A-692-80
La Reine (appelante)
c.
Gordon A. Bryce (intimé)
Cour d'appel, juges Heald, Unie et juge suppléant
Verchere—Vancouver, 9 et 15 février 1982,
Impôtsur le revenu — Calcul du revenu — Déductions —
Jugement conditionnel de divorce obligeant l'intimé à acquitter
tous les versements exigibles sur l'hypothèque d'une maison et
autres dépenses — La moitié de ces sommes devait être payée
au profit de l'ex-épouse de l'intimé — La Division de première
instance a décidé que les versements faits par l'intimé au cours
de l'année d'imposition 1975 étaient déductibles — Il échet de
déterminer si le juge de première instance a fait erreur lors-
qu'il a jugé que l'art. 60.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu
autorisait par lui-même cette déduction — Il s'agit de savoir
si les versements constituent une »allocation au sens de
l'art. 60b) de la Loi — Loi de l'impôt sur le revenu, S.C.
1970-71-72, c. 63, art. 56(1)b), 56.1, 606), 60.1, 178(2).
Appel d'une décision de la Division de première instance qui
a jugé que les versements faits par l'intimé au profit de son
ex-épouse au cours de l'année d'imposition 1975 sont déducti-
bles d'impôt. Aux termes d'un accord de pension alimentaire
entériné par le jugement conditionnel de divorce, l'intimé devait
acquitter les versements exigibles sur l'hypothèque d'une
maison à deux logements dont la propriété serait transmise à
l'intimé et à son ex-épouse qui en seraient copropriétaires, ainsi
que les impôts fonciers, les taxes d'eau, les taxes d'égout, les
frais de télédistribution et les dépenses nécessaires au bon
entretien de la maison. Le jugement conditionnel de divorce
prévoyait en outre que la moitié de ces sommes devait être
payée au profit de l'ex-épouse de l'intimé. Le litige porte sur
l'interprétation de l'article 60.1 de la Loi de l'impôt sur le
revenu (inséré par le paragraphe 31(1) des S.C. 1974-75-76,
c. 26). L'appelante soutient premièrement que le juge de pre-
mière instance a fait erreur lorsqu'il a jugé que l'article 60.1
autorise par lui-même la déduction, deuxièmement qu'il faut
tenir compte de l'alinéa 60b) de la Loi de l'impôt sur le revenu
pour décider si ces versements sont déductibles et troisième-
ment que ceux-ci n'ont pas été effectués à titre d'«allocation»
suivant l'interprétation donnée à ce terme par la présente Cour
dans une série de jugements qui a commencé avec l'affaire
Pascoe.
Arrêt: l'appel est accueilli. Lorsqu'un contribuable veut
réclamer la déduction de versements à titre alimentaire, il doit
respecter les exigences de l'alinéa 60b) de la Loi de l'impôt sur
le revenu parce que les seules déductions permises dans le
calcul du revenu imposable sont celles qu'autorise la Loi, et que
l'article 60.1 de la Loi n'autorise aucune déduction. Cette Cour
est liée par ses décisions antérieures qui ont établi que des
versements, du type de ceux qu'a effectués en l'espèce l'intimé,
ne constituent pas le paiement d'une «allocation» visée par
l'alinéa 60b), et ce, malgré que ces versements soient réputés,
en vertu de l'article 60.1, avoir été faits au profit du conjoint. Si
le Parlement avait voulu que les versements qu'envisage
l'article 60.1 soient déductibles sans qu'il soit nécessaire de se
reporter à l'alinéa 60b), l'article 60.1 aurait facilement pu être
rédigé en conséquence. Chaque article de la sous-section e qui
permet une déduction emploie spécifiquement des mots tels
«Peuvent être déduites» ou «peut déduire» pour autoriser une
déduction. L'article 60.1 ne contient aucune autorisation
semblable.
Jurisprudence: arrêts suivis: Le procureur général du
Canada c. Weaver [1976] 1 C.F. 423; R. c. Gagnon [1982]
2 C.F. 255; R. c. Pascoe [1976] 1 C.F. 372.
APPEL.
AVOCATS:
Wilfrid Lefebvre et Jeanne Watchuk pour
l'appelante.
Elko Kroon pour l'intimé.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour
l'appelante.
Elko Kroon, North Vancouver, pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE URIE: La Cour se prononce sur l'appel
d'une décision de la Division de première instance
[[1981] 1 C.F. 587] qui a rejeté l'appel inscrit par
l'appelante d'une décision de la Commission de
révision de l'impôt. Celle-ci avait accueilli l'appel
de l'intimé contre la nouvelle cotisation de l'impôt
sur le revenu établie par le ministre du Revenu
national à l'égard de l'année d'imposition 1975 de
l'intimé.
Les faits pertinents, consignés dans l'exposé con
joint des faits, sont les suivants. L'intimé a obtenu
un jugement de divorce contre son ex-femme le 20
mars 1975. Le jugement conditionnel de divorce,
rendu par la Cour suprême de Colombie-Britanni-
que, a entériné les dispositions d'un accord de
pension alimentaire intervenu entre l'intimé et sa
femme. Les dispositions pertinentes de cet accord
prévoient que l'intimé acquittera:
a) tous les versements exigibles sur l'hypothèque
d'une maison à deux logements dont la propriété
sera transmise à l'intimé et à son ex-femme qui
en seront copropriétaires, et dont l'ex-femme
pourra occuper un des deux logements;
b) toutes les dépenses nécessaires au bon entre-
tien de la maison à deux logements;
c) à leur échéance, tous les impôts fonciers, les
taxes d'égout, les taxes d'eau et les frais de
télédistribution.
L'appel ne porte que sur les versements effectués
conformément aux alinéas a) et c) ci-dessus.
Le jugement conditionnel de divorce contient
aussi une disposition qui prévoit que l'ex-femme
devra s'abstenir de réclamer à l'intimé une pension
alimentaire mensuelle en sus du paiement de la
moitié des sommes mentionnées au paragraphe qui
précède.
Pendant l'année 1975, l'intimé s'est conformé à
toutes les dispositions contenues dans l'accord. Il a
acquitté les sommes suivantes:
Hypothèque $2,148.00
Impôt foncier 655.99
Taxes d'eau et taxes d'égout 151.50
Télédistribution 59.40
Total $3,014.89
L'intimé a réclamé la somme de $1,256.20 à
titre de déduction dans le calcul de son revenu
imposable pour l'année d'imposition 1975, soit les
10/12 de la moitié du total susmentionné, parce
que le jugement conditionnel de divorce n'a été
prononcé qu'en mars 1975. Il échet seulement de
déterminer par cet appel si l'intimé avait le droit
de réclamer cette déduction. A l'instar de la Com
mission de révision de l'impôt, le juge de première
instance a décidé que l'intimé pouvait réclamer
cette déduction. L'appelante soutient que le juge
de première instance a fait erreur lorsqu'il a jugé
que l'article 60.1 de la Loi de l'impôt sur le
revenu, modifiée par le paragraphe 31(1) des S.C.
1974-75-76, c. 26, autorise par lui-même cette
déduction.
Pour pouvoir juger de l'argument de l'appelante,
il est nécessaire de passer en revue les articles
pertinents de la Loi de l'impôt sur le revenu'. La
section B contient les diverses dispositions relatives
au calcul du revenu aux fins de l'impôt. La sous-
section e de la section B porte sur certaines déduc-
tions permises lors du calcul du revenu. L'alinéa
60b) édicte ce qui suit:
60. Peuvent être déduites lors du calcul du revenu d'un-
contribuable pour une année d'imposition les sommes suivantes
qui sont appropriées:
b) toute somme payée dans l'année par le contribuable, en
vertu d'un arrêt, d'une ordonnance ou d'un jugement rendus
par un tribunal compétent ou en vertu d'un accord écrit, à
' S.R.C. 1952, c. 148, modifié par S.C. 1970-71-72, c. 63,
art. 1 (ci-après appelée «la Loi»).
titre de pension alimentaire ou autre allocation payable
périodiquement pour subvenir aux besoins du bénéficiaire,
des enfants issus du mariage ou à la fois du bénéficiaire et
des enfants issus du mariage, si le contribuable vivait séparé,
en vertu d'un divorce, d'une séparation judiciaire ou d'un
accord écrit de séparation, du conjoint ou de l'ex-conjoint à
qui il était tenu de faire le paiement, le jour où le paiement a
été effectué et durant le reste de l'année;
L'alinéa correspondant, l'alinéa 56(1)b), fait
partie de la sous-section d qui se rapporte aux
autres sources de revenu. Il prévoit:
56. (1) Sans restreindre la portée générale de l'article 3, sont
à inclure dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une
année d'imposition,
b) toute somme reçue dans l'année par le contribuable, en
vertu d'un arrêt, d'une ordonnance ou d'un jugement rendus
par un tribunal compétent ou en vertu d'un accord écrit, à
titre de pension alimentaire ou autre allocation payable
périodiquement pour subvenir aux besoins du bénéficiaire,
des enfants issus du mariage ou à la fois du bénéficiaire et
des enfants issus du mariage, si le bénéficiaire vivait séparé
en vertu d'un divorce, d'une séparation judiciaire ou d'un
accord écrit de séparation du conjoint ou de l'ex-conjoint
tenu de faire le paiement, à la date où le paiement a été reçu
et durant le reste de l'année;
En 1976, cette Cour a rendu jugement dans la
cause La Reine c. Pascoe 2 . Dans cette affaire,
l'intimé et sa femme avaient conclu un accord de
séparation qui prévoyait le versement d'une pen
sion alimentaire mensuelle d'un montant fixe, de
même qu'un accord selon lequel le mari intimé
s'engageait à acquitter tous les comptes de méde-
cin, d'hôpital et de dentiste au nom de sa femme et
de ses enfants, ainsi que certaines dépenses liées à
l'éducation des enfants. Cet appel portait sur la
possibilité de déduire aux fins de l'impôt les verse-
ments effectués conformément à ces accords. Le
juge Pratte, rendant jugement pour la Cour, s'ex-
prime en ces termes à la page 374 du recueil:
A notre avis, ni les sommes versées par l'intimé pour l'éduca-
tion de ses enfants ni celles versées à titre de frais médicaux ne
sont déductibles.
Tout d'abord, nous sommes d'avis que le versement de ces
sommes ne constitue pas le versement d'une allocation au sens
de l'article 11(1)l). Selon nous, une allocation est une somme
d'argent limitée et déterminée à l'avance, versée afin de per-
mettre à celui qui la reçoit de faire face à certains types de
dépenses; sa quotité est établie à l'avance et celui qui la touche
en a la libre disposition, sans comptes à rendre à personne. Un
versement effectué pour satisfaire à une obligation d'indemni-
ser ou de rembourser quelqu'un ou de le défrayer de dépenses
2 [1976] 1 C.F. 372.
réellement engagées n'est pas une allocation; il ne s'agit pas en
effet d'une somme susceptible d'être affectée par celui qui la
touche, à sa discrétion, à certains types de dépenses.
De plus, même si l'acquittement des dépenses en cause
pouvait être considéré comme le versement d'une allocation, il
ne s'agit pas, selon nous, d'une allocation «payable périodique-
ment», comme l'exige l'article 11(1)l). Ni l'acte de séparation
de corps ni le jugement conditionnel ne prévoient le versement
de ces sommes à intervalles fixes. Ils ne font même pas mention
du moment où se feront les versements. Il importe peu que les
sommes versées pour l'éducation des enfants l'aient en fait
peut-être été périodiquement, car la périodicité exigée par la
Loi a rapport à la manière dont l'allocation est payable et non à
la façon dont elle est effectivement versée.
La même année, cette Cour, par décision majo-
ritaire dans Le procureur général du Canada c.
Weaver 3 , a suivi l'arrêt Pascoe et décidé que cer-
tains versements, dont des versements hypothécai-
res, faits directement à des tiers par le mari,
conformément à un accord de séparation, n'étaient
pas couverts par la définition que donne le juge
Pratte au mot «allocation», et qu'ils n'étaient donc
pas déductibles.
Les deux arrêts qui précèdent portent sur des
années d'imposition antérieures à l'adoption de
l'article 60.1 cité plus haut.
Dans La Reine c. Gagnon 4 , cette Cour a de
nouveau appliqué en 1981 la ratio decidendi de
l'arrêt Pascoe à l'égard de versements hypothécai-
res effectués par un conjoint à son ex-femme.
Cette Cour y déclare que ces versements ne consti
tuent pas une «allocation» au sens de l'alinéa 60b)
au motif que leur bénéficiaire ne jouit d'aucune
discrétion dans l'emploi de l'argent. Même s'il
semble que deux des trois années d'imposition sur
lesquelles porte cet appel soient postérieures à
l'adoption de l'article 60.1, les motifs de ce juge-
ment ne mentionnent nullement cet article.
Il découle de ce qui précède, pour employer les
mots du juge de première instance, qu'en l'espèce,
le vrai point litigieux porte sur l'interprétation
qu'il faut donner à l'article 60.1, la lumière de
l'arrêt Pascoe. En 1975, l'article 60.1 était ainsi
conçu:
60.1 Quand, après le 6 mai 1974, il est intervenu un arrêt,
une ordonnance, un jugement ou un accord écrit visé à l'alinéa
60b) ou c) ou une modification y relative, prévoyant le verse-
ment périodique d'une certaine somme, par le contribuable, à
3 [1976] 1 C.F. 423.
[1982] 2 C.F. 255.
son conjoint, à son ancien conjoint ou aux enfants du mariage
confiés à la garde du conjoint ou ancien conjoint, ou au profit
de ce conjoint, de cet ancien conjoint ou de ces enfants, cette
somme est réputée avoir été payée au conjoint ou à l'ancien
conjoint et reçue par lui si le contribuable vivait séparé du
conjoint ou de l'ancien conjoint à la date de la réception du
versement et a continué à vivre séparé de lui jusqu'à la fin de
l'année où le paiement a été reçu.
L'article correspondant, l'article 56.1, porte:
56.1 Quand, après le 6 mai 1974, il est intervenu un arrêt,
une ordonnance, un jugement ou un accord écrit visé à l'alinéa
56(1)b) ou c) ou une modification y relative, prévoyant le
versement périodique d'une certaine somme, par le conjoint ou
l'ancien conjoint du contribuable, soit à ce dernier, soit au
profit de ce dernier ou des enfants du mariage confiés à la
garde du contribuable, cette somme est réputée avoir été payée
au contribuable et reçue par lui s'il vivait séparé du conjoint ou
de l'ancien conjoint à la date du versement de cette somme et
ont continué à vivre séparé du conjoint ou de l'ancien conjoint à
la date de versement de cette somme et ont continué à vivre
séparés de lui jusqu'à la fin de l'année où le montant a été payé.
Si l'article 60.1 permet à un contribuable qui est
dans la même situation que l'intimé, de déduire ses
versements hypothécaires dans le calcul de son
revenu imposable pour l'année 1975, l'article 56.1
a alors pour effet d'inclure ces versements dans le
calcul du revenu de son conjoint pour la même
année.
Même si l'article 60.1 se trouve à la sous-section
e qui porte le titre «Déductions lors du calcul du
revenu», il faut d'abord remarquer que cet article
ne prévoit pas spécifiquement, dans le calcul du
revenu imposable d'un contribuable, la déduction
du versement périodique d'une somme fait soit à
son conjoint, à son ancien conjoint ou aux enfants
confiés à la garde du conjoint ou de l'ancien
conjoint, soit à leur profit. A première vue, cet
article prévoit simplement que ces versements sont
réputés avoir été faits au conjoint ou à l'ancien
conjoint, et reçus par l'un ou l'autre de ceux-ci, s'il
vivait séparé du contribuable à la date de la récep-
tion du versement et s'il a continué à vivre séparé
de lui jusqu'à la fin de l'année où le versement a
été reçu. A cet égard, l'article 60.1 prime alors sur
un des fondements de la conclusion selon laquelle
des versements périodiques qui ne sont pas payés
directement au conjoint, ne constituent pas une
«allocation», au sens que cette Cour, dans les arrêts
Pascoe et Weaver, a donné à ce mot, tel qu'il est
employé à l'alinéa 60b).
Toutefois, selon l'avocat de l'appelante, c'est là
la limite de la portée qu'il faut attribuer à l'article
60.1. Selon lui, il faut tenir compte de l'alinéa
60b), tel qu'il a été interprété dans les arrêts cités
précédemment, pour déterminer si de tels verse-
ments sont déductibles. Il admet que
a) en l'espèce, lorsque les versements ont été
effectués, les conjoints vivaient séparés, à la date
de la réception du versement et jusqu'à la fin de
l'année où le versement a été reçu, conformé-
ment à un arrêt, une ordonnance, un jugement
ou un accord de séparation;
b) les versements ont été effectués conformé-
ment à un arrêt, une ordonnance, un jugement
ou un accord de séparation;
c) les versements font partie d'une série de
versements payables périodiquement; et
d) en vertu de l'article 60.1, ces versements ont
été faits au conjoint ou à l'ancien conjoint.
Toujours selon l'avocat de l'appelante, il n'y a
qu'une condition de l'alinéa 60b) que le contribua-
ble n'a pas remplie en l'espèce. Il soutient que le
contribuable n'a pas effectué ces versements à titre
d'«allocationo, au sens donné à ce mot par cette
Cour dans une suite d'arrêts qui commence avec la
décision rendue dans l'affaire Pascoe, précitée.
Selon lui, le bénéficiaire de ces versements n'en
avait pas la libre disposition; ces versements
devaient plutôt être remis, aux termes de l'accord
de séparation, au créancier hypothécaire et aux
percepteurs des taxes foncières, des tarifs à la
consommation d'eau et des contributions au ser
vice de télédistribution.
Le juge de première instance a commenté en ces
termes des arguments semblables présentés devant
lui [aux pages 594 et 595]:
L'alinéa 60b) traite des sommes payées, à titre de pension
alimentaire ou autre allocation d'entretien, au bénéficiaire, aux
enfants issus du mariage ou aux deux. Selon moi, l'article 60.1
traite des montants stipulés dans un jugement de divorce, une
ordonnance, un jugement (rendus par un tribunal compétent)
ou un accord écrit, et périodiquement versés au conjoint, à
l'ex-conjoint ou aux enfants issus du mariage ou à leur profit.
Je ne peux pas concevoir que le législateur ait voulu que des
sommes payées à des tiers au profit du conjoint, de l'ex-conjoint
ou des enfants issus du mariage ne soient réputées payables à
ces personnes que si le document spécifie qu'elles peuvent à tout
moment ordonner que les paiements soient faits à d'autres
personnes ou à elles-mêmes ou pour des fins autres que celles
stipulées dans le document. Il serait, me semble-t-il, illogique
de la part du législateur d'une part de sanctionner un accord de
pension alimentaire stipulant que les paiements au profit de la
ou des personnes dont il faut subvenir aux besoins seront faits à
des tiers, et d'autre part d'exiger que ledit accord donne au
bénéficiaire toute latitude pour leur affectation.
C'est à grand regret que je conclus que l'inter-
prétation que donne le juge de première instance à
ces deux articles ne peut être maintenue, et que
l'argument de l'appelante doit prévaloir. Lorsqu'un
contribuable veut réclamer la déduction de verse-
ments à titre alimentaire, il doit respecter les
exigences de l'alinéa 60b), parce que les seules
déductions permises dans le calcul du revenu impo-
sable sont celles qu'autorise la loi, et que l'article
60.1 n'autorise aucune déduction. Dans l'interpré-
tation de cet alinéa, nous sommes liés par les
décisions antérieures de cette Cour qui ont établi
que des versements, du type de ceux qu'a effectués
en l'espèce l'intimé, ne constituent pas le paiement
d'une «allocation» visée par l'alinéa 60b), et ce,
malgré que ces versements soient réputés, en vertu
de l'article 60.1, avoir été faits au profit du con
joint. Si le Parlement avait voulu que les verse-
ments qu'envisage l'article 60.1 soient déductibles
sans qu'il soit nécessaire de se reporter à l'alinéa
60b) pour déterminer s'ils sont déductibles, l'arti-
cle 60.1 aurait facilement pu être rédigé en consé-
quence. Il convient de noter que chaque article de
la sous-section e qui permet une déduction, em-
ploie spécifiquement des mots tels «Peuvent être
déduites» ou «peut déduire» pour permettre au
contribuable de réclamer une déduction dans le
calcul de son revenu imposable. L'article 60.1 ne
contient aucune autorisation semblable.
En conséquence, la Cour accueille cet appel et
rétablit la cotisation du ministre du Revenu natio
nal, en date du 21 juin 1976. Conformément aux
dispositions du paragraphe 178(2) de la Loi, l'in-
timé aura le droit de se faire rembourser par le
ministre du Revenu national tous ses frais raison-
nables et justifiés, à la fois devant cette Cour et
devant les tribunaux inférieurs, après que ces frais
auront été taxés.
LE JUGE HEALD: Je souscris à ces motifs.
LE JUGE SUPPLÉANT VERCHERE: Je souscris à
ces motifs.
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