IMM-6517-19
2021 CF 1089
Gbenga Williams Adeosun (demandeur)
c.
Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (défendeur)
Répertorié : Adeosun c. Canada (Citoyenneté et Immigration)
Cour fédérale, juge Little—Toronto, 29 avril et 18 octobre 2021.
Citoyenneté et Immigration — Pratique en matière d’immigration — Contrôle judiciaire d’une décision par laquelle la Section d’appel de l’immigration (la SAI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugiés a rejeté l’appel du demandeur pour défaut de compétence au titre de l’art. 63(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la LIPR) — Le demandeur, un résident permanent, a parrainé la demande de résidence permanente de son épouse — L’agent des visas a conclu que, parce que l’épouse avait déjà présenté une demande de permis d'études qui avait été rejetée pour fausses déclarations, elle ne pouvait pas présenter de demande de résidence permanente au titre de l’art. 40(3) de la LIPR — L’agent a donc rejeté la demande — L’appel subséquemment interjeté devant la SAI a été rejeté pour défaut de compétence — En l’espèce, le demandeur a soutenu que la SAI a, à tort, interprété l’art. 63(1) de la LIPR et l’art. 10(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (le RIPR) comme s’ils exigeaient que le répondant dépose une demande de résidence permanente conforme en substance à l’art. 40(3) de la LIPR; et que pour interjeter appel au titre de l’art. 63(1) de la LIPR, le dépôt doit être conforme aux exigences administratives énoncées à l’art. 10(1) du RIPR — Il a fait également valoir que la SAI a commis une erreur en jugeant qu’elle n’avait pas compétence au titre de l’art. 64(3) de la LIPR — Le défendeur a soutenu que, comme une personne interdite de territoire pour fausses déclarations n’est même pas autorisée à présenter une demande de résidence permanente selon l’art. 40(3), il n’y avait rien en droit qui lui permettait d’interjeter appel devant la SAI; et que l’art. 10(1) du RIPR « prescrit » que la demande doit être présentée conformément à l’art. 40(3) de la LIPR — Les questions étaient de savoir si la SAI a commis une erreur susceptible de contrôle en interprétant déraisonnablement sa compétence légale d’entendre un appel au titre de l’art. 63(1) de la LIPR et si elle a déraisonnablement appliqué le droit aux faits — La SAI a conclu que l’art. 10(6) du RIPR s’appliquait et qu’une demande qui n’était pas déposée conformément à l’art. 10(1) du RIPR n’était pas réputée « déposé[e], conformément au règlement » aux fins de l’application de l’art. 63(1) de la LIPR — Les exigences relatives au dépôt énoncées à l’art. 10(1) du RIPR concernent la forme et le contenu — La SAI a commis une erreur de droit lorsqu’elle a conclu qu’il n’avait pas été satisfait aux exigences administratives prescrites aux art. 10(1)a) à 10(1)d) du RIPR parce que l’appel concernait une demande à laquelle l’art. 40(3) de la LIPR s’appliquait — Elle a également commis une erreur en concluant que l’art. 10(6) du RIPR s’appliquait — Ces erreurs étaient toutefois insuffisantes pour annuler la décision de la SAI — La SAI a conclu qu’elle n’avait compétence pour entendre un appel interjeté au titre de l’art. 63(1) de la LIPR que si la décision de refuser de délivrer un visa de résident permanent portait sur le « bien-fondé » de la demande de visa — Il était loisible à la SAI d’interpréter comme elle l’a fait l’expression « refus de délivrer » (c.-à-d. comme une décision sur le fond) employée dans le libellé du paragraphe 63(1) — En ce qui concerne la compétence de la SAI pour entendre un appel interjeté au titre de l’art. 63(1) au regard des art. 40(3) et 64(3) de la LIPR, la SAI a jugé que l’agent n’était pas autorisé à examiner la demande de résidence permanente déposée au titre de l’art. 15(1), car celle-ci n’avait pas été déposée conformément à l’art. 40(3) de la LIPR — Il était loisible à la SAI d’interpréter les art. 15, 40 et 63 comme elle l’a fait — Ses motifs démontraient qu’en analysant sa compétence relativement à l’art. 63(1), elle avait conscience et a tenu compte du libellé de cette disposition, du libellé et du contexte général des autres dispositions de la LIPR et de l’objet que visait le législateur lorsqu’il a adopté l’art. 40(3) — Sa démarche et son interprétation de l’économie des dispositions n’étaient pas déraisonnables — Le fait que la SAI n’a pas expressément analysé l’art. 64(3) en l’espèce n’était pas fatal au caractère raisonnable de son interprétation de l’art. 63 — La SAI a suffisamment pris en considération le texte, le contexte et l’objet des dispositions de la LIPR dans l’analyse qui l’a menée à ses conclusions — Par conséquent, la SAI n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a interprété sa compétence légale d’entendre l’appel en l’espèce — En ce qui concerne l’application du droit aux faits, la décision de la SAI selon laquelle elle n’avait pas compétence pour entendre l’appel était raisonnable — La SAI a conclu que la lettre par laquelle l’agent avait rejeté la demande ne pouvait pas à elle seule attribuer à la SAI la compétence légale d’entendre un appel — Cette conclusion était exacte — La compétence de la SAI pour entendre un appel devait lui être conférée par la LIPR ou le RIPR — Par conséquent, la SAI n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle en appliquant le droit aux faits — Demande rejetée
Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision par laquelle la Section d’appel de l’immigration (la SAI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté l’appel du demandeur pour défaut de compétence au titre du paragraphe 63(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la LIPR). Le demandeur sollicitait l’annulation de la décision de la SAI.
Le demandeur est un résident permanent du Canada. Il a parrainé la demande de résidence permanente de son épouse. Un agent des visas a conclu que l’épouse avait déjà présenté une demande de permis d’études qui avait été rejetée pour fausses déclarations au titre du paragraphe 40(1) de la LIPR et qu’elle ne pouvait donc pas présenter de demande de résidence permanente parce que moins de cinq ans s’étaient écoulés depuis la conclusion d’interdiction de territoire pour fausses déclarations (paragraphe 40(3) de la LIPR). Il a donc rejeté la demande et a procédé au remboursement des frais de traitement. Le demandeur a ensuite interjeté appel devant la SAI.
La SAI a jugé qu’elle n’avait pas compétence pour instruire l’appel au titre du paragraphe 63(1) lorsque le constat d’interdiction de territoire pour fausses déclarations au titre de l’alinéa 40(1)a) et l’interdiction prévue au paragraphe 40(3) de la LIPR précédaient le dépôt de la demande de résidence permanente.
En l’espèce, le demandeur a soutenu, en particulier, que la SAI a, à tort, interprété le paragraphe 63(1) de la LIPR et le paragraphe 10(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (le RIPR) comme s’ils exigeaient que le répondant dépose une demande de résidence permanente conforme en substance au paragraphe 40(3) de la LIPR. Il a fait valoir que, pour interjeter appel au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR, le dépôt doit être conforme aux exigences administratives énoncées au paragraphe 10(1) du RIPR. Autrement dit, le fait de ne pas se conformer au paragraphe 40(3) n’empêche pas un appelant d’interjeter appel « conformément au règlement ». Le demandeur a également avancé qu’un « refus de délivrer », aux termes du paragraphe 63(1) de la LIPR, désigne une décision sur le fond de la demande, et il a ajouté que l’agent des visas avait rendu une telle décision, basée sur les faits de la présente affaire. De plus, il a fait valoir que lorsqu’elle a interprété l’étendue de sa compétence en matière d’appel, la SAI a commis une erreur en ne concluant pas qu’elle avait compétence au titre du paragraphe 64(3) de la LIPR. Le demandeur a entre autres soutenu que puisqu’une personne interdite de territoire pour fausses déclarations n’est même pas autorisée à présenter une demande de résidence permanente selon le paragraphe 40(3) de la LIPR, il n’y avait rien en droit qui permettait d’interjeter appel devant la SAI et que le paragraphe 10(1) du RIPR [traduction] « prescrit » effectivement que la demande doit être présentée conformément au paragraphe 40(3) de la LIPR.
Les questions à trancher étaient de savoir si la SAI a commis une erreur susceptible de contrôle en interprétant déraisonnablement sa compétence légale d’entendre un appel au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR et si elle a appliqué déraisonnablement le droit aux faits.
Jugement : la demande doit être rejetée.
Dans la décision de la SAI, deux questions précises concernaient des expressions employées au paragraphe 63(1) de la LIPR, à savoir « déposé […] conformément au règlement » et « refus de délivrer ». La première question soulevait celle de l’incidence du paragraphe 40(3) de la LIPR sur l’interprétation du paragraphe 63(1), mais au regard de certaines dispositions techniques du RIPR. La question était de savoir si une demande de résidence permanente interdite par le paragraphe 40(3) est, pour ce seul motif, réputée non « déposé[e] […] conformément au règlement », selon les termes du paragraphe 63(1). La SAI a jugé que, s’il était interdit à un étranger de déposer une demande de résidence permanente au titre du paragraphe 40(3) de la LIPR, le répondant n’avait pas déposé la demande de parrainage conformément aux exigences administratives relatives au dépôt énoncées au paragraphe 10(1) du RIPR. Par conséquent, la SAI a conclu que le paragraphe 10(6) du RIPR s’appliquait et qu’une demande n’étant pas déposée conformément au paragraphe 10(1) du RIPR n’était pas réputée « déposé[e], conformément au règlement » aux fins de l’application du paragraphe 63(1) de la LIPR. Les exigences relatives au dépôt énoncées au paragraphe 10(1) du RIPR concernent la forme et le contenu. La SAI a commis une erreur de droit en concluant qu’il n’avait pas été satisfait aux exigences administratives prescrites aux alinéas 10(1)a) à 10(1)d) du RIPR parce que l’appel concernait une demande à laquelle le paragraphe 40(3) de la LIPR s’appliquait. Le libellé des alinéas 10(1)a) à d) n’est tout simplement pas compatible avec cette interprétation. Par conséquent, il était également erroné de conclure que le paragraphe 10(6) s’appliquait. Néanmoins, ces erreurs étaient insuffisantes pour justifier l’annulation de la décision de la SAI en l’espèce, étant donné le reste de la décision et son caractère raisonnable.
En ce qui concerne la question relative à l’expression « refus de délivrer » employée au paragraphe 63(1) de la LIPR, la SAI a affirmé que la décision de l’agent des visas « ne [portait] clairement pas sur le bien-fondé » et qu’elle n’était, selon toute vraisemblance, « donc pas une décision de refuser de délivrer » le visa de résident permanent. Elle a conclu qu’elle n’avait compétence pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) que si la décision de refuser de délivrer un visa de résident permanent portait sur le « bien-fondé » de la demande de visa. Dans ses motifs, la SAI a expressément pris en considération l’expression « refus de délivrer » employée au paragraphe 63(1) de la LIPR. Il était loisible à la SAI d’interpréter comme elle l’a fait l’expression « refus de délivrer » employée dans le libellé du paragraphe 63(1). Cette expression, ainsi que le paragraphe 63(1) en général, peut raisonnablement justifier la distinction faite par la SAI entre, d’une part, une décision sur le fond et, d’autre part, une décision de refuser ou de ne pas traiter une demande parce que le demandeur n’est pas autorisé à la présenter selon le paragraphe 40(3) de la LIPR. La décision de la SAI concernant cette question n’était pas déraisonnable.
En ce qui a trait à la compétence de la SAI pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR au regard des paragraphes 40(3) et 64(3), la SAI a jugé que l’agent n’était pas autorisé à examiner la demande de résidence permanente déposée au titre du paragraphe 15(1), car celle-ci n’avait pas été déposée conformément au paragraphe 40(3) de la LIPR. Il était loisible à la SAI d’interpréter les articles 15, 40 et 63 de la LIPR comme elle l’a fait. Ses motifs démontraient qu’en analysant sa compétence relativement au paragraphe 63(1), elle avait conscience et a tenu compte du libellé de cette disposition, du libellé et du contexte général des autres dispositions de la LIPR et de l’objet que visait le législateur lorsqu’il a adopté le paragraphe 40(3). Sa démarche et son interprétation de l’économie des dispositions n’étaient pas déraisonnables. En outre, dans ses motifs, la SAI n’a pas expressément analysé le paragraphe 64(3), et ce, ni isolément, ni conjointement avec le paragraphe 40(3). Le fait que la SAI n’a pas directement analysé le paragraphe 64(3) peut facilement s’expliquer par son raisonnement. Selon l’interprétation de la SAI, le paragraphe 40(3) empêchait de soulever un argument selon lequel les paragraphes 63(1) et 64(3) lui attribueraient la compétence d’entendre l’appel. Il était loisible à la SAI d’interpréter ainsi l’incidence du paragraphe 40(3). Le fait que la SAI n’a pas expressément analysé le paragraphe 64(3) de la LIPR en l’espèce n’était pas fatal au caractère raisonnable de son interprétation du paragraphe 63(1). Compte tenu du libellé des articles 15, 40, 63 et 64 de la LIPR, le demandeur n’a pas démontré que la façon dont la SAI a interprété sa compétence d’entendre un appel au titre du paragraphe 63(1) était déraisonnable parce qu’elle n’a pas analysé ou appliqué le paragraphe 64(3) dans ses motifs. La SAI a suffisamment pris en considération le texte, le contexte et l’objet des dispositions de la LIPR dans l’analyse qui l’a menée à ses conclusions. Par conséquent, la SAI n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a interprété sa compétence légale d’entendre l’appel en l’espèce.
En ce qui concerne l’application, par la SAI, du droit aux faits, la décision de celle-ci selon laquelle elle n’avait pas compétence pour entendre l’appel était raisonnable. La SAI a conclu que la lettre par laquelle l’agent a refusé la demande du demandeur ne pouvait pas à elle seule attribuer à la SAI la compétence légale d’entendre un appel. Cela ne pouvait être qu’exact. La compétence de la SAI pour entendre un appel devait lui être conférée par la LIPR ou le RIPR. En outre, la lettre de l’agent portait en substance sur l’interdiction de territoire de l’épouse du demandeur aux termes de l’article 40 et sur l’interdiction de demander la résidence permanente aux termes du paragraphe 40(3). Le fait que, dans la lettre, l’agent a employé le terme « refusé », plutôt que d’indiquer qu’il refusait de trancher la demande, voire de la retourner tout simplement, ne changeait en rien la substance de la décision. L’agent a rendu une décision de fond selon laquelle l’épouse du demandeur ne pouvait présenter de demande de résidence permanente aux termes du paragraphe 40(3). Enfin, la simple portée de l’examen du dossier du demandeur effectué par l’agent n’avait pas d’incidence sur la substance de la décision que ce dernier avait rendue au titre de l’article 40, ni sur l’existence (ou l’inexistence) de la compétence de la SAI pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR. Par conséquent, en ce qui a trait à l’application du droit aux faits, la décision de la SAI ne comportait pas d’erreur susceptible de contrôle.
LOIS ET RÈGLEMENTS CITÉS
Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21.
Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, art. 11(1), 15, 40, 63, 64, 74d).
Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, art. 10(1),(6), 12.
JURISPRUDENCE CITÉE
Décisions appliquées :
Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65, [2019] 4 R.C.S. 653; Société canadienne des postes c. Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, [2019] 4 R.C.S. 900; Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27; Gill c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 33.
Décisions mentionnées :
Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Mason, 2021 CAF 156, [2022] 1 R.C.F. 3; Court c. Canada (Procureur général), 2020 CAF 199; Lefter c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017CanLII 10743 [2017] D.S.A.I. no 182 (QL (C.I.S.R.); Dhillon c. Canada (Citoyenneté et l’Immigration), 2018 CanLII 102071 [2018] D.S.A.I. no 1162 (QL) 102071 (C.I.S.R.); Keays c. Canada (Citoyenneté et l’Immigration), 2018 CanLII 54764 [2018] D.S.A.I. no 532 (QL) (C.I.S.R.); Delos Reyes c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), [2018] D.S.A.I. no 1821 (QL) sub nom. Josefina c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CanLII 136419 (C.I.S.R.).
DOCTRINE CITÉE
Cour fédérale. Lignes directrices sur la pratique dans les instances intéressant la citoyenneté, l’immigration et les réfugiés, 5 novembre 2018.
DEMANDE de contrôle judiciaire de la décision (2019 CanLII 124121) par laquelle la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté l’appel du demandeur pour défaut de compétence au titre du paragraphe 63(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Demande rejetée.
ONT COMPARU :
Nicholas Woodward et Adrienne Smith pour le demandeur.
Hillary Adams pour le défendeur.
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Battista Smith Migration Law Group, Toronto, pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement et du jugement rendus par
[1] Le juge Little : La question centrale dans la présente demande est celle de savoir si la Section d’appel de l’immigration (la SAI) a commis une erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a conclu qu’elle n’avait pas compétence pour entendre l’appel du demandeur sous le régime de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).
[2] Le demandeur, M. Adeosun, est un résident permanent du Canada. Il a épousé Shukurat Olaide Olaonipekun (Mme Olaonipekun) en août 2017. Mme Olaonipekun a présenté une demande de résidence permanente au Canada, et M. Adeosun l’a parrainée.
[3] Un agent des visas a constaté que Mme Olaonipekun était interdite de territoire au Canada pour fausses déclarations. Il a par conséquent conclu qu’elle n’était pas autorisée à présenter une demande de résidence permanente sous le régime de la LIPR. Il a rejeté la demande et a procédé au remboursement des frais de traitement.
[4] Le demandeur a interjeté appel devant la SAI. Celle-ci a rejeté l’appel pour défaut de compétence aux termes du paragraphe 63(1) de la LIPR.
[5] Les questions à trancher dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire sont les suivantes :
• Comment la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique-t-elle aux décisions ayant nécessité une interprétation législative?
• La SAI a-t-elle commis les erreurs susceptibles de contrôle suivantes :
o interpréter déraisonnablement sa compétence légale d’entendre un appel aux termes du paragraphe 63(1) de la LIPR?
o appliquer déraisonnablement le droit aux faits?
[6] Les paragraphes 63(1) et 40(3) de la LIPR étaient au cœur du raisonnement de la SAI et des observations des parties dans le cadre de la présente demande. Le libellé du paragraphe 63(1) est le suivant :
Droit d’appel
[…]
Droit d’appel : visa
63 (1) Quiconque a déposé, conformément au règlement, une demande de parrainage au titre du regroupement familial peut interjeter appel du refus de délivrer le visa de résident permanent. [Non souligné dans l’original.]
[7] Le libellé du paragraphe 40(3) est le suivant :
Interdictions de territoire
[…]
40 (1) […]
Interdiction de territoire
(3) L’étranger interdit de territoire au titre du présent article ne peut, pendant la période visée à l’alinéa (2)a), présenter de demande pour obtenir le statut de résident permanent. [Non souligné dans l’original.]
[8] J’ai souligné les passages de chaque disposition qui sont pertinents relativement à la présente demande. Toutes les dispositions législatives mentionnées dans la présente décision sont rassemblées à l’annexe A.
I. La décision de l’agent des visas
[9] Dans une lettre datée du 22 octobre 2018, l’agent des visas a écrit que la demande de résidence permanente de Mme Olaonipekun ne satisfaisait pas aux exigences de la LIPR, parce que sa demande de permis d’études présentée en mai 2017 avait été rejetée pour fausses déclarations. L’agent des visas a constaté que Mme Olaonipekun était interdite de territoire au Canada pour une période de cinq ans ayant débuté le 18 mai 2017 et a conclu que, suivant le paragraphe 40(3) de la LIPR, elle ne pouvait présenter de demande de résidence permanente pendant cette période. Il a donc rejeté sa demande de résidence permanente et a indiqué qu’elle en recevrait le remboursement des frais de traitement. Il était également convaincu que Mme Olaonipekun était interdite de territoire au titre du paragraphe 11(1) de la LIPR. Celui-ci prévoit que l’agent peut délivrer un visa sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la LIPR.
[10] Certains aspects juridiques et factuels de la décision de l’agent des visas ont eu une incidence sur les observations présentées à la Cour. L’aspect juridique concernait le paragraphe 40(3) de la LIPR, selon lequel un étranger interdit de territoire au titre de l’article 40 « ne peut […] présenter de demande pour obtenir le statut de résident permanent » pendant la période visée à l’alinéa (2)a) de cet article — en l’espèce, dans les cinq ans suivant la décision constatant l’interdiction de territoire pour fausses déclarations. L’aspect factuel de la décision de l’agent des visas résidait dans le fait que ce dernier avait effectué un examen plutôt détaillé de la demande de Mme Olaonipekun, ce que les notes de l’agent consignées dans le Système mondial de gestion des cas (le SMGC) montrent d’ailleurs clairement. De plus, dans sa lettre, l’agent des visas avait affirmé avoir [traduction] « terminé l’évaluation » de la demande de Mme Olaonipekun. Enfin, la demande avait été [traduction] « refusée » par l’agent plutôt que simplement retournée avec le remboursement.
[11] M. Adeosun a interjeté appel devant la SAI. Devant la Cour, le demandeur sollicite l’annulation de la décision par laquelle la SAI a conclu qu’elle n’avait pas compétence pour entendre l’appel.
II. La décision de la SAI
[12] Le commissaire de la SAI a demandé aux parties de lui fournir des observations préliminaires sur la question de savoir si la SAI avait compétence pour entendre l’appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR. La SAI a conclu qu’elle n’avait pas compétence [2019 CanLII 124121 (C.I.S.R.)].
[13] La SAI a constaté, suivant une « simple lecture » de l’article 40 de la LIPR, que les personnes interdites de territoire au Canada pendant cinq ans ne pouvaient présenter de demande pour obtenir le statut de résident permanent au cours des cinq ans suivant la décision constatant en dernier ressort leur interdiction de territoire pour fausses déclarations. La demande en l’espèce n’avait « pas été déposée selon les modalités réglementaires », puisque, selon le paragraphe 40(3), il était alors interdit à Mme Olaonipekun de le faire.
[14] La SAI [au paragraphe 26] a considéré que le paragraphe 63(1) se composait de deux éléments principaux : d’abord, la personne doit avoir déposé une demande de parrainage d’un étranger « conformément au règlement », et, ensuite, l’appel peut être interjeté à l’encontre d’un « refus de délivrer » le visa de résident permanent.
[15] Concernant le premier élément, la SAI a conclu que le dépôt de la demande de parrainage était interdit par le paragraphe 10(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le RIPR), lequel énonce les exigences à satisfaire pour interjeter appel « conformément au règlement », aux termes du paragraphe 63(1) de la LIPR. De ce point de vue, le paragraphe 10(6) du RIPR s’appliquait, de sorte que la demande n’ayant pas été déposée selon les modalités réglementaires était, « pour l’application du paragraphe 63(1) de la Loi, […] réputée non déposée ». La demande visant à obtenir le statut de résident permanent aurait dû être retournée conformément à l'article 12 du RIPR, qui prévoit entre autres que « si les exigences prévues aux articles 10 et 11 [du RIPR] ne sont pas remplies, la demande et tous les documents fournis à l’appui de celle-ci [sauf les renseignements indiqués] sont retournés au demandeur ».
[16] Quant au deuxième élément du paragraphe 63(1), la SAI a conclu [au paragraphe 37] que l’agent n’avait formulé aucune conclusion sur le fond de la demande et qu’il avait simplement effectué un premier examen de la preuve. Le traitement de la demande avait « cessé dès » que l’agent eut confirmé que la demanderesse était interdite de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR. Comme il était manifeste qu’aucune décision n’avait été rendue sur le fond, la SAI a conclu que, selon toute vraisemblance, la décision de l’agent ne constituait pas un « refus de délivrer » un visa de résident permanent au titre du paragraphe 63(1).
[17] Dans sa conclusion [au paragraphe 45], la SAI a jugé qu’elle n’avait pas compétence pour instruire un appel lorsque le constat d’interdiction de territoire pour fausses déclarations au titre de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR et l’interdiction au titre du paragraphe 40(3) de la LIPR « précéd[aient] le dépôt de la demande de résidence permanente ». Elle a aussi réitéré ses conclusions concernant les effets combinés du paragraphe 40(3) de la LIPR et des paragraphes 10(1) et 10(6) du RIPR.
[18] La SAI a donc rejeté l’appel pour défaut de compétence.
III. La norme de contrôle
[19] Le demandeur a déposé ses observations écrites avant que la Cour suprême ne rende l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65, [2019] 4 R.S.C. 653, et il a mis l’accent sur le caractère correct de la décision de la SAI. Toutefois, à l’audience, les parties ont convenu à juste titre que la norme de contrôle applicable était celle de la décision raisonnable, telle qu’elle est décrite dans les arrêts Vavilov et Société canadienne des postes c. Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, [2019] 4 R.C.S. 900.
A. Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable : principes généraux
[20] Lorsqu’elle effectue un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, la Cour tient compte du résultat de la décision administrative eu égard au raisonnement sous-jacent à celle-ci afin de s’assurer que la décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée : Vavilov, au paragraphe 15.
[21] Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable s’intéresse à la décision effectivement rendue par le décideur, notamment au raisonnement suivi qui a mené à la décision et au résultat : Vavilov, aux paragraphes 83 et 86. Les motifs fournis par le décideur sont le point de départ, et la cour de révision doit les interpréter de façon globale et contextuelle, et en corrélation avec le dossier dont le décideur disposait : Vavilov, aux paragraphes 84, 91–96, 97 et 103; Société canadienne des postes, au paragraphe 31.
[22] Lors d’un contrôle judiciaire, la cour se demande si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable (la justification, la transparence et l’intelligibilité), et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci : Vavilov, au paragraphe 99. Une décision raisonnable est : a) fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et b) justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti : Vavilov, aux paragraphes 83–86 et 96–97.
[23] Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable comporte une évaluation sensible et respectueuse, mais aussi rigoureuse, des décisions administratives : Vavilov, aux paragraphes 12–13. Comme l’a souligné le défendeur, la cour de révision n’intervient que si elle est convaincue que la décision souffre de « lacunes graves à un point tel » qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence : Vavilov, au paragraphe 100.
[24] Dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême a déterminé deux catégories de lacunes fondamentales : d’abord, le manque de logique interne du raisonnement, et, ensuite, une décision indéfendable sous certains rapports compte tenu des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur la décision : Vavilov, au paragraphe 101.
[25] Les règles d’interprétation des lois constituaient la principale contrainte juridique applicable en l’espèce.
B. Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable : interprétation législative
[26] Dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême a énoncé les principes qu’une cour de révision doit appliquer lorsqu’elle analyse le caractère raisonnable de la façon dont un décideur a interprété une loi. Les arrêts Vavilov et Société canadienne des postes contiennent des instructions précises. Le rôle de la Cour n’est pas de déterminer l’interprétation correcte des dispositions de la loi, soit, en l’espèce, celles de la LIPR. La question est plutôt celle de savoir si l’interprétation de la SAI était raisonnable : Vavilov, aux paragraphes 115–124; Société canadienne des postes, au paragraphe 41.
[27] La cour de révision ne procède pas à une analyse de novo de la question soulevée ni ne se demande « “ce qu’aurait été la décision correcte” » : Vavilov, au paragraphe 116; Société canadienne des postes, aux paragraphes 40–41; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Mason, 2021 CAF 156, [2022] 1 R.C.F. 3, au paragraphe 20. Elle adopte plutôt la même démarche que lorsqu’il s’agit d’autres aspects d’un contrôle judiciaire. Elle doit examiner la décision administrative dans son ensemble, y compris les motifs fournis par le décideur et le résultat obtenu. Elle y procède en appliquant le « principe moderne » en matière d’interprétation des lois, à savoir qu’il faut lire les termes d’une loi « dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » : Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, au paragraphe 21.
[28] La tâche du décideur administratif est d’interpréter la disposition contestée d’une manière qui cadre avec le texte, le contexte et l’objet, compte tenu de sa compréhension particulière du régime législatif en cause : Vavilov, au paragraphe 121; Société canadienne des postes, aux paragraphes 40–42; Court c. Canada (Procureur général), 2020 CAF 199, au paragraphe 65; Mason, aux paragraphes 11 et 41–42.
[29] Lorsque le sens d’une disposition législative est contesté, il incombe au décideur de démontrer dans ses motifs qu’il était « conscient [des] éléments essentiels » de l’interprétation législative appropriée : Vavilov, au paragraphe 120; Société canadienne des postes, au paragraphe 42. Si le décideur administratif ne tient pas compte d’un élément clé du texte, du contexte ou de l’objet d’une disposition législative, et arrive à un résultat différent de celui qu’il aurait obtenu sans cette omission, celle-ci peut amener la cour de révision à perdre confiance dans la décision dans son ensemble.
[30] En plus de s’harmoniser avec le contexte et l’objet du libellé, une interprétation législative raisonnable devrait être conforme à toute contrainte d’interprétation imposée par le régime législatif (comme les définitions données dans les lois) ainsi qu’aux règles d’interprétation applicables (comme la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21) : Société canadienne des postes, aux paragraphes 42 et 46. Par exemple, si l’interprétation du décideur rendait une autre disposition redondante, il se peut qu’elle soit déraisonnable : Société canadienne des postes, aux paragraphes 57–58. De même, si l’interprétation va à l’encontre de l’objet de la disposition, il se peut également qu’elle soit déraisonnable : Société canadienne des postes, au paragraphe 59.
[31] Il n’est pas nécessaire que l’interprétation d’un décideur tienne compte de tous les éléments du contexte législatif, dont l’ensemble des dispositions législatives susceptibles d’avoir une incidence sur l’interprétation en cause : Société canadienne des postes, au paragraphe 52. L’incidence d’une telle omission sera propre à chaque cas et dépendra de la question de savoir si l’élément omis de l’analyse amène la cour de révision à perdre confiance dans le résultat obtenu : Société canadienne des postes, aux paragraphes 52–53; Vavilov, au paragraphe 122.
[32] Si une seule interprétation raisonnable de la disposition est possible, la cour de révision peut intervenir et donner son interprétation, mais non pas sans hésitation. Comme la Cour suprême l’a affirmé au paragraphe 124 de l’arrêt Vavilov, la cour « [devrait] généralement hésiter à se prononcer de manière définitive sur l’interprétation d’une disposition qui relève de la compétence d’un décideur administratif ».
IV. La SAI a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle?
[33] Dans ses observations, le demandeur a mis l’accent sur trois points. Premièrement, il a affirmé que la SAI avait interprété à tort les paragraphes 63(1) de la LIPR et 10(1) du RIPR comme s’ils exigeaient que le répondant dépose une demande de résidence permanente conforme en substance au paragraphe 40(3) de la LIPR. Il a soutenu que, pour interjeter appel au titre du paragraphe 63(1), le dépôt doit être conforme aux exigences administratives énoncées au paragraphe 10(1). Autrement dit, le fait de ne pas se conformer au paragraphe 40(3) n’empêche pas un appelant d’interjeter appel « conformément au règlement ».
[34] Deuxièmement, le demandeur a soutenu qu’un « refus de délivrer » le visa de résident permanent, aux termes du paragraphe 63(1) de la LIPR, désigne une décision sur le fond de la demande, et il a ajouté que l’agent des visas avait rendu une telle décision, basée sur les faits de la présente affaire.
[35] Troisièmement, le demandeur a soutenu qu’en interprétant l’étendue de sa compétence en matière d’appel, la SAI avait commis une erreur en ne concluant pas qu’elle avait compétence au titre du paragraphe 64(3) de la LIPR :
Droit d’appel
[…]
64 (1) […]
Fausses déclarations
(3) N’est pas susceptible d’appel au titre du paragraphe 63(1) le refus fondé sur l’interdiction de territoire pour fausses déclarations, sauf si l’étranger en cause est l’époux ou le conjoint de fait du répondant ou son enfant.
[36] Le demandeur a soutenu que cette disposition visait à alléger l’épreuve que vit une personne qui demande la résidence permanente lorsqu’elle est séparée de son époux, de son conjoint de fait et de ses enfants. Il a aussi souligné que rien dans le libellé du paragraphe 40(3) n’indiquait que le droit d’appel était affecté.
[37] Le défendeur a affirmé que le paragraphe 40(3) de la LIPR et la décision de la Cour dans l’affaire Gill c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 33 (sous la plume de la juge Simpson), répondaient entièrement aux arguments du demandeur. D’après lui, puisqu’une personne interdite de territoire pour fausses déclarations n’est même pas autorisée à présenter une demande de résidence permanente selon le paragraphe 40(3), il n’y avait rien en droit qui permettait d’interjeter appel devant la SAI. Comme la juge Simpson l’a affirmé dans la décision Gill, la demande était nulle de nullité absolue : Gill, au paragraphe 16.
[38] Le défendeur a aussi affirmé que le paragraphe 10(1) du RIPR [traduction] « prescrit » que la demande doit être présentée conformément au paragraphe 40(3) de la LIPR. Il a renvoyé au paragraphe 15(1) de la LIPR à titre d’exemple d’exigence prescrite. De son point de vue, le paragraphe 15(1) autorise un agent à procéder à l’examen d’une demande de résidence permanente présentée « au titre de » la LIPR, y compris le paragraphe 40(3). Le libellé du paragraphe 15(1) est le suivant :
Contrôle
Pouvoir de l’agent
15 (1) L’agent peut procéder à un contrôle dans le cadre de toute demande qui lui est faite au titre de la présente loi ou qui est faite au titre du paragraphe 11(1.01). [Non souligné dans l’original.]
[39] Le défendeur a soutenu qu’aucune décision de la Cour fédérale ne limitait la SAI en ce qui a trait à l’interprétation de sa compétence à cet égard (l’affaire Gill a été tranchée après que la SAI eut rendu la décision en l’espèce), et que la décision de la SAI dans la présente affaire concordait avec ses autres décisions (par exemple, Lefter c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017CanLII 10743 [2017] D.S.A.I. no 182 (QL), (C.I.S.R.), Dhillon c. Canada (Citoyenneté et l’Immigration), 2018 CanLII 102071 [2018] D.S.A.I. no 1162 (QL), (C.I.S.R.), Keays c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CanLII 54764 [2018] D.S.A.I. no 532 (QL), (C.I.S.R.), Delos Reyes c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), [2018] D.S.A.I. no 1821 (QL), sub nom. Josefina c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CanLII 136419 (C.I.S.R.)).
[40] Le défendeur a fait remarquer que le demandeur n’avait produit aucune preuve concernant l’objet du paragraphe 64(3) de la LIPR, tandis qu’il avait de son côté déposé dans le cadre de la présente demande un nouvel affidavit auquel était jointe une preuve provenant des débats parlementaires à propos des objectifs du paragraphe 40(3).
[41] En dernier lieu, le défendeur a soutenu que la décision de la SAI ne souffrait d’aucune lacune (Vavilov, au paragraphe 100) et que le renvoi de l’affaire pour réexamen n’en changerait pas l’issue, puisque le paragraphe 40(3) pourrait toujours interdire à Mme Olaonipekun de présenter une demande de résidence permanente.
[42] Les deux parties ont aussi présenté des observations au sujet de l’applicabilité et du caractère correct de la décision Gill. Le demandeur a affirmé qu’une distinction entre l’affaire Gill et la présente affaire pouvait être établie, et il a souligné que la juge Simpson n’avait pas fait mention du paragraphe 64(3) de la LIPR dans ses motifs. Le défendeur a soutenu que la décision Gill s’appliquait en l’espèce et était correcte, exception faite de la conclusion, à son avis erronée, de la Cour selon laquelle la conformité au paragraphe 40(3) de la LIPR n’était pas prescrite par le paragraphe 10(1) du RIPR.
[43] À mon avis, les arguments des parties soulèvent deux questions principales que la Cour doit trancher, soit celle de savoir si la SAI a déraisonnablement interprété sa compétence légale d’entendre un appel au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR, et celle de savoir si la SAI a déraisonnablement appliqué le droit aux faits de la présente affaire.
A. La SAI a-t-elle déraisonnablement interprété sa compétence légale d’entendre un appel au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR?
[44] Les observations du demandeur portaient principalement sur la façon dont la SAI avait interprété sa compétence pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR, notamment au regard d’autres dispositions de la LIPR et du RIPR. Bien que les observations portaient en substance sur le caractère correct du raisonnement de la SAI, j’appliquerai la méthode de contrôle selon la norme de la décision raisonnable décrite dans les arrêts Vavilov et Société canadienne des postes, car je reconnais qu’en raison de leur nature technique, les questions d’interprétation, comme celle de savoir si la SAI a pris en considération le texte, le contexte et l’objet des dispositions, ne se prêtent pas toujours à une analyse linéaire ou par étapes.
1) Deux questions précises concernant le paragraphe 63(1) de la LIPR
[45] Dans la décision de la SAI, deux questions précises concernaient des expressions employées au paragraphe 63(1) de la LIPR, à savoir « déposé, conformément au règlement » et « refus de délivrer », qui sont soulignées au paragraphe 6 ci-dessus.
[46] La première question soulève celle de l’incidence du paragraphe 40(3) de la LIPR sur l’interprétation du paragraphe 63(1), mais au regard de certaines dispositions techniques du RIPR.
[47] La question était de savoir si, abstraction faite des dispositions du RIPR, une demande de résidence permanente interdite par le paragraphe 40(3) est, pour ce seul motif, réputée non « déposé[e], conformément au règlement », selon les termes du paragraphe 63(1).
[48] Sur un plan plus technique, la SAI a jugé que, s’il était interdit à un étranger de déposer une demande de résidence permanente au titre du paragraphe 40(3) de la LIPR, le répondant n’avait pas déposé la demande de parrainage conformément aux exigences administratives relatives au dépôt énoncées au paragraphe 10(1) du RIPR. Par conséquent, la SAI a conclu que le paragraphe 10(6) du RIPR s’appliquait et qu’une demande n’étant pas déposée conformément au paragraphe 10(1) du RIPR n’est pas réputée « déposé[e], conformément au règlement » aux fins de l’application du paragraphe 63(1) de la LIPR.
[49] Les parties ont toutes deux affirmé que le paragraphe 10(1) du RIPR était la source des exigences administratives à respecter pour qu’une demande de parrainage soit réputée déposée « conformément au règlement », aux termes du paragraphe 63(1).
[50] Les exigences relatives au dépôt énoncées au paragraphe 10(1) du RIPR concernent la forme et le contenu : voir la décision Gill, au paragraphe 19. À mon avis, la SAI a commis une erreur de droit en concluant qu’il n’avait pas été satisfait aux exigences administratives prescrites aux alinéas 10(1)a) à du RIPR parce que l’appel concernait une demande à laquelle le paragraphe 40(3) de la LIPR s’appliquait. Le libellé des alinéas 10(1)a) à d) n’est tout simplement pas compatible avec cette interprétation. Par conséquent, il était également erroné de conclure que le paragraphe 10(6) s’appliquait.
[51] Ces erreurs concernent les exigences relatives à la forme et au contenu des documents d’appel déposés. À mon avis, elles sont insuffisantes pour justifier l’annulation de la décision de la SAI en l’espèce, étant donné le reste de la décision et mes conclusions concernant son caractère raisonnable ci-dessous : Vavilov, au paragraphe 100. De plus, si l’affaire était renvoyée pour que la SAI réexamine la question des exigences administratives relatives au dépôt, le résultat ne serait probablement pas différent, notamment en raison de la décision rendue entre-temps par la Cour dans l’affaire Gill : Vavilov, aux paragraphes 112 et 142.
[52] La question suivante concerne l’expression « refus de délivrer » employée au paragraphe 63(1). La SAI a affirmé [au paragraphe 37] que la décision de l’agent des visas « ne [portait] clairement pas sur le bien-fondé » et qu’elle n’était, selon toute vraisemblance, « donc pas une décision de refuser de délivrer » le visa de résident permanent. Elle a conclu qu’elle n’avait compétence pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) que si la décision de refuser de délivrer un visa de résident permanent portait sur le « bien-fondé » de la demande de visa.
[53] Dans ses motifs, la SAI a expressément pris en considération l’expression « refus de délivrer » employée au paragraphe 63(1) de la LIPR. Aucune des parties n’a affirmé que la SAI était liée par quelque précédent limitant son interprétation. Aucune des parties n’a renvoyé à un contexte ou à un objet précis du paragraphe 63(1) lié à cette expression.
[54] À mon avis, il était loisible à la SAI d’interpréter comme elle l’a fait l’expression « refus de délivrer » employée dans le libellé du paragraphe 63(1) de la LIPR. Cette expression, ainsi que le paragraphe 63(1) en général, peut raisonnablement justifier la distinction faite par la SAI entre, d’une part, une décision sur le fond et, d’autre part, une décision de refuser ou de ne pas traiter une demande parce que le demandeur n’est pas autorisé à la présenter selon le paragraphe 40(3) de la LIPR. La décision de la SAI concernant cette question n’était pas déraisonnable.
[55] Ayant traité de ces deux questions initiales, j’aborde maintenant la principale question soulevée dans les observations des parties.
2) La compétence de la SAI pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) au regard des paragraphes 40(3) et 64(3) de la LIPR
[56] Les parties ont présenté des observations à propos de l’incidence des paragraphes 15(1), 40(3) et 64(3) de la LIPR sur la compétence de la SAI pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR. Il n’appartient pas à la Cour de décider si l’interprétation de la SAI était correcte ou de fournir l’interprétation correcte. Sa tâche consiste à trancher la question de savoir si la SAI était raisonnable en appliquant les normes établies dans l’arrêt Société canadienne des postes et dans les autres affaires jugées en appel qui lient la Cour.
[57] La SAI a jugé que l’agent n’était pas autorisé à examiner la demande de résidence permanente déposée au titre du paragraphe 15(1), car celle-ci n’avait pas été déposée conformément au paragraphe 40(3). En effet, elle a conclu qu’il n’existait aucun droit d’appel relativement au rejet d’une demande de résidence permanente déposée alors que la loi l’interdisait, et qu’en se reconnaissant la compétence pour entendre l’appel, elle irait à l’encontre de l’intention du législateur lors de l’adoption du paragraphe 40(3).
[58] À mon avis, il était loisible à la SAI d’interpréter les articles 15, 40 et 63 comme elle l’a fait. Ses motifs démontrent qu’en analysant sa compétence relativement au paragraphe 63(1), elle avait conscience et a tenu compte du libellé de cette disposition, du libellé et du contexte général des autres dispositions de la LIPR et de l’objet que visait le législateur lorsqu’il avait adopté le paragraphe 40(3). Sa démarche et son interprétation de l’économie des dispositions n’étaient pas déraisonnables. D’ailleurs, je souligne que la SAI est arrivée à la même conclusion que la juge Simpson dans la décision Gill quelques semaines plus tard.
[59] Quant à la question de savoir si le paragraphe 64(3), que ce soit par son libellé ou par le contexte dans lequel il s’inscrit, a une incidence sur l’étendue de la compétence de la SAI relativement au paragraphe 63(1), il y a trois éléments importants à aborder. Premièrement, la SAI a expressément accepté la position du demandeur selon laquelle elle avait compétence pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 64(3), sur lequel le libellé du paragraphe 40(3) n’a aucune incidence. Je souligne que, bien que le demandeur ait mentionné le paragraphe 64(3) dans ses observations écrites présentées à la SAI, les observations à propos de cette disposition ne représentaient pas, à ce moment, un élément prépondérant ou central de sa position.
[60] Deuxièmement, force est de reconnaître que, dans ses motifs, la SAI n’a pas expressément analysé le paragraphe 64(3), et ce, ni isolément, ni conjointement avec le paragraphe 40(3). En revanche, la SAI n’était pas tenue de le faire pour que sa décision soit raisonnable : voir l’arrêt Société canadienne des postes, au paragraphe 52. Tout dépend des circonstances — ce qui conduit au troisième élément.
[61] Le fait que la SAI n’a pas directement analysé le paragraphe 64(3) peut facilement s’expliquer par son raisonnement. Selon l’interprétation de la SAI, le paragraphe 40(3) empêchait de soulever un argument selon lequel les paragraphes 63(1) et 64(3) lui attribueraient la compétence d’entendre l’appel. C’est-à-dire que, si, initialement, le paragraphe 40(3) interdisait de déposer la demande, rien ne peut faire l’objet d’un appel, et il s’ensuit que le libellé du paragraphe 64(3) n’a pas d’incidence sur l’étendue de la compétence d’appel de la SAI. À mon avis, il était loisible à la SAI d’interpréter ainsi l’incidence du paragraphe 40(3).
[62] Par conséquent, le fait que la SAI n’a pas expressément analysé le paragraphe 64(3) en l’espèce n’était pas fatal au caractère raisonnable de son interprétation du paragraphe 63(1) : voir les arrêts Mason, aux paragraphes 31–33, 41 et 46; Société canadienne des postes, au paragraphe 52; Vavilov, aux paragraphes 127–128.
[63] Enfin, les parties ont présenté devant la Cour des observations concernant l’intention du législateur lors de l’adoption des paragraphes 40(3) et 64(3) ainsi que l’incidence de ces dispositions sur la compétence de la SAI en matière d’appel. Les parties n’ont présenté aucune observation à propos de l’objet précis du paragraphe 63(1).
[64] Comme le démontre sans équivoque l’analyse de ses motifs ci-dessus, la SAI a pris en considération l’objet du paragraphe 40(3) ainsi que l’incidence que cette disposition pourrait avoir sur sa compétence en matière d’appel, étant donné le libellé exprès de celle-ci selon lequel une personne interdite de territoire pour fausses déclarations ne peut même pas présenter une demande de résidence permanente. La SAI a aussi expressément accepté la position du demandeur selon laquelle rien dans le paragraphe 40(3) n’interdisait l’appel proposé.
[65] Bien que le demandeur ait affirmé que le paragraphe 64(3) visait à permettre d’interjeter appel lorsqu’une personne interdite de territoire risque d’être séparée de son époux, de son conjoint de fait ou de ses enfants, aucune des parties n’a soutenu que cette disposition serait superflue ou dénuée de sens, ou encore que son objet serait entièrement contrecarré, si un demandeur frappé d’interdiction de territoire pour fausses déclarations avant de présenter une demande de résidence permanente n’était pas autorisé à interjeter appel. Les deux parties ont accepté dans le cadre de la présente demande que la SAI aurait compétence pour entendre un appel si un agent concluait à l’existence d’une présentation erronée des faits entraînant une interdiction de territoire au cours de l’examen d’une demande de résidence permanente. Dans cette situation, il y aurait « refus de délivrer » le visa de résident permanent au titre du paragraphe 63(1), et, en vertu du paragraphe 64(3), l’appel ne serait pas interdit en raison de l’interdiction de territoire pour fausses déclarations, pourvu que l’étranger satisfasse aux exigences énoncées au paragraphe 64(3).
[66] Compte tenu de toutes ces circonstances et du libellé des articles 15, 40, 63 et 64 de la LIPR, le demandeur n’a pas démontré que la façon dont la SAI avait interprété sa compétence d’entendre un appel au titre du paragraphe 63(1) était déraisonnable, parce qu’elle n’avait pas analysé ou appliqué le paragraphe 64(3) dans ses motifs. La SAI avait suffisamment pris en considération le texte, le contexte et l’objet des dispositions de la LIPR dans l’analyse qui l’avait menée à ses conclusions.
3) Conclusion au sujet des questions touchant la compétence de la SAI pour entendre l’appel
[67] Je conclus que la SAI n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a interprété sa compétence légale d’entendre l’appel en l’espèce. Bien que les motifs de la SAI présentaient des imperfections, celles-ci, dans les circonstances, n’étaient pas fondamentales ou graves au point de me faire perdre confiance dans sa décision dans son ensemble : Vavilov, au paragraphe 100; Société canadienne des postes, au paragraphe 33.
B. La SAI a-t-elle déraisonnablement appliqué le droit aux faits?
[68] La deuxième question principale de la présente demande de contrôle judiciaire est celle de savoir si la SAI aurait dû conclure qu’elle avait compétence pour entendre l’appel de la décision de l’agent des visas en raison du contenu de cette décision. Le demandeur a affirmé que la lettre datée du 22 octobre 2018 indiquait expressément que l’agent avait terminé l’évaluation de la demande et que celle-ci était « refusée ». Le demandeur a mis en contraste, d’une part, une décision de refuser la demande et, d’autre part, une décision de ne pas trancher la demande sur le fond et de la retourner à la personne avec le remboursement des frais de traitement de la demande. La lettre de l’agent faisait aussi expressément mention du droit d’appel du demandeur.
[69] À mon avis, la décision de la SAI selon laquelle elle n’avait pas compétence pour entendre l’appel était raisonnable.
[70] Premièrement, la SAI a conclu que la lettre de l’agent ne pouvait pas à elle seule attribuer à la SAI la compétence légale d’entendre un appel. Cela ne peut être qu’exact. La compétence de la SAI pour entendre un appel devait lui être conférée par la LIPR ou la RIPR.
[71] Deuxièmement, et il s’agit là d’un point important, la lettre de l’agent portait en substance sur l’interdiction de territoire du demandeur aux termes de l’article 40 et sur l’interdiction de demander la résidence permanente aux termes du paragraphe 40(3). Le fait que, dans la lettre, l’agent a employé le terme « refusé », plutôt que d’indiquer qu’il refusait de trancher la demande, voire de la retourner tout simplement, ne change en rien la substance de la décision. L’agent a rendu une décision de fond selon laquelle Mme Olaonipekun ne pouvait présenter de demande de résidence permanente aux termes du paragraphe 40(3).
[72] Troisièmement, le demandeur a renvoyé aux notes de l’agent consignées dans le SMGC, qui donnaient à penser que l’agent avait procédé à un examen approfondi du dossier avant de conclure que l’article 40 s’appliquait. Toutefois, en définitive, c’est la décision de l’agent qui importe. En l’espèce, la simple portée de l’examen du dossier du demandeur effectué par l’agent n’avait pas d’incidence sur la substance de la décision que ce dernier avait rendue au titre de l’article 40, ni sur l’existence (ou l’inexistence) de la compétence de la SAI pour entendre un appel interjeté au titre du paragraphe 63(1) de la LIPR.
[73] Pour ces motifs, je ne peux conclure que la décision de la SAI était indéfendable au regard de la preuve ou que la SAI s’est fondamentalement méprise au sujet d’un élément essentiel de la preuve ou qu’elle a négligé un tel élément : Vavilov, aux paragraphes 101 et 125–126. En ce qui a trait à l’application du droit aux faits, la décision de la SAI ne comporte pas d’erreur susceptible de contrôle.
V. Conclusion
[74] La demande est donc rejetée.
[75] À la fin de l’audience, le demandeur a demandé de disposer du reste de la journée pour présenter des observations concernant une question à proposer aux fins de la certification en vertu de l’alinéa 74d) de la LIPR. Le défendeur s’y est opposé en plaidant que les lignes directrices sur la pratique exigeaient qu’un préavis au sujet d’une question à certifier soit transmis au moins cinq jours avant l’audience. L’avocate du défendeur a affirmé qu’elle aurait peut-être plaidé la demande autrement si une question avait été proposée conformément aux lignes directrices sur la pratique.
[76] Selon les Lignes directrices sur la pratique dans les instances intéressant la citoyenneté, l’immigration et les réfugiés, datées du 5 novembre 2018, les parties doivent formuler des observations écrites au sujet de l’alinéa 74d) dans leurs observations écrites ou oralement à l’audience sur le fond. De plus [aux pages 4 et 5], « [s]i une partie entend proposer une question à certifier, la partie opposée doit en être informée au moins cinq (5) jours avant l’audience, dans le but de s’entendre sur le libellé de la question proposée ».
[77] Étant donné la nature de la présente demande et l’objection du défendeur, je conviens qu’en l’espèce, le demandeur ne devrait pas être autorisé à proposer une question aux fins de la certification après l’audience.
JUGEMENT dans le dossier IMM-6517-19
LA COUR STATUE que :
1. La demande est rejetée;
2. La Cour ne certifie aucune question en vertu de l’alinéa 74d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.
ANNEXE – IMM-6517-19
DISPOSITIONS LÉGISLATIVES
Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27
Pouvoir de l’agent
15 (1) L’agent peut procéder à un contrôle dans le cadre de toute demande qui lui est faite au titre de la présente loi ou qui est faite au titre du paragraphe 11(1.01).
[…]
Fausses déclarations
40 (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :
a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;
[…]
Application
(2) Les dispositions suivantes s’appliquent au paragraphe (1) :
a) l’interdiction de territoire court pour les cinq ans suivant la décision la constatant en dernier ressort, si le résident permanent ou l’étranger n’est pas au pays, ou suivant l’exécution de la mesure de renvoi;
[…]
Interdiction de territoire
(3) L’étranger interdit de territoire au titre du présent article ne peut, pendant la période visée à l’alinéa (2)a), présenter de demande pour obtenir le statut de résident permanent.
[…]
Droit d’appel : visa
63 (1) Quiconque a déposé, conformément au règlement, une demande de parrainage au titre du regroupement familial peut interjeter appel du refus de délivrer le visa de résident permanent.
[…]
Restriction du droit d’appel
64 (1) […]
Fausses déclarations
(3) N’est pas susceptible d’appel au titre du paragraphe 63(1) le refus fondé sur l’interdiction de territoire pour fausses déclarations, sauf si l’étranger en cause est l’époux ou le conjoint de fait du répondant ou son enfant.
Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227
Forme et contenu de la demande
10 (1) Sous réserve des alinéas 28b) à d) et 139(1)b), toute demande au titre du présent règlement :
a) est faite par écrit sur le formulaire fourni, le cas échéant, par le ministère ou, dans le cas d’une demande de déclaration de dispense visée au paragraphe 42.1(1) de la Loi, par l’Agence des services frontaliers du Canada;
b) est signée par le demandeur;
c) comporte les renseignements et documents exigés par le présent règlement et est accompagnée des autres pièces justificatives exigées par la Loi;
d) est accompagnée d’un récépissé de paiement des droits applicables prévus par le présent règlement;
e) dans le cas où le demandeur est accompagné d’un époux ou d’un conjoint de fait, indique celui d’entre eux qui agit à titre de demandeur principal et celui qui agit à titre d’époux ou de conjoint de fait accompagnant le demandeur principal.
[…]
Demande de parrainage non valide
(6) Pour l’application du paragraphe 63(1) de la Loi, la demande de parrainage qui n’est pas faite en conformité avec le paragraphe (1) est réputée non déposée.
[…]
Renvoi de la demande
12 Sous réserve de l’article 140.4, si les exigences prévues aux articles 10 et 11 ne sont pas remplies, la demande et tous les documents fournis à l’appui de celle-ci, sauf les renseignements visés aux sous-alinéas 12.3b)(i) et (ii), sont retournés au demandeur.