A-181-81
Orlando Bonifacio Cepeda-Welden (requérant)
c.
La Commission d'appel de l'immigration (intimée)
Cour d'appel, juges Heald et Le Dain, juge sup
pléant Hyde —Calgary, 10, 11 et 12 mai 1982.
Contrôle judiciaire — Demandes d'examen — Immigration
— Rejet de la demande de réexamen du statut de réfugié —
La décision de la Commission d'appel de l'immigration repo-
sait sur l'examen de la question de savoir si le requérant était
une personne non admissible sous le régime de l'art. 19(1)f) ou
g) de la Loi sur l'immigration et susceptible d'être expulsée en
vertu de l'art. 55a) lors même qu'elle serait déclarée réfugiée
au sens de la Convention — La Commission laisse entendre
que la question du statut de réfugié peut être théorique, parce
qu'il est possible que le requérant soit inadmissible en vertu
d'un autre article de la Loi — La Commission doit se limiter à
déterminer si le requérant est un réfugié au sens de l'art. 2(1)
— Le critère approprié consiste à déterminer si le requérant
pourra vraisemblablement établir, à l'audition, avoir raison de
craindre d'être persécuté en raison de ses opinions politiques et
que, du fait de cette crainte, il ne veut pas se réclamer de la
protection du Chili — Pour arriver à sa conclusion, la Com
mission ne peut prendre en considération que les éléments visés
à l'art. 70(2) — La Commission a commis une erreur en
examinant si le requérant était une personne non admissible —
La demande fondée sur l'art. 28 est accueillie — L'affaire est
renvoyée devant la Commission pour nouvel examen — Loi sur
la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), chap. 10, art. 28 —
Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52, art.
2(1), 19(1)f),8), 55a), 70(2), 71(1).
DEMANDE de contrôle judiciaire.
AVOCATS:
F. T. Abboud pour le requérant.
B. Saunders pour l'intimée.
PROCUREURS:
Charles R. Darwent, Calgary, pour le
requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: Je ne suis pas persuadé que la
Commission d'appel de l'immigration a appliqué
en l'espèce le critère approprié. Le critère applica
ble, tel qu'il est énoncé au paragraphe 71(1) de la
Loi, consiste à déterminer si le bien-fondé de la
demande de statut de réfugié pourra vraisembla-
blement être établi à une audience. Pour se pro-
noncer sur la question de savoir s'il y a lieu de
permettre à la demande de suivre son cours, la
Commission ne peut prendre en considération que
les éléments visés au paragraphe 70(2) de la Loi.
La Commission doit fonder son opinion sur ces
éléments.
Dans ses motifs, la Commission s'intéresse aux
activités passées de [TRADUCTION] «guérillero
marxiste» du requérant et discute de la question de
savoir si, compte tenu des éléments de preuve, il
pourrait être considéré comme une personne dont
la présence au Canada constituerait un danger qui,
à ce titre, serait vraisemblablement non admissible
sous le régime des alinéas 19(1)f) ou g) de la Loi,
et qui, en tant que telle, serait susceptible d'être
expulsée en vertu de l'alinéa 55a) lors même
qu'elle serait déclarée réfugiée au sens de la Con
vention. La Commission semble laisser entendre
que la question du statut de réfugié peut être sans
portée pratique en l'espèce, parce qu'il est possible
que le requérant ne soit pas admissible en vertu
d'un autre article de la Loi.
J'estime qu'un tel point de vue reflète une per
ception erronée des pouvoirs que la Commission
tient de la Loi sur l'immigration de 1976, S.C.
1976-77, chap. 52. Dans les circonstances de l'es-
pèce, la Commission n'est pas habilitée à détermi-
ner si le requérant tombe dans l'une quelconque
des catégories de personnes non admissibles men-
tionnées dans la Loi, ni à exercer le pouvoir con-
féré par l'article 55. En l'espèce, le seul pouvoir
que peut exercer la Commission consiste à déter-
miner si le requérant est un réfugié au sens du
paragraphe 2(1) de la Loi. Il est à noter que la
Commission déclare expressément dans ses motifs
qu'en rendant sa décision, elle a pris en considéra-
tion toutes les questions susmentionnées relative-
ment aux alinéas 19(1)f), g) et 55a). Par consé-
quent, je ne suis pas persuadé qu'en rendant sa
décision, la Commission se soit posé la bonne
question, celle de savoir si, à partir des éléments de
preuve, le requérant pourra vraisemblablement
établir, à une audition, avoir raison de craindre
d'être persécuté en raison de ses opinions politiques
et que, du fait de cette crainte, il ne veut pas se
réclamer de la protection du Chili, son pays d'ori-
gine; je ne suis pas non plus convaincu que la
Commission n'a pas été influencée par des ques
tions non pertinentes et accessoires.
Par ces motifs, j'estime qu'il y a lieu d'accueillir
la demande fondée sur l'article 28, d'infirmer la
décision rendue par la Commission d'appel de
l'immigration le 19 mars 1981, et de renvoyer
l'affaire devant la Commission pour nouvel
examen en conformité avec les dispositions de la
Loi sur l'immigration de 1976 et la jurisprudence
pertinente.
LE JUGE LE DAIN: Je souscris aux motifs
ci-dessus.
LE JUGE SUPPLÉANT HYDE: Je souscris aux
motifs ci-dessus.
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