T-2132-78
Midwest Oil Production, Ltd. (demanderesse)
c.
La Reine (défenderesse)
Division de première instance, le juge Mahoney—
Calgary, 11 janvier; Ottawa, 28 janvier 1982.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — Appel des
cotisations établies pour les années d'imposition 1974 et 1975
— Tout le pétrole brut était livré à la Commission de mise en
marché du pétrole de l'Alberta pour être acheté par celle-ci —
Des crédits au titre des stimulants au forage ont été affectés
par la demanderesse au règlement de redevances sur le gaz
naturel payables à l'Alberta — Il échet d'examiner si la
redevance relative au pétrole brut livrée en nature à la Com
mission constitue une somme que vise l'art. 12(1)o) de la Loi
de l'impôt sur le revenu — Il échet de déterminer si la somme
qui doit, en vertu de l'art. 12(1)o) être incluse dans le revenu, à
titre de redevances sur le gaz naturel, est la somme véritable-
ment versée ou s'il faut aussi y ajouter la somme des crédits
au titre des stimulants au forage affectée à la réduction de la
somme qui autrement aurait été payable — Il faut examiner si
l'art. 12(1)o) est ultra vires — Il s'agit de déterminer si l'on
peut opposer à la demanderesse une fin de non-recevoir pour
l'empêcher de soulever pour la première fois un point devant
cette Cour — Action rejetée — Loi de l'impôt sur le revenu,
S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 12(1)o), 165(1), 172(2), 175(3),
248(1) — The Mines and Minerals Act, S.R.A. 1970, c. 238 ;
art. 31(1),(2),(4), 121(1), 142(1),(2), 170.1(1) — The Petro
leum Marketing Act, S.A. 1973, c. 96, art. 7(1), 15(1), 17,
18(1) — Exploratory Drilling Incentive Regulations, 1974,
Règlement de l'Alberta 18/74, art. 10 — Acte de l'Amérique
du Nord britannique, 1867, 30 & 31 Vict., c. 3 (R.-U.) /S.R.C.
1970, Appendice II, n° 5], art. 125.
La demanderesse fait appel des cotisations établies pour ses
années d'imposition 1974 et 1975. L'alinéa 12(1)o) de la Loi de
l'impôt sur le revenu exige d'un contribuable qu'il inclue dans
son revenu imposable toute somme devenue recevable au cours
de l'année en vertu d'une obligation imposée par une loi à titre
de redevance ou d'équivalent, rattachée à la production, au
Canada, de pétrole tiré d'un puits de pétrole situé au Canada
sur un bien sur lequel le contribuable avait, à la date de cette
production, le droit d'extraire du pétrole. Depuis le 1" décem-
bre 1974, tout le pétrole brut doit être livré à la Commission de
mise en marché du pétrole de l'Alberta (ci-après appelée la
CMMPA) au compteur de transfert, qui achète la partie du
pétrole brut appartenant au producteur et lui en paie le prix en
temps voulu. La demanderesse soutient que depuis cette date
aucune somme n'est recevable par l'Alberta à titre de
redevance. Il échet donc de déterminer si la redevance relative
au pétrole brut, ou sa valeur, payable à l'Alberta et que la
demanderesse a livrée en nature à la CMMPA après le 1"
décembre 1974, constitue une somme que vise l'alinéa 12(1)o).
La demanderesse a accumulé des crédits au titre des stimulants
au forage dans le cadre du programme, instauré par l'Alberta,
de stimulants au forage de recherche. Ces crédits pouvaient être
employés pour remplir des obligations, dont le paiement de
redevances sur le gaz naturel. Le Ministre a cotisé la demande-
resse sur la base que les redevances sur le gaz naturel receva-
bles par l'Alberta comprenaient la somme véritablement versée
plus ces crédits. La demanderesse soutient que les redevances
sur le gaz naturel recevables par l'Alberta ont été réduites par
l'emploi des crédits affectés. Il échet c'.e déterminer en second
lieu si la somme dont l'alinéa 12(1)o) exige l'inclusion dans le
revenu de la demanderesse, à titre de redevance sur le gaz
naturel, est la somme véritablement versée à l'Alberta ou s'il
faut aussi y ajouter la somme des crédits au titre des stimulants
au forage, affectée à la réduction de la somme qui autrement
aurait été payable. La troisième question consiste à déterminer
si l'alinéa 12(1)o) est ultra vires, compte tenu de l'article 125
de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, qui inter-
dit l'imposition des terres appartenant à la Couronne. Il faut
déterminer en dernier lieu si l'on peut opposer à la demande-
resse une fin de non-recevoir pour l'empêcher de soulever un
point au motif qu'elle n'en a pas fait état dans son avis
d'opposition.
Arrêt: l'action est rejetée. Le montant de l'impôt exigible du
contribuable est établi en fonction de la somme recevable par
l'Alberta à titre de redevance, mais c'est le contribuable qui est
assujetti à la taxe, et non la redevance ou l'Alberta. L'appel
d'une décision de la Commission de révision de l'impôt à la
Cour fédérale constitue un nouveau procès. On ne saurait
opposer à un contribuable une fin de non-recevoir pour l'empê-
cher de soulever, dans un appel formé devant la Cour fédérale
en application du paragraphe 172(2) de la Loi de l'impôt sur le
revenu, un point au seul motif que ce point est soulevé pour la
première fois dans les pièces de procédure. Comme dans toute
action, les questions sont celles qui ressortent des pièces de
procédure. Les cotisations, fondées sur l'application de l'alinéa
12(1)o), étaient conformes à la Loi. Le mot «recevable», dans
son sens habituel, n'implique pas un changement dans le droit
de propriété ou dans le droit du titulaire d'un bien; il implique
un changement dans la garde ou dans la possession de ce même
bien. Même s'il est impossible avant la livraison du pétrole brut
à la CMMPA, et peut-être aussi après cette livraison, d'identi-
fier une mesure spécifique de pétrole brut, et de dire qu'elle
constitue une mesure de la partie attribuée à la redevance de
l'Alberta, il est incontestable qu'en fait, cette partie attribuée à
la redevance existe depuis le moment où le locataire en prend
possession à la tête du puits. Le paragraphe 170.1(1) de The
Mines and Minerals Act de l'Alberta exige que la partie
attribuée à la redevance soit livrée à la CMMPA, et l'alinéa
15(1)a) de The Petroleum Marketing Act exige que la
CMMPA en prenne livraison. Avant cette livraison, la partie
attribuée à la redevance de l'Alberta est, au sens habituel de ce
mot, «recevable» par la CMMPA. La valeur de cette partie est
une somme, que vise nettement l'alinéa 12(1)o), et qui doit être
incluse dans le revenu du locataire. L'article 10 du Exploratory
Drilling Incentive Regulations, 1974 prévoit qu'un crédit au
titre des stimulants au forage «peut être affecté au paiement des
sommes payables» par la demanderesse, notamment des rede-
vances sur le gaz naturel. Les crédits n'ont pas réduit, en 1974
et en 1975, la somme recevable par l'Alberta à titre de rede-
vance sur la production de gaz naturel par la demanderesse; ils
pouvaient seulement, si tel était le choix de la demanderesse,
être affectés au paiement partiel de cette somme. Et c'est ce
que la demanderesse a fait.
Arrêts appliqués: Phillips c. La corporation de la ville de
Sault-Sainte-Marie [1954] R.C.S. 404; Goldman c. Le
ministre du Revenu national [1951] R.C.É. 274. Arrêts
analysés: Spence c. Le ministre du Revenu national 64
DTC 651; Rosenberg c. Le ministre du Revenu national 68
DTC 830.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
John M. Roland, c.r., et Brian G. Morgan
pour la demanderesse.
T. B. Smith, c.r., et C. T. A. MacNab pour la
défenderesse.
PROCUREURS:
Osier, Hoskin & Harcourt, Toronto, pour la
demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: La demanderesse fait
appel des cotisations relatives à ses déclarations
d'impôt sur le revenu pour les années se terminant
le 31 décembre 1974 et le 31 décembre 1975. Cet
appel porte sur l'alinéa 12(1)o) de la Loi de l'im-
pôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, modifiée
par S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 1, en vigueur entre
le 18 novembre 1974 et le 25 mai 1976:'
12. (1) Sont à inclure dans le calcul du revenu tiré par un
contribuable d'une entreprise ou d'un bien, au cours d'une
année d'imposition, les sommes appropriées suivantes:
o) toute somme (autre qu'une somme visée à l'alinéa
18(1)m), payée ou payable par le contribuable, ou une
somme prescrite), devenue recevable au cours de l'année en
vertu d'une obligation imposée par une loi ou d'une obliga
tion contractuelle qui remplace une obligation imposée par
une loi
(i) par Sa Majesté du chef du Canada ou d'une province,
(ii) par un mandataire de Sa Majesté du chef du Canada
ou d'une province, ou
(iii) par une corporation, commission ou association con-
trôlée directement ou indirectement, de quelque façon que
ce soit, par Sa Majesté du chef du Canada ou d'une
province ou par un mandataire de Sa Majesté du chef du
Canada ou d'une province
à titre de redevance ou d'équivalent, de taxe (autre qu'une
taxe ou fraction de taxe qui peut raisonnablement être
considérée comme une taxe municipale ou scolaire levée afin
de fournir des services dans le voisinage immédiat du bien du
' S.C. 1974-75-76, c. 26, art. 4(2), modifié par S.C. 1977-78,
c. 1, art. 5(1).
contribuable), de loyer, de prime, de contribution ou à un
autre titre ou à titre de somme, quelle que soit la façon dont
elle est désignée, qui peut être raisonnablement considérée
comme tenant lieu de redevance ou d'équivalent, de taxe, de
loyer, de prime, de contribution ou d'autre somme (que cette
redevance ou l'équivalent, cette taxe, ce loyer, cette prime,
cette contribution ou cette autre somme soit recevable en
vertu de toute autre loi ou d'un contrat), qui peut raisonna-
blement être considérée comme rattachée
(iv) à l'acquisition, à l'aménagement ou à la propriété, par
un contribuable, d'un avoir minier canadien ou d'un bien
qui aurait été un avoir minier canadien s'il avait été acquis
après 1971, ou
(v) à la production, au Canada,
(A) de pétrole, de gaz naturel ou d'hydrocarbures appa-
rentés, ou
(B) de métaux ou de minerai industriel, jusqu'à un stade
ne dépassant pas celui du métal primaire ou de son
équivalent,
tirés d'un puits de pétrole ou de gaz ou de ressources
minérales situées au Canada sur un bien sur lequel le
contribuable avait, à la date de cette production, le droit
d'extraire du pétrole, du gaz naturel ou d'autres hydrocar-
bures apparentés ou le droit d'extraire des métaux ou du
minerai industriel.
A une exception près, qui n'est pas pertinente, le
paragraphe 248 (1) détermine que «montant» ou
«somme» signifient «de l'argent, des droits ou
choses exprimés sous forme d'un montant d'argent,
ou leur valeur exprimée en argent ...».
Les deux principales questions en litige sont les
suivantes:
1. Il échet de déterminer si la redevance relative
au pétrole brut, ou sa valeur, payable à Sa
Majesté du chef de la province de l'Alberta
(ci-après appelée «Alberta»), et que la demande-
resse a livrée en nature à la Commission de mise
en marché du pétrole de l'Alberta* (ci-après
appelée la «CMMPA»), après le 1" décembre
1974, constitue une somme que vise l'alinéa
12(1)o), et
2. Il échet de déterminer si la somme dont
l'alinéa 12(1)o) exige l'inclusion dans le revenu
de la demanderesse, à titre de redevances sur le
gaz naturel, est la somme véritablement versée à
l'Alberta ou s'il faut aussi y ajouter la somme
des crédits au titre des stimulants au forage
(ci-après appelés les «CSF»), affectée à la réduc-
tion de la somme qui autrement aurait été
payable.
* N.D.T.: Cette Commission s'appelle officiellement «Alber-
ta Petroleum Marketing Commission».
Je les appellerai respectivement la question de la
redevance sur le pétrole brut et la question de la
redevance sur le gaz naturel. Outre ces deux ques
tions qu'elle a soulevées, la demanderesse a égale-
ment contesté à l'audience la constitutionnalité de
l'alinéa 12(1)o), même si ses pièces de procédure
n'en faisaient pas mention. Pour sa part, la défen-
deresse a soulevé l'irrecevabilité de la question de
la redevance sur le pétrole brut au motif que la
demanderesse n'en avait pas fait état dans ses avis
d'opposition. Il est approprié de trancher d'abord
ces questions.
La demanderesse s'appuie sur l'article 125 de
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867 2
pour contester la constitutionnalité de l'alinéa
12(1)o):
125. Nulle terre ou propriété appartenant au Canada ou à
aucune province en particulier ne sera sujette à la taxation.
Dans Phillips c. La corporation de la ville de
Sault-Sainte-Marie 3 , la Cour suprême du
Canada étudie l'imposition d'une taxe provinciale
à l'occupant d'un bien-fonds qui appartient à la
Couronne. Les appelants, qui tombaient sous la
définition élargie de [TRADUCTION] «occupant>,
étaient tenus de résider sur un bien-fonds qui
appartenait à Sa Majesté du chef du Canada. Le
juge Taschereau, plus tard juge en chef, rend le
jugement de la Cour et déclare à la page 407:
[TRADUCTION] Il ne fait aucun doute qu'aux termes de l'art.
32(1), l'évaluateur attribue une valeur aux biens de la Cou-
ronne pour fins de taxation; toutefois, la personne cotisée à
l'égard du terrain n'est pas la Couronne, mais l'noccupant, qui
d'ailleurs paie la taxe. Le montant de la taxe est établi en
fonction de la valeur du terrain, mais la Loi n'assujettit pas le
terrain à la taxation et, ainsi, n'entre pas en conflit avec l'art.
125 de l'Acte de l'A.N.B.
En l'espèce, le montant de l'impôt exigible du
contribuable est établi en fonction de la somme
recevable par l'Alberta à titre de redevance, mais
c'est le contribuable qui est assujetti à la taxe, et
non la redevance ou l'Alberta.
La fin de non-recevoir soulevée par la défende-
resse se fonde sur l'argument selon lequel la
demanderesse a inclus, à titre de revenus imposa-
bles dans ses déclarations d'impôt sur le revenu, les
sommes qui font l'objet de la question de la rede-
2 30 & 31 Vict., c. 3 (R.-U.) [S.R.C. 1970, Appendice II,
n° 5].
3 [1954] R.C.S. 404.
vance sur le pétrole brut. La demanderesse a éga-
lement inclus, comme l'exige l'alinéa 12(1)o), la
redevance sur le gaz naturel dont elle avait déduit
la somme des CSF. Cette déduction est le seul
point qui a été soulevé par la demanderesse à la
fois dans ses avis d'opposition et dans le présent
appel. La question de la redevance sur le pétrole
brut a été soulevée pour la première fois dans la
déclaration produite en l'espèce. La défenderesse
reconnaît volontiers que, si la demanderesse avait
soulevé la question de la redevance sur le pétrole
brut dans ses déclarations ou par ses avis d'opposi-
tion, ses arguments auraient alors été identiques à
ceux qu'elle fait actuellement valoir devant cette
Cour.
La Loi porte:
165. (1) Un contribuable qui s'oppose à une cotisation prévue
par la présente Partie peut, dans les 90 jours de la date
d'expédition par la poste de l'avis de cotisation, signifier au
Ministre un avis d'opposition, en double exemplaire, dans la
forme prescrite, exposant les motifs de son opposition et tous les
faits pertinents.
172. ...
(2) Lorsqu'un contribuable a signifié un avis d'opposition à
une cotisation visée à l'article 165, il peut, au lieu d'interjeter
appel auprès de la Commission de révision de l'impôt en vertu
de l'article 169, interjeter appel auprès de la Cour fédérale du
Canada à une date où, selon l'article 169, il lui aurait été
permis de le faire à la Commission de révision de l'impôt.
L'article 169 pose la même condition au droit
d'appel devant la Commission de révision de l'im-
pôt. Celle-ci a d'ailleurs, à de nombreuses reprises,
jugé qu'elle n'était pas compétente pour entendre
l'appel d'une question qui n'avait pas été soulevée
par l'avis d'opposition. A titre d'exemple, et c'est
un cas extrême, dans Spence c. M.R.N. 4 , le contri-
buable avait soulevé par son avis d'opposition la
question de savoir si une société dont il était
actionnaire, lui avait conféré un avantage lors-
qu'elle a payé, dans le cadre d'une transaction, la
somme convenue en règlement d'une poursuite en
dommages-intérêts dirigée contre lui, ainsi que le
montant des frais judiciaires accessoires. Devant la
Commission, le contribuable a réclamé, à titre de
déduction de son revenu, certaines pertes qu'il
disait avoir subies dans l'exploitation de sa ferme
alors qu'il ne les avait pas réclamées dans sa
4 64 DTC 651.
déclaration initiale et qu'il n'avait cherché à pro-
duire une déclaration modifiée à cet égard qu'a-
près que sa déclaration initiale eut été cotisée et
qu'il eut fait appel. Un autre exemple, qui est un
cas certainement moins extrême, est celui de
Rosenberg c. M.R.N. 5 Dans cette affaire, le Minis-
tre avait rejeté la déduction de $3,550 réclamée
par le contribuable, à titre de perte sur un prêt
consenti à une société dont il était actionnaire, et il
avait aussi rejeté la déduction de la somme de
$2,450 que le contribuable avait déboursée en sa
qualité de caution de la société pour l'emprunt
bancaire. Dans son avis d'opposition, le contribua-
ble n'avait fait mention que de la somme de
$3,550, et la Commission, se déclarant incompé-
tente, a refusé d'entendre le contribuable au sujet
de la somme de $2,450.
La Cour fédérale ne semble pas s'être prononcée
directement sur cette question. Dans Goldman c.
M.R.N. 6 , le président Thorson devait déterminer si
l'appel d'une décision de la Commission d'appel de
l'impôt sur le revenu à la Cour de l'Échiquier
constituait un nouveau procès. Après une étude
fouillée de la loi alors en vigueur et de celle qu'elle
avait remplacée, il conclut en ces termes:
[TRADUCTION] Par tous ces motifs, je conclus que l'appel
d'une décision de la Commission d'appel de l'impôt sur le
revenu devant cette Cour, qu'il soit interjeté par le contribuable
ou par le Ministre, constitue un nouveau procès des questions
en litige. Je conclus aussi que les parties ne sont pas astreintes à
se limiter aux questions de fait ou de droit qui ont été débattues
devant la Commission, mais qu'elles sont entièrement libres de
soulever toute question, même si cette question diffère de celles
qui ont été soulevées devant la Commission. Je conclus enfin
que la Cour a l'obligation d'entendre et de trancher ces ques
tions sans égard au procès entendu par la Commission et sans
être influencée par les conclusions de celle-ci.
En rejetant l'appel de ce jugement, la Cour
suprême du Canada ne s'est pas prononcée spécifi-
quement sur cette question 7 . Depuis lors, les dispo
sitions pertinentes de la Loi ont été considérable-
ment modifiées; toutefois, la conclusion selon
laquelle l'appel à la Cour fédérale d'une décision
de la Commission de révision de l'impôt constitue
un nouveau procès, demeure valable. Puisqu'il en
est ainsi, je ne vois pas comment cette Cour pour-
rait être incompétente pour entendre une question
68 DTC 830.
6 [1951] R.C.É. 274 la p. 281.
7 [1953] R.C.S. 211.
qui n'a pas été soulevée dans l'avis d'opposition,
lorsque l'appel est interjeté directement devant la
Cour fédérale conformément au paragraphe
172(2).
Je ne pense pas que l'on puisse opposer à un
contribuable une fin de non-recevoir, quelle qu'elle
soit, pour l'empêcher de soulever, dans un appel
formé devant cette Cour en application du para-
graphe 172(2) de la Loi, un point au seul motif
qu'il n'en a pas fait état dans son avis d'opposition
ou, le cas échéant, devant la Commission de révi-
sion de l'impôt. Il faut souligner que c'est la
cotisation du Ministre, et non les motifs de celle-ci,
qui fait l'objet de l'appel. L'article 175 de la Loi
énonce les moyens de se pourvoir en appel devant
la Cour fédérale et déclare de plus:
175... .
(3) Un appel interjeté en vertu du présent article est réputé
être une action en Cour fédérale à laquelle s'appliquent la Loi
sur la Cour fédérale et les règles de la Cour fédérale concer-
nant une action ordinaire, sous réserve des règles spéciales
établies relativement à ces appels et sauf que ....
Aucune des exceptions prévues au paragraphe
175(3) n'est pertinente en l'espèce. Comme dans
toute action, la Cour doit statuer sur les questions
qui ressortent des pièces de procédure, sans égard
à ce qui les a précédées. Cela ne veut pas dire que
le fisc ne pourrait pas plaider avec succès une fin
de non-recevoir, mais celle-ci ne devrait pas se
fonder uniquement sur l'argument selon lequel une
question est soulevée pour la première fois dans les
pièces de procédure produites devant cette Cour.
Une grande partie du procès a porté sur une
preuve d'un caractère explicatif. Il n'est pas néces-
saire de l'examiner en détail. Il suffit de commen-
cer au point oil le pétrole et le gaz naturel, qui,
sous terre, appartiennent à l'Alberta, sont extraits
par les méthodes conventionnelles et atteignent la
surface. Je vais d'abord traiter la question de la
redevance sur le pétrole brut.
On peut décrire comme suit la situation habi-
tuelle en matière de production pétrolière, du
moins en ce qui concerne la demanderesse. C'est
un mélange de pétrole, de gaz et d'eau qui jaillit
d'un puits de pétrole ou qui est pompé à la surface.
La quantité de ce mélange est mesurée à la tête du
puits et le mélange est pompé jusqu'à un centre de
production qui reçoit également de tels mélanges
en provenance d'autres puits qui appartiennent à
différentes personnes. Une entente contractuelle
conclue par tous les producteurs intéressés régit
l'usage de ce centre et, entre autres, désigne parmi
eux un responsable du centre. La production de
chaque puits est vérifiée périodiquement pour en
déterminer la composition. Au centre, la produc
tion de tous les puits se mélange pendant le traite-
ment qui sépare l'eau, le gaz et le pétrole. Le
pétrole brut coule à travers des réservoirs de stock-
age jusqu'à l'oléoduc d'un transporteur commun.
Un compteur de transfert mesure le volume du
pétrole brut au point de livraison au transporteur.
C'est à ce point que passe à l'acheteur la propriété
du pétrole brut, que son prix est fixé par la
CMMPA et qu'est déterminé le volume acheté. De
même, c'est à ce point qu'est fixé le volume de
pétrole réservé au paiement de la redevance de
l'Alberta. Pour établir la répartition mensuelle de
la redevance et du pétrole brut produit entre les
différents puits et leurs propriétaires, il faut se
servir de calculs mathématiques qui tiennent
compte de la production brute de chaque puits et
de sa composition déterminée par des tests effec-
tués pendant le mois. Sans discuter longuement de
détails complexes, il suffit de constater que le
responsable du centre de production est le manda-
taire de tous les producteurs qui utilisent ce centre,
aux fins de recevoir et de répartir leurs paiements,
ainsi qu'aux fins de s'acquitter de certaines de
leurs obligations, dont la livraison à la CMMPA
de la partie du pétrole brut qui constitue la rede-
vance de l'Alberta.
Avant décembre 1974, le producteur vendait, au
compteur de transfert, tout le pétrole brut à l'ache-
teur, y compris la partie attribuée à la redevance
de l'Alberta. Le producteur devait alors payer à
l'Alberta le prix qu'il recevait pour la partie du
pétrole brut attribuée à la redevance. Depuis 7 h le
ler décembre 1974, tout le pétrole brut doit être
livré à la CMMPA au compteur de transfert. La
CMMPA achète à ce point de livraison la partie
du pétrole brut qui appartient au producteur et lui
en paie le prix en temps voulu. La demanderesse
soutient qu'aucune somme n'est recevable par l'Al-
berta, à titre de redevance ou de somme équiva-
lente, depuis l'introduction de ce nouveau régime,
et que l'alinéa 12(1)o) ne s'applique plus à la
valeur de la partie du pétrole brut qui constitue la
redevance de l'Alberta.
Les lois provinciales et les baux conclus avec
l'Alberta conformément à ces lois définissent les
droits et obligations de la demanderesse. Les divers
baux contiennent quelques différences dans leur
formulation; toutefois, ces modifications ne me
semblent pas pertinentes en l'espèce. La partie
importante d'un des baux qui a été produit en
preuve (la pièce n° 10), prévoit ce qui suit:
[TRADUCTION] EN FOI DE QUOI, LES PARTIES CONVIEN-
NENT qu'en considération des loyers et redevances ci-après
prévus ... Sa Majesté accorde par les présentes au locataire ...
le droit exclusif de faire de l'exploration pétrolière, d'exploiter
les gisements trouvés et d'en extraire le pétrole et le gaz naturel
dans et sous ... avec le droit de vendre le pétrole et le gaz
naturel extraits.
... et, pour cela, paie à Sa Majesté, sur tout le pétrole et le gaz
naturel extraits de cet emplacement, de même que sur toutes les
matières extraites de ceux-ci, au taux ou aux taux qui sont ou
seront prescrits par le lieutenant-gouverneur en conseil, une
redevance libre de toute déduction de quelque nature que ce
soit. La redevance maximale qui sera payable sur le pétrole et
le gaz naturel ... ne devra pas être supérieure au sixième de la
production de cet emplacement.
La dernière phrase n'est importante que parce
qu'on y trouve le mot «payable». Elle a cependant
été abrogée par une loi subséquente. L'article 5 des
engagements du locataire et l'article 12 des stipu
lations des parties sont tout aussi pertinents et
portent en partie:
[TRADUCTION] 5. Le locataire veillera à bien et véritable-
ment payer ou faire payer ... le loyer et la redevance qui sont
payables en vertu du présent bail.....
12. Advenant que le locataire soit en retard et ne paie pas le
loyer ou la redevance prévus aux présentes, ou toute partie de
ceux-ci ....
Ce bail est, par définition, une entente conclue
conformément aux dispositions de The Mines and
Minerals Act 8 . Le pétrole et le gaz naturel sont,
par définition, des minerais. Entre autres disposi
tions, la loi porte:
[TRADUCTION] 31. (1) Une redevance est prévue en faveur
de la Couronne du chef de l'Alberta sur tout minerai pris,
extrait, récupéré ou obtenu conformément à toute entente ou à
tout certificat d'enregistrement établis ou signés en vertu de la
présente loi.
(2) La redevance qui doit être calculée, imposée et perçue sur
le minerai pris, extrait, récupéré ou obtenu conformément à
toute entente ou à tout certificat d'enregistrement établis ou
signés en vertu de la présente loi, de la loi qui l'a précédée ou de
The Provincial Lands Act, doit être la redevance prescrite par
le lieutenant-gouverneur en conseil.
8 S.R.A. 1970, c. 238 modifié.
(4) Toute redevance prévue en faveur de la Couronne du chef
de l'Alberta sur tout minerai
a) est payable en nature, sauf lorsqu'il est autrement prévu
dans la présente loi ou dans tout décret du lieutenant-
gouverneur en conseil, et
b) est payable sur le minerai au moment et au lieu où
celui-ci est obtenu, récupéré ou produit.
121. (1) Un bail donne droit au pétrole et au gaz naturel qui
se trouvent à l'emplacement et qui appartiennent à la Cou-
ronne, sous réserve de toute exception prévue au bail.
142. (1) Le pétrole et le gaz naturel extraits de tout emplace
ment acquis en vertu de la présente Partie sont assujettis au
paiement à la Couronne de la redevance prescrite par le
lieutenant-gouverneur en conseil.
(2) La redevance est perçue de la manière que prescrit le
Ministre.
170.1 (1) Toute entente visée au présent article est assujettie
à la condition que la partie du pétrole récupéré conformément à
l'entente, attribuée à la redevance de la Couronne, soit livrée à
la Commission de mise en marché du pétrole de l'Alberta
constituée en vertu de The Petroleum Marketing Act.
L'alinéa a) du paragraphe 31(4) et l'article 170.1
ont été ajoutés par le chapitre 94 des Statuts de
l'Alberta de 1973. Le Règlement 15/74 de l'Al-
berta a assujetti tous les baux qui sont pertinents
au litige à l'article 170.1, compter du 1er mars
1974. Les modifications de 1973 The Mines and
Minerals Act font partie d'un programme législatif
qui comprend l'adoption de The Petroleum Mar
keting Act 9 , en vertu de laquelle la CMMPA a été
constituée. Cette loi porte entre autres:
[TRADUCTION] 7. (1) La Commission est à toutes fins un
mandataire de la Couronne du chef de l'Alberta et ses pouvoirs
ne peuvent être exercés qu'en sa qualité de mandataire de la
Couronne du chef de l'Alberta.
15. (I) La Commission
a) prend livraison en Alberta de la partie du pétrole,
récupéré conformément à une entente, qui constitue la
redevance de la Couronne et qui doit être livrée à la
Commission conformément à l'article 170.1 de The
Mines and Minerals Act, et
b) sous réserve du paragraphe (2), vend en Alberta, à un
prix favorable aux intérêts de l'Alberta, la partie du
pétrole attribuée à la redevance de la Couronne.
17. Conformément aux instructions du trésorier provincial, la
Commission lui verse, pour dépôt au Fonds général du revenu,
9 S.A. 1973, c. 96.
le produit de ses ventes de pétrole effectuées conformément à la
présente Partie.
18. (1) La livraisoti à la Commission de la partie du pétrole,
récupéré conformément à une entente, qui constitue la rede-
vance de la Couronne, libère le locataire de l'obligation de
verser cette redevance à la Couronne du chef de l'Alberta ....
The Petroleum Marketing Act a été proclamée
et la CMMPA a été constituée le 15 janvier 1974.
Celle-ci a commencé ses opérations le 1»' mars
1974. Sans nécessairement en accepter les conclu
sions de nature juridique, j'aimerais citer la
note expédiée par la CMMPA aux producteurs,
laquelle fait suite aux feuillets de renseignements
T-5 qu'elle avait reçus au début de 1975. Cette
note décrit bien les régimes de redevance sur le
pétrole brut en vigueur pendant l'année 1974:
[TRADUCTION] a) Quant au pétrole extrait des terres de la
Couronne de l'Alberta entre le 1" mars 1974 et le 30
novembre 1974, la Commission prenait livraison en nature de
la partie du pétrole qui constitue la redevance de la Cou-
ronne. Les locataires livraient cette partie du pétrole, attri-
buée à la redevance de la Couronne, aux acheteurs de pétrole
brut pour que la Commission en effectue la vente. Les
locataires recevaient des acheteurs de pétrole brut le produit
de la vente de la partie attribuée à la redevance de la
Couronne. Ils recevaient ce produit au nom de la Commis
sion. Selon ces modalités, le locataire ne payait à la Commis
sion ni une «redevance de source canadienne» ni un «autre
revenu de source canadienne».
b) Quant au pétrole extrait des terres de la Couronne de
l'Alberta à compter du mois de décembre 1974, la Commis
sion prenait livraison au centre de production de la partie du
pétrole attribuée à la redevance de la Couronne, et recevait
paiement du produit de la vente de ce pétrole directement des
acheteurs de pétrole brut. Encore une fois, selon ces modali-
tés, le locataire ne payait à la Commission ni une «redevance
de source canadienne» ni un «autre revenu de source
canadienne».
Le régime décrit au paragraphe b) a eu cours
pendant toute l'année 1975. Le fondement juridi-
que de ce régime se trouve dans la loi provinciale
dont les extraits sont cités plus haut.
Débarrassé de ce qui n'est pas applicable à la
question de la redevance sur le pétrole brut, l'ali-
néa 12(1)o) porte qu'un contribuable doit inclure
dans son revenu imposable:
... toute somme devenue recevable au cours de l'année en vertu
d'une obligation imposée par une loi par un mandataire de
[l'Alberta], à titre de redevance ou d'équivalent, rattachée à la
production, au Canada, de pétrole tiré d'un puits de pétrole
situé au Canada sur un bien sur lequel le contribuable avait, à
la date de cette production, le droit d'extraire du pétrole.
On peut facilement exprimer en dollars la valeur
de la partie du pétrole brut attribuée à la rede-
vance de l'Alberta. En fait, c'est de cette manière
qu'elle est habituellement exprimée. La partie
attribuée à la redevance de l'Alberta est une
«somme», selon la définition élargie que donne à ce
mot la Loi de l'impôt sur le revenu. Il importe
seulement de déterminer si, en vertu du régime en
vigueur depuis le 1" décembre 1974 et pendant
toute l'année 1975, elle constitue une «somme rece-
vable». Dans l'affirmative, elle constitue certaine-
ment une somme recevable par le mandataire de
l'Alberta, la CMMPA, et elle est clairement visée
par les dispositions du reste de l'alinéa 12(1)o). Il
n'est pas nécessaire de déterminer si cette obliga
tion est imposée par la loi ou s'il s'agit d'une
obligation contractuelle qui remplace une obliga
tion légale; elle est manifestement l'une ou l'autre,
ou les deux.
Tout le pétrole brut, y compris la partie attri-
buée à la redevance de l'Alberta, appartient à
l'Alberta tant qu'il est sous terre. A un certain
moment du processus de la production, la propriété
d'une partie indivise de ce pétrole brut passe à son
producteur. Je reconnais que l'Alberta est toujours
demeurée propriétaire de la partie attribuée à la
redevance, jusqu'à ce qu'elle soit vendue par la
CMMPA. Toute autre proposition, par exemple
que le producteur devient propriétaire de tout le
pétrole brut à un certain stade de la production, et
que l'Alberta devient propriétaire de la partie
attribuée à la redevance au moment de la livraison
à la CMMPA, ne renforce pas l'argumentation de
la demanderesse.
Je crois qu'il ne faut attacher aucune impor
tance ni au fait que le mot «recevable» est l'anto-
nyme du mot «payable» dans la terminologie habi-
tuelle de la comptabilité, ni à la conclusion
connexe que suggère l'emploi du mot «payable» et
de ses variantes dans les baux et dans la législation
provinciale. Il s'agit ici d'interpréter une loi et non
d'examiner des principes comptables généralement
acceptés. Bien qu'il soit possible qu'aucune rede-
vance ne soit devenue payable à l'égard du pétrole
brut, en vertu du régime imposé le 1" décembre
1974, cela ne fait pas l'objet du litige. Je laisse à
un autre juge le soin de trancher la question
probablement intéressante de savoir si l'obligation
de livrer à quelqu'un un bien qui lui appartient
signifie qu'une somme lui est payable. En l'espèce,
la question en litige est de déterminer si une
pareille obligation signifie qu'une somme est deve-
nue recevable par l'Alberta ou par son mandataire,
la CMMPA.
Le mot «recevable» n'est pas défini dans la Loi
de l'impôt sur le revenu. Ce mot n'est pas un
terme spécialisé. Dans son sens premier, selon Le
petit Robert, il signifie «Qui peut être reçu», alors
que «recevoir» signifie «Être mis en possession de
(quelque chose) par un envoi, un don, un paie-
ment, etc.» Le mot «recevable», dans son sens
habituel, n'implique pas un changement dans le
droit de propriété ou dans le droit du titulaire d'un
bien; il implique un changement dans la garde ou
dans la possession de ce même bien.
Même s'il est impossible avant la livraison du
pétrole brut à la CMMPA, et peut-être aussi après
cette livraison, d'identifier une mesure spécifique
de pétrole brut, avant ou après séparation du gaz
et de l'eau, et de dire qu'elle constitue une mesure
de la partie attribuée à la redevance de l'Alberta, il
est incontestable qu'en fait, cette partie attribuée à
la redevance existe depuis le moment où le loca-
taire en prend possession à la tête du puits. Le
paragraphe 170.1(1) de The Mines and Minerals
Act exige que la partie attribuée à la redevance
soit livrée à la CMMPA, et l'alinéa 15(1)a) de
The Petroleum Marketing Act exige que la
CMMPA en prenne livraison. Avant cette livrai-
son, la partie attribuée à la redevance de l'Alberta
est, au sens habituel de ce mot, «recevable» par la
CMMPA. La valeur de cette partie est une
somme, que vise nettement l'alinéa 12(1)o) de la
Loi de l'impôt sur le revenu, et qui doit être
incluse dans le revenu du locataire. Les parties ne
contestent pas la valeur attribuée à cette partie
dans les cotisations qui font l'objet du présent
appel.
Quant à la question de la redevance sur le gaz
naturel, l'Alberta a instauré en 1972 un pro
gramme de stimulants au forage de recherche. La
demanderesse a accumulé des crédits en vertu de
ce programme. Les sommes qui lui ont été crédi-
tées ne pouvaient être touchées en argent liquide,
mais pouvaient être employées pour remplir des
obligations prescrites, dont le paiement de rede-
vances sur le gaz naturel. La demanderesse a
acquitté des redevances sur le gaz naturel de
$22,170.97 en 1974, et de $50,122.47 en 1975.
Elle a inclus ces sommes dans son revenu imposa-
ble conformément à l'alinéa 12(1)o). La demande-
resse a aussi demandé à l'Alberta d'affecter des
CSF de $3,138.56 en 1974, et de $24,122.44 en
1975, au paiement des redevances sur le gaz natu-
rel. Le Ministre a établi sa cotisation en fonction
des sommes de $25,309.53 en 1974, et de
$74,234.91 en 1975, recevables par l'Alberta à
titre de redevances sur le gaz naturel. Je remarque
qu'il y a une erreur d'addition de $10 pour l'année
1975.
Les règlements 10 en vigueur en 1974 et 1975
portent:
[TRADUCTION] 10. Sur demande écrite du détenteur d'un
crédit établi conformément à l'article 8, et sous réserve des
procédures instaurées par le ministère, ce crédit peut être
affecté au paiement des
a) sommes payables par lui à l'égard de toute demande et
de toute disposition effectuée sous le régime de la Partie
5 de The Mines and Minerals Act,
b) sommes payables par lui conformément à l'article 40 de
The Mines and Minerals Act, ou
c) taxes imposées en vertu de The Freehold Mineral Taxa
tion Act,
qui viennent à échéance et sont payables entre le 1 janvier
1974 et le 31 décembre 1979.
Les sommes payables à l'Alberta par un locataire,
lors de la vente de la partie du gaz naturel attri-
buée à la redevance de l'Alberta, sont visées par
l'alinéa a).
Dans sa plaidoirie, la demanderesse a soutenu
que les redevances sur le gaz naturel recevables
par l'Alberta ont été réduites par l'emploi de la
somme des CSF. Elle a soutenu, à juste titre,
qu'elle n'a jamais eu le droit de recevoir la somme
des CSF en argent, mais qu'elle avait seulement le
droit de s'en servir conformément à l'article 10.
Son argument est que les CSF ne sont donc pas
une dette ou une somme que doit la Couronne à la
demanderesse et que, par conséquent, il ne peut y
avoir compensation avec l'obligation de payer la
redevance, comme ce pourrait être le cas de dettes
mutuellement exigibles. Puisqu'il ne peut y avoir
compensation, il s'ensuit, je suppose, que l'affecta-
tion des CSF au paiement de cette obligation doit
1O Exploratory Drilling Incentive Regulations, 1974, Règle-
ment de l'Alberta 18/74.
avoir réduit cette obligation de manière que, dans
la mesure de cette réduction, l'obligation soit pré-
sumée ne jamais avoir existé, plutôt que d'avoir été
partiellement exécutée.
J'espère que je ne trahis pas l'argument de la
demanderesse, mais je dois admettre que j'éprouve
de la difficulté à le comprendre. De toute manière,
cet argument ne tient aucunement compte du sens
évident des mots employés dans l'article 10. Un
CSF «peut être affecté au paiement des sommes
payables» par la demanderesse, notamment des
redevances sur le gaz naturel. Les CSF n'ont pas
réduit, en 1974 et en 1975, la somme recevable par
l'Alberta à titre de redevance sur la production de
gaz naturel par la demanderesse; ils pouvaient
seulement, si tel était le choix de la demanderesse,
être affectés au paiement partiel de cette somme.
Et c'est ce que la demanderesse a fait.
La demanderesse a également plaidé qu'en tout
état de cause, puisque la somme recevable par
l'Alberta à titre de redevance sur le gaz naturel
pour une année civile ne peut être déterminée que
l'année suivante, les cotisations fixées à l'égard de
ces sommes pour les années 1974 et 1975 auraient
dû être fixées pour les années 1975 et 1976 respec-
tivement. Cet argument n'a pas été soulevé dans
les pièces de procédure et je n'entends donc pas le
traiter. Si elle avait été soulevée de manière régu-
lière, cette question aurait probablement fait l'ob-
jet de preuves, et non seulement d'une argu
mentation, comme dans le cas de la question
constitutionnelle.
Puisque j'ai jugé que les cotisations, fondées sur
l'application de l'alinéa 12(1)o), étaient conformes
à la Loi, il n'est pas nécessaire que je me prononce
sur les arguments subsidiaires de la défenderesse
qui portent sur l'alinéa 18(1)m) et le paragraphe
69(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Je rejette
avec dépens l'action intentée par la demanderesse.
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