T-707-85
Commissaire à l'information du Canada (requé-
rant)
c.
Président du Conseil de la radiodiffusion et des
télécommunications canadiennes (intimé)
et
Procureur général du Canada (intervenant)
RÉPERTORIÉ: CANADA (COMMISSAIRE À L'INFORMATION) c.
CONSEIL DE IA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICA-
TIONS CANADIENNES
Division de première instance, juge en chef adjoint
Jerome—Ottawa, 12 septembre 1985 et 28 février
1986.
Accès à l'information — Les procès-verbaux des réunions
du CRTC sont-ils exempts de divulgation en vertu de l'art.
21(1)b) de la Loi sur l'accès à l'information? — Le processus
de prise de décision du CRTC est valide — L'art. 49 n'habilite
pas la Cour à intervenir dans l'exercice du pouvoir discrétion-
naire conféré au président du Conseil par l'art. 21(1)b) — Les
textes anglais et français de l'art. 49 de la Loi ont le même
sens — Loi sur l'accès à l'information, S.C. 1980-81-82-83,
chap. 111, annexe I, art. 21(1)a),b),(2)a), 42(1)a), 49 — Loi sur
les langues officielles, S.R.C. 1970, chap. O-2, art. 8(2)d) —
Loi sur la protection des renseignements personnels, S.C.
1980-81-82-83, chap. 111, annexe II.
Il s'agit en l'espèce d'un recours en révision exercé en vertu
de l'alinéa 42(1)a) de la Loi sur l'accès à l'information contre
le président du CRTC qui a invoqué l'alinéa 21(1)b) de la Loi
pour refuser de communiquer des extraits des procès-verbaux
de certaines réunions du comité de direction du CRTC et
d'indiquer quels membres du comité étaient présents et se sont
prononcés.
Jugement: le recours devrait être rejeté.
Tout d'abord, la Cour suprême du Canada a statué de façon
concluante dans l'arrêt CRTC c. CTV que le processus de prise
de décision du CRTC est valide.
Ensuite, il ne fait aucun doute qu'il est absolument essentiel
que les communications entre les membres du comité pendant
la préparation de la décision restent secrètes et que l'alinéa
21(1)b) prévoit une exception particulière parfaitement appro-
priée. Seuls les motifs finals de la décision échappent à cette
exception.
Enfin, l'article 49 de la Loi n'habilite pas la Cour à intervenir
dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire conféré au président
du CRTC par l'alinéa 21(1)b). Les textes anglais et français de
l'article 49 ont le même sens: la Cour doit ordonner la commu
nication d'un document si elle conclut au bon droit du requé-
rant. Mais ce droit n'est pas absolu car il est assujetti au
pouvoir discrétionnaire du responsable de l'institution fédérale
de donner suite à la demande.
La décision du juge Strayer dans l'affaire Ternette signifie
simplement que la Cour est habilitée à déterminer si un dossier
a été versé à juste titre dans un fichier inconsultable comme le
prévoit la Loi sur la protection des renseignements personnels.
Elle ne laisse pas entendre que l'exercice du pouvoir discrétion-
naire du responsable d'une institution fédérale peut faire l'objet
d'un examen par la Cour.
JURISPRUDENCE
DÉCISION SUIVIE:
CRTC c. CTV Television Network Ltd. et autres, [1982]
1 R.C.S. 530; 134 D.L.R. (3d) 193.
DÉCISION EXAMINÉE:
Ternette c. Solliciteur général du Canada, [1984] 2 C.F.
486 (1" inst.).
AVOCATS:
Bruce W. Mann pour le requérant.
A. Cohen et William A. Howard pour
l'intimé.
Barbara A. Mclsaac pour l'intervenant.
PROCUREURS:
Conseiller juridique, Commissaire à l'infor-
mation du Canada pour le requérant.
Conseiller juridique, Conseil de la radiodif-
fusion et des télécommunications canadiennes
pour l'intimé.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intervenant.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT JEROME: La pré-
sente demande fondée sur l'alinéa 42(1)a) de la
Loi sur l'accès à l'information [S.C. 1980-81-
82-83, chap. 111, annexe I] a été entendue à
Ottawa (Ontario) le 12 septembre 1985. Le requé-
rant cherche à prendre connaissance de documents
du CRTC que Douglas Smith a tenté d'obtenir le
26 juin 1984:
[TRADUCTION] La photocopie des extraits pertinents des comp-
tes rendus de toutes les réunions du comité de direction du
CRTC au cours desquelles des décisions ont été prises au sujet
de la Décision CRTC 84-214, ainsi que le nom des membres du
comité de direction qui étaient présents et se sont prononcés.
Le président du CRTC, qui est reconnu comme le
responsable de cette institution fédérale, a invoqué
l'alinéa 21(1)b) de la Loi sur l'accès à l'informa-
tion pour refuser de communiquer le document
demandé:
21. (1) Le responsable d'une institution fédérale peut refuser
la communication de documents datés de moins de vingt ans
lors de la demande et contenant:
b) des comptes rendus de consultations ou délibérations où
sont concernés des cadres ou employés d'une institution
fédérale, un ministre de la Couronne ou le personnel de
celui-ci;
Je me suis demandé si la présente requête met en
jeu la validité du processus de prise de décision du
CRTC et en fait une question préliminaire. Je
tiens surtout compte du fait que les conseillers qui
siègent à l'audience initiale au cours de laquelle
une demande est examinée ne sont pas nécessaire-
ment les membres du comité de direction qui
prennent la décision finale. Dans ses plaidoiries
écrites portant sur les «faits», l'intimé a brossé en
l'espèce un tableau du processus suivi pour rendre
la décision 84-214:
[TRADUCTION] 6. En 1983, Saskatoon Telecable Limited a
demandé au Conseil l'autorisation d'acquérir les actifs d'une
autre entreprise de radiodiffusion ainsi qu'une licence de radio-
diffusion lui permettant de continuer à exploiter cette entre-
prise, d'émettre les signaux de certaines stations de télévision
choisies et de divers services spécialisés et de majorer son tarif
d'abonnement mensuel.
7. Pour ce qui est des demandes de radiodiffusion en général, si
le Conseil décide d'entendre une demande au cours d'une
audience publique, son président désigne des conseillers à temps
plein et à temps partiel qui font partie d'un comité chargé
d'entendre la demande.
Article 19 de la Loi sur la radiodiffusion.
8. Après avoir entendu la demande, le comité formule habituel-
lement ses recommandations dans un document intitulé
«Recommandations du comité» qui est ensuite remis à tous les
conseillers.
9. Les conseillers se réunissent ensuite afin d'examiner les
recommandations du comité.
10. Cet examen permet au comité de direction de «consulter» les
membres à temps partiel comme le prévoit la Loi sur la
radiodiffusion.
Article 17 de la Loi sur la radiodiffusion.
11. La consultation consiste pour les conseillers à donner leurs
points de vue sur les mesures qui devraient être prises au sujet
d'une demande particulière. Ils peuvent faire valoir toutes
sortes d'idées, de théories, d'opinions et de remarques person-
nelles qui donnent presque inévitablement lieu à des débats, des
critiques, des compromis, etc., entre les divers conseillers,
c'est-à-dire aux échanges habituels que l'on peut attendre de
tout groupe de personnes qui cherche à arriver à un consensus
sur une question.
12. Une fois la consultation terminée, l'affaire est soumise au
comité de direction qui doit prendre une décision sur la
demande.
13. Le comité de direction se penche alors sur la demande au
cours d'une ou de plusieurs réunions et il réfléchit sur la
décision à rendre.
14. Ces réunions sont tenues à huis clos ou en présence du
personnel. Dans le premier cas, les conseillers ont tendance à
s'exprimer plus librement sur la qualité et l'utilité des docu
ments qui leur sont présentés et à ne pas mâcher leurs mots en
ce qui concerne leur appréciation des points en litige. Les
questions de stratégie sont souvent examinées à huis clos.
15. Aux réunions du comité de direction, qu'elles soient à huis
clos ou publiques, les conseillers donnent leurs points de vue sur
les mesures qui devraient être prises au sujet d'une demande.
Comme au cours de la réunion de consultation, ils peuvent de
nouveau faire valoir leurs idées, leurs théories, leurs opinions et
leurs remarques personnelles. Cela donnera encore lieu à des
discussions, des échanges, des critiques et des compromis entre
les conseillers présents.
16. Une fois que les conseillers en sont arrivés à un consensus
(ce qui peut nécessiter quelques sessions tenues à différentes
dates), des directives sont données au personnel afin qu'il
prépare un projet de décision suivant certaines grandes lignes.
Ce projet est ensuite soumis à l'approbation et aux commentai-
res des conseillers. Plusieurs projets devront inévitablement être
rédigés et soumis aux conseillers avant que ces derniers ne se
mettent d'accord sur le libellé de la décision du Conseil. Une
fois ce libellé choisi, la décision est publiée.
17. La demande qui a donné lieu à la décision CRTC 84-214 a
été entendue par les conseillers Therrien, Merchant, Raines et
Klingle au cours d'une audience publique tenue à Edmonton
(Alberta) le 10 janvier 1984.
18. Le comité formé de conseillers a présenté son rapport à une
réunion des conseillers à temps plein et à temps partiel tenue le
18 janvier 1984, et le comité de direction a consulté les
membres à temps partiel présents sur les mesures à prendre au
sujet de la demande.
19. Le 20 janvier 1984, le comité de direction a tenu une
réunion au cours de laquelle il s'est penché sur la question de
l'approbation de la demande et sur les conditions dont elle
serait assortie. Le procès-verbal qui fait l'objet de la présente
action porte sur ces délibérations.
20. Par suite de ces délibérations, un projet de décision a été
rédigé et soumis à l'approbation et aux commentaires de tous
les membres du comité de direction; la décision finale a été
rendue publique le let mars 1984 sous l'intitulé Décision CRTC
84-214.
Articles 17 et 25 de la Loi sur la radiodiffusion.
21. Ladite décision ainsi que ses motifs ont été publiés dans la
Gazette du Canada et dans des journaux ayant une circulation
générale en Saskatchewan.
Article 20 de la Loi sur la radiodiffusion.
Il est évident que je dois tout d'abord avoir la
conviction que la procédure suivie fait valablement
partie du processus de prise de décision avant
d'accorder l'exemption de divulgation réclamée.
Heureusement, cette question a été examinée à
fond par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt
CRTC c. CTV Television Network Ltd. et autres,
[1982] 1 R.C.S. 530; 134 D.L.R. (3d) 193. Le
juge en chef Laskin dit dans cet arrêt [aux pages
549 et 550 R.C.S.; 207 et 208 D.L.R.]:
La difficulté que pose l'application de considérations strictes
de justice naturelle, fondées sur la maxime portant que seuls
ceux qui ont participé à l'audience peuvent participer à la
décision tient à ce que la loi applicable prescrit autre chose.
L'avocat du CRTC a soutenu que les dispositions du par. 19(4)
concernant la constitution d'un comité d'audience établissent
simplement un quorum de deux personnes ou plus, dont une
seule doit être un membre à plein temps; cette condition a été
respectée pendant toute la durée de l'audience. Toutefois, le
paragraphe ne fixe précisément aucun quorum, ce qui à mon
avis était inutile vu les dispositions de l'al. 17(1)c).
Ces modalités rendent inapplicable le principe énoncé dans
l'arrêt Mehr où, de plus, il y avait une accusation d'inconduite
portée contre l'avocat, ce qui risquait de compromettre sa
carrière. En l'espèce, la loi prévoit clairement que les membres
du comité de direction qui ne faisaient pas partie du comité
d'audience peuvent prendre part à la décision relative au renou-
vellement. En réalité, huit membres ont ainsi participé même si
seulement quatre d'entre eux faisaient partie du comité d'au-
dience. Je ne puis interpréter l'al. 17(1)c), quant au renouvelle-
ment ou les al. 17(1)a) et b) quant à l'attribution et à la
modification d'une licence, autrement que comme permettant
expressément à tous les membres à plein temps du CRTC, qui
constituent le comité de direction, de prendre la décision sur le
renouvellement, l'attribution ou la modification d'une licence,
qu'ils aient ou non entendu les observations formulées lors de
l'audience publique. Je ne serais pas non plus justifié de limiter
la participation à ceux qui faisaient partie du comité d'audience
ou d'exiger la participation de tous ceux-ci, pourvu qu'il y ait eu
quorum du comité de direction qui a rendu la décision relative
au renouvellement. Aucune disposition expresse n'exclut un des
membres du comité de direction et on ne peut déduire aucune
disposition de ce genre de l'examen des par. 17(1) et 19(4).
Ce qui est implicite c'est que le comité d'audience, au moyen
d'un procès-verbal ou autrement, fait connaître aux membres
du comité de direction les questions soulevées au sujet de la
demande de renouvellement et il consulte les membres à temps
partiel quant à la décision proposée. Il existe un procès-verbal
en l'espèce. De plus, le CRTC et le comité de direction avaient
affaire à une requérante expérimentée qui connaissait les dispo
sitions de la Loi et qui semblait comprendre que l'absence d'un
seul, de deux ou même de trois membres pendant une partie
quelconque de l'audience n'empêcherait pas le comité de direc
tion de rendre une décision. Aussi inusité que puisse être le
pouvoir de décision par rapport à la composition du comité
d'audience, la Loi est claire à ce sujet.
Je dois par conséquent présumer que la procédure
suivie pour les fins de la décision 84-214 n'est pas
en cause dans la présente demande. Cet élément
du litige étant réglé, il ne doit faire aucun doute
qu'il est absolument essentiel que les communica
tions entre les membres du Conseil pendant la
préparation de la décision restent secrètes. Il en
résulte que l'alinéa 21(1)b) prévoit une exception
particulière parfaitement appropriée. Je ne crois
pas non plus que la manière dont elle est énoncée
dans le texte législatif crée une quelconque ambi-
guïté. Je n'ai aucune difficulté à établir une dis
tinction entre les notes préparatoires ou les com
munications échangées et les motifs finals de la
décision. À mon avis, l'exception prévue à l'alinéa
21(2)a) ne vise que ce dernier document:
21....
(2) Le paragraphe (1) ne s'applique pas aux documents
contenant:
a) le compte rendu ou l'exposé des motifs d'une décision qui
est prise dans l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire ou
rendue dans l'exercice d'une fonction judiciaire ou quasi-
judiciaire et qui touche les droits d'une personne;
Le dernier argument du requérant concerne les
pouvoirs de la Cour lorsqu'est exercé le recours en
révision fondé sur l'alinéa 42(1)a) de la Loi sur
l'accès à l'information. Le requérant soutient que
même si la Cour conclut que le document est visé
par les dispositions de l'alinéa 21(1)b), l'article 49
de la Loi autorise celle-ci à décider si, à son avis, il
y aurait lieu de donner communication du docu
ment. Comme il semble que les textes français et
anglais de l'article 49 sont différents, l'avocat invo-
que l'alinéa 8(2)d) de la Loi sur les langues
officielles [S.R.C. 1970, chap. O-2] pour convain-
cre la Cour d'appliquer le texte français:
49. La Cour, dans les cas où elle conclut au bon droit de la
personne qui a exercé un recours en révision d'une décision de
refus de communication totale ou partielle d'un document
fondée sur des dispositions de la présente loi autres que celles
mentionnées à l'article 50, ordonne, aux conditions qu'elle juge
indiquées, au responsable de l'institution fédérale dont relève le
document en litige d'en donner à cette personne communication
totale ou partielle; la Cour rend une autre ordonnance si elle
l'estime indiqué.
49. Where the head of a government institution refuses to
disclose a record requested under this Act or a part thereof on
the basis of a provision of this Act not referred to in section 50,
the Court shall, if it determines that the head of the institution
is not authorized to refuse to disclose the record or part thereof,
order the head of the institution to disclose the record or part
thereof, subject to such conditions as the Court deems appro
priate, to the person who requested access to the record, or shall
make such other order as the Court deems appropriate.
Il invoque en outre la décision rendue par le juge
Strayer dans l'affaire Ternette c. Solliciteur géné-
ral du Canada, [1984] 2 C.F. 486 (1r» inst.) [aux
pages 497, 498 et 501]:
Bien que l'argumentation de l'intimé ait une certaine valeur,
je ne peux conclure qu'il s'agit d'une situation qui convient à
l'application de la maxime expressio unius est exclusio alte-
rius. Si ce n'était des renvois précis au droit du Commissaire à
la protection de la vie privée de demander la révision d'un
dossier versé dans un fichier inconsultable et aux procédures
prévues à cette fin, il ne ferait aucun doute que cette question
relèverait à juste titre des pouvoirs généraux de la Cour de
connaître des demandes de révision des refus de communication
des renseignements personnels, conformément aux termes géné-
raux des articles 41, 45, 46 et 48. de ne suis pas prêt à
restreindre la portée de ces pouvoirs généraux pour la simple
raison qu'on a également jugé bon de décrire avec précision le
droit du Commissaire à la protection de la vie privée de
chercher à obtenir une telle révision. Il aurait été facile pour le
Parlement de restreindre la portée des articles 41, 45 et 48 ou
d'indiquer clairement qu'ils ne s'appliquent pas lorsque le para-
graphe 36(5), l'article 43 et l'article 50 s'appliquent. Mais le
Parlement ne l'a pas fait. Au lieu de cela, l'article 41 donne à
l'individu qui s'est vu refuser la communication, le droit général
d'exercer «un recours en révision de la décision de refus» devant
la Cour et, dans de tels cas, l'article 45 donne à la Cour carte
blanche pour examiner les renseignements qui relèvent d'une
institution fédérale, à l'exception des renseignements confiden-
tiels du Conseil privé de la Reine «Nonobstant toute autre Loi
du Parlement ou toute immunité reconnue par le droit de la
preuve», ce qui donne clairement à la Cour le pouvoir et la
responsabilité de connaître de ces demandes en tenant compte
seulement de la nécessité d'éviter toute divulgation inappropriée
comme le prévoit l'article 46. En adoptant de telles dispositions
générales, le Parlement doit avoir fait en sorte que le droit de
l'individu au contrôle judiciaire soit aussi efficace en ce qui a
trait au fichier inconsultable qu'aux renseignements personnels
classés sous d'autres formes. L'interprétation que donne l'in-
timé en l'espèce des articles 41 et 48 signifierait qu'en réponse à
la demande de révision, la Cour n'aurait d'autre pouvoir que de
lire le décret en conseil rendant le fichier inconsultable. Une
fois que la Cour aurait lu le décret en conseil et comparé le
numéro de répertoire du fichier à celui qui est visé dans la
demande de renseignements personnels, ses pouvoirs seraient
épuisés. On ne peut supposer que le Parlement avait l'intention
de donner un rôle aussi banal et insignifiant à la Cour alors
qu'il accordait aux individus concernés, à l'article 41, un pou-
voir général de demander la révision judiciaire des refus des
institutions fédérales de communiquer des renseignements
personnels.
Par conséquent, je conclus que dans un «recours en révision
de la décision de refus» en vertu de l'article 41 comme en
l'espèce, la présente Cour est autorisée à vérifier s'il y a
vraiment un dossier concernant le requérant dans ce fichier de
renseignements personnels et, dans l'affirmative, s'il y a été
versé à juste titre. Comme je l'ai déjà dit, un fichier ne doit être
classé parmi les fichiers inconsultables en vertu du paragraphe
18(1) de la Loi que si dans tous les dossiers qu'il contient
«dominent les renseignements visés aux articles 21 ou 22». La
condition préalable à l'inclusion de tout dossier est formulée en
termes objectifs et non en des termes subjectifs, comme par
exemple: «lorsque le gouverneur en conseil estime que ...» une
telle condition existe. Le fichier visé en l'espèce est censé avoir
été classé comme inconsultable parce qu'il est formé de dossiers
dans chacun desquels dominent les renseignements visés à
l'article 21. La Cour est donc autorisée à examiner tout dossier
versé dans le fichier inconsultable qui fait l'objet d'une
demande en vertu de l'article 41 pour déterminer s'il contient
des dossiers dans chacun desquels dominent les renseignements
visés à l'article 21. Si elle constate qu'il ne s'agit pas d'un
dossier où dominent ces renseignements, cela signifie que ce
dossier n'aurait pas dû être versé dans ce fichier et la Cour est
autorisée à rendre l'ordonnance appropriée en vertu de
l'article 48.
À mon avis, les textes anglais et français de
l'article 49 ont le même sens, c'est-à-dire que la
Cour doit ordonner la communication d'un docu
ment si elle conclut au bon droit du requérant.
Une fois qu'il est décidé qu'un document entre
dans la catégorie de documents mentionnés au
paragraphe 21(1), le droit du requérant d'en obte-
nir la communication est assujetti au pouvoir dis-
crétionnaire du responsable de l'institution fédé-
rale de donner suite à la demande. Autrement dit,
le requérant ne possède pas un droit absolu à la
communication des documents visés par le para-
graphe 21(1).
Qui plus est, je ne crois pas que l'on puisse
conclure que les remarques du juge Strayer dans
l'affaire Ternette signifient que l'exercice du pou-
voir discrétionnaire du responsable de l'institution
fédérale peut faire l'objet d'un examen par la
Cour, une fois qu'il a été établi que le document ou
le dossier a été versé à juste titre dans le fichier de
renseignements personnels qui ne peuvent être
communiqués. A mon avis, il a plutôt conclu que la
Cour est habilitée à déterminer si un dossier a été
versé à juste titre dans un fichier inconsultable
comme le prévoit la Loi sur la protection des
renseignements personnels, S.C. 1980-81-82-83,
chap. 111, annexe II.
Pour ces motifs, j'estime qu'il n'y a pas lieu de
rendre l'ordonnance prévue à l'article 49 de la Loi.
Le recours est donc rejeté avec dépens.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.