A-571-77
Rosaire Picard (Requérant)
c.
La Commission des relations de travail dans la
Fonction publique (Intimée)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, le juge
Heald et le juge suppléant Kerr—Ottawa, le 8
décembre 1977.
Examen judiciaire — Fonction publique — Relations du
travail — La Commission des relations de travail dans la
Fonction publique a-t-elle compétence pour entendre la
matière après l'abrogation de l'article applicable faite avant le
commencement des procédures? — Après avoir décidé que
l'arbitre a commis une erreur de droit, la Commission aurait-
elle dû renvoyer la matière à l'arbitre pour nouvelle audition
au lieu d'appliquer la loi aux faits constatés par l'arbitre pour
arriver à une décision correcte? Loi sur la Cour fédérale,
S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 28 — Loi sur les relations de
travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35, art. 23
modifié par S.C. 1974-75-76, c. 67, art. 11, 32.
DEMANDE d'examen judiciaire.
AVOCATS:
Maurice Wright, c.r., pour le requérant.
John McCormick pour l'intimée.
Robert W. Côté pour la Reine (Conseil du
Trésor).
PROCUREURS:
Soloway, Wright, Houston, Greenberg,
O'Grady & Morin, Ottawa, pour le requérant.
La Commission des relations de travail dans
la Fonction publique, Service du contentieux,
pour l'intimée.
Le sous-procureur général du Canada pour la
Reine (Conseil du Trésor).
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus à l'audience par
LE JUGE EN CHEF JACKETT: Il s'agit d'une
demande introduite en vertu de l'article 28 en vue
d'obtenir l'annulation d'une décision de la Corn-
mission des relations -de travail dans la Fonction
publique.
Le premier motif d'appel est basé sur l'alléga-
tion que, comme la matière venait devant la Com
mission sur renvoi d'un arbitre en vertu de l'article
23 de la Loi sur les relations de travail dans la
Fonction publique', S.R.C. 1970, c. P-35, lequel
article a été abrogé par l'article 11 du chapitre 67
des statuts de 1974-75-76, en vigueur le l er octobre
1975, alors que le renvoi fait en vertu de l'article
23 l'a été le 30 avril 1976, la Commission ne serait
donc plus compétente pour entendre ledit renvoi et
se prononcer sur lui.
Ce premier motif d'appel invoque que le renvoi
serait une procédure au sens du mot «procédure»
de l'article 32(1) de la Loi modificatrice dont voici
le libellé:
32. (1) Les procédures engagées en vertu de la Loi sur les
relations de travail dans la Fonction publique devant la Com
mission, le Tribunal d'arbitrage ou un arbitre avant l'entrée en
vigueur de la présente loi seront poursuivies et achevées comme
si la présente loi n'avait pas été édictée.
A mon avis, le sens du mot «procédure» varie
suivant le contexte, et, en l'espèce, il évoque toutes
les procédures prévues par la Loi sur les relations
de travail dans la Fonction publique aux fins de
traitement des griefs. Suivant ce point de vue,
comme le requérant a entamé sa procédure de
grief avant l'abrogation de l'article 23, il est évi-
dent que ladite abrogation ne s'applique pas à la
procédure de grief en question. L'analogie est
manifeste entre un renvoi fait en vertu de l'article
23 et un appel dans un procès ordinaire. A mon
avis, le droit de renvoyer est un droit en soi et non
pas un simple droit de procédure. Et aucune dispo
sition créant ou abolissant un tel droit n'a d'effet
rétroactif, sauf en cas de stipulation expresse. Voir
Boyer c. Le Roi 2 et Marcotte c. Le Roi 3 .
' Voici le libellé de l'article 23:
23. Lorsqu'une question de droit ou de compétence se pose
à propos d'une affaire qui a été renvoyée au tribunal d'arbi-
trage ou à un arbitre, en conformité de la présente loi, le
tribunal d'arbitrage ou l'arbitre, selon le cas, ou l'une des
parties peut renvoyer la question à la Commission, pour
audition ou décision conformément aux règlements établis
par la Commission à ce sujet. Toutefois le renvoi d'une
question de ce genre à la Commission n'aura pas pour effet
de suspendre les procédures relatives à cette matière à moins
que le tribunal d'arbitrage ou l'arbitre, selon le cas, ne décide
que la nature de la question justifie une suspension des
procédures ou que la Commission n'en ordonne la suspension.
2 [1949] R.C.S. 89.
3 [1950] R.C.S. 352.
Le second motif d'appel consiste à soutenir que
la Commission, ayant conclu que l'arbitre, avant
elle, s'est prononcé sur la question par suite d'une
interprétation erronée de la loi, aurait dû renvoyer
la matière audit arbitre pour une nouvelle
audience à tenir suivant l'interprétation de la loi
formulée par la Commission. A ma connaissance,
la Commission s'est fondée sur les faits constatés
par l'arbitre, s'est prononcée sur lesdits faits sui-
vant ce qu'elle considérait comme une interpréta-
tion correcte de la loi, et a rendu son ordonnance
en conséquence. A mon avis, la Commission, agis-
sant de cette façon, n'a pas outrepassé les pouvoirs
à elle conférés par l'article 23.
A mon avis, la demande introduite en vertu de
l'article 28 doit être rejetée.
* * *
LE JUGE HEALD y a souscrit.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT KERR y a souscrit.
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