T-2029-76
La Reine, ex relatione William Gilbey et Marjorie
Steffensen, en leur propre nom et au nom de
certains membres du Grain Services Union
(C.T.C.) et Grain Services Union (C.T.C.)
(Requérants)
c.
J. Stuart Gunn, un commissaire nommé conformé-
ment aux dispositions du Code canadien du tra
vail, Saskatchewan Wheat Pool et Manitoba Pool
Elevators (Intimés)
Division de première instance, le juge en chef
adjoint Thurlow—Ottawa, les 8, 9 et 17 juin 1976.
Relations de travail—Nomination d'un commissaire afin
qu'il enquête sur des questions concernant les employés des
compagnies intimées La requête vise à interdire au commis-
saire de poursuivre son enquête pour défaut de compétence et
demande l'émission d'un bref de quo warranto enjoignant au
commissaire d'établir sur quelle autorité il se fonde pour
exercer les fonctions d'une commission d'enquête relative à la
négociation collective entre les parties—Le commissaire est-il
partial?—Code canadien du travail, S.R.C. 1970, c. L-1, art.
27(3)a), 29, 30, 32, 32.1, 62 et 110(1).
Le gouverneur en conseil a institué une commission d'en-
quête afin d'étudier les devoirs etc. d'une catégorie d'employés
travaillant pour des élévateurs à grain ruraux en vue de déter-
miner si les articles 29 et 30 du Code canadien du travail, sans
modification, nuiraient injustement aux intérêts des employés,
causeraient ou causent un grave préjudice aux compagnies
exploitant des élévateurs et si ces employés devraient être
dispensés de l'application des articles 29, 30 et 32. Comme
principal motif à l'appui de leur demande de redressement les
requérants prétendent que puisque le syndicat requérant a été
accrédité pour négocier au nom des employés des compagnies
intimées, les termes et conditions de leur emploi (y compris la
durée du travail) sont assujettis aux dispositions relatives à la
négociation collective de la Partie V du Code. On soutient
également que les Parties III et V du Code sont contradictoires
dans leur ensemble à l'égard des employés pour lesquels un
agent a été accrédité et qu'advenant une modification des
règlements édictés sous l'empire de la Partie III, l'employeur
pourrait fort bien se trouver en violation de la Partie V pour
défaut de participer à la négociation collective. On prétend en
outre que l'article 110(1) confère le droit à la négociation
collective et que la Loi devrait être interprétée de façon à
protéger ce droit. En second lieu, les requérants allèguent qu'en
rencontrant les représentants des compagnies d'élévateurs en
l'absence des représentants du syndicat, le commissaire a
adopté une conduite qui soulève une crainte justifiée de partia-
lité. On a avancé que le rôle de la commission est de nature
judiciaire ou quasi judiciaire parce que les recommandations
peuvent affecter les droits des parties et parce qu'elle a les
pouvoirs d'un commissaire en vertu de la Loi sur les enquêtes
pour contraindre les témoins à comparaître et à témoigner sous
serment. Même si une enquête n'est jamais judiciaire ou quasi
judiciaire, les requérants soutiennent que les principes de la
justice naturelle exigent une audition impartiale.
Arrêt: la requête est rejetée. (1) Autant que possible, la Loi
doit être interprétée de façon à éviter toute contradiction; la
Cour conclut que les Parties III et V ne sont pas contradictoi-
res. L'article 27 définit le champ d'application de la Partie III
en des termes assez larges pour couvrir toutes les activités des
compagnies intimées. Le Code ne contient aucune disposition
spécifique soustrayant du champ d'application de la Partie III
les activités des compagnies intimées ou les activités pour
lesquelles les employés ont généralement des agents négocia-
teurs accrédités en vertu de la Partie V. En outre, l'article 28
révèle clairement que le Parlement entendait faire prévaloir les
dispositions de la Partie III et le droit général du territoire tout
en permettant aux employés de s'engager par contrat afin
d'obtenir de meilleures conditions relatives à la durée du travail
que celles prévues à la Partie III. Les articles 29, 30 et 32 ne
prescrivent pas la durée du travail de façon définitive mais
prévoient simplement la durée maximum du travail; sous
réserve de cette restriction, les employés ou leurs agents peu-
vent conclure un contrat relatif aux conditions et à la durée du
travail. En outre, rien dans la Partie V n'indique que l'on doit
considérer que le droit de négocier collectivement prévaut et
l'emporte sur les dispositions de la Partie III concernant la
durée du travail (articles 29 et 30) ou sur les règlements édictés
en vertu de la Partie III (article 32.1). De plus, rien dans
l'article 110(1) n'étaye cette allégation; les modifications des
règlements édictés en vertu de la Partie III sont faites par le
gouverneur en conseil et ne pourraient en elles-mêmes mettre
l'employeur en état de violation de son obligation légale de
participer à la négociation collective avec l'agent de ses
employés. (2) Bien qu'il ait été considéré que l'enquête prévue à
l'article 32.1(2) à titre d'étape préliminaire à l'exercice par le
gouverneur en conseil des pouvoirs conférés à l'article 32.1(1)
n'était pas de nature judiciaire ni quasi judiciaire et ne devait
pas obligatoirement être conduite comme s'il existait un lis
entre les parties ou comme s'il s'agissait d'une procédure
soumise à la règle audi alteram partem, l'affaire n'a pas été
tranchée sur ce point et a été traitée comme s'il s'agissait d'une
enquête quasi judiciaire soumise à la règle. Celle-ci accorde
tout au plus aux requérants le droit de prendre connaissance
des documents communiqués au commissaire par les autres
parties et d'avoir la possibilité suffisante et raisonnable d'y
répondre. Il appartenait au commissaire de déterminer la pro-
cédure à suivre et, dans la mesure où il respectait le principe
accordant aux parties une possibilité suffisante de corriger ou
de contredire toute déclaration pertinente portant préjudice à
leur cause, rien ne l'empêchait d'entendre les parties intéressées
séparément. Le commissaire n'a violé aucune règle de droit en
assistant à la réunion et rien dans la preuve n'indique que ces
discussions ont influencé le commissaire ou ont été à l'origine
de ses conclusions sur le fond de l'affaire. Et même si le
syndicat a exprimé son inquiétude au sujet de la tenue de cette
réunion à son insu, la preuve ne révèle pas qu'il a demandé au
commissaire de lui faire part des propos tenus à la réunion afin
d'avoir la possibilité d'y répondre.
Arrêt appliqué: Board of Education c. Rice [1911] A.C.
179. Distinction faite avec les arrêts: Guay c. Lafleur
[1965] R.C.S. 12 et Committee for Justice and Liberty c.
L'Office national de l'énergie (1976) 9 N.R. 115.
REQUÊTE.
AVOCATS:
G. K. Randall pour les requérants.
L. P. Chambers et D. F. Friesen pour l'intimé
Gunn.
W. J. Vancise pour l'intimée Saskatchewan
Wheat Pool.
E. W. Olson pour l'intimée Manitoba Pool
Elevators.
PROCUREURS:
Goldenberg, Taylor & Tallis, Saskatoon,
pour les requérants.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé Gunn.
Balfour, Moss, Milliken, Laschuk, Kyle,
Vancise & Cameron, Regina, pour l'intimée
Saskatchewan Wheat Pool.
Scarth, Simonsen & Company, Winnipeg,
pour l'intimée Manitoba Pool Elevators.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT THURLOW: Il s'agit
d'une demande en vue d'obtenir:
(1) une ordonnance enjoignant à l'intimé, J.
Stuart Gunn, de cesser toutes les procédures
relatives à la commission d'enquête instituée en
vertu des dispositions du Code canadien du tra
vail, S.R.C. 1970, c. L-1, pour faire enquête sur
des questions concernant les employés des inti-
mées, Saskatchewan Wheat Pool et Manitoba
Pool Elevators (ci-après appelées «les compa-
gnies intimées»), au motif que ledit J. Stuart
Gunn n'a pas compétence pour entendre et tran-
cher les questions exposées au document lui
conférant les pouvoirs d'une commission d'en-
quête en vertu du Code canadien du travail et
(2) une ordonnance prévoyant l'émission d'un
bref de quo warranto, enjoignant audit J. Stuart
Gunn d'établir de quelle autorité il se prévaut
pour exercer les fonctions d'une commission
d'enquête relativement à des questions relevant
de la négociation collective entre le requérant et
les intimées, Saskatchewan Wheat Pool et
Manitoba Pool Elevators.
Les questions sur lesquelles la commission a été
chargée de faire enquête sont énoncées au docu
ment attestant la nomination dont voici le texte:
[TRADUCTION] NOMINATION D'UNE COMMISSION D'EN-
QUÊTE
Le ministre du Travail, conformément à l'article 62 du Code
canadien du travail, confère par la présente à J. Stuart Gunn,
de la ville de Winnipeg, de la province du Manitoba, les
pouvoirs d'une commission d'enquête, afin de déterminer quels
sont les devoirs, fonctions et responsabilités d'une catégorie
d'employés appelés «directeurs d'élévateurs à grain ruraux» ou
«agents d'élévateurs à grain ruraux» engagés aux fins de l'ex-
ploitation d'élévateurs à grain ruraux, servant principalement à
recevoir le grain des producteurs des provinces de l'Ontario, du
Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta et de la Colombie-
Britannique, à des fins d'entreposage ou d'expédition ou les
deux. Le commissaire présentera ses conclusions et ses recom-
mandations sur les questions de savoir si
a) les dispositions relatives aux heures de travail, aux articles
29 et 30 de la Partie III du Code canadien du travail, sans
modification,
(i) nuiraient injustement aux intérêts des employés;
(ii) causeraient ou causent un grave préjudice à l'exploita-
tion des compagnies d'élévateurs à grain ruraux;
b) ces employés devraient être dispensés de l'application de
l'un ou plusieurs des articles 29, 30 et 32.
Ladite commission pourra, selon qu'elle le juge nécessaire ou
souhaitable, retenir les services de comptables, ingénieurs, con-
seillers techniques ou d'autres experts, commis, sténographes ou
assistants pour l'aider à accomplir ses fonctions de commission
d'enquête.
DEVANT TÉMOIN, le ministre du Travail a signé la présente et y
a apposé le sceau du ministère à Ottawa, le 12 novembre 1975.
Les articles 29, 30, 32 et 62 du Code canadien
du travail, mentionnés dans la nomination, de
même que l'article 32.1 relèvent de la Partie III du
Code. En voici le texte:
29. (1) Sauf les dispositions contraires de la présente Divi
sion, la durée du travail d'un employé ne doit pas dépasser huit
heures par jour ni quarante heures par semaine. Sauf les
dispositions contenues dans la présente Division ou édictées
sous son régime, aucun employeur ne doit faire travailler un
employé, ni permettre qu'il travaille, plus de huit heures par
jour ni plus de quarante heures par semaine.
(2) Si la nature du travail dans un établissement industriel
nécessite une répartition irrégulière de la durée du travail d'un
employé, on peut, de la manière et dans les circonstances
prévues par les règlements, faire en sorte que la durée moyenne
du travail de deux semaines ou plus corresponde à la durée
normale du travail journalier ou du travail hebdomadaire.
(3) Dans une semaine où tombe un jour férié qui, selon la
Division IV, donne à un employé droit à un congé payé dans
cette semaine, l'employé ne doit pas travailler plus de trente-
deux heures pendant cette semaine. Aux fins du présent para-
graphe, en évaluant la durée du travail effectué par un employé
au cours d'une telle semaine, il ne sera tenu compte ni des
heures de travail qu'il a fournies ce jour férié, ni du temps
pendant lequel il était à la disposition de son employeur ce jour
férié.
30. (1) Un employé peut être employé au-delà de la durée
normale du travail. Cependant, sous réserve des articles 33 et
34 et des règlements établis en application de l'article 32.1, la
durée totale du travail qu'il peut accomplir au cours d'une
semaine ne doit pas dépasser quarante-huit heures ou le nombre
d'heures moindre que peuvent prescrire les règlements comme
durée maximum du travail dans l'établissement industriel au
compte duquel il est employé.
(2) Le paragraphe 29(2) s'applique au calcul de la durée
maximum de la semaine de travail que prescrit le présent
article.
32. L'employé auquel il est enjoint ou permis de travailler
au-delà de la durée normale du travail doit, sous réserve des
règlements établis en application de l'article 32.1, être rému-
néré pour les heures, supplémentaires selon un taux non infé-
rieur à son taux normal de salaire majoré de cinquante pour
cent.
32.1 (1) Le gouverneur en conseil peut établir des
règlements
a) adaptant les dispositions des articles 29 et 30 afin d'appli-
quer la présente Division aux catégories d'employés y spéci-
fiées dont le travail est lié ou rattaché à la marche d'un
établissement industriel y spécifié lorsque, à son avis, l'appli-
cation de ces articles sans adaptation
•
(i) nuirait ou nuit injustement aux intérêts des employés
de ces catégories, ou
(ii) causerait ou cause un grave préjudice à la marche de
l'établissement industriel;
b) dispensant toute catégorie d'employés y spécifiée de l'ap-
plication de l'un ou plusieurs des articles 29, 30 et 32
lorsqu'il est convaincu que ces articles ne peuvent raisonna-
blement être appliqués à cette catégorie d'employés;
c) prévoyant que l'article 32 ne s'applique pas aux cas dans
lesquels sont suivies des pratiques de travail spécifiées dans
les règlements et qui, à son avis, rendent l'application de cet
article soit déraisonnable, soit inéquitable; et
d) prévoyant le calcul des heures de travail effectuées par les
employés d'une catégorie quelconque qui travaillent dans un
établissement industriel ou une catégorie d'établissements
industriels y spécifiés.
(2) Aucun règlement ne peut être établi en application de
l'alinéa (1)a) ou b) si le Ministre n'a pas, en application de
l'article 62, fait faire une enquête relative au travail d'employés
susceptibles d'être touchés par ses dispositions et reçu un
rapport de la ou des personnes nommées pour procéder à
l'enquête.
62. (1) Le Ministre peut, pour l'une des fins de la présente
Partie, faire faire une enquête relative ou connexe à l'emploi
dans tout établissement industriel. Il peut nommer une ou
plusieurs personnes qui y procéderont.
(2) Une personne nommée conformément au paragraphe (1)
possède et peut exercer tous les pouvoirs d'une personne
nommée commissaire en vertu de la Partie I de la Loi sur les
enquêtes.
Voici les principaux moyens invoqués lors de
l'examen de la requête pour contester le pouvoir de
Gunn d'exécuter son mandat:
(1) puisque le syndicat requérant a été accrédité
en vertu de la Partie V du Code canadien du
travail comme agent négociateur des personnes
employées par les deux compagnies d'élévateurs
intimées, les termes et conditions de leur emploi,
y compris la durée de leur travail, sont assujettis
aux dispositions relatives à la négociation collec
tive de la Partie V de la Loi et ne sont plus régis
par l'article 32.1 en vertu duquel ils pourraient
être modifiés par règlements édictés sous l'em-
pire de cette article, et
(2) il existe une crainte justifiée de partialité du
commissaire.
Dans sa plaidoirie, l'avocat de Gunn a traité de
ces arguments; il a également formulé des objec
tions à la demande de bref de quo warranto,
alléguant notamment que la Couronne n'est pas
valablement partie à l'action. L'avocat des compa-
gnies intimées n'a présenté aucune argumentation
quant au fond mais a demandé à la Cour, par
requête, de rejeter la demande instituée contre les
compagnies intimées aux motifs qu'elle ne révèle
aucune cause d'action, qu'aucune demande de
redressement ne leur a été faite et que la Cour
n'était pas compétente pour émettre contre elle un
bref de prohibition. Ayant conclu au rejet de la
demande comme non fondée, il ne me semble pas
nécessaire de statuer sur ces objections.
Selon la thèse invoquée par l'avocat des requé-
rants à l'appui du premier motif d'opposition, la
durée du travail, semble-t-il, relève des termes et
conditions d'emploi et lorsqu'un agent négociateur
a été accrédité en vertu de la Partie V du Code
canadien du travail, ces termes ne peuvent plus
être modifiés que par la négociation collective
conformément à la Partie V qui prévaut contre la
Partie III dans le cas des employés à l'égard
desquels un agent négociateur a été accrédité,
puisqu'elle est postérieure à cette dernière. On a
soumis à l'appui de cette thèse que la Partie III et
la Partie V sont contradictoires dans leur ensemble
à l'égard des employés pour lesquels un agent
négociateur a été nommé et qu'advenant une modi
fication des règlements édictés sous l'empire de la
Partie III, l'employeur pourrait fort bien se trouver
en violation de la Partie V pour défaut de négocia-
tion collective. On a également avancé que le
paragraphe 110(1)' confère un droit à la négocia-
tion collective et que la Loi devrait être interprétée
de façon à protéger ce droit.
A mon avis, autant que possible une loi doit être
interprétée de façon à éviter toute contradiction
interne et, après avoir examiné la Loi à la lumière
de ce principe, je conclus que les Parties III et V
de la Loi ne sont pas contradictoires. L'article 27
définit le champ d'application de la Partie III en
des termes assez larges pour couvrir les activités
des compagnies intimées. D'ailleurs les parties à
l'action semblent s'entendre sur ce point. On ne
soutient pas non plus qu'une disposition spécifique
du Code soustrait du champ d'application de la
Partie III les activités des compagnies intimées ou
les activités pour lesquelles les employés ont géné-
ralement des agents négociateurs accrédités en
vertu de la Partie V. Les documents soumis à la
Cour révèlent qu'on peut se demander si l'article
27(3)a) dispense de l'application de la Partie III
les employés des compagnies intimées appelés
directeurs ou agents, mais cette question n'a pas
été soulevée en l'espèce. De plus, l'article 28
prévoit:
28. (1) La présente Partie s'applique nonobstant toute autre
loi ou quelque coutume, contrat ou accord établi avant ou après
le 1" juillet 1965. Cependant, rien dans la présente Partie ne
doit s'interpréter comme atteignant les droits ou avantages qu'a
acquis un employé aux termes de quelque loi, coutume, contrat
ou accord et qui lui sont plus favorables que ceux que la
présente Partie lui attribue.
(2) Rien dans la présente Partie n'autorise l'exécution d'un
travail dominical que la loi interdit.
A mon avis, cet article révèle clairement que le
Parlement entendait faire prévaloir les dispositions
de la Partie III et le droit général du territoire tout
en permettant aux employés d'obtenir par contrat
de meilleures conditions relatives à la durée du
travail que celles prévues à la Partie III.
De plus, il semble que les articles 29, 30 et 32 ne
prescrivent pas la durée du travail de façon défini-
' 110. (1) Tout employé est libre d'adhérer au syndicat de
son choix et de participer à ses activités licites.
tive mais prévoient simplement la durée maximum
du travail qu'un employeur est en droit de deman-
der ou de convenir par contrat avec un employé
éventuel. Sous réserve de ces restrictions, l'em-
ployé ou son agent négociateur peut conclure un
contrat relatif à la durée du travail avec l'em-
ployeur. En outre, à mon avis, rien dans la Partie
V n'indique que l'on doit considérer que le droit de
négocier collectivement au sujet de la durée du
travail et la procédure visant à garantir la négocia-
tion collective prévalent et l'emportent sur les dis
positions de la Partie III concernant la durée du
travail, c.-à-d. les articles 29 et 30, ou sur l'article
32.1 de la Partie III, qui permet de déroger aux
articles 29, 30 et 32.
En dernier lieu, rien dans le paragraphe 110(1)
n'étaye l'allégation des requérants et j'estime évi-
dent que les modifications des règlements édictés
en vertu de la Partie III, qu'elles soient demandées
ou réclamées par un employeur, doivent être effec-
tuées par le gouverneur en conseil et non par
l'employeur et qu'elles ne peuvent en elles-mêmes
mettre l'employeur en état de violation de son
obligation statutaire de participer à la négociation
collective avec l'agent négociateur de ses employés.
La prétention des requérants est donc rejetée.
L'allégation de crainte justifiée de partialité de
la commission est fondée sur les circonstances
suivantes:
Vers le 28 novembre 1975, le syndicat requérant
a reçu du ministère de la Main-d'oeuvre une lettre
l'informant de la nomination de la commission et
contenant une copie de cette nomination. Le syndi-
cat a également reçu dans le même courrier, une
lettre de Gunn dont voici le texte:
[TRADUCTION] COMMISSION D'ENQUÊTE
Le 19 novembre 1975
Grain Services Union
202-1810 rue Albert
REGINA (Saskatchewan)
S4P 2S8
Messieurs,
Il semble que le sous-ministre du Travail vous ait informés de
ma nomination en qualité de commissaire enquêteur pour étu-
dier les fonctions et la durée du travail des directeurs d'éléva-
teurs à grain.
Je souhaiterais prendre connaissance de vos observations à ce
sujet, que vous voudrez bien me faire tenir sous forme de
rapport écrit dans les 3 semaines qui viennent.
Je vous informerai des temps et lieu des audiences. S'il n'est pas
jugé nécessaire de tenir des audiences publiques, tous les rap
ports vous seront distribués.
Veuillez adresser votre correspondance et les copies du rapport
au secrétaire de la commission, Mn' J. A. Weinman, bureau
914, au Sir Wilfrid Laurier, 340 ouest rue Laurier, Ottawa
(Ontario), K1A 0J2. Vous pouvez joindre Mme Weinman au
997-3010.
La nomination d'une commission d'enquête a
étonné le syndicat requérant qui ne savait pas que
les compagnies d'élévateurs avaient saisi le Minis-
tère de la question. Les paragraphes 13 et suivants
de l'affidavit de W. G. Gilbey, déposé à l'appui de
la requête, traitant de questions concernant le
commissaire, disent que:
[TRADUCTION] 13. Avant le 28 novembre 1975, date de récep-
tion desdites lettres, le syndicat requérant ne savait pas que des
discussions relatives à la durée du travail avaient été engagées
entre les représentants du Saskatchewan Wheat Pool, du
Manitoba Pool Elevators et les fonctionnaires de la section des
normes du travail du ministère du Travail du Canada. En
outre, le syndicat requérant n'était pas au courant de la nomi
nation de ladite commission d'enquête et n'a pas été consulté à
ce sujet avant la nomination. Avant de recevoir lesdites lettres,
le syndicat requérant a négocié de bonne foi avec les représen-
tants du Saskatchewan Wheat Pool et du Manitoba Pool
Elevators relativement aux questions mentionnées dans la
nomination de ladite commission et croyaient qu'il en était de
même de la part des compagnies.
14. Après réception des lettres susmentionnées, j'ai rencontré le
8 décembre 1975, Regina (Saskatchewan), l'intimé, GUNN, et
un certain Phillip Ponting, avocat de Saskatchewan Wheat Pool
et de Manitoba Pool Elevators et de certaines autres compa-
gnies de grain. Peu après, j'ai téléphoné audit Ponting pour lui
demander des copies de toute la correspondance échangée par
Ponting, à titre d'avocat de Saskatchewan Wheat Pool et de
Manitoba Pool Elevators, et le ministère du Travail du Canada.
Ponting m'a répondu que le directeur du personnel de Sas-
katchewan Wheat Pool, un certain Metro Kereluke, avait
demandé de ne pas divulguer cette correspondance avant qu'il
ait pu en discuter avec d'autres compagnies de grain.
16. Vers le 18 décembre 1975, l'intimé, GUNN, m'a téléphoné
pour me convoquer à une réunion à Winnipeg les 12 et 13
janvier 1976. Au cours de cette conversation, je lui ai demandé
de remettre au syndicat les copies de toute la correspondance
échangée par les compagnies susmentionnées et le ministère du
Travail du Canada. L'intimé, GUNN, m'a répondu qu'il devait
obtenir l'autorisation du sous-ministre du Travail avant de
divulguer ces documents.
17. Vers le 23 décembre 1975, j'ai reçu de l'intimé GUNN, la
copie d'une lettre de Ponting datée du 8 août 1975 et adressée à
T. M. Eberlee, qui traitait de la durée du travail des agents
d'élévateurs ruraux. Vous trouverez ci-annexée et marquée
pièce «Ku une photocopie conforme de ladite lettre. Ledit
syndicat n'avait pas reçu de copie de la lettre avant cette date et
en ignorait l'existence.
18. Le 12 janvier 1976, j'ai assisté à une réunion à Winnipeg
avec l'intimé GUNN et ledit Ponting. Marjorie Steffensen,
secrétaire gérante adjointe du Grain Services Union, et Gwen
Randall, avocate du syndicat, m'accompagnaient. A cette réu-
nion, j'ai soutenu que les compagnies intimées avaient discuté
de la durée du travail avec les fonctionnaires du ministère du
Travail du Canada sans nous en avoir fait part et que ces
discussions avaient donné lieu à la nomination de la commission
d'enquête sans nous en informer ni nous consulter. J'ai égale-
ment déclaré qu'à notre avis, ladite Commission s'immisçait
dans la négociation collective en cours entre le syndicat et
lesdites compagnies. J'ai ajouté que nous pensions que si le
Ministre avait connu tous les aspects de la situation, il n'aurait
peut-être pas nommé une commission d'enquête. En réponse,
Ponting a admis au nom desdites compagnies que si le Ministre
avait connu tous les faits, il n'aurait peut-être pas institué une
commission d'enquête mais il a soutenu qu'à son avis la Com
mission devait tout de même procéder à l'enquête.
19. A la suite d'autres discussions, l'intimé, GUNN, a lui aussi
déclaré qu'il pensait que, dans les circonstances, la commission
n'aurait pas dû être instituée et il a proposé que tous les
représentants se rendent à Ottawa en vue de soumettre l'affaire
à Eberlee, sous-ministre du Travail.
20. Le 13 janvier 1976, Marjorie Steffensen, Gwen Randall et
moi-même avons rencontré à Ottawa ledit T. M. Eberlee,
sous-ministre du Travail. Ponting et GUNN, de même que
plusieurs fonctionnaires du ministère du Travail du Canada,
étaient présents. Ledit Eberlee déclara qu'il informerait les
parties de sa décision dès que possible.
21. Le 19 janvier 1976, Marjorie Steffensen, Gwen Randall et
moi-même avons rencontré à Winnipeg ledit Eberlee, sous-
ministre du Travail. Ponting et GUNN, ainsi que des représen-
tants du Alberta Wheat Pool et du Saskatchewan Wheat Pool,
étaient présents. Ledit Eberlee nous fit alors part de son opinion
selon laquelle la commission devait procéder à l'enquête et que
les détails de procédure devraient être réglés avec l'intimé
GUNN à cette même réunion. J'ai alors à nouveau demandé
qu'on nous fournisse des copies de toute la correspondance
échangée par l'avocat du Saskatchewan Wheat Pool et du
Manitoba Pool Elevators et le ministère du Travail du Canada.
On m'a remis à la réunion des copies d'une partie de la
correspondance. C'était la première fois que ledit syndicat
prenait connaissance ou recevait des copies de ladite
correspondance.
22. Par lettre datée du 21 janvier 1976, et adressée au secré-
taire de la commission, les avocats du syndicat requérant ont à
nouveau demandé des copies de toute la correspondance. Vous
trouverez ci-annexée et marquée pièce «L» une photocopie
conforme de cette lettre.
23. Par lettre datée du 27 janvier 1976, ledit secrétaire a
répondu aux avocats du requérant et a joint une copie d'une
lettre dudit Eberlee adressée audit Ponting le 10 septembre
1975. Vous trouverez ci-annexée et marquée pièce «M» une
photocopie conforme de ladite lettre.
Le 24 février 1975, le syndicat requérant a écrit
au ministre du Travail au sujet de la nomination
de la commission et, le 7 avril 1975, ses représen-
tants l'ont rencontré à Ottawa, mais le Ministre a
décidé que la commission devait procéder à l'en-
quête. Entre temps le syndicat a également écrit
aux compagnies intimées afin de leur demander de
commencer la négociation collective relativement à
la durée du travail de leurs employés exerçant les
fonctions de gérant agent.
Les paragraphes 31 et 32 de l'affidavit et la
lettre mentionnée au paragraphe 32 exposent le
fondement de l'allégation de partialité. En voici le
texte:
[TRADUCTION] 31. Le 22 avril 1976, j'ai rencontré à Winni-
peg l'intimé GUNN et Ponting. Marjorie Steffensen et George
Taylor étaient avec moi. La réunion a débuté à 14 heures et
l'intimé GUNN a alors déclaré avoir tenu une réunion le matin
même avec Ponting et les représentants du Saskatchewan
Wheat Pool et du Manitoba Pool Elevators, en l'absence des
avocats ou des représentants du syndicat requérant. Ledit
George Taylor a protesté contre cette réunion mais l'intimé
GUNN n'a fourni aucune explication à ce sujet.
32. Le 23 avril 1976, j'ai vu à la rédaction et à l'envoi à GUNN
d'une lettre traitant de cette question; vous trouverez annexée
aux présentes et marquée pièce «T» une photocopie conforme de
cette lettre.
GRAIN SERVICES UNION (C.T.C.)
Le 23 avril 1976.
Monsieur J. S. Gunn,
Commission d'enquête,
a/s Mme J. A. Weinman,
Travail Canada,
Ottawa (Ontario).
K1A 0J2.
Monsieur,
En l'absence de notre avocat, Maître Taylor, nous vous
confirmons la proposition faite lors de la réunion tenue à
Winnipeg, le 22 avril 1976.
Comme vous le savez, nous avons appris à notre étonnement
au début de la réunion que le commissaire avait rencontré en
notre absence les représentants des employeurs le matin même
de la réunion. Notre étonnement fut encore plus grand lorsque
nous avons constaté à la réunion que les employeurs n'étaient
représentés que par leurs avocats alors qu'il avait été convenu,
et cela a été confirmé par l'un des employeurs, qu'ils assiste-
raient à la réunion de Monsieur Gunn et nous-mêmes. Cette
situation nous a inquiétés et nous inquiète encore, car elle
interdit toute discussion valable sur la durée moyenne du
travail.
En conséquence, après avoir sérieusement étudié la question
avec nous, notre avocat a proposé que le commissaire convoque
et préside une réunion des représentants des employeurs et de
leurs avocats, des représentants du syndicat et de leurs avocats
et d'au moins deux représentants du ministère du Travail dont
le sous-ministre du Travail et le directeur de la Division des
normes du Travail.
Nous avons suggéré dans notre proposition trois étapes:
(1) Tout d'abord déterminer si les employeurs sont disposés
ou non à étudier et considérer la demande d'établir une durée
moyenne de travail dans l'industrie.
(2) Si l'on parvient à une entente de principe sur la première
étape, il s'agira en second lieu de discuter concrètement de
cette moyenne en vue de conclure un accord que les
employeurs, le syndicat et le Ministère considéreront
acceptable.
(3) Si l'on conclut un tel accord, il faudra alors fixer les
modalités de sa mise en oeuvre, par le Ministère, dans le cas
des employés non syndiqués et, par négociation collective,
dans le cas des employés syndiqués.
Nous considérons que cette façon de procéder est plus sus
ceptible de conduire à des résultats positifs et qu'en cas de
succès, la commission ne serait plus nécessaire.
Nous vous demandons instamment d'étudier attentivement
notre proposition et de nous répondre dès que possible.
Veuillez agréer l'expression de notre considération
distinguée.
W. G. Gilbey,
Secrétaire gérant.
c.c. L'Honorable John Munro,
Ministre du Travail.
Gilbey n'a pas été contre-interrogé au sujet de
son affidavit et les intimés n'ont soumis aucune
preuve. Vu les circonstances, j'en déduis que le
commissaire, Ponting et tous ceux qui ont assisté à
la réunion de la matinée du 22 avril ont discuté de
l'enquête et des points qu'elle devait aborder.
Cependant il n'y a aucune preuve sur ce qui a été
dit pendant cette réunion.
Les requérants soutiennent qu'en tenant une
réunion avec les représentants des compagnies
d'élévateurs, dont les deux compagnies intimées,
en l'absence des représentants du syndicat, le com-
missaire a adopté une conduite qui soulève une
crainte justifiée de partialité. A l'appui de sa thèse,
l'avocat s'est reféré à l'affaire récente Committee
for Justice and Liberty. c. L'Office national de
l'énergie [(1976) 9 N.R. 115] et a avancé que le
rôle du commissaire est analogue à celui de l'Of-
fice national de l'énergie dans l'affaire précitée et
est de nature judiciaire ou quasi judiciaire car les
recommandations de la commission, si elles sont
adoptées, peuvent affecter les droits des parties et
la commission possède les pouvoirs d'un commis-
saire nommé en vertu de la Loi sur les enquêtes
pour contraindre les témoins à comparaître et à
témoigner sous serment. Il a également soutenu
que même si une enquête n'est ni judiciaire ni
quasi judiciaire, les requérants ont néanmoins droit
à une audition impartiale en conformité des princi-
pes de la justice naturelle.
Sur ce point, le juge en chef Laskin, parlant au
nom de la majorité de la Cour dans l'arrêt L'Office
national de l'énergie a déclaré:
Il faut se rappeler, en l'espèce, qu'il s'agit d'une demande en
vertu de l'art. 44, où, à mon avis, le rôle de l'Office est
quasi-judiciaire ou, du moins, doit être exercé conformément
aux principes de justice naturelle; même s'il n'est pas nécessai-
rement soumis à toutes les règles qui s'appliquent à un tribunal
il l'est certainement à un degré suffisant pour être tenu de
manifester l'intégrité de sa procédure et son impartialité (je
note cependant que l'Office est une cour d'archives en vertu de
l'art. 10 de sa loi constitutive). Toutefois ces principes ne
s'appliquent pas à une enquête menée en vertu du par. (2) de
l'art. 14 ou de l'art. 22.
Il me semble qu'une enquête en vertu de l'article
62 du Code canadien du travail, qui consiste uni-
quement à faire une enquête et un rapport 2 , se
rapproche plus des enquêtes tenues en vertu du
paragraphe 14(2) et de l'article 22 de la Loi sur
l'Office national de l'énergie 3 ou des enquêtes
effectuées sous l'empire de la Loi de l'impôt sur le
revenu, comme celle en cause dans l'affaire Guay
c. Lafleur 4 , où la Loi conférait à la personne
nommée le pouvoir de tenir une enquête et l'inves-
tissait des pouvoirs d'un commissaire en vertu des
articles 4, 5 et 11 de la Loi sur les enquêtes. Dans
cette affaire, le jugement de la majorité semble
être fondé sur le fait que l'intimé, qui faisait partie
d'un certain nombre de personnes dont les affaires
faisaient l'objet d'enquêtes, n'avait pas le droit
d'être présent car il s'agissait d'une enquête privée
et l'enquêteur ne possédait aucun pouvoir de déci-
sion. En l'espèce, l'objet de l'enquête n'est peut-
être pas de nature privée mais le commissaire n'a
2 Voir le paragraphe 32.1(2).
3 Aux fins d'une enquête en vertu de l'article 14(2), le
paragraphe 10(3) confère à l'Office pour recueillir des témoi-
gnages, les pouvoirs d'une cour supérieure d'archives et, aux
fins de l'article 22, l'article 24 l'investit des pouvoirs d'un
commissaire en vertu de la Partie I de la Loi sur les enquêtes.
4 [1965] R.C.S. 12.
pas le pouvoir de prendre une décision et cela suffit
à mon avis pour faire une distinction entre la
présente affaire et l'arrêt L'Office national de
l'énergie (précité) où l'article 44 de la Loi sur
l'Office national de l'énergie habilite l'Office à
décider s'il y a lieu de délivrer un certificat et, sous
réserve de l'approbation du gouverneur en conseil,
à rendre une ordonnance à cet effet.
Dans l'arrêt Guay c. Lafleur (précité), le juge
Hall, dissident, souligna que celui qui tenait l'en-
quête pouvait faire des recommandations et qu'en
réalité, dans de tels cas, la décision est prise par
celui qui mène l'enquête mais est rendue au nom
du sous-ministre.
En l'espèce, la nomination elle-même confère
plus de pouvoirs que l'article 62 ou le paragraphe
32.1(2) car elle n'autorise pas uniquement la tenue
d'une enquête et la présentation d'un rapport mais
elle demande également au commissaire de faire
des recommandations; on peut donc supposer que
celles-ci peuvent influencer la décision du gouver-
neur en conseil. La situation n'est donc pas en tous
points analogue à celle de l'affaire Guay c.
Lafleur, ni à celle de l'arrêt L'Office national de
l'énergie et semble se ranger entre les deux.
Je pense que l'enquête prévue au paragraphe
32.1(2), titre d'étape préliminaire à l'exercice
par le gouverneur en conseil des pouvoirs conférés
par le paragraphe 32.1(1), n'est pas de nature
judiciaire ni quasi judiciaire et ne doit pas obliga-
toirement être conduite comme s'il existait un lis
entre les parties ou comme s'il s'agissait d'une
procédure soumise à la règle audi alteram partem,
appliquée en faveur des requérants. Je préfère
toutefois ne pas trancher l'affaire sur ce point et
prendre pour hypothèse qu'il s'agit d'une enquête
quasi judiciaire soumise à la règle audi alteram
partem.
Cela ne revient toutefois pas à dire que le com-
missaire doit tenir un genre de procès ni que les
requérants ont droit à une confrontation avec les
compagnies d'élévateurs devant lui ni même que le
commissaire doit tenir une audition. A mon avis,
en droit, la règle accorde tout au plus aux requé-
rants le droit de prendre connaissance de quelque
façon des documents communiqués au commis-
saire par les autres parties et d'avoir la possibilité
suffisante et raisonnable d'y répondre en soumet-
tant leur argumentation. En l'absence d'une loi ou
d'un règlement prévoyant la procédure à suivre
pour accorder ou protéger ce droit, il appartenait
au commissaire de la déterminer. Or, à mon avis,
dans la mesure où il respectait les principes énon-
cés par lord Loreburn dans l'arrêt Board of Édu-
cation c. Rice 5 , rien ne l'empêchait de choisir une
procédure d'audition où il entendrait les parties
intéressées séparément.
A mon avis, c'est à la lumière des droits des
requérants ainsi définis que l'on doit apprécier les
faits invoqués pour étayer leur allégation de par-
tialité. Le commissaire n'a violé aucune règle de
droit en recontrant les représentants des compa-
gnies d'élévateurs en l'absence des représentants
du syndicat et aucune preuve n'indique que ces
discussions ont influencé le commissaire ou ont été
à l'origine de ses conclusions sur le fond de l'af-
faire soumise à l'enquête. Rien dans la preuve
n'indique en outre que les requérants ont demandé
à. Gunn de les informer des propos tenus à la
réunion afin de pouvoir faire des représentations à
cet égard. On peut comparer cette attitude à celle
que le syndicat avait adoptée, selon l'affidavit,
lorsqu'il a demandé des copies de la correspon-
dance échangée par les compagnies et le Ministère.
En outre, même si dans une lettre rédigée le
lendemain de la réunion, le syndicat exprime son
inquiétude au sujet de la tenue de cette réunion à
son insu et en son absence, il est important de
remarquer qu'il ne fait part d'aucune crainte de
partialité ni d'aucune objection à l'enquête menée
par Gunn. Au lieu de cela, dans sa lettre, le
syndicat soumet une proposition visant à rendre
l'enquête inutile, recommandant notamment que
Gunn préside une réunion entre les représentants
du Ministère, du syndicat et des compagnies.
5 [1911] A.C. 179 la page 182:
[TRADUCTION] Il peut obtenir des renseignements de la
manière qu'il juge la meilleure, en donnant toujours aux
parties engagées dans la controverse une possibilité suffisante
de corriger ou de contredire toute déclaration pertinente
portant préjudice à leur cause.
A mon avis, en ce qui concerne la réunion du
commissaire et des représentants des compagnies
d'élévateurs, dans la matinée du 12 avril, 1976, les
requérants ont uniquement le droit d'être informés
des propos tenus à la réunion et d'avoir la possibi-
lité raisonnable de présenter leurs observations au
commissaire à cet égard. La preuve de la tenue de
cette réunion ne démontre aucune partialité ni ne
justifie aucune crainte de partialité de Gunn.
La requête est donc rejetée avec dépens contre
les quasi-demandeurs William Gilbey et Marjorie
Steffensen, et le requérant, Grain Services Union.
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