T-4673-73
La Reine (Demanderesse)
c.
Perry J. Rhine (Défendeur)
Division de première instance, le juge Cattanach—
Ottawa, le 10 mai 1977.
Compétence — Demande de jugement par défaut conformé-
ment à la Règle 324 — Somme due par le défendeur en vertu
de la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies
— La Cour connaît-elle de la demande? — Loi sur les
paiements anticipés pour le grain des Prairies, S.R.C. 1970, c.
P-18, art. 14 et 21 — Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e
Supp.), c. 10, art. 17(4) — Règle 324 de la Cour fédérale.
Le défendeur est débiteur envers la Couronne en vertu de la
Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies. La
Couronne le poursuit et, conformément à la Règle 324,
demande un jugement contre le défendeur pour défaut de
plaider. La Cour doute de sa compétence pour entendre l'af-
faire vu la décision de la Cour suprême dans McNamara
Construction (Western) Limited c. La Reine.
Arrêt: la demande est rejetée. La question à trancher est celle
de savoir si l'action de la Couronne en l'espèce «est fondée sur
la législation fédérale applicable». Il ne suffit pas que l'obliga-
tion naisse par l'effet d'une loi. La Loi sur les paiements
anticipés pour le grain des Prairies autorise le versement de
paiements anticipés et prescrit les conditions dans lesquelles ils
peuvent être faits par la Commission en qualité de mandataire
de la Reine du chef du Canada. Mais la Loi n'impose pas, en
elle-même, une obligation, et il n'en existe aucune, sauf celle
souscrite par l'emprunteur, obligation qui découle non de la
Loi, mais de l'engagement contractuel de rembourser souscrit
par l'emprunteur. L'obligation est fondée sur 1'«engagement»
exigé par la Loi et ne découle pas d'une obligation imposée par
la Loi elle-même comme c'est le cas aux termes de la Loi de
l'impôt sur le revenu.
Arrêt appliqué: McNamara Construction (Western) Limi
ted c. La Reine [1977] 2 R.C.S. 654.
DEMANDE.
AVOCATS:
W. Thiessen pour la demanderesse.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour la
demanderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE CATTANACH: Il s'agit ici d'une
demande de jugement présentée par la demande-
resse contre le défendeur pour défaut de plaider,
en application de la Règle 324.
Ce litige a pris naissance à la suite de paiements
faits à des cultivateurs par la Commission cana-
dienne du blé, mandataire de Sa Majesté du chef
du Canada, à titre d'avances sur les paiements
initiaux pour du grain battu entreposé avant sa
livraison à la Commission. Ces paiements anticipés
sont faits sous le régime de la Loi sur les paie-
ments anticipés pour le grain des Prairies, S.R.C.
1970, c. P-18.
Les déclarations concernant ces questions sont
d'un modèle uniforme; de fait, on semble en avoir
tiré, au moyen d'un procédé technique, de nom-
breux exemplaires comportant des blancs pour les
mentions appropriées. Je reprends le texte de la
déclaration relative à la présente action.
[TRADUCTION] A l'honorable Cour fédérale du Canada:
Le sous-procureur général de Sa Majesté pour le Canada,
pour le compte de Sa Majesté, déclare ce qui suit:
1. Le défendeur est domicilié à Carnwood (Alberta) ou aux
environs et était, aux époques considérées, un producteur au
sens de l'art. 1 de la Loi sur les paiements anticipés pour le
grain des Prairies, 1957-58, c. 2, dans sa forme modifiée.
2. La Commission canadienne du blé est un corps constitué
en corporation aux termes de la Loi sur la Commission
canadienne du blé, S.R., c. 44, art. 1, dans sa forme modifiée,
et est, pour toutes fins, mandataire de Sa Majesté la Reine
du chef du Canada.
3. Conformément aux dispositions de la Loi sur les paie-
ments anticipés pour le grain des Prairies, le défendeur a
présenté à la Commission canadienne du blé une demande
écrite de paiement anticipé, à la date et pour la somme
indiquées dans la partie 1 de l'annexe ci-jointe concernant les
détails.
4. La demande a été établie dans la forme prescrite par la
Loi. Le défendeur s'y engageait, en retour du paiement
anticipé, à rembourser ledit paiement soit en déduisant la
moitié du paiement initial pour le blé, l'avoine ou l'orge livrés
par lui à la Commission canadienne du blé, soit en versant à
celle-ci une somme d'argent, ou les deux à la fois, au choix
du défendeur.
5. Aux termes de la demande, le défendeur s'était également
engagé, en cas de défaut de sa part, à rembourser à la
Commission canadienne du blé, tout solde dû à la date du
défaut du paiement anticipé avec intérêts au taux annuel de 6
pour 100 compter de la date du défaut.
6. Conformément à la loi susdite, la Commission canadienne
du blé, dès la réception ou après la réception de la demande,
a versé du défendeur la somme indiquée à titre de paiement
anticipé dans la partie 1 de l'annexe concernant les détails.
7. Conformément à l'engagement mais avant défaut, le
défendeur a livré à la Commission du blé, de l'avoine, ou de
l'orge ou lui a versé une somme d'argent, à l'égard de quoi la
Commission canadienne du blé a crédité le défendeur de la
somme indiquée au paragraphe a) de la partie 2 de l'annexe
concernant les détails.
8. Le défendeur a omis de remplir son engagement et, par
conséquent, à la date indiquée au paragraphe b) de la partie
2 de l'annexe, a été réputé en défaut conformément au
paragraphe 13(1) de la Loi.
9. A la date du défaut, le défendeur devait donc à la
Commission canadienne du blé la somme indiquée au para-
graphe d) de la partie 2 de l'annexe, ainsi que l'intérêt sur
ledit solde au taux annuel de 6 pour 100, et ce jusqu'à parfait
paiement.
10. Après la date du défaut, la Commission canadienne du
blé a reçu du défendeur les sommes indiquées au paragraphe
c) de la partie 2 de l'annexe, et les lui a créditées vers les
dates mentionnées audit paragraphe.
11. Le défendeur doit à la demanderesse la somme princi-
pale de $417.00 et les intérêts courus.
12. Le défendeur refuse ou néglige de payer ladite somme ou
toute partie de celle-ci bien que dûment requis de le faire par
la Commission canadienne du blé, au nom de Sa Majesté.
Demande
Le sous-procureur général du Canada, pour le compte de Sa
Majesté, demande ce qui suit:
a) la somme de $417.00;
b) les intérêts calculés à partir de la date du défaut sur le
montant dû ou toute partie impayée de ce montant, au taux
annuel de 6 pour 100 jusqu'à parfait paiement ou jusqu'à ce
qu'un jugement soit rendu;
c) les dépens de cette action; et
d) tout autre redressement que cette honorable cour esti-
mera juste.
J'accepte comme prémisses que la Loi sur les
paiements anticipés pour le grain des Prairies et
la législation en la matière, ainsi que les règle-
ments établis par le gouverneur en conseil, confor-
mément à l'article 21 de ladite loi, relèvent de la
compétence du Parlement.
Le but de la Loi ressort très clairement de son
libellé: le Parlement a désigné la Commission
canadienne du blé comme mandataire de Sa
Majesté la Reine pour verser des paiements antici-
pés aux producteurs de grain, avant livraison de ce
grain à la Commission.
L'article 3 de la Loi autorise la Commission à
faire des paiements anticipés, sur demande présen-
tée à cette fin par le producteur qui doit se confor-
mer aux conditions prescrites.
L'article 4 détermine la forme et la teneur de la
demande.
Aux termes de l'article 5, le requérant doit,
avant qu'un paiement anticipé ne lui soit versé,
souscrire en faveur de la Commission l'engage-
ment de livrer le grain à celle-ci et à défaut, de lui
rembourser la somme due augmentée des intérêts
calculés au taux prescrit à compter de la date du
défaut.
Les paragraphes 3 à 9 de la déclaration font
valoir que, selon les termes précis de la Loi, celle-ci
régirait le défendeur.
Il est allégué au paragraphe 10 que le défendeur
a versé certaines sommes qui lui ont été créditées;
au paragraphe 11, qu'il doit à la Commission la
somme y mentionnée et, au paragraphe 12, qu'il a
été sommé d'acquitter cette dette, mais n'a pas
obtempéré.
D'où la présente demande de jugement présen-
tée par Sa Majesté.
Il ressort très clairement des dispositions de la
Loi et des allégations de la déclaration que la
demande de remboursement présentée par la Com
mission est fondée sur l'engagement souscrit par le
défendeur en faveur de celle-ci et sur le défaut du
défendeur de se conformer aux termes de son
engagement.
Lorsque, pour la première fois, j'ai été saisi de
cette affaire, j'ai donné instruction au greffe de
demander au procureur de la demanderesse ses
observations écrites sur la question de savoir si
cette cour a compétence pour connaître de la
cause, vu la décision de la Cour suprême du
Canada, rendue le 25 janvier 1977 dans McNa-
mara Construction (Western) Limited c. La Reine
[1977] 2 R.C.S. 654.
Le procureur de la demanderesse, par lettre en
date du 15 avril 1977, a répondu en ces termes:
[TRADUCTION] Nous sommes d'avis que nos demandes relè-
vent de la Cour fédérale du Canada, vu que nous sommes
mandataires de Sa Majesté la Reine du chef du Canada et que
nous pouvons entamer des actions en application de la Loi sur
les paiements anticipés pour le grain des Prairies. L'article 13
de la Loi énumère les conditions dans lesquelles un compte est
réputé en défaut. L'article 15 du Règlement d'application
dispose que «lorsqu'un bénéficiaire manque à ses engagements,
la Commission ou Sa Majesté peuvent percevoir le montant dû
et tout intérêt afférent en intentant une action devant la Cour
fédérale du Canada».
L'article 4(2) de la Loi sur la Commission
canadienne du blé, S.R.C. 1970, c. C-12, prévoit
que la Commission est, pour toutes fins, manda-
taire de Sa Majesté du chef du Canada et que ses
pouvoirs ne peuvent être exercés qu'à ce titre.
L'article 14 de la Loi sur les paiements antici-
pés pour le grain des Prairies prévoit que:
14. Lorsqu'un producteur est en défaut, toutes procédures
contre lui, pour assurer l'exécution de son engagement, peuvent
être prises au nom de la Commission ou au nom de Sa Majesté.
Je ne vois pas comment l'une ou l'autre de ces
dispositions donne à la présente cour compétence
pour connaître de la cause.
Dans la première disposition, la Commission est
nommée mandataire de Sa Majesté. Aux termes
de la seconde, il est prévu que toutes procédures
intentées contre un producteur en défaut, en exé-
cution de son engagement, sont prises au nom de la
Commission ou au nom de Sa Majesté. Il ne
s'ensuit pas de l'une ou l'autre de ces dispositions
que la présente cour ait compétence en la matière.
Il importe de signaler qu'aux termes de l'article
14, l'action peut être intentée au nom de la Com
mission ou au nom de Sa Majesté pour assurer
l'exécution de l'«engagement» exigé du producteur
comme condition préalable à l'obtention d'un paie-
ment anticipé en vertu de l'article 4 de la Loi sur
les paiements anticipés pour le grain des Prairies.
Je crois que l'«engagement» est requis comme con-
séquence de la Loi et que la demanderesse cherche
à faire respecter cette obligation par le défendeur.
Aux termes de l'article 21 de la Loi sur les
paiements anticipés pour le grain des Prairies, le
gouverneur en conseil peut établir des règlements:
21....
b) prescrivant les mesures à prendre pour la perception de
tout montant en défaut relativement aux paiements anticipés;
Le procureur de la demanderesse déclare dans
sa lettre qu'en vertu de ce pouvoir et selon l'article
15 du Règlement:
15. Lorsqu'un bénéficiaire manque à ses engagements, la
Commission ou Sa Majesté peuvent percevoir le montant dû et
tout intérêt afférent en intentant une action devant la Cour
fédérale du Canada.
Le Règlement prévoit que la Commission ou Sa
Majesté peuvent percevoir le montant dû à la suite
du défaut d'exécuter l'«engagement», en intentant
une action devant la Cour fédérale du Canada;
mais cette disposition ne peut avoir l'effet d'inves-
tir la Cour fédérale du Canada d'une compétence
qui n'existe pas par ailleurs.
Je ne peux m'empêcher de souligner qu'aux
termes de l'article 10 de la Loi sur les paiements
anticipés pour le grain des Prairies, la Commis
sion possède un privilège à concurrence du mon-
tant du paiement anticipé, sur le grain à l'égard
duquel on a versé ledit paiement anticipé. En
l'espèce, ce n'est pas l'exercice du privilège que
l'on veut assurer, mais bien l'engagement du
défendeur de rembourser. Le grain a probablement
disparu et cette disparition a également entraîné
celle du privilège. L'action est plutôt fondée sur
l'inexécution d'un contrat.
Dans l'affaire McNamara, la Couronne du chef
du Canada a conclu un contrat avec la défende-
resse pour la construction d'un établissement péni-
tentiaire à Drumheller (Alberta) et, conformément
à l'article 16(1) de la Loi sur les travaux publics,
S.R.C. 1970, c. P-38, le Ministre a exigé de la
défenderesse le dépôt d'un cautionnement pour
garantir l'exécution régulière des travaux. Ce cau-
tionnement a été fourni par la Fidelity Insurance
Company of Canada en garantie de l'exécution du
contrat par la défenderesse McNamara.
La Couronne a intenté devant la Cour fédérale
du Canada une action en dommages-intérêts
contre la défenderesse McNamara pour inexécu-
tion de contrat et, contre Fidelity, une action sur le
cautionnement.
C'est sur l'article 17(4) de la Loi sur la Cour
fédérale que se fondait la compétence de la Cour
fédérale pour connaître de l'action intentée par la
Couronne.
L'article 17(4) se lit comme suit:
17....
(4) La Division de première instance a compétence concur-
rente en première instance
a) dans les procédures d'ordre civil dans lesquelles la Cou-
ronne ou le procureur général du Canada demande redresse-
ment; et
b) dans les procédures dans lesquelles on cherche à obtenir
un redressement contre une personne en raison d'un acte ou
d'une omission de cette dernière dans l'exercice de ses fonc-
tions à titre de fonctionnaire ou préposé de la Couronne.
L'une des questions en litige dans l'affaire
McNamara est celle de savoir si la Cour fédérale a
compétence sur l'objet d'une action en dommages-
intérêts pour inexécution d'un contrat, intentée par
la Couronne du chef du Canada.
Le juge en chef déclare au nom de toute la Cour
[à la page 658]N,
Cette compétence relèverait de l'art. 101 de l'Acte de l'Améri-
que du Nord britannique qui confère notamment au Parlement
le pouvoir législatif d'établir des tribunaux «pour la meilleure
administration des lois du Canada». Dans l'arrêt Quebec North
Shore Paper Company c. Le Canadien Pacifique Limitée
([1977] 2 R.C.S. 1054), (arrêt rendu après les jugements de la
Cour d'appel fédérale en l'espèce), cette Cour a statué que les
dispositions de l'art. 101 posent comme condition préalable à
l'exercice par la Cour fédérale de sa compétence, l'existence
d'une législation fédérale applicable sur laquelle on puisse
fonder les procédures. Il ne suffit pas que le Parlement du
Canada puisse légiférer sur un domaine dont relève la question
soumise à la Cour fédérale. Comme l'a indiqué cette Cour dans
l'arrêt Quebec North Shore Paper Company, la compétence
judiciaire en vertu de l'art. 101 ne recouvre pas le même
domaine que la compétence législative fédérale.
L'article 17(4) de la Loi sur la Cour fédérale a
remplacé l'article 29d) de la Loi sur la Cour de
l'Échiquier, S.R.C. 1952, c. 98.
A cet égard, le juge en chef poursuit en ces
termes [aux pages 659-660]:
Ce paragraphe a remplacé l'art. 29d) de la Loi sur la Cour de
l'Échiquier, S.R.C. 1952, c. 98, qui conférait compétence à la
Cour de l'Échiquier
dans toutes les autres actions et poursuites d'ordre civil, en
common law ou en equity, dans lesquelles la Couronne est
demanderesse ou requérante.
Dans l'arrêt Quebec North Shore Paper Company, cette Cour a
souligné au sujet de cette disposition que pour traduire des
personnes devant la Cour de l'Échiquier, la Couronne du chef
du Canada doit au préalable établir que son action relève de la
législation fédérale applicable, que ce soit une loi, un règlement
ou la common law.
Il ne s'agit donc pas de décider en l'espèce si la demande de
redressement de la Couronne relève d'un domaine de compé-
tence législative fédérale, mais de déterminer si elle est fondée
sur la législation fédérale applicable. Je ne pense pas que, pris
littéralement, le par. 17(4), qui vise à habiliter la Cour fédérale
à connaître de tout genre d'action d'ordre civil du seul fait que
la Couronne du chef du Canada fait une réclamation à titre de
demanderesse, constitue une législation fédérale valide en vertu
de l'art. 101 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.
Le juge en chef déclare ensuite [à la page 662]:
Il reste donc à déterminer, quant à la question de la compé-
tence, s'il existe une législation fédérale applicable aux présents
pourvois qui donne à la Cour fédérale compétence pour connaî-
tre de l'action de la Couronne concernant la demande de
dommages-intérêts et la réclamation fondée sur le cautionne-
ment.
Il ajoute [à la page 662]:
... il suffit à la Couronne d'être partie à un contrat qu'elle
invoque dans son action à titre de demanderesse pour que
l'exigence relative à la législation fédérale applicable soit
remplie.
Quant à l'action de la Couronne fondée sur le
cautionnement, le juge en chef déclare [à la page
6631:
Le raisonnement s'applique à la réclamation de la Couronne
fondée sur le cautionnement tout comme à sa demande de
dommages-intérêts contre McNamara. On a plaidé qu'il exis-
tait une différence parce que (1) le par. 16(1) de la Loi sur les
travaux publics, maintenant S.R.C. 1970, c. P-38, oblige le
ministre responsable à obtenir une garantie suffisante de l'exé-
cution régulière d'un contrat visant des travaux publics et que
(2) l'arrêt Consolidated Distilleries c. Le Roi, précité, fait
jurisprudence sur le droit de la Couronne d'invoquer la compé-
tence de la Cour fédérale lorsqu'elle intente une action fondée
sur un cautionnement. Aucun de ces arguments n'améliore la
situation de la Couronne. Le paragraphe 16(1) de la Loi sur les
travaux publics formule une exigence administrative, la néces-
sité d'une garantie, mais reste muet sur le droit régissant
l'exécution de la garantie.
Il a été conclu que la contestation de la compé-
tence de la Cour fédérale était fondée.
Par conséquent, la première question à l'étude
dans la présente cause est de déterminer s'il existe
une loi fédérale traitant de l'objet de la poursuite.
La position du procureur de la demanderesse,
comme il l'a indiqué dans sa lettre du 15 avril
1977 précitée, est, sans l'ombre d'un doute, qu'une
telle législation fédérale existe, que c'est la Loi sur
les paiements anticipés pour le grain des Prairies
et l'article 15 du Règlement adopté conformément
à cette loi.
La question à trancher, selon le juge en chef, est
celle de savoir si la demande de redressement de la
Couronne, en l'espèce, «est fondée sur la législation
fédérale applicable».
J'exposerai de façon concise mon opinion quant
à l'arrêt McNamara dans la mesure où il s'appli-
que au présent litige.
Il ne suffit pas que l'obligation naisse par l'effet
d'une loi.
En l'espèce, la Loi sur les paiements anticipés
pour le grain des Prairies autorise le versement de
tels paiements et prescrit les conditions dans les-
quelles ils peuvent être faits par la Commission en
sa qualité de mandataire de Sa Majesté la Reine
du chef du Canada. Mais la Loi n'impose pas, en
elle-même, une obligation, et il n'en existe aucune,
sauf celle souscrite par l'emprunteur, obligation
qui découle non de la Loi, mais de l'engagement
contractuel de rembourser souscrit par l'emprun-
teur. L'obligation est fondée sur l'«engagement»
exigé par la Loi et ne découle pas d'une obligation
imposée par la Loi elle-même, comme c'est le cas
aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu, de la
législation fédérale concernant les douanes et l'ac-
cise et autres textes législatifs semblables.
A mon avis, la présente cause est tout à fait
semblable à la réclamation de la Couronne fondée
sur le cautionnement dans l'affaire McNamara.
L'engagement exigé du cultivateur comme condi
tion préalable du versement par la Commission des
paiements anticipés a les mêmes fondements que le
cautionnement dans l'affaire McNamara. De
même que la Loi sur les travaux publics requiert
le dépôt d'un cautionnement, de même la Loi sur
les paiements anticipés pour le grain des Prairies
exige du producteur requérant de tels paiements
qu'il souscrive un «engagement». De même que la
Loi sur les travaux publics exige un cautionne-
ment, ainsi la Loi sur les paiements anticipés pour
le grain des Prairies exige un engagement de la
part de l'emprunteur et, de même que la Loi sur
les travaux publics ne comporte aucune disposi
tion régissant l'exécution du cautionnement, ainsi
la Loi sur les paiements anticipés pour le grain
des Prairies n'en comporte aucune régissant l'exé-
cution de l'engagement.
Je ne crois pas que l'existence de l'article 15 du
Règlement auquel fait référence le procureur de la
demanderesse améliore davantage la situation de
la Couronne dans la présente affaire, pas plus que
celle de l'article 17(4) de la Loi sur la Cour
fédérale ne l'améliorait dans l'affaire McNamara,
où la Couronne était également demanderesse.
De plus, j'estime que les éléments de la présente
affaire sont identiques à ceux de l'affaire
McNamara.
La Cour suprême a unanimement conclu que
l'action de la Couronne pour inexécution d'un
contrat ou l'action fondée sur le cautionnement
n'avaient aucun fondement légal.
De même, pour les motifs exprimés, je conclus
que l'action de la Couronne en l'espèce n'a aucun
fondement légal et par conséquent, la demande de
jugement contre le défendeur pour défaut de plai-
der doit être rejetée parce que, après étude de la
décision McNamara, j'estime que la présente cour
n'a pas compétence pour connaître de la
déclaration.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.