A-242-81
J. M. O'Grady (appelant) (intimé)
c.
Byron George Whyte (intimé) (appelant)
Cour d'appel, juges Heald et Urie, juge suppléant
Kelly—Toronto, 20 mai; Ottawa, ler juin 1982.
Contrôle judiciaire — Brefs de prérogative — Mandamus
— Immigration — Appel est formé contre l'ordonnance par
laquelle la Division de première instance a décerné un bref de
mandamus enjoignant au directeur du Centre d'immigration
d'instruire la demande de parrainage faite par l'intimé pour le
compte de sa fille en vue de l'admission de cette dernière au
Canada à titre de résidence permanente, et de rendre une
décision à ce sujet — L'intimé a soumis au Centre d'immigra-
tion du Canada une demande de parrainage pour le compte de
sa fille — Aucune demande de droit d'établissement n'a été
formulée — L'appelant a refusé d'instruire la demande de
l'intimé — Appel accueilli au motif qu'en l'absence d'une
demande de droit d'établissement, l'appelant n'était pas tenu
de rendre une décision sur la demande de l'intimé — Loi sur
l'immigration, S.R.C. 1952, chap. 325 — Loi sur l'immigra-
tion de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52, art. 9(1), 79(1) —
Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, art.
2(1), 41(1).
L'intimé est un citoyen canadien naturalisé. Sa fille, née d'un
concubinage à la Jamaïque, a été admise au Canada à titre de
visiteur. A l'expiration de la deuxième prorogation du visa de
visiteur de la fille, l'intimé a soumis au Centre local d'immigra-
tion du Canada une demande de parrainage pour le compte de
celle-ci en vue de son admission à titre d'immigrant reçu. A
aucun moment, ni la fille ni une personne représentant celle-ci
n'a fait de demande de droit d'établissement. L'appelant, direc-
teur du Centre, a refusé d'instruire la demande de parrainage
au motif que, la fille étant née d'un concubinage, elle n'apparte-
nait pas à la «catégorie de la famille» selon la définition de la
Loi sur l'immigration de 1976. L'appelant a également avisé
l'intimé qu'il n'était aucunement en droit d'interjeter appel de
la décision, puisque seuls ceux qui avaient parrainé une
demande de droit d'établissement présentée par une personne
appartenant à la «catégorie de la famille» avaient ce droit.
L'intimé a saisi la Division de première instance d'une requête,
et a obtenu un bref de mandamus enjoignant à l'appelant
d'instruire sa demande de parrainage. L'appelant a fait appel
de l'ordonnance au motif qu'en l'absence d'une demande cor-
respondante de droit d'établissement, il n'était nullement tenu
de rendre une décision sur la demande de parrainage de
l'intimé. Il a soutenu en outre que puisque le bref de mandamus
peut être décerné pour forcer une autorité publique à s'acquit-
ter de ses tâches seulement lorsque le requérant a établi qu'il
existe une obligation envers lui et qu'au moment de la demande
de redressement, l'autorité publique est tenue d'exécuter cette
obligation, ce bref ne devrait pas être accordé en l'espèce.
Arrêt: l'appel est accueilli. Le paragraphe 79(1) de la Loi sur
l'immigration de 1976, à la différence de la Loi sur l'immigra-
tion de 1952, où il était prévu qu'une personne pouvait parrai-
ner un particulier, prévoit le parrainage d'une demande de droit
d'établissement. Donc, une demande de parrainage n'est valide
que lorsqu'elle se fonde sur une demande de droit d'établisse-
ment. Tant qu'une demande de droit d'établissement n'a pas été
faite, aucun agent d'immigration ne peut rendre de décision sur
une demande de parrainage et n'est donc pas tenu de rendre
une telle décision. Une ordonnance de mandamus ne sera pas
accordée pour forcer un agent à accomplir quelque chose qu'il
n'est pas encore tenu de faire.
JURISPRUDENCE
DÉCISION APPLIQUÉE:
Karavos v. The City of Toronto et al., [1948] O.W.N. 17
(C.A.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Lawrence et autre c. Le ministre de l'Emploi et de
l'Immigration et autre, [1980] I C.F. 779 (1" inst.); Le
ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration c.
Tsiafakis, [1977] 2 C.F. 216; 73 D.L.R. (3d) 139 (C.F.
Appel); Jiminez-Perez c. Le ministre de l'Emploi et de
l'Immigration, Cour fédérale, T-3232-80, jugement en
date du 9 juillet 1980; [1983] 1 C.F. 163 (C.A.).
DÉCISIONS CITÉES:
Re Regina and Jones (Nos. 1 and 2) et al. (1974), 2 O.R.
(2d) 741 (C.A. Ont.); Jakobs and Filimowski v. City of
Winnipeg, [1974] 2 W.W.R. 577 (C.A. Man.).
AVOCATS:
B. R. Evernden pour l'appelant (intimé).
B. T. Pennell pour l'intimé (appelant).
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelant (intimé).
Pennell, Underwood & Ion, Brantford, pour
l'intimé (appelant).
Ce gui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE URIE: Appel est formé contre l'ordon-
nance par laquelle la Division de première instance
[[1982] 1 C.F. 103] a décerné un bref de manda-
mus enjoignant à l'appelant ou à tout autre agent
d'immigration dûment désigné d'instruire la
demande de parrainage faite par l'intimé pour le
compte de sa fille putative, Joan Elene Whyte, en
vue de l'admission de cette dernière au Canada à
titre de résidente permanente, et de rendre une
décision à ce sujet.
Les faits pertinents, dont aucun n'a fait l'Objet
d'une contestation, sont les suivants. À toutes les
époques en cause, l'appelant travaillait au Centre
d'immigration du Canada à Hamilton (Ontario) à
titre de directeur. L'intimé, originaire de Jamaï-
que, est maintenant citoyen canadien naturalisé. Il
réside à Brantford (Ontario) avec sa femme et sa
fille adoptive Sharon. Joan Elene Whyte est la fille
de l'intimé, née d'un concubinage à la Jamaïque.
Le 15 août 1980, elle a été admise au Canada à
titre de visiteur. Après deux prorogations, son visa
de visiteur a expiré le 10 novembre 1980. Le 10
octobre 1980, l'intimé a soumis aux agents d'immi-
gration d'Hamilton une formule intitulée «Parrai-
nage d'une demande par un membre de la catégo-
rie de la famille» au profit de Joan Elene Whyte.
Le 16 octobre 1980, l'appelant avisa l'intimé par
lettre que la demande de parrainage ne pouvait
être instruite parce que Joan Elene Whyte n'était
pas une personne de la catégorie de la famille selon
la définition que donne la Loi sur l'immigration de
1976, S.C. 1976-77, chap. 52. On voulait sans
doute dire qu'elle n'était pas une «fille» au sens de
la définition du paragraphe 2(1) du Règlement sur
l'immigration de 1978, DORS/78-172, dont la
partie applicable est ainsi rédigée:
2.(1)...
«fille», par rapport à toute personne, désigne un enfant
a) issue du mariage de cette personne et qui posséderait l'état
d'enfant légitime si son père avait été domicilié dans une
province du Canada à sa naissance,
Par lettre en date du 20 octobre 1980, l'avocat
de l'intimé, en réponse à la lettre du 16 octobre,
exposa que son client n'admettait pas que Joan
Elene Whyte n'appartienne pas à la catégorie de la
famille, et demanda que sa lettre soit considérée
comme tenant lieu d'avis d'appel. L'appelant
répondit à cette lettre en se référant à la définition
de «fille» susmentionnée, et fit remarquer que puis-
que l'intimé n'avait pas épousé la mère de Joan
Whyte, il n'y avait donc pas entre eux un lien de
famille. Puisque l'article 79 de la Loi n'autorise
que ceux qui ont parrainé une demande de droit
d'établissement présentée par une personne appar-
tenant à la catégorie de la famille à faire appel
contre le rejet de la demande de parrainage, M.
Whyte n'avait donc aucun droit d'appel.
L'intimé déposa alors un avis introductif tendant
à l'obtention d'une ordonnance décernant un bref
de mandamus, à la suite duquel a été rendue
l'ordonnance qui fait l'objet du présent appel.
Avant d'aller plus loin, il convient de souligner
qu'à aucun moment une demande de résidence
permanente n'a été faite ni à la Jamaïque, ni au
Canada, ni dans aucun autre pays, par Joan Elene
Whyte ou en son nom. Ni aucun décret a-t-il été
pris sous le régime du paragraphe 115(2) de la Loi
pour la dispenser de la condition, imposée par le
paragraphe 9(1), d'obtenir un visa avant de se
présenter à un point d'entrée, parce que son admis
sion devrait être facilitée ou pour des considéra-
tions d'ordre humanitaire.
Le premier moyen pris par l'avocat de l'appelant
pour contester l'ordonnance est que le bref de
mandamus ne peut être décerné pour forcer les
autorités publiques à s'acquitter de leurs tâches
que lorsque, entre autres, celui qui sollicite une
telle ordonnance a établi qu'il existe une obligation
envers lui et que, au moment où le redressement
est demandé, les autorités publiques sont tenues
d'exécuter cette obligation. A l'appui de cet argu
ment, l'avocat s'est appuyé sur la décision rendue
par la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire
Karavos v. The City of Toronto et al.' où, à la
page 18, le juge d'appel Laidlaw dit ceci:
[TRADUCTION] Il y a tout lieu de mentionner dès le début
certaines règles fondamentales et bien comprises relatives au
redressement par voie de bref de mandamus. Ce redressement
est à bon droit appelé et réputé un redressement extraordinaire;
la Cour ne le décerne pas si celui qui le sollicite a quelque autre
recours adéquat. Ce bref vise à suppléer à l'absence d'autres
voies de recours légales. Il convient de s'en servir pour venir à
bout de l'inaction ou de l'incurie de personnes à qui incombe
l'exercice de fonctions à caractère public. Toutefois, la partie
plaignante doit établir clairement le droit dont la protection est
demandée, et une ordonnance n'est jamais accordée dans des
cas douteux: High's Extraordinary Legal Remedies, 3' éd.
1896, p. 12, art. 9. Je n'essaie pas de faire un résumé exhaustif
des règles qui guident la Cour en matière de demande de bref
de mandamus, mais je vais exposer brièvement certaines d'en-
tre elles qui s'appliquent particulièrement en l'espèce. Pour que
le redressement puisse être accordé, celui qui le sollicite doit
établir ce qui suit: (1) «un droit clair et licite de faire accomplir
la chose dont on demande l'exécution, de la manière demandée,
et par la personne qui fait l'objet de la demande de redresse-
ment»: High, op. cit., p. 13, art. 9; voir p. 15, art. 10. (2)
«L'obligation dont on demande l'exécution forcée par voie de
mandamus doit être née et doit incomber au fonctionnaire au
moment de la demande de redressement, et le bref ne sera pas
accordé pour forcer l'accomplissement de quelque chose qu'il
n'est pas encore tenu de faire»: ibid., p. 44, art. 36. (3) Cette
obligation doit être de nature purement ministérielle, c'est-à-
dire qu'elle doit «incomber manifestement à un fonctionnaire en
vertu d'une loi ou de ses fonctions, et à l'égard de laquelle il n'a
aucun pouvoir discrétionnaire»: ibid., p. 92, art. 80. (4) Il doit y
avoir une demande et un refus d'accomplir l'acte dont l'exécu-
tion forcée est sollicitée par voie de recours légale: ibid., p. 18,
art. 13.
1 [1948] O.W.N. 17 (C.A.).
Ce passage a été cité avec approbation dans
l'affaire Re Regina and Jones (Nos. 1 and 2) et
al. 2 ; la Cour d'appel du Manitoba l'a également
cité dans l'arrêt Jakobs and Filimowski v. City of
Winnipeg 3 . On peut, à juste titre, dire de ce pas
sage qu'il énonce les règles à appliquer lorsqu'une
ordonnance de la nature d'un bref de mandamus
est sollicitée. Se fondant sur ces règles, l'appelant
fait valoir que tant qu'une demande de droit d'éta-
blissement n'a pas été faite, aucun agent d'immi-
gration n'est tenu de rendre une décision à l'égard
d'une demande de parrainage d'un membre de la
catégorie de la famille. L'avocat de l'appelant s'est
appuyé sur les paragraphes 9(1) et 79(1) de la Loi
et sur le paragraphe 41(1) du Règlement pour
justifier cette prétention. Ces paragraphes sont
ainsi conçus:
9. (1) Sous réserve des dispositions réglementaires, tout
immigrant et tout visiteur doivent demander et obtenir un visa
avant de se présenter à un point d'entrée.
79. (1) Un agent d'immigration ou un agent des visas peut
rejeter une demande parrainée de droit d'établissement présen-
tée par une personne appartenant à la catégorie de la famille,
au motif que
a) le répondant ne satisfait pas aux exigences des règlements
relatifs aux répondants, ou
b) la personne appartenant à la catégorie de la famille ne
satisfait pas aux exigences de la présente loi ou des
règlements.
Le répondant doit alors être informé des motifs du rejet.
41. (1) Lorsque l'agent d'immigration rejette une demande
parrainée de droit d'établissement présentée par une personne
appartenant à la catégorie de la famille, il doit,
a) lorsque le rejet de la demande est fait d'après les motifs
visés à l'alinéa 79(1)a) de la Loi, donner au répondant, et
b) lorsque le rejet de la demande est fait d'après les motifs
visés à l'alinéa 79(1)b) de la Loi, donner à la personne
appartenant à la catégorie de la famille,
un résumé des renseignements sur lesquels se fondent les rai-
sons de son rejet.
Il est clair que celui qui sollicite un droit d'éta-
blissement doit obtenir un visa avant de se présen-
ter à un point d'entrée à moins qu'il n'en soit
dispensé, ce qui n'est pas le cas de Joan Elene
Whyte. Il est également clair que le paragraphe
79(1) de la Loi, à la différence de la Loi sur
2 (1974), 2 O.R. (2d) 741 (C.A. Ont.).
3 [1974] 2 W.W.R. 577à la p. 585.
l'immigration, S.R.C. 1952, chap. 325, où il était
prévu qu'une personne pouvait parrainer un parti-
culier, exige qu'il s'agisse d'un parrainage d'aune
demande de droit d'établissement». Le paragraphe
41(1) du Règlement étaie cette interprétation.
Autrement dit, jusqu'à ce qu'une demande de droit
d'établissement soit faite, il ne saurait y avoir de
demande de parrainage. Donc, tant qu'il n'y a pas
de demande de droit d'établissement, on ne saurait
requérir les agents d'immigration de rendre une
décision à l'égard d'une demande de parrainage,
puisque la condition fondamentale d'une demande
de droit d'établissement n'est pas encore remplie.
Aussi, un agent d'immigration n'est-il nullement
obligé de rendre une décision, et une ordonnance
de la nature d'un bref de mandamus «ne sera pas
accordé[e] pour forcer l'accomplissement de quel-
que chose qu'il n'est pas encore tenu de faire» 4 .
Au cours des plaidoiries, l'avocat de l'intimé
s'est appuyé sur la décision rendue par la Division
de première instance de cette Cour dans l'affaire
Lawrence et autre c. Le ministre de l'Emploi et de
l'Immigration et autres. Dans cette affaire, Law-
rence, citoyen américain, qui s'était évadé de
prison aux Etats-Unis, fut déclaré coupable de
quatre actes criminels commis au Canada. Il se
maria par la suite avec une citoyenne canadienne.
Au terme d'une enquête effectuée pendant que
Lawrence purgeait sa peine, un avis d'interdiction
de séjour fut émis, lui ordonnant de quitter le
Canada à une date donnée. Avant cette date, il
avait fait, pendant qu'il se trouvait au Canada, une
demande de résidence permanente et Mme Law-
rence avait demandé à parrainer la demande de
son mari. Il fut décidé par le Ministre ou ses
agents que ni l'une ni l'autre demande ne pouvait
être instruite tant que M. Lawrence n'aurait pas
fait sa demande de résidence permanente à un
bureau des visas à l'étranger. Lawrence sollicita
alors, entre autres, un bref de mandamus ordon-
nant au Ministre de recevoir et d'instruire la
demande de résidence permanente, de signifier à
Lawrence l'acceptation ou le rejet de la demande
de résidence permanente, et d'aviser Mme Law-
rence de l'accueil ou du rejet de sa demande de
parrainage. Le juge de première instance arrive
aux conclusions suivantes [à la page 788]:
4 Karavos v. The City of Toronto et al. (susmentionné),
p. 18.
5 [1980] 1 C.F. 779 (1'e inst.).
D'après cette lettre et l'affidavit, il est clair que le Ministère
a en sa possession une demande de résidence permanente au
Canada présentée par M. Lawrence, mais qu'il refuse d'y
donner suite tant que ce dernier n'aura pas demandé un visa à
un bureau des visas à l'étranger. A mon avis, il est normal que
le Ministère adopte cette position au début, mais il ne peut
refuser indéfiniment de prendre quelque mesure que ce soit
relativement à cette demande. Si le Ministère apprenait de
façon certaine que le requérant n'a pas l'intention de se rendre
à un bureau des visas à l'étranger, ou si un temps raisonnable
s'écoulait sans que le requérant n'indique au Ministère à quel
bureau des visas il désire que sa demande soit envoyée, la
mesure appropriée à prendre par le Ministère serait de rejeter
la demande au motif que le requérant n'a pas obtenu un visa
comme le requiert l'article 9(1) de la Loi sur l'immigration de
1976. Les témoignages rendus devant l'arbitre révèlent d'autres
motifs que le Ministère pourrait invoquer, s'il le voulait, pour
rejeter la demande. En l'espèce, je crois qu'il est évident que M.
Lawrence n'a nullement l'intention de se rendre aux États-Unis
pour y faire une demande de visa à un bureau canadien des
visas.
A mon avis, il doit être donné suite à la demande de
parrainage de la demande de son mari présentée par Mme
Lawrence. Une fois la demande de M. Lawrence rejetée,—ce
qui, en droit, sera probablement la décision rendue,—ladite
demande de parrainage pourra être rejetée, au motif qu'en
vertu de l'article 79(1)b), l'intéressé ne satisfait pas aux exigen-
ces de la Loi ou de ses Règlements. Une des exigences prescri-
tes par la Loi est en effet que celui-ci doit demander et obtenir
un visa à un bureau des visas à l'étranger.
Bien que je doute fort que tout ce qui est dit
dans le passage précédent soit juridiquement
fondé, il est inutile, compte tenu des faits de cette
cause, de décider que l'affaire Lawrence a été
incorrectement jugée. La différence essentielle
entre les deux causes réside, bien entendu, dans ce
qu'à aucun moment, Joan Elene Whyte n'a fait de
demande de résidence permanente, ni à l'intérieur
ni à l'extérieur du Canada. Les agents d'immigra-
tion n'ont donc pas été requis de rendre une déci-
sion à l'égard de cette demande. La demande de
parrainage de l'intimé ne repose donc sur aucun
fondement, et ni l'appelant, ni aucun autre agent
du Ministère n'avait, vis-à-vis de l'intimé, l'obliga-
tion de rendre une décision à l'égard de la
demande de parrainage. Autrement dit, ni l'appe-
lant ni aucun autre agent d'immigration n'était
tenu de rendre une décision à l'égard de l'engage-
ment par l'intimé de parrainer la demande de Joan
Elene Whyte.
Au cours des plaidoiries, il a également été fait
mention de la décision rendue par cette Cour dans
Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra-
tion c. Tsiafakis 6 , et de celle de la Division de
première instance dans Jiminez-Perez c. Le minis-
tre de l'Emploi et de l'Immigration', qui a récem-
ment été confirmée par la Cour d'appel sous
réserve d'une modification de l'ordonnance de
cette Cour s. Ni l'une ni l'autre de ces décisions
n'est, à mon avis, utile en l'espèce parce que les
faits dans ces affaires sont nettement différents de
ceux de l'espèce. Dans l'affaire Tsiafakis, qui a été
jugée selon l'ancienne Loi sur l'immigration, les
agents d'immigration avaient refusé de fournir la
formule appropriée à une personne désirant faire
une demande de parrainage. La Cour a décidé
qu'elle avait le droit de l'obtenir. Bien entendu, le
répondant n'a pas connu en l'espèce un tel refus.
La demande de parrainage n'a pas pu être instruite
simplement parce que la demande de résidence
permanente que le répondant voulait parrainer
n'existait pas. Le motif invoqué pour le refus de
l'instruire, dans ces circonstances, importe peu,
parce que, quel que soit le motif donné, aucune
obligation de l'instruire ne peut exister tant que la
demande de résidence permanente n'a pas été
faite.
Dans l'affaire Jiminez-Perez, il s'agissait de
déterminer si les agents d'immigration sont tenus
de permettre au requérant de faire au Canada une
demande de droit d'établissement lorsqu'il
demande à être dispensé, pour des motifs d'ordre
humanitaire ou de compassion, de la condition
selon laquelle cette demande doit être faite à l'ex-
térieur du Canada. Le litige, on peut le voir, est
tout à fait différent de celui de l'espèce et a été
tranché selon le même raisonnement que celui
adopté dans l'affaire Tsiafakis.
Par tous ces motifs, j'estime qu'il y a lieu d'ac-
cueillir l'appel, d'infirmer le jugement de la Divi
sion de première instance et de rejeter la demande
en mandamus introduite par l'intimé. I1 n'y aura
pas d'adjudication de dépens en appel ni en pre-
mière instance.
LE JUGE HEALD: Je souscris aux motifs
ci-dessus.
LE JUGE SUPPLÉANT KELLY: Je souscris aux
motifs ci-dessus.
6 [1977] 2 C.F. 216; 73 D.L.R. (3d) 139 (C.F. Appel).
' N° du greffe T-3232-80 (jugement non publié rendu le 9
juillet 1980).
8 [1983] 1 C.F. 163 (C.A.).
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.