T-2934-76
International Marine Banking Co. Limited
(Demanderesse)
c.
Le pétrolier Dora et Abyreuth Shipping Company
Limited (Défendeurs)
[N° 2]
Division de première instance, le juge en chef
adjoint Thurlow—Montréal, les 16, 18 et 20 août;
Ottawa, le 24 août 1976.
Droit maritime—Pratique—Demande d'une ordonnance en
vue de vendre le navire sous saisie par contrat privé—Déclara-
tion signifiée au navire mais pas à la compagnie défenderes-
se—Aucune demande d'autorisation pour une signification ex
juris—Irrecevabilité de l'affidavit déclarant que le prix offert
est le meilleur qu'on puisse obtenir—Recevabilité de l'affida-
vit de la demanderesse exposant sa conviction de l'exactitude
des renseignements contenus dans les deux autres affidavits—
Négociations pour la vente sans l'agrément ni l'autorisation de
la Cour—La préférence donnée au plus haut soumissionnaire
est contraire à l'intention de la Règle 1007(2)a)(v)—Les procé-
dés et la preuve de la demanderesse ont un caractère dou-
teux—La demande est rejetée—Règles 1003 et 1007(1),
(2),(3),(4) et (5) de la Cour fédérale.
La demanderesse a introduit son action le 27 juillet 1976 et
le navire a été saisi le même jour. La déclaration a été signifiée
au navire, mais pas à la compagnie défenderesse et il n'y a eu
aucune demande d'autorisation pour qu'elle lui soit signifiée ex
juris. Le délai pour déposer une comparution ou une défense
n'était pas encore expiré. Se sont opposés à la présente
demande un affréteur, des fournisseurs d'approvisionnements
de première nécessité et les défendeurs qui se sont engagés de
façon satisfaisante à déposer une comparution.
Arrêt: la demande est rejetée. La Règle 1007 prévoit l'éva-
luation et la vente d'un bien saisi. La demanderesse invoque le
paragraphe (1) de la Règle 1007, mais depuis l'entrée en
vigueur de la Loi sur la Cour fédérale, la Cour se conforme au
paragraphe (2), qui expose en détail les raisons et les méthodes
pour vendre les biens saisis se trouvant sous sa juridiction. En
tous cas, on envisage ici une vente suivant les modalités ordon-
nées à l'avance par la Cour et non pas l'approbation et l'adop-
tion par la Cour d'un acte de vente arrangé par la demande-
resse. Celle-ci invoque le coût élevé de l'entretien, mais elle
peut solliciter une ordonnance en vertu de la Règle 1003(10) de
manière à attribuer au prévôt la responsabilité de l'entretien.
La preuve que le prix demandé par la demanderesse est le
meilleur qu'on puisse obtenir consiste en deux affidavits irrece-
vables plus celui de la demanderesse où elle exprime la convic
tion que les faits énoncés dans lesdits affidavits sont exacts.
Toutefois, la pratique consistant à donner au plus haut soumis-
sionnaire une occasion privilégiée d'accepter une contre-offre
est contraire à l'intention de la Règle 1007(2)a)(v). Les procé-
dés suivis ne constituent ni une substitution satisfaisante aux
prescriptions que la Cour aurait pu formuler ni un moyen
destiné à obtenir le prix le plus élevé et la Cour n'est pas
convaincue que le prix négocié soit le meilleur qu'on puisse
obtenir.
DEMANDE d'une ordonnance rétroactive.
AVOCATS:
G. Vaillancourt pour la demanderesse.
V Prager pour le pétrolier Dora.
M. Nadon pour Trans-Asiatic Oil Ltd.
M. Savard pour Golden Eagle Canada
Limited.
P. Q. Davidson pour Pera Shipping Corp.
E. Baudry pour Clipper Ship Supply Ltd. et
Hitachi Shipbuilding et Engineering.
F. de B. Gravel et S. Harrington pour Joseph
Christopher Twite.
PROCUREURS:
Langlois, Drouin & Laflamme, Québec, pour
la demanderesse.
Stikeman, Elliott, Tamaki, Mercier & Robb,
Montréal, pour le pétrolier Dora.
Martineau, Walker, Allison, Beaulieu,
Phelan & Mackell, Montréal, pour Trans-
Asiatic Oil Ltd.
Chauvin, Marler & Baudry, Montréal, pour
Golden Eagle Canada Limited, Clipper Ship
Supply Ltd. et Hitachi Shipbuilding et
Engineering.
Brisset, Bishop & Davidson, Montréal, pour
Pera Shipping Corp.
Gravel & Associés, Québec, pour Joseph
Christopher Twite.
Ce qui suit est la version française des motifs
de l'ordonnance rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT THURLOw: La
demanderesse sollicite une ordonnance en vue de
vendre le navire défendeur à Pera Shipping Corpo
ration, du Libéria, par contrat privé, avant juge-
ment, sans évaluation et sans avis, pour la somme
de $5,900,000. Compte tenu de la procédure nor-
male de cette Cour, la présente demande est
extraordinaire et ce qui l'a précédée l'est
également.
Le navire est un pétrolier d'un port en lourd
d'environ 95,000 tonnes. Il est actuellement sous
saisie à Québec, en raison de la présente action et
d'une autre action introduite par son capitaine en
son nom propre et en celui de l'équipage pour le
paiement de salaires qui s'élèvent à un montant de
$175,000. Plusieurs caveat contre la levée de la
saisie ont été également déposés.
La demanderesse a introduit son action, le 27
juillet 1976. Un mandat a été décerné et le navire
a été saisi le même jour. La déclaration a aussi été
signifiée au navire, mais non pas à la compagnie
défenderesse et il n'y a eu aucune demande d'auto-
risation pour qu'elle lui soit signifiée ex juris. La
réclamation est fondée sur trois hypothèques, dont
le montant total s'élève à plus de $9,000,000. Le
délai pour déposer une comparution ou une
défense n'a pas encore expiré.
Se sont opposés à la demande l'avocat de Trans-
Asiatic Oil Limited, partie qui se prétend intéres-
sée à l'instance en tant qu'affréteur ayant passé un
contrat d'affrètement à temps qui n'expirera que
dans deux ans, l'avocat de deux titulaires de
caveat, dont les réclamations portent sur les four-
nitures de première nécessité au navire, et l'avocat
des défendeurs qui s'est engagé à la satisfaction de
la Cour à ce que ses clients déposent une
comparution.
La Règle 1007 de cette Cour afférente à l'éva-
luation et à la vente d'un bien saisi, contient les
dispositions suivantes:
Règle 1007. (1) La Cour pourra, avant ou après le jugement
final, ordonner que des biens saisis sur son ordre soient évalués,
ou soient vendus, après avoir été évalués ou non, soit aux
enchères publiques, soit par contrat privé, et elle peut prescrire
quel avis doit être donné à ce sujet sur publicité ou autrement,
ou peut dispenser de donner avis.
(3) Si les biens perdent de leur valeur, la Cour pourra
ordonner de les vendre immédiatement.
(4) La Cour pourra, avant ou après le jugement final, ordon-
ner que des biens saisis sur son ordre soient déplacés ou qu'une
cargaison saisie à bord d'un navire soit déchargée; et, d'une
façon générale, après introduction d'une action, elle peut rendre
une ordonnance ou un décret pour la sécurité et la conservation
d'un navire ou d'une cargaison saisie, de même qu'une ordon-
nance pour la disposition des marchandises périssables saisies,
aux conditions qu'elle peut juger convenables.
(5) L'estimation, la vente et l'enlèvement de biens ainsi que
le déchargement d'une cargaison doivent s'effectuer en vertu
d'une commission adressée au prévôt. (Formules 40 à 44).
Les paragraphes (1) et (2) et la plus grande
partie des paragraphes (3) et (4) sont des Règles
anciennes. Elles figuraient dans les Règles de la
Cour de l'Échiquier du Canada siégeant en Cour
d'Amirauté, depuis au moins 1916, date de la
publication du Mayer's Admiralty Law and Prac
tice in Canada. La demanderesse invoque le para-
graphe (1) à l'appui de l'ordonnance qu'elle veut
obtenir. Toutefois, il existe une règle ultérieure qui
a été insérée dans le paragraphe (2) à laquelle, si
je comprends bien, la Cour s'est conformée depuis
son adoption en 1971, époque à laquelle la Loi sur
la Cour fédérale est entrée en vigueur. En voici le
libellé:
(2) Sous réserve du paragraphe (1), la Cour pourra, avant
ou après le jugement final, ordonner que,
a) lorsqu'un bien est sous la saisie de la Cour, il soit mis en
vente par des annonces selon les instructions contenues à
l'ordonnance qui peuvent comprendre l'une ou toutes les
modalités suivantes:
(i) les offres d'achat seront scellées et adressées au prévôt,
(ii) les offres d'achat seront décachetées en même temps à
l'audience,
(iii) la vente ne sera pas obligatoirement faite au plus haut
enchérisseur ou autre enchérisseur,
(iv) les parties seront informées de la séance de la Cour ou
les offres d'achat seront décachetées et la vente se fera en
vertu d'une ordonnance de la Cour rendue durant cette
séance, ou subséquemment après que les parties aient eu
l'occasion de se faire entendre,
(v) après l'ouverture des offres d'achat, la Cour pourra,
après avoir entendu les parties, s'il y a un doute sur la
suffisance du prix offert, ordonner que le montant le plus
élevé soit communiqué aux autres personnes qui ont pro-
duit des offres ou à une autre classe de personnes ou
autrement prendre les moyens qui lui paraissent appropriés
dans le but d'obtenir une offre plus élevée,
(vi) pourront être émises toutes autres instructions appro-
priées aux circonstances;
b) qu'un agent ou courtier soit utilisé pour la vente de ces
biens, avec l'autorisation de vendre aux conditions mention-
nées dans l'ordonnance ou sous réserve d'une approbation
subséquente de la Cour et selon un dédommagement pour les
services de l'agent ou du courtier fixé dans l'ordonnance.
Il convient d'observer que, sans se soucier de
savoir quelle Règle est invoquée, on envisage ici
une vente suivant des modalités ordonnées à
l'avance par la Cour en vue de protéger les intérêts
de toutes les parties, et non pas un acte de vente
arrangé à l'avance par la demanderesse pour servir
ses intérêts, suivant des modalités qui lui convien-
nent et qu'elle fixe elle-même, qui serait présenté à
la Cour aux fins d'approbation et d'adoption.
Pour justifier une dérogation aussi importante
aux pratiques normales de la Cour, la demande-
resse invoque le coût élevé de l'entretien du navire
pendant qu'il est sous saisie, les pertes sérieuses
qui découlent de son immobilisation et les fortes
probabilités de sa détérioration matérielle, surtout
s'il n'est pas armé et entretenu par un équipage
compétent.
Je ne pense pas que le navire subira une détério-
ration matérielle indue en restant immobilisé le
temps nécessaire à l'exécution de procédures nor-
males de la Cour relatives à son évaluation et à sa
vente, s'il est correctement armé et je ne vois
aucune raison valable pour qu'on ne puisse pas
pourvoir à cet armement par l'entremise du prévôt
pourvu que la demanderesse obtienne une ordon-
nance en vertu de la Règle 1003 (10) et lui four-
nisse une garantie pour assurer le paiement des
salaires et autres frais et honoraires, tel que ladite
règle l'exige.
Quant aux dépenses et pertes, les documents
produits devant la Cour, à l'appui de la demande,
ne donnent pas une idée claire du montant qu'exi-
gerait l'entretien du navire sous saisie. Il est
prouvé qu'une firme d'agents maritimes a débité la
demanderesse de $34,784 pour la période du l er au
16 août, dont $15,550 pour les droits de quai,
$5,000 pour la surveillance et la sécurité, $9,634
pour les remorqueurs, le pilote et les préposés à
l'amarrage nécessités pour deux déplacements,
$3,000 pour frais divers et $1,600 pour la commis
sion. Ce montant ne couvre pas les soins médicaux
de l'équipage, les frais de rapatriement, les vivres,
la fourniture de carburant, les réparations, l'eau,
les déserteurs, etc. En particulier, il ne tient aucun
compte de l'assurance. Il est aussi prouvé que les
salaires des 37 officiers et membres d'équipage
s'élèvent à $1,189.57 par jour. Lors d'une demande
antérieure, les salaires d'un équipage-souche de 17
officiers et marins étaient estimés à environ $600
par jour. Si on arrondit à $35,000 pour une
période de 16 jours, on obtient le chiffre de $2,200
par jour et si on y ajoute $1,200 pour les salaires
de l'équipage, celui de $3,400. Un intérêt annuel
de 10% sur la valeur du navire estimée approxima-
tivement à $6,000,000 ajouterait aux pertes déjà
encourues, un montant de $1,800 par jour. Donc,
pour tous ces postes, on aboutirait à un total
d'environ $5,200 par jour. Il n'existe aucune
preuve afférente au coût des autres postes. Mais si
l'on présume que le total des dépenses et des pertes
consécutives à l'immobilisation du navire atteint
$10,000 par jour, je ne pense pas, compte tenu de
la taille et de la valeur du navire, que ces coûts
soient exceptionnels et je ne suis donc pas con-
vaincu que la situation présente une urgence qui
suffise à justifier une dérogation aux pratiques
normales de la Cour. Le navire a un gros tonnage,
les investissements qu'il représente sont importants
et les dépenses et les pertes sont en proportion.
C'est là tout ce qu'elles ont d'insolite.
Je passe maintenant aux arguments présentés à
la Cour par l'avocat, à l'appui de sa prétention que
le prix de $5,900,000 offert par Pera Shipping
Corporation est le meilleur qu'on puisse obtenir et
doit être approuvé. La preuve a consisté en un
affidavit émanant du procureur de la demande-
resse, qui se réfère à deux autres affidavits et
exprime la conviction que les renseignements qu'ils
contiennent sont exacts. L'un de ces affidavits
émane de David Edward Demeza, administrateur
de Galbraith Wrightson Limited, firme de cour
tiers maritimes de Londres (Angleterre) et l'autre,
de Michael David Revell, dirigeant de la compa-
gnie demanderesse. Les deux derniers affidavits
ont été déposés à l'appui de la demande et ont
donné lieu à une opposition. Quant à leur recevabi-
lité, elle n'a pas été démontrée. Sur ce, le procu-
reur de la demanderesse a choisi de déposer son
propre affidavit exposant qu'il est convaincu de
leur exactitude. Lui aussi a donné lieu à une
opposition, mais il me semble qu'il est recevable et
que l'opposition se limite à sa portée.
En bref, il ressort des affidavits que
(1) Avant juillet de la présente année, la navire
a été offert en vente par ses propriétaires, qui
éprouvaient des difficultés financières, au prix
de 6.25 millions de dollars.
(2) Le navire est contrôlé par le groupe MFC,
domicilié en Israël, et placé sur une liste noire
par les pays arabes.
(3) Selon Galbraith Wrightson, la valeur du
navire dans son état et son lieu actuels, libre de
tout engagement d'affrètement, est 5.5 millions
de dollars.
(4) Sur les instructions de la demanderesse,
Galbraith Wrightson s'est adressée à trois cour
tiers maritimes qui, le 3 août 1976, ont évalué le
navire sur cette base respectivement à 5.5, 5.15
et 6 millions de dollars.
(5) Antérieurement, Galbraith Wrightson s'est
efforcée de négocier la vente du navire avec son
reliquat d'affrètement à temps et a reçu plu-
sieurs offres à 5.2 millions de dollars, mais les
négociations ont été abandonnées lorsqu'il est
devenu évident que le navire serait mis sous
saisie à son arrivée à Québec.
(6) Le 29 juillet, à la suite de la saisie, Gal-
braith Wrightson, sur les instructions de la
demanderesse, a diffusé à l'échelle internatio-
nale que le navire était en vente dans son état et
son lieu actuels, à Québec, libre d'affrètement,
et que les acheteurs éventuels devaient d'abord
l'inspecter et ensuite soumettre des offres sans
réserve.
(7) Quatorze compagnies maritimes se sont
montrées intéressées et, dans la semaine qui a
suivi la publicité, plusieurs ont procédé à l'ins-
pection du navire.
(8) Le 5 août, toujours sur les instructions de la
demanderesse, Galbraith Wrightson a envoyé un
télex aux acheteurs éventuels, qui avaient reçu
la permission d'inspecter le navire, leur deman-
dant de faire une offre le jour suivant à 13 h.
(9) Finalement, plusieurs acheteurs éventuels
ont fait savoir qu'ils n'étaient pas disposés à
poursuivre les négociations, mais il y a eu cinq
offres s'étalant de 4.7 à 5.767 millions de
dollars.
(10) A la suite d'un entretien avec la demande-
resse, Galbraith Wrightson a fait au plus
offrant, Pera Shipping Corporation, une contre-
offre de 5.9 millions de dollars, qui «après plu-
sieurs discussions» a été acceptée.
Le télex du 5 août demandant des offres, est
rédigé dans les termes suivants:
[TRADUCTION] OBJET: PÉTROLIER «DORA»
VU L'INTÉRÊT QUE VOUS MANIFESTEZ ENVERS LE PÉTROLIER
SUSMENTIONNÉ, INTERNATIONAL MARINE BANKING CO.
LTD., CRÉANCIER HYPOTHÉCAIRE DU NAVIRE (QUI EST
ACTUELLEMENT SOUS SAISIE A QUÉBEC SOUS LA JURIDIC-
TION DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA) NOUS CHARGE DE
DEMANDER DES OFFRES D'ACHAT, LESDITES OFFRES DEVANT
ÊTRE EN NOTRE POSSESSION DEMAIN 6 AOÛT, À 13 H.
LES OFFRES SONT DEMANDÉES SUR LA BASE SUIVANTE:
1.
LE PRIX DE ... A PAYER COMPTANT EN DOLLARS CANADIENS
AVEC UN DÉPÔT DE 10 POUR CENT A REMETTRE À MARINE
MIDLAND BANK, À NEW YORK OU A LONDRES, AGISSANT EN
TANT QUE DÉPOSITAIRE, DANS LES DEUX JOURS OUVRABLES,
LES PRIX ET CONDITIONS AYANT ÉTÉ CONVENUS PAR TÉLEX,
REMBOURSABLE, AINSI QUE LE SOLDE COMPTANT DANS LES
DEUX JOURS QUI SUIVRONT L'AVIS DE DISPONIBILITÉ.
2.
VENTE INCONDITIONNELLE, LES ACHETEURS AYANT SOT
APPROUVÉ LE NAVIRE ET LES REGISTRES APRÈS INSPECTIOP
SOIT RENONCE A LEURS DROITS A CET ÉGARD.
3.
NAVIRE À LIVRER DANS SON ÉTAT ET SON LIEU ACTUELS, .
FLOT EN PORT SUR A QUEBEC. AVIS DE DISPONIBILITÉ ,
PRÉSENTER IMMÉDIATEMENT APRÈS LES FORMALITÉS VISÉE
AU PARAGRAPHE 6 CI-DESSOUS.
4.
NAVIRE VENDU AVEC TOUT CE QUI S'Y RAPPORTE À BORD
LES ACHETEURS DOIVENT PAYER UN SURPLUS AU PRIX MAR
CHAND COURANT AU PORT DE LIVRAISON POUR LE CARBU
RANT RESTANT, LES LUBRIFIANTS, LES ARTICLES EN MAGA
SIN ET LES PROVISIONS INUTILISÉS. LES PAIEMENTS DOIVENT
ÉTRE EFFECTUÉS AU MOMENT DE LA LIVRAISON. LES EFFET.
PERSONNELS DU CAPITAINE, DES OFFICIERS ET DE L'ÈQUI
PAGE SONT EXCLUS, AINSI QUE L'ÉQUIPEMENT LOUÉ (S'IL Y I
LIEU).
5.
AU MOMENT DU RÈGLEMENT, LES ACHETEURS RECEVRONT
LES DOCUMENTS SUIVANTS:-
(I) L'ACTE DE VENTE DÉCLARANT LE NAVIRE EXEMPT DI
CHARGES, PASSÉ PAR L'AUTORITÉ DE LA COUR FÉDÉRALI
DU CANADA.
(II) LA COPIE DE L'ORDONNANCE DE LA COUR AUTORI
SANT LA VENTE.
6.
LA VENTE EST ASSUJETTIE À L'AUTORISATION DE LA COU'
FÉDÉRALE POUR QUE LE NAVIRE SOIT TRANSFÉRÉ AUX ACHE
TEURS, LIBRE D'AFFRÈTEMENT. CETTE AUTORISATION DOIT
ÊTRE OBTENUE ENTRE LE 16 ET LE 23 AOÛT 1976. SI ELLE
N'EST PAS OBTENUE LE 23 AOÛT, LA VENTE SERA AUTOMATI
QUEMENT ANNULÉE ET LE DÉPÔT REMBOURSÉ IMMÉDIATE
MENT AUX ACHETEURS.
7.
SI LES ACHETEURS NE PAIENT PAS LE SOLDE DU PRIN
D'ACHAT INDIQUÉ CI-DESSUS, LE DÉPÔT DE 10 POUR CEN]
SERA IMMÉDIATEMENT CONFISQUÉ.
NOUS INSISTONS SUR LE FAIT QU'IL N'Y AURA AUCUN CON•
TRAT DE VENTE, LES MODALITÉS NÉGOCIÉES SERONT INSÉ•
RÉES DANS UNE LETTRE D'ENGAGEMENT SIGNÉE PAR LES
ACHETEURS ET ADRESSÉE A LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA
ET À INTERNATIONAL MARINE BANKING CO. LIMITED
LADITE LETTRE DEVANT ÉTRE EN POSSESSION DE CETTE
DERNIÈRE AU PLUS TARD LE MARDI 10 AOÛT, A 13 H.
IMB S'ENGAGERA PAR ÉCRIT AUPRÈS DES ACHETEURS A REM
BOURSER LE DÉPÔT PLUS INTÉRÊT, AU CAS OÙ LA VENTE
SERAIT ANNULÉE CONFORMÉMENT AU PARAGRAPHE 6.
NOUS NOUS ATTENDONS À RECEVOIR DES INSTRUCTIONS
POUR RÉPONDRE DEMAIN APRÈS-MIDI A LA MEILLEUR'
OFFRE FAITE AUX MODALITÉS CI-DESSUS.
La lettre de Pera Shipping Corporation, en date
du 9 août, adressée à Marine Midland Bank Limi
ted et non pas à la Cour, contient les termes de 11
vente projetée. En voici le libellé:
[TRADUCTION] PÉTROLIER «DORA»-CONSTRUIT EN 1972,
PORT EN LOURD ENVIRON 95,600 TONNES
Nous confirmons les divers entretiens que nous avons eus,
vendredi dernier, par téléphone et par télex avec Galbraith
Wrightson Limited, d'où il ressort que notre compagnie accepte
d'acheter le pétrolier susmentionné sur la base suivante:-
1. Le prix doit être de 5,900,000 dollars canadiens versés
comptant.
2. Aujourd'hui, nous avons pris nos dispositions pour que
10% du montant de l'achat, soit 590,000 dollars canadiens,
soient transférés à Marine Midland Bank, 55 Moorgate,
Londres, montant que vous devez détenir en tant que déposi-
taires, jusqu'à ce que les négociations aient pris un caractère
définitif.
3. Nous paierons le plein montant de l'achat dans les deux
jours ouvrables qui suivront l'avis de disponibilité pour livrai-
son, étant bien entendu que ledit avis de disponibilité sera
présenté immédiatement après que la Cour fédérale du
Canada aura autorisé la vente du navire et en échange des
documents mentionnés aux alinéas (1) et (2) du
paragraphe 6.
4. Nous avons inspecté à Québec le navire et les registres.
Nous n'avons besoin d'aucune autre inspection et sommes
donc disposés à acheter le navire sans condition, avec livrai-
son «dans son état et son lieu actuels», à flot en port sûr à
Québec.
5. Nous sommes prêts à payer au prix marchand courant au
port de livraison, un supplément pour le carburant restant,
les lubrifiants, les articles en magasin et les provisions
inutilisés.
Nous sommes d'accord pour que les effets personnels du
capitaine, des officiers et de l'équipage soient exclus de la
vente, ainsi que l'équipement loué (s'il y a lieu).
Ces exceptions mises à part, le navire doit nous être livré
avec tout ce qui lui appartient à bord.
6. Nous acceptons qu'il n'y ait pas de contrat de vente
formel et qu'une fois les formalités de la Cour accomplies, les
seuls documents fournis aux vendeurs soient:-
1. L'acte de vente déclarant que le navire est libre de
charges, passé par l'autorité de la Cour fédérale du
Canada.
2. La copie de l'ordonnance de la Cour autorisant la vente.
7. Nous comprenons que notre achat du pétrolier «DORA» est
assujetti à l'autorisation de la Cour fédérale du Canada pour
que ledit navire nous soit transféré libre d'affrètement et que
cette autorisation doit être obtenue entre le 16 et le 23 août
1976.
8. Si l'autorisation n'est pas obtenue le 23 août 1976, notre
engagement d'achat sera immédiatement annulé et Marine
Midland Bank Ltd. nous remboursera immédiatement les
590,000 dollars canadiens, dont fait mention le paragraphe
(1), ainsi que les intérêts y afférents.
9. Au cas où nous ne paierions pas le solde du prix d'achat,
tel que convenu ci-dessus nous acceptons que le dépôt de 10%
(590,000 dollars canadiens) soit immédiatement confisqué.
Il convient de mentionner deux autres points: 1)
la demanderesse est une filiale de Marine Midland
Bank Limited, dont parle la lettre et 2) tout ce qui
a été fait l'a été sans l'agrément ni l'autorisation
de cette Cour, sous la juridiction de laquelle le
navire saisi se trouve depuis le 27 juillet.
A mon avis, aux fins de vente par la Cour, les
périodes allouées en l'occurrence, soit une semaine
pour l'inspection et vingt-quatre heures pour la
présentation d'offres d'achat, étaient déraisonna-
blement courtes et insatisfaisantes. Cela me paraît
suffire à expliquer l'attitude de plusieurs acheteurs
éventuels qui, après la fixation d'un délai de pré-
sentation d'offres aussi court, ont fait savoir qu'ils
n'étaient plus disposés à poursuivre les négocia-
tions. En outre, la pratique consistant à donner au
soumissionnaire le plus offrant, une occasion privi-
légiée d'accepter une contre-offre paraît contraire
à l'intention de la Règle 1007(2)a)(v).
En conséquence, je ne suis pas disposé à approu-
ver les procédés suivis en l'occurrence ni à y voir
une substitution satisfaisante aux prescriptions que
la Cour aurait pu formuler en présence d'une
demande, ni un moyen destiné à obtenir le prix le
plus élevé. Cela revient à dire, à mon sens, que la
demanderesse a adopté ces procédés parce qu'ils
servaient ses intérêts et que le projet de vente qui
en a résulté n'est pas du tout une vente par la
Cour, mais une vente par la demanderesse que
celle-ci cherche maintenant à faire endosser par la
Cour, afin de lui donner l'apparence d'une vente
par la Cour. Je ne serais donc pas disposé à rendre
l'ordonnance demandée même si j'étais convaincu
qu'une vente par la Cour ne pourrait pas rapporter
plus que $5.9 millions.
Toutefois, je ne suis pas du tout convaincu que
le prix négocié soit le meilleur que l'on puisse
obtenir. La Cour a été saisie d'affidavits, qui ont
autant de poids que ceux de la demanderesse. Ils
indiquent:
(1) qu'il aurait été normal de demander une
contre-offre bien supérieure à 5.9 millions de
dollars;
(2) qu'une offre de 5.9 millions de dollars a été
faite, en réalité, par le second enchérisseur en
importance, avant que les arrangements pour la
vente proposée aient eu lieu;
(3) qu'un navire de même série plus ancien a
été vendu, le 8 août 1976, 6.25 millions de
dollars;
(4) qu'un navire comparable, grevé d'un affrè-
tement d'un an avec option de renouvellement, a
été vendu, le 7 août 1976, 8 millions de dollars;
(5) que trois courtiers ont estimé le navire res-
pectivement à 6.6 millions de dollars américains,
6.5 millions de dollars américains, et 6.3 mil
lions de dollars américains, tous s'étant fondés
sur des conditions normales de vente et non pas
sur une vente «dans l'état et le lieu actuels»;
(6) que la première de ces estimations émane
du courtier qui a fixé la valeur du navire, dans le
cas d'une vente «dans l'état et le lieu actuels», à
5.150 millions de dollars, lorsque la demande-
resse lui a demandé une estimation à une date
antérieure du même mois;
(7) que Fidelity Ocean Navigation Limited, de
Monrovia, (sur laquelle on ne sait rien de plus) a
offert pour le navire, le prix de $6.1 millions,
moins une commission de 2%, sur une base de
vente «dans l'état et le lieu actuels», et s'est
déclarée prête à déposer $610,000, une fois que
la Cour aura confirmé la vente.
A mon sens, en présence de la présente
demande, il ne m'appartient pas d'évaluer le navire
ni de m'efforcer d'apprécier les opinions et de
déterminer celle qui a le plus de poids. Pour
approuver le prix obtenu dans une transaction
aussi inhabituelle, il faut au moins que la Cour soit
convaincue qu'il est le meilleur possible. Or, on
peut fortement en douter si l'on se rapporte aux
procédés suivis et aux affidavits dont j'ai fait état.
La demande échoue donc et je la rejette.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.