T-1844-77
La Reine (Demanderesse)
c.
Star Treck Holdings Ltd., Star Treck Holdings
Ltd. faisant affaires sous le nom de The Sultan's
Palace, et ledit The Sultan's Palace, Star Treck
Holdings Ltd. faisant affaires sous le nom de
Tahiti Retreat, et ledit Tahiti Retreat, Star Treck
Holdings Ltd. faisant affaires sous le nom de
Neptune's Hideaway et ledit Neptune's Hideaway,
Star Treck Holdings Ltd. faisant affaires sous le
nom de The Golden Girls et ledit The Golden
Girls (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Cattanach—
Ottawa, le 24 août 1977.
Pratique — Règle 337(6) — Rectification d'une erreur de
rédaction — Certificat enregistré à la Cour fédérale par le
ministre du Revenu national — La Cour est-elle compétente
pour rectifier cette erreur? — Règle 337(6) de la Cour fédérale
— Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-71-72, c. 63, art.
223.
S'appuyant sur la Règle 337(6) la requérante sollicite la
rectification d'une erreur de rédaction que comporte un certifi-
cat émis par le ministre du Revenu national et qui est enregistré
à la Cour en vertu de l'article 223 de la Loi de l'impôt sur le
revenu.
Arrêt: la demande est rejetée. Un certificat n'est pas un
jugement et ne devient pas un jugement de la Cour à la suite de
son enregistrement, mais il demeure simplement un certificat
du Ministre, même si un tel certificat, une fois enregistré, a la
même force et le même effet, et que toutes les procédures
peuvent être engagées à la faveur de ce certificat comme s'il
était un jugement obtenu de la Cour. La Règle 337(6) en vertu
de laquelle la présente demande est formulée ne s'applique pas.
La Règle 337 s'applique aux jugements rendus par la Cour et
puisqu'un certificat ne constitue pas un jugement prononcé par
la Cour, il s'ensuit qu'une erreur de rédaction sur un certificat
ne peut être corrigée en ayant recours à la Règle 337(6).
Arrêts appliqués: M.R.N. c. Bolduc [1961] R.C.É. 115;
Fraternité Internationale des ouvriers en électricité, sec
tion locale 529 c. Central Broadcasting Company Ltd.
[1977] 2 C.F. 78 et Le Syndicat canadien de la Fonction
publique, Local 660 c. La Société Radio-Canada [1976] 2
C.F 151.
DEMANDE par écrit en vertu de la Règle 324.
AVOCATS:
Beverly J. T. Delong pour la demanderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la
demanderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE CATTANACH: Il s'agit d'une demande
sollicitant de la Cour qu'elle rectifie une erreur de
rédaction que comporte un certificat émis par le
directeur de la Division des recouvrements du
ministère du Revenu national, Impôt, daté du 9
mai 1977 et enregistré le même jour à la Cour
fédérale en vertu de l'article 223 de la Loi de
l'impôt sur le revenu et portant que les défendeurs
désignés précédemment devaient payer en vertu de
la Loi de l'impôt sur le revenu une somme de
$15,000 et un intérêt de $225 sur cette somme, le
tout totalisant $15,225, plus un intérêt additionnel
de 6% par année calculé sur la somme de $15,000,
de la date du dépôt du certificat à la date du
paiement. L'obligation de payer un intérêt addi-
tionnel au taux mentionné de la date du certificat
à la date du paiement est prévue à la Loi de
l'impôt sur le revenu.
La demande, présentée conformément à la
Règle 337(6) au moyen d'un avis de requête ex
parte, sollicite la rectification de l'erreur de rédac-
tion contenue au certificat et un changement cor-
rélatif au bref de fieri facias émis sur requête de la
requérante. L'en-tête du bref de fieri facias est
identique à celui du certificat et aucune erreur n'a
été commise à cet égard par les fonctionnaires du
greffe de la Cour. L'erreur se trouve sur le certifi-
cat; le bref de fieri facias a simplement reproduit
l'erreur contenue au certificat.
Voici le libellé de l'article 223 de la Loi de
l'impôt sur le revenu (S.C. 1970-71-72, c. 63):
223. (1) Un montant payable en vertu de la présente loi qui
est impayé ou le solde d'un montant payable en vertu de la
présente loi, peut être certifié par le Ministre,
a) lorsqu'un ordre a été donné par le Ministre en vertu du
paragraphe 158(2) immédiatement après cet ordre, et
b) dans les autres cas, à l'expiration d'une période de 30
jours après le manquement.
(2) Sur production à la Cour fédérale du Canada, un certifi-
cat fait sous le régime du présent article doit être enregistré à
cette cour et, lorsqu'il est enregistré, il a la même force et le
même effet, et toutes les procédures peuvent être engagées à la
faveur de ce certificat comme s'il était un jugement obtenu de
cette cour pour une dette du montant spécifié dans le certificat,
plus l'intérêt couru jusqu'à la date du paiement ainsi qu'il est
prescrit dans la présente loi.
(3) Tous les frais et dépens raisonnables se rattachant à
l'enregistrement du certificat sont recouvrables de la même
manière que s'ils avaient été certifiés et que le certificat eût été
enregistré sous le régime du présent article.
On a demandé que la demande de rectification
de l'erreur de rédaction contenue au certificat soit
jugée sans la comparution personnelle du procu-
reur de la requérante conformément à la Règle
324.
Lorsque la demande m'a été soumise de cette
façon la première fois, j'ai ordonné au registraire
d'inviter le procureur de la requérante à présenter
ses observations sur la compétence de la Cour à
rectifier le certificat enregistré en vertu de l'article
223 de la Loi de l'impôt sur le revenu (cité
précédemment) tel que la requête à cet effet le
demande, ainsi que sur l'à-propos de la demande
aux fins de rectifier un bref émis à la suite de
l'enregistrement du certificat en cause.
Ces observations ont maintenant été reçues.
Incidemment, l'erreur de rédaction est peu
importante. Où apparaît le mot «Treck» dans les
noms des défendeurs contenus à l'intitulé, on
devrait lire «Trek». L'insignifiance de l'erreur ne
diminue pas l'importance du point litigieux sur
lequel j'ai demandé des observations écrites et
qu'on peut présenter simplement ainsi: la Cour
est-elle compétente à rectifier l'erreur de rédaction
contenue dans un certificat émis par le Ministre et
enregistré en vertu de l'article 223 de la Loi de
l'impôt sur le revenu et, dans le même ordre
d'idée, un bref émis à la suite de l'enregistrement
d'un certificat et qui reproduit précisément le lan-
gage du certificat peut-il être rectifié, ce qui
dépend en retour de la question de savoir si le
certificat lui-même peut être rectifié par la Cour.
En conséquence, la question fondamentale est celle
de savoir si la Cour peut amender le certificat.
Dans M.R.N. c. Bolduc [1961] R.C.É. 115, le
juge Thurlow (alors juge puîné) a eu l'occasion
d'étudier l'article 119(2) de la Loi de l'impôt sur
le revenu, S.R.C. 1952, chapitre 148, dont le texte
est identique à celui de l'article 223(2).
Il dit, à la page 118:
[TRADUCTION] Car, bien que l'art. 119(2) prévoie que le
certificat, une fois enregistré, a la même force et le même effet
et que toutes les procédures peuvent être engagées à la faveur
de ce certificat comme s'il était un jugement obtenu de la
présente cour, ce certificat ne constitue pas en fait un jugement
et l'art. 119(2) ne dit pas que, une fois enregistré, il va devenir
ou devient un jugement de cette cour. L'émission et l'enregis-
trement du certificat n'ont pour seul effet que ce que prévoit la
Loi de l'impôt sur le revenu, ni plus ni moins, et d'après moi, la
loi ne prévoit pas que le certificat est ou doit être considéré
comme un jugement, mais dispose simplement qu'un tel certifi-
cat peut être émis et enregistré à la présente cour et que, une
fois que cela est fait, il a la même force et le même effet, et que
toutes les procédures peuvent être engagées à la faveur de ce
certificat comme s'il était un jugement. A mon avis, cependant,
le certificat demeure purement et simplement un certificat, bien
que d'une nature unique, en vertu duquel les procédures autori-
sées par la loi peuvent être intentées.
On peut résumer succinctement sa pensée ainsi:
un certificat n'est pas un jugement et ne devient
pas un jugement de la Cour à la suite de son
enregistrement, mais il demeure simplement un
certificat du Ministre, même si un tel certificat,
une fois enregistré, a la même force et le même
effet, et que toutes les procédures peuvent être
engagées à la faveur de ce certificat comme s'il
était un jugement obtenu de la Cour.
Par conséquent, la Règle 337(6), en vertu de
laquelle la présente demande est formulée, ne s'ap-
plique pas. La Règle 337 s'applique aux jugements
rendus par la Cour et puisqu'un certificat ne cons-
titue pas un jugement prononcé par la Cour, il
s'ensuit qu'une erreur de rédaction sur un certifi-
cat ne peut être corrigée en ayant recours à la
Règle 337(6).
Il me semble donc que la personne désignée pour
corriger un certificat doit être le Ministre ou la
personne à qui les fonctions et les pouvoirs perti-
nents du Ministre ont été délégués en vertu de la
Partie IX des Règlements de l'impôt sur le revenu.
Le procureur de la requérante, pour appuyer
l'hypothèse que la présente cour est compétente à
rectifier des erreurs contenues sur des certificats
de ce genre qui ont été enregistrés conformément à
une disposition de la loi, cite comme jurisprudence
un extrait de l'arrêt Bolduc (précité) rendu par
mon collègue le juge Thurlow; il s'agit du paragra-
phe qui suit le passage que j'ai déjà cité aux pages
118-119:
[TRADUCTION] Ce qui ne veut pas dire, cependant, que
l'émission et l'enregistrement d'un tel certificat ne sont aucune-
ment exposés aux attaques. Le certificat a été créé par l'art.
119 de la Loi de l'impôt sur le revenu et seule cette loi autorise
son enregistrement dans les dossiers de la présente cour. L'in-
terprétation et l'application de l'art. 119 relèvent de la compé-
tence de la Cour en vertu de l'art. 29 de la Loi sur la Cour de
l'Échiquier, si ce n'est en vertu d'une autre disposition et une
personne touchée par l'enregistrement d'un tel certificat peut
demander que la Cour exerce sa compétence en jugeant, par
exemple, de la régularité de son émission et de son enregistre-
ment. En outre, comme l'enregistrement du certificat s'est fait
à la Cour, je crois que la Cour est compétente pour examiner à
la fois la validité, en droit constitutionnel, de la loi permettant
une telle procédure et les faits sur lesquels repose le droit du
Ministre d'émettre un tel certificat et de le faire enregistrer, le
tout étant incident à son pouvoir inhérent de préserver et de
maintenir la légalité de ses dossiers et de rectifier ou éviter
l'abus de ses procédures.
Selon moi, cet extrait n'étaye pas l'hypothèse
qui est mise de l'avant, à savoir, que la présente
cour peut corriger un certificat enregistré.
Au contraire, il étaye l'hypothèse qu'une per-
sonne touchée par l'enregistrement d'un tel certifi-
cat peut demander que la Cour exerce sa compé-
tence en jugeant, par exemple, de l'opportunité de
l'enregistrement et que la personne contre qui le
certificat a été enregistré peut l'attaquer au moyen
d'une procédure indépendante requérant que le
certificat ou l'enregistrement soit déclaré invalide.
Il ajoute que la Cour est compétente pour exami
ner la validité, en droit constitutionnel, de la loi
permettant l'enregistrement d'un certificat et les
faits sur lesquels repose le droit du Ministre
d'émettre un tel certificat et de le faire enregistrer.
Dire qu'une personne touchée par un certificat
peut l'attaquer en contestant la validité, en droit
constitutionnel, de la loi qui permet cette procé-
dure, l'émission du certificat par le Ministre et son
enregistrement en violation des conditions préala-
bles à l'enregistrement est tout à fait différent que
de dire que la Cour est compétente à corriger un
certificat qui a été enregistré. Corriger un certifi-
cat enregistré équivaut à l'amender ou à le modi
fier et cela, je pense, outrepasse la compétence de
la Cour.
Lorsque le juge Thurlow utilise le mot «rectifier»
dans l'extrait cité de l'arrêt Bolduc, il l'utilise en
faisant allusion à la compétence inhérente de la
Cour à maintenir la «légalité de ses dossiers» et à
«rectifier ou éviter» l'abus de ses procédures. Il n'y
a aucun doute que la règle noscitur a sociis s'ap-
plique et que le mot «rectifier» ainsi utilisé est
limité par le contexte et, dans ce contexte, il prend
la couleur du mot «éviter» qui lui est accolé et les
mots «rectifier ou éviter» ont tous deux pour objet
grammatical «abus de ses procédures».
Une situation à peu près analogue est survenue
relativement à l'enregistrement d'ordonnances
d'exécution prévu aux Lois sur l'exécution réci-
proque des jugements qui sont des lois uniformes
promulguées par la plupart des provinces du
Canada, sinon toutes.
Ces lois, en fait quelque peu semblables à l'arti-
cle 223(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu,
prévoient qu'à la suite de l'enregistrement d'une
ordonnance délivrée par une cour d'une province
accordant la réciprocité, toutes les procédures peu-
vent être intentées à la faveur de cette ordonnance
comme s'il s'agissait d'une ordonnance du tribunal
auprès duquel elle est enregistrée. On a jugé que le
tribunal auprès duquel l'ordonnance est enregistrée
ne peut modifier l'ordonnance délivrée par un tri
bunal d'une autre province pour la raison évidente
que l'ordonnance n'est pas celle du tribunal auprès
duquel elle est enregistrée, mais demeure l'ordon-
nance du tribunal qui l'a délivrée et que le rôle du
tribunal auprès duquel elle est enregistrée se réduit
à la faire exécuter au moyen de ses propres procé-
dures (voir Re Pasowysty et Foreman (1969) 5
D.L.R. (3e) 427 (C.S.C.-B.) arrêt suivi par Re
Rhinhart c. Rhinhart (1973) 35 D.L.R. (3e) 555
(C.T.T.N.-O.) et Falkner c. Falkner [1974] 3
W.W.R. 446 (C.S.C.-B.); mais voir Re Short c.
Short (1962) 40 W.W.R. 592 (C.S.Alb.) où on a
jugé différemment et qui a été critiqué et mis de
côté par Re Pasowysty et Foreman (précité)).
Récemment, dans Fraternité internationale des
ouvriers en électricité, section locale 529 c. Cen
tral Broadcasting Company Ltd. [1977] 2 C.F. 78,
j'ai eu l'occasion d'étudier, entre autres choses, la
compétence de la présente cour à décider que
l'ordonnance du Conseil canadien des relations du
travail du 19 février 1975, déposée et enregistrée
auprès de cette cour en vertu de l'article 123 du
Code canadien du travail (S.R.C. 1970, c. L-1,
dans sa forme modifiée par S.C. 1972, c. 18) le 12
mars 1975, devait être déposée et enregistrée avec
effet rétroactif au 12 mars 1975.
Cette demande s'inspirait de la décision rendue
par mon collègue le juge Walsh dans Le Syndicat
canadien de la Fonction publique, Local 660 c. La
Société Radio-Canada [1976] 2 C.F. 151 qui a
accueilli une requête visant à radier l'enregistre-
ment d'une décision arbitrale du Conseil des rela
tions du travail censé avoir été effectué auprès de
cette cour en vertu de l'article 159 du Code cana-
dien du travail.
A l'exception de différences mineures dictées
par les nécessités du sujet, le libellé de l'article 159
soumis au juge Walsh et celui de l'article 123 dont
j'ai été saisi sont identiques.
Suivant la conclusion du juge Walsh, pour que
l'enregistrement de l'ordonnance du Conseil soit
valable, il faut qu'il ait lieu par suite d'un avis de
requête signifié à la partie adverse et étayé par des
affidavits qui établissent l'existence de la condition
préalable à l'enregistrement prévue à l'article
159(1), savoir qu'on ne s'est pas conformé à la
décision ou à l'ordonnance du Conseil. Cela
n'ayant pas été fait, il a par conséquent conclu à la
nullité de l'enregistrement et en a ordonné la
radiation.
Dans la cause dont je fus saisi, j'ai suivi et
appliqué la décision de mon collègue le juge
Walsh. En fait, je suis allé plus loin que lui et j'ai
jugé que l'enregistrement de l'ordonnance du Con-
seil était invalide.
L'avocat de la requérante dans cette affaire a
reconnu que, pour qu'elle soit susceptible d'être
exécutée à l'aide des procédures de la présente
cour, l'ordonnance du Conseil aurait dû énoncer
avec précision le délai à l'intérieur duquel il fallait
accomplir ce qu'elle ordonnait. En conséquence, il
m'a invité, dans l'avis de requête, à fixer un délai
pour l'exécution de l'ordonnance du Conseil.
J'ai refusé au motif qu'il me demandait de
modifier l'ordonnance du Conseil, ce que je ne puis
faire pour la simple raison qu'elle demeure une
ordonnance du Conseil et ne devient pas une
ordonnance de la Cour à la suite de son dépôt et de
son enregistrement, même si l'article 123(2) pré-
voit que l'enregistrement de l'ordonnance lui con-
fère la même force et le même effet que s'il
s'agissait d'un jugement émanant de cette cour et
que toutes les procédures lui faisant suite peuvent
dès lors être engagées en conséquence.
La similitude du libellé des articles 123 et 159
du Code canadien du travail et de l'article 223 de
la Loi de l'impôt sur le revenu est frappante. Dans
chaque cas, les conditions préalables à l'enregistre-
ment de l'ordonnance sont d'abord prévues, suivies
des conséquences qui découlent de cet enregistre-
ment. Cependant, si l'enregistrement est déclaré
nul, il n'entraîne aucune conséquence. Mon collè-
gue le juge Thurlow a clairement établi dans l'ar-
rêt Bolduc (précité) qu'une personne touchée par
un certificat et son enregistrement pouvait atta-
quer à bon droit la validité de l'émission du certifi-
cat et de l'enregistrement.
Comme dans Fraternité internationale des
ouvriers en électricité, section locale 529 c. Cen
tral Broadcasting Company Ltd., je ne puis m'em-
pêcher de souligner que le Ministre (et je ne
voudrais pas qu'on interprète cette mention comme
visant le Ministre personnellement mais seulement
à titre représentatif, sachant, comme moi, que- les
pouvoirs et fonctions du Ministre à cet égard sont
délégués à des fonctionnaires responsables du
ministère du Revenu national) devrait connaître et
comprendre la nature unique de ces certificats
autorisés par l'article 223 de la Loi de l'impôt sur
le revenu et que l'émission et l'enregistrement de
ces certificats, qui sont innombrables, devraient
être faits avec beaucoup d'attention afin que ces
fonctionnaires responsables s'assurent de l'exacti-
tude complète de ce qu'ils sont requis de certifier
et du respect de toutes les conditions préalables à
l'enregistrement d'un certificat. Il ne fait aucun
doute qu'une personne touchée par le certificat
peut contester son émission et la validité de son
enregistrement et que si on n'établit pas les condi
tions préalables à l'enregistrement cela ouvre la
porte à une déclaration de nullité dans une procé-
dure appropriée. En l'espèce, il ne m'appartient
pas de tirer des conclusions au sujet de la validité
de l'enregistrement et je ne le ferai pas, mais si
l'une ou l'autre des deux conditions préalables
imposées par l'article 223(1) cité précédemment
n'a pas été établie avant l'enregistrement prévu au
paragraphe (2), il s'ensuit qu'une contestation de
la validité de l'enregistrement serait bien fondée et
que l'établissement subséquent que l'une ou l'autre
de ces conditions existe en fait ne peut valider
rétroactivement l'enregistrement.
Les paragraphes 2 et 4 de l'affidavit montrent
clairement que l'auteur de l'affidavit soumis à
l'appui de la présente requête ou son rédacteur n'a
pas compris la véritable nature du certificat.
Aux paragraphes 2 et 4, l'auteur de l'affidavit
affirme sous serment qu'il a [TRADUCTION] «exa-
miné le(s) certificat(s) émis par cette honorable
cour le 9 mai 1977 sous le numéro T-1844-77»,
joints comme pièces 1 et 2 respectivement.
La Cour n'a pas fait une telle chose: elle n'a pas
émis de certificat. Ce qui a été émis, fait ou créé,
ou quelque mot descriptif qu'on puisse utiliser,
émanait de l'auteur du certificat, qui est en l'es-
pèce un fonctionnaire portant le titre de directeur
de la Division des recouvrements du ministère du
Revenu national, Impôt.
Seuls les certificats désignés comme pièces 1 et
2 dans l'affidavit soumis à l'appui de la présente
requête ont été présentés pour enregistrement le 9
mai 1977 et ont été simplement enregistrés ce
jour-là par les fonctionnaires du greffe de la Cour.
Il n'a pas été établi, par affidavit ou autrement,
qu'il y a eu ordre du Ministre aux termes de
l'article 158(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu
ou expiration d'une période de 30 jours après le
défaut de payer, l'une de . ces circonstances devant
d'abord survenir avant que le Ministre puisse certi-
fier, conformément à l'article 223(1), qu'un mon-
tant payable en vertu de la présente loi est impayé,
en tout ou en partie.
A un certain moment, le formulaire du certificat
énonçait qu'une période de 30 jours s'était écoulée
depuis la date de la cotisation et que le fonction-
naire qui le signait devait être considéré comme
celui qui certifiait. Cette énonciation n'a pas été
reproduite sur les formulaires imprimés mainte-
nant en usage, ce qui constitue en soi un pas en
arrière, et je doute que l'inclusion de la déclaration
utilisée précédemment suffise à établir que les
exigences de l'article 223(1) ou des articles qui
l'ont précédé ont été respectées et que l'enregistre-
ment est valide, dans l'éventualité où la validité de
l'enregistrement serait attaquée; je ne suis pas
obligé de trancher ce point, et je ne le ferai pas.
Le formulaire du certificat présentement en
usage est cousu d'inexactitudes qui proviennent du
fait qu'on ne comprend pas la portée des propos du
juge Thurlow dans l'arrêt Bolduc (précité). Il a
clairement affirmé que le certificat ne constituait
pas un jugement de la Cour et qu'il ne devenait
pas non plus un jugement après son enregistre-
ment. Il demeure ce qu'il était au début, soit
simplement un certificat fait par l'auteur du docu
ment qui, en vertu de l'article 223(2) de la Loi de
l'impôt sur le revenu, peut être exécuté comme s'il
était un jugement de la présente cour, ce qu'il n'est
pas.
En conséquence, le formulaire du certificat uti-
lisé par le Ministre ne devrait pas porter la men
tion «En la Cour fédérale du Canada, Division de
première instance». Le formulaire devrait plutôt
être adressé «A la Cour fédérale du Canada, Divi
sion de première instance».
En outre, il est également inexact de citer la
cause comme étant entre Sa Majesté la Reine, la
demanderesse, et les personnes désignées comme
parties défenderesses. Aucune disposition de la Loi
de l'impôt sur le revenu, de la Loi sur la Cour
fédérale, des Règles de la Cour fédérale ou autre,
que je connais ou que je peux trouver, ne prévoit
qu'il est censé y avoir une action entre les parties
ainsi désignées. Il n'y a en fait aucune action et il
ne peut en avoir tant qu'une déclaration portant un
intitulé approprié n'est pas déposée et l'article 223
de la Loi de l'impôt sur le revenu ne prévoit pas
qu'une action doit être instituée mais fait en sorte,
au contraire, que cela ne soit pas nécessaire. L'ar-
ticle coupe au plus court, sans prévoir de poursui-
tes réelles. Puisqu'il en est ainsi, il incombe à ceux
qui détiennent cette arme d'en comprendre parfai-
tement l'utilisation et d'être méticuleux et attentifs
lorsqu'ils s'en servent.
L'intitulé du certificat utilisé devrait ressembler
à ce qui suit:
A la Cour fédérale du Canada, Division de première instance
In re la Loi de l'impôt sur le revenu
(et il pourrait être utile d'insérer une citation
appropriée et un renvoi à l'article de cette loi),
et
In re une cotisation établie par le Ministre en vertu de la Loi de
l'impôt sur le revenu (pour l'année d'imposition pertinente)
contre (le contribuable désigné par son nom suivi de son
adresse) suivi ensuite du mot «Certificat» et du corps qui
certifiera le montant payable par le contribuable en vertu de la
Loi de l'impôt sur le revenu qui est impayé.
J'ai repris dans les présents motifs l'inexactitude
contenue dans le formulaire en utilisant l'intitulé
de la cause employé sur la requête, mais je l'ai fait
simplement pour des raisons de commodité parce
qu'au greffe les documents sont placés dans le
dossier approprié qui est désigné par un intitulé de
cause et un numéro qui lui est attaché et je ne
voudrais pas qu'on interprète mon geste comme un
acquiescement à la pratique inexacte des auteurs
de ces certificats.
Comme je l'ai indiqué précédemment et pour les
motifs formulés à cet effet, la requérante ne peut
se prévaloir de la Règle 337(6) pour rectifier les
erreurs contenues au certificat présenté par elle
pour enregistrement et je n'ai pu trouver dans la
Loi de l'impôt sur le revenu aucune disposition qui
permet au Ministre de présenter une requête au
tribunal pour que soient rectifiées les erreurs con-
tenues au certificat, établi par lui, dont on a
découvert l'existence après l'enregistrement, et
aucune disposition de cet ordre ne m'a été citée.
En conséquence, pour ces raisons, la demande en
vue de rectifier le certificat est rejetée et il s'ensuit
que la demande corrélative de rectifier le bref de
fieri fadas est également rejetée pour le motif
supplémentaire que les fonctionnaires du greffe
n'ont commis aucune erreur dans l'émission de ce
bref.
L'erreur contenue au certificat est insignifiante
niais le principe soulevé par cette requête ne l'est
pas. Bien qu'il ne relève pas de mes fonctions, à ce
moment-ci, de me prononcer là-dessus, je dirais
que les contribuables contre qui on cherche à
exécuter le certificat sont suffisamment identifiés
pour permettre au shérif d'exécuter le bref contre
ceux qui sont correctement identifiés aussi bien
que contre le contribuable dont le nom comporte
une légère erreur qui n'est pas suffisante pour que
le contribuable ne puisse plus être identifié, erreur
qui prend la forme de l'adjonction d'une simple
lettre de l'alphabet dans un des mots du nom
corporatif du contribuable qui en compte quatre et
plusieurs lettres: ce contribuable exploite une
entreprise en qualité de simple particulier sous
d'autres noms qui ne comptent aucune erreur.
Ce commentaire est gratuit et ne doit en aucune
façon être interprété comme définitif ou péremp-
toire. La requête étant rejetée, il appartient à la
requérante de décider de la marche ultérieure des
procédures.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.