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T-1745-77
Springbank Dehydration Ltd. et Seabird Island Farms Ltd. (Demanderesses)
c.
Archie Charles, Harold Peters, Allan Peters et toutes les autres personnes appartenant à cette catégorie de membres de la bande de l'île Seabird, Agassiz, district de Vancouver (Colombie-Britan- nique) et la Reine représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (Défen- deurs)
Division de première instance, le juge Mahoney— Vancouver, les 2 et 3 mai 1977.
Couronne Terres comprises dans la réserve indienne
Bail principal expiré Droits du sous-locataire dans une entente concernant l'échange de certaines terres Demande d'injonction Droit sur les terres en cause nécessaire pour accorder l'injonction Les demanderesses avaient-elles un droit à l'appui de leur demande? Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, c. I-6, art. 28.
Les demanderesses sous-louaient des terres appartenant aux défendeurs. Ces derniers ont conclu avec les demanderesses un accord visant un échange de terres entre elles. Les défendeurs ont subséquemment ratifié cet échange et demandé l'approba- tion du Ministre. A l'expiration du bail principal, la demande- resse Springbank a refusé l'offre par le Ministre d'un nouveau bail, comme il était prévu dans une clause du contrat de sous-location. La bande a refusé d'accorder le bail concernant les terres comprises dans l'échange et ce, malgré la recomman- dation du Ministre; elle a décidé de s'établir à son compte et de remplacer les cultures fourragères des demanderesses par la culture de haricots.
Arrêt: la demande est rejetée. La réclamation des demande- resses repose entièrement sur l'existence d'un droit valide sur les terres Seabird, les terres Springbank et les Terres réunies. La déclaration ne révèle aucun droit semblable et, par consé- quent, l'injonction ne doit pas être accordée. En ce qui concerne les terres Springbank, il appert que le droit de la demanderesse Springbank s'est éteint à l'expiration du bail principal, le 30 septembre 1976, l'offre du Ministre ayant été refusée. Le droit sur les Terres réunies dépend uniquement des effets de l'en- tente, nulle en vertu de l'article 28(1) de la Loi sur les Indiens, et de la résolution ultérieure du Conseil de la bande. Le droit sur les terres Seabird dépend entièrement des effets de la recommandation du Ministre et l'offre de ce dernier à l'égard des terres Seabird, valide pour un an seulement, aurait pu avoir quelque effet en vertu de l'article 28(2) si elle avait équivalu à un permis.
DEMANDE. AVOCATS:
B. K. Atkinson et P. J. Jones pour les demanderesses.
R. E. Eades pour les défendeurs à l'exception de la Reine.
PROCUREURS:
Jestley Kirstiuk, Vancouver, pour les deman- deresses.
Volrich, Eades, Wark & Mott, Vancouver, pour les défendeurs à l'exception de la Reine.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MAHONEY: Les faits allégués dans la déclaration et dans l'affidavit présenté à l'appui de la demande d'injonction provisoire ne sont pas contestés par les défendeurs à l'encontre de qui l'injonction est sollicitée et qui étaient tous repré- sentés à l'audience, soit tous les défendeurs à l'exception de Sa Majesté.
Jusqu'au 30 septembre 1976, les demanderesses sous-louaient au même locataire principal certai- nes terres comprises dans la réserve indienne de l'île Seabird, près de Chilliwack (Colombie-Britan- nique), la demanderesse Springbank environ 400 acres (ci-après appelées les terres Springbank) et la demanderesse Seabird, environ 200 (ci-après appelées les terres Seabird). Aux termes du con- trat de sous-location de Springbank, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien s'enga- geait à accorder, à l'expiration du bail principal, un nouveau bail pour le temps restant à courir dudit contrat de sous-location. Il appert que Sea bird et Springbank gèrent conjointement ces terres et, dans une certaine mesure, les détiennent en copropriété.
Le 26 juin 1976, Springbank et la bande défen- deresse ont convenu par écrit de transférer à Springbank environ 160 acres des terres Seabird en échange d'environ 180 acres des terres Spring- bank, la pièce de terre résultante, louée à Spring- bank, étant dénommée Terres réunies. Le locataire principal a décidé d'abandonner son bail le 30 septembre 1976 et, le 2 septembre 1976, le Minis- tre a fait, conformément à son engagement, une offre valable jusqu'au 29 septembre, de location à Springbank des terres primitivement louées à ce dernier. Le 28 septembre, le Conseil de la bande défenderesse a, par résolution, ratifié, approuvé et confirmé le susdit échange et demandé au Ministre de louer à Springbank les Terres réunies. S'ap-
puyant sur l'entente du 26 juin et la résolution du 28 septembre, Springbank a refusé l'offre du Ministre et de plus, a engagé des dépenses relative- ment aux Terres réunies.
Le 22 mars 1977, le Ministre a informé Seabird qu'il se proposait de recommander à la bande de louer à bail les terres Seabird à celle-ci. Le 5 avril, le Ministre a fait connaître à Seabird le refus de la bande de lui consentir ledit bail. Il semble que le consentement du Ministre au contrat de sous-loca tion de Seabird n'ait jamais été obtenu et que, par conséquent, aucun engagement semblable à celui concernant les terres Springbank n'ait existé à l'égard des terres Seabird.
La bande a décidé de s'établir à son compte sur les terres et d'y remplacer les cultures fourragères par la production de haricots. Vers le 18 avril 1977, un entrepreneur recruté par la bande a commencé à exécuter sur ces terres des travaux qui auraient à coup sûr anéanti les récoltes des demanderesses. Ces dernières ont intenté une action en Cour suprême de la Colombie-Britanni- que et ont obtenu une injonction ex parte interdi- sant la continuation des travaux. Le 2 mai, la Cour suprême a annulé l'injonction au motif qu'elle n'avait pas compétence pour connaître de l'action. Le même jour, les demanderesses ont entamé des procédures devant la présente cour, qui a instruit la demande d'injonction.
Comme je l'ai souligné à la clôture de l'au- dience, je suis convaincu que si la déclaration démontre que les demanderesses ont actuellement un droit sur l'une ou l'autre des terres, l'injonction sera accordée à l'égard de ladite terre.
En ce qui concerne les terres Springbank, il appert que le droit de la demanderesse Springbank s'est éteint à l'expiration du bail principal, le 30 septembre 1976, l'offre du Ministre ayant été refu sée. Le droit sur les Terres réunies dépend unique- ment des effets de l'entente du 26 juin 1976 et de la résolution ultérieure du Conseil de la bande, et le droit sur les terres Seabird, des effets de la recommandation du Ministre.
La Loi sur les Indiens' prévoit que:
28. (1) Sous réserve du paragraphe (2), est nul un acte, bail, contrat, instrument, document ou accord de toute nature, écrit ou oral, par lequel une bande ou un membre d'une bande est censé permettre à une personne, autre qu'un membre de cette bande, d'occuper ou utiliser une réserve ou de résider ou autrement exercer des droits sur une réserve.
(2) Le Ministre peut, au moyen d'un permis par écrit, autoriser toute personne, pour une période d'au plus un an, ou, avec le consentement du conseil de la bande, pour toute période plus longue, à occuper ou utiliser une réserve, ou à résider ou autrement exercer des droits sur une réserve.
En vertu du paragraphe 28(1), l'entente concer- nant les Terres réunies semble évidemment nulle et non avenue. Cette question a fait l'objet d'une jurisprudence trop constante pour être encore sus ceptible d'équivoques malgré le cas d'équité mani- feste. 2 L'entente étant nulle et de nul effet, la résolution l'est également.
L'offre du Ministre concernant les terres Sea bird, valide pour un an seulement, aurait pu avoir quelque effet en vertu du paragraphe 28(2) si elle avait équivalu à un permis; mais elle a été claire- ment exprimée en ces termes: [TRADUCTION] ale ministère est disposé à recommander au Conseil de la bande de proroger, en faveur de votre compa- gnie, le bail pour une durée d'un an....» Cela n'équivaut pas, à mon avis, à un permis, quelle qu'en soit la définition.
La réclamation des demanderesses visant l'ob- tention d'une injonction repose entièrement sur l'existence d'un droit valide sur les terres Seabird, les terres Springbank et les Terres réunies. La déclaration ne révèle aucun droit semblable et, par conséquent, l'injonction ne doit pas être accordée.
' S.R.C. 1970, c. I-6.
2 Ex. Le Roi c. McMaster [1926] R.C.É. 68; Easterbrook c. Le Roi [1931] R.C.S. 210 et Le Roi c. Cowichan Agricultural Society [1950] R.C.E. 448.
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