A-399-82
Union des employés de commerce, local 503 et
Carole Madeleine (appelantes)
c.
Purolator Courrier Ltée (intimée)
et
Conseil canadien des relations du travail (mis-en-
cause)
Cour d'appel, juges Pratte et Ryan, juge suppléant
Lalande—Montréal, 12 et 15 octobre 1982.
Relations du travail — La Division de première instance n'a
pas compétence pour surseoir à l'exécution d'une ordonnance
du Conseil canadien des relations du travail déposée et enre-
gistrée à la Cour fédérale en vertu de l'art. 123 du Code
canadien du travail — Appel accueilli — Code canadien du
travail, S.R.C. 1970, chap. L-1, art. 123 (abrogé et remplacé
par S.C. 1977-78, chap. 27, art. 43) — Règles de la Cour
fédérale, C.R.C., chap. 663, Règles 1904(1), 1909.
Compétence — Relations du travail — Une ordonnance du
Conseil canadien des relations du travail a été déposée et
enregistrée à la Cour fédérale suivant l'art. 123 du Code
canadien du travail — La Division de première instance ne
peut modifier l'ordonnance du Conseil ni en suspendre l'exécu-
tion sous le régime des Règles 1904(1) ou 1909 de la Cour
fédérale — Appel accueilli — Code canadien du travail,
S.R.C. 1970, chap. L-1, art. 123 (abrogé et remplacé par S.C.
1977-78, chap. 27, art. 43) — Règles de la Cour fédérale,
C.R.C., chap. 663, Règles 1904(1), 1909.
JURISPRUDENCE
DÉCISION SUIVIE:
Nauss et autre c. La Section 269 de l'Association inter-
nationale des débardeurs, [1982] 1 C.F. 114 (C.A.).
AVOCATS:
Janet Cleveland pour les appelantes.
Barry Singer et Jean Bazin pour l'intimée.
Luc Martineau et Michel Robert pour le
mis-en-cause.
PROCUREURS:
Rivest, Castiglio, Castiglio, LeBel &
Schmidt, Montréal, pour les appelantes.
Byers, Casgrain, Montréal, pour l'intimée.
Robert, Dansereau, Barre, Marchessault &
Lauzon, Montréal, pour le mis-en-cause.
Voici les motifs du jugement de la Cour pro-
noncés en français à l'audience par
LE JUGE PRATTE: Cet appel est dirigé contre
une décision de la Division de première instance
[[1983] 1 C.F. 472] qui a ordonné que l'on sursoie
à l'exécution d'une ordonnance du Conseil cana-
dien des relations du travail jusqu'à ce que la Cour
d'appel fédérale se soit prononcée sur la demande
d'annulation de cette ordonnance.
L'ordonnance du Conseil dont il s'agit avait été
déposée et enregistrée à la Cour fédérale suivant
l'article 123 du Code canadien du travail [S.R.C.
1970, chap. L-1 (abrogé et remplacé par S.C.
1977-78, chap. 27, art. 43)]'. Le dispositif de cette
ordonnance était le suivant:
EN CONSEQUENCE, le Conseil ordonne par les présentes que
Purolator Courrier Ltée réintègre Carole Madeleine dans ses
fonctions avec tous ses droits, avantages et privilèges dont elle
jouissait au moment de son congédiement;
ET EN OUTRE, que Purolator Courrier Ltée, paie à Madame
Madeleine une indemnité équivalant au salaire et autres avan-
tages qu'elle aurait reçus, n'eut été de son congédiement illégal,
entre la date dudit congédiement et celle de sa réintégration;
ET EN OUTRE, que Purolator Courrier Ltée, retransfère à
Québec les opérations du département des comptes payables de
la région 518 présentement effectuées à Montréal et d'adjoin-
dre à Madame Madeleine un employé régulier à temps partiel
(minimum de 3 heures par jour);
ET EN OUTRE, que Purolator Courrier Ltée satisfasse immédia-
tement aux conditions de la présente ordonnance.
1 Voici le texte de cet article:
123. (1) Le Conseil doit, sur demande écrite de toute
personne ou organisme concerné par une décision ou une
ordonnance du Conseil, déposer à la Cour fédérale du
Canada une copie du dispositif de la décision ou de l'ordon-
nance en question, à moins qu'à son avis,
a) rien ne permette de croire à l'inobservation actuelle ou
prévisible de l'ordonnance ou de la décision, ou
b) il existe d'autres bonnes raisons pour lesquelles le dépôt
de l'ordonnance ou de la décision à la Cour fédérale ne
servirait aucune fin utile.
(2) Lorsque le Conseil dépose à la Cour fédérale du
Canada copie d'une ordonnance ou d'une décision conformé-
ment au paragraphe (1), il doit préciser par écrit à la Cour
que le dépôt se fait conformément audit paragraphe; cette
précision étant donnée, la Cour doit recevoir, aux fins de
dépôt, la copie de l'ordonnance ou de la décision et l'enregis-
trer, sans qu'aucune autre demande ni procédure ne soit
requise. Cet enregistrement confère à la décision ou à l'or-
donnance la même force et le même effet que s'il s'agissait
d'un jugement émanant de cette Cour et, sous réserve du
présent article et de l'article 28 de la Loi sur la Cour
fédérale, toutes les procédures lui faisant suite peuvent dès
lors être engagées en conséquence par toute personne ou tout
organisme concerné par l'ordonnance ou la décision.
La décision attaquée, prononcée à la requête de
l'intimée Purolator Courrier Ltée, a ordonné que
l'exécution de cette ordonnance du Conseil soit
reportée à plus tard. Le dispositif de cette décision
se lit comme suit [aux pages 479 et 480]:
L'exécution de la décision rendue le 22 janvier 1982 par le
Conseil canadien des relations du travail est suspendue jusqu'à
ce que la Cour d'appel fédérale ait statué sur la demande
présentée par la requérante à l'instance en vertu de l'article 28,
aux conditions suivantes:
(1) Dans la semaine qui suit la date de cette ordonnance,
la requérante doit consigner à la Cour fédérale du Canada
la somme de $10,000, qui sera déposée à un compte
productif d'intérêts, pour garantir l'exécution de la partie
financière de l'ordonnance si la demande fondée sur
l'article 28 est rejetée.
(2) La requérante doit autoriser Carole Madeleine à conti-
nuer à prendre part, pour le compte de l'Union, à toutes
nouvelles négociations ou à toutes nouvelles séances de
conciliation.
Les dépens suivront l'issue de la demande fondée sur
l'article 28.
Il nous paraît que cette décision ne peut se
concilier avec l'arrêt rendu dans la cause Nauss et
autre c. La Section 269 de l'Association interna-
tionale des débardeurs, [1982] 1 C.F. 114 (C.A.),
où nous avons décidé que le dépôt d'une ordon-
nance du Conseil conformément à l'article 123 du
Code canadien du travail ne conférait à la Division
de première instance ni le pouvoir de modifier les
termes de cette ordonnance suivant la Règle
1904(1) [Règles de la Cour fédérale, C.R.C.,
chap. 663] ni celui d'en suspendre l'exécution sui-
vant la Règle 1909. Il est vrai que le premier juge
a affirmé que cette affaire-ci se distinguait de
l'affaire Nauss en ce que, dans cette dernière, la
Division de première instance avait expressément
modifié l'ordonnance du Conseil. Cette distinction
ne nous semble avoir aucun fondement.
L'arrêt Nauss est un arrêt récent de cette Cour
dont on ne nous a pas démontré qu'il était mal
fondé. Cet arrêt doit, en conséquence, être suivi.
Pour ces motifs, l'appel sera accueilli avec
dépens, la décision attaquée sera cassée et la
requête en sursis d'exécution présentée par l'inti-
mée sera rejetée avec dépens.
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