A-398-74
Liberty Ornamental Iron Limited (Appelante)
c.
B. Fertleman & Sons Limited (Intimée)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges
Pratte et Urie—Ottawa, le 6 août 1976.
Pratique—Demande de jugement présentée par écrit confor-
mément à la Règle 324—L'intimée obtient une injonction dans
une action en contrefaçon de dessin ou modèle industriel—
L'injonction est annulée en cour d'appel et l'appelante est
autorisée à rédiger un projet de jugement en vertu de la Règle
324 conformément à la Règle 337—Le projet d'ordonnance sur
consentement et le jugement sont datés d'une manière inexacte
et ne peuvent donner effet à la décision—La demande est
rejetée avec permission de former une nouvelle demande—
Règles de la Cour fédérale 324 et 337.
L'intimée a intenté une action en contrefaçon relativement à
l'enregistrement d'un dessin ou modèle industriel et elle a
sollicité une injonction interdisant à l'appelante de fabriquer et
de vendre un produit semblable ou d'utiliser tout catalogue de
l'intimée aux fins de vente. L'injonction a été accordée mais elle
a été annulée en appel au motif qu'elle était rédigée en des
termes trop larges et qu'on n'a pas prouvé le bien fondé de
l'injonction. L'appelante a été autorisée à préparer un projet de
jugement conformément à la Règle 337 et à faire une demande
de jugement en vertu de la Règle 324.
Arrêt: la demande est rejetée avec permission de former une
nouvelle demande. Le projet de l'ordonnance sur consentement
est rédigé de sorte qu'elle semblerait avoir été rendue le jour où
l'appel a été entendu et où la Cour a rendu sa décision. En
vertu de la Règle 337, aucune décision de cette Cour n'est
rendue tant qu'elle n'a pas été signée par le juge présidant et il
n'existe pas de jurisprudence reconnaissant la rétroactivité au
jour où la Cour a exprimé sa décision. De plus le jugement ne
peut donner effet à la décision de la Cour.
DEMANDE écrite en vertu de la Règle 324.
PROCUREURS:
Gowling & Henderson, Ottawa, pour
l'appelante.
Rogers, Bereskin & Parr, Toronto, pour
l'intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF JACKETT: Il s'agit d'une
demande de jugement présentée par écrit (Règle
324).
Le 9 octobre 1974, l'intimée a intenté devant la
Division de première instance une action en con-
trefaçon relativement à l'enregistrement d'un
dessin ou modèle industriel et, par avis de requête
daté du 11 octobre 1974, elle a sollicité
[TRADUCTION] a) Une injonction interdisant à la défende-
resse elle-même, à ses préposés, mandataires, ouvriers et
employés de fabriquer ou de vendre au Canada des ensem
bles muraux semblables à ceux illustrés dans les enregistre-
ments de dessins industriels de la demanderesse portant les
numéros 38111, 38112, 38113 et 38114, y compris toutes
imitations trompeuses, et
b) Une injonction interdisant à la défenderesse elle-même, à
ses préposés, mandataires, ouvriers et employés d'utiliser tout
catalogue de la demanderesse aux fins de vendre des ensem
bles muraux que cette dernière n'a pas fabriqués.
Le 9 décembre 1974, la Division de première
instance, le juge Gibson présidant, a rendu un
jugement * qui dit notamment:
[TRADUCTION] SUITE À LA DEMANDE présentée au nom de
la demanderesse visant à obtenir:
a) une injonction interdisant à la défenderesse elle-même, à
ses préposés, mandataires, ouvriers et employés de fabriquer ou
de vendre au Canada des ensembles muraux semblables à ceux
illustrés dans les enregistrements de dessins industriels de la
demanderesse portant les numéros 38111, 38112, 38113 et
38114, y compris toutes imitations trompeuses, et
b) une injonction interdisant à la défenderesse elle-même, à
ses préposés, mandataires, ouvriers et employés d'utiliser tout
catalogue de la demanderesse aux fins de vendre des ensembles
muraux que cette dernière n'a pas fabriqués.
ATTENDU que la demanderesse a:
1. Établi une présomption légale,
2. Établi l'existence d'un préjudice irréparable et
3. Supposant que la défenderesse ait une prétention soutena-
ble fondée sur un enregistrement irrégulier, les avantages réci-
proques sont en faveur de la demanderesse. (Cette dernière a
déposé une promesse relativement aux dommages-intérêts datée
du 11 novembre 1974.) (Voir l'arrêt Grafton c. Watson (1884)
51 L.T.R. 141 la p. 143).
IL EST ORDONNE que soit accordée une injonction rédigée
conformément aux termes des paragraphes a) et b) de l'avis de
requête daté du• 11 octobre 1974 et entrant en vigueur le jour
où la demanderesse déposera à la Cour un cautionnement de
$25,000 pour dommages-intérêts. Les frais afférents à la pré-
sente ordonnance sont accordés à la demanderesse.
En cette Cour, le 4 février 1975, la conclusion
de l'audition d'un appel de ce jugement, les motifs
que voici ** ont été rendus:
* [Motifs du jugement de première instance (T-3589-74) non
circulés—Éd.]
** [Motifs oraux du jugement (A-398-74) non circulés—Éd.]
[TRADUCTION] Bien qu'aucun de nous ne soit persuadé qu'à
la place du savant juge de première instance, il aurait accordé
l'injonction relativement aux dessins ou modèles déposés, on ne
nous a pas convaincus que le savant juge de première instance a
fait une erreur sur une question de principe dans l'exercice de
son pouvoir discrétionnaire d'accorder une telle injonction.
Certains éléments de preuve lui permettaient de conclure qu'en
attendant une décision sur la validité des enregistrements, les
avantages réciproques demandaient que l'on interdise à l'appe-
lante d'utiliser les dessins ou modèles déposés. Cette dernière
n'avait pas encore mis en vente au Canada des meubles conçus
selon ces dessins alors que l'intimée l'avait fait. Et, dans
l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le savant juge de
première instance était fondé à retenir contre l'appelante la
contrefaçon apparente des dessins ou modèles de l'intimée
avant qu'ils n'aient été déposés.
Cependant, nous estimons que l'injonction est rédigée en des
termes trop larges. A notre avis, l'injonction accordée confor-
mément au paragraphe a) de l'avis de requête, devrait simple-
ment interdire à l'appelante personnellement et à ses mandatai-
res, ses préposés ou ses employés, jusqu'à ce qu'on ait statué sur
l'action, de se servir, aux fins de la vente, des modèles ou
dessins contenus dans les enregistrements portant les numéros
38111, 38112, 38113 ou 38114, ou toute imitation trompeuse
de ceux-ci.
De plus, on n'a pas prouvé le bien-fondé de l'injonction
rédigée conformément au paragraphe b) de l'avis de requête et
nous sommes d'avis qu'elle doit être annulée.
Dans les circonstances, aucuns dépens ne seront accordés
dans l'appel.
Conformément à la Règle 337, l'appelante peut rédiger un
projet de jugement et présenter une demande de jugement en
vertu de la Règle 324.
La Règle 337 dit notamment:
Règle 337. (1) La Cour pourra rendre une décision sur toute
question qui a fait l'objet d'une audition
a) en rendant un jugement à l'audience avant que l'audition
ne soit terminée, ou
b) après avoir réservé son jugement en attendant la fin de
l'audition, en déposant le document nécessaire au greffe,
de la manière prévue au paragraphe (2).
(2) Lorsque la Cour est arrivée à une décision sur le juge-
ment à prononcer, elle doit, en plus de donner, le cas échéant,
les motifs de son jugement,
a) prononcer le jugement (Formule 14) dans un document
distinct signé par le juge présidant, ou
b) à la fin des motifs du jugement, s'il en est, et sinon par
déclaration spéciale de sa conclusion, déclaration qui peut
être faite oralement à l'audience ou par document déposé au
greffe, indiquer que l'une des parties (habituellement la
partie gagnante) peut préparer un projet de jugement appro-
prié pour donner effet à la décision de la Cour et demander
que ce jugement soit prononcé (requête qui sera habituelle-
ment faite en vertu de la Règle 324).
(3) Après présentation d'une requête prévue au paragraphe
(2)b), la Cour fixera les termes du jugement et prononcera le
jugement qui sera signé par le juge présidant. (Formule 14).
L'avis de cette demande déposé le 26 juillet
1976 indique qu'a été présentée une demande de
[TRADUCTION] «Jugement conforme aux motifs
du jugement prononcés oralement ... le mardi, 4
février 1975» et il se fonde sur le «consentement»
donné à une «ordonnance» qui se lit ainsi:
[TRADUCTION] Sur appel de l'appelante d'une ordonnance
de l'honorable juge Gibson de la Division de première instance,
datée du lundi 9 décembre 1974, qui accorde une injonction
conforme aux termes des paragraphes a) et b) de l'avis de
requête daté du 11 octobre 1974, prenant effet le jour où la
demanderesse déposera à la Cour un cautionnement de $25,000
pour dommages, en présence des avocats de l'appelante et de
l'intimée, le juge en chef ayant rendu oralement aujourd'hui les
motifs de la Cour, il est ordonné que:
1. L'injonction accordée par l'honorable juge Gibson le lundi 9
décembre 1974 conformément aux termes du paragraphe a) de
l'avis de requête déposé devant la Division de première ins
tance, en date du 11 octobre 1974 est modifiée comme suit:
Une injonction interdisant à l'appelante elle-même, à ses
agents, ses employés ou mandataires, jusqu'au jugement de
l'action, d'appliquer aux fins de la vente tous dessins conte-
nus dans les enregistrements de dessins industriels portant les
numéros 38111, 38112, 38113 ou 38114, ou toute imitation
trompeuse de ceux-ci.
2. L'injonction accordée par l'honorable juge Gibson le lundi 9
décembre 1974 conformément aux termes du paragraphe b) de
l'avis de requête déposé devant la Division de première instance
le 11 octobre 1974 est annulée par les présentes.
3. Aucuns dépens ne seront accordés dans cet appel.
L'ordonnance sur consentement projetée est rédi-
gée de sorte que, si elle était signée, elle semblerait
avoir été rendue le «mardi 4 février 1975», le jour
où l'appel a été entendu et où la Cour a rendu sa
décision.
Soulignons tout d'abord que selon mon interpré-
tation de la Règle 337, aucune décision de cette
Cour n'est rendue sur un appel tant qu'un juge-
ment (par opposition aux motifs du jugement) n'a
pas été signé par le juge présidant, soit conformé-
ment à la Règle 337(2)a) ou à la Règle 337(3), et
un tel jugement ne prend effet que lorsqu'il a été
signé. Je ne vois pas sur quoi on pourrait se fonder
pour rendre rétroactif au jour où la Cour a
exprimé sa décision conformément à la Règle
337(2)a) un jugement signé conformément à la
Règle 337(3).
Le second point à souligner est que le projet de
jugement convenu me semble incapable de donner
effet à la décision de cette Cour en date du 4
février 1975.
Je propose que le jugement soit ainsi rédigé:
DANS LA COUR D'APPEL FÉDÉRALE
jour, le jour de , 1976.
CORAM: Le juge en chef,
Le juge Pratte,
Le juge Urie.
ENTRE
LIBERTY ORNAMENTAL IRON LIMITED,
Appelante,
et
B. FERTLEMAN & SONS LIMITED,
Intimée.
JUGEMENT
1. L'appel est accueilli sans dépens.
2. La partie du jugement de la Division de première instance
qui se lit
IL EST ORDONNÉ que soit accordée une injonction rédigée
conformément aux termes des paragraphes a) et b) de l'avis
de requête daté du 11 octobre 1974 et entrant en vigueur le
jour où la demanderesse déposera à la Cour un cautionne-
ment de $25,000 pour dommages-intérêts.
est annulée.
3. L'appelante se voit personnellement interdire par les présen-
tes, ainsi que ses administrateurs, ses employés ou mandataires,
tant que la Division de première instance n'aura pas statué sur
l'action, de se servir, relativement à tout article, aux fins de la
vente, des modèles ou dessins contenus dans les enregistrements
de dessins industriels portant les numéros 38111, 38112, 38113
ou 38114, ou toute imitation trompeuse de ceux-ci.
Juge en chef
Si le cautionnement mentionné dans la partie du
jugement de première instance qui doit être annu-
lée n'a pas été versé, on devra en faire une mention
appropriée pour indiquer la date où l'injonction
prend effet.
Je propose que la demande de jugement présen-
tée conformément à la Règle 324 soit rejetée avec
permission de présenter une autre demande.
* * *
LE JUGE PRATTE: Je souscris.
* * *
LE JUGE URIE: Je souscris.
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