T-4080-73
B. G. Equipment Co. Inc. (Demanderesse)
c.
Care Line Canada Ro/Ro Express et Cie Atlan-
tique Maritime, a/s Cie Générale Transatlantique
(Défenderesses)
Division de première instance, le juge Walsh—
Montréal, le 7 novembre; Ottawa, le 15 novembre
1977.
Droit maritime — Connaissement — Applicabilité des
Règles de La Haye — Cargaison transportée de la Suède à
Montréal endommagée — Aucune déclaration et aucune men
tion faite sur le connaissement en ce qui concerne la valeur des
marchandises — Les défenderesses ont-elles renoncé au béné-
fice de la limitation de responsabilité par unité? — Faut-il
appliquer la loi canadienne ou la loi suédoise? — Loi sur le
transport des marchandises par eau, S.R.C. 1970, c. C-15 —
Article IV, Règle 5 des Règles de La Haye.
Les marchandises de la demanderesse ont été endommagées
durant leur transport de la Suède à Montréal. Le contrat de
transport était régi par les Règles de La Haye, lesquelles, selon
la loi suédoise, étaient d'application obligatoire. La valeur des
marchandises n'a pas été déclarée aux défenderesses ni men-
tionnée sur le connaissement. La demanderesse fait valoir que
l'article 12 du connaissement, intitulé «Le montant des indem-
nités» s'applique (les parties ayant renoncé à la limitation fixée
par les Règles de La Haye) plutôt que l'article 13 intitulé
«Dispositions particulières y compris les transports au départ et
à destination d'un port». Les questions à trancher sont les
suivantes: (1) en vertu des conditions du connaissement, les
défenderesses ont-elles renoncé au bénéfice de la limitation de
responsabilité par unité et (2) si non, cette limitation doit-elle
être fondée sur la loi suédoise ou sur la loi canadienne?
Arrêt: l'action est rejetée. Les procédures ont été introduites
de bon droit au Canada mais ce sont les Règles de La Haye
adoptées par la Suède qui sont applicables en vertu de l'article
13(1)b). Rien ne permet de restreindre le sens du mot «nonob-
stant» utilisé à l'article 13 qui exclut clairement l'application de
l'article 12 quand on peut établir le lieu de la survenance des
pertes ou dommages, auquel cas le commerçant ou le transpor-
teur peuvent demander que la responsabilité soit fixée confor-
mément aux dispositions des Règles de La Haye. Il y a peu de
fondement à l'argument suivant lequel le mot «responsabilité»
utilisé à l'article 13 signifie responsabilité légale pour les dom-
mages et exclut le quantum, lequel est traité à l'article 12 seul.
Il faut donner à l'article 13 du connaissement plein effet parce
qu'il l'emporte sur l'article 12 et qu'il incorpore les Règles de
La Haye.
ACTION.
AVOCATS:
P. R. D. MacKell, c.r., pour la demanderesse.
A. S. Hyndman, c.r., pour les défenderesses.
PROCUREURS:
Martineau, Walker, Allison, Beaulieu, Mac -
Kell & Clermont, Montréal, pour la deman-
deresse.
McMaster, Minnion, Patch, Hyndman,
Legge, Camp & Paterson, Montréal, pour les
défenderesses.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: La présente action est enten-
due à la suite d'un exposé des faits conformément
à la Règle 475. Les faits convenus, les prétentions
de la demanderesse ainsi que les questions sur
lesquelles il faut statuer sont indiqués comme suit:
[TRADUCTION] 1. A toutes les époques pertinentes la deman-
deresse était la propriétaire des marchandises décrites dans le
connaissement, relatif à un transport combiné effectué par Care
Line émis le 21 novembre 1972 Copenhague (Danemark),
(annexé comme pièce n° 1), lesdites marchandises se composant
d'une grue Climber Kroll démontée et transportée dans quatre
caisses ainsi que 64 pièces à monter non emballées (les
«marchandises»).
2. A toutes les époques pertinentes, le n.m. MONT LAURIER
appartenait à la défenderesse Cie Atlantique Maritime.
3. A toutes les époques pertinentes, la défenderesse Cie Géné-
rale Transatlantique était le «transporteur» des marchandises de
la demanderesse au sens de la partie I, paragraphe 2 du
connaissement, pièce n° 1.
4. Les marchandises provenaient de l'usine de fabrication de
grues F. B. Kroll A/S située à Copenhague (Danemark) et ont
été reçues à Copenhague en bon état et conditionnement appa-
rents par les mandataires de la défenderesse Care Line, d'où
elles ont été transportées par caboteur à Goteborg (Suède) pour
être chargées à bord d'un navire océanique le MONT LAURIER
pour être transportées à Montréal.
5. Le 22 novembre 1972, le chargeur, F. B., Kroll A/S, a
envoyé au destinataire, B. G. Equipment Co. Inc., une facture
(copie annexée comme pièce n° 2) confirmant la date de
l'expédition ainsi que l'itinéraire décrit ci-dessus.
6. La valeur des marchandises de la demanderesse n'a pas été
déclarée aux défenderesses et aucune mention n'en a été faite
sur le connaissement.
7. A Goteborg, les marchandises ont été reçues et arrimées à
bord du MONT LAURIER, toujours en bon état et conditionne-
ment apparents.
8. Pendant la traversée de l'Atlantique Nord et, plus particuliè-
rement, entre le 8 et 14 décembre 1972, le navire a essuyé une
tempête avec des grands vents atteignant la force 11 (Échelle
de Beaufort), avec des vagues et une houle de 35 pieds de haut,
faisant rouler et tanguer fortement le navire et lui faisant
embarquer de l'eau par-dessus bord.
9. Pendant la durée du mauvais temps décrit ci-dessus, une
partie du chargement y compris une partie du chargement de la
demanderesse, s'est déplacée et a été endommagée.
10. Aux fins du présent exposé des faits, la demanderesse
reconnaît que les défenderesses ont exercé une diligence raison-
nable pour maintenir le MONT LAURIER en bon état de naviga-
bilité et pour assurer au navire un armement, équipement ou
approvisionnement convenables, et pour mettre en état les cales
et toute autre partie du navire où les marchandises de la
demanderesse ont été chargées, de façon qu'elles soient aptes à
leur réception, à leur transport et à leur préservation.
11. Aux lins de l'exposé des faits, les défenderesses renoncent à
tout moyen de défense fondé sur les périls, dangers et accidents
de la mer ou d'autres eaux navigables.
12. A la suite du déchargement des marchandises de la deman-
deresse à Montréal le 21 décembre 1972 ou vers cette date, et à
la suite d'expertises ultérieures, il a été déterminé que le coût de
réparation de ces marchandises totalisait à peu près la somme
de $20,000, la demanderesse a fixé le montant des réparations à
$17,000.
13. Le contrat de transport était régi, en autant qu'il concerne
la période du transport visé dans la présente action, par la
Convention internationale pour l'unification de certaines règles
en matière de connaissement, 1924 (les «Règles de La Haye»),
lesquelles selon la loi suédoise n° 277 du 5 juin 1936 étaient
d'application obligatoire.
14. L'article IV (5) des Règles de la Haye prévoit, notamment:
«Le transporteur comme le navire ne seront tenus en aucun
cas des pertes ou dommages causés aux marchandises ou les
concernant pour une somme dépassant 100 livres sterling par
colis ou unité, ou l'équivalent de cette somme en une autre
monnaie, à moins que la nature et la valeur de ces marchan-
dises n'aient été déclarées par le chargeur avant leur embar-
quement et que cette déclaration ait été insérée au
connaissement.»
15. En vertu de l'article 4 (5) de cette loi suédoise, la limitation
par colis ou unité était, à toutes les époques pertinentes, de
1800 couronnes suédoises, laquelle, était en décembre 1972,
équivalente à 377.82 $CAN.
16. Des dommages ont été occasionnés à 16 colis ou unités de
marchandises de la demanderesse.
17. Les défenderesses soutiennent qu'en vertu de la loi suédoise
et en vertu de l'article 13 de la partie III du connaissement
(intitulé «Responsabilité du transporteur») leur responsabilité
totale à l'égard de la demanderesse concernant les 16 colis ou
unités est limitée à $6,045.12.
18. Le 27 juillet 1976, les défenderesses ont offert et consigné à
cette cour à Montréal la somme de $6,045.12, y compris la
somme de $1,084 représentant l'intérêt au taux légal calculé du
27 décembre 1972 au 27 juillet 1976, plus $100 de frais, lesdits
intérêt et frais étant sauf à parfaire.
19. La demanderesse soutient que:
a) en vertu des conditions du connaissement, les défenderes-
ses ont renoncé au bénéfice de la limitation de responsabilité
par colis ou unité et donc sont tenues de verser à la demande-
resse le montant de $17,000; ou, subsidiairement,
b) si les défenderesses bénéficient de la limitation de respon-
sabilité par colis ou unité, cette responsabilité ajoutée à
l'effet des articles 5, 12 et 13 du connaissement aurait pour
résultat, qu'en vertu de la Loi sur le transport des marchan-
dises par eau, 1970 S.R. chap. C-15, le montant actuel serait
de $500 par colis ou unité, auquel cas leur responsabilité à
l'égard de la demanderesse serait d'un montant de $8,000.
20. Qu'il doit être statué sur les questions suivantes:
a) En vertu des conditions du connaissement, les défenderes-
ses ont-elles renoncé au bénéfice de la limitation de responsa-
bilité par colis ou unité pour pertes ou dommages occasionnés
aux marchandises de la défenderesse?
b) Si les défenderesses n'ont pas renoncé au bénéfice de la
limitation de responsabilité, cette limitation doit-elle être
fondée sur la loi suédoise au taux de $377.82 par colis ou
unité ou sur la loi canadienne au taux de $500 par colis ou
unité?
21. Si la Cour statue que les défenderesses ont renoncé au
bénéfice de la limitation de responsabilité par colis ou unité, le
jugement sera rendu en faveur de la demanderesse pour un
montant de $17,000, plus intérêt au taux légal et les frais, le
montant de l'offre faite par les défenderesses ainsi que la
provision déposée auprès de la Cour devant être prélevée en
faveur de la demanderesse pour l'exécution partielle de ce
jugement.
22. Si la Cour statue que les défenderesses bénéficient de la
limitation de responsabilité par colis ou unité, et ce conformé-
ment aux Règles de La Haye édictées en Suède, l'offre des
défenderesses ainsi que la provision déposée seront déclarées
valides et le jugement sera rendu en faveur de la demanderesse
pour un montant de $6,045.12, plus intérêt au montant de
$1,084 ainsi que des frais d'un montant de $100, tous les frais
ultérieurs à partir du 27 juillet 1976, seront accordés aux
défenderesses.
23. Si la Cour statue que les défenderesses bénéficient de la
limitation de la responsabilité par colis ou unité mais conformé-
ment à la Loi canadienne sur le transport des marchandises par
eau, le jugement sera rendu en faveur de la demanderesse- pour
un montant de $8,000, plus les intérêts au taux légal calculés à
partir du 27 décembre 1972, ainsi que les frais, le montant de
l'offre faite par les défenderesses ainsi que de la provision
déposée auprès de la Cour devant être prélevée en faveur de la
demanderesse en exécution partielle de ce jugement.
Les articles du connaissement qui ont un rapport
avec la solution du litige sont les suivants:
[TRADUCTION] 12. Le montant des indemnités.
(1) Lorsque le transporteur est tenu de verser une indemnité
pour des pertes ou dommages occasionnés aux marchandises,
cette indemnité sera calculée par référence à la valeur des
marchandises aux temps et lieu de leur livraison au commer-
çant conformément au contrat, ou aux temps et lieu où elles
auraient dû être livrées.
(2) La valeur de la marchandise est déterminée par le cours
en bourse ou, à défaut, d'après le prix courant sur le marché
ou, à défaut de l'un et de l'autre, d'après la valeur usuelle des
marchandises de mêmes nature et qualité.
(3) Cependant, l'indemnité ne dépassera pas 2 $CAN par
kilogramme de poids brut des marchandises perdues ou
endommagées.
(4) Une indemnité plus élevée peut être réclamée seulement
lorsque, avec le consentement du transporteur, la valeur des
marchandises déclarées par l'expéditeur, qui dépasse la
valeur limite stipulée au présent article, a été indiquée dans
ce connaissement. Dans ce cas le montant de la valeur
déclarée remplace la valeur limite.
13. Dispositions particulières y compris les transports au
départ et à destination d'un port.
(1) Nonobstant toute disposition des articles 11 et 12 de ce
connaissement, si le lieu de survenance des pertes ou domma-
ges peut être établi, le transporteur et(ou) le commerçant
pourra(ont) demander que cette responsabilité, c'est-à-dire la
responsabilité du transporteur, soit fixée en vertu des disposi
tions contenues dans une convention internationale ou dans le
droit national, lesquelles dispositions
a) ne peuvent être écartées par contrat particulier conclu
au préjudice du réclamant, et
b) se seraient appliquées si le commerçant avait conclu un
contrat distinct et sans intermédiaire avec le transporteur
pour l'étape particulière du transport où les pertes ou
dommages sont survenus et s'il avait reçu comme preuve
du contrat tout document particulier devant être émis dans
le cas où cette convention internationale ou ce droit natio
nal s'appliquait.
(2) En autant que les Règles de La Haye contenues dans la
Convention internationale pour l'unification de certaines
règles en matière de connaissement en date du 25 août 1924,
ne s'appliquent pas au transport par mer en vertu des disposi
tions précédentes de l'article, la responsabilité du transpor-
teur pour tout transport par mer doit être déterminée par
cette convention. Les Règles de La Haye détermineront
également la responsabilité du transporteur pour le transport
le long des côtes ainsi que le transport dans les eaux intérieu-
res comme si ce transport était effectué en mer. En outre,
elles s'appliqueront aux marchandises transportées sur le
pont sous réserve de l'article 8.
(3) Chaque fois qu'il est fait renvoi aux Règles de La Haye
dans le présent article, ce renvoi doit, au Canada, être
interprété comme visant la Loi sur le transport des marchan-
dises par eau de 1936.
5. Loi applicable et attribution de compétence.
Les litiges survenant en vertu de ce connaissement doivent être
réglés, au choix du requérant, par les tribunaux et, sous réserve
de l'article 13 du connaissement, conformément à la loi
a) du lieu où le transporteur a sa résidence habituelle ou de
son lieu principal d'affaire, ou de la succursale ou de l'agence
par l'intermédiaire de laquelle le contrat ou le contrat de
transport combiné a été conclu, ou
b) du lieu où les marchandises ont été prises en charge par le
transporteur ou du lieu indiqué pour la livraison.
Aucune procédure ne peut être intentée devant d'autres tribu-
naux à moins que les parties ne consentent expressément au
choix d'une autre cour ou d'un tribunal d'arbitrage et de la loi
applicable.
Les Règles de La Haye sont incorporées en
annexe dans la Loi sur le transport des marchan-
dises par eau' du Canada mais en vertu de l'arti-
cle 2 de la Loi, les Règles sont exécutoires relative-
ment au transport des marchandises par eau
seulement à partir d'un port du Canada à destina
tion de tout autre port, soit à l'intérieur, soit en
dehors du Canada. Par l'article 4 tout connaisse-
ment émis au Canada qui prouve l'existence de
contrats visés par les Règles doit renfermer une
déclaration formelle qu'il sera exécutoire sous
réserve des Règles. Le présent transport a été
effectué en vertu d'un connaissement émis à
Copenhague (Danemark), faisant venir à Göte-
borg (Suède) la cargaison par un caboteur, et
ensuite à Montréal sur le n.m. Mont Laurier pro-
priété de la défenderesse Cie Atlantique Maritime,
de là les marchandises devaient être envoyées par
camion au destinataire à Rochester (New York).
C'était par conséquent un connaissement direct
mais il ne fait aucun doute que le dommage est
survenu durant le transport du port de Goteborg
au port de Montréal. Les défenderesses soutien-
nent que l'utilisation par elles d'un formulaire
courant de connaissement direct justifie les termes
utilisés et en particulier la limite plus élevée du
montant de l'indemnité fondée sur le poids dans
l'article 12 du connaissement, principalement des-
tiné à s'appliquer aux autres étapes du transport
plutôt qu'au transport par voie océanique; elles
ajoutent que le même connaissement est utilisé
pour les transports en direction de l'est aussi bien
que de l'ouest, et que c'est ce qui explique le renvoi
fait dans l'article 13(3) la Loi sur le transport
des marchandises par eau du Canada, renvoi qui
est exigé par l'article 4 de cette loi. Ce qui précède
peut bien être exact et expliquer les termes de
certains articles du connaissement, mais cela ne
peut modifier le fait que le connaissement doit être
interprété sur la base des termes utilisés, et qu'il ne
s'agit pas d'un transport régi par la Loi sur le
transport des marchandises par eau du Canada.
Les procédures ont été introduites de bon droit au
Canada en vertu de l'article 5 du connaissement
qui donne au réclamant trois possibilités, l'une
étant le lieu indiqué pour la livraison. Le fait que
l'article 13(3) mentionne que chaque fois qu'il est
fait renvoi aux Règles de La Haye, ce renvoi doit
«au Canada» être interprété comme un renvoi à la
' S.R.C. 1970, c. C-15.
Loi du transport des marchandises par eau, 1936
du Canada ne rend pas applicable, à mon avis, la
limitation canadienne à un montant ne dépassant
pas $500 par colis ou unité prévue à l'article IV,
Règle 5 des Règles de La Haye, puisque la Loi
énonce clairement que ces Règles ne s'appliquent
qu'au transport à partir du Canada.
La prétention principale de la demanderesse est
que l'article 12 du connaissement s'applique, les
parties ayant renoncé à la limitation fixée par les
Règles de La Haye. Pour appuyer cet argument,
elle fait remarquer que l'article 12 est intitulé «Le
montant des indemnités» et que l'article 13 est
intitulé «Dispositions particulières y compris les
transports au départ et à destination d'un port».
C'est durant le transport au départ et à destination
d'un port que le dommage est survenu. La deman-
deresse soutient qu'il faut donner une interpréta-
tion étroite à l'expression «Nonobstant toute dispo
sition des articles 11 et 12», et affirme que cela
signifie que l'article 13 l'emporte en cas de conflit
avec l'article 12, mais qu'il n'existe pas de conflit
puisque l'article 12 prévoit une limitation de res-
ponsabilité plus élevée, ce que permettent les
Règles de La Haye. L'article IV, Règle 5 des
Règles de La Haye est libellé comme suit:
Le transporteur comme le navire ne seront tenus en aucun
cas des pertes ou dommages causés aux marchandises ou les
concernant pour une somme dépassant 100 livres sterling par
colis ou unité, ou l'équivalent de cette somme en une autre
monnaie, à moins que la nature et la valeur de ces marchandi-
ses n'aient été déclarées par le chargeur avant leur embarque-
ment et que cette déclaration ait été insérée au connaissement.
Cette déclaration ainsi insérée dans le connaissement consti-
tuera une présomption, sauf preuve contraire, mais elle ne liera
pas le transporteur, qui pourra la contester.
Par convention entre le transporteur, capitaine ou agent du
transporteur et le chargeur, une somme maximum différente de
celle inscrite dans ce paragraphe peut être déterminée, pourvu
que ce maximum conventionnel ne soit pas inférieur au chiffre
ci-dessus fixé.
Ni le transporteur ni ie navire ne seront en aucun cas
responsables pour perte ou dommage causé aux marchandises
ou les concernant, si dans le connaissement le chargeur a fait
sciemment une déclaration fausse de leur nature ou de leur
valeur.
En conséquence la demanderesse soutient qu'étant
donné que les Règles autorisent une augmentation
du montant maximum de la limitation de respon-
sabilité et que l'article 12 augmente ce montant,
cet article l'emporte. Deux objections peuvent être
formulées à l'égard de ce raisonnement. En pre-
mier lieu, bien que la nature des marchandises ait
été déclarée par le transporteur et incorporée dans
le connaissement, leur valeur n'y figure pas. Le
connaissement renferme l'expression [TRADUC-
TION] «en transit vers les É.-U. pour le compte et
aux risques des destinataires», et bien qu'aucune
valeur des marchandises n'ait été déclarée, les frais
de transport devaient être calculés sur le transport
direct. Si l'on considère seul l'article 12, il semble-
rait que la limitation de $2 par kilogramme prévue
au paragraphe 3 l'emporterait en l'absence d'une
déclaration de valeur pour mettre en oeuvre con-
formément au paragraphe 4 une limitation d'un
montant plus élevé. Cependant la limitation de $2
par kilogramme, même s'il a été convenu de l'utili-
ser et peut-être l'a-t-elle été, pour déterminer les
frais de transport, pourrait être considérée comme
une dérogation à l'article IV, Règle 5 des Règles
de La Haye qui n'autorisent aucune dérogation
concernant la limitation à moins que la nature et
la valeur des marchandises n'aient été déclarées.
En outre, rien ne permet de restreindre le sens
du mot «nonobstant» utilisé à l'article 13 qui, à
mon avis, exclut clairement l'application de l'arti-
cle 12 quand on peut établir le lieu de la surve-
nance des pertes ou dommages, auquel cas le
commerçant ou le transporteur peuvent demander
que la responsabilité soit fixée conformément aux
dispositions des Règles de La Haye. Je crois que
l'article 13(1)b) s'applique et que le connaissement
a été conclu avec le transporteur pour cette étape
particulière du transport où la perte ou le dom-
mage est survenu. Bien que le connaissement
englobe également d'autres étapes du transport et,
dans ce sens, n'ait pas été un contrat distinct sans
intermédiaire avec le transporteur, il mentionne
qu'il est sur la base de la formule «quai à quai» et il
n'est pas contesté que c'est durant cette partie du
transport que le dommage est survenu.
La demanderesse présente un autre argument lié
avec sa prétention que l'article 13 ne s'applique
pas. Elle s'appuie sur l'expression «c'est-à-dire la
responsabilité du transporteur» pour dire que res-
ponsabilité signifie simplement responsabilité
légale pour les dommages et ne comprend pas leur
quantum qui est traité à l'article 12 intitulé «Le
montant des indemnités». Cette prétention est
fondée sur le fait que non seulement les Règles de
La Haye limitent le montant qui peut être réclamé
par colis, mais également qu'elles précisent les
obligations du transporteur. L'article II des Règles
déclare que le transporteur «sera ... soumis aux
responsabilités et obligations, comme il bénéficiera
des droits et exonérations ci-dessous énoncés». En
outre, l'article IV en plus d'indiquer les différentes
conditions dans lesquelles le transporteur ne sera
pas tenu responsable, précise à la Règle 5 (supra)
qu'il ne sera tenu en aucun cas des pertes ou
dommages dépassant la somme de £100 sterling
par colis ou unité. Un autre exemple de l'utilisa-
tion du mot «responsabilité» dans le droit maritime
peut être trouvé dans la Loi sur la marine mar-
chande du Canada, S.R.C. 1970, c. S-9, aux arti
cles 647 et suivants qui se trouvent sous la rubri-
que Limitation de responsabilité et concernent le
montant qui peut être réclamé dans certaines cir-
constances. En conséquence, je trouve peu de fon-
dement à l'argument suivant lequel le mot «respon-
sabilité» utilisé à l'article 13 exclut le quantum,
lequel est traité par l'article 12 seul.
Pour les motifs indiqués ci-dessus, je conclus
qu'il faut donner à l'article 13 du connaissement
plein effet parce qu'il l'emporte sur l'article 12 et
qu'il incorpore les Règles de La Haye, avec le
résultat qu'il ne peut être fait droit à la première
prétention de la demanderesse suivant laquelle les
défenderesses ont renoncé au bénéfice de la limita
tion de responsabilité par colis ou unité, et la
réclamation de $17,000 ne peut aboutir.
Comme déjà mentionné, je conclus également
que bien que les procédures soient intentées au
Canada, ce n'est pas la limitation de responsabilité
se trouvant dans les Règles de La Haye adoptées
au Canada par la Loi sur le transport des mar-
chandises par eau du Canada qui s'applique à ce
transport à destination du Canada, ce sont plutôt
les Règles de La Haye adoptées en Suède par la
Loi suédoise n° 277 du 5 juin 1936 qui sont
applicables en vertu de l'article 13(1)b) comme
«convention internationale ou loi nationale» de la
Suède. Les parties conviennent que la limitation
serait de 1,800 couronnes suédoises par colis ou
unité ce qui, en décembre 1972, était l'équivalent
de 377.82 $CAN. Puisque 16 colis ou unités ont
subi des dommages, le montant de la réclamation
est de $6,045.12 avec $1,084 d'intérêt au taux
légal calculé du 27 décembre 1972 au 27 juillet
1976, comme il est indiqué au paragraphe 18 de
l'exposé des faits. Les défenderesses ayant consi
gné ce montant auprès de la Cour le 27 juillet
1976, plus la somme de $100 des frais taxés, le
jugement est rendu en faveur de la demanderesse
pour ce montant et une ordonnance sera émise
pour que la Cour verse à la demanderesse le total
de $7,229.12 avec les intérêts accumulés. Les
défenderesses ont droit à leurs dépens postérieurs
au 27 juillet 1976 engagés pour contester ces
procédures.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.