T-6075-79
La Reine (demanderesse)
c.
Hampton Golf Club Limited (défenderesse)
RÉPERTORIÉ: CANADA C. HAMPTON GOLF CLUB LTD.
Division de première instance, juge McNair -
Saint John (Nouveau-Brunswick), 21 mai;
Ottawa, 1" octobre 1986.
Impôt sur le revenu - Calcul du revenu - Allocation du
coût en capital - Les verts et les tertres de départ d'un club de
golf ne sont pas des biens amortissables au sens de la Loi -
Ils ne constituent ni des "structures" au sens de la catégorie 3
du Règlement ni une "semblable construction en surface" au
sens de la catégorie 1 - Loi de l'impôt sur le revenu, S.C.
1970-71-72, chap. 63, art. 18(1)b), 20(1)a),(aa)-Règlements
de l'impôt sur le revenu, DORS/54-682, art. 1100(1)a)(i),(iii)
(mod. par DORS/69-503, art. 1), 1102(2), annexe B, catégories
1, 3, 8 (mod. par DORS/72-273, art. 1; 73-324, art. 4; 73-684,
art. 2) - Règlement de l'impôt sur le revenu, C.R.C., chap.
945, art. 1100(1)a)(i),(üi), 1102(2), annexe II, catégories 1, 3, 8
- Loi sur la taxe d'accise, S.R.C. 1970, chap. E-13, art. 26(4)
- Companies Act, R.S.N.B. 1952, chap. 33, catégorie 4
Finance (1909-10) Act, 1910, 10 Edw. 7, chap. 8, art. 25(2)
(R.-U.) - Assessment Act, S.N.B. 1965-66, chap. 110 - The
Plant and Machinery (Valuation for Rating) Order, 1927, St.
R. & O. 1927, No. 480.
Peu de temps après sa constitution en 1971, la société
défenderesse a entrepris de convertir son bien-fonds en un
terrain de golf de dix-huit trous. Pour ses années d'imposition
1974 et 1975, la défenderesse a réclamé une allocation du coût
en capital pour ses verts et tertres de départ pour le motif que
ceux-ci constituaient des structures au sens de l'alinéa 20(1)a)
de la Loi de l'impôt sur le revenu et des sous-alinéas
1100(1)a)(i) et (iii) du Règlement de l'impôt sur le revenu, qui
renvoient aux catégories 1 et 3 de l'annexe B des Règlements.
La défenderesse a également réclamé, en vertu de l'alinéa
20(1)aa) de la Loi, le coût de préparation des allées au titre de
dépenses d'aménagement. Le Ministre a rejeté la demande
d'allocation du coût en capital pour les verts et les tertres de
départ parce qu'ils n'étaient pas des biens amortissables. Il a
accordé, à titre de dépenses d'aménagement, quinze pour cent
du coût total de préparation des allées, des verts et des tertres
de départ. La Commission de révision de l'impôt a accordé une
allocation du coût en capital parce que les verts et les tertres de
départs constituaient une «semblable construction en surface»
au sens de la catégorie 1, mais elle souscrit à l'octroi de quinze
pour cent pour les coûts d'aménagement. La Couronne inter-
jette appel de la décision pour ce qui est de l'«amortissement»,
et la défenderesse forme un appel incident par voie de demande
reconventionnelle à l'égard des coûts d'aménagement et de
l'allocation du coût en capital.
Jugement: Il y a lieu d'accueillir l'appel de la demanderesse
et de rejeter l'appel incident par voie de demande reconvention-
nelle interjeté par la défenderesse.
La question est essentiellement de savoir si les verts et les
tertres de départ sont des entités structurelles ou des biens-
fonds. Dans l'arrêt M.R.N. et autre c. Plastibeton Inc., le juge
MacGuigan a, au nom de la majorité de la Cour d'appel
fédérale, indiqué trois critères pour déterminer l'existence d'une
structure: «1) elle doit être construite; 2) elle doit reposer sur ou
dans le sol; 3) elle ne doit pas faire "partie" d'une autre
structure». Compte tenu de ces critères et de ce qui est énuméré
à la catégorie 3, on peut conclure qu'une «structure» est quelque
chose de la nature d'une entité artificiellement construite qui
est séparée et distincte du terrain lui-même. En l'espèce, les
verts et les tertres de départ de la défenderesse ne sont pas
manifestement artificiels au point de pouvoir être facilement
distingués de l'environnement naturel du reste du terrain de
golfe. Ils font corps avec le terrain lui-même. Ils ne constituent
pas des «semblables constructions en surface» au sens de la
catégorie I.
Quant à l'appel formé par la défenderesse contre la déduc-
tion de quinze pour cent pour les frais d'aménagement, le
montant accordé pour ceux-ci est raisonnable et approprié étant
donné que les verts et les tertres de départ ne sont pas des
structures au sens de la catégorie 3, et qu'il a été reconnu au
procès que les allées ne sont pas des structures au sens de
celle-ci.
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
British Columbia Forest Products Ltd. c. Ministre du
Revenu National, [1972] R.C.S. 101; (1971), 71 DTC
5178; Superior Pre-Kast Septic Tanks Ltd. et autre c.
La Reine, [1978] 2 R.C.S. 612; (1978), 21 N.R. 73;
M.R.N. et autre c. Plastibeton Inc., [1986] 2 C.T.C. 211;
86 DTC 6400 (C.A.F.); infirmant (1985), 85 DTC 5240
(C.F. 1'» inst.).
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Cardiff Rating Authority and Cardiff Assessment Com
mittee v. Guest Keen Baldwin's Iron and Steel Co., Ld.,
[1949] 1 K.B. 385 (C.A.); Inland Revenue Commission
ers v. Smyth, [1914] 3 K.B. 406; Edinboro Co. v. U.S.,
224 F.Supp. 301 (W.D. Pa.) (1963); Acadian Pulp &
Paper Ltd. v. Minister of Municipal Affairs (1973), 6
N.B.R. (2d) 755 (C.A.).
DÉCISIONS CITÉES:
Moran & Son, Ld. v. Marsland, [1909] 1 K.B. 744;
Hobday v. Nichol, [1944] 1 All E.R. 302 (K.B.).
AVOCATS:
Paul Plourde et Bonnie F. Moon pour la
demanderesse.
Robert G. Vincent pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la
demanderesse.
McKelvey, Macaulay, Machum, Saint John
(Nouveau-Brunswick), pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE McNAIR: La présente action, intentée
par voie d'appel et d'appel incident, porte sur deux
points. Il s'agit de savoir en tout premier lieu si les
verts et les tertres de départ sont des biens amor-
tissables au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu
[S.R.C. 1952, chap. 148 (mod. par S.C. 1970-
71-72, chap. 63, art. 1)] et des Règlements
[Règlements de l'impôt sur le revenu, DORS/54-
682]. Il faut en second lieu déterminer si les
dépenses d'aménagement sont déductibles. Appel
est interjeté de la décision par laquelle la Commis
sion de révision de l'impôt a, le 27 août 1979,
accueilli en partie l'appel formé par la défende-
resse contre les cotisations d'impôt sur le revenu
établies pour les années d'imposition 1974 et 1975.
L'audition des appels constitue toujours un procès
de novo lorsque le point litigieux est la validité de
la cotisation établie par le Ministre.
La contribuable a réclamé une allocation du
coût en capital pour ses verts et tertres de départ
pour le motif que ceux-ci constituaient des structu
res au sens de la Loi et des Règlements, et elle a
réclamé le coût de construction des allées au titre
de dépenses d'aménagement. Le Ministre avait
rejeté la demande d'allocation du coût en capital
pour les verts et tertres de départ parce qu'ils
n'étaient pas des biens amortissables. Il avait
accordé, à titre de dépenses d'aménagement,
quinze pour cent du coût total de construction des
allées, des verts et tertres de départ. La Commis
sion de révision de l'impôt a accordé une allocation
du coût en capital pour les verts et tertres de
départ parce qu'ils étaient des biens de la nature
d'une «semblable construction en surface» au sens
de la catégorie 1 de l'annexe B des Règlements,
mais elle a souscrit à l'octroi de quinze pour cent
pour les coûts d'aménagement. La Couronne inter-
jette appel de la décision pour ce qui est de
l'«amortissement», et la défenderesse forme un
appel incident par voie de demande reconvention-
nelle à l'égard des coûts d'aménagement et de
l'allocation du coût en capital, faisant valoir, en ce
qui concerne celle-ci, que les verts et tertres de
départ sont des structures au sens de la catégorie 3
de l'annexe B.
La défenderesse est une société qui possède et
exploite un terrain de golf de dix-huit trous à
Hampton (Nouveau-Brunswick), comprenant un
chalet, un appentis, des allées, des verts, des tertres
de départ et des terrains environnants. La société a
été constituée en 1971 en vertu de la Companies
Act [R.S.N.B. 1952, chap. 33] du Nouveau-Bruns-
wick. Peu de temps après, elle a entrepris de
convertir son bien-fonds en un terrain de golf. En
1974, neuf des dix-huit trous avaient été achevés.
Les verts et tertres de départ sont des éléments
essentiels et relativement permanents d'un terrain
de golf. Élevés jusqu'à la hauteur requise, après
l'excavation initiale, ils sont composés de couches
successives de terre. Il s'agit habituellement d'une
couche de gravier ou d'un remblai de grosses
pierres que recouvre une couche de terre de sous-
sol. Puis vient une couche de terre végétale d'à peu
près neuf pouces. Finalement, une couche de semis
d'une épaisseur d'environ un pouce et demi est
épandue sur la terre végétale. La conception et la
construction des verts et tertres de départ est
compliquée et prend beaucoup de temps. Il faut
veiller à ce qu'il y ait un bon système de drainage.
La construction des tertres de départ ressemble à
celle des verts, bien qu'elle soit légèrement moins
compliquée. Les tertres de départ et les verts sont
les plates-formes utilisées par les golfeurs pour
frapper leurs coups et atteindre les trous. On a fait
venir de l'extérieur et par camion pratiquement
tous les matériaux de construction destinés aux
verts et aux tertres de départ.
Il me semble que le point capital en l'espèce est
de savoir si les verts et les tertres de départ sont
des composants naturels artificiellement créés, que
l'on peut distinguer du terrain lui-même, ou s'ils
sont simplement le résultat de la nouvelle configu
ration du terrain. L'avocat de la défenderesse a
reconnu au procès que les allées n'étaient plus en
litige. En bref, il s'agit de savoir si les verts et les
tertres de départ sont des entités structurelles ou
des biens-fonds.
Sont applicables les dispositions des alinéas
18(1)b), 20(1)a) et 20(1)aa) de la Loi de l'impôt
sur le revenu, de l'article 1100 des Règlements
[mod. par DORS/69-503, art. 1] et de l'annexe B
de ce dernier, qui est maintenant l'annexe II [du
Règlement de l'impôt sur le revenu, C.R.C., chap.
945]. Pour des raisons de commodité, je me référe-
rai à l'annexe II.
L'alinéa 18(1)b) de la Loi de l'impôt sur le
revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63, est ainsi rédigé:
18. (1) Dans le calcul du revenu du contribuable, tiré d'une
entreprise ou d'un bien, les éléments suivants ne sont pas
déductibles:
b) une somme déboursée, une perte ou un remplacement de
capital, un paiement à titre de capital ou une provision pour
amortissement, désuétude ou épuisement, sauf ce qui est
expressément permis par la présente Partie;
Les alinéas 20(1)a) et aa) de la Loi portent:
20. (1) Nonobstant les dispositions des alinéas 18(1)a), b) et
h), lors du calcul du revenu tiré par un contribuable d'une
entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition, peuvent
être déduites celles des sommes suivantes qui se rapportent
entièrement à cette source de revenus ou la partie des sommes
suivantes qui peut raisonnablement être considérée comme s'y
rapportant:
a) la partie, si partie il y a, du coût en capital des biens
supporté par le contribuable ou le montant, si montant il y a,
du coût en capital des biens, supporté par le contribuable,
que le règlement autorise;
aa) une somme payée par le contribuable dans l'année pour
l'aménagement de parterres situés autour d'un bâtiment ou
d'une autre construction du contribuable que ce dernier
utilise principalement en vue de tirer un revenu du bâtiment
ou de cette construction, ou d'une entreprise ou en vue de
leur faire produire un revenu;
Les dispositions des Règlements qui sont parti-
culièrement pertinentes sont les sous-alinéas
1100(1)a)(i) et (iii) [le texte ci-dessous est pris
dans C.R.C., chap. 945], qui portent:
1100. (1) Aux fins de l'alinéa 20(1)a) de la Loi, il est alloué
au contribuable dans le calcul de son revenu d'une entreprise ou
de biens, selon le cas, des déductions pour chaque année
d'imposition égales
Taux
a) au montant qu'il peut réclamer à l'égard de biens de
chacune des catégories suivantes, comprises dans l'annexe II,
sans dépasser, à l'égard des biens
(i) de la catégorie 1, 4 pour cent,
(iii) de la catégorie 3, 5 pour cent,
du montant qui reste, s'il en est, après déduction des montants,
établis en vertu des articles 1107 et 1110 l'égard de la
catégorie, sur le coût en capital non déprécié, pour lui, des biens
de la catégorie, à la fin de l'année d'imposition (avant d'opérer
quelque déduction en vertu du présent paragraphe pour l'année
d'imposition);
La catégorie 1 et la catégorie 3 [encore une fois,
le texte cité est pris dans C.R.C., chap. 945]
susmentionnées sont définies à l'annexe II du
Règlement [auparavant l'annexe B], qui prévoit
notamment:
ANNEXE II
ALLOCATIONS DU COÛT EN CAPITAL
CATÉGORIE 1
(4 pour cent)
Les biens non compris dans aucune autre catégorie constitués
par
g) un chemin, un trottoir, une piste d'envol, un parc de
stationnement, une aire d'emmagasinage ou une semblable
construction en surface, acquis avant le 26 mai 1976;
CATÉGORIE 3
(5 pour cent)
Les biens non compris dans aucune autre catégorie constitués
par
a) un édifice ou autre structure, y compris les parties consti-
tuantes, notamment les fils électriques, la tuyauterie, les
réseaux extincteurs, le matériel pour la climatisation, les
appareils de chauffage, l'agencement pour l'éclairage, les
ascenseurs et escaliers roulants;
La Couronne soutient principalement que la
construction des tertres de départ et des verts n'est
rien plus qu'un aménagement paysager modifiant
la configuration du terrain lui-même, ce qui n'est
pas amortissable en raison de l'effet combiné du
paragraphe 1102(2) des Règlements et de la caté-
gorie 8 [mod. par. DORS/72-273, art. 1; 73-324,
art. 4; 73-684, art. 2] de l'annexe II de ces der-
niers. L'avocat de la Couronne soutient en outre
que la règle ejusdem generis limite le général à la
catégorie particulière énumérée à l'alinéa g) de la
catégorie 1, de manière à exclure tout ce qui ne
participe pas d'une «semblable construction en sur
face» servant de chemin pour l'homme et les véhi-
cules. En conséquence, la seule déduction permise
est celle prévue à l'alinéa 20(1)aa), déduction au
titre de laquelle le Ministre a accordé une somme
raisonnable.
Partant de la prémisse contraire, la défenderesse
soutient que les verts et les tertres de départ sont
construits à partir d'éléments naturels conçus dans
le seul dessein d'assembler des structures artificiel-
les de dimension appréciable et relativement per-
manentes, dotées d'un bon système de drainage et
qui serviront de surface de jeu ou de plates-formes
pour les golfeurs. L'avocat de la défenderesse fait
valoir qu'il y a des cas où ce qui a été considéré
comme des structures était composé de terre, et il
cite plusieurs décisions à l'appui de cet argument:
Moran & Son, Ld. v. Marsland, [1909] 1 K.B.
744; et Hobday v. Nichol, [1944] 1 All E.R. 302
(K.B.). Dans l'affaire Moran, des réservoirs sur un
plancher de béton, avec des murs de briques ren-
forcés par du béton et de la terre, couverts de
voûtes en brique qui elles-mêmes étaient couvertes
d'une couche de béton et de terre au sommet, ont
été considérés comme des [TRADUCTION] «bâti-
ments ou structures» au sens de la loi régissant les
bâtiments. Dans Hobday v. Nichol, des réservoirs
de tôle galvanisée remplis de terre et de blocailles,
qui ont été érigés derrière un mur de béton le long
d'une rivière, ont été considérés comme des [TRA-
DUCTION] «structures» selon l'acception ordinaire
de ce terme et correspondaient suffisamment au
sens que leur donne un règlement sur le drainage
pour justifier une condamnation sous le régime de
ce règlement.
L'avocat de la défenderesse reconnaît que le plus
gros obstacle que le club de golf doit surmonter est
que, tout compte fait, les structures achevées des
verts et tertres de départ ressemblent beaucoup à
la structure naturelle environnante, c'est-à-dire au
terrain lui-même.
La Cour suprême du Canada a posé le principe
que le terme «structure» employé dans la catégorie
3 ne doit pas s'interpréter ejusdem generis avec le
terme «édifice» auquel il est associé: voir les arrêts
British Columbia Forest Products Ltd. c. Ministre
du Revenu National, [1972] R.C.S. 101; (1971),
71 DTC 5178; et Superior Pre-Kast Septic Tanks
Ltd. et autre c. La Reine, [1978] 2 R.C.S. 612;
(1978), 21 N.R. 73. Le sens du terme «structure»
doit être défini en fonction de son utilisation dans
la disposition législative en question. Il convient
toutefois d'examiner ce qu'on a considéré comme
une structure dans le contexte d'autres lois fiscales:
voir l'affaire Superior Pre-Kast, précitée, aux
pages 619 R.C.S.; 79 N.R.
L'arrêt Superior Pre-Kast portait sur une
demande d'exemption de la taxe de vente. Dans
cette affaire, il s'agissait uniquement de savoir si
une fosse septique était une «structure» au sens du
paragraphe 26(4) de la Loi sur la taxe d'accise
[S.R.C. 1970, chap. E-13] où figure l'expression
«un bâtiment ou une autre structure». L'exemption
a été accordée.
Au nom de la Cour, le juge Martland s'est
prononcé en ces termes aux pages 619 et 620
R.C.S.; 79 et 80 N.R.:
Avec égards, le fait qu'une fosse septique soit utilisée comme
partie du système sanitaire d'une résidence et non sur une
canalisation d'égout n'en fait pas une partie de la résidence. Je
considérerais comme une structure en soi un château d'eau
construit pour emmagasiner de l'eau à l'usage d'une résidence.
Il ne fait pas partie du bâtiment bien qu'il soit construit à
l'usage de ses occupants.
Les fosses septiques en question ici sont des choses qui sont
construites. Elles sont conçues pour être enfouies sous terre et
sont intégrées au terrain dans lequel elles sont installées. Leur
fabricant est en concurrence avec des personnes qui construi-
sent des fosses analogues à pied d'oeuvre. Selon moi, les fosses
sont des structures au sens du par. 26(4) et les appelantes ont
droit à l'exemption prévue par ce paragraphe.
Pour interpréter le terme «structure», les tribu-
naux citent très souvent l'arrêt Cardiff Rating
Authority and Cardiff Assessment Committee v.
Guest Keen Baldwin's Iron and Steel Co., Ld.,
[1949] 1 K.B. 385 (C.A.). Le point à trancher
était de savoir si des fours oscillants mobiles dans
une aciérie constituaient des [TRADUCTION] «bâti-
ments ou des structures» au sens de la catégorie 4
de l'annexe de l'ordonnance appelée The Plant and
Machinery (Valuation for Rating) Order, 1927
[St. R. & O. 1927, No. 480], de manière à être
imposables sous le régime de cette ordonnance. Il a
été jugé qu'ils l'étaient.
Le lord juge Denning tient ces propros à la page
396:
[TRADUCTION] En l'espèce, le recorder a, semble-t-il, estimé
qu'ils n'étaient pas des structures ou n'étaient pas de la nature
des structures en raison de leur mobilité. J'estime qu'il a fait
fausse route. Une structure, c'est quelque chose qui est cons-
truit, mais les choses construites ne sont pas toutes des structu
res. Par exemple, les navires sont construits, mais ce ne sont pas
des structures. Une structure, c'est une chose de grandes
dimensions, construite à partir de pièces distinctes et destinée à
demeurer en permanence sur des fondations permanentes, mais
c'est une structure même si certaines de ses parties constituan-
tes peuvent être déplacées, par exemple, autour d'un pivot; ainsi
un moulin à vent ou une table tournante est une structure. Une
chose qui ne demeure pas en permanence dans un endroit n'est
pas une structure, mais elle peut être «de la nature d'une
structure» si elle a un emplacement permanent et a toutes les
qualités d'une structure, bien que, occasionnellement, on la
déplace sur son emplacement ou hors de celui-ci.
La décision anglaise antérieure Inland Revenue
Commissioners v. Smyth, [1914] 3 K.B. 406 cons-
tituait un cas limite où il s'agissait de savoir si une
route était une [TRADUCTION] «structure» au sens
du paragraphe 25(2) de la Finance (1909-10) Act,
1910 [10 Edw. 7, chap. 8] (R.-U.), et la Cour a
jugé qu'elle l'était.
Le juge Scrutton a établi quelques analogies
intéressantes et il a résumé son concept de struc
ture de la façon suivante aux pages 421 et 422:
[TRADUCTION] J'estime qu'il s'agit d'une question de fait dans
chaque cas; bien qu'il soit plus solide que le sol environnant
grâce à plusieurs gravelages, un chemin de gravier n'est pas à
mon avis une structure, alors que les routes bien connues en
Suisse, au Tyrol et en Italie, en partie construites sur des flancs
de montagne, en partie creusées dans des rochers solides, sont
clairement des structures à mon avis, tout comme les composi
tions complexes de béton, de pavés en bois et de goudron qu'on
utilise pour la dense circulation automobile d'aujourd'hui.
Entre les deux, il existe toute une variété de degrés de solidité
et de permanence ... J'estime qu'une structure est quelque
chose qui est artificiellement érigé, construit, assemblé, d'une
certaine dimension et permanence, qui est maintenu comme
une installation artificielle, ou qui ne l'est pas mais dont les
limites demeurent discernables par rapport au sol naturel envi-
ronnant. Déterminer la dimension et la permanence nécessaires
est une question de fait dans chaque cas.
Dans l'affaire Edinboro Co. v. U.S., 224
F.Supp. 301 (W.D. Pa.) (1963), sur laquelle la
demanderesse s'est appuyée dans une grande
mesure, la question était de savoir si la contribua-
ble pouvait réclamer une déduction pour amortis-
sement à l'égard du prix d'achat des bâtiments et
de l'équipement d'un terrain de golf de dix-huit
trous et pour le coût des améliorations. La Cour a
rejeté la déduction pour amortissement réclamée.
Elle a jugé que le terrain lui-même ne pouvait faire
l'objet d'une déduction pour amortissement aux
fins d'impôt sur le revenu puisqu'il avait une durée
illimitée. On a, par analogie, appliqué le même
principe au coût des améliorations des tertres de
départ, des verts, des allées, des trappes de sable et
des autres accidents de terrain.
Le juge suppléant Willson a déclaré à la page
303:
[TRADUCTION] La Cour est d'accord avec la prétention de
l'avocat du gouvernement selon laquelle on ne peut distinguer
les tertres de départ, les verts, les allées, les trappes de sable, et
les autres accidents de terrain du terrain qui est façonné et
refait pour les former. Tout comme le terrain, ils sont d'une
durée illimitée.
L'affaire Acadian Pulp & Paper Ltd. v. Minis
ter of Municipal Affairs (1973), 6 N.B.R. (2d)
755 (C.A.), une décision du Nouveau-Brunswick,
est tout à fait pertinente. Il s'agissait de savoir si
un embarcadère et un mur de soutènement étaient
des [TRADUCTION] «structures» au sens de la
Assessment Act [S.N.B. 1965-66, chap. 110] de
cette province, ou s'ils tombaient dans la catégorie
des terrains.
Le juge en chef du Nouveau-Brunswick Hughes
a conclu à la page 759:
[TRADUCTION] Bien que construit à partir de pièces consti-
tutives composées de coffrets de béton dans et sur lesquels on a
mis des pierres, du gravier et des remblais, l'embarcadère de
l'appelante ne peut, à mon avis, être distingué du reste de
l'emplacement sur lequel est construite la raffinerie, sauf que
l'embarcadère a, sur son côté extérieur, un mur de soutènement
vertical fait de tôle ondulée résistante. L'embarcadère constitue
un prolongement, dans le port, de l'emplacement de la raffine-
rie construit par l'ajout de remblais stabilisés par des blocs de
béton et protégés contre l'érosion par le mur de soutènement de
tôle ondulée. A mon avis, exception faite du mur de soutène-
ment, l'embarcadère constitue un terrain et devrait être évalué
selon les principes d'évaluation des terrains et non en tant que
structure d'après sa contenance cubique. [C'est moi qui
souligne.]
Dans l'affaire Plastibeton Inc. v. M.R.N. et
autre (1985), 85 DTC 5240 (C.F. 1" inst.) le juge
Dubé a statué que les bandes médianes de poly-
mère installées au centre du boulevard Métropoli-
tain à Montréal étaient des structures et bénéfi-
ciaient de l'exemption de la taxe de vente prévue
au paragraphe 26(4) de la Loi sur la taxe d'accise,
mais que les panneaux de polymère servant de
divisions sur le boulevard ne l'étaient pas. Le juge
a fait un examen approfondi de la jurisprudence,
et il a recouru aux définitions du mot «structure»
qui figurent habituellement dans les dictionnaires.
L'affaire a été déférée à la Cour d'appel fédérale
qui a statué que les bandes médianes de polymère
ne pouvaient être exemptes de la taxe de vente en
tant que «autre structure» au sens du paragraphe
26(4) de la Loi, pour le motif qu'il ne s'agissait pas
d'une structure distincte: M.R.N. et autre c.
Plastibeton Inc., [1986] 2 C.T.C. 211; 86 DTC
6400.
Citant l'opinion du juge Martland dans l'affaire
Superior Pre-Kast Septic Tanks, précitée, où il
était question d'une fosse septique, le juge Mac-
Guigan a déclaré aux pages 214 C.T.C.; 6402
DTC:
[TRADUCTION] Il me semble que, dans cette analyse, le juge
Martland adopte trois critères pour déterminer l'existence
d'une structure: (1) elle doit être construite; (2) elle doit
reposer sur ou dans le sol; (3) elle ne doit pas «faire partie»
d'une autre structure.
Le juge a en outre conclu aux pages 215 C.T.C.;
6402 DTC:
[TRADUCTION] Dans la présente affaire, le juge de première
instance a tenu compte suffisamment de la caractéristique
positive mais non de la négative. La bande médiane n'a pas
d'autre but que de faire partie de la route. C'est une caractéris-
tique ordinaire et même habituelle de ce genre de route. Elle
n'est pas distincte de la route comme l'est une tour ou une
cabine, mais elle est exactement de même étendue qu'elle, car
elle n'a ni forme ni existence distinctes. C'est une partie ou un
accessoire de la route, et elle ne peut donc pas être définie
comme une «autre structure» pour l'application de l'alinéa
24(4)a).
Le juge Marceau s'est dit d'accord avec le résul-
tat, mais il a exprimé des réserves quant à l'appro-
bation, par son collègue, des critères d'application
générale servant à déterminer l'existence d'une
«structure», ces critères allant au-delà des faits
particuliers survenus dans l'arrêt Superior Pre-
Kast. Il a préféré aborder le problème de la diffé-
renciation structurale du point de vue de la fonc-
tion plutôt que de la construction. Bien entendu, je
dois respecter l'opinion majoritaire.
Compte tenu de ce qui est énuméré à l'alinéa a)
de la catégorie 3 des Règlements et de l'exclusion
expresse des terrains dans les autres dispositions
réglementaires, les mots «édifice ou autre struc
ture» figurant à cet alinéa évoquent davantage, à
mon avis, quelque chose de la nature d'une entité
ou structure artificiellement construite qui est
séparée et distincte du terrain lui-même. En ce qui
concerne plus particulièrement le cas d'un terrain
de golf, on peut facilement considérer comme une
structure des ouvrages artificiels tels qu'un pavil-
lon, une palissade, un étançon doté d'un éclairage
extérieur, un abri contre la pluie et autres cons
tructions de ce genre. De même, il est difficile de
voir dans les verts et tertres de départ quelque
chose qui ne fait pas partie des allées et du paysage
environnant. J'estime que les verts et tertres de
départ de la défenderesse ne sont pas manifeste-
ment artificiels au point de pouvoir être facilement
distingués de l'environnement naturel du reste du
terrain de golf. Bref, ils font corps avec le terrain
lui-même. En conséquence, je conclus que les verts
et tertres de départ ne sont pas des structures au
sens de la catégorie 3 des Règlements.
À propos de la catégorie 1 des Règlements, je ne
saurais conclure que les verts et tertres de départ
peuvent être qualifiés de construction de surface
semblable à un chemin, à un trottoir, à une piste
d'envol etc., selon la terminologie qui y est utilisée.
J'estime donc qu'ils ne sont pas de semblables
constructions en surface au sens de la catégorie 1.
Le dernier point soulevé par la défenderesse
porte sur la déduction de quinze pour cent pour les
frais d'aménagement accordée par le Ministre en
vertu de l'alinéa 20(1)aa) de la Loi de l'impôt sur
le revenu. Ainsi qu'il a été dit, on a reconnu au
procès que les allées ne sont pas des structures au
sens de la catégorie 3 des Règlements. J'ai conclu
que les verts et les tertres de départ ne sont pas des
structures au sens de celle-ci. Dans les circons-
tances, je considère que le montant accordé par le
Ministre pour les frais d'aménagement est raison-
nable et approprié.
Pour les motifs qui précèdent, l'appel de la
demanderesse est accueilli avec dépens. L'appel
incident de la défenderesse, par voie de demande
reconventionnelle, est rejeté avec dépens. Un juge-
ment sera rendu dans ce sens.
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