A-407-82
La Reine (appelante)
c.
Special Risks Holdings Inc. (intimée)
Cour d'appel, juges Heald et Le Dain, juge sup
pléant Kerr— Ottawa, l er et 30 décembre 1982.
Impôt sur le revenu — Pratique — Requête en radiation des
actes de procédure — Communication — Documents — Appel
d'une ordonnance qui a radié un extrait de la défense et refusé
la production de la liste des documents prévue à la Règle 448
— L'intimée a effectué une série d'opérations avec trois autres
sociétés, notamment la vente des actions de R.M. Ltd. — Elle
a par la suite choisi de verser des dividendes à même son
surplus en main non réparti et libéré d'impôt et son surplus de
capital en main — Le Ministre a établi une nouvelle cotisation
d'impôt sur les dividendes en présumant que certaines disposi
tions s'appliquaient parce que l'intimée contrôlait R.M. Ltd.
avant la vente des actions et qu'elle avait un lien de dépen-
dance après cette vente — En interjetant appel des nouvelles
cotisations, l'intimée a allégué dans sa déclaration que la vente
est survenue au moment où R.M. Ltd. était contrôlée par une
autre société pendant une brève période — L'extrait en cause
alléguait le mobile de l'opération qui était d'éviter de payer
l'impôt — L'intimée n'a pas nié ce mobile — La continuité du
contrôle est la seule question en litige — Le mobile n'entre pas
en ligne de compte parce que l'appelante n'a pas allégué dans
sa plaidoirie que les ventes constituaient une simulation ou
qu'elles étaient autrement contraires à la loi — Cela avait été
allégué dans des causes antérieures où le désir d'éviter de
payer des impôts justifiait un examen attentif des opérations
par la Cour — L'appelante a le droit d'obtenir la liste des
documents en ce qui concerne les questions spécifiées dans la
requête puisque ces documents pourraient porter sur le con-
trôle de R.M. Ltd. et sur toutes les autres questions en litige
— Appel accueilli en partie — Loi de l'impôt sur le revenu,
S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 89(1)l)(ii) (mod. par S.C.
1974-75-76, chap. 26, art. 53), 89(5)a)(ii) (adopté par S.C.
1974-75-76, chap. 26, art. 53), 186(2), 245, 246, 247 — Règles
de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663, Règle 448, formule 21.
Pratique — Communication — Production de documents —
Appel (notamment) d'une ordonnance refusant la production
d'une liste de documents prévue à la Règle 448 — L'intimée a
vendu les actions de R.M. Ltd. et elle a par la suite choisi de
verser des dividendes à même son surplus en main non réparti
et libéré d'impôt et son surplus de capital en main — Le
Ministre a établi une nouvelle cotisation d'impôt sur les divi-
dendes — La continuité du contrôle de R.M. Ltd. par l'intimée
est la seule question en litige — L'appelante a le droit d'obte-
nir la liste des documents concernant les questions spécifiées
dans la requête puisque ces documents pourraient porter sur le
contrôle de R.M. Ltd. et sur toutes les autres questions en
litige — Appel accueilli en partie — Règles de la Cour
fédérale, C.R.C., chap. 663, Règle 448, formule 21.
L'intimée et les sociétés H.R.G. Ltd., R.M. Ltd. et M.H.R.
Ltd. ont effectué entre elles une série d'opérations. Dans le
cadre de ces opérations, l'intimée a vendu (au mois de décem-
bre 1976) les actions qu'elle détenait dans R.M. Ltd. Au mois
de mars 1978, elle a choisi de verser des dividendes à même son
surplus en main non réparti et libéré d'impôt et son surplus de
capital en main; la somme portée au débit du surplus en main
non réparti et libéré d'impôt a cependant été réduite dans les
nouvelles cotisations d'impôt établies par le Ministre, la somme
tirée du surplus de capital en main a été augmentée, le total de
ces deux sommes étant inférieur au montant du dividende, et un
impôt additionnel a par conséquent été prélevé. Le Ministre a
procédé à ces calculs en se fondant sur l'hypothèse que certai-
nes dispositions de la Loi s'appliquaient. Cette hypothèse s'ap-
puyait sur le fait que l'intimée contrôlait R.M. Ltd. avant de
vendre ses actions et qu'elle avait avec celle-ci un lien de
dépendance après ladite vente. L'intimée a interjeté appel des
nouvelles cotisations. Dans sa déclaration, elle a mis en lumière
les opérations pertinentes et elle a prétendu que les dispositions
en question ne s'appliquaient pas parce que la vente est surve-
nue au cours d'une période de 11 jours durant laquelle R.M.
Ltd. était contrôlée non par elle mais par M.H.R. Ltd. Dans sa
défense, l'appelante a soutenu le contraire et elle a ajouté qu'en
effectuant les opérations en question, l'intimée «a élaboré un
plan ... en espérant éviter de payer des impôts sur la distribu
tion des dividendes». Sur requête de l'intimée, cette déclaration
a été radiée de la plaidoirie de l'appelante. En même temps, une
requête présentée par l'appelante conformément à la Règle 448
en vue d'obtenir une ordonnance enjoignant à l'intimée de
fournir une liste de documents et un affidavit attestant l'exacti-
tude de cette liste a été rejetée. L'appelante a interjeté appel de
ces deux décisions.
Jugement: (1) La radiation concernant la défense était justi-
fiée. L'extrait en question porte sur les motifs pour lesquels
l'intimée a élaboré le «plan». Celle-ci ne nie pas avoir voulu
éviter de payer des impôts sur la distribution des dividendes;
elle a cependant fait valoir que, en l'absence de simulation, un
contribuable est libre d'organiser ses affaires pour atteindre cet
objectif. Elle a par conséquent prétendu qu'elle avait le droit
d'agir comme elle l'a fait et que l'appelante dont le plaidoyer ne
contient aucune allégation de simulation n'a pas le droit de
s'immiscer dans les mobiles de son acte. Si on se fonde sur les
actes de procédure et les parties elles-mêmes, c'est la continuité
du contrôle de R.M. Ltd. par l'intimée qui est en cause.
L'appelante soutient néanmoins que l'extrait contesté est perti
nent. A son avis, puisqu'on a invoqué un «plan» visant à éviter
l'impôt, la Cour doit examiner attentivement tous les aspects de
ce «plan» afin de déterminer si les opérations en cause ont
effectivement produit, en fait et en droit, les rapports que les
nombreuses compagnies ont voulu créer. Il faut établir une
distinction d'avec les décisions sur lesquelles on s'est fondé pour
étayer cet argument. Dans les cas où il a été jugé nécessaire de
procéder à cet examen attentif, le Ministre a invoqué des
questions telles que le caractère factice de la prétendue exploi
tation d'une entreprise par un contribuable, la simulation,
l'absence de fins commerciales valides ainsi que les dispositions
relatives aux opérations factices. Au contraire, en l'espèce
l'appelante n'a allégué aucune de ces questions ni invoqué les
articles de la Loi concernant le fait d'éviter l'impôt ou le
dépouillement des dividendes. En l'absence d'allégation portant
que les opérations en question ont été annulées par une disposi
tion législative ou étaient autrement contraires à la Loi, les
mobiles de l'intimée ne sont pas pertinents.
(2) La requête de l'appelante visait à obtenir une liste
comprenant notamment des documents relatifs aux négocia-
Lions entre H.R.G. Ltd. et l'intimée concernant l'acquisition de
R.M. Ltd., ainsi que les documents et accords conclus entre
H.R.G. Ltd. et l'intimée concernant le contrôle de M.H.R. Ltd.
Les documents faisant partie de chacune de ces deux catégories
pourraient fort bien se rapporter à la question du contrôle de
R.M. Ltd. qui a été soulevée dans les actes de procédure.
L'appelante a donc le droit d'obtenir une liste de tous ces
documents, mais le paragraphe 448(1) des Règles va plus loin.
Il est question de documents «qui ont trait à tout point litigieux
de l'affaire ...» En l'espèce, les allégations de fait contenues
dans trois paragraphes de la déclaration sont contestées. Par
conséquent, l'appelante a le droit d'obtenir une liste et un
affidavit attestant l'exactitude de cette liste, qui comprend les
documents relatifs à chacune de ces allégations.
JURISPRUDENCE
DISTINCTION FAITE AVEC:
Rose c. Le ministre du Revenu national, [1973] C.F. 65;
73 DTC 5083 (C.A.); Sa Majesté La Reine c. Daly,
[1981] CTC 270 (C.F. Appel).
DÉCISIONS CITÉES:
Stubart Investments Limited c. Sa Majesté La Reine
(1981), 81 DTC 5120 (C.F. Appel); W. T. Ramsay Ltd. v.
Inland Revenue Commissioners, [1982] A.C. 300 (H.L.).
AVOCATS:
P. Plourde pour l'appelante.
G. Du Pont pour l'intimée.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelante.
Verchere, Noël & Eddy, Montréal, pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: Il s'agit d'un appel d'un juge-
ment interlocutoire de la Division de première
instance [Cour fédérale, T-4602-81, ordonnance
en date du 11 mai 1984] qui a;
a) accueilli la requête de l'intimée visant à suppri-
mer le paragraphe 8 de la déclaration et à apporter
certaines modifications au paragraphe 12 de la
déclaration;
b) ordonné que les termes [TRADUCTION] «mais
elle ajoute que la demanderesse a élaboré un plan
décrit auxdits paragraphes en espérant éviter de
payer des impôts sur la distribution de dividendes»
soient radiés du paragraphe 3 de la défense de
l'appelante; et
c) rejeté la requête de l'appelante demandant qu'il
soit ordonné à l'intimée de produire des documents
en vertu de la Règle 448 [Règles de la Cour
fédérale, C.R.C., chap. 663]'.
Même si l'avis d'appel porte sur les trois décisions
comprises dans l'ordonnance de la Division de
première instance précitée, l'appelante s'est limitée
aux alinéas b) et c) précités dans son exposé des
points de droit et de fait et l'appel a été entendu à
l'intérieur de ces limites.
Voici les faits pertinents qui sont résumés dans
les motifs du juge des requêtes (D.A. pages 48 et
49):
Il s'agit en l'espèce d'un appel de cotisations établies le 19
mars 1981, après que la défenderesse [sic] eut choisi, aux mois
de mars et de décembre 1978, conformément au paragraphe
83(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, de verser des dividen-
des à même son surplus en main non réparti et libéré d'impôt et
son surplus de capital en main en 1971. La demanderesse,
Hogg Robinson Group Ltd., Richards, Melling & Co. Ltd. et
Melling Hogg Robinson Ltd. ont effectué entre elles un certain
nombre d'opérations intersociétés, des souscriptions d'actions et
des modifications de capital social, mais il n'est pas nécessaire
d'en faire ici un examen approfondi. En conséquence, la
demanderesse a versé, en date du 31 mars 1978, un dividende
de 185 000 $, dont 181 604 $ ont été payés à même son surplus
en main non réparti et 3 396 $ à même son surplus de capital en
main et, le 29 décembre 1978, elle a versé un autre dividende de
1 346 231 $ à même son surplus de capital en main en 1971. En
établissant la nouvelle cotisation, le Ministre a estimé qu'en ce
qui concerne l'option du 13 mars 1978, une somme de 129 334,-
35 $ était censée être payée à même le surplus en main non
réparti et libéré d'impôt et 51 171,65 $ à même le surplus de
capital en main, et il a établi une cotisation supplémentaire en
conséquence.
La demanderesse se fonde sur les articles 3, 83, 86, 89, 184 et
248 de la Loi tels qu'ils s'appliquaient au cours de l'année
d'imposition 1978 et sur l'article 26 des Règles de 1971 concer-
nant l'application de l'impôt sur le revenu. La défenderesse se
fonde sur les mêmes articles.
La défenderesse admet un certain nombre de paragraphes de
la déclaration de la demanderesse, et au paragraphe 3 de sa
propre déclaration, elle admet les paragraphes 10, 11, 12, 14,
16 et 18 de la déclaration de la demanderesse mais elle ajoute
audit paragraphe que [TRADUCTION] «la demanderesse a éla-
boré un plan décrit auxdits paragraphes en espérant éviter de
payer des impôts sur la distribution de dividendes».
' Dans l'ordonnance rendue par le juge des requêtes (D.A.
page 51), la mention de la production de documents en vertu de
la Règle 448 est manifestement erronée. Dans l'avis de requête
présenté en vertu de la Règle 448 (D.A. page 32), on deman-
dait une ordonnance [TRADUCTION] «enjoignant à la demande-
resse d'établir, de déposer et de signifier à la défenderesse une
liste des documents ...». Ce sont en outre les termes utilisés au
paragraphe 448(1) des Règles.
Au paragraphe 4, la défenderesse nie les paragraphes 13, 15
et 17 et elle ajoute qu'en établissant la cotisation de la deman-
deresse, le Ministre a présumé qu'à toutes les époques en cause,
la demanderesse contrôlait effectivement Richards, Melling &
Co. Ltd. Les paragraphes 5 et 8 confirment cette assertion
selon laquelle la demanderesse avait un lien de dépendance avec
ladite compagnie après qu'elle eut vendu ses actions, le
paragraphe 8 concluant que la somme mentionnée au sous-ali-
néa 89(1)a)(ii) de la Loi est réputée être nulle en vertu des
dispositions du sous-alinéa 89(5)a)(ii) de la Loi. Les parties ont
convenu que c'est là la question principale du litige.
En ce qui concerne la partie de l'ordonnance énon-
cée à l'alinéa b) précité, voici les motifs prononcés
par le juge des requêtes (D.A. pages 49 et 50):
La demanderesse s'oppose fermement à l'allégation contenue
au paragraphe 3 de la défense selon laquelle elle a élaboré un
plan en espérant éviter de payer des impôts sur la distribution
de dividendes, invoquant le principe bien établi selon lequel un
contribuable peut organiser ses affaires de façon à payer le
moins d'impôt possible ou à n'en pas payer du tout, ce qu'on lui
permet de faire, sauf lorsqu'il s'agit de simulation. Dans le
présent cas, il n'y a aucune allégation de simulation et la
défenderesse [sic] admet que les actions ont réellement fait
l'objet de différentes manoeuvres. La demanderesse ne nie pas
qu'elle voulait éviter de payer des impôts sur la distribution des
dividendes mais elle soutient qu'elle avait le droit de le faire et
que la défenderesse n'a pas le droit d'examiner le mobile de ces
manoeuvres. Celle-ci [sic] prétend qu'il faut tenir compte de la
substance et non de la forme des opérations et que pendant une
brève période de 11 jours, la demanderesse a transféré le
contrôle des actions avant de le reprendre. La défenderesse n'a
pas invoqué l'article 245 de la Loi qui porte sur les opérations
factices, ni l'article 246 concernant le fait d'éviter l'impôt ni
l'article 247 relatif au dépouillement des dividendes. Je conclus
par conséquent que l'allégation contenue dans la dernière partie
du paragraphe 3 de la défense, concernant le mobile de la
demanderesse, devrait être radiée.
L'appelante soutient que l'intimée contrôlait
Richards, Melling & Co. Ltd. (R.M.C.) avant
qu'elle ne vende ses actions de (R.M.C.) le 23
décehibre 1976 et qu'elle avait un lien de dépen-
dance avec cette dernière immédiatement après
cette vente. Elle prétend ainsi qu'en vertu du sous-
alinéa 89(1)1)(ii) de la Loi de l'impôt sur le revenu
[S.R.C. 1952, chap. 148, mod. par S.C. 1970-
71-72, chap. 63; s.-al. 89(1)1)(ii) mod. par S.C.
1974-75-76, chap. 26, art. 53] 2 , la somme qui y est
mentionnée est réputée être nulle, conformément
2 89. (1) Dans la présente sous-section,
1) «surplus de capital en main en 1971» d'une corporation,
à une date donnée postérieure au 6 mai 1974, signifie la
fraction, si fraction il y a, du total
(Suite à la page suivante)
aux dispositions du sous-alinéa 89(5)a)(ii) de la
Loi [édicté par S.C. 1974-75-76, chap. 26, art.
53] ' . L'intimée, quant à elle, invoque chaque étape
des différentes opérations et prétend que les dispo
sitions du sous-alinéa 89(5)a)(ii) qui créent une
présomption ne s'appliquent pas en l'espèce parce
que l'intimée ne contrôlait pas R.M.C. immédiate-
ment avant qu'elle ne vende les actions de R.M.C.
qu'elle détenait. Se fondant sur les opérations indi-
quées aux paragraphes 9 à 18 de la déclaration,
l'intimée fait valoir, si je comprends bien, qu'entre
le 20 décembre et Je 31 décembre 1976, elle ne
contrôlait pas R.M.C. au sens du paragraphe
186(2) de la Loi 4 . En d'autres termes, la question
en litige porte sur la continuité du contrôle de
R.M.C. par l'intimée. Se reportant à la déclara-
(Suite de la page précédente)
(ii) sous réserve du paragraphe (5), de toutes les sommes
dont chacune est une somme afférente à un bien en
immobilisations appartenant à la corporation au 31
décembre 1971 et dont elle a disposé après cette date et
avant la date donnée, égales à la fraction, si fraction il y
a, du moins élevé des montants suivants: la juste valeur
marchande du bien au jour fixé par proclamation, aux
fins de la sous-section c, ou le produit tiré par la
corporation de la disposition de ce bien, qui est en sus de
son coût effectif supporté par la corporation et déter-
miné en faisant abstraction des Règles de 1971 concer-
nant l'application de l'impôt sur le revenu autres que les
paragraphes 26(15), (17) et (21) à (27) desdites Règles,
89....
(5) Pour déterminer le surplus de capital en main en 1971
ou l'insuffisance du capital versé d'une corporation à une
date donnée postérieure au 6 mai 1974, les règles suivantes
s'appliquent:
a) la somme visée aux sous-alinéas (1)l)(ii) et (xiv) relati-
vement à un bien en immobilisations de la corporation est
réputée être nulle, lorsque le bien ayant fait l'objet de la
disposition consiste
(ii) en une action du capital-actions d'une autre corpora
tion canadienne qui était contrôlée, au sens du paragra-
phe 186(2), par la corporation immédiatement avant la
disposition et dont la corporation a disposé après 1971
en faveur d'une personne avec laquelle elle avait un lien
de dépendance immédiatement après la disposition, à
l'exclusion d'une disposition visée à l'alinéa b), ou
.
4186....
(2) Aux fins de la présente Partie, une corporation est
contrôlée par une autre corporation si plus de 50% des
actions émises de son capital-actions (comportant plein droit
de vote en toutes circonstances) appartiennent à l'autre
corporation-, à des personnes avec lesquelles cette autre cor
poration a un lien de dépendance, ou à la fois à l'autre
corporation et à des personnes avec lesquelles l'autre corpora
tion a un lien de dépendance.
tion, l'intimée prétend, si je comprends bien,
qu'elle a contrôlé R.M.C. jusqu'au 20 décembre
1976, date à laquelle ce contrôle a été transféré à
Melling, Hogg, Robinson Ltd. (M.H.R.). Elle ne
contrôlait pas cependant M.H.R. au sens du para-
graphe 186(2) parce que les actions avec droit de
vote de M.H.R. ont été réparties également entre
une autre compagnie et l'intimée. On ne peut donc
dire que celle-ci contrôlait R.M.C. Telle était la
situation, de l'avis de l'intimée, lorsque celle-ci a
vendu ses actions de R.M.C. le 23 décembre 1976.
Ce n'est que le 31 décembre 1976 qu'elle a repris
le contrôle de M.H.R. L'intimée prétend donc que
pendant une période de 11 jours, c'est-à-dire du 20
au 31 décembre 1976, elle n'a pas contrôlé R.M.C.
Au cours de cette période de 11 jours, plus précisé-
ment le 23 décembre 1976, l'intimée a vendu ses
actions de R.M.C.
L'appelante soutient que la partie contestée du
paragraphe 3 de sa défense doit être lue en corréla-
tion avec le paragraphe 4 de ladite défense et que
l'on constatera alors que cette partie contestée est
utile et pertinente en ce qui concerne les questions
soulevées dans les conclusions. A son avis, puisqu'il
est allégué au paragraphe 3 que l'intimée a élaboré
et invoqué un «plan» [TRADUCTION] «en espérant
éviter de payer des impôts sur la distribution de
dividendes», la Cour doit examiner attentivement
tous les aspects de ce «plan» pour déterminer si les
parties ont réellement exécuté le projet qu'elles
avaient élaboré; en d'autres termes, il s'agit de
savoir si la série d'opérations en question a été
effectivement et intégralement mise en œuvre pour
que l'on puisse dire que les rapports de droit que
les parties prétendent avoir créés ont vraiment
existé en fait et en droit. L'avocat de l'appelante a
déclaré que la Couronne entendait contester le
résultat du plan et qu'à cette fin, la partie contes-
tée du paragraphe 3 était nécessaire et pertinente.
Au soutien de cette prétention, l'avocat s'est fondé
sur la décision rendue dans l'affaire Rose c. Le
ministre du Revenu national s où l'ex-juge en chef
de cette Cour a déclaré ce qui suit à la page 69:
5 [[1973] C.F. 65;] 73 DTC 5083 [C.A.], le juge en chef
Jackett.
Il ne semble pas faire de doute que l'objet de l'arrangement
en vertu duquel les compagnies en question devaient se former
en société pour fournir des services de gestion à la Central Park
Estates Limited, était d'obtenir des avantages fiscaux pour les
actionnaires de ces compagnies. Bien que cet élément ne change
rien au résultat auquel ces opérations ont effectivement abouti,
j'estime cependant qu'il justifie une appréciation très prudente
des témoignages sur le point de savoir si les mesures prévues
pour atteindre ce but ont vraiment été prises. [Note en bas de
page omise.]
Cependant, un examen attentif du dossier dans
cette affaire montre que le Ministre a fait valoir,
au paragraphe 7 de sa réponse à l'avis d'appel
modifié que [TRADUCTION] «la prétendue partici
pation du contribuable dans la soi-disant société
Central Park Management Company n'était pas
une exploitation active d'une entreprise financière,
commerciale ou industrielle mais plutôt une tenta
tive de créer l'apparence de l'exploitation d'une
telle entreprise». On doit également souligner que
dans l'affaire Rose, le Ministre a notamment pré-
tendu, au paragraphe 16 de son exposé des points
de droit et de fait, que [TRADUCTION] «l'arrange-
ment en vertu duquel le contrat de société et le
contrat de gestion ont été conclus constituait une
simulation». A mon avis, il y a une différence très
importante entre le présent cas et l'affaire Rose
précitée. Dans cette dernière affaire, on a invoqué
le caractère factice de l'opération, contrairement
au présent cas. La décision rendue dans l'affaire
Rose et les observations précitées qu'y a faites
l'ex-juge en chef doivent être examinées à la
lumière des conclusions formulées dans cette
affaire. Voici ce que j'ai déclaré dans la cause Sa
Majesté La Reine c. Daly 6 , en prononçant le juge-
ment au nom de la majorité de la Cour:
Dans une affaire de ce genre, lorsqu'il est reconnu que ce qui
est recherché par une certaine démarche est un avantage fiscal,
il est du devoir de la Cour d'examiner toutes les preuves
relatives à l'opération afin de s'assurer que ce qui a été fait a eu
pour résultat une opération valide, complétée.
Je fais également remarquer que dans l'affaire
Daly (précitée), la Couronne a prétendu que la
ligne de conduite n'a pas été adoptée [TRADUC-
TION] «à des fins commerciales» (paragraphe 7 de
la défense) et ajouté qu'elle a cotisé le contribuable
pour le motif que [TRADUCTION] «la procédure n'a
pas été adoptée à des fins commerciales valides ou
légitimes ...» (paragraphe 8 de la défense). La
Couronne a également invoqué les dispositions de
6 [1981] CTC 270 [C.F. Appel] à la p. 279.
l'article 245 de la Loi et de la disposition qu'il a
remplacée. Ces articles portent sur les opérations
factices.
Je suis donc d'avis que la jurisprudence de cette
Cour, notamment dans les affaires Rose et Daly,
doit être examinée à la lumière des questions
soulevées dans leurs conclusions. Dans l'affaire
Rose, le Ministre a invoqué le caractère factice de
l'opération. Dans l'affaire Daly, la Couronne a
invoqué l'absence de fins commerciales valides ou
légitimes. Ce moyen n'a pas été soulevé dans le
présent cas. Je tiens pour acquis qu'en citant les
articles 245, 246 et 247 de la Loi, le juge des
requêtes a voulu dire que dans le présent cas, la
Couronne n'a pas invoqué de faits qui, s'ils étaient
prouvés au cours du procès, permettraient d'appli-
quer un ou plusieurs de ces articles et créeraient
un assujetissement à l'impôt.
À la lumière des conclusions en l'espèce, l'appe-
lante n'a pas allégué de faits qui établieraient une
simulation, une absence de fins commerciales vali-
des, des opérations factices au sens de l'article 245,
le fait d'éviter l'impôt au sens de l'article 246 ou
un dépouillement des dividendes au sens de l'arti-
cle 247.
Au contraire, l'appelante admet la plupart des
paragraphes de la déclaration qui établissent le
prétendu «plan». Les seuls paragraphes qu'elle nie
sont les paragraphes 13, 15 et 17. Le paragraphe
13 porte sur le contrôle de R.M.C. Je ne crois pas
que les paragraphes 15 et 17 se rapportent à la
question du contrôle. Ils font partie de la descrip
tion de l'ensemble des opérations. Donc, le seul
point litigieux soulevé par l'appelante porte sur le
contrôle de R.M.C. Selon le juge des requêtes,
l'intimée n'a pas nié qu'elle a voulu éviter de payer
des impôts sur la distribution de dividendes. Son
avocat n'a pas non plus nié cette intention devant
nous. L'appelante n'a pas cependant allégué en
l'espèce que le plan en question est contraire à la
loi ou nul en vertu d'une disposition législative
particulière'. Si l'appelante avait allégué des faits
suffisants pour constituer une simulation, une
absence de fins valides et légitimes ou si elle avait
' Comparer: Stubart Investments Limited c. Sa Majesté La
Reine (1981), 81 DTC 5120 [C.F. Appel] à la p. 5124, et W. T.
Ramsay Ltd. v. Inland Revenue Commissioners, [1982] A.C.
300 [H.L.] à la p. 323.
invoqué l'une des dispositions législatives auxquel-
les le juge des requêtes a fait allusion, la situation
aurait pu être différente. Cependant, si je consi-
dère les conclusions telles que rédigées, je ne peux
voir comment les motifs pour lesquels l'intimée a
élaboré le «plan» en question peuvent donner
ouverture à des moyens de défense valables de la
part de l'appelante. Par conséquent, je pense que la
partie contestée du paragraphe 3 n'est pas perti-
nente et que le juge des requêtes a eu raison de la
radier de la défense.
Examinons maintenant la partie de l'ordonnance
décrite à l'alinéa c) précité, dont il est interjeté
appel. Voici les motifs pour lesquels le juge des
requêtes a rejeté cette partie de la requête de
l'appelante [à la page 5]:
Au sujet de la requête présentée par la défenderesse en vertu
de la Règle 448, une lettre jointe à l'affidavit annexé indique les
documents demandés.
L'alinéa a) demande que l'on produise les documents relatifs
aux négociations entre Hogg Robinson et la demanderesse
concernant l'acquisition de Richards, Melling & Co. Ltd., et
l'alinéa b) vise à obtenir les documents concernant la réorgani-
sation du capital-actions de cette compagnie. Les détails de la
réorganisation ont déjà été fournis et tout écrit ou compte
rendu de discussions concerne le mobile des actes de la défende-
resse et n'est pas pertinent. Au sujet des alinéas c) et d)
concernant la constitution de Melling Hogg Robinson Ltd. et la
répartition de ses actions entre le groupe Hogg Robinson et la
demanderesse, et l'achat des actions de Richards, Melling &
Co. par Melling Hogg Robinson, il semble ici également que la
demanderesse a déjà produit ces documents dans la liste qu'elle
a déposée en vertu de la Règle 447, ou que la défenderesse les a
admis en admettant certains paragraphes de la déclaration de
la demanderesse. Si la documentation est incomplète, des docu
ments additionnels de la compagnie (par opposition à la corres-
pondance) pourront sans doute être obtenus au cours de l'inter-
rogatoire préalable. L'alinéa e) vise à obtenir les accords
conclus entre le groupe Hogg Robinson et la demanderesse
concernant le contrôle de Melling Hogg Robinson Ltd. et les
documents qui s'y rapportent. Il semble de nouveau qu'on
recherche le mobile des actes de la défenderesse, et en l'absence
d'allégations de simulation, ces renseignements ne sont pas
nécessaires. Par ces motifs, la requête de la défenderesse est
rejetée.
En toute déférence, je ne peux souscrire à la
décision du juge des requêtes de rejeter la requête
de l'appelante visant à obliger l'intimée, par voie
d'ordonnance, à établir, déposer et signifier la liste
des documents prévue au paragraphe 448(1) des
Règles de la Cour fédérale. Comme je l'ai déjà fait
remarquer, l'appelante a nié le paragraphe 13 de
la déclaration, ce qui soulevait la question du
contrôle de R.M.C. A l'alinéa a) de la lettre dont il
est fait mention dans les motifs du juge des requê-
tes (précitée), on demande [TRADUCTION] «les
documents relatifs aux négociations entre Hogg
Robinson et la demanderesse concernant l'acquisi-
tion de Richards, Melling & Co. Ltd.». Ces docu
ments pourraient fort bien être pertinents pour
trancher la question du contrôle de R.M.C. La
demande des documents relatifs à la prise de con-
trôle de R.M.C. a une portée plus étendue que
[TRADUCTION] «tout écrit ou compte rendu de
discussions» portant sur le mobile des opérations.
Je conclus par conséquent que l'appelante a le
droit d'obtenir, en vertu du paragraphe 448(1) des
Règles, la liste de tous et chacun de ces docu
ments. Je crois également qu'en demandant tous
les accords conclus entre le groupe Hogg Robinson
et l'intimée concernant le contrôle de M.H.R. et
tous les documents s'y rapportant, l'alinéa e) de la
lettre requiert des documents qui pourraient fort
bien se rapporter à la question du contrôle de
R.M.C. en raison des opérations auxquelles ont
participé l'intimée, le groupe Hogg Robinson et
M.H.R. concernant les actions de R.M.C. Je suis
donc d'avis que l'appelante a également le droit
d'obtenir, en vertu du paragraphe 448(1) des
Règles, la liste de tous les documents qui sont visés
par l'alinéa e) de la lettre en question.
Je me suis penché sur les questions énoncées
dans la lettre du ler avril 1982, relativement aux-
quelles l'appelante a le droit, à mon avis, d'obtenir
la communication des documents prévue à la
Règle 448. Le paragraphe 448(1) prévoit cepen-
dant «une liste des documents ... qui ont trait à
tout point litigieux de l'affaire ...». Les questions
en litige dans le présent débat sont les allégations
de faits contenues aux paragraphes 13, 15 et 17 de
la déclaration. Je suis par conséquent d'avis que
l'appelante a le droit de se prévaloir des disposi
tions du paragraphe 448(1) des Règles en ce qui
concerne chacune des allégations de faits conte-
nues aux paragraphes 13, 15 et 17 de la
déclaration.
En résumé, voici les conclusions du présent
appel: je rejetterais l'appel de l'alinéa b) du juge-
ment de la Division de première instance, j'accueil-
lerais l'appel de l'alinéa c) du jugement de la
Division de première instance et j'ordonnerais à
l'intimée, conformément aux dispositions du para-
graphe 448(1) des Règles, d'établir, de déposer et
de signifier à l'appelante, dans les 20 jours de la
date du présent jugement, une liste des documents
qui sont ou ont été en sa possession, sous sa garde
ou son autorité et qui ont trait à chacune des
allégations de faits contenues aux paragraphes 13,
15 et 17 de la déclaration et en même temps,
d'établir et de déposer un affidavit attestant l'exac-
titude de cette liste (formule 21) et d'en signifier
copie à l'appelante.
Quant aux dépens, je note que le juge des requê-
tes a adjugé les dépens à l'intimée en ce qui
concerne la requête de cette dernière visant à
modifier la déclaration et à radier une partie de la
défense, ainsi qu'en ce qui concerne la requête de
l'appelante visant à obtenir le dépôt d'une liste en
vertu de la Règle 448. Puisque chacune des parties
a partiellement gain de cause dans cet appel, je
n'adjugerais aucun dépens ni en appel ni en pre-
mière instance.
LE JUGE LE DAIN: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE SUPPLÉANT KERR: Je souscris à ces
motifs.
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