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T-640-77
Hijos de Romulo Torrents Albert S.A. (Deman- deresse)
c.
Le navire Star Blackford et Blandford Shipping Co. Ltd. et Star Shipping A/S (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Mahoney— Vancouver, le 17 octobre; Ottawa, le 1" novembre 1977.
Pratique Requête visant à faire ajouter les trois deman-
deurs proposés La réclamation de la demanderesse met en cause les marchandises des demandeurs proposés, en partie, mais la demanderesse n'a aucun droit sur celles-ci Les réclamations des demandeurs proposés prescrites Les demandeurs proposés peuvent-ils être ajoutés à l'action?
Règles 424, 425, 427 et 1716 de la Cour fédérale Loi sur le transport des marchandises par eau, S.R.C. 1970, c. C-15, article III, règle 6.
La demanderesse, conformément à la Règle 1716, demande que soient ajoutés à la présente action ab initio et nunc pro tunc les trois demandeurs proposés. La requête introductive d'ins- tance de la demanderesse faisait valoir une réclamation concer- nant des marchandises couvertes non seulement par son propre connaissement mais également par ceux des demandeurs propo- sés. Les demandeurs proposés, dont l'omission dans la requête introductive d'instance provenait d'une erreur véritable, ne pouvaient faire valoir leurs réclamations pour cause de prescription.
Arrêt: la demande est rejetée. Il n'y a aucune preuve permet- tant de conclure que la demanderesse avait un droit, à titre d'agent ou autrement, sur les trois connaissements qui intéres- saient les demandeurs proposés ou, qu'au commencement de l'action, la demanderesse aurait agi pour leur compte. Les causes d'action des demandeurs proposés seraient exposées pour la première fois par suite de leur addition à l'action à titre de demandeurs. Leur permettre de procéder de cette façon serait nier aux défendeurs une défense à leur disposition si les causes d'action sont alléguées dans de nouvelles procédures. La modi fication proposée à la requête introductive d'instance n'entraîne pas l'addition d'une nouvelle cause d'action ou la substitution d'une nouvelle cause qui mettraient en cause les Règles 424 et 427 et elle ne peut être désignée comme »un amendement aux fins de corriger le nom d'une partie» au sens de la Règle 425.
Arrêt approuvé: Mabro c. Eagle, Star and British Domin ions Insurance Co., Ltd. [1932] I K.B. 485. Distinction faite avec l'arrêt: Canada Malting Co. Ltd. c. Burnett Steamship Co. Ltd. [1965] 2 R.C.É. 257.
DEMANDE. AVOCATS:
S. Lipetz pour la demanderesse. J. W. Perrett pour les défendeurs.
PROCUREURS:
Ray, Wolfe, Connell, Lightbody & Reynolds, Vancouver, pour la demanderesse.
Macrae, Montgomery, Spring & Cunning- ham, Vancouver, pour les défendeurs.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MAHONEY: Il s'agit d'une requête, introduite en vertu de la Règle 1716 pour le compte de la demanderesse, en vue de faire ajouter à la présente action ab initio et nunc pro tunc, les noms de J. Vilaseca S.A., Miquel y Costas et Miquel S.A. et S. Torras Domenech S.A. (ci-après appelés collectivement les «demandeurs proposés»). Les dispositions des paragraphes (1) et (2) de la Règle sont pertinentes dans l'espèce'. Dans ces circonstances, l'exposé des faits par l'avocat de la demanderesse traduit de façon convenable le con- sentement des demandeurs proposés requis au paragraphe (2).
Voici l'exposé conjoint des faits:
[TRADUCTION] 1. La défenderesse Star Shipping A/S était l'affréteur du navire STAR BLACKFORD, à toutes les époques considérées ici.
2. Les connaissements n°' GRB-7, GRB-8, GRB-9 et GRB-10, (annexes 1, 2, 3 et 4) ont été datés vers le 28 décembre 1975 à Vancouver (Colombie-Britannique).
3. Les marchandises décrites aux annexes 1, 2, 3 et 4 furent déchargées du navire STAR BLACKFORD le 20 février 1976 à Barcelone (Espagne).
' Règle 1716. (1) La validité d'une action n'est pas affectée à cause d'une fausse constitution de partie ou de l'omission de mettre une partie en cause, et la Cour peut dans toute action disposer des points ou des questions en litige dans la mesure ils touchent aux droits et intérêts des personnes qui sont parties à l'action.
(2) La Cour peut, à tout stade d'une action, aux condi tions qu'elle estime justes, et soit de sa propre initiative, soit sur demande,
a) ordonner qu'une personne constituée partie à tort ou sans nécessité ou qui, pour quelque raison, a cessé d'être une partie compétente ou nécessaire, soit mise hors de cause, ou
b) ordonner que soit constituée partie une personne qui aurait être constituée partie ou dont la présence devant la Cour est nécessaire pour assurer qu'on pourra valable- ment et complètement juger toutes les questions en litige dans l'action et statuer sur elles;
toutefois, nul ne doit être constitué codemandeur sans son consentement notifié par écrit ou de telle autre manière que la Cour peut juger adéquate dans les circonstances.
4. Les contrats de transport, dont partie est reproduite dans les connaissements ci-après annexés, ont été conclus sous l'empire de la Loi sur le transport des marchandises par eau (S.R., c. 291), article III, règle 6.
5. Star Shipping Canada Ltd., de Vancouver (Colombie-Bri- tannique), est une filiale possédée en propriété exclusive par la défenderesse Star Shipping A/S et, aux fins du paragraphe suivant, les deux forment une seule et même organisation.
6. Star Shipping (Canada) Ltd. a reçu les documents ci-après annexés comme pièces H, J et L à l'affidavit de Don Paul Baron en date du 21 juin 1977.
7. Il a été convenu entre la demanderesse et la défenderesse Star Shipping A/S qu'il n'y avait pas de prorogation des délais de procédure accordés par la défenderesse à la demanderesse ou aux compagnies désignées dans l'avis de requête et que la demanderesse cherche à ajouter, à titre de demanderesses, à la présente action ab initio et nunc pro tune.
8. La présente action a commencé le 15 février 1977, avec Hijos de Romulo Torrents Albert S.A. comme demanderesse, et le navire STAR BLACKFORD et Blandford Shipping Co. Ltd. et Star Shipping A/S comme défendeurs.
La consignataire désignée dans le connaissement GRB-7 est la demanderesse. Les demandeurs proposés sont, respectivement, les consignataires désignés dans les connaissements n°' GRB-8, 9 et 10.
Par lettre en date du 13 juillet 1976, Star Ship ping (Canada) Limited a reconnu avoir reçu noti fication de perte, par lettre du 31 mai, relative- ment aux marchandises couvertes par le connaissement GRB-8, lequel identifie la demanderesse proposée J. Vilaseca S.A. comme consignataire. Par lettre du 31 août, Star Shipping (Canada) Limited a reconnu avoir reçu notifica tion de perte, par lettre du 21 juillet, relativement aux marchandises couvertes par le connaissement GRB-9, lequel identifie comme consignataires les demandeurs proposés Miguel y Costas et Miguel S.A. Par lettre du 13 juillet, Star Shipping (Canada) Limited a reconnu avoir reçu notifica tion de perte, par lettre du 28 mai, relativement aux marchandises couvertes•par le connaissement GRB-10, lequel identifie comme consignataire la demanderesse proposée S. Torras Domenech S.A. Lesdites notifications de pertes forment, res- pectivement, les pièces H, J et L annexées à l'affidavit de Baron.
Par la requête introductive d'instance déposée, la demanderesse demande indemnisation des pertes subies relativement aux marchandises cou- vertes par les quatre connaissements. En fait, elle ne touche que les marchandises couvertes par le connaissement GRB-7.
Voici les dispositions pertinentes de l'article III, règle 6, de la Loi sur le transport des marchandi- ses par eau ':
En tout cas, le transporteur et le navire seront déchargés de toute responsabilité pour pertes ou dommages à moins qu'une action ne soit intentée dans l'année de la délivrance des mar- chandises ou de la date à laquelle elles eussent être délivrées.
L'ordonnance sollicitée aurait pour effet d'installer les demandeurs proposés dans une action relative à des réclamations qu'il leur est interdit de faire eux-mêmes en intentant des actions nouvelles.
La modification proposée à la requête introduc- tive d'instance n'entraîne certes pas l'addition d'une nouvelle cause d'action ou la substitution d'une nouvelle cause à la cause actuelle. Je n'ai donc pas à me soucier de l'effet des Règles 424 et 427 sur la validité actuelle de la déclaration de droit faite par le lord juge Scrutton dans Mabro c. Eagle, Star and British Dominions Insurance Company, Limited' portant sur l'addition d'une cause d'action.
[TRADUCTION] ... la Cour n'a jamais permis l'addition d'une partie ou d'une cause d'action lorsque cette permission ferait échouer la défense invoquant la Loi sur la prescription.
A mon avis, on ne pourrait pas non plus désigner comme «un amendement aux fins de corriger le nom d'une partie» la requête de la demanderesse, pour mettre celle-ci sous l'empire de la Règle 425 4 . Je suis tout à fait convaincu que l'omission, dans la requête introductive d'instance, des demandeurs proposés, provenait d'une erreur véritable et que, par suite des avis de pertes antérieurs, on n'a pas
2 S.R.C. 1970, c. C-15.
3 [1932] 1 K.B. 485, la p. 487.
° Règle 424. Lorsque permission de faire un amendement mentionné aux Règles 425, 426 ou 427 est demandée à la Cour après l'expiration de tout délai de prescription applica ble mais qui courait à la date du début de l'action, la Cour pourra néanmoins, accorder cette permission dans les cir- constances mentionnées dans la Règle applicable s'il semble juste de le faire.
Règle 425. Un amendement aux fins de corriger le nom d'une partie peut être permise en vertu de la Règle 424, même s'il est allégué que l'amendement aura pour effet de substituer une nouvelle partie à l'ancienne, pourvu que la Cour soit convaincue que l'erreur dont la correction est demandée était véritablement une erreur et n'était ni de nature à tromper ni susceptible d'engendrer un doute raison- nable sur l'identité de la partie qui avait l'intention de poursuivre, ou, selon le cas, qu'on avait l'intention de poursuivre.
cherché à tromper le défendeur et on n'a pas fait naître en lui un doute raisonnable sur l'identité des parties ayant l'intention d'ester en justice. Ceci dit, lorsque la Règle 1716 édicte des dispositions spéci- fiques pour le cas de fausse constitution de partie ou d'omission de mettre une partie en cause, ce serait étendre l'application de la Règle 425 au-delà de toute limite raisonnable que considérer un cas évident d'omission de mettre une partie en cause comme une erreur susceptible d'être redressée par correction du nom de la partie.
La demanderesse se fonde sur la décision rendue par le juge de district en Amirauté Wells dans Canada Malting Co. Limited c. Burnett Steam ship Co. Limited' pour faire une distinction entre la loi applicable devant cette cour dans des actions concernant les connaissements et la règle énoncée dans Mabro. Dans ce dernier cas, l'expéditeur de la cargaison a commencé l'action, et il a ajouté plus tard le consignataire comme demandeur après extinction du délai de prescription. Sur le fonde- ment des documents produits devant la Cour, il a été constaté que l'expéditeur a pris le connaisse- ment, à titre d'agent et d'envoyeur, pour le compte et le risque du consignataire, et qu'en conséquence, l'addition du principal comme demandeur ne don- nait pas naissance à une nouvelle cause d'action ni ne privait le défendeur d'aucun moyen de défense qui ne fût déjà englobé dans l'action commencée par l'agent.
Dans l'espèce, il n'y a aucune preuve permettant de conclure que la demanderesse avait un droit, à titre d'agent ou autrement, sur les trois connaisse- ments qui intéressaient respectivement les deman- deurs proposés, ou qu'au commencement de l'ac- tion, la demanderesse aurait agi pour leur compte et qu'en conséquence, les demandeurs proposés, s'ils sont ajoutés à l'action, revendiqueraient sim- plement des causes d'action que la demanderesse a déjà revendiquées à leur place. Au contraire, la demanderesse n'a manifestement aucune cause d'action relative aux connaissements GRB-8, 9 et 10. Les causes d'action des demandeurs propo- sés seraient exposées pour la première fois par suite de leur addition à l'action à titre de deman- deurs. Leur permettre de procéder de cette façon serait nier aux défendeurs une défense à leur dis
5 [1965] 2 R.C.É. 257.
position si les causes d'action sont alléguées dans de nouvelles procédures. Avec beaucoup d'hésita- tion en l'espèce, je suis arrivé à la conclusion qu'il ne faut pas le permettre.
ORDONNANCE La requête est rejetée avec dépens.
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