A-642-77
Genette Laurent (Requérante)
c.
G. Perron et le ministre de l'Emploi et de l'Immi-
gration du Canada (Intimés)
et
Le sous-procureur général du Canada (Mis - en-
cause)
Cour d'appel, les juges Ryan et Le Dain et le juge
suppléant Hyde—Montréal, le 31 octobre; Ottawa,
le 7 novembre 1977.
Examen judiciaire — Immigration — Certificat du Ministre
annulé vu le retrait de la demande du mari pour l'admission
de la requérante — Demande personnelle de résidence perma-
nente — Déclarée inadmissible après enquête — Pas de visa
valable et non périmé — Contestation de la validité de l'annu-
lation du certificat du Ministre et, par conséquent, de la
compétence de l'enquêteur spécial — Celui-ci n'a pas compé-
tence pour faire enquête sur l'annulation du permis ministériel
— Le permis ministériel relève exclusivement d'une décision
administrative et n'est donc pas susceptible d'examen — Loi
sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 28 —
Loi sur l'immigration, S.R.C. 1970, c. I-2, art. 5t) — Règle-
ment sur l'immigration, Partie I, DORS/62-36 modifié par
DORS/72-443.
Arrêt suivi: Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immi-
gration c. Hardayal [1978] 1 R.C.S. 470.
DEMANDE d'examen judiciaire.
AVOCATS:
A. H. J. Zaitlin, c.r., pour la requérante.
Claude Joyal pour les intimés et le mis-en-
cause.
PROCUREURS:
A. H. J. Zaitlin, c.r., Montréal, pour la
requérante.
Le sous-procureur général du Canada pour
les intimés et le mis-en-cause.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement de la Cour rendus par
LE JUGE LE DAIN: Il s'agit d'une demande
formulée en vertu de l'article 28 visant l'annula-
tion d'une ordonnance d'expulsion. Le jugement
prononcé à l'audience rejetait la demande, avec la
mention que les motifs en seraient donnés par écrit
ultérieurement. Voici les motifs du jugement.
Le 19 septembre 1973, la requérante a été
admise au Canada comme touriste, jusqu'au 10
octobre 1973. Elle est demeurée au pays jusqu'en
octobre 1976, sans apparemment aucune extension
de son statut légal. Le 10 octobre 1976, elle a
épousé, à Montréal, un certain Émile Laurent,
immigrant reçu. Laurent a fait une demande pour
qu'elle soit admise au Canada en tant que per-
sonne à charge parrainée et, le 14 octobre 1976,
elle obtenait un permis du Ministre, conformément
à l'article 8 de la Loi sur l'immigration, S.R.C.
1970, c. I-2, l'autorisant à demeurer au pays
jusqu'au 13 octobre 1977, pendant que sa demande
d'admission présentée par son mari serait étudiée.
Le 5 mai 1977, Laurent a adressé aux autorités de
l'immigration une déclaration statutaire dans
laquelle il retirait, en fait, sa demande visant
l'admission de la requérante comme personne à
charge parrainée. Le 24 mai 1977, le permis du
Ministre a été annulé à compter du 7 juin 1977. Le
8 juin 1977, la requérante a prévenu les autorités
de l'immigration conformément à l'article 7(3) de
la Loi sur l'immigration et a fait une demande
pour être admise au Canada comme résidente
permanente. Le fonctionnaire à l'immigration qui
l'a examinée a fait un rapport conformément à
l'article 22 de la Loi dans lequel il exprimait
l'opinion que l'admission de la requérante lui était
interdite en vertu de l'article 5t) de la Loi en ce
qu'elle n'était pas en possession d'un visa d'immi-
grant valable et non périmé comme l'exige l'article
28 du Règlement sur l'immigration, Partie I,
DORS/62-36 modifié par DORS/72-443. Une
enquête a eu lieu et la requérante a été déclarée
inadmissible pour ce motif; le 15 septembre 1977,
une ordonnance d'expulsion a été rendue contre
elle.
La requérante attaque l'ordonnance d'expulsion
au motif que l'annulation du permis du Ministre,
en vertu de l'article 8(3) de la Loi, est invalide et
que, pour cette raison, l'enquêteur spécial a outre-
passé sa compétence ou autrement erré en droit en
ordonnant son expulsion. La requérante prétend
que, pour des motifs d'ordre public, le Règlement
sur l'immigration doit être interprété de façon à
empêcher le mari de retirer sa demande d'admis-
sion pour sa femme comme personne à charge
parrainée, une fois que cette demande est faite, et
que, de toute façon, ce retrait ne constitue pas un
motif valable de l'annulation du permis du Minis-
tre qui avait été accordé pour la durée de l'examen
de cette demande. Nous doutons fort du bien-
fondé de cette prétention en dépit de tout le désa-
grément que ce retrait peut entraîner mais, de
toute façon, nous sommes tous d'avis que le motif
pour lequel on attaque la validité de l'annulation
du permis du Ministre ne peut constituer un motif
pour attaquer la validité de l'ordonnance d'expul-
sion. L'enquêteur spécial n'a pas compétence pour
faire enquête sur la question de savoir si le permis
du Ministre a été annulé pour une raison valable.
Il n'a pas compétence pour réviser l'exercice du
pouvoir discrétionnaire du Ministre. L'exercice
valide de ce pouvoir discrétionnaire ne constitue
aucunement une condition préalable à l'exercice de
sa propre compétence. Il ne commet pas non plus
d'erreur de droit s'il présume que l'annulation, en
apparence valide, d'un permis du Ministre est
valide et s'il conclut que la requérante se trouve au
pays sans statut légal. La Cour suprême du
Canada a décidé que l'annulation d'un permis du
Ministre conformément à l'article 8(3) de la Loi
est une décision administrative qui n'est pas sou-
mise à un processus judiciaire ou quasi judiciaire'.
C'est une autre raison pour que l'on ne puisse
l'attaquer de façon collatérale dans le cadre d'une
demande fondée sur l'article 28 visant une ordon-
nance d'expulsion. Si l'on veut attaquer l'exercice
du pouvoir discrétionnaire en question, il faut le
faire directement au moyen d'un autre recours.
' Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration c.
Hardayal [1978] 1 R.C.S. 470.
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