T-415-76
Ron MacKenzie (Requérant)
c.
Busy Bee Enterprises International Ltd. (Intimée)
Division de première instance, le juge Mahoney—
Vancouver, le 23 novembre; Ottawa, le 22 décem-
bre 1976.- --
Marques de commerce--Demande aux fins de biffer deux
inscriptions du registre—La première marque de commerce
était-elle enregistrable? La deuxième marque de commerce
peut-elle exister par elle-même? Intérêt public—Loi sur les
marques de commerce, S.R.C. 1970, c. T-10, art. 57(1).
Le requérant sollicite une ordonnance portant que deux
inscriptions soient biffées du registre des marques de commerce
au motif qu'elles n'expriment ou ne définissent pas exactement
les droits de leur propriétaire.
Arrêt: la demande est accueillie. La première marque de
commerce couvre les services seulement et, n'étant pas distinc
tive des services offerts par le propriétaire, n'était pas enregis-
trable et doit être radiée. La deuxième marque de commerce,
en autant qu'elle se rattache aux services offerts par le proprié-
taire, ne peut exister par elle-même si la première masque est
radiée puisque cela constituerait un monopole portant sur le
trafic de la marque de commerce elle-même, ce qui est con-
traire à l'intérêt public.
DEMANDE aux fins de radier des marques de
commerce.
AVOCATS:
T. D. Devitt pour le requérant.
D. A. Race pour l'intimée.
PROCUREURS:
Barbeau, McKercher, Collingwood & Hanna,
Vancouver, pour le requérant.
Goldman, Kemp & Craig, Vancouver, pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: En vertu de l'article 57(1)
de la Loi sur les marques de commerce, le requé-
rant sollicite une ordonnance portant que les ins
criptions des numéros 183,692 et 195,822 soient
biffées du registre des marques de commerce au
motif qu'elles n'expriment ou ne définissent pas
exactement les droits existants du propriétaire ins-
crit, l'intimée. On doit déterminer ce fait à la date
de la demande, soit le 27 janvier 1976; cependant,
un des motifs donnant lieu à une telle conclusion
est qu'au départ, la marque de commerce n'était
pas enregistrable.
L'enregistrement de la marque de commerce n°
183,692 a été demandé par Garfin & Wener
Enterprises Ltd. le 16 juin 1971. Cette compagnie,
ci-après appelée G & W, a vendu à"l'intimée tous
ses droits dans la marque de commerce le 17 mars
1972. L'enregistrement n° 183,692 émis le 9 juin
1972 couvre l'expression BUSY BEE ONE HOUR
CLEANERS en relation avec des services seule-
ment. On a renoncé au droit à l'usage exclusif des
trois derniers mots mais non à la marque de
commerce. Les services pour lesquels elle a été
enregistrée sont: «nettoyer, presser, teindre, blan-
chir et repriser des vêtements, tissus, articles et
ameublements de maisons».
La marque de commerce 195,822 demandée par
l'intimée le 21 septembre 1972 et enregistrée le 30
novembre 1973 couvre l'expression busy bee I
Hour Cleaners et un sténogramme représentant
une abeille pour distinguer les biens et les services.
On a renoncé à l'usage exclusif du chiffre et des
mots «1 Hour Cleaners» mais non à la marque de
commerce. Les services pour lesquels elle a été
enregistrée sont: «l'octroi de licences, baux, conces
sions ou franchises à d'autres pour nettoyer, pres-
ser, teindre, blanchir et repriser des vêtements,
tissus, articles et ameublements de maisons». Il
n'est pas nécessaire d'énumérer en détail les biens
que l'enregistrement n° 195,822 distingue; aucune
preuve quelconque n'a été produite relativement à
ces biens au soutien de la demande qui portait sur
la marque de commerce.
L'intimée a été constituée en corporation le 21
juin 1966 sous le nom de Busy Bee Enterprises
Ltd. et a dûment adopté son nom corporatif actuel
le 2 avril 1970. Dès le début, elle s'est activement
lancée dans l'ouverture de magasins de nettoyage à
sec en Colombie-Britannique. Son mode d'opéra-
tion avouée est de vendre un établissement une fois
qu'il est établi et, par contrat, de consentir une
franchise à l'acheteur.
La preuve laisse croire que l'intimée et G & W
étaient, en quelque sorte, liées; certains de leurs
dirigeants étaient les mêmes; cependant, la relation
précise n'est pas dévoilée. L'intimée a vendu ses
cinq premiers établissements à G & W en 1966.
Elle lui en a vendu cinq autres avant septembre
1969. Elle en a aussi vendu directement à des tiers.
G & W a vendu à son tour des établissements ou
des intérêts dans des établissements à des tiers.
Dans le cas des établissements de G & W, la
propriété réelle de chacun paraît sans aucun doute
avoir été confiée à une entité corporative distincte
qui, au début, était sans aucun doute une filiale
exclusive de G & W et les tiers acquéraient leurs
intérêts en achetant des actions des filiales de G &
W.
Bien avant la demande de G & W qui a conduit
à l'enregistrement de la marque de commerce n°
183,692, soit G & W soit l'intimée ou les deux
avaient permis à un certain nombre de tiers d'utili-
ser les mots «Busy Bee» dans une diversité de
combinaisons en rapport avec l'exploitation de
leurs établissements de nettoyage à sec. La marque
de commerce n'était pas distinctive des services
offerts par G & W lorsque cette dernière a fait la
demande d'enregistrement et n'était pas alors
enregistrable; elle doit être radiée.
A vrai dire, comme le prétend l'intimée, il n'y a
aucune preuve satisfaisante que quelqu'un, autre
que l'intimée, a utilisé la marque de commerce n°
195,822 en relation avec les services qu'elle couvre,
soit l'octroi de licences etc., pour l'exploitation
d'établissements de nettoyage à sec. Ceci dit, je ne
pense pas que la marque n° 195,822, dans la
mesure où elle se rattache à ces services, peut
exister par elle-même si la marque n° 183,692 est
radiée. Un monopole d'utilisation des mots «Busy
Bee» en relation avec l'octroi de licences, baux,
franchises et ainsi de suite d'établissements de
nettoyage à sec, lorsque le même monopole n'exis-
te pas relativement aux services offerts au public
par ces établissements, n'est rien d'autre qu'un
monopole portant sur le trafic de la marque de
commerce elle-même et est nul puisque contraire à
l'intérêt public.
En conséquence, la marque de commerce n°
183,692 sera radiée du registre et l'inscription de
la marque de commerce n° 195,822 sera modifiée
par la suppression des services pour lesquels elle a
été enregistrée. Il est juste, dans les circonstances,
que chaque partie supporte ses propres frais.
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