[1971] R.C.É. VEMB v. LE «SAMUEL T» 1037 Vemb (Demandeur) v. Le Samuel T (Défendeur) Le Juge Walsh—en amirauté, Halifax le 23 avril; Ottawa le 4 mai 1971. [TRADUCTION] Droit maritime Marine marchande—Juridiction—Action in rem contre le navire— Demande du droit de propriété exclusif sur le navire par l'un des copropriétaires d cause du défaut de paiement de l'autre copropriétaire de ses droits sur le navire— L'autre copropriétaire n'est pas partie d l'action—Supreme Court of Judicature (Consolidation) Act 1952 (R.-U.), c. 49, art. 22 (1)a) (i) et (ii). Le demandeur, l'un des deux copropriétaires inscrits du navire défendeur, intenta une action in rem contre le navire afin d'obtenir le transfert à son nom des 64 actions du navire car l'autre copropriétaire n'a pas respecté son contrat en ne payant pas au demandeur la moitié de ses droits sur le navire. Arrêt: Que le litige entre les copropriétaires concerne le droit de propriété du navire ou l'arrêté de leurs comptes, il ressort implicitement de la loi conférant à la cour sa juridiction (art. 22(1)a)(i) et (ii) de la Supreme Court of Judicature (Consolidation) Act 1925 (R.-U.)) que cette action in rem intentée contre le navire par l'un des copropriétaires ne pouvait pas être accueillie à moins que l'autre copropriétaire soit informé des poursuites en devenant partie ou autrement. Renvoi à: The Raven, 9 R.C.E. 404; The Seaward, 3 R.C.É. 268. ACTION. D. Kerr, c.r., pour le demandeur. La défense fait défaut. LE JUGE WALSH—Dans cette action, intentée in rem contre le navire défendeur et intitulée «Action concernant le titre ou le droit de propriété d'un navire», l'exposé de demande compte un seul alinéa rédigé ainsi: [TRADUCTION] Le demandeur, en qualité de copropriétaire du navire à moteur Samuel T demande qu'une décision soit rendue contre le navire défendeur sur le droit de propriété dudit navire défendeur, le transfert à son nom de la totalité des soixante-quatre actions dans ledit navire défendeur et les frais. Aucun acte de comparution n'ayant été déposé au nom du défendeur dans le délai légal, l'affaire vint devant moi le 23 avril 1971 à Halifax, sous la forme d'une demande d'ordonnance de jugement en faveur du demandeur (Vemb) requérant que l'ordonnance prévoit en outre qu'un mandat soit délivré à l'adresse de M. V. Arthur Sibley, prévôt de cette cour, lui en-joignant de préparer et de remettre au demandeur un contrat de vente pour la totalité des 64 actions représentant le navire défendeur, libres de toute charge. A l'appui de sa demande, le demandeur produisit un affidavit exposant les circonstances qui provoquèrent sa demande. Il ressort dudit affidavit qu'en décembre 1970 et janvier 1971, à la suite d'un accord avec un associé d'affaires, un certain John W. Stephens, il devait acheter à la J. P. Porter Company Limited, propriétaire inscrit du navire à moteur Samuel T, les 64 actions dudit navire, libres de toute charge, en échange de la cession audit M. Stephens de la moitié de ses droits sur un autre navire qu'il possédait à ce moment-là conjointement avec ledit M. Stephens. A peu près à la même époque, il fit connaissance d'un certain Capitaine Jim Edwards et entama
[1971] R.C.E. VEMB v. LE «SAMUEL T» 1039 des transactions commerciales avec ce dernier, alors de Darmouth (Nou-velle-Écosse) qui avait déjà acheté d'autres navires audit M. John W. Stephens, et à la suite de ses transactions avec M. Edwards, il accepta de vendre la moitié des droits sur le navire à moteur Samuel T. à M. Edwards moyennant une contrepartie de $2,000 plus des pièces détachées enlevées par M. Edwards sur le navire à moteur Fundy Prince, qui lui appartenait à ce moment-là, et qui devaient être livrées au navire à moteur Samuel T aux frais de M. Edwards. Cet accord, daté du 12 janvier 1971, spécifiait que la somme de $2,000 devait être versée à la date du ler février 1971 ou avant, et contenait en outre une clause supplémentaire selon laquelle M. Vemb consentait à accorder à M. Edwards trente jours de grâce «pour le rem-boursement». A la suite de cet accord, le 13 janvier 1971, il fut convenu entre le demandeur et la J. P. Porter Company Limited que le contrat de vente des 64 actions du navire à moteur Samuel T serait établi au nom de M. Edwards et au sien en tant que copropriétaires, ce qui fut fait le même jour, et le jour suivant, ledit contrat de vente fut inscrit auprès du registraire de la marine marchande à Halifax. Au moment de l'inscription, M. Edwards et le demandeur signèrent une formule de désignation par laquelle le demandeur était nommé propriétaire gérant du navire. Le contrat de vente et le certi-ficat du registraire sont joints à l'affidavit comme pièces. En outre l'affidavit expose que M. Edwards ne paya ni les $2,000 prévus ni une partie de la somme bien qu'on lui ait demandé plusieurs fois de le faire, et bien qu'il ait convenu que le demandeur pouvait procéder au transfert des pièces détachées du Fundy Prince sur le Samuel T; le deman-deur le fit à ses propres frais, ce qui lui coûta environ $400, soit, selon sa déclaration, approximativement la valeur des pièces, puisque M. Edwards n'avait pas, à ce moment, les fonds nécessaires pour embaucher des ou-vriers. Au début de mars, M. Edwards disparut et le demandeur se mit à chercher les noms des différentes personnes et corporations avec lesquelles il avait été en contact depuis, et toutes lui firent savoir que ledit M. Edwards leur devait de l'argent et qu'elles essayaient de le retrouver sans succès. Ses efforts de recherche personnels grâce à d'autres connaissances se révé-lèrent aussi vains et il pense qu'à cause de ses dettes importantes, M. Edwards a quitté la province. Il est préoccupé par le fait que certains des autres créanciers de M. Edwards puissent obtenir gain de cause contre ce dernier, ce qui menacerait le navire à moteur Samuel T, et il soutient qu'étant donné que M. Edwards ne s'est pas conformé aux dispositions de l'accord ou n'a fait aucun versement pour ses droits sur le navire, il n'a aucunement le droit d'être copropriétaire et que par conséquent, la Cour devrait ordon-ner le transfert à son nom de toutes les actions du navire à moteur Samuel T, lesdites actions étant libres de toute charge. En intentant la présente action in rem contre le navire au lieu de le faire contre M. Edwards avec lequel le demandeur est réellement en litige, et sans même donner à M. Edwards la qualité de partie à l'action, le de-mandeur essaie de résilier le contrat qu'il a passé avec M. Edwards et d'acquérir l'entière propriété des actions sur le navire sans assignation soit personnelle soit autre dudit M. Edwards, lui donnant par là-même l'occasion
[1971] R.C.É. VEMB v. LE «SAMUEL T» 1041 de se faire entendre. L'avocat du demandeur avança que, puisqu'aux termes de la Règle 73A(5) [TRADUCTION] «La Cour peut, selon les modalités qu'elle estime justes, annuler ou modifier un jugement par défaut inscrit confor-mément à cette règle» (c.-à-d. un jugement par défaut), ledit M. Edwards pourrait, si par la suite il revenait et avait des motifs valables d'intervenir dans la procédure pour l'attaquer, la faire réouvrir et partant, ne subirait aucun préjudice irrémédiable, mais je ne peux pas accepter cet argument. Bien qu'il soit sans aucun doute pratique et opportun pour le demandeur d'essayer de faire radier le nom de M. Edwards du registre en tant que co-propriétaire des 64 actions du navire avant que certains des créanciers de M. Edwards puissent les saisir à la suite de leurs réclamations, l'opportunité seule ne peut jamais servir de justification pour ne pas suivre la procédure légale. Il me semble qu'on peut se poser la question de savoir si le litige entre le demandeur et M. Edwards est même vraiment à proprement parler (TRADUCTION) «une question portant sur le titre ou le droit de propriété d'un navire» selon l'acception de l'article 22(1) a) (i) de la Supreme Court of Judicature (Consolidation) Act, 1925 (U.K.) afin de conférer à cette Cour compétence conformément à l'article 18(2) de la Loi sur l'Amirauté,) ou [TRADUCTION] ... Toute question survenant entre les copropriétaires d'un navire inscrit dans un port quelconque d'Angleterre, (remplacer ce mot par Canada), concernant le droit de propriété, la possession, l'emploi ou les profits de ce navire, ou de toute action de ce dernier, avec le pouvoir d'arrêter tout compte en souffrance et non-réglé entre les parties à son sujet, et d'ordonner que le navire ou toute action de ce dernier soit vendu ou de prendre toute ordonnance que la Cour estime appropriée, aux termes des dispositions de l'art. 22(1) a) (ii) dudit Act. Il me semble que la common law offre au demandeur deux moyens de droit: ou bien pour-suivre M. Edwards en paiement du montant dû aux termes du contrat, ce qu'apparemment il estime vain, ou bien entamer la procédure appropriée contre M. Edwards afin d'annuler le contrat pour non-paiement de la con-trepartie, bien que cette procédure risque d'être quelque peu compliquée car, comme le demandeur l'a lui-même admis, il est déjà entré en possession d'une partie de la contrepartie, savoir, les pièces détachées provenant du Fundy Prince bien qu'il allègue que cette opération lui ait coûté ce que les pièces valaient. A la suite d'un jugement annulant le contrat, toutes les actions du navire pourraient être transférées à son nom, et le fait que durant les délais inévitables pour obtenir ce jugement, certains autres créanciers de M. Edwards puissent saisir des actions est certes regrettable du point de vue du demandeur, mais ne peut pas justifier d'avoir écarté cette procédure. Alors que, comme je l'ai indiqué, j'ai certains doutes sur le point de savoir si la Cour est compétente puisque le litige entre les parties ne semble pas porter sur le droit de propriété du navire mais plutôt sur le paiement de la contrepartie due par M. Edwards pour acquérir la moitié des droits d'une telle propriété, droits que sans nul doute il a, à moins que le contrat en 1 S .R.C. 1952, c. 1.
[1971] R.C.E. VEMB v. LE *SAMUEL T» 1043 vertu duquel il est copropriétaire soit annulé, il se peut qu'elle soit compé-tente en vertu des termes de l'art. 22(1)a) (ii) [de la loi britannique] lui con-férant [TRADUCTION] a... le pouvoir d'arrêter tout compte en souffrance et non-réglé entre les parties à son sujet, ...» pris dans leur sens large. Si cette Cour est compétente, elle peut alors statuer soit in personam, soit in rem, et dans ce dernier cas, le navire peut être saisi comme c'est déjà arrivé (voir Admiralty Law and Practice in Canada de Mayers, (page 68) qui renvoie à l'affaire The Raven, 9 R.C.É. 404, dans laquelle le demandeur dans une action en reddition de compte entre copropriétaires avait intenté une action in rem. Toutefois, dans ce cas, l'autre copropriétaire était aussi partie en qualité de défendeur. Voir aussi l'affaire The Seaward, 3 R.C.Ê. 268, qui a également permis d'intenter une action in rem contre le navire et dans laquelle le copropriétaire incriminé n'était pas nommé comme partie, mais il y eut comparution et les comptes qui constituaient le fondement de la demande, étaient dus à l'emploi du navire). Il me semble fondamental et implicite dans les dispositions de l'art. 22(1)a)(i) et (ii) de la Supreme Court of Judicature (Consolidation) Act, 1925 (U.K.) que, même si le litige entre les parties concerne le titre ou le droit de propriété d'un navire ou l'arrêté de tout compte en souffrance et non-réglé entre eux au sujet de ce dernier, si une action in rem est intentée par l'un des copropriétaires contre le navire lui-même, l'autre copropriétaire, impliqué dans le litige, doit être informé des poursuites en devenant partie ou autrement. Par conséquent, je ne peux pas rendre la décision dans le sens de la demande qui m'avait été faite.
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