T-1777-77
Jag Dish Bhadauria (Demandeur)
c.
Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra-
tion (Défendeur)
Division de première instance, le juge Walsh
Toronto, le 13 juin; Ottawa, le 17 juin 1977.
Immigration — Le demandeur sollicite un jugement qui
déclarerait que la personne désignée a satisfait aux critères
d'immigration — Le défendeur cherche à faire radier la décla-
ration — Aucune cause raisonnable d'action — La personne
désignée n'a pas été convoquée à une entrevue avec un fonc-
tionnaire à l'immigration — Insuffisance de «points» attribués
dans le cadre d'offres d'emplois dans sa profession — L'entre-
vue n'est nécessaire que dans le cadre d'une appréciation sous
la rubrique personnalité, et par conséquent, est sans effet —
Décision administrative non sujette à révision judiciaire
Règlement sur l'immigration, DORS/62-36, art. 33(2),(3).
Le demandeur sollicite, d'une part, un jugement qui déclare-
rait que son frère, qu'il a désigné en vue de son admission au
Canada en qualité d'immigrant, satisfait à la loi en vigueur à
l'époque de sa désignation, et d'autre part, une ordonnance qui
enjoindrait au défendeur de délivrer un visa d'entrée. Le
demandeur allègue que son frère n'a pas été convoqué à une
entrevue avec un fonctionnaire à l'immigration, contrairement
à la règle audi alteram partem, et que le défendeur a délibéré-
ment refusé de lui attribuer les points d'appréciation appropriés
relativement à sa profession. Le défendeur cherche à faire
radier la déçlaration au motif qu'elle ne révèle aucune cause
raisonnable d'action. Il a été allégué que la règle audi alteram
partem ne s'applique pas puisque la décision est de nature
purement administrative. De plus, une entrevue—qui n'a lieu
que dans le cadre d'une appréciation relative à la personnali-
té—serait inutile puisque la personne désignée ne s'est vue
attribuer aucun point relativement aux offres d'emplois dans sa
profession et, par conséquent, n'est pas admissible à titre
d'immigrant.
Arrêt: l'action est rejetée. Les procédures ne révèlent aucune
cause raisonnable d'action. La Cour n'a pas la compétence
d'accorder le redressement sollicité car, pour ce faire, elle
devrait se substituer au fonctionnaire à l'immigration ou au
préposé aux visas et rendre une décision administrative sur une
affaire qui relève de leur pouvoir discrétionnaire et délivrer au
Ministre une ordonnance au sujet d'une question de nature
administrative. La décision d'accorder ou de refuser à un
immigrant son admission au Canada en qualité de résident
permanent est une décision administrative et, en cas de refus,
n'est pas sujette à révision judiciaire ou autre, si ce n'est par le
Ministre.
ACTION.
AVOCATS:
Jag Dish Bhadauria comparaissant en son
nom personnel.
K. F. Braid pour le défendeur.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le
défendeur.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Le demandeur sollicite, d'une
part, un jugement qui déclarerait que son frère,
Kedar Singh qu'il a désigné en vue de son admis
sion au Canada, conformément à l'article 33 du
Règlement sur l'immigration' satisfait aux exigen-
ces de la Loi et du Règlement en vigueur à l'épo-
que de la désignation, et d'autre part, une ordon-
nance qui enjoindrait au défendeur de délivrer à
Kedar Singh un visa d'entrée.
Le défendeur cherche à faire radier la déclara-
tion au motif qu'elle ne révèle aucune cause raison-
nable d'action.
Le demandeur allègue que son frère n'a pas été
convoqué à une entrevue avec un fonctionnaire à
l'immigration à New Delhi au sujet de sa demande
pour résidence permanente remplie le 26 septem-
bre 1974 mais que, comme on le lui demandait, il a
fourni, par écrit, des renseignements concernant
son emploi et le genre de travail qu'il entendait
faire au Canada en qualité de technicien. Il fait
valoir que l'omission de lui accorder une entrevue
est contraire à la règle audi alteram partem et que
le défendeur a délibérément refusé de lui attribuer
les points d'appréciation appropriés en sa qualité
de technicien. L'avocat du défendeur allègue que
la règle audi alteram partem ne s'applique pas
puisque la décision est de nature purement admi
nistrative et que le fait d'exiger d'un requérant
qu'il se présente à une entrevue alors que même s'il
recevait le nombre maximum de points sous la
rubrique personnalité, il ne serait pas pour autant
admissible à titre d'immigrant parce que sa
demande montre qu'il ne se verrait attribuer aucun
point sous les rubriques offres d'emplois dans sa
profession ou emploi réservé et par conséquent, ne
serait pas admissible à titre d'immigrant, serait lui
imposer une épreuve inutile. Contrairement à la
récente décision n° T-1779-77 (non encore
publiée), McDoom c. M.M. & I., en date du 10
juin 1977, la modification du 22 février 1974
(DORS/74-113) introduisant l'article 33(2)c)
' DORS/62-36, dans sa forme modifiée.
dans le Règlement s'applique clairement à l'appré-
ciation à faire dans la présente cause. Ce paragra-
phe est libellé comme suit:
33. ...
(2) L'admission au Canada aux fins de résidence perma-
nente peut être accordée à un parent désigné et aux membres
de sa famille immédiate
c) s'il obtient au moment de son appréciation, au moins un
point au titre des offres d'emplois dans sa profession ou s'il a
un emploi réservé ou désigné qui lui aurait valu dix points s'il
avait été examiné à titre de requérant indépendant.
Le paragraphe 33(3) prescrit que l'appréciation
doit être faite en conformité avec l'annexe B et une
étude de l'annexe B révèle qu'en ce qui concerne le
paragraphe l b), une appréciation sous la rubrique
«Personnalité» doit être faite «Au cours d'une
entrevue avec le requérant, [par] un fonctionnaire
à l'immigration ou un préposé aux visas», tandis
que l'appréciation qu'exige le paragraphe 1 e) con-
cernant les «Offres d'emplois dans sa profession»
est faite «Sur la base des renseignements recueillis
par le ministère sur les occasions d'emploi au
Canada....» Un examen plus poussé de l'annexe B
indique que les appréciations visées au paragraphe
la) intitulé «Instruction et formation» et au para-
graphe le) intitulé «Age» ne semblent pas exiger
d'entrevue personnelle et une interprétation identi-
que s'appliquerait vraisemblablement au paragra-
phe 1d) intitulé «Compétence professionnelle»,
puisque tous les renseignements concernant ces
différents facteurs peuvent être obtenus par le
biais d'un questionnaire ou d'une documentation
présentée à cet effet. L'entrevue n'est nécessaire
que lorsque le nombre de points à attribuer sous la
rubrique «Personnalité» doit être évalué. Donc, le
fait que le frère du demandeur n'ait pas été convo-
qué à une entrevue ne constitue pas une privation
de ses droits.
Quoi qu'il en soit, la présente cour n'a pas la
compétence d'accorder le redressement sollicité.
Pour ce faire, elle devrait se substituer au fonction-
naire à l'immigration ou au préposé aux visas et
rendre une décision administrative sur une affaire
qui relève de leur pouvoir discrétionnaire, et déli-
vrer au Ministre une ordonnance au sujet d'une
question de nature administrative. La décision
d'accorder ou de refuser à un immigrant son
admission au Canada en qualité de résident per-
manent conformément à la Loi sur l'immigration
et au Règlement sur l'immigration est une déci-
sion administrative et, en cas de refus, n'est pas
sujette à révision judiciaire ou autre, si ce n'est par
le Ministre. Voir Koula Cana c. M.M. & I. 2 od le
juge Abbott déclare, à la page 712:
La décision d'accorder ou de refuser ce statut selon les
prescriptions de la Loi et du Règlement dépend du fonction-
naire à l'immigration au port d'entrée et il s'agit d'une décision
administrative. Elle n'est pas sujette à révision judiciaire ou
autre, si ce n'est par le ministre. Dans nombre de cas, les
immigrants subissent cet examen d'aptitude à l'étranger; si on
les juge admissibles, ils obtiennent un visa les autorisant à
entrer au Canada à titre d'immigrants reçus. Si on leur refuse
cette autorisation, le dossier est fermé.
Voir également la décision du juge Addy dans «B»
c. La Commission d'enquête relevant du ministère
de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration' aux
pages 620-21:
j'estime que l'on doit considérer le jugement déclaratoire dont il
est question à l'article I8a) de la Loi sur la Cour fédérale
comme visant les cas où les organismes n'exercent pas de
fonctions judiciaires ou quasi judiciaires mais sont simplement
des personnes ou organismes exerçant des pouvoirs reètant un
caractère non judiciaire.
Par conséquent, la déclaration en l'espèce ne
révèle aucune cause raisonnable d'action et la
requête du défendeur visant à la faire radier est
bien fondée.
ORDONNANCE
La déclaration du demandeur est radiée avec
dépens.
2 1I 970] R.C.S. 699.
' [1975] C.F. 602.
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