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T-255-75
La Reine (Demanderesse)
c.
Alfred C. Huxtable (Défendeur)
Division de première instance, le juge en chef adjoint Thurlow—Halifax, le 31 mai; Ottawa, le 8 juillet 1977.
Impôt sur le revenu Calcul du revenu Déductions Compagnies associées Réserve inutilisée, prévue dans les comptes pour l'année 1968 en vue de l'expertise quadriennale, incluse dans le revenu de 1969 de la compagnie venderesse La compagnie venderesse a versé à la compagnie acheteuse un montant correspondant à la contrepartie due aux termes d'une transaction non traitée â distance ayant eu lieu en 1969 La compagnie venderesse a-t-elle le droit de déduire ce montant dans le calcul de son revenu de 1969? Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, art. 6(1)e6), 11(1)ea), 12(1)a),e).
Il s'agit de l'appel d'une décision de la Commission de révision de l'impôt accueillant un appel interjeté par le défen- deur contre une nouvelle cotisation de l'impôt sur le revenu de 1969. La Bedford Investments Limited est devenue, en 1969, une corporation personnelle et le défendeur, en tant que pro- priétaire, était imposable sur le dividende censé lui avoir été distribué, égal au revenu de la compagnie pour ladite année. La question est de savoir si la compagnie avait le droit de déduire la somme de $48,750 qu'elle a versée à la «New Newfound- land», une compagnie qui a acheté, par une transaction non traitée à distance, le navire appartenant à la Bedford, la clientèle et le droit au remboursement de l'impôt. Ce montant avait été prévu par la Bedford dans ses comptes pour l'année
1968 titre de «réserve» pour l'expertise quadriennale de son navire. N'ayant pas été utilisée en 1968, cette réserve a été incluse dans le calcul du revenu de la Bedford en 1969. Cette dernière a versé à la New Newfoundland la somme de $48,750 contre ce qui aurait été autrement le solde de la contrepartie due à cette dernière et, en ce sens, la Bedford a versé cette somme à la New Newfoundland comme montant correspondant au coût de l'expertise quadriennale. Vu que la Bedford, au cours de la même transaction, a transféré d'autres actifs, les $48,750 ne doivent pas être considérés comme une réduction du prix du navire.
Arrêt: l'appel est accueilli. Le paiement de $48,750 effectué par la Bedford n'est pas une réserve au sens de l'alinéa 12(1)e). Bien que la somme prévue par la Bedford dans ses comptes pour l'année 1968 constitue une réserve et, à ce titre, soit déductible du revenu de 1968, la somme versée à la New Newfoundland n'est pas une réserve mais un poste de débours. L'alinéa 12(1)e) ne s'applique pas pour interdire sa déduction. Bien qu'il faille considérer que cette somme a été déboursée au sens de l'alinéa 12(1)a), elle ne l'a pas été en vue de gagner ou de produire un revenu tiré de l'entreprise de la Bedford au sens dudit alinéa. Le fait d'avoir besoin d'une expertise n'équivaut pas à effectuer une dépense pour une expertise et ce fait ne peut être considéré comme une dépense. En fait et en droit, la Bedford n'a encouru aucune dépense à laquelle le paiement qu'elle a fait à la New Newfoundland puisse se rattacher, lui
donnant le caractère d'une dépense afférente à une expertise quadriennale.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu. AVOCATS:
G. W. Ainslie, c.r., et Alison Scott-Butler pour la demanderesse.
E. C. Harris, c.r., et G. S. Black, c.r., pour le défendeur.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la demanderesse.
Daley, Black & Moreira, Halifax, pour le défendeur.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT THURLOW: Il s'agit ici de l'appel d'une décision de la Commission de révision de l'impôt accueillant un appel interjeté par le défendeur contre une nouvelle cotisation de l'impôt sur le revenu de 1969. Cette année-là, la Bedford Investments Limited (auparavant, New- foundland Canada Steamships Limited) est deve- nue une corporation personnelle au sens de l'article 68 de la Loi de l'impôt sur le revenu. En vertu de l'article 67 de ladite loi, le défendeur, en tant que propriétaire de la compagnie, était imposable sur le dividende censé lui avoir été distribué, égal au revenu de la compagnie pour ladite année. Le point litigieux en appel est le suivant: la compagnie avait-elle le droit de déduire dans le calcul de son revenu une somme de $48,750 versée par elle au cours de la transaction décrite ci-après à la compa- gnie récemment constituée sous la raison sociale Newfoundland Canada Steamships Limited?
La Commission de révision de l'impôt, après avoir entendu la preuve, a conclu que la Bedford avait droit à la déduction et a donc accueilli l'appel. Toutefois, la Cour a été saisie de l'affaire par un exposé conjoint des faits qui, avec les documents évoqués ici et les plaidoiries, constitue le dossier qui servira de fondement à la décision. En résumé, il ressort de ces documents que la Bedford, après avoir exploité le navire Bedford II pendant plusieurs années, l'a vendu le ler janvier 1961 par une transaction non traitée à distance à la nouvelle compagnie (ci-après appelée New
Newfoundland), ainsi que la clientèle et le droit au remboursement de l'impôt. Cette dernière compa- gnie a alors assumé la responsabilité de certains postes qui figurent au passif de son bilan. Le dernier poste de $48,750 est désigné comme «réserve» pour l'expertise quadriennale. La Bed- ford, dans le calcul de son revenu pour l'année fiscale se terminant le 31 décembre 1968, a inclus ce montant à ce titre en vertu de l'alinéa 11(1)ea) de la Loi de l'impôt sur le revenu'. Or, puisque cette expertise n'a pas été faite en 1968, la Bedford s'est vue obligée, en vertu de l'alinéa 6(1)eb) 2 , d'inclure ce montant dans le calcul de son revenu de 1969. Ce point ne fait plus l'objet d'aucune contestation. Toutefois, la Bedford prétend avoir le droit de déduire une somme du même montant à titre de dépense de revenu encourue au cours de la transaction du lef janvier 1969. A ce propos, la déclaration de la demanderesse contient entre autres les trois paragraphes suivants, qui ont été admis par le défendeur:
[TRADUCTION] 8. Vu que le navire Bedford II était assujetti à la Loi sur la marine marchande du Canada visant les experti- ses quadriennales, la Old Newfoundland Bedford avait prévu dans ses comptes, arrêtés au 31 décembre 1968, une réserve de $48,750 pour l'expertise qui devait avoir lieu en 1969;
9. Le ler janvier 1969, la Bedford a transféré le navire à la New Newfoundland à son coût en capital non déprécié, se trouvant en possession de ladite Bedford.
' S.R.C. 1952, c. 148, alinéa 11(1)ea) ajouté 1966-67, c. 91, paragraphe 3(2).
11. (1) Par dérogation aux alinéas a), b) et h) du para- graphe (1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être déduits dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition:
ea) tel montant qui peut être prescrit à titre de réserve pour des dépenses que doit encourir le contribuable en raison d'expertises quadriennales ou d'autres expertises spéciales requises aux termes de la Loi sur la marine marchande du Canada, ou des règlements établis sous le régime de ladite loi ou aux termes des règles de toute société ou association pour la classification et l'immatricu- lation des navires, approuvée par le ministre des Trans ports aux fins de la Loi sur la marine marchande du Canada;
2 S.R.C. 1952, c. 148, alinéa 6(1)eb) ajouté 1966-67, c. 91, paragraphe 1(2).
6. (1) Sans restreindre la généralité de l'article 3, doivent être inclus dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition
eb) le montant déduit à titre de réserve aux termes de l'alinéa ea) du paragraphe (1) de l'article 11 dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année précédente;
10. La Bedford a aussi accepté de verser à la New Newfound- land une somme de $48,750, qui représente le coût estimatif d'une expertise quadriennale et figure sur ses livres comme réserve à ce titre.
Au vu de ces constatations et des faits qui ressortent de l'exposé conjoint, il me semble que:
(1) dans la transaction, la Bedford a versé à la New Newfoundland la somme de $48,750 contre ce qui aurait été autrement le solde de la contre- partie due à cette dernière;
(2) en ce sens, la Bedford a versé cette somme à la New Newfoundland, le ler janvier 1969, comme montant correspondant au coût estimatif de l'ex- pertise quadriennale et,
(3) vu que la Bedford, au cours de la même transaction, a transféré d'autres actifs, les $48,750 ne doivent pas être considérés simplement comme une réduction du prix du navire.
Toutefois, il convient de noter que, lorsque la Loi sur la marine marchande du Canada' exige que le propriétaire fasse faire une expertise qua- driennale sans laquelle il ne peut obtenir un certifi- cat d'exploitation du navire, elle pose une simple condition de renouvellement d'exploitation, car le propriétaire a en tout temps la possibilité de vendre le navire ou de le détruire, et dans un cas comme dans d'autre, il n'a plus l'obligation de faire faire une expertise. Il peut aussi laisser le navire immobilisé. Il n'est obligé de faire faire l'expertise que s'il veut continuer à l'exploiter.
Une question se pose alors: la Bedford a-t-elle droit à une déduction pour les $48,750 qu'elle a versés à la New Newfoundland? Si je comprends bien, Me Ainslie soutient que la Bedford n'a jamais eu une obligation réelle de faire faire une expertise quadriennale, tout au plus une obligation poten- tielle susceptible de se matérialiser seulement si la Bedford continuait à exploiter le navire; que cette obligation potentielle et l'état du navire ont été certainement pris en considération dans le calcul de la valeur de l'actif transféré à la New New- foundland, mais n'ont pas donné lieu à une dépense déductible; que, même si la Bedford avait accepté de faire faire l'expertise et les réparations
3 S.R.C. 1970, c. S-9.
en se fondant sur le jugement rendu dans Mont - ship Lines Limited c. M.R.N. 4 , les débours n'au- raient pas été déductibles; et que, si les $48,750 ont été versés au titre de la détérioration, puisque aucune réparation n'a été faite ce montant est purement estimatif et l'alinéa 12(1)e) interdit d'en tenir compte. Sur ce point, l'avocat a invoqué Edward Collins & Sons, Ltd. c. The Commission ers of Inland Revenues, The Naval Colliery Co., Ltd. c. The Commissioners of Inland Revenue 6 , et Peter Merchant, Ltd. c. Stedeford (H.M. Inspector of Taxes)'. Il a aussi cité: Southern Railway of Peru Ltd. c. Owen (Inspector of Taxes) 8 , James Spencer & Co. c. Commissioners of Inland Revenue 9 , et Federal Commissioner of Taxation c. James Flood Proprietary Limited 10 .
Ces causes illustrent des principes appliqués par d'autres juridictions. Je ne les juge donc pas utiles pour résoudre le présent problème. A mon sens, il ne faut pas oublier que les jugements dans ces espèces reposent sur les dispositions de lois qui s'appliquent aux situations dont elles traitent et que ces dispositions ne sont pas nécessairement les mêmes que celles de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le passage suivant, qui figure aux pages 505 et 506 de l'affaire Flood, souligne la diffé- rence entre la loi britannique et la loi australienne, ainsi que la différence entre ces deux lois et la Loi de l'impôt sur le revenu:
[TRADUCTION] Lorsqu'on examine ces questions, il ne faut jamais oublier les différences qui existent en matière d'impôt sur le revenu entre la loi anglaise et les lois du Commonwealth. Le rapport du Comité de codification de l'impôt sur le revenu de 1936, paragraphe 76, contient la description suivante du système britannique: [TRADUCTION] «Les tribunaux ont sou- vent commenté le fait que les lois en vigueur ne contiennent aucune directive générale pour la vérification des profits com- merciaux. Celles qu'elles donnent se limitent à une déclaration selon laquelle `l'équilibre des profits ou des gains' des entrepri- ses, sous réserve des dispositions qui interdisent certaines déductions spéciales, dont quelques-unes ont la forme de limita tions, sont considérées comme une autorisation de procéder à des déductions dans certaines limites. C'est aux tribunaux à établir que `l'équilibre des profits ou des gains' doit, en l'ab- sence de toutes dispositions contraires, se conformer aux princi- pes commerciaux ordinaires, et de formuler comme principe
4 [1954] R.C.É. 376.
5 (1924) 12 T.C. 773.
6 (1928) 12 T.C. 1017. ' (1948) 30 T.C. 496.
8 [1957] A.C. 334.
9 (1950) 32 T.C. 111.
0 [1953] 88 C.L.R. 492.
que dans une transaction commerciale ou un compte de profits et pertes, un poste débiteur est en général aussi un poste débiteur dans le calcul de l'impôt sur le revenu.»
D'autre part, le Commonwealth Act pose en principe que le revenu imposable est le montant qui reste après que toutes les déductions admissibles en aient été extraites et restreint ces dernières aux cas autorisés par la Loi. L'article 51(1) de l'Income Tax Assessment Act stipule qu'il faut déduire toutes les pertes et les dépenses encourues en gagnant ou en produi- sant le revenu imposable ou bien en exerçant une entreprise aux fins de gagner ou de produire ce revenu, pourvu naturellement qu'elles n'aient pas la nature d'un capital ou soient autrement exclues. Le mot «dépenses» laisse à penser qu'il doit y avoir un débours réel, mais, soit parce que cette interprétation produirait des résultats très étranges et anormaux, ou soit en raison de l'emploi du mot «encourues», la disposition a été interprétée comme visant les dépenses dont le contribuable doit s'acquitter au cours de l'année financière, même s'il n'y a pas eu de réels débours.
L'esprit de la Loi de l'impôt sur le revenu, en ce qui concerne le présent litige, est exprimé dans les articles 3, 4 et 12. Aux termes de l'article 3, le revenu d'un contribuable (mot qui, en vertu de l'alinéa 139(1)av) comprend toute personne) pour une année d'imposition, comprend entre autres les revenus de toutes les entreprises. Aux termes de l'article 4, sous réserve des autres dispositions de la Partie I de la Loi, le revenu provenant d'une entreprise ou de biens pour une année d'imposition est le bénéfice en découlant pour l'année. Il est bien établi que le bénéfice provenant d'une entre- prise est celui qui peut être vérifié par l'application des principes commerciaux ordinaires, mais, aux fins de l'impôt sur le revenu, il est sujet aux limitations ou modifications requises pour donner effet aux autres dispositions de la Partie I de la Loi, et entre autres de l'article 12 qui prévoit que:
12. (1) Dans le calcul du revenu, il n'est opéré aucune déduction à l'égard
a) d'une somme déboursée ou dépensée, sauf dans la mesure elle l'a été par le contribuable en vue de gagner ou de produire un revenu tiré de biens ou d'une entreprise du contribuable,
e) d'un montant transféré ou crédité à une réserve, à un compte de prévoyance ou à une caisse d'amortissement, sauf autorisation expresse de la présente Partie,
Au titre de ces dispositions, pour être admissible à une déduction, une somme déboursée ou dépensée déductible du bénéfice calculé selon les principes commerciaux ordinaires doit aussi tomber sous le
coup de l'exception de l'alinéa 12(1)a). Et si la somme dont la déduction est demandée n'est pas une dépense réelle, mais une somme mise de côté pour pourvoir à un débours ou à une dépense à laquelle on s'attend, mais pour laquelle une obliga tion n'est pas encore née, elle sera en droit et en fait une réserve et tombera sous le coup de l'inter- diction de l'alinéa 12(1)e).
En l'espèce, j'estime impossible de considérer le paiement de $48,750 effectué par la Bedford à la New Newfoundland, au cours de la transaction du 1 °r janvier 1969, comme une réserve au sens de l'alinéa 12(1)e). Les $48,750 prévus par la Bed- ford dans ses comptes pour la période se terminant le 31 décembre 1968 constituent une réserve et à ce titre ils étaient déductibles du revenu de 1968 en vertu de l'alinéa 11(1)ea) et des règlements, et en dépit de l'alinéa 12(1)e). Mais la somme versée à la New Newfoundland, le 1 °r janvier 1969, n'est pas une réserve; c'est, s'il me faut absolument la définir, un poste de débours et le fait qu'il ait été calculé d'après le coût estimatif de l'expertise n'en fait nullement une réserve. L'alinéa 12(1)e) ne s'applique donc pas ici pour interdire sa déduction.
D'autre part, à propos de l'alinéa 12(1)a), il faut à mon avis considérer que la somme a été «débour- sée» ou «dépensée» au sens qu'il donne à ces termes, mais je ne suis pas convaincu qu'elle l'ait été «en vue de gagner ou de produire un revenu tiré» de l'entreprise de la Bedford au sens dudit alinéa. L'entreprise avait bien pour objet l'exploi- tation du Bedford II, mais la somme n'a pas été versée pour permettre à la Bedford de poursuivre cette exploitation et la transaction elle a figuré n'a pas été effectuée en cours d'entreprise. Elle a consisté à vendre l'actif investi dans ladite entre- prise et a mis fin à celle-ci. Elle n'a pas été effectuée en vue de gagner ou de produire un revenu tiré d'une entreprise et le montant que la Bedford a accepté de verser au cours de la transac tion ne constitue pas non plus une somme débour- sée ou dépensée «en vue de gagner ou de produire un revenu tiré» d'une entreprise.
La portée de l'exception à l'alinéa 12(1)a) n'est pas étroite. De façon générale, elle comprend
toutes les dépenses qui entrent dans l'exploitation lucrative ou lui sont accessoires. Mais même si, dans certains cas, elle est assez large pour com- prendre une dépense encourue au cours d'une tran saction mettant fin à une entreprise, ce qui peut donner lieu à certaines questions qu'il n'est pas nécessaire de trancher maintenant, elle ne me semble pas comprendre une dépense du genre qui nous intéresse ici, c'est-à-dire une dépense sans rapport avec l'expertise du navire, mais faite sim- plement pour donner à l'acheteur l'actif immobi- lisé de l'entreprise et notamment: le navire, une indemnité relative au coût escompté d'une exper tise dont il pourra ensuite à son gré utiliser ou ne pas utiliser le montant à cette fin. Il ne s'agit pas d'une somme déboursée pour une expertise, car il n'y a pas eu expertise.
Le défendeur soutient que les frais d'expertise quadriennale sont réellement encourus lorsque le navire est exploité mais qu'en l'occurrence, vu qu'il n'y a eu aucune dépense annuelle à cet effet, l'alinéa 12(1)e) interdit toute déduction à ce titre pendant les trois premières années; que le Parle- ment a reconnu que cela était injuste et y a remédié par l'alinéa 11(1)ea); que lorsqu'un con- tribuable paie une autre personne pour faire à propos d'une expertise quadriennale ce qu'il aurait faire lui-même en définitive, il a alors le droit de déduire le coût; que le paiement effectué par le contribuable se rapporte également à l'exploitation du navire au cours des années précédentes et tire son caractère des dépenses qu'il remplace. A titre d'exemple, il cite à ce propos la pratique courante de répartir les impôts entre le vendeur et l'ache- teur, quand on conclut des transactions immobiliè- res. Il s'agit d'un argument séduisant, mais je ne pense pas qu'il puisse prévaloir.
Quant à l'argument selon lequel les dépenses afférentes à l'expertise quadriennale sont encou- rues lorsque le navire est exploité, je dois préciser que je n'ai trouvé dans la documentation produite devant moi aucun indice sur la manière dont la question est réglée dans la pratique commerciale ordinaire. Toutefois, on a déclaré qu'aux fins de l'impôt sur le revenu, le montant de la réserve déduit en 1968 au titre de l'alinéa 11(1)ea) était égal aux trois quarts du coût estimatif de l'exper- tise, calculé d'après le coût réel de l'expertise quadriennale précédente. Toutefois, tout au long
de ce processus, il n'y a pas eu de dépenses encou- rues pour l'expertise. Il n'y a eu qu'une seule réserve qui, aux fins de l'impôt sur le revenu, tombe sous le coup de l'interdiction de l'alinéa 12(1)e), sauf les restrictions prévues par l'alinéa 11(1)ea). Selon moi, il s'ensuit donc qu'aux yeux du législateur, le fait d'avoir besoin d'une expertise n'équivaut pas à effectuer une dépense pour une expertise et ce fait ne peut être considéré en soi comme une dépense. Donc, en fait et en droit, la Bedford n'a encouru aucune dépense à laquelle, dans le calcul de son revenu aux fins de l'impôt, le paiement qu'elle a fait à la New Newfoundland puisse se rattacher, lui donnant le caractère d'une dépense afférente à une expertise quadriennale.
Quant à la pratique suivie dans l'immobilier, toute analogie disparaît, car ce genre de situation comporte en fait une obligation fiscale, qui donne lieu à une dépense encourue par une partie ou par l'autre pendant l'année de la vente. En l'espèce, il n'y a eu ni expertise quadriennale ni frais encourus à ce propos par le vendeur ou l'acheteur.
Dans sa plaidoirie, l'avocat du défendeur a pro- posé que, si je venais à conclure que les $48,750 ne sont qu'une simple réduction du prix du navire, la question soit renvoyée au Ministre pour qu'il déduise une allocation finale à l'égard du coût en capital. Toutefois, la défense n'a pas soulevé ce point et, en tout cas, je n'ai pas conclu que les $48,750 constituaient une réduction du prix du navire.
Il est donc fait droit à l'appel. Je l'accueille avec dépens et ordonne de rétablir la nouvelle cotisation.
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