T-1779-77
Iris Motayne McDoom (Requérante)
c.
Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra-
tion (Intimé)
Division de première instance, le juge Walsh
Toronto, le 6 juin; Ottawa, le 10 juin 1977.
Immigration — Brefs de prérogative — Désignation de deux
fils en vue de leur admission au Canada — Application
rétroactive d'un règlement — Rejet d'une demande parce
qu'aucune disposition ne permet de traiter les étudiants comme
des résidents permanents — Demande de mandamus
Examen de l'autre demande remis à plus tard — Modification
du Règlement dans l'intervalle — Rejet de la demande sur le
fondement du nouveau règlement — Demande de certiorari et
de mandamus — Demande en vertu de la Règle 474 pour faire
trancher une question de droit, à savoir la rétroactivité d'un
règlement.
La requérante a désigné ses deux fils en vue de leur admis
sion au Canada pour résidence permanente. La demande de
Gregory, étudiant, n'a jamais été appréciée parce qu'aucune
disposition ne permet de traiter les étudiants comme des rési-
dents permanents. La demande d'Anthony n'a été examinée
qu'après un long délai, mais sous le régime d'un règlement plus
restrictif mis en vigueur après le dépôt de la demande. La
requérante cherche à obtenir un bref de certiorari en vue
d'annuler la décision rejetant la demande d'Anthony, et des
brefs de mandamus requérant le traitement des deux demandes
sous le régime de la loi en vigueur lors de la présentation
desdites demandes. Elle cherche également à obtenir une décla-
ration, rendue sous le régime de la Règle 474, portant que les
demandes doivent être traitées sous le régime de la loi en
vigueur au moment de leur présentation.
Arrêt: les demandes sont accueillies. La requérante a un droit
acquis à exiger leur examen approfondi sur le fondement du
Règlement en vigueur à la date où elles ont été acceptées et
envoyées aux fins d'appréciation, et quelle que soit la cause du
retard apporté à cet examen, elles ne peuvent pas subir le
contrecoup défavorable qu'entraînerait la rétroactivité des nou-
velles exigences incorporées ultérieurement dans le Règlement.
Il n'est pas nécessaire de trancher la question de la non-rétroac-
tivité du nouveau règlement en tant que question de droit,
puisque la décision à cet effet est implicite dans la conclusion
selon laquelle un bref de mandamus doit être émis pour exami
ner les demandes sur le fondement du Règlement en vigueur à
la date où elles ont été présentées. Il en ressort implicitement
que la décision contraire afférente à la demande relative à
Anthony doit être nécessairement annulée.
DEMANDE.
AVOCATS:
P. Stott et C. Hoppe pour la requérante.
G. R. Garton pour l'intimé.
PROCUREURS:
Duggan, Hoppe, Niman & Stott, Toronto,
pour la requérante.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Il s'agit ici d'une demande
visant à obtenir un bref de certiorari en vue d'an-
nuler une décision du ministère de la Main-d'oeu-
vre et de l'Immigration refusant la désignation
d'Anthony Motayne, et un bref de mandamus
requérant l'intimé de donner suite à la demande de
désignation au titre de l'article 33 du Règlement
sur l'immigration, C.P. 1962-86, dans sa version
en vigueur le 30 octobre 1973. On demande aussi
qu'il soit statué sur un point de droit au titre de la
Règle 474 de la Cour fédérale, à savoir que ledit
Anthony Motayne soit apprécié en vertu dudit
article 33 en vigueur à la date où la requérante a
procédé à la désignation. Ladite requérante a pré-
senté une demande identique portant le n° du
greffe T-1783-77, où elle désigne Gregory
Motayne, mais ne réclame aucun bref de certio-
rari, la demande n'ayant pas été instruite. Les
mêmes arguments s'appliquent aux deux actions,
car les faits sont identiques si ce n'est qu'à la date
où la requérante, Iris Motayne McDoom, mère
d'Anthony et de Gregory Motayne, a procédé à la
désignation, Gregory était encore étudiant dans
une université des États-Unis. Son total de points
au titre de l'article 33 du Règlement n'a donc
jamais été calculé, sa demande d'admission au
Canada aux fins de résidence permanente ayant
été rejetée au motif qu'il projetait de poursuivre
ses études ici et qu'aucune disposition ne permet
de traiter les étudiants comme des résidents per
manents. Dans le cas d'Anthony, sa requête a été
d'abord annulée parce qu'il avait négligé de se
rendre à plusieurs convocations de la section de la
Main-d'oeuvre et de l'Immigration du Consulat
général du Canada à New York, par suite de la
perte de la formule américaine I-94 requise. Ces
renseignements ressortent d'une lettre écrite par L.
D. Carroll, consul, Main-d'oeuvre et Immigration,
au procureur de la requérante, le 17 octobre 1975,
annexée à l'affidavit produit par la requérante et
accompagnant la demande T-1783-77. En temps
opportun, Anthony Motayne a été finalement
interrogé le 2 février 1976. Il lui a été attribué 55
points, mais sa demande a été refusée conformé-
ment aux modifications du Règlement en date du
22 février 1974, parce qu'il y avait pénurie d'em-
plois dans sa profession. Ce renseignement figure
dans une lettre du 13 avril 1976, adressée par M.
Carroll à l'avocat de la requérante et annexée à
son affidavit joint à la présente demande.
Dans les deux demandes, l'affidavit déclare que
la requérante et son mari se sont vus octroyer le
statut d'immigrants reçus au Canada, le 3 juillet
1973, et que le 30 octobre 1973, la requérante s'est
rendue au Centre d'immigration du Canada, 480,
University Avenue à Toronto, pour désigner ses
deux fils aux fins de résidence permanente. A
l'époque, Anthony avait 25 ans et Gregory, 23;
tous deux résidaient dans la ville de New York.
Dans les deux cas, la requérante a été interrogée
pour déterminer si elle était bien admissible à
désigner ses fils et, à la fin de l'examen, on l'a
avisée que la désignation était acceptée et allait
être envoyée au Consulat général du Canada à
New York pour suite à donner. La désignation
d'Anthony correspond à la fiche n° 369981 et celle
de Gregory, à la fiche 335655. Rien de cela n'est
contesté ni le fait qu'à la suite du rejet des deux
désignations elle a recouru aux services d'un
avocat pour se faire expliquer les motifs dudit
rejet, renseignements qu'elle a obtenus dans les
lettres susmentionnées. Elle s'est ensuite efforcée
d'obtenir une révision de la décision auprès du
ministère de l'Immigration, de la section de la
Main-d'oeuvre et de l'Immigration du Consulat du
Canada à New York et par l'entremise de conseil-
lers en immigration, auprès du Directeur du Ser
vice étranger du ministère susdit; tous ces efforts
ont été vains.
Le point litigieux provient d'une modification au
Règlement, introduite le 22 février 1974. L'article
33 d'icelui, dans sa version en vigueur le 30 octo-
bre 1973, date à laquelle la requérante a désigné
ses fils aux fins de résidence permanente au
Canada, est énoncé dans le DORS/67-434. En
voici les termes:
33. (1) Sous réserve du présent article, toute personne qui
réside au Canada et est citoyen canadien ou a été légalement
admise au Canada en vue d'y résider en permanence peut
désigner, pour son admission au Canada en vue d'y résider en
permanence, l'une ou l'autre des personnes suivantes (ci-après
appelées «parent désigné»), ainsi que l'un des membres de la
famille immédiate de cette personne qui l'accompagne:
a) tout fils ou fille de cette personne, de 21 ans ou plus;
b) tout fils marié ou fille mariée de cette personne, de moins
de 21 ans;
c) tout frère ou sœur de cette personne;
d) le père, la mère, le grand-père ou la grand-mère de cette
personne, de moins de 60 ans, et
e) tout neveu, nièce, oncle, tante, petit-fils ou petite-fille de
cette personne.
(2) L'admission au Canada en vue d'y résider en perma
nence peut être accordée à un parent désigné et aux membres
de sa famille immédiate
a) si lui-même et les membres de sa famille immédiate
satisfont aux exigences de la Loi et du présent Règlement; et
b) si la personne qui l'a désigné a satisfait aux exigences du
paragraphe (4) et si aucune ordonnance d'expulsion n'a été
rendue contre cette personne.
(3) En établissant l'admissibilité d'un parent désigné en vue
de son admission au Canada pour y résider en permanence, un
fonctionnaire à l'immigration ou un préposé aux visas doit
apprécier cette personne ou le chef de sa famille immédiate si
elle n'en est pas elle-même le chef, en se fondant sur les
facteurs suivants conformément aux normes énoncées à l'An-
nexe B:
a) son instruction et sa formation;
b) ses qualités personnelles;
c) la demande qui existe au Canada dans le secteur profes-
sionnel où elle sera vraisemblablement employée;
d) le degré de son habileté professionnelle; et
e) son âge.
(4) Quiconque nomme un parent désigné en vue de son
admission au Canada pour y résider en permanence doit
a) s'engager à fournir pendant une période de 5 ans, en
puisant sur ses propres ressources, les soins et l'entretien
nécessaires du parent désigné et des membres de sa famille
immédiate conformément aux normes prescrites par le
Ministre;
b) s'être acquitté des responsabilités découlant de toute
demande antérieure visant l'admission au Canada d'une per-
sonne quelconque en vue d'y résider en permanence;
c) avoir à la fois la volonté et le pouvoir de s'engager à
conseiller, guider et aider le parent désigné dans l'accomplis-
sement des devoirs que lui impose sa qualité de résident du
Canada; et
d) faire la désignation selon la formule prescrite par le
Ministre.
(5) Nonobstant le paragraphe (3), un fonctionnaire à l'im-
migration ou un préposé aux visas peut
a) approuver l'admission d'un parent désigné qui ne satisfait
pas aux normes énoncées à l'Annexe B, ou
b) refuser l'admission d'un parent désigné qui satisfait aux
normes indiquées à l'Annexe B,
si, à son avis, il existe des raisons valables pour lesquelles ces
normes ne reflètent pas les chances de ce parent désigné de
réussir à s'établir lui-même au Canada et si ces raisons ont été
soumises par écrit à un fonctionnaire du ministère qu'a désigné
le Ministre et ont reçu l'approbation de ce fonctionnaire.
Toutefois, les paragraphes (1) et (2) dudit article
33 ont été abrogés et remplacés par DORS/74-
113, le 22 février 1974, par de nouvelles clauses
dont voici le libellé:
2. (1) Au paragraphe 33(1) dudit règlement, la partie qui
précède l'alinéa a) est abrogée et remplacée par ce qui suit:
«33. (1) Sous réserve du présent article, toute personne
qui réside au Canada, qui est un citoyen canadien ou qui a
été légalement admise au Canada aux fins de résidence
permanente et qui a dix-huit ans révolus peut désigner, en
vue de son admission au Canada pour résidence permanente,
l'une ou l'autre des personnes suivantes (ci-après appelée
«parent désigné»), y compris les membres de la famille
immédiate de cette personne qui l'accompagnent:»
(2) Le paragraphe 33(2) dudit règlement est abrogé et
remplacé par ce qui suit:
«(2) L'admission au Canada aux fins de résidence perma-
nente peut être accordée à un parent désigné et aux membres
de sa famille immédiate
a) si lui-même et les membres de sa famille immédiate
satisfont aux exigences de la Loi et du présent règlement;
b) si la personne qui l'a désigné a satisfait aux exigences
du paragraphe (4) et si aucune ordonnance d'expulsion n'a
été rendue contre cette personne ou si, dans le cas où une
telle ordonnance a été rendue,
(i) un appel de l'ordonnance a été accueilli
(ii) l'ordonnance a été annulée, ou si
(iii) la personne a été admise de nouveau au Canada à
titre d'immigrant reçu en vertu d'une autorisation du
Ministre, conformément à l'article 35 de la Loi; et
c) s'il obtient au moment de son appréciation, au moins un
point au titre des offres d'emplois dans sa profession ou s'il
a un emploi réservé ou désigné qui lui aurait valu dix
points s'il avait été examiné à titre de requérant
indépendant.»
Le principal changement est le suivant: avant cette
date, on exigeait, selon les normes énoncées dans
l'annexe B, qu'un fils désigné obtienne une appré-
ciation de 25 points (annexe B, article 2(1)b));
depuis la modification, il doit en outre en vertu de
l'alinéa (2)c), obtenir au moins un point d'appré-
ciation par demande d'emploi dans sa profession
ou avoir un emploi réservé ou désigné, qui lui
aurait valu 10 points s'il avait été examiné à titre
de requérant indépendant. Dans le cas d'Anthony,
bien que son appréciation soit de 55 points, il a été
refusé au motif qu'il n'y avait aucun emploi dans
sa profession. Quant à Gregory, sa fiche a été
perdue; il semble néanmoins raisonnable de
déduire des motifs donnés que son refus repose
également sur une absence totale d'offres d'emploi
dans sa profession, vu qu'il est étudiant et ne vient
donc pas au Canada pour travailler. La raison
invoquée, c'est-à-dire qu'il ne peut pas être appré-
cié parce qu'aucune disposition ne permet de trai-
ter les étudiants comme des résidents permanents,
ne s'appuie sur aucune clause expresse de la Loi;
elle n'est donc pas en soi un motif valable pour
refuser de procéder à une appréciation.
Il faut donc établir si la modification du Règle-
ment a un effet rétroactif qui permette de l'appli-
quer aux désignations auxquelles la requérante a
procédé, le 30 octobre 1973, pour chacun de ses
fils, et change la base sur laquelle elles sont
examinées.
On peut se référer ici à la Loi d'interprétation'
et en particulier à ses articles 35b),c),e) et 36c) et
d), dont voici le libellé:
35. Lorsqu'un texte législatif est abrogé en tout ou en partie,
l'abrogation
b) n'atteint ni l'application antérieure du texte législatif ainsi
abrogé ni une chose dûment faite ou subie sous son régime;
c) n'a pas d'effet sur quelque droit, privilège, obligation ou
responsabilité acquis, né, naissant ou encouru sous le régime
du texte législatif ainsi abrogé;
e) n'a pas d'effet sur une enquête, une procédure judiciaire
ou un recours concernant de semblables droit, privilège,
obligation, responsabilité, peine, confiscation ou punition;
et une enquête, une procédure judiciaire bu un recours prévu à
l'alinéa e) peut être commencé, continué ou mis à exécution, et
la peine, la confiscation ou la punition peut être infligée comme
si le texte législatif n'avait pas été ainsi abrogé.
36. Lorsqu'un texte législatif (au présent article appelé
«texte antérieur») est abrogé et qu'un autre texte législatif (au
présent article appelé «nouveau texte») y est substitué,
c) toutes les procédures prises aux termes du texte antérieur
sont reprises et continuées aux termes et en conformité du
nouveau texte, dans la mesure où la chose peut se faire
conformément à ce dernier;
d) la procédure établie par le nouveau texte doit être suivie,
autant qu'elle peut y être adaptée, dans le recouvrement ou
l'imposition des peines et confiscations encourues et pour
faire valoir des droits existant ou naissant aux termes du
texte antérieur, ou dans toute procédure concernant des
choses survenues avant l'abrogation;
Dans le paragraphe 2(1), «texte législatif» est
défini comme signifiant «une loi ou un règlement
ou toute partie d'une loi ou d'un règlement>.
' S.R.C. 1970, c. I-23.
Les termes de l'arrêté en conseil modificateur
indiquent clairement que les paragraphes (1) et
(2) de l'article 33 n'ont pas été simplement abro-
gés, mais remplacés. Dans Bell Canada c. Pal-
mer , , le juge Thurlow (c'était son titre alors) de la
Cour d'appel fédérale, prononçant le jugement au
nom de la Cour, fait état à la page 5, de l'argu-
ment selon lequel l'article 35 s'applique lorsqu'il y
a simplement abrogation et l'article 36, lorsqu'il y
a abrogation et remplacement. Il déclare [à la
page 190]:
L'avocat n'a pas pu nous fournir de jurisprudence en ce sens et,
en toute déférence, je ne suis pas d'accord avec lui.
Il commente ensuite le jugement rendu par le
Conseil privé dans Director of Public Works c. Ho
Po Sanga et établit une distinction avec l'affaire
précédente. Il déclare à la page 192:
Ici, à mon avis, la situation est différente. Au moment en
cause, les plaignantes avaient, à titre d'employées de l'appe-
lante, un droit acquis à un salaire égal en conformité des
dispositions législatives, droit qu'elles ont cherché à faire res-
pecter, et, en présentant une plainte écrite au Ministre, elles ont
rempli la seule formalité de procédure qu'elles étaient tenues de
remplir pour que la procédure prévue à l'article 6 soit menée à
terme.
Il cite alors aux pages 192-193 les motifs de lord
Morris, énoncés à la page 922 du jugement Ho Po
Sang:
[TRADUCTION] Il convient de noter qu'en vertu de l'article
10e) une abrogation ne doit pas avoir d'effet sur une enquête,
une procédure judiciaire ou un recours «concernant de sembla-
bles droits». Le droit visé est le droit mentionné à l'article 10c),
c'est-à-dire un droit acquis ou né en vertu d'un texte législatif
abrogé. Cette partie des dispositions de l'alinéa e) de l'article
10 ne s'applique pas et ne peut pas s'appliquer à moins qu'il n'y
ait un droit tel que celui prévu à l'alinéa c). Il se peut par
conséquent qu'en vertu d'un certain texte législatif abrogé un
droit ait été accordé, mais qu'en ce qui le concerne, une enquête
ou une certaine procédure judiciaire soit nécessaire. Le droit
n'est alors pas touché et il est garanti. Il sera garanti même si
l'on doit faire le nécessaire pour en fixer le quantum. Mais il y
a une nette distinction entre une enquête portant sur un droit et
une enquête destinée à décider si un certain droit doit ou non
être accordé. Dans le premier cas, lors de l'abrogation, le droit
est garanti par la Loi d'interprétation. Dans le deuxième cas il
ne l'est pas. Leurs Seigneuries sont d'accord avec la remarque
du juge Blair-Kerr qui déclare: «C'est une chose que d'invoquer
une loi pour l'attribution de droits qui étaient déjà nés avant
l'abrogation de cette loi; c'est une toute autre chose que d'affir-
mer que, sans avoir égard au fait qu'il existe ou non des droits
au moment de l'abrogation, si des formalités de procédure sont
2 [1974] 1 F.C. 186.
3 [1961] A.C. 901.
effectuées avant l'abrogation, le demandeur est alors en droit,
même après l'abrogation, de continuer cette procédure de façon
à déterminer si on lui attribuera un droit qu'il n'avait pas
encore lorsque la procédure a été entamée.
Le juge Thurlow déclare alors [à la page 193]:
A mon avis, rien dans cette citation ne vient étayer la théorie
de l'appelante; au contraire, elle favorise plutôt la conclusion
opposée. Lorsqu'il n'y a pas de droit acquis en vertu de l'article
35c), à mon avis, l'article 35e) ne permet pas d'avoir recours à
la procédure pour créer un droit. Mais lorsqu'il y a, comme
c'est le cas ici à mon avis, un droit acquis au sens de l'alinéa c),
la partie qui y a droit a également le droit de voir la procédure
se poursuivre jusqu'à la fin comme le prévoit l'alinéa e) dans le
but de faire respecter le droit acquis.
L'article 33(1) du Règlement donne manifeste-
ment à la requérante le droit de désigner ses fils en
vue de leur admission au Canada pour résidence
permanente, pourvu qu'ils satisfassent aux exigen-
ces de la Loi et du Règlement. Le paragraphe (4)
de l'article 33 de ce dernier, que la modification
n'a pas atteint, stipule que toute personne nom-
mant un parent désigné s'engage à subvenir aux
besoins de celui-ci pendant cinq ans, à le conseiller,'
le guider et l'aider dans l'accomplissement de ses
devoirs comme résident du Canada. Ces obliga
tions, la requérante les a contractées lorsqu'elle a
procédé sur la formule prescrite à la désignation,
qui a été acceptée.
Il en a résulté pour la requérante un droit né,
mais aussi une obligation à l'égard de chacun de
ses deux fils.
Dans Township of Nepean c. Leikin 4 , le juge
Evans [tel était alors son titre], de la Cour d'appel
de l'Ontario, déclare à la page 572:
[TRADUCTION] Il me semble juste en principe qu'une per-
sonne, qui a acquis certains droits et contracté certaines obliga
tions en conformité de la loi en vigueur à une certaine époque,
ne subisse pas l'effet rétroactif d'une loi portant sérieusement
atteinte à ces droits et à ces obligations, à moins que ladite loi
abrogatrice ne déclare expressément qu'elle sera appliquée de
façon rétroactive.
Il se réfère à l'affaire Hamilton Gell c. White
[1922] 2 K.B. 422, aux pages 431-432, où le lord
juge Atkin, invoquant l'article 38 de la Loi d'in-
terprétation britannique de 1889, 52-53 Vict., c.
63 selon lequel [dans l'article 38(2)], lorsqu'une loi
est abrogée [TRADUCTION] «... l'abrogation
n'aura pas d'effet sur quelque droit, privilège, obli-
4 [1971] 1 O.R.567.
gation ou responsabilité né ou encouru sous le
régime du texte législatif ainsi abrogé», déclare:
[TRADUCTION] Il est manifeste que cette disposition ne vise
pas à préserver les droits abstraits conférés par la Loi abrogée,
tels que par exemple le droit d'indemnité pour les ennuis causés
aux locataires en général en vertu de la Loi de 1908, car s'il en
était ainsi, la Loi abrogatfice serait inopérante. Elle s'applique
seulement aux droits spécifiques accordés à une personne
lorsque l'un ou l'autre des événements spécifiés dans la loi se
produit. Ici, l'événement s'est produit parce que le propriétaire,
en vue de vendre l'immeuble, a donné avis de congé au loca-
taire. Vu ces circonstances, le locataire «a acquis le droit» (qui
est «né» lorsqu'il a quitté son logement) à une indemnité.
L'affaire Abbott c. Minister for Lands [1895] A.C. 425 est
citée à l'appui de la prétention du propriétaire. Elle portait sur
la question de savoir si un homme, qui a acheté certains biens, a
le droit de procéder à l'achat de terres contiguës en vertu des
pouvoirs que la Loi abrogée lui conférait, la Loi abrogatrice
contenant la réserve habituelle. Le Conseil privé a répondu par
la négative. Il a déclaré (1) que «le simple droit (en admettant
qu'il convienne de l'appeler ainsi) imparti aux membres de la
communauté ou d'une catégorie d'entre eux, de profiter d'un
texte législatif sans avoir accompli aucun acte individuel pour
se prévaloir de ce droit, ne peut pas être exactement réputé un
droit né au sens du texte législatif.» Je pense que ces commen-
taires contiennent la proposition que j'ai énoncée ci-dessus.
En l'espèce présente, la requérante a pris des
mesures pour se prévaloir du droit, que le Règle-
ment lui conférait, de désigner ses fils en vue
d'admission au Canada pour résidence permanente
et a contracté les obligations y afférentes.
Récemment, des conclusions semblables ont été
formulées dans Central Mortgage and Housing
Corp. c. Co-operative College Residences, Inc. 5 à
la page 406, où le juge Howland, prononçant
l'arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario, déclare:
[TRADUCTION] En bref, avant l'entrée en vigueur des modi
fications intervenues en 1966, Co-op avait acquis des droits en
vertu de la lettre d'engagement de la SCHL. Ces droits sont nés
lorsque les conditions préalables au prêt énoncées dans la lettre
d'engagement ont été remplies. Toutes les conditions statutaires
relatives au prêt l'étaient déjà. En vertu de l'art. 19(1) 6 de la
Loi d'interprétation du Canada, Co-op avait le droit d'être
protégée contre l'obligation de se conformer aux exigences
complémentaires des modifications de 1966. Vu les droits
acquis par Co-op en vertu de la lettre d'engagement, elle a le
droit d'exiger que le prêt soit conforme aux dispositions législa-
tives en vigueur avant l'adoption des modifications de 1966.
Dans Upper Canada College c. Smith', le juge
Duff, prononçant le jugement de la majorité de la
Cour, déclare aux pages 424-425:
5 13 O.R. (2') 394.
6 Maintenant article 35.
' (1921) 61 R.C.S. 413.
[TRADUCTION] Un droit au sens juridique du terme et non pas
simplement dans le langage courant, mais dans celui de tous les
hommes de loi d'où qu'ils viennent désigne un droit que les
tribunaux protégeront et feront exécuter par tout recours
approprié.
On peut illustrer ce principe en se référant aux lois, qui
accordent ou enlèvent un droit d'appel. Bien entendu, ce droit
d'appel est un droit récursoire et les tribunaux ont été souvent
appelés à décider si une loi, qui donne ou enlève un droit
d'appel, doit être présumée concerner les parties au litige en
cours. Si l'on considère qu'une telle loi régit les procédures
uniquement dans le sens de ladite règle, alors il ne faut pas
restreindre son application aux procédures engagées postérieu-
rement. Dans l'ensemble, les tribunaux ont refusé avec persis-
tance d'adopter ce point de vue. Ils ont statué presque unifor-
mément qu'une telle loi n'appartenait pas à la catégorie de
celles se rapportant exclusivement aux procédures....
J'hésite à conclure que le Règlement modifica-
teur, qui impose à titre d'exigence supplémentaire
un point d'appréciation au moins pour les offres
d'emploi dans la profession, est une simple ques
tion de procédure. Il convient de se rappeler qu'en
l'espèce, ce n'est pas le droit d'Anthony ou de
Gregory Motayne à être admis au Canada qui est
en cause ni leur appréciation ou leur cotation, qui
sont des questions administratives laissées à la
discrétion de l'agent d'immigration et dans lesquel-
les la Cour ne doit pas s'immiscer, mais bien les
demandes visant leur admission à titre de résidents
permanents, présentées par Iris Motayne
McDoom. A mon avis, cette dernière a un droit
acquis à exiger leur examen approfondi sur le
fondement du Règlement en vigueur à la date où
elles ont été acceptées et envoyées à New York aux
fins d'appréciation et, quelle que soit la cause du
retard apporté à cet examen, elles ne peuvent pas
subir le contrecoup défavorable qu'entraînerait la
rétroactivité des nouvelles exigences incorporées
ultérieurement dans le Règlement.
L'intimé se réfère à Director of Public Works c.
Ho Po Sang (précitée) que le juge Thurlow a
commentée et distinguée d'avec la présente cause.
Toutefois, dans ladite affaire, lord Morris of
Borth -y-Gest a fait la déclaration que j'ai déjà
citée à la page 922. J'estime utile de la répéter
partiellement ici:
[TRADUCTION] Il se peut par conséquent qu'en vertu d'un
certain texte législatif abrogé un droit ait été accordé, mais
qu'en ce qui le concerne, une enquête ou une certaine procédure
judiciaire soit nécessaire. Le droit n'est alors pas touché et il est
garanti. Il sera garanti même si l'on doit faire le nécessaire
pour en fixer le quantum.
En l'espèce, l'agent d'immigration n'est pas entiè-
rement libre de décider s'il est souhaitable d'ad-
mettre un parent désigné aux fins de résidence
permanente; il est obligé d'appliquer les règle-
ments pertinents, ce qu'il semble avoir omis de
faire en l'occurrence. Je constate en effet que le
nouveau règlement, entré en vigueur le 22 février
1974, a été appliqué à tort à la demande présentée
le 30 octobre 1973.
L'intimé soulève une objection contre les procé-
dures afférentes aux présentes demandes visant à
obtenir le remède demandé. Mais dans la demande
relative à Anthony, la requérante ne demande pas
seulement un bref de certiorari annulant le refus,
mais aussi un bref de mandamus enjoignant à
l'intimé d'appliquer en l'occurrence le Règlement
en vigueur le 30 octobre 1973 et, au titre de la
Règle 474, de trancher une question de droit: à
savoir que ce Règlement est bien celui qui doit être
appliqué. Dans le cas de Gregory, comme aucune
décision n'a été prise à propos de son admissibilité,
la requérante ne demande pas de bref de certio-
rari. On a simplement conclu qu'en tant qu'étu-
diant, il ne peut être apprécié aux fins de résidence
permanente. Il n'y a donc aucune décision à annu-
ler. Il appert que les demandes abordent la ques
tion sous tous ses aspects et il se peut donc que les
objections de procédure soient de la pure rhétori-
que. Néanmoins, j'en parlerai brièvement. Dans
son manuels, le professeur S. A. de Smith déclare
A la page 110:
[TRADUCTION] On a dit que «la distinction entre une décision
erronée et le défaut d'entendre une cause et de la juger
conformément à la loi, peut être très ténue.» En vérité, cette
distinction est souvent imperceptible, mais elle est importante
car, lorsqu'un tribunal censé trancher une question se dispense,
par suite d'une fausse conception de son devoir, de l'entendre et
de la juger «conformément à la loi», un bref de mandamus est
alors rendu, qui lui enjoint de prendre une nouvelle décision.
A la page 481, il déclare:
[TRADUCTION] De nos jours, le bref de mandamus est princi-
palement octroyé en vue de contraindre les tribunaux inférieurs
(et, en vertu du Courts Act de 1971, la Cour de la Couronne) à
exercer une compétence qu'ils ont déclinée à tort et d'appliquer
les pouvoirs discrétionnaires que la loi leur confère, en confor-
mité des principes juridiques, applicables.
A la page 483, il déclare en se référant au bref de
mandamus:
[TRADUCTION] Il ne consiste pas en général à défaire ce qui a
été fait en contravention de la loi. En outre, il ne semble pas
8 Judicial Review of Administrative Action, 3» éd.
être le bon moyen d'exécution de l'obligation de s'abstenir
d'agir illégalement. Donc, si des pouvoirs publics ou des fonc-
tionnaires menacent d'agir ultra vires, le bon recours pour
éviter d'excéder les pouvoirs conférés par la loi sera une injonc-
tion ou une déclaration et non pas le bref de mandamus. Si un
tribunal inférieur outrepasse sa compétence, une interdiction, et
non pas un bref de mandamus, le contraindra à cesser de ce
faire et le bref de certiorari, et non le bref de mandamus,
l'empêchera d'agir lors de son ordonnance définitive.
et aux pages 485 - 486, il déclare:
[TRADUCTION] ... il n'existe aucune règle universelle selon
laquelle la validité de l'exercice des pouvoirs discrétionnaires
serait assujettie à des constatations de droit et de fait exactes
mais, dans certains cas, des erreurs de droit et de fait manifes-
tes ont été assimilées à un défaut d'entendre et de décider
conformément à la loi et à la raison justifiant l'octroi d'un bref
de mandamus. D'autre part, ledit bref a été fréquemment
employé comme recours contre le mauvais usage des pouvoirs
discrétionnaires eux-mêmes. Bien que les tribunaux aient à
maintes reprises refusé de se reconnaître la moindre compé-
tence pour examiner la sagesse ou le caractère raisonnable de
l'exercice des pouvoirs discrétionnaires, autrement qu'en appel,
ils ont longtemps appliqué les critères jurisprudentiels selon
lesquels l'exercice des pouvoirs discrétionnaires «judiciaires»
doit être mesuré; et, dès l'origine, le bref de mandamus a été
reconnu comme un recours approprié contre certaines formes
d'abus dans l'exercice des susdits pouvoirs. L'obligation d'ob-
server ces principes fondamentaux de légalité dans l'exercice de
tels pouvoirs est, contrairement à «l'obligation» d'appliquer la
loi régulièrement aux constatations de faits, présumée exécuta-
ble par un bref de mandamus. D'où, lorsque les pouvoirs
publics interprètent mal ou appliquent mal leurs pouvoirs dis-
crétionnaires, les exercent à propos d'un objet impropre ou de
façon capricieuse ou en se fondant sur des considérations non
pertinentes ou sans tenir compte des considérations pertinentes,
ils sont réputés avoir complètement omis d'exercer leur compé-
tence ou leurs pouvoirs discrétionnaires, ou omis d'entendre la
cause et de la juger conformément à la loi; un bref de manda-
mus peut alors être rendu pour les contraindre à se conformer à
la loi. Les tribunaux, s'ils doivent rester dans les limites admises
de leur propre compétence, ne peuvent pas ordonner aux pou-
voirs publics compétents d'exercer leurs pouvoirs discrétionnai-
res en faveur du requérant, mais ils peuvent circonscrire ces
pouvoirs en indiquant les facteurs dont il peut légalement être
tenu compte, et si la décision originale est fondée exclusivement
sur un facteur non pertinent, ou si une condition attachée à
l'octroi discrétionnaire d'une licence est jugée non valable, les
pouvoirs publics peuvent très bien être incités à accéder à la
demande lorsqu'elle est renouvelée devant eux.
L'auteur déclare à la page 487:
[TRADUCTION] ... les tribunaux n'accordent qu'avec circons-
pection un bref de mandamus pour défaire ce qui a été fait.
Néanmoins, la tendance à accorder un bref de mandamus plus
facilement qu'un bref de certiorari à titre de recours contre le
mauvais usage des pouvoirs discrétionnaires n'a peut-être pas
encore disparu. En tout cas, s'il y a quelque doute que les
fonctions des pouvoirs publics compétents aient un aspect judi-
ciaire, il est indiqué de demander un bref de mandamus aussi
bien qu'un bref de certiorari.
Passons à la jurisprudence. Dans l'affaire bri-
tannique Regina c. Paddington Valuation Offi
cer 9 , lord Denning, refusant, compte tenu des faits,
d'émettre un bref de certiorari et de mandamus,
déclare à la page 403:
[TRADUCTION] Je dirai que lorsqu'un tribunal ou un orga-
nisme commet une erreur qui touche l'essence même de sa
décision, parce qu'il a abordé l'affaire de façon erronée, il
outrepasse alors sa compétence.
et le lord juge Salmon déclare à la page 419:
[TRADUCTION] Pour qu'un bref de mandamus se justifie, il
faut prouver qu'il a établi la liste illégalement ou de mauvaise
foi, c'est-à-dire qu'en fait il n'a pas exercé son pouvoir discré-
tionnaire et qu'il n'existe donc aucune liste valide. Reg. c.
Cotham, etc., JJ. and Webb; Ex parte Williams [1898] 1 Q.B.
802. En conséquence, la conclusion selon laquelle la liste est
nulle et de nul effet me paraît sous-entendue dans l'ordonnance
de mandamus.
Dans La Reine c. Cotham and Another, Jus
tices, and Wallace and Webb' 0 , évoqué dans la
décision Paddington, le juge Kennedy déclare à la
page 808:
[TRADUCTION] Je ne dis pas que le redressement s'applique
lorsqu'il y a eu simplement une mauvaise interprétation d'une
loi du Parlement; mais lorsque, comme c'est le cas ici, ils n'ont
pas observé la disposition de la loi qui leur donne compétence,
et ont pris en considération des questions qu'ils auraient dû
ignorer, alors ils se sont eux-mêmes assujettis aux pouvoirs
récursoires du bref de mandamus.
Il est facile d'établir une distinction avec l'arrêt
de la Cour suprême Gana c. Le ministre de la
Main-d'œuvre et de l'Immigration", invoqué par
l'intimé, et où le juge Abbott déclare à la page
712:
La décision d'accorder ou de refuser ce statut selon les
prescriptions de la Loi et du Règlement dépend du fonction-
naire à l'immigration au port d'entrée et il s'agit d'une décision
administrative. Elle n'est pas sujette à révision judiciaire ou
autre, si ce n'est par le ministre. Dans nombre de cas, les
immigrants subissent cet examen d'aptitude à l'étranger; si on
les juge admissibles, ils obtiennent un visa les autorisant à
entrer au Canada à titre d'immigrants reçus. Si on leur refuse
cette autorisation, le dossier est fermé. [C'est moi qui souligne.]
Les mots que j'ai soulignés indiquent la distinction
à établir avec la présente action, où j'ai conclu
qu'on a appliqué le mauvais règlement.
9 [1966] 1 Q.B. 380.
10 [1898] 1 Q.B. 802.
n [1970] R.C.S. 699.
Dans La Reine et D. N. McDonell c. Leong Ba
Chai 12 , le bref de mandamus a été émis parce que
l'admission de l'enfant avait été refusée par suite
d'une erreur de droit relative à sa légitimité. Le
bref ordonnait à l'agent d'immigration d'accomplir
un certain acte entrant dans le cadre de son obliga
tion statutaire de déterminer si l'enfant remplissait
autrement les dispositions de la Loi sur l'immigra-
tion. A la page 14, le juge Taschereau déclare:
[TRADUCTION] Ce que l'on demande, ce n'est pas l'admission
au Canada de Ba Chai, mais un examen de sa demande sur la
base de la Loi sur l'immigration, ce qui a été illégalement
refusé.
Voir aussi Smith & Rhuland Limited c. The
Queen on the Relation of Brice Andrews 13 , où un
bref de mandamus a été émis à la suite du refus de
la Commission des relations du travail d'accréditer
le syndicat pour un motif qui n'apparaît pas dans
la loi.
Dans Tsiafakis c. Le ministre de la Main-
d'oeuvre et de l'Immigration 14 , le bref de manda-
mus a ordonné à l'agent d'immigration de fournir
à la requérante le formulaire à remplir pour le
parrainage de ses parents en vue de leur admission
au Canada, bien qu'il fût improbable qu'une fois la
formule remplie, ils soient reconnus admissibles.
La Cour d'appel a confirmé ce jugement dans un
arrêt du 20 janvier 1977 publié à [1977] 2 C.F.
216.
Je me réfère au paragraphe (1) de la Règle 474,
dont voici le libellé:
Règle 474. (1) La Cour pourra, sur demande, si elle juge
opportun de le faire,
a) statuer sur un point de droit qui peut être pertinent pour
la décision d'une question, ou
b) statuer sur un point afférent à l'admissibilité d'une preuve
(notamment d'un document ou d'une autre pièce justifica-
tive),
et une telle décision est finale et péremptoire aux fins de
l'action sous réserve de modification en appel.
Il convient de noter que ce texte donne à la Cour
une entière discrétion et aussi que l'emploi des
termes «d'une question» est peut-être assez large
pour appliquer cette décision à une demande du
genre de celle qui nous occupe. Ce point a été
12 [1954] R.C.S. 10.
13 [1953] 2 R.C.S. 95.
14 [1976] 2 C.F. 407.
discuté dans l'arrêt Jamieson et Lessard c.
Carota' 5 , où la Cour d'appel a conclu que la
question de droit ne pouvait pas être tranchée
d'après le dossier tel qu'il était constitué à l'époque
qu'en tout cas la décision de la Division de pre-
mière instance portant qu'il était inutile de la
trancher à cette date, avait un caractère discré-
tionnaire et qu'aucune raison n'avait été avancée
pour justifier une ingérence dans l'exercice de
cette discrétion. Toutefois, dans un renvoi, le juge
en chef Jackett déclare [à la page 244]:
Normalement, aucune demande visée à la Règle 474 ne devrait,
à mon avis, être présentée avant le dépôt d'une défense; ainsi, la
Cour pourrait statuer sur la question d'opportunité en fonction
des points en litige.
Cela ne s'applique probablement pas au cas qui
nous occupe, où les avocats des deux parties ont
pleinement débattu le point litigieux lors du dépôt
des demandes par la requérante. Toutefois, il n'est
pas vraiment nécessaire de trancher la question de
la non-rétroactivité du nouveau règlement en tant
que question de droit, puisque la décision à cet
effet est implicite dans la conclusion selon laquelle
un bref de mandamus doit être émis pour exami
ner les demandes sur le fondement du Règlement
en vigueur à la date où elles ont été présentées. De
même, comme les brefs de mandamus qui seront
émis en l'espèce ordonneront à l'intimé d'examiner
les requêtes en accord avec le Règlement en
vigueur à cette date, il en ressort implicitement
que la décision contraire afférente à la demande
relative à Anthony doit être nécessairement annu-
lée. Les jugements afférents aux deux demandes
seront rendus en conséquence, ces motifs s'appli-
quant à l'une comme à l'autre.
15 [1977] 2 C.F. 239.
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