A-164-80
Claude Leclerc (appelant) (défendeur)
c.
La Reine (intimée) (demanderesse)
A-165-80
Georges E. Lemay (appelant) (défendeur)
c.
La Reine (intimée) (demanderesse)
Cour d'appel, juges Pratte et Le Dain, juge sup
pléant Hyde—Montréal, 21 septembre 1982.
Pratique — Frais et dépens — Appel d'une décision par
laquelle le juge de première instance a réduit le montant des
frais taxés des appelants parce que les appels ne soulevaient
aucune question de principe susceptible d'affecter des causes
ultérieures et parce que le montant d'impôt en jeu était minime
— Frais adjugés en vertu de l'art. 178(2) de la Loi — Le taux
horaire et le nombre d'heures de travail consacrées aux appels
n'étaient pas excessifs — Le juge de première instance a
commis une erreur de droit — Les principes dégagés dans La
Reine c. Creamer, /1977J 2 C.F. 195 (I" inst.), s'appliquent —
Le but de l'art. 178(2) est de permettre au contribuable de
recouvrer ses frais raisonnables, quels que soient le résultat du
litige et le montant en cause — Loi de l'impôt sur le revenu,
S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 178(2), mod. par S.C.
1976-77, chap. 4, art. 64.
Impôt sur le revenu = Pratique — »Frais raisonnables et
justifiés» selon l'art. 178(2) de la Loi — Le juge de première
instance a commis une erreur en réduisant le montant des frais
taxés adjugés au contribuable au motif qu'ils excédaient le
montant d'impôt en cause et que les appels n'avaient pas
valeur de précédents — Arrêt La Reine c. Creamer, [1977] 2
C.F. 195 (l'e inst.), appliqué — Le but de l'art. 178(2) est de
permettre au contribuable de recouvrer ses frais raisonnables,
quels que soient le résultat du litige et le montant en cause —
Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, chap. 63, art.
178(2), mod. par S.C. 1976-77, chap. 4, art. 64.
JURISPRUDENCE
DÉCISION APPLIQUÉE:
La Reine c. Creamer, [1977] 2 C.F. 195 (1" inst.).
AVOCATS:
Jean Delage pour l'appelant (défendeur).
D. Thibodeau et P. Cossette pour l'intimée
(demanderesse).
PROCUREURS:
Monet, Hart, Saint-Pierre & Des Marais,
Montréal, pour l'appelant (défendeur).
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée (demanderesse).
Voici les motifs du jugement prononcés en fran-
çais à l'audience par
LE JUGE PRATTE: Il s'agit d'appels de décisions
de la Division de première instance [[1980] 2 C.F.
194] qui ont fait droit à deux requêtes qu'avait
présentées Sa Majesté pour faire réviser la taxa
tion des frais que la Cour avait préalablement
adjugés à messieurs Leclerc et Lemay.
Sa Majesté en avait appelé à la Division de
première instance des décisions de la Commission
de révision de l'impôt qui avaient favorisé mes
sieurs Leclerc et Lemay. Le montant en jeu dans
chacun de ces appels était d'approximativement
1 325 $. Les appels furent accueillis et Sa Majesté
eut gain de cause. Comme il s'agissait d'affaires où
il y avait lieu d'appliquer le paragraphe 178(2) de
la Loi de l'impôt sur le revenu [S.R.C. 1952, chap.
148, mod. par S.C. 1970-71-72, chap. 63, art. 1;
S.C. 1976-77, chap. 4, art. 64], les jugements
ordonnèrent néanmoins à Sa Majesté, dans cha-
cune des causes, de payer la moitié des frais
raisonnables et justifiés encourus par les deux
contribuables. L'administrateur de district taxa ces
frais, dans chaque cause, à la somme de 2 500 $
plus les déboursés. Les jugements attaqués ont
réduit ces montants de moitié.
Les deux montants de 2 500 $ accordés par l'ad-
ministrateur représentaient la rémunération des 77
heures de travail que les avocats de messieurs
Leclerc et Lemay prétendaient avoir consacrées à
la défense des intérêts de leurs clients.
Le premier juge, si je comprends bien sa déci-
sion, a jugé que le taux horaire de 70 $ réclamé
par les avocats des requérants n'était pas excessif;
il a aussi considéré qu'ils avaient bien consacré 77
heures de travail aux deux appels et que ce temps
n'était pas, lui non plus, excessif. S'il a néanmoins
diminué de moitié les montants accordés par l'ad-
ministrateur, c'est que les deux appels ne soule-
vaient aucune question de principe susceptible de
se soulever dans d'autres cas; il a conclu, de cela,
que les frais ne pouvaient être raisonnables et
justifiés s'ils excédaient le montant en litige.
En décidant ainsi, le premier juge me semble
avoir commis une erreur de droit. Dans un cas où
le paragraphe 178(2) de la Loi de l'impôt sur le
revenu s'applique, ni le fait que le montant en
litige dans l'appel ait été minime, ni le fait que
l'appel n'ait soulevé aucune question de principe ne
me semblent devoir être pris en considération lors-
qu'il s'agit de fixer le montant des frais raisonna-
bles auxquels a droit le contribuable. Le but du
paragraphe 178(2) est de permettre au contribua-
ble de recouvrer ses frais raisonnables, quel que
soit le résultat de l'appel et bien que l'appel ne
mette en jeu qu'un faible montant. Les considéra-
tions pertinentes à la détermination du montant
des frais auxquels un contribuable a droit en vertu
du paragraphe 178(2) me semblent ressortir du
passage de la décision rendue dans La Reine c.
Creamer ([1977] 2 C.F. 195 (1fe inst.), à la page
206) où le juge Mahoney dit quel résultat le
Parlement a voulu atteindre lorsque cette disposi
tion s'applique:
Le Parlement a voulu que dans ce cas le contribuable puisse se
défendre et recevoir toute l'aide juridique nécessaire, sans que
les frais en jeu, dans la mesure où ils sont raisonnables et
justifiés, ne soient un obstacle.
Mais si, pour des raisons financières, on ne doit pas empêcher
un contribuable de présenter une défense, ou ne lui donne pas
par ailleurs, pas plus qu'à ses conseillers juridiques, carte
blanche pour piller les fonds publics. L'avocat qui requiert de
son client des honoraires raisonnables compte tenu du temps
passé sur l'affaire peut s'attendre à ce que des fonds soient
fournis à son client pour le payer ou à ce que ce dernier, les
ayant acquittés, puisse se faire rembourser.
Pour ces motifs, je ferais droit aux appels, je
casserais les décisions attaquées et rétablirais les
décisions de l'administrateur de district. J'accorde-
rais à chacun des appelants leurs frais en première
instance et en appel, et je fixerais ces frais à la
somme de 600 $.
LE JUGE LE DAIN y a souscrit.
LE JUGE SUPPLÉANT HYDE y a souscrit.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.