T-2163-80
Atlantic Sandblasting & Coatings Inc. (demande-
resse)
c.
Marine Industries Limited, Gulf Oil Canada
Limited et le navire Gulf MacKenzie (défendeurs)
Division de première instance, juge en chef adjoint
Jerome—Toronto, 8 février; Ottawa, 3 mars 1982.
Pratique — Requête en radiation des plaidoiries — Contrat
de réparation de navire — La demanderesse réclame des
dommages-intérêts pour la perte découlant de l'exécution du
travail supplémentaire que ne révélaient pas les plans et devis
— Il n'est nullement allégué dans la déclaration que les
propriétaires aient participé à la négociation du contrat, que la
demanderesse ait compté sur le navire ou ses propriétaires
pour obtenir paiement, ou que les propriétaires du navire aient
incité l'exécution du travail — Il échet d'examiner si la
déclaration révèle une cause d'action in rem — La cause
d'action, si cause il y a, relève-t-elle de la compétence de la
Cour? — L'action intentée contre les propriétaires du navire
doit être déterminée en vertu du droit ordinaire de la négli-
gence et non en vertu d'une loi du Parlement ni du droit
maritime canadien — L'art. 22(2)n) de la Loi ne s'applique
pas, puisqu'on n'a allégué aucun engagement contractuel de la
part des propriétaires — L'art. 22(2)m) n'est pas applicable, la
demande n'étant pas une demande relative à des services — Il
ne s'agit nullement d'une action in rem — Requête accueillie
— Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10,
art. 22(I ), (2)m),n).
REQUÊTE.
AVOCATS:
G. R. Strathy pour la demanderesse.
Edouard Baudry pour la défenderesse Marine
Industries Limited.
David I. L. Hamer pour les défendeurs Gulf
Oil Canada Limited et le navire Gulf
MacKenzie.
PROCUREURS:
McTaggart, Stone, Winters & Herridge,
Toronto, pour la demanderesse.
Lavery, O'Brien, Montréal, pour la défende-
resse Marine Industries Limited.
McCarthy & McCarthy, Toronto, pour les
défendeurs Gulf Oil Canada Limited et le
navire Gulf MacKenzie.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT JEROME: C'est le
8 février 1982, Toronto, que j'ai entendu la
présente demande en radiation de la déclaration,
introduite par l'avocat des défendeurs Gulf Oil
Canada Limited et du navire Gulf MacKenzie.
D'après les défendeurs, la déclaration ne révèle
aucune cause d'action in rem et, de toute façon,
aucune cause d'action qui relève de la compétence
de cette Cour.
La demanderesse réclame à tous les défendeurs,
à titre de dommages-intérêts, la somme de $44,775
qui, selon elle, représente la perte qu'elle a subie
par suite d'un contrat de réparation du navire Gulf
MacKenzie des défendeurs. Seules la demande-
resse et la défenderesse Marine Industries Limited
ont participé aux négociations concernant le con-
trat. La teneur du contrat a été négociée unique-
ment avec cette défenderesse, et c'est celle-ci qui a
payé la demanderesse à l'achèvement des travaux.
Il n'est nullement allégué que les propriétaires du
navire aient participé, de quelque façon que ce
soit, à la négociation du contrat ou à l'approbation
du travail. Il n'est nullement allégué dans la décla-
ration que la demanderesse, en signant le contrat,
ait compté sur le navire ou les propriétaires pour
obtenir paiement; il n'est pas non plus allégué que
les propriétaires du navire aient, de quelque façon
que ce soit, incité la demanderesse à exécuter le
travail sur le navire de manière à en obtenir un
enrichissement sans cause. Les paragraphes 1 à 8
de la déclaration décrivent les événements qui ont
amené la conclusion du contrat entre la demande-
resse et la défenderesse Marine Industries Limited.
Les paragraphes 9 à 15 sont ainsi rédigés:
[TRADUCTION] 9. Peu de temps après, la demanderesse com-
mença le travail sur le navire et au cours de ce travail, elle se
rendit compte qu'une superficie de 7,500 pieds carrés ne figu-
rait pas, sur les plans et devis joints à la demande de prix de
M.I.L., dans la description des cales du navire qu'il s'agissait de
décaper à la sableuse et de peindre au complet.
10. La demanderesse avisa alors les défendeurs ou leurs manda-
taires et représentants du travail supplémentaire à faire et
demanda à M.I.L. d'augmenter le prix du contrat de
$44,775.00 pour tenir compte du surcroît de travail en cause,
mais jusqu'à la date des présentes, celle-ci a refusé de le faire.
11. La demanderesse a décapé à la sableuse et peint toutes les
cales du navire et le travail supplémentaire exécuté, que ne
révélaient pas les plans et devis des défendeurs, lui a causé une
perte, un préjudice et des dépenses, le tout s'élevant à
$44,775.00.
12. La demanderesse prétend que cette perte, ce préjudice et
ces dépenses découlaient de la violation du contrat par la
défenderesse M.I.L. en ce que celle-ci ne lui avait pas fourni de
plans et devis qui indiquaient exactement le travail à accomplir
en vertu du contrat.
13. Subsidiairement, M.I.L. et Gulf ont, par négligence, incor-
rectement représenté à la demanderesse le travail à exécuter.
14. Toujours à titre subsidiaire, la demanderesse fait valoir que
son travail a entraîné un enrichissement sans cause pour les
défendeurs, et elle réclame dédommagement sur la base de
l'action quantum meruit.
15. La demanderesse réclame donc:
a) $44,775.00 titre de dommages-intérêts;
b) subsidiairement, des dommages-intérêts évalués sur la
base de l'action quantum meruit;
c) un intérêt, au taux commercial, à compter du 1" août
1978 jusqu'à la date de jugement ou de paiement;
d) ses frais de cette action; et
e) tout autre redressement que cette Cour jugera approprié.
Quelle que puisse être la nature de la demande
contre la défenderesse Marine Industries Limited,
il est absolument clair que cette action contre les
propriétaires défendeurs repose uniquement sur la
négligence. Il y a donc à la déterminer en vertu du
droit ordinaire de la négligence et non en vertu
d'une loi du Parlement du Canada ni du «droit
maritime canadien», expression employée au
paragraphe 22(1) de la Loi sur la Cour fédérale'.
Les avocats des parties s'accordent pour dire qu'à
l'article 22, les seuls alinéas susceptibles d'applica-
tion en l'espèce sont les alinéas m) et n), lesquels
sont ainsi rédigés:
22....
(2) Sans restreindre la portée générale du paragraphe (1), il
est déclaré pour plus de certitude que la Division de première
instance a compétence relativement à toute demande ou à tout
litige de la nature de ceux qui sont ci-après mentionnés:
m) toute demande relative à des marchandises, fournitures
ou services fournis à un navire, où que ce soit, pour son
exploitation ou son entretien, et notamment, sans restreindre
la portée générale de ce qui précède, les demandes relatives à
l'aconage ou gabarage;
n) toute demande née d'un contrat relatif à la construction, à
la réparation ou à l'équipement d'un navire;
J'écarte tout de suite l'alinéa 22(2)n), puisqu'on
n'a allégué aucun engagement contractuel de la
part des propriétaires. Quant à l'alinéa in), la
S.R.C. 1970 (2' Supp.), c. 10, modifié par S.C. 1973-74,
c. 17, art. 8; S.C. 1974-75-76, c. 18, art. 9.
question serait plus difficile s'il s'agissait d'une
demande relative au coût de réparation fondée sur
la responsabilité prima facie du propriétaire ou du
navire, mais, en l'espèce, la demanderesse sollicite
dans son action des dommages-intérêts pour une
perte qu'elle attribue à l'insuffisance des plans et
devis due, je le présume, à la négligence des pro-
priétaires du navire. Il ne s'agit donc pas, si je
comprends bien l'alinéa 22(2)m), d'une demande
relative à des services.
Je ne vois donc aucune base sur laquelle la
demanderesse peut fonder une action in rem, et si
une action fondée sur la négligence était recevable
contre les propriétaires, je ne vois rien dans cette
action qui fasse qu'elle relève de la compétence de
la Cour fédérale du Canada.
Par conséquent, il sera émis une ordonnance
portant radiation de toute mention dans la déclara-
tion des défendeurs Gulf Oil Canada Limited et le
navire Gulf MacKenzie. Ces derniers ont droit à
leurs dépens.
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