T-1667-76
William A. Gibbon (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Walsh
Toronto, le 13 mai; Ottawa, le 3 juin 1977.
Impôt sur le revenu — Calcul du revenu — Déductions —
»Pension alimentaire» volontaire — Paiements non versés en
vertu d'un accord ou d'une ordonnance d'un tribunal compé-
tent — Déduction autorisée — Nouvelle cotisation — Le
demandeur incité à continuer ses paiements volontaires plutôt
que de bénéficier d'une réduction d'impôt en constituant un
fonds d'épargne-retraite enregistré à son profit — Les cotisa-
tions inexactes portent-elles atteinte à la responsabilité fiscale
du demandeur? — Loi de l'impôt sur le revenu, S.C. 1970-
71-72, c. 63, art. 606), c), 152(3), (8).
Le demandeur, séparé de son épouse, a versé une pension
alimentaire pour ses fils à charge et ce, volontairement et non
pas en vertu d'une ordonnance de la cour ou d'un accord de
séparation. Le ministère lui a remboursé le trop-payé d'impôt
parce qu'il n'avait pas revendiqué la déduction de ces paie-
ments. Quelque temps après, le ministère a fixé de nouveau la
contribution fiscale du demandeur lorsqu'il est devenu évident
que ces paiements n'étaient pas déductibles. Le demandeur
allègue qu'il aurait pu bénéficier d'une réduction d'impôt pres-
que identique en constituant un fonds d'épargne-retraite enre-
gistré à son profit et que l'erreur du ministère l'a incité à
continuer à verser une pension alimentaire volontaire. Parce
que l'erreur du ministère l'a incité à renoncer à une mesure
acceptable visant à lui épargner de l'impôt, le demandeur
allègue qu'il ne doit pas être tenu responsable de la nouvelle
cotisation d'impôt.
Arrêt: l'appel est rejeté. Le seul point litigieux porté devant
la Cour est le suivant: les nouvelles cotisations pour les années
d'imposition 1972 et 1973 sont-elles correctes? Or, il est incon
testable qu'elles sont conformes à la loi. Le fait que le deman-
deur aurait pu agir autrement et réclamer certaines autres
déductions (ce qu'il ne peut plus faire maintenant) qui auraient
réduit ses obligations fiscales pour les années en cause est
regrettable en soi, mais ne saurait avoir d'effet sur la validité
des nouvelles cotisations devant la Cour pour le seul motif qu'il
aurait été incité par les premières cotisations à adopter une
ligne de conduite qui lui a causé des pertes financières.
Distinction faite avec les arrêts: Howell c. Falmouth Boat
Construction Co. Ltd. [1951] A.C. 837 et Robertson c.
Minister of Pensions [1948] 2 All E.R. 767. Arrêts suivis:
M.R.N. c. Inland Industries Ltd. [1974] R.C.S. 514;
Woon c. M.R.N. [1950] R.C.É. 327; Stickel c. M.R.N.
[1972] C.F. 672 et Cam Gard Supply Ltd. c. M.R.N.
[1974] 2 C.F. 236.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
William A. Gibbon pour le demandeur.
Ian S. MacGregor pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE WALsx: Le présent appel en matière
d'impôt sur le revenu a été entendu sur la base
d'un exposé conjoint des faits, le seul témoin étant
le demandeur, qui exerçait le droit à Winnipeg
avant 1965. Depuis 1967, il enseigne à Toronto
dans une école. Il a assuré sa propre défense. Il
s'est séparé de sa femme en 1963. Le couple avait
trois enfants, dont deux garçons, qui en 1972
avaient respectivement 19 et 15 ans et étaient
complètement à charge pendant les années d'impo-
sition 1972 et 1973. Au cours de ces deux années,
le demandeur a versé à sa femme une pension
alimentaire volontaire, comme il le faisait depuis
leur séparation en 1963, mais non pas en vertu
d'un arrêt, d'une ordonnance ou d'un jugement
rendu par un tribunal compétent ni d'un accord
écrit de séparation. Dans ses déclarations de
revenu afférentes auxdites années d'imposition, le
demandeur n'a pas revendiqué la déduction de ces
paiements et il admet qu'il n'avait pas le droit de le
faire en vertu des articles 60b) et c) de la Loi de
l'impôt sur le revenu, dont voici le libellé:
60. Peuvent être déduites lors du calcul du revenu d'un
contribuable pour une année d'imposition les sommes suivantes
qui sont appropriées:
b) toute somme payée dans l'année par le contribuable, en
vertu d'un arrêt, d'une ordonnance ou d'un jugement rendus
par un tribunal compétent ou en vertu d'un accord écrit, à
titre de pension alimentaire ou autre allocation payable
périodiquement pour subvenir aux besoins du bénéficiaire,
des enfants issus du mariage ou à la fois du bénéficiaire et
des enfants issus du mariage, si le contribuable vivait séparé,
en vertu d'un divorce, d'une séparation judiciaire ou d'un
accord écrit de séparation, du conjoint ou de l'ex-conjoint à
qui il était tenu de faire le paiement, le jour où le paiement a
été effectué et durant le reste de l'année;
c) toute somme payée au cours de l'année par le contribua-
ble, en vertu d'une ordonnance rendue par un tribunal com-
pétent, à titre d'allocation payable périodiquement pour sub-
venir aux besoins du bénéficiaire, des enfants issus du
mariage ou à la fois du bénéficiaire et des enfants issus du
mariage, si le contribuable vivait séparé du conjoint à qui il
était tenu de faire le paiement, le jour où le paiement a été
effectué et durant le reste de l'année;
Par lettre du 18 mai 1973, le Ministre a réclamé
au demandeur des renseignements complémentai-
res sur la garde et le contrôle des enfants à charge,
leur revenu pour 1972, leur adresse et des détails
complets sur tous les versements effectués au cours
de l'année à titre de pension alimentaire ou d'in-
demnité de séparation, ainsi que le nom et
l'adresse de l'épouse bénéficiaire; ce qui a été fait.
En réalité, le demandeur a effectué des paiements
hebdomadaires volontaires de $40 pendant l'année
d'imposition 1972 pour un total de $2,080, et dans
un avis de cotisation du 31 août 1973 le Ministère
a déduit pour cette année-là ces paiements du
revenu imposable dudit demandeur, lequel avait
versé en excédent $450.10, qui lui ont été rembour-
sés par chèque en temps opportun. En consé-
quence, dans sa déclaration de revenu pour 1973, il
a déduit la somme de $2,340, qu'il a payée cette
année-là à sa femme à titre de pension alimentaire,
ayant volontairement augmenté ses paiements heb-
domadaires à $45. Par avis de cotisation du 22 mai
1974, sa déclaration de revenu a été cotisée telle
quelle et le Ministère lui a reconnu un paiement
excédentaire de $561.80.
Ce n'est que le 19 juin 1975 que le Ministère a
écrit au demandeur que ses déclarations de revenu
pour 1972 et 1973 faisaient l'objet d'une révision,
et lui a demandé d'envoyer copie de l'accord de
séparation et des chèques encaissés afférents aux
paiements effectués au cours des deux années. Or,
il n'y avait pas d'accord de séparation et les verse-
ments avaient tous été faits en espèces. A la récep-
tion de la lettre, le demandeur s'est rendu au
ministère du Revenu national à Toronto, et a
déclaré qu'il n'y avait jamais eu accord écrit de
séparation, ni arrêt, ordonnance ou jugement
rendu par un tribunal compétent. Après quoi, le 8
août 1975, le Ministère a établi les nouvelles coti-
sations, qui rejettent la déduction des sommes de
$2,080 et de 2,340, déduction précédemment
accordée pour les années d'imposition 1972 et
1973. Ces nouvelles cotisations sont nettement
conformes à la loi, les précédentes étant indiscuta-
blement inexactes, mais ne provenant pas de faus-
ses déclarations de la part du demandeur.
Celui-ci prétend que sa femme avait des moyens
suffisants pour subvenir elle-même à ses besoins et
que ses fils ayant grandi, il envisageait de mettre
fin aux paiements alimentaires volontaires et de
commencer à constituer un fonds d'épargne-
retraite enregistré à son profit, ce qu'il ne pouvait
pas se permettre tant qu'il effectuerait des paie-
ments à sa femme. Quand, après la cotisation du
31 août 1973, il a reçu le remboursement afférent
à l'année d'imposition 1972, il s'en est servi pour
commencer ce fonds et, en février 1974, a fait à ce
titre un paiement de $500, qui s'appliquait à l'an-
née d'imposition 1973. D'après son témoignage,
lorsqu'il a constaté qu'il pouvait déduire les paie-
ments alimentaires qu'il faisait à sa femme, il les a
continués; mais s'il n'en avait pas été ainsi, il les
aurait arrêtés en 1974 et en aurait placé l'argent
dans un fonds d'épargne-retraite à son profit. Tou-
tefois, lorsqu'il s'est aperçu que les avantages fis-
caux étaient presque les mêmes, pensant toujours
que ses paiements alimentaires étaient déductibles,
il a décidé de les continuer. On pourrait penser
que, même si sa femme avait un revenu indépen-
dant suffisant, maintenant que les enfants étaient
plus grands, sans les paiements alimentaires, la
décision du demandeur de les continuer ou de les
arrêter serait influencée par d'autres facteurs que
les avantages fiscaux et, de même, que sa décision
de constituer un fonds d'épargne-retraite enregis-
tré à son profit ne devait pas être exclusivement
motivée par les avantages fiscaux d'un tel projet.
En tout cas, le demandeur fait valoir avec insis-
tance qu'il avait le choix entre la poursuite des
paiements alimentaires à sa femme, déductibles de
son revenu imposable, qu'il croyait acceptables
étant donné les cotisations inexactes qu'il avait
reçues, ou bien l'arrêt de ces paiements et l'affec-
tation de cet argent à un fonds d'épargne-retraite à
son profit, versements également déductibles. Dans
les deux cas, il bénéficiait de la déduction pour les
années en question, bien que pour la contribution
au fonds d'épargne enregistré, il lui faudrait éven-
tuellement payer l'impôt sur les prestations de la
pension qu'il commencerait à toucher. Il est signi-
ficatif aussi que sa seconde contribution (autre que
les dépôts d'intérêt) audit fonds ait consisté en la
somme de $1,600 payée le 13 février 1976 et
probablement imputable sur son année d'imposi-
tion 1975. Elle a suivi les avis de nouvelles cotisa-
tions du 8 août 1975, qui rejettent la déduction des
paiements alimentaires faits à sa femme en 1972 et
en 1973. Il prétend que, s'il n'avait pas été induit
en erreur par les cotisations inexactes, il aurait
arrêté les paiements susdits plus tôt qu'il ne l'a fait
et il aurait pu réclamer la déduction des contribu-
tions au fonds d'épargne-retraite enregistré en
1973 et pendant les années d'imposition subsé-
quentes. Toutefois, rien ne lui permettait de croire
qu'il pouvait déduire les versements alimentaires
faits à sa femme et, en fait, il n'a pas essayé de les
déduire avant d'avoir reçu la première cotisation
inexacte du 31 août 1973 pour l'année d'imposition
1972, suivie du chèque de remboursement. Il ne
peut certainement pas prétendre qu'avant cette
date, il aurait conduit ses affaires différemment.
Cet argument est donc sans valeur, en tout cas
pour l'année d'imposition 1972. Quant à 1973, il
est significatif qu'il ait payé à sa femme, cette
année-là, une pension alimentaire de $2,340. Or,
rien dans la preuve ne permet d'établir qu'il aurait
cessé ces paiements précisément le 31 août 1973,
et qu'il les a continués seulement à cause de l'avis
de cotisation indiquant qu'il pouvait les déduire.
En fait, il a commencé à constituer un fonds
d'épargne-retraite enregistré à son profit au début
de 1974, en se servant du chèque de rembourse-
ment pour effectuer le premier paiement. Donc,
même si on accepte son argument, la seule année
pour laquelle il a pu subir un préjudice, ce serait
1974, année où il n'a fait aucune contribution au
fonds, mais cette année d'imposition ne constitue
pas en l'espèce un point litigieux. En février 1976,
le paiement de $1,600 imputable à l'année 1975, a
permis de déduire ce montant du revenu imposable
de ladite année. Outre les faits qui, comme je l'ai
dit, révèlent que le demandeur a subi un préjudice
financier d'ordre fiscal très inférieur à ce qu'il
prétend du fait de la ligne de conduite que les
cotisations inexactes permettant de déduire les
paiements alimentaires l'ont incité à adopter, il
n'est certainement pas acceptable en droit de faire
valoir hypothétiquement ce qu'il aurait fait pour
réduire sa responsabilité fiscale, s'il avait su que
l'autre moyen ne lui était pas accessible.
Le demandeur invoque Robertson c. Minister of
Pensions', où le juge Denning (c'était son titre
alors) a examiné la question d'opposer une fin de
non-recevoir à la Couronne. La réclamation por-
tait ici sur une pension d'invalidité de guerre et le
' [ 1948] 2 All E.R. 767.
War Office avait avisé le réclamant que son invali-
dité était reconnue comme imputable au service
militaire. En conséquence, l'intéressé n'a pas
demandé à l'époque un autre avis médical et les
clichés radiologiques de ses blessures, qui étaient
alors encore disponibles, ont été détruits. Ultérieu-
rement, le tribunal d'appel des pensions a statué
que l'invalidité n'était pas attribuable au service
militaire. La question qui se posait alors était la
suivante: la première lettre n'engageait-elle pas ses
auteurs? A la page 770, le jugement déclare:
[TRADUCTION] Il convient également de décider si la Cou-
ronne est liée par les assurances données par la lettre du War
Office. La Couronne ne saurait se dégager en affirmant qu'elle
est en droit de se dédire d'une déclaration ou d'un engagement
car cette doctrine est discréditée depuis longtemps.
Plus loin, sur la même page, il ajoute:
[TRADUCTION] A mon sens si, dans ses rapports avec un
particulier, un ministère assume de lui-même compétence rela-
tivement à une affaire concernant ledit particulier, ce dernier
est en droit de penser que ce ministère a bien la compétence
qu'il a assumée. Il ne connaît pas les limites de cette compé-
tence et on ne peut pas lui demander de les connaître.
Toutefois, ces commentaires ont été critiqués à la
Chambre des Lords à propos de Howell c. Fal-
mouth Boat Construction Co. Ld. 2 dans un arrêt
rendu par lord Normand à la page 849. Il se réfère
à des commentaires presque identiques du lord
juge Denning (titre qui était alors devenu le sien)
sur un jugement rendu par une cour inférieure
dans cette même affaire, et déclare:
[TRADUCTION] Si je comprends bien ces commentaires, le
savant lord juge a estimé que les intimés étaient en droit de dire
que les représentations faites par M. Thompson empêchaient la
Couronne d'alléguer contre eux une violation de l'ordonnance
statutaire, et qu'ils étaient également en droit d'affirmer dans
un point litigieux avec l'appelante qu'il n'y avait pas eu viola
tion. Mais il est certain que ni un ministre ni un agent
subalterne de la Couronne ne peut empêcher celle-ci d'exécuter
une prohibition statutaire ni ne peut donner à l'intéressé le droit
de soutenir qu'il n'y a pas eu infraction.
Ce jugement établit donc clairement une distinc
tion entre une décision erronée sur une question de
fait, qui a néanmoins incité le bénéficiaire de cette
décision à agir, et le défaut d'appliquer la loi. Dans
ce dernier cas, aucune décision prise par un fonc-
tionnaire ou un agent de la Couronne ne peut
engager celle-ci. Les tribunaux canadiens ont cons
2 [1951] A.C. 837.
tamment statué ainsi. Dans M.R.N. c. Inland
Industries Limited 3 , qui traite des articles de la
Loi (fréquemment contestés) relatifs à la déducti-
bilité des contributions pour services passés à un
régime de retraite dûment accepté par le ministère
du Revenu national pour enregistrement, mais à
propos duquel les déductions ont été plus tard
refusées, le juge Pigeon, en prononçant le juge-
ment de la Cour, déclare à la page 523:
Toutefois, il me paraît clair qu'une approbation donnée sans
que les conditions prescrites par la loi ne soient remplies ne lie
pas le ministre.
Dans Woon c. M.R.N. 4 , l'appel était motivé, entre
autres, par une décision du Commissaire selon
laquelle, si l'appelant suivait une certaine méthode,
il serait imposé en vertu d'un article de la Loi de
l'impôt de guerre sur le revenu. Il a effectivement
suivi ladite méthode, mais le Ministre l'a cotisé à
un montant beaucoup plus élevé, en lui appliquant
un autre article de la Loi. On a alors soutenu que
la décision antérieure du Commissaire mettait le
Ministre dans l'impossibilité d'affirmer que ledit
article, en vertu duquel il établissait la cotisation,
était applicable. Après un examen analytique et
détaillé de la jurisprudence, le juge Cameron a
statué que le Commissaire n'avait pas le pouvoir
d'engager le Ministre par une décision limitant son
pouvoir en matière fiscale et non prévue par les lois
fiscales; que la cotisation devait être établie con-
formément aux termes de la loi, et que l'appelant
n'avait aucune latitude d'opposer une fin de non-
recevoir pour empêcher l'application de la loi.
Ces deux affaires ont été invoquées dans Stickel
c. M.R.N.S, où le juge Cattanach déclare à la page
685:
En bref, les fins de non-recevoir sont soumises à une règle
générale: elles ne peuvent aller à l'encontre des lois d'applica-
tion générale.
Voir aussi le jugement rendu par le juge Thurlow
(c'était son titre alors) dans Cam Gard Supply
Ltd. c. M.R.N. 6 , du il se réfère au point traité à
fond dans Inland Industries et déclare à la page
240:
' [1974] R.C.S. 514.
4 [1950] R.C.É. 327.
5 [1972] C.F. 672.
6 [1974] 2 C.F. 236.
Lorsque n'est pas remplie une exigence statutaire visant une
déduction, celle-ci doit alors être rejetée, même si l'approbation
du paiement, qui constitue aussi une condition essentielle de la
déductibilité,"a été donnée.
Face à une jurisprudence aussi constante, le
demandeur a tenté de prétendre qu'il ne proposait
pas d'invoquer une fin de non-recevoir pour empê-
cher la Loi de l'impôt sur le revenu de lui être
appliquée, mais qu'il invoquait l'article 152(3) de
la Loi, dont voici le libellé:
152. (3) Le fait qu'une cotisation est inexacte ou incomplète
ou qu'aucune cotisation n'a été faite n'a pas d'effet sur les
responsabilités du contribuable ii l'égard de l'impôt prévu par la
présente Partie.
Il a soutenu que les termes «responsabilités du
contribuable à l'égard de l'impôt» ont un sens très
large. Il peut, dit-il, être responsable de l'impôt
complémentaire résultant de la non-déductibilité
des paiements alimentaires faits à sa femme (et il
le croyait effectivement jusqu'à ce que la cotisation
inexacte de 1972 vienne jeter un doute dans son
esprit et l'inciter à présenter la réclamation de
1973, plus tard acceptée par une seconde cotisa-
tion inexacte), mais il ne devrait pas néanmoins
être tenu responsable de l'impôt complémentaire
qu'on lui réclame, parce que l'établissement d'un
plan d'épargne-retraite enregistré et la déductibi-
lité des montants payés à ce titre jusqu'à certaines
limites, font partie de la Loi. A l'époque, il avait
donc le choix de faire ou non des versements selon
le plan, et s'il l'avait fait, il n'aurait pas dû l'impôt
complémentaire qu'on lui réclame maintenant, et
comme il ne peut pas aujourd'hui faire ces verse-
ments rétroactivement pour les années en cause,
les cotisations erronées ne devraient pas avoir d'ef-
fet sur ses obligations.
Je ne peux pas accepter cet argument. Les nou-
velles cotisations sont indiscutablement correctes.
L'article 152(8) est rédigé dans les termes
suivants:
152. (8) Sous réserve de modifications qui peuvent y être
apportées ou d'annulation qui peut être prononcée lors d'une
opposition ou d'un appel fait en vertu de la présente Partie et
sous réserve d'une nouvelle cotisation, une cotisation est réputée
être valide et exécutoire nonobstant toute erreur, vice de forme
ou omission dans cette cotisation ou dans toute procédure s'y
rattachant en vertu de la présente loi.
Ce texte prévoit nettement la possibilité d'établir
une nouvelle cotisation pour corriger une erreur
antérieure. Le paragraphe 152(4) autorise une
nouvelle cotisation dans les 4 ans à compter du
jour de l'expédition par la poste d'un avis de
première cotisation et, en l'espèce, personne n'a
soutenu que cela n'avait pas été fait. Le seul point
litigieux porté devant la Cour est le suivant: les
nouvelles cotisations pour les années d'imposition
1972 et 1973 sont-elles correctes? Or, il est incon
testable qu'elles sont conformes à la loi. Le fait
que le demandeur aurait pu agir autrement et
réclamer certaines autres déductions (ce qu'il ne
peut plus faire maintenant) qui auraient réduit ses
obligations fiscales pour les années en cause est
regrettable en soi, mais ne saurait avoir d'effet sur
la validité des nouvelles cotisations. Le seul recours
du demandeur, en l'occurrence, pourrait consister
en une action délictuelle contre la Couronne, s'il
pouvait établir qu'il a subi des dommages du fait
de la négligence de fonctionnaires de celle-ci. Je
n'insinue pas d'ailleurs qu'il dispose d'une telle
action; je veux simplement dire qu'il ne peut pas
contester devant la Cour la validité des nouvelles
cotisations pour le seul motif qu'il prétend avoir
été incité par les premières cotisations à adopter
une ligne de conduite qui lui a causé des pertes
financières.
Je rejette donc l'action du demandeur mais, vu
les faits de l'espèce, sans dépens.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.