T-132-76
Jacques Beique (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Walsh—
Montréal, le 12 septembre; Ottawa, le 15 septem-
bre 1977.
Pratique — Action portant sur l'impôt sur le revenu —
Requête pour rayer la mise-en-cause — Aucun redressement
demandé contre la mise-en-cause — Jonction en vertu des
Règles 1715 et 1716 inopérante en raison de l'art. 175(3)a) de
la Loi de l'impôt sur le revenu — Loi de l'impôt sur le revenu,
S.R.C. 1952, c. 148, modifiée par S.C. 1970-71-72, c. 63, art.
175(3)a) — Règles 1715 et 1716 de la Cour fédérale.
La présente requête vise à rayer de l'action la mise-en-cause
au motif que le demandeur l'a constituée partie à l'action et
qu'aucun redressement n'a été demandé contre elle. L'action
porte sur la nouvelle cotisation d'impôt du demandeur née du
fait qu'il a divisé son revenu avec son épouse, la mise-en-cause,
se fondant, pour ce faire, sur leur régime de communauté de
biens. Le demandeur a interjeté appel de cette décision.
L'épouse n'a toutefois pas interjeté appel de la nouvelle cotisa-
tion établie sur son revenu.
Arrêt: la requête de la défenderesse est accueillie. La loi ne
prévoit aucune disposition permettant au demandeur de consti-
tuer son épouse partie à l'appel contre la défenderesse. Bien que
les Règles 1715 et 1716 de la Cour fédérale permettent la
jonction de parties avec la permission de la Cour ou sur
l'ordonnance de cette dernière lorsqu'une même question de
droit touche aux droits et intérêts des personnes qui sont parties
à l'action, il demeure que ces règles ne peuvent s'appliquer en
raison de l'article 175(3)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il
ne peut être question de jonction d'appels puisqu'il n'y a qu'un
appel.
DEMANDE pour rayer la mise-en-cause.
AVOCATS:
Jacques Beique pour le demandeur.
Jean Delage pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Jacques Beique, Montréal, pour le deman-
deur.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Il s'agit d'une requête visant à
obtenir une ordonnance pour mettre hors de cause
Jacqueline Sicotte au motif que le demandeur l'a
illégalement constituée partie sans nécessité puis-
que aucun redressement n'est demandé contre elle.
L'action porte sur la nouvelle cotisation d'impôt du
demandeur pour l'année 1971 au cours de laquelle
il a divisé son revenu entre lui-même et son épouse,
ladite Jacqueline Sicotte, se fondant pour ce faire,
sur leur régime de communauté de biens. Cette
division de revenu a été rejetée par le Ministre qui
a établi d'une part, la nouvelle cotisation de
l'épouse en se fondant sur son revenu personnel
gagné au cours de l'année en cause et d'autre part,
la nouvelle cotisation du demandeur en se fondant
sur le revenu personnel de ce dernier pour cette
même année. Le demandeur a interjeté appel de
cette décision mais cet appel a été rejeté par la
Commission de révision de l'impôt. Il a alors
intenté les présentes procédures. Son épouse, la
mise-en-cause, n'a pas interjeté appel, bien qu'elle
ait un intérêt évident dans la cause. Si l'appel du
demandeur est accueilli, elle sera alors, sans aucun
doute, sujette à une nouvelle cotisation de manière
à refléter le revenu additionnel qui sera alors
réputé avoir été imposable. Cependant, il semble
que la loi ne prévoit aucune disposition visant à
constituer l'épouse du demandeur partie à l'appel
de ce dernier contre la défenderesse, sans la per
mission de la Cour. L'article 175(3)a) de la Loi de
l'impôt sur le revenu se lit comme suit:
175. ...
(3) Un appel interjeté en vertu du présent article est réputé
être une action en Cour fédérale à laquelle s'appliquent la Loi
sur la Cour fédérale et les règles de la Cour fédérale concer-
nant une action ordinaire, sous réserve des règles spéciales
établies relativement à ces appels et sauf que
a) les règles concernant la jonction des parties et des bases
d'actions ne s'appliquent que pour permettre la jonction des
appels introduits en vertu du présent article;
Par conséquent, il est clair que les Règles 1715 et
1716 de la Cour fédérale permettant la jonction de
parties avec la permission de la Cour ou sur l'or-
donnance de cette dernière lorsqu'une même ques
tion de droit touche aux droits et intérêts des
personnes qui sont parties à l'action, ne peuvent
s'appliquer et il n'est nullement question de jonc-
tion d'appels comme l'a mentionné le juge Heald
dans l'arrêt L. & M. Wood Products Ltd., North
Battleford Lumber and Post Sales Ltd., et Glaslyn
Forest Products Ltd. c. M.R.N.' puisqu'il n'y a
' [1972] 2 C.F. 1251.
qu'un appel, Dame Jacqueline Sicotte n'ayant pas
interjeté appel. Il s'agit d'un appel interjeté par le
demandeur de sa nouvelle cotisation et bien qu'une
nouvelle cotisation d'impôt sur le revenu de son
épouse, Dame Jacqueline Sicotte, puisse dépendre,
en grande partie, de l'issue de l'appel, sa nouvelle
cotisation ne fait pas présentement l'objet d'un
appel et n'est pas soumise à cette cour.
L'article 174(3)b) de la Loi de l'impôt sur le
revenu qui se lit comme suit:
174....
(3) Lorsque la Commission de révision de l'impôt ou la Cour
fédérale—Division de première instance, est convaincue que la
décision rendue concernant la question exposée dans une
demande présentée en vertu du présent article influera sur des
cotisations intéressant deux ou plusieurs contribuables à qui
une copie de la demande a été signifiée et qui sont nommés
dans une décision de la Commission ou de la Cour, selon le cas,
elle peut, conformément au présent paragraphe,
b) si un ou plusieurs des contribuables ainsi nommés se sont
pourvus en appel, rendre une décision groupant dans cet ou
ces appels les parties appelantes comme elle le juge à propos.
aurait pu s'appliquer s'il avait été question, en
l'espèce, d'un renvoi par le Ministre devant la
Cour conformément à l'article 174(1) mais cela
n'est pas le cas en l'espèce. Même si de telles
procédures avaient été intentées, l'intervention de
la Cour serait obligatoire pour que celle-ci puisse
exercer son pouvoir discrétionnaire afin de rendre
une décision sur l'opportunité de constituer Dame
Jacqueline Sicotte partie aux procédures. Le juge
Heald a déclaré dans l'arrêt L. & M. Wood (pré-
cité) à la page 1255:
La loi vise chaque année d'imposition distincte et chaque
contribuable distinct. Chaque cotisation annuelle constitue, il
me semble, une cause d'action distincte. Le but des procédures
d'appel qu'expose la loi est d'arriver à une décision sur les
questions qui se sont élevées entre un contribuable déterminé et
le ministre du Revenu national à propos de son assujettissement
que prévoit la loi au titre d'une année d'imposition déterminée.
Par conséquent, la requête de la défenderesse est
accueillie et Dame Jacqueline Sicotte est mise hors
de cause et il est ordonné que l'intitulé soit rectifié
en conséquence.
ORDONNANCE
La requête de la défenderesse est accueillie avec
dépens, Dame Jacqueline Sicotte est mise hors de
cause et l'intitulé est rectifié en conséquence.
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