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T-6037-81
In re la Loi sur la citoyenneté et in re Israel Jacob Aaron (appelant)
Division de première instance, le juge Addy— Vancouver, 9 février 1982.
Citoyenneté Compétence Appel de la décision par laquelle le juge de la citoyenneté a conclu qu'il ne recomman- derait pas au gouverneur général en conseil d'exercer, en application de l'art. 5(4) de la Loi sur la citoyenneté, ses pouvoirs discrétionnaires pour accorder au requérant la citoyenneté en raison de situations particulières et exception- nelles de détresse Il échet d'examiner si la Cour est compétente pour entendre un tel appel Appel rejeté Loi sur la citoyenneté, S.C. 1974-75-76, c. 108, art. 5(1)6),(3),(4), 13(5) Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 2 Règle 912 de la Cour fédérale.
Arrêts appliqués: In re Akins et in re la Loi sur la citoyenneté [1978] 1 C.F. 757; In re la Loi sur la citoyen- neté et in re Boutros [1980] I C.F. 624.
APPEL.
A COMPARU:
Israel Jacob Aaron pour son propre compte.
Voici les motifs de l'ordonnance rendus en fran- çais par
LE JUGE ADDY: Étant donné l'urgence de cette cause, l'appel a été, à la demande expresse de l'appelant, entendu à bref délai et hors la présence de l'amicus curiae qui, en raison d'un engagement antérieur, n'a pas pu comparaître.
Le requérant, qui ne satisfait pas aux conditions de résidence permanente au Canada prévues à l'alinéa 5(1)b) de la Loi sur la citoyenneté, S.C. 1974-75-76, c. 108, fait valoir dans cet appel que c'est par une mauvaise interprétation du paragra- phe 5(4) de la Loi que le juge de la citoyenneté a conclu qu'il ne recommanderait pas au gouverneur général en conseil d'exercer, en application de ce paragraphe, ses pouvoirs discrétionnaires pour accorder au requérant la citoyenneté en raison de situations particulières et exceptionnelles de détresse.
Par les motifs que j'ai exposés en détail dans In re Akins et in re la Loi sur la citoyenneté [1978] 1 C.F. 757, et plus récemment dans In re la Loi sur la citoyenneté et in re Boutros [1980] 1 C.F. 624, je ne statue pas au fond mais conclus à l'irreceva-
bilité de cet appel pour cause d'incompétence.
Pour ce qui est de l'existence du droit d'appel, les mêmes principes s'appliquent aux recomman- dations visées au paragraphe 5(3) et aux recom- mandations visées au paragraphe 5(4).
Il est regrettable que l'affaire Boutros n'ait pas été portée en appel, bien que j'aie instamment recommandé ce recours par les motifs figurant aux pages 630 et 631 du recueil susmentionné. Les mêmes considérations s'appliquent en l'espèce pour ce qui est de l'avantage d'un appel.
Pour éclairer davantage la question, j'estime cependant qu'il y a lieu de souligner ce qui suit:
1. Un appel devant cette Cour est instruit à titre de procès de novo (Règle 912 de la Cour fédérale). L'instance d'appel doit procéder à une nouvelle audition de l'affaire, exactement comme si elle l'entendait pour la première fois, et rendre sa décision en conséquence. J'estime donc qu'il n'y a pas lieu pour ce tribunal, dans ce cas, de renvoyer l'affaire au juge de la citoyenneté pour nouvelle décision fondée sur les conclusions de droit qui doivent s'appliquer.
2. Les juges de la Cour de la citoyenneté, à la différence des juges de cours supérieures, de cours de comtés ou de cours provinciales, relèvent plutôt de l'appareil administratif que de l'appareil judi- ciaire, bien que dans l'exercice de leurs fonctions, ils doivent observer les règles judiciaires ou quasi judiciaires. Il en est ainsi tout particulièrement de l'exercice des pouvoirs prévus par les paragraphes 5(3) et 5(4), il y a lieu de les considérer comme constituant un «autre tribunal» au sens de la défini- tion d'«office, commission ou autre tribunal fédé- ral» de l'article 2 de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, et non un tribunal judiciaire dans l'acception courante de cette expression.
3. Dans notre système de gouvernement, les cours de justice ont pour fonction de rendre la justice par des ordonnances et des jugements exécutoires ou déclaratoires, et non de faire des recommandations administratives. La loi n'imposant pas une obliga tion ou directive claire et sans équivoque à cet égard, je ne saurais conclure que le législateur
exige des juges de cours supérieures qu'ils assu- ment des fonctions administratives et recomman- dent, soit au Ministre par application du paragra- phe 5(3), soit au gouverneur général en conseil par application du paragraphe 5(4), l'octroi de la citoyenneté. Il s'agit d'un acte purement admi- nistratif, et il est loisible au Ministre ou au gouver- neur général en conseil d'accepter ou de rejeter cette recommandation. Le texte conférant le droit d'appel, c'est-à-dire le paragraphe 13(5), ne pré- voit nulle obligation ou directive claire dans ce sens. Quand bien même ce serait le cas, le principe de la séparation des pouvoirs universellement reconnu par notre système de gouvernement et par nos tribunaux depuis l'Act of Settlement, 1700, 12 & 13 Will. 3, c. 2, me forcerait à nourrir de graves doutes sur la validité constitutionnelle d'une pareille disposition.
ORDONNANCE
L'appel est rejeté par ce motif que l'affaire ne saurait faire l'objet d'un appel devant la Division de première instance de la Cour fédérale et que, par conséquent, cette Cour n'a pas compétence pour l'entendre.
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