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T-5811-78
Boris G. Freesman et Joyce Freesman (deman- deurs)
c.
La Reine (défenderesse)
Division de première instance, juge Addy— Toronto, 23 et 24 mars 1982.
Douanes et accise Saisie et confiscation Saisie de l'automobile et mainlevée de cette saisie sur dépôt d'une somme en garantie Il échet d'examiner si l'automobile a été «aliénée» dans les douze mois de son importation au Canada ou si elle a été affectée à une autre fin, ce qui annulerait son exemption à titre de marchandise d'immigrant Loi sur les douanes, S.R.C. 1970, c. C-40, art. 2(3), 105(1),(3),(4) Tarif des douanes, S.R.C. 1970, c. C-41, liste A, numéro tarifaire 70505-1.
Il s'agit d'une action en recouvrement d'un dépôt versé par le demandeur par suite de la saisie d'une automobile dont il était en possession en vertu d'un contrat de vente sous condition. Cette automobile faisait partie des effets que Diana Glass a importés au pays comme immigrante. En vertu du numéro tarifaire 70505-1, elle était exempte de droits pourvu qu'elle ne soit pas vendue ni autrement aliénée dans les douze mois de son importation au Canada, et pourvu qu'elle ne soit pas affectée à une fin autre que l'usage personnel de Diana Glass. L'automo- bile fit l'objet d'une entente en vertu de laquelle le demandeur recevait une hypothèque mobilière à titre de garantie d'un prêt consenti à M"» Glass ainsi qu'une option irrévocable d'achat de l'automobile, et le droit de l'aliéner s'il ne levait pas l'option, pourvu qu'elle fût vendue à une certaine date. M"» Glass conservait toutefois la propriété du véhicule. Le demandeur fait valoir que l'entente ne constituait pas une «aliénation» au sens de la Loi sur les douanes, et que cette entente visait à créer une entreprise commune, le prêt consenti par le demandeur consti- tuant son apport.
Arrêt: action rejetée. Même si M"» Glass conservait théori- quement la propriété du véhicule, l'hypothèque mobilière avait pour objet de transférer le titre au demandeur. Compte tenu des droits que le demandeur pouvait exercer sur l'automobile, y compris la possession et l'usage, il ne restait à M"» Glass, en fait et en droit, que très peu des attributs du droit de propriété. De plus, l'exemption attachée à l'automobile ne s'appliquait qu'en autant que le véhicule servait à l'usage personnel de Glass. La, création d'une entreprise commune qui avait comme objet l'automobile a eu pour effet de détourner le véhicule de l'usage pour lequel il avait été admis en franchise.
Jurisprudence: décision appliquée: Allardice c. La Reine [1979] 1 C.F. 13. Décisions mentionnées: Ward c. Com missioner of Inland Revenue [1956] A.C. 391; Greiner c. La Reine 81 DTC 5371; Duke of Northumberland c. Attorney -General [1905] A.C. 406; Liverman c. La Reine, Cour de l'Échiquier, B3412, jugement en date du 3 avril 1970; Victory Hotels Ltd. c. Le ministre du Revenu natio nal 62 DTC 1378; Roache c. Australian Mercantile Land & Finance Co. Ltd. [1966] 1 N.S.W.R. 384.
ACTION. AVOCATS:
S. Zucker pour les demandeurs. B. Evernden pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Danson & Zucker, Toronto, pour les deman- deurs.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Voici les motifs du jugement prononcés en fran- çais à l'audience par
LE JUGE ADDY: J'ai pu étudier les nouveaux arguments qui m'ont été soumis et revoir la juris prudence citée dans cette affaire. Comme il a été dit au début, les faits ne sont pas vraiment contes tés. L'issue du présent litige dépend en définitive de l'entente déposée sous la cote M de la pièce 1, c'est-à-dire l'entente conclue le 14 juin 1977, et de la conduite des parties avant et après la signature de celle-ci.
Nul ne conteste que l'automobile de marque Ferrari faisait partie des effets que Diana Glass a importés au Canada comme immigrante. En vertu d'une disposition spéciale du numéro tarifaire 70505-1, ces marchandises sont admises en fran chise. Le numéro est rédigé en ces termes:
Marchandises, définies par les règlements établis par le Minis- tre, importées par un immigrant pour son usage domestique ou personnel, si réellement elles lui ont appartenu, ont été en sa possession et lui ont servi avant son émigration au Canada, suivant les règlements que peut édicter le Ministre ....
L'alinéa suivant prévoit que:
Toutes marchandises importées en vertu de ce numéro tari- faire, vendues ou autrement aliénées dans les douze mois de leur importation, sont soumises aux droits et aux impôts pres- crits par ailleurs.
Deux conditions sont donc nécessaires pour qu'il y ait exemption du paiement des droits en vertu de ce numéro:
(1) que les marchandises soient importées par l'immigrant pour son usage domestique ou personnel,
(2) que celui-ci ne les vende pas ou ne les aliène pas dans les douze mois de leur importation. Il est
important de noter ici que le paragraphe 105(1) semble ajouter une condition qui n'est pas prévue au numéro tarifaire, savoir que les marchandises ne soient pas affectées à une autre fin que celle pour laquelle elles ont été importées. Naturelle- ment, il faut aussi tenir compte des dispositions de la loi. Le texte pertinent du paragraphe 105(1) est ainsi conçu:
105. (1) Lorsque des marchandises ont été importées libres de droit .. .
Je devrais dire < span> des droits auxquels elles seraient autrement frappées» et l'alinéa a) dit ce qui suit:
105. (1) ...
a) soit comme étant destinées à l'usage d'une personne admise, en vertu de la loi, à importer des marchandises pour son propre usage, libres de droit .. .
et que ces marchandises sont vendues ou autrement aliénées à une personne qui n'a droit à aucune exemption, ou qu'elles sont affectées à une autre fin que celle pour laquelle elles ont été
importées, elles deviennent passibles . .
et le législateur, dans ce même paragraphe, pour- suit en précisant qu'elles deviennent passibles et sont frappées de droits ou de droits additionnels et qu'elles sont susceptibles de confiscation et de saisie.
Le paragraphe 105(3) prévoit que lorsque les marchandises sont vendues ou autrement aliénées, les deux parties sont conjointement et solidaire- ment passibles des droits, et le paragraphe 105(4) édicte que la personne qui a affecté les marchandi- ses à un autre usage que celui pour lequel elles avaient été importées est passible des droits.
En ce qui concerne la charge de la preuve, il est évident que c'est la personne qui réclame l'exemp- tion qui doit prouver que les marchandises sont exemptes des droits généralement imposés par la Loi sur les douanes, S.R.C. 1970, c. C-40. C'est aussi aux demandeurs qu'il incombe de démontrer qu'en vertu des dispositions de la Loi, la Couronne n'avait pas le droit de confisquer l'automobile. J'ai consulté l'affaire Allardice c. La Reine [ 1979] 1 C.F. 13, à la page 15, que l'avocat de la défende- resse m'a citée. C'est le juge Dubé qui a rendu la décision et je cite l'extrait suivant:
Bien entendu, le demandeur a la charge d'établir que la Couronne n'avait pas le droit, en vertu de quelque disposition que ce soit de la Loi sur les douanes, de procéder à des confiscations. La Couronne n'est pas limitée par les raisons
données par le Ministre ou par les motifs invoqués dans les documents douaniers. La Cour peut déclarer les confiscations valables par suite de toute violation établie, sanctionnée par des confiscations et commise à l'encontre de la Loi (voir Le Roi c. Bureau [1949] R.C.S. 367, Kenzik c. La Reine [1954] R.C.É. 153).
A cet égard, il est intéressant de lire aussi le paragraphe 2(3) de la Loi qui prévoit que:
2....
(3) Toutes les expressions et dispositions de la présente loi ou de toute loi relative aux douanes doivent recevoir, suivant leurs véritables sens, intention et esprit, l'interprétation équitable et libérale la plus propre à assurer la protection du revenu et la réalisation des objets pour lesquels la présente loi ou cette loi a été édictée.
L'avocat de la défenderesse a prétendu, et je suis d'accord avec lui là-dessus, que la Loi vise d'abord la protection du commerce intérieur et ensuite l'obtention de revenus. La Loi n'a pas pour but de faciliter l'importation. Il est évident aussi que lors- qu'une disposition qui prévoit une exemption à une loi fiscale d'application générale est susceptible de plus d'une interprétation, c'est l'interprétation la moins favorable à la personne qui réclame l'exemption qui sera retenue.
Je passe maintenant à l'examen de l'entente, cote M de la pièce 1. Cette entente prévoit en substance ce qui suit: d'abord, le demandeur Freesman s'engage à prêter la somme de $13,000 à Glass, laquelle consent à ce dernier une hypothè- que mobilière de $28,000 sans intérêt pour la garantie du prêt et d'une somme additionnelle de $15,000 qui représente le coût estimé des travaux à effectuer pour réparer l'automobile et pour l'adap- ter à la conduite à gauche.
Deuxièmement, c'est Freesman qui a la posses sion de l'automobile et qui est autorisé à l'utiliser.
Troisièmement, c'est Freesman seul qui décide des travaux à effectuer.
Quatrièmement, Freesman doit veiller à ce que les réparations soient bien faites et que l'automo- bile soit en bon état advenant que Glass en reprenne possession.
Cinquièmement, sous réserve de la déduction du montant du prêt auparavant consenti ($13,000), Glass accorde à Freesman une option irrévocable
d'achat pour un prix de $26,500, option que celui-ci ne peut lever qu'entre le 20 avril et le 15 mai 1978.
Sixièmement, si Freesman ne lève pas l'option, l'automobile doit être vendue après le 15 mai 1978 à un prix sur lequel les deux parties s'entendent et le contrat prévoit comment partager le produit de la disposition. Ces clauses figurent à la page 5 de l'entente. Je n'en ferai pas l'examen.
Septièmement, Glass conserve la propriété de l'automobile jusqu'à ce que Freesman l'achète ou qu'elle soit vendue à une tierce partie.
Finalement, si le 15 juillet 1978 l'automobile n'est pas vendue, c'est-à-dire si ni Freesman ni une tierce partie ne l'a achetée, Glass en reprend pos session sans frais.
Les autres faits pertinents au litige sont, je crois, les suivants: Freesman a pris possession de l'auto- mobile le 22 juin 1977 et l'a conservée jusqu'à ce qu'elle soit saisie le 19 octobre de la même année. En fait, Glass n'a jamais utilisé l'automobile après le 22 juin, ni en avait-elle le droit. C'est Freesman qui, le 20 septembre 1978, a payé sous réserve les $11,707 qu'exigeait la défenderesse pour donner mainlevée de la saisie et de la confiscation. Le demandeur, Boris Freesman, s'y connaissait en Ferrari et avait la réputation d'être, selon une expression populaire, un [TRADUCTION] «mordu des Ferraris,,. D'après le témoignage de ce dernier, les parties à l'entente voulaient se lancer dans une entreprise commune ayant pour objet l'automobile, le prêt de $13,000 étant destiné à équilibrer leur participation. Le demandeur, Boris Freesman, n'a pas signalé ce contrat aux douanes avant la saisie pratiquée le 19 octobre 1977, soit environ quatre mois après la signature de l'entente. Il a donc omis de signaler aussitôt l'aliénation, si aliénation il y avait, comme l'exige le paragraphe 105(3). L'auto- mobile avait déjà été saisie en mai 1977 parce que M"° Glass avait essayé de la vendre. Elle avait par la suite fait l'objet d'une mainlevée de saisie. Il savait que la G.R.C. avait, avant la signature de l'entente, rendu visite à M"° Glass concernant l'au- tomobile. Après la signature de l'entente, M"° Glass n'a pas montré le moindre intérêt pour l'au- tomobile et n'a pas été revue. Afin de lever l'op- tion, il a s'adresser à la Cour suprême de l'Ontario et il a consigner le prix de vente en
cour pour devenir propriétaire. Rien dans la preuve n'indique que M"e Glass ait réclamé la somme déposée, ni à combien se chiffrait cette somme.
J'en déduis qu'après avoir reçu les $13,000, Mile Glass a perdu tout intérêt pour l'automobile et qu'à toutes fins pratiques, elle a abandonné les droits auxquels elle pouvait prétendre sur celle-ci ou, considérant sa conduite, qu'elle semble les avoir abandonnés.
Il s'agit d'abord de déterminer si Mlle Glass a autrement aliéné l'automobile dans le délai de 12 mois prévu par la loi, c'est-à-dire avant le 25 janvier 1978. Il n'y a pas dans la Loi sur les douanes de définition du substantif «aliénation» ni du verbe «aliéner». Le mot «aliéner» n'a pas de signification technique particulière; on doit donc lui donner sa signification ordinaire et s'il y a plus d'une signification, on doit lui donner celle qui permet le mieux à la Loi d'atteindre son but et de produire ses effets. A cet égard, j'ai examiné plu- sieurs décisions que m'ont citées les avocats, notamment Ward c. Commissioner of Inland Revenue [ 1956] A.C. 391 la page 400, Greiner c. La Reine 81 DTC 5371 aux pages 5373 et 5374, Duke of Northumberland c. Attorney -General [ 1905] A.C. 406 la page 410, Liverman c. La Reine, une décision de la Cour de l'Échiquier rendue le 3 avril 1970 par le juge Jackett qui était alors président de cette Cour, décision non publiée portant le numéro B3412, aux pages 30 et 31, Roache c. Australian Mercantile Land & Finance Co. Ltd. [1966] 1 N.S.W.R. 384 la page 386 et Victory Hotels Ltd. c. Le ministre du Revenu national 62 DTC 1378. J'ai aussi jeté un coup d'oeil à la jurisprudence américaine que m'a citée l'avocat des demandeurs.
Compte tenu des règles d'interprétation applica- bles à l'exemption du paiement de droits générale- ment exigés en vertu de la Loi sur les douanes, que j'ai rappelées au début des présents motifs, j'estime qu'une interprétation juste de l'expression «ou autrement aliénées» utilisée en conjonction avec le mot «vendues» aux paragraphes 105(1) et 105(3) de la Loi et au numéro tarifaire 70505-1 donnerait à l'expression les significations suivantes: se débar-
rasser de, se défaire de, céder, se départir de, placer en la possession ou sous le contrôle d'une autre personne et transmettre la garde de la chose à une autre personne. La signification de cette expression n'est pas limitée à celle qu'en donnait le jugement dans l'affaire Liverman précitée. Je ne crois pas que le juge, lorsqu'il a rendu jugement dans cette affaire, ait voulu que l'interprétation qu'il a donnée à l'expression «to dispose of»* soit la seule applicable.
L'intention de Diana Glass est tout aussi impor- tante que celle des demandeurs, sinon plus, puis- que c'est elle qui a importé l'automobile et qui en était propriétaire au moment de l'importation. A partir du 22 juin 1977 et jusqu'à la saisie pratiquée en octobre de la même année, c'est Boris Freesman qui en avait la possession. Glass n'avait droit ni à la possession ni à l'usage de l'automobile et elle n'a pas tenté d'exercer ces droits. Boris Freesman avait l'usage exclusif du véhicule. C'est lui seul qui, avait le droit de déterminer quelles répara- tions et quelles modifications seraient faites. Il possédait une option d'achat irrévocable, à prix fixe, et, à la condition d'obtenir l'assentiment de Mlle Glass au prix de vente et de le vendre avant une certaine date, il pouvait, à défaut de lever l'option, disposer du véhicule. L'automobile était aussi grevée en sa faveur d'une hypothèque mobi- lière d'un montant de $28,000. Après la signature de l'entente, M"e Glass n'a manifesté aucun intérêt pour l'automobile ou pour toute autre somme qu'elle aurait pu toucher par suite de sa vente.
Même si l'entente stipulait que Mile Glass con- servait la propriété du véhicule, l'hypothèque mobilière avait pour objet de transférer le titre à Boris Freesman et, selon un principe constant, il faut examiner la substance de tous les contrats et pas seulement leur forme. Compte tenu des droits que ce dernier pouvait exercer sur l'automobile, y compris la possession et l'usage, il ne restait à Mue Glass, en fait et en droit, que très peu des attributs du droit de propriété. L'absence totale d'intérêt pour l'automobile qu'elle a par la suite démontrée en fait foi. En effet, elle n'avait qu'une faculté de
* N.d.T.: Dans l'affaire Liverman, le juge interprétait l'arti- cle 18 de la Loi sur les douanes. Dans la version française de cet article, c'est le terme «disposer» qui est employé et non pas «aliéner» comme à l'article 105.
rachat et le droit de reprendre l'automobile si le demandeur ne se prévalait pas de son option d'achat ou ne vendait pas le véhicule.
Dans ces circonstances, j'estime que l'automo- bile a été «autrement aliénée» parce que Mlle Glass s'en est départie, l'a placée en la possession de Boris Freesman ou sous son contrôle ou lui en a transmis la garde comme dans l'affaire Victory Hotels Ltd. c. Le ministre du Revenu national [précitée] citée par l'avocat des demandeurs. J'ai- merais ajouter cependant que l'automobile, impor- tée comme faisant partie des effets d'un immi grant, ne demeurait exempte de droits qu'en autant qu'elle n'était pas affectée à un autre usage que celui pour lequel elle avait été importée. Elle était exempte de droits que si elle était importée par Mile Glass en tant qu'immigrante «pour son usage domestique ou personnel». Il est important de noter ici que l'usage est lié à la personne de l'immigrant. Cela constitue, à mon avis, un élé- ment essentiel de la notion d'usage présente dans le numéro tarifaire en cause et dans la disposition de la Loi qui y réfère. Mlle Glass n'aurait pas pu importer l'automobile à titre d'élément d'un fonds de commerce, pas plus qu'elle n'aurait pu importer quelque autre marchandise dans le cadre d'une entreprise commerciale. L'exemption attachée à l'automobile ne s'appliquait qu'en autant que le véhicule servait à l'usage personnel de M"e Glass comme ses meubles ou autres effets domestiques.
La création de l'entreprise commune qui avait comme objet l'automobile, et le transfert de pos session et de garde qui a eu lieu pour donner suite à cette entente ont eu pour effet de détourner le véhicule de l'usage pour lequel il avait été admis en franchise en vertu du numéro tarifaire 70505-1. Si, dès le début, elle avait voulu importer l'auto- mobile aux fins décrites dans l'entente discutée en l'instance, elle n'aurait alors bénéficié d'aucune exemption. L'entente et les gestes accomplis pour y donner suite ont détourné le véhicule de l'usage pour lequel il avait été importé et, comme je l'ai déjà dit, l'usage de l'automobile est lié à la per- sonne de l'immigrant.
Pour ces deux motifs, et même pour l'un ou l'autre des deux, j'aurais rejeté l'action; l'action sera donc rejetée. Je présume que les dépens sui- vront le sort de la cause à moins qu'on n'ait des arguments particuliers à me faire valoir sur ce sujet.
Me ZUCKER: Le seul argument que je voudrais faire valoir à la Cour est qu'il semble n'y avoir aucune jurisprudence portant sur ce point de droit. La présente espèce est, je crois, la première cause au Canada à traiter vraiment de cette question. Mon confrère admettra que, dans une certaine mesure, le Ministère, devant ce vide juridique, comptait aussi sur cette cause pour clarifier sa propre position. Il agissait sur la foi de sa propre interprétation du droit et le demandeur ne pouvait manifestement pas obtenir de conseils juridiques quant à l'historique de cette disposition de la loi. La loi ayant été clarifiée autant pour les importa- teurs à venir que pour le gouvernement, la présente instance a certainement constitué un exercice utile. Considérant cela et le fait, avec lequel, Monsieur le juge, vous serez certainement d'accord, que cette aliénation était susceptible de plus d'une interprétation, que celle du demandeur n'était pas déraisonnable et que celui-ci a fait tous les efforts possibles pour se conformer à cet article, il ne devrait pas, dans ces circonstances, y avoir de dépens. La position du gouvernement est meilleure qu'elle ne l'était auparavant puisque ses actions ont maintenant un fondement.
LA COUR: La demanderesse demande-t-elle les dépens?
M e EVERNDEN: Monsieur le juge, je n'ai reçu aucune instruction précise dans un sens ou dans l'autre à propos des dépens, et je préférerais laisser cette question à votre discrétion. Mon confrère a laissé entendre que le gouvernement est en meil- leure position qu'avant, mais si l'on considère que vous dites le droit tel qu'il est et que cela concorde avec l'interprétation que proposait la Couronne à cet égard, notre position n'a pas changé du tout et ne s'est pas améliorée. J'admets cependant que la question qui vous a été soumise était nouvelle. Je ne fais aucune demande particulière concernant les dépens.
LA COUR: Je penserai à la question des frais cet après-midi et en déciderai alors. Merci beaucoup.
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