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A-869-81
Le procureur général du Canada (requérant)
c.
Allan Tanner (intimé)
Cour d'appel, juge en chef Thurlow, juges sup pléants Cowan et Lalande—Toronto, 20 septem- bre 1982.
Contrôle judiciaire Demandes d'examen Assurance- chômage Demande d'annulation de la décision par laquelle un juge-arbitre a rejeté l'appel formé par le requérant contre la décision d'un Conseil arbitral et a jugé que l'intimé avait droit au bénéfice des prestations d'assurance-chômage pour une période durant laquelle il était détenu dans une prison L'art. 45 de la Loi prévoit qu'un détenu n'est pas admissible aux prestations sauf dispositions contraires des règlements En vertu de l'art. 55 du Règlement, un détenu à qui a été accordée la libération conditionnelle, de jour ou autre, une autorisation d'absence temporaire ou un certificat de disponi- bilité pour chercher et accepter un emploi ne perd pas son droit aux prestations du seul fait de l'art. 45 de la Loi La décision par laquelle le Conseil a accueilli la demande de prestations formée par le détenu reposait sur une lettre prove- nant du surveillant d'un établissement correctionnel et faisant savoir que le requérant avait auparavant été libéré pour accep- ter un emploi et que, malgré son licenciement et son renvoi en détention, il serait de nouveau mis en liberté pour les mêmes fins Demande accueillie La possibilité d'obtenir un permis d'absence temporaire pour chercher un emploi n'équi- vaut pas à une »autorisation d'absence temporaire» au sens de l'art. 55 du Règlement L'art. 55 vise le cas d'un détenu à qui une libération conditionnelle ou une autorisation d'absence temporaire a été accordée et qui n'est pas mis dans l'incapacité de chercher du travail par son incarcération; cet article vise également le cas d'un détenu qui est sous garde, mais à qui on a accordé un certificat de disponibilité pour chercher et accep- ter un emploi dans la société Loi de 1971 sur l'assurance- chômage, S.C. 1970-71-72, chap. 48, art. 25 (mod. par S.C. 1974-75-76, chap. 80, art. 7; 1976-77, chap. 54, art. 36), 45 (mod. par S.C. 1974-75-76, chap. 80, art. 17) Règlements sur l'assurance-chômage, C.R.C., chap. 1576, art. 55.
AVOCAT:
Roslyn J. Levine pour le requérant.
A COMPARU:
Allan Tanner pour son propre compte.
PROCUREUR:
Le sous-procureur général du Canada pour le requérant.
L'INTIMÉ POUR SON PROPRE COMPTE:
Allan Tanner, Brantford.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement de la Cour prononcés à l'audience par
LE JUGE EN CHEF THURLOW: Il s'agit d'une demande d'examen et d'annulation de la décision par laquelle un juge-arbitre, nommé en vertu de la Loi de 1971 sur l'assurance-chômage, S.C. 1970- 71-72, chap. 48, a, sur réexamen fondé sur l'article 102 de la Loi, rejeté l'appel formé par le requérant contre la décision d'un Conseil arbitral, et a jugé que l'intimé avait droit au bénéfice des prestations d'assurance-chômage pour une période durant laquelle il était détenu dans une prison.
En vertu de l'article 25 [mod. par S.C. 1974- 75-76, chap. 80, art. 7; 1976-77, chap. 54, art. 36]' de la Loi, pour établir son admissibilité au service des prestations dans un cas comme l'espèce, le prestataire doit prouver qu'il était capable de tra- vailler et disponible à cette fin et incapable d'obte- nir un emploi convenable.
En outre, en vertu de l'article 45 [mod. par S.C. 1974-75-76, chap. 80, art. 171 2 , un détenu dans une prison ou un établissement semblable n'est pas admissible au bénéfice des prestations sauf disposi tions contraires des règlements. A l'époque en cause, l'article 55 du Règlement [C.R.C., chap. 1576] était ainsi rédigé:
55. Un prestataire qui est détenu dans une prison ou dans un établissement du même genre et à qui a été accordée la libération conditionnelle, de jour ou autre, une autorisation d'absence temporaire ou un certificat de disponibilité pour chercher et accepter un emploi dans la société, ne perd pas son droit aux prestations du seul fait de l'article 45 de la Loi.
1 25. Un prestataire n'est pas admissible au service des prestations initiales pour tout jour ouvrable d'une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu'il était
a) soit capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d'obtenir un emploi convenable ce jour-là,
b) soit incapable de travailler ce jour-là par suite d'une maladie, blessure ou mise en quarantaine prévue par les règlements et qu'il aurait été sans cela disponible pour travailler.
2 45. A l'exception des cas prévus à l'article 31, un prestataire n'est pas admissible au bénéfice des prestations pour toute période pendant laquelle
a) il est détenu dans une prison ou un établissement sembla- ble, ou
b) pendant qu'il est hors du Canada, sauf prescription contraire.
Voici la décision du Conseil arbitral:
[TRADUCTION] Le Conseil a examiné les éléments de preuve disponibles et est unanime à reconnaître que le prestataire est admissible au bénéfice des prestations pendant la période allant du 26 novembre 1980 au 12 décembre 1980.
Puisque le prestataire a perdu son emploi lors d'un licenciement collectif, qu'il n'était donc pas requis de chercher du travail pendant la période en question, et qu'il ressort des éléments de preuve provenant de l'établissement pénitentiaire que le presta- taire serait libéré pour accepter un emploi, le Conseil trouve sans fondement la conclusion selon laquelle le prestataire n'était pas disponible pour travailler en vertu de la Loi.
Les éléments de preuve auxquels le Conseil fait allusion ne se trouvent pas dans le dossier dont dispose la Cour, mais il semble clair que la ques tion sur laquelle le Conseil s'est penché était celle de savoir si l'intimé était disponible pour travailler, et que le Conseil a jugé qu'il était disponible à cette fin. Le Conseil ne semble pas avoir examiné la question posée par l'article 55 du Règlement, ni répondu à celle-ci, savoir si la prison avait accordé à l'intimé une autorisation d'absence temporaire au sens de cet article. S'ils l'ont fait, il semble qu'ils aient considéré la possibilité d'obtenir une autorisation d'absence temporaire pour travailler comme équivalant à une «absence temporaire» au sens de l'article 55 du Règlement.
Nous estimons que cela constitue une erreur de droit de la part du Conseil. A notre avis, l'article 55 du Règlement vise le cas une libération conditionnelle ou une autorisation d'absence tem- poraire a été accordée au détenu, et que ce dernier n'est pas mis dans l'incapacité de chercher du travail par son incarcération. Cet article prévoit également qu'un détenu qui peut être encore sous garde, mais à qui on a accordé un certificat de disponibilité pour chercher ou accepter un emploi dans la société, ne perd pas son droit aux presta- tions du fait de l'article 45 de la Loi. De plus, le Conseil n'a pas conclu qu'on avait accordé à l'in- timé une autorisation d'absence temporaire ou un certificat, et il est constant que l'intimé est demeuré en prison.
L'affaire ayant été portée devant le juge-arbitre, l'appel a été accueilli au motif qu'il n'existait aucune preuve qu'une autorisation d'absence tem- poraire avait été accordée. A notre avis, cette décision était bien fondée.
A la suite d'une demande de réexamen, le juge- arbitre a toutefois décidé que la condition prévue par l'article 55 du Règlement avait été remplie puisque, ainsi qu'il est indiqué dans sa décision, il y avait une lettre provenant du surveillant de la prison de Brantford, qui est ainsi rédigée:
[TRADUCTION] La personne susmentionnée a été admise dans cet établissement le 25 novembre 1980, et transférée au centre correctionnel Burtch le 28 novembre 1980.
On a accordé à la personne susmentionnée une autorisation d'absence temporaire pour aller travailler chez Massey- Ferguson Industries Ltd., mais lorsqu'on a pris contact avec celle-ci, il n'y avait pas de travail disponible en raison du licenciement; aussi a-t-elle été transférée au centre correction- nel Burtch pour alléger le surpeuplement dans cet établisse- ment.
Nous ne pensons pas que cette lettre puisse être considérée comme une preuve d'absence tempo- raire au sens de l'article 55 du Règlement. Il ne s'agit pas de la preuve d'une absence en fait, et il est constant que l'intimé est demeuré en déten- tion pendant toute la période en cause. Par consé- quent, la décision du juge-arbitre n'est pas soutenable.
La décision du juge-arbitre est annulée, et l'af- faire renvoyée à ce dernier pour nouvelle décision fondée sur le principe que l'article 55 du Règle- ment n'exemptait pas l'intimé de l'application de l'article 45 de la Loi.
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