A-14.1-77
Le procureur général du Canada (Requérant)
c. -
Michel Grégoire (Intimé)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges
Pratte et Le Dain—Montréal, les 24 et 25 novem-
bre 1977.
Examen judiciaire — Fonction publique — Relations du
travail — Compétence — Demande d'annulation d'une déci-
sion d'un arbitre agissant en vertu de l'art. 91 de la Loi sur les
relations de travail dans la Fonction publique — Compétence
si le grief a donné lieu à une peine pécuniaire — Prélèvement
de la peine pécuniaire — Demande rejetée — Loi sur la Cour
fédérale, S.R.C. 1970 (2' Supp.), c. 10, art. 28 — Loi sur les
relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c.
P-35, art. 91(1)b).
DEMANDE.
AVOCATS:
P. Delage pour le requérant.
P. Lesage et N. Beaulieu pour l'intimé.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le
requérant.
Trudel, Nadeau, Létourneau, Lesage &
Cleary, Montréal, pour l'intimé.
Commission des relations de travail dans la
Fonction publique, Ottawa, pour la Commis
sion des relations de travail dans la Fonction
publique.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus à l'audience par
LE JUGE EN CHEF JACKETT: Cette demande
faite en vertu de l'article 28 vise à faire annuler
une décision d'un arbitre prétendant agir en vertu
de l'article 91(1)b) de la Loi sur les relations de
travail dans la Fonction publique', pour le motif
que le grief de l'intimé ne relevait pas dudit article
et qu'en conséquence l'arbitre n'avait pas compé-
tence en la matière.
Les parties reconnaissent que, si le grief avait
trait à «une mesure disciplinaire entraînant ... une
peine pécuniaire», l'arbitre était compétent, alors
qu'autrement il ne l'était pas.
' S.R.C. 1970, c. P-35.
Vu la rareté des éléments d'information à l'ap-
pui de cette demande faite en vertu de l'article 28,
il est important de souligner, dès le commence
ment, que, si ces éléments n'établissent pas que
l'arbitre n'est pas compétent, la demande doit être
rejetée.
Les faits constatés par l'arbitre n'ont pas été mis
en doute, quoique cette cour n'ait pas devant elle
les dépositions orales sur lesquelles ses constata-
tions sont largement fondées. D'après ces faits,
l'intimé, commis des postes, a accepté un chèque
«frauduleux» en paiement d'un mandat postal sans
présenter le «chèque» à un fonctionnaire de rang
plus élevé, comme l'exigeait, en l'occurrence, le
[TRADUCTION] «Manuel de procédure financière»,
laquelle exigence n'avait apparemment pas été
portée à sa connaissance. Dans ces circonstances,
son Ministère l'a avisé qu'il était requis de rem-
bourser la perte subie, soit le montant du chèque
de $150.36. Devant l'arbitre, cette exigence a
manifestement été justifiée sur la base des [TRA-
DUCTION] «exigences énoncées dans la description
des postes-repères», quoique, pendant la période
des procédures préliminaires de grief, le Ministère
ait informé l'intimé que la décision était fondée sur
le paragraphe 18 du «Manuel>.
Il n'a pas été démontré devant la Cour que «la
description de poste» a force de statut contractuel
ou autre statut légal, en ce qui concerne les rela
tions juridiques de l'intimé à titre d'employé, ni
que celui-ci était au courant de son contenu. On
n'a pas informé la Cour dans quelles circonstances
ce manuel a vu le jour (et, plus spécialement, s'il
constitue un règlement) et le paragraphe 18 n'a
pas été versé au dossier, et son contenu n'a pas été
autrement révélé à la Cour.
Une chose est évidente. On n'a jamais accusé
l'intimé pour n'avoir pas rendu compte de l'argent
ou d'autres valeurs mobilières confiés à sa posses
sion. En outre, il n'est pas évident que le prélève-
ment fait sur le salaire de l'intimé soit basé sur une
négligence qu'il aurait commise dans l'exécution
de ses fonctions. Au contraire, les faits constatés
par l'arbitre rendraient invraisemblable une telle
allégation.
En l'espèce, je dois conclure qu'une peine pécu-
niaire a été, avec ou sans fondement juridique,
imposée à l'intimé pour inobservation de certaines
des exigences contenues dans le [TRADUCTION]
«Manuel de procédure financière», lequel manuel
peut, ou non, avoir l'effet d'un règlement ou d'une
procédure adoptée à un certain niveau de l'admi-
nistration ministérielle. En outre, rien ne prouve
que cette peine est fondée sur la constatation que
la perte était imputable au défaut d'observation
desdites exigences par l'intimé.
Sans essayer de définir les limites de ce qu'est
«une mesure disciplinaire» ou «une peine pécu-
niaire», je suis d'avis que, à juger les faits exposés
devant cette cour, il n'a pas été prouvé que l'arbi-
tre a eu tort de décider que le grief de l'intimé
relève de l'article 91(1)b) de la Loi sur les rela
tions de travail dans la Fonction publique.
A mon avis, la demande faite en vertu de l'arti-
cle 28 doit être rejetée.
* * *
LE JUGE PRATTE y a souscrit.
* * •
LE JUGE LE DAIN y a souscrit.
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