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A-547-75
Le Syndicat international des marins canadiens (Appelant)
c.
La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (Intimée)
et
Canadien Pacifique Limitée (Appelante)
c.
La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (Intimée)
Cour d'appel, les juges Pratte et Le Dain et le juge suppléant Hyde—Montréal, les 20 et 23 janvier 1976.
Examen judiciaire et appel La CCT a décidé de reconnaî- tre la proposition d'acquisition de l'intimée La Commission a-t-elle commis une erreur de droit, en ne rejetant pas l'acqui- sition proposée parce que le CN n'avait pas le pouvoir de conclure une telle transaction et en ne considérant pas d'autres arguments avancés?—La Commission a-t-elle mal interprété l'article 27(4)b) de la Loi nationale sur les transports?—La Commission a-t-elle enfreint un principe de la justice natu- relle en fondant sa décision sur des renseignements non divul- gués aux opposants? Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, c. N-17, art. 22 et 27.
Ces appels et la demande en vertu de l'article 28 visent la décision de la Commission canadienne des transports de recon- naître la proposition d'acquisition par l'intimée d'une participa tion dans deux compagnies de transport. L'appelant S.I.M.C. prétend que la Commission a commis une erreur de droit (1) parce que le CN n'avait pas le pouvoir de conclure une telle transaction et (2) parce qu'elle n'a pas considéré d'autres arguments qu'il a fait valoir et qui auraient mené à la conclu sion que l'acquisition proposée était préjudiciable à l'intérêt public. L'appelante CP allègue (3) que la Commission a mal interprété l'article 27(4)b) en décidant sur la base des consé- quences de l'acquisition proposée à l'égard des opposants et non de l'intérêt public et (4) que la Commission a enfreint un principe de la justice naturelle en fondant sa décision sur des renseignements non divulgués aux opposants, les privant ainsi de la possibilité de faire des observations et d'apporter des preuves.
Arrêt: les appels et la demande en vertu de l'article 28 sont rejetés. (1) En vertu de l'article 27(4), la Commission doit se faire une opinion sur les conséquences de l'acquisition proposée et non sur les conditions préalables à sa validité en droit. (2) En rejetant les arguments avancés, la Commission a validement exercé ses pouvoirs en vertu de l'article 27(4). (3) La Commis sion a correctement interprété ses devoirs en vertu de l'article 27(4). (4) Si la Commission décide de tenir une audition en vertu de l'article 27(4), cette audition ne constitue rien de plus qu'une partie de son enquête. Elle ne transforme pas l'enquête
en un débat contradictoire. La décision de la Commission de tenir une audition publique ne confère pas aux opposants des droits qu'ils n'auraient pas autrement. L'allégation des appe- lants que le droit de faire opposition en vertu de l'article 27(3) comporte le droit à la possibilité de contredire tout renseigne- ment portant sur l'opposition, obtenu par la Commission au cours de son enquête, est fondée sur l'hypothèse erronée que la présentation d'une opposition crée un lis ou quasi-lis auquel est partie l'opposant, et qui ne peut être tranché sans que celui-ci ait pu se faire entendre. Aux termes de l'article 27, un opposant peut seulement faire opposition; cet article ne lui confère pas le droit à un débat contradictoire.
Le juge Le Dain: Il n'existe aucune obligation générale de divulguer tous les documents sur lesquels la décision sera fondée, comme notamment les renseignements dont un tribunal peut prendre formellement connaissance. Le droit prévu à l'article 27(3), permettant aux personnes visées par l'acquisi- tion proposée de s'y opposer, implique que l'enquête doit leur donner l'entière possibilité de faire opposition d'une façon efficace. Outre l'intérêt des personnes visées, il est dans l'intérêt public général d'accorder la possibilité de s'opposer d'une façon efficace, car cela constitue le principal moyen dont la Commis sion dispose pour parvenir à une décision. Ce que représente l'entière possibilité de faire opposition de façon efficace dépend de la nature de l'opposition et des questions qu'elle soulève. Cela ne signifie pas que la Commission ne peut rejeter l'acqui- sition proposée que si elle conclut au bien-fondé des oppositions. Une fois que la Commission est saisie du dossier à la suite d'une opposition, ses pouvoirs ne se limitent pas à déterminer si l'opposant a prouvé ses allégations. Il ne s'agit pas de trancher un litige entre la partie se proposant de conclure l'acquisition et l'opposant; ce dernier a droit à l'entière possibilité de présenter son opposition de façon efficace, sans toutefois être fondé à répondre à tous les éléments sur lesquels pourrait être basée la décision.
Le juge suppléant Hyde: L'enquête n'a pas créé un lis les opposants avaient le droit d'exiger que les dossiers soumis à la Commission leur soient remis pour examen. Bien que certaines étapes de l'audition se rapprochent d'un lis entre les parties, peut s'appliquer la règle audi alteram partem, j'estime qu'en l'espèce on ne peut l'invoquer.
Arrêts appliqués: Board of Education c. Rice [1911] A.C. 179 et La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Bell Telephone Company of Canada [1939] R.C.S. 308. Distinction faite avec l'arrêt: Magnasonic Canada Limited c. Le Tribunal antidumping [1972] C.F. 1239. Arrêts analysés: Knapman c. Board of Health (1957) 6 D.L.R. (2e) 81 et [1955] 3 D.L.R. 248 confir- mant [1954] 3 D.L.R. 760 et [1954] O.R. 360; R. c. Ontario Racing Commission [1971] 1 O.R. 400; Biais c. Andras [1973] C.F. 182; Lazarov c. Le Secrétaire d'État [1973] C.F. 927; Local Government Board c. Arlidge [1915] A.C. 120; Errington c. Minister of Health [1935] 1 K.B. 249 et Volkswagen Northern Ltd. c. Board of Indus trial Relations (1964) 49 W.W.R. 574. Arrêt approuvé: B. Johnson and Co. (Builders) Ltd. c. Minister of Health [1947] 2 All E.R. 395.
APPEL et examen judiciaire.
AVOCATS:
J. Nuss pour le Syndicat international des marins canadiens.
M. S. Bistrisky pour Canadien Pacifique Limitée.
H. J. G. Pye, c.r., et G. M. Cooper pour la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada.
G. W. Ainslie, c.r., et W. G. St. John pour la Commission canadienne des transports.
PROCUREURS:
Ahern, De Brabant, Nuss & Drymer, Mont- réal, pour le Syndicat international des marins canadiens.
Les services juridiques de Canadien Pacifi- que, Montréal, pour Canadien Pacifique Limitée.
Les services juridiques des chemins de fer nationaux du Canada, Montréal, pour la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada.
Le sous-procureur général du Canada pour la Commission canadienne des transports.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés oralement par
LE JUGE PRATTE: Appel est interjeté par le Syndicat international des marins canadiens et Canadien Pacifique Limitée à l'encontre de la décision de la Commission canadienne des trans ports de reconnaître l'acquisition par l'intimée d'une participation dans deux compagnies de transport. Le Syndicat international des marins canadiens a aussi contesté cette décision en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale. Les deux appels et la demande en vertu de l'article 28 furent réunis conformément à une ordonnance de la Cour, rendue le 25 novembre 1975.
La décision contestée se fonde sur l'article 27 de la Loi nationale sur les transports, dont voici le texte:
27. (1) Une compagnie de chemin de fer, une compagnie de pipe-line pour denrées, une compagnie de transport par eau, une personne exploitant une entreprise de transport par véhi- cule à moteur ou un transporteur par air, assujetti à la compé- tence législative du Parlement du Canada, qui se propose d'acquérir, directement ou indirectement, par achat, location à bail, fusion, consolidation ou autrement, un intérêt dans les affaires ou l'entreprise de toute personne principalement enga-
gée dans des opérations de transport, que ces affaires ou cette entreprise soient ou non soumises à la compétence du Parle- ment, doit donner à la Commission avis de l'acquisition proposée.
(2) La Commission doit donner ou faire donner l'avis public ou tel autre avis de toute acquisition proposée mentionnée au paragraphe (1) qui lui semble raisonnable dans les circons- tances, y compris l'avis au directeur des enquêtes et recherches en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions.
(3) Toute personne visée par une proposition d'acquisition mentionnée au paragraphe (1) ou toute association ou autre organisme représentant les transporteurs ou des entreprises de transport visées par cette acquisition peut, dans le délai qui peut être prescrit par la Commission, s'opposer auprès de la Commission à cette acquisition en invoquant le motif qu'elle restreindra indûment la concurrence ou portera autrement pré- judice à l'intérêt public.
(4) Lorsqu'il est fait opposition en conformité du paragraphe (3), la Commission
a) doit faire l'enquête, comprenant notamment la tenue d'auditions publiques, qu'elle estime nécessaire ou souhaita- ble dans l'intérêt du public;
b) peut ne pas reconnaître une semblable acquisition si, de l'avis de la Commission, cette acquisition doit restreindre indûment la concurrence ou être par ailleurs préjudiciable à l'intérêt public;
et toute semblable acquisition, à laquelle il a été fait opposition dans le délai prévu à cette fin par la Commission et que la Commission n'a pas reconnue, est nulle.
(5) Rien au présent article ne doit s'interpréter comme autorisant l'acquisition d'un intérêt dans une autre compagnie lorsque cette acquisition est interdite par quelque loi du Parle- ment du Canada. 1966-67, c. 69, art. 20.
Le 31 juillet 1975, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada a donné avis à la Com mission canadienne des transports de son intention d'acquérir une participation dans le capital-actions de deux compagnies de transport étrangères. La Commission a par la suite donné l'avis prévu à l'article 27(2) et les deux appelants, de même que d'autres personnes prétendant être visées par ce projet, se sont opposées à cette acquisition auprès de la Commission. Agissant par l'intermédiaire de son comité des transports par eau, la Commission a mené une enquête et, dans le cadre de cette enquête, a tenu une audience publique à laquelle ont comparu les deux appelants et les autres oppo- sants. Au terme de son enquête, la Commission décida de reconnaître l'acquisition proposée. C'est cette décision que visent les présentes procédures.
L'avocat du Syndicat international des marins canadiens a avancé deux arguments. Il a déclaré que la Commission avait commis une erreur de droit en ne rejetant pas l'acquisition proposée, car
la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada n'avait pas le pouvoir de conclure une telle transaction. Il a aussi allégué que la Commission avait commis une erreur de droit en ne considérant pas d'autres arguments qu'il a fait valoir devant elle car, à son avis, si elle en avait tenu compte, elle aurait pu conclure que l'acquisition proposée était préjudiciable à l'intérêt public.
Comme nous l'avons indiqué à l'audience, nous sommes d'avis que ces arguments ne sont pas fondés. A supposer, comme le prétend l'avocat, que la Commission n'ait pas examiné la question de savoir si les pouvoirs de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada sont suffisamment larges pour l'autoriser à conclure l'acquisition pro posée, nous estimons que ce défaut ne vicie pas la décision de la Commission. En vertu de l'article 27(4), la Commission doit se faire une opinion sur les conséquences de l'acquisition proposée et non sur les conditions préalables à sa validité en droit. Nous pensons aussi que le défaut de la Commis sion de tenir compte des autres arguments soulevés par l'avocat ne vicie pas sa décision. Ces argu ments tendaient tous à démontrer que l'acquisition proposée serait préjudiciable à l'intérêt public. La Commission les a examinés et résumés correcte- ment dans sa décision. Elle les a cependant rejetés, estimant qu'ils étaient ni pertinents, ni fondés. Nous sommes d'avis qu'en concluant de la sorte la Commission a validement exercé ses pouvoirs en vertu de l'article 27(4). Cet article confère à la Commission, et non à cette cour, le pouvoir de déterminer si l'acquisition proposée est préjudicia- ble à l'intérêt public; pour exécuter ce devoir, la Commission doit définir quelles sont, à son avis, les exigences de l'intérêt public.
L'avocat de Canadien Pacifique Limitée a aussi avancé deux arguments qui ont été repris par l'avocat de l'autre appelant.
En premier lieu, il a prétendu que la Commis sion avait mal interprété l'article 27(4)b) de la Loi nationale sur les transports. Pour appuyer cette thèse, l'avocat a cité un extrait de la décision contestée qui, à son avis, démontre que la Commis sion s'est fondée sur une supposition erronée, savoir qu'elle devait, en vertu de l'article 27(4), évaluer les conséquences de l'acquisition proposée
à l'égard des opposants au lieu de l'intérêt public. Comme nous l'avons déclaré à l'audience, nous estimons que cet argument n'est pas fondé. D'après le contexte, il est clair qu'en s'exprimant de la sorte, la Commission n'entendait pas décrire l'étendue de ses pouvoirs en vertu de l'article 27(4). Il ressort de la lecture de l'ensemble de la décision que la Commission a correctement inter- prété ses devoirs.
Le second argument invoqué par l'avocat de Canadien Pacifique Limitée est le seul au sujet duquel la Cour a estimé nécessaire d'entendre les avocats de l'intimée et de la Commission. Selon cet argument, la Commission a enfreint un principe de la justice naturelle en fondant sa décision sur des renseignements non divulgués aux opposants, les privant ainsi de la possibilité de faire des observa tions et d'apporter des preuves à cet égard.
Cet argument se réfère au dernier paragraphe de la décision contestée, dont voici le texte:
Aussi, nous avons pesé avec soin toutes les preuves soumises au cours de l'audience publique et étudié à fond tous les renseignements qui nous ont été fournis au cours de notre enquête sur l'acquisition proposée, et avons conclu que, dans le cadre nous devons considérer l'affaire, rien n'indique que l'acquisition proposée restreindra indûment la concurrence ou portera autrement préjudice à l'intérêt public. En conséquence, nous ne rejetons pas l'acquisition proposée.
A l'appui de cette allégation, les avocats ont invoqué une jurisprudence bien établie les tri- bunaux ont jugé que, lorsqu'une autorité ne peut prendre une décision sans au préalable donner à la partie concernée une possibilité de se faire enten- dre d'une façon efficace, celle-ci ne bénéficie pas d'une audition équitable si l'autorité en question ne lui accorde pas la possibilité de réfuter les preuves qu'elle a obtenues et qui sont préjudiciables à la partie en cause.
J'estime inutile d'examiner les décisions citées par les avocats à cet égard, car une lecture atten tive de l'article 27(3) et (4) de la Loi nationale sur les transports démontre qu'elles ne sont pas perti- nentes en l'espèce.
Aux termes de l'article 27(3), le seul droit d'une personne visée par un projet d'acquisition est de s'y
opposer auprès de la Commission. Lorsqu'il est fait opposition, la Commission doit faire l'enquête qu'elle estime nécessaire ou souhaitable dans l'in- térêt du public afin d'être en mesure de déterminer si l'acquisition proposée restreindra indûment la concurrence ou sera par ailleurs préjudiciable à l'intérêt public. Le but de l'enquête tenue par la Commission ne consiste pas seulement à lui per- mettre de juger de la validité des divers arguments soulevés par les avocats des opposants à l'appui de leur opposition; la Commission est également tenue de se faire une opinion quant aux effets de l'acquisition proposée. Si la Commission décide de tenir une audition publique en vertu de l'article 27(4)a), cette audition ne constitue rien de plus qu'une partie de son enquête. La décision de tenir une audition publique ne transforme pas l'enquête de la Commission en un débat contradictoire. Je ne vois pas comment le fait de tenir une audition publique confère aux opposants des droits qu'ils n'auraient pas autrement. Les droits des opposants ne varient pas selon la décision de la Commission de tenir ou non une audition publique.
Le droit d'une personne de faire opposition, en vertu de l'article 27(3), peut impliquer le droit de présenter des preuves et des arguments à l'appui de l'opposition. Il est inutile de trancher cette ques tion en l'espèce, car il est admis que les appelants ont eu cette possibilité. Selon les appelants, le droit de faire opposition en vertu de l'article 27(3) comporte, en plus du droit de présenter des preuves et des arguments à l'appui de leur opposition, le droit à la possibilité de contredire tout renseigne- ment portant sur l'opposition, obtenu par la Com mission dans le cours de son enquête. A mon avis, cette allégation est fondée sur l'hypothèse erronée que la présentation d'une opposition en vertu de l'article 27(3) crée un lis ou quasi-lis auquel est partie l'opposant et qui ne peut être tranché sans que celui-ci ait pu se faire entendre équitablement.
A mon avis, le seul droit d'un opposant en vue de l'article 27 est de s'opposer à l'acquisition pro posée (avec tout ce que ce droit comporte); cet article ne confère pas à l'opposant le droit à un débat contradictoire en vue de déterminer la vali- dité de l'opposition. Je dois ajouter que je ne vois
rien dans cette législation qui soit injuste ou con- traire à la justice naturelle.
Pour ces motifs, je rejetterais les appels et la demande en vertu de l'article 28.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés oralement par
LE JUGE LE DAIN: Je souscris aux motifs de mon collègue le juge Pratte et n'entends ajouter que quelques commentaires sur la question de la justice naturelle.
Il s'agit, d'une façon générale, de déterminer jusqu'à quel point les règles de la justice naturelle obligent un tribunal administratif à communiquer aux parties intéressées les éléments sur lesquels il entend fonder sa décision. Aucune règle générale- ne peut être formulée à ce sujet. Chaque cas doit être étudié à la lumière des circonstances particu- lières et du contexte législatif. Les deux principes de base concernés—le droit d'un tribunal adminis- tratif de réunir les éléments de base de sa décision de multiples façons et le droit d'une partie intéres- sée d'avoir la possibilité de présenter sa preuve d'une façon efficace—sont exprimés avec concision dans le dictum souvent cité du lord Chancelier Loreburn, dans l'arrêt Board of Education c. Rice [1911] A.C. 179, la page 182: [TRADUCTION] «Il peut obtenir des renseignements de la manière qu'il juge la meilleure, en donnant toujours aux parties engagées dans la controverse une possibilité suffisante de corriger ou de contredire toute décla- ration pertinente portant préjudice à leur cause.»
De toute évidence, un tribunal de ce genre, particulièrement lorsqu'il doit, comme en l'espèce, se prononcer sur des questions de politique, de fait et de droit, peut, en l'absence de dispositions légis- latives à l'effet contraire, fonder sa décision sur divers éléments incluant, outre la preuve et les arguments présentés à l'audition, les renseigne- ments et opinions obtenus autrement et dont il peut prendre connaissance formellement, et son expérience. Comme l'a déclaré le juge en chef Duff dans l'affaire La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Bell Telephone Company of Canada [1939] R.C.S. 308, à la page 317, au sujet de l'ancienne Commission des chemins de fer:
[TRADUCTION] La Commission n'est pas liée par les règles ordinaires de la preuve. En se prononçant sur des questions de fait, elle doit inévitablement faire appel à son expérience dans ce domaine, compte tenu des nombreux dossiers qui lui sont soumis, ainsi qu'à l'expérience de ses conseillers techniques. En conséquence, devant des questions de fait soulevées dans le cadre d'un problème administratif par exemple, il est possible que la Commission soit à même de poser avec certitude un jugement sur des faits et des circonstances qui ne laisseraient à un tribunal ne possédant pas les moyens ni les facilités de la Commission, qu'une impression vague et ambiguë.
Il reste cependant à déterminer jusqu'à quel point, dans des cas particuliers, un tribunal peut être tenu de communiquer les preuves, les rensei- gnements et les opinions dont il entend tenir compte pour parvenir à une décision. La jurispru dence ne donne encore que peu d'indications préci- ses quant à l'étendue éventuelle de ce devoir de divulgation. Elle est loin d'appliquer littéralement le principe énoncé par lord Loreburn—[TRADUC- TION] «une possibilité suffisante de corriger ou de contredire toute déclaration pertinente portant préjudice à leur cause'.»
Bien sûr, le devoir de divulgation n'existe que dans la mesure s'appliquent les règles de la justice naturelle, ou lorsqu'il existe un devoir d'agir équitablement tant en matière de procédure qu'en droit positif. La déclaration de lord Lore- burn dans Board of Education c. Rice concernait un organisme administratif investi du devoir de
de Smith, Judicial Review of Administrative Action (3° éd.)
1973, pages 182 et 183, propos des devoirs relatifs à la conduite des audiences, par des tribunaux investis de pouvoirs très étendus en ce qui concerne l'élaboration du fondement de la décision, déclare:
[TRADUCTION] Ils sont néanmoins obligés d'agir conformé- ment aux règles de la justice naturelle. Cela signifie qu'en l'absence de disposition contraire, ils ne peuvent désavanta- ger une partie en lui refusant la possibilité de commenter de façon efficace les éléments pertinents à la décision si ceux-ci viennent de sources extérieures ou s'ils ont été obtenus au cours de leurs enquêtes ou à la suite de preuves soumises à l'occasion d'affaires antérieures. La jurisprudence ne donne encore aucune indication précise sur la portée de leur pouvoir de ne pas communiquer à l'audience les opinions de leurs propres experts ou les renseignements concernant l'exercice de leur pouvoir discrétionnaire lorsqu'ils peuvent tenir compte de l'intérêt public. On estime cependant que les cours auront tendance à imposer, dans la mesure du possible, des normes judiciaires, de sorte que lorsqu'une partie est induite en erreur quant aux éléments sur lesquels le tribunal entend vraisemblablement fonder sa décision, et se trouve ainsi fort désavantagée pour présenter sa preuve, on peut conclure au déni de justice naturelle.
trancher des questions de droit et de fait, dans un domaine l'on pouvait parler de controverse ou de parties adverses—en d'autres termes un lis. Dans de tels cas, les tribunaux tendent de plus en plus à reconnaître le devoir de communiquer les rapports d'inspecteurs ou les autres documents sur lesquels la décision sera fondée'. On a aussi affirmé le principe qu'un tribunal ne doit pas recevoir les preuves ou arguments d'une partie en les dissimulant à l'autre'. Dans les cas une décision peut influer sur des droits ou intérêts individuels, on a reconnu que la justice naturelle, ou la justice, exige la communication des docu ments qu'une partie doit connaître afin de pouvoir se défendre d'une façon efficace.
Cependant, je ne connais aucun précédent éta- blissant un devoir général de communiquer tous les éléments sur lesquels la décision sera fondée, y compris les renseignements dont le tribunal peut prendre connaissance formellement. Il semble manifeste qu'en pratique on ne peut s'attendre à ce qu'un tribunal révèle son expertise ou, en d'autres termes, fasse connaître les politiques générales résultant de ses qualifications et expériences parti- culières sur lesquelles est fondée son opinion aver- tie. De toute évidence, les mots «tous les renseigne- ments qui nous ont été fournis au cours de notre enquête sur l'acquisition proposée» visent autre chose. Ils semblent porter sur des renseignements, et peut-être des preuves, soumis au comité des transports par eau au cours de son enquête, mais nous ne connaissons pas la nature de «ces rensei- gnements» dont parle le comité dans sa conclusion et encore moins leur lien avec les oppositions spéci- fiques des appelants, ou leur portée.
z Voir, par exemple, Knapman c. Board of Health for Salt - fleet Township [1954] O.R. 360, [1954] 3 D.L.R. 760 (arrêt confirmé à [1955] 3 D.L.R. 248, et (1957) 6 D.L.R. (2') 81); R. c. Ontario Racing Commission [1971] 1 O.R. 400, 15 D.L.R. (3') 430; Blais c. Andras [1973] C.F. 182; Lazarov c. Le Secrétaire d'État du Canada [1973] C.F. 927. A cet égard, il semble que les tribunaux se soient éloignés de la position adoptée dans la décision de la Chambre des lords Local Government Board c. Arlidge [1915] A.C. 120, la cour a jugé qu'en appel devant le Local Government Board, on n'avait pas le droit de consulter le rapport de l'inspecteur dans le cadre de l'enquête locale publique, car le devoir de divulgation pour- rait nuire au franc parler dans les communications gouvernementales.
3 Voir, par exemple, Errington c. Minister of Health [1935] 1 K.B. 249; Volkswagen Northern Ltd. c. Board of Industrial Relations (1964) 49 W.W.R. 574.
Les appelants se sont principalement fondés sur la décision de cette cour dans Magnasonic Canada Limited c. Le Tribunal antidumping [1972] C.F. 1239, il fut arrêté que le Tribunal antidumping n'avait pas mené l'enquête exigée par la Loi parce qu'il avait statué d'après des renseignements non communiqués aux parties. Dans cette affaire, le Tribunal devait déterminer si le dumping de cer- taines marchandises avait causé, causait ou était susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises sembla- bles. Comme en l'espèce, l'enquête comportait une audience publique ainsi que d'autres formes d'in- vestigations 4 . Le juge en chef Jackett, rendant le jugement de la Cour, déclarait la page 1244]: «Il faut remarquer que le trait caractéristique de ce genre d"enquête' est que, bien que les `parties' aient eu une connaissance complète de la preuve apportée lors de l'audience publique, elles n'avaient pas la possibilité de connaître quelles autres preuves ou renseignements le Tribunal avait acceptés et n'avaient pas la possibilité d'y répondre ou de faire valoir leurs prétentions à cet égard».
La Cour a conclu comme suit la page 1249]:
En conséquence, nous sommes d'avis que le Tribunal a pris la décision attaquée sans avoir mené l'enquête exigée par la loi, dans la mesure il a agi sur des renseignements qui ne lui avaient pas été communiqués au cours des audiences du Tribu nal ou par un seul membre du Tribunal ainsi que le prévoit la loi; il s'ensuit que les parties n'ont pas eu la possibilité de répondre à ces renseignements (soit tels qu'ils avaient été obtenus ou, lorsqu'ils étaient fondés sur des communications confidentielles, tels que communiqués conformément à l'article
4 Le juge en chef Jackett la page 1244] décrit comme suit l'enquête en question:
Lors de la présente «enquête», il y a eu d'une part une audience publique devant laquelle la Magnasonic et les autres parties, toutes représentées par des avocats, ont apporté des éléments de preuve et ont eu la possibilité de faire valoir leurs prétentions à l'égard des preuves présentées. Toutefois il était entendu que, lors de cette audience, nul ne serait tenu de témoigner contre sa volonté s'il estimait qu'il devait divulguer des éléments «confidentiels». D'autre part, durant l'enquête un ou plusieurs membres du Tribunal ou le personnel du Tribunal, en dehors des séances, ont reçu la preuve confidentielle exigée par le Tribunal ou envoyée volontairement par le sous-ministre ou d'autres personnes. Enfin, durant l'enquête, un ou plusieurs membres de la Commission ou de son personnel se sont rendus dans les locaux des fabricants canadiens. Ils ont également fait une ou plusieurs entrevues au cours desquelles ils ont obtenu des éléments de preuve et des renseignements.
29(3)) ni de faire valoir leurs prétentions à cet égard.
L'arrêt Magnasonic semble principalement fondé sur la conclusion que les dispositions perti- nentes de la Loi révèlent l'intention d'instruire une enquête au moyen d'audiences auxquelles les par ties peuvent comparaître et être représentées et que cela implique nécessairement la communica tion aux parties en cause, par le Tribunal, de toute preuve ou tout renseignement sur lequel il se pro pose de fonder sa décision, afin qu'elles puissent répondre, par témoignage ou plaidoirie, à tout ce qu'elles considèrent susceptible de porter préjudice à leur cause. A cet égard, le juge en chef Jackett soulignait la page 1247]: «Le droit d'une partie de `comparaître' à une `audience' n'aurait pas de portée réelle si la décision ne devait pas être fondée sur ladite `audience' ou si la partie n'avait pas le droit fondamental d'y être entendue.» Puis il ajou- tait [aux pages 1248-49]:
Nous sommes tout à fait d'accord avec le fait que le Tribunal peut par différents moyens rassembler les renseignements rela- tifs à l'affaire qui lui est soumise. Il nous semble que la loi prévoit inclure ces éléments de preuve dans le dossier de l'affaire, dans la mesure ils semblent utiles. Ceci doit se faire au cours des auditions, de la façon que le Tribunal choisit, à condition que la procédure adoptée soit compatible avec le fait d'accorder aux «parties» la possibilité d'être entendues (l'une des façons évidentes consiste à inviter les avocats de la commis sion à soumettre leur preuve et à faire valoir leurs prétentions de la même façon que les avocats d'une partie).
En l'espèce, le droit statutaire de s'opposer et le devoir statutaire de faire enquête semblent être de nature différente. Il est clair que la Commission a le pouvoir discrétionnaire de déterminer, dans chaque cas, le type d'enquête qu'elle va mener et de décider de tenir ou non une audition publique; ce qui suffit à différencier ses devoirs en matière d'enquête du devoir statutaire d'enquêter défini par la Cour dans l'arrêt Magnasonic.
A mon avis, le droit prévu au paragraphe (3) de l'article 27 de la Loi nationale sur les transports permettant aux personnes visées par l'acquisition proposée de s'y opposer au motif qu'elle restrein- dra indûment la concurrence ou portera autrement préjudice à l'intérêt public implique que l'enquête menée conformément au paragraphe (4) doit donner à ces personnes l'entière possibilité de s'y opposer de façon efficace. Outre l'intérêt des ,per-
sonnes visées par l'acquisition proposée, il est, comme l'a souligné le juge en chef dans l'arrêt Magnasonic, dans l'intérêt public général d'accor- der une possibilité de faire opposition d'une façon efficace, car cela constitue le principal moyen dont la Commission dispose pour parvenir à une déci- sion ou une opinion sur la question de savoir si l'acquisition proposée restreindra indûment la con currence ou sera autrement préjudiciable à l'inté- rêt public. Ce que représente dans un cas particu- lier, l'entière possibilité de faire opposition de façon efficace, dépend de la nature de l'opposition et des questions qu'elle soulève. Dans certains cas, une argumentation écrite suffira. Dans d'autres cas, il pourra s'avérer nécessaire de présenter des preuves, de permettre un contre-interrogatoire, et par conséquent de tenir une audition. En l'espèce, les appelants ont eu l'entière possibilité de présen- ter à l'audition publique les preuves et arguments motivant leurs oppositions. Ils allèguent cependant que leur droit de faire opposition comportait néces- sairement le droit de prendre connaissance de tous les renseignements qui pouvaient causer un préju- dice à leurs oppositions et d'y répondre.
Le droit de faire opposition est une chose; le droit à une décision sur la question litigieuse fondée sur les oppositions en est une autre. Bien que la compétence de la Commission en vertu de l'article 27 de la Loi soit subordonnée au dépôt d'oppositions, ces dernières ne déterminent pas l'étendue de la controverse dont la Commission est saisie. Il est exact que la même terminologie sert à décrire les motifs d'opposition et la question que la Commission doit trancher. Toutefois, cela ne signi- fie pas que la Commission ne peut rejeter l'acquisi- tion proposée que si elle conclut au bien-fondé des oppositions. Il se peut que sa décision résulte, non pas des oppositions, mais de sa propre enquête et de son examen de l'acquisition proposée. Une fois que la Commission est saisie du dossier à la suite d'une opposition, ses pouvoirs ne se limitent pas à déterminer si l'oppposant a prouvé ses allégations. Il ne s'agit pas de trancher un litige entre la partie se proposant de conclure l'acquisition et l'oppo- sant. Un opposant a droit à l'entière possibilité de présenter son opposition de façon efficace sans toutefois être fondé à répondre à tous les éléments sur lesquels pourrait être basée la décision.
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Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés oralement par
LE JUGE SUPPLÉANT HYDE: Plusieurs personnes intéressées, dont les deux appelants en l'espèce, ayant fait opposition auprès de la Commission, cette dernière était tenue, aux termes de l'article 27(4)a) de la Loi nationale sur les transports, de
... faire l'enquête, comprenant notamment la tenue d'auditions publiques, qu'elle estime nécessaire ou souhaitable dans l'inté- rêt du public.
et à la suite de cette enquête, la Commission était autorisée par l'alinéa b) à ne pas reconnaître l'ac- quisition proposée si, à son avis, l'acquisition devait «restreindre indûment la concurrence ou être par ailleurs préjudiciable à l'intérêt public».
Il est évident que la Commission n'est pas obli gée de tenir une audition publique à moins qu'elle
ne l'estime nécessaire pour mener une enquête
suffisante pour décider si elle reconnaîtra ou non l'acquisition.
S'il y a des auditions publiques, elles ne consti tuent pas nécessairement le seul mode d'enquête, comme l'indique clairement l'expression «compre-
nant notamment» relative aux auditions, à l'article 27(4)a).
La nature de la Commission est difficile à défi- nir. En règle générale, il s'agit d'un organe consul- tatif et d'un organe de contrôle chargé, entre autres, d'entreprendre des études sur les divers aspects du transport au Canada et d'en faire rap port au Ministre des transports, conformément à l'article 22 de la Loi'.
22. (1) Outre les pouvoirs, devoirs et fonctions que lui attribuent la Loi sur les chemins de fer, la Loi sur l'aéronauti- que et la Loi sur les transports, la Commission doit
a) faire enquête et rapport au Ministre sur les mesures à prendre pour aider au développement économique sain des divers moyens de transport relevant de la compétence du Parlement;
b) entreprendre des études et des recherches sur les aspects économiques de tous les moyens de transport à l'intérieur, à destination ou en provenance du Canada;
c) faire enquête et rapport au Ministre sur les relations entre les divers moyens de transport à l'intérieur, à destination ou en provenance du Canada et sur les mesures qui devraient être adoptées pour coordonner le développement, la régle- mentation et la direction des divers moyens de transport;
d) exercer, en plus des fonctions qui lui sont dévolues par la présente loi, telles autres fonctions qui peuvent, de temps à autre, lui être légalement imposées relativement à tout
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moyen de transport au Canada, notamment la réglementa- tion d'un tel moyen de transport et l'attribution des permis y afférents, le contrôle des taux et tarifs et l'administration des subventions votées par le Parlement pour un tel moyen de transport;
e) faire enquête et rapport au Ministre sur les mesures financières qui pourraient être nécessaires pour aider directe- ment tout moyen de transport et sur la méthode d'adminis- tration de toutes mesures qui peuvent être approuvées;
f) de temps à autre faire enquête et présenter au Ministre des recommandations sur les politiques et les mesures écono- miques qu'elle considère nécessaires et désirables en ce qui concerne le fonctionnement de la marine marchande du Canada, compte tenu des besoins du Canada dans ce domaine;
g) établir des normes et des critères économiques de portée générale devant servir à la détermination des investissements fédéraux en matériel et installations à répartir entre les divers moyens de transport et au sein de chacun d'eux, ainsi qu'à la détermination des rendements financiers qu'il serait souhaitable d'en obtenir;
h) faire enquête et conseiller le gouvernement au sujet de l'équilibre d'ensemble entre les programmes de dépenses entrepris par les ministères, les départements ou les organis- mes du gouvernement pour fournir des installations et du matériel de transport aux divers moyens de transport, et au sujet des mesures visant à développer les revenus provenant de l'utilisation des installations de transport - fournies ou exploitées par tout ministère, département ou organisme du gouvernement; et
i) collaborer aux aspects économiques des travaux des orga- nismes intergouvernementaux, nationaux ou internationaux qui s'occupent d'un moyen quelconque de transport relevant de la compétence du Parlement et faire des enquêtes, des examens et des rapports sur les effets et les exigences écono- miques qui résultent de la participation aux conventions internationales ou de leur ratification.
(2) La Commission peut procéder à des examens, faire des constatations et tenir des registres ainsi que faire des rapports appropriés au Ministre, au sujet
a) des services de navigation, entre ports canadiens et depuis des ports du Canada jusqu'à des ports de l'étranger, qui sont nécessaires pour maintenir et faire progresser normalement le commerce intérieur et extérieur du Canada;
b) du type, de la dimension, de la vitesse et des autres caractéristiques des navires qui sont et, de l'avis de la Com mission, devraient être utilisés par ces services;
c) du coût de l'assurance maritime, de l'entretien et des réparations, des salaires et de la subsistance des officiers et hommes d'équipage et de tous autres articles de dépenses afférents à l'exploitation des navires immatriculés au Canada de même qu'au sujet de la comparaison entre ces frais et ceux de navires analogues naviguant sous un autre pavillon;
d) de l'industrie des transports par eau et des entreprises et
services qui y sont directement rattachés;
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Dans l'exercice de leurs fonctions, les Commis- saires et le personnel de la Commission, acquièrent sans aucun doute des connaissances considérables et des archives imposantes qui leur sont utiles pour traiter des questions qui lui sont confiées, comme par exemple, en l'espèce, la formulation d'une opinion aux termes de l'article 27(4)b).
Les oppositions soulevées en conformité de l'ar- ticle 27(3), ont obligé la Commission à agir con-
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e) des modalités et usages s'appliquant au transport par eau des marchandises et des voyageurs à l'intérieur, à destination ou en provenance du Canada;
f) des travaux des agences et organismes internationaux et intergouvernementaux qui s'occupent de transport par eau de marchandises et de voyageurs; et
g) des autres questions afférentes à la marine marchande dont le Ministre peut lui demander de s'occuper ou dont la Commission peut estimer qu'il est nécessaire de connaître pour appliquer toute disposition ou réaliser toute fin de la présente loi.
(3) La Commission doit
a) au nom du Ministre, exercer tels pouvoirs et remplir tels devoirs ou fonctions dévolus au Ministre par la Loi sur la marine marchande du Canada que le Ministre la charge d'exercer ou de remplir; et
b) exercer les autres pouvoirs et remplir les autres devoirs ou fonctions, relativement au transport par eau, qui lui sont conférés ou qu'il lui est ordonné de remplir ou d'exercer par ou en conformité de toute autre loi ou de tout décret du gouverneur en conseil.
(4) Dans l'exercice des fonctions que lui attribue le présent article, la Commission peut consulter les personnes, les organis- mes et les autorités qui, à son avis, sont en mesure de l'aider à formuler et à recommander la ligne de conduite à suivre et la Commission peut nommer et consulter des comités représenta- tifs de ces personnes, organismes et autorités.
(5) La Commission peut déléguer, en tout ou en partie, à quelque autre organisme ou autorité ressortissant au pouvoir législatif du Parlement du Canada, l'un quelconque de ses pouvoirs ou fonctions en ce qui concerne la sécurité dans l'exploitation de pipe-lines pour denrées, et l'organisme ou l'autorité en question ayant fait l'objet d'une semblable déléga- tion peut exercer les pouvoirs, et doit s'acquitter des fonctions, ainsi délégués.
(6) Lorsqu'une personne qui transporte des marchandises par un mode de transport autre que le chemin de fer exige une taxe, exprimée sous forme d'une somme unique, pour le trans port de marchandises en partie par un mode de transport et en partie par un autre mode de transport, la Commission peut, en vue de décider si une taxe imposée est contraire à quelque loi du Parlement du Canada, sommer cette personne de lui décla- rer sans délai, ou peut déterminer elle-même, quelle partie de cette somme unique est imposée relativement au transport de marchandises par le mode de transport utilisé par cette per- sonne. 1966-67, c. 69, art. 15.
formément à l'article 27(4), mais l'«enquête» n'a pas créé un débat contradictoire ni un lis inter partes les opposants avaient le droit d'exiger que les dossiers soumis à la Commission (du type décrit ci-dessus) leur soient remis pour examen et inspection.
Avec tout le respect que je porte à la règle audi alteram partem qui constitue un des piliers de notre système judiciaire, on doit reconnaître qu'il ne s'agit pas ici d'un processus judiciaire.
L'opinion du maître des rôles lord Greene dans l'arrêt de la Cour d'appel anglaise, B. Johnson & Co. (Builders) Ltd. c. Minister of Healthb étaye fortement ma conclusion. Il s'agissait dans cette affaire d'une demande présentée par certains pro- priétaires fonciers visant l'annulation d'une ordon- nance rendue en vertu du Housing Act, 1936, par une autorité locale et confirmée par le ministre de la Santé. Ils alléguaient que pour examiner leurs oppositions, le Ministre était tenu d'agir selon un processus quasi judiciaire et qu'il ne l'avait pas fait, puisqu'il n'avait pas permis aux opposants de prendre connaissance du contenu de la correspon- dance qui lui avait été adressée avant l'ordon- nance. Le tribunal de première instance (le juge Henn Collins) annula l'ordonnance; le Ministre interjeta appel et son pourvoi fut accueilli. La situation du Ministre dans cette affaire ressemble beaucoup à celle de la Commission telle qu'elle est définie dans la Loi nationale sur les transports. Les jugements du maître des rôles lord Greene et du lord juge Cohen méritent d'être lus intégrale- ment, mais je ne citerai que l'extrait suivant de l'opinion de lord Green, aux pages 400-401:
[TRADUCTION] Les intimés ne nient pas que le Ministre, pour décider de confirmer ou non une ordonnance d'expropriation, est fondé à utiliser différents moyens pour se renseigner. En d'autres termes, il n'est pas limité aux documents contenus dans les oppositions—il n'est pas limité aux arguments, à la preuve, aux considérations avancés par l'autorité locale en vue de l'étude des oppositions ou invoqués par les opposants eux- mêmes. Il est manifeste pour quiconque connaît la façon de procéder des ministères que les questions d'intérêt public, comme celle en l'espèce, font, ou peuvent faire constamment l'objet d'étude et d'examen par le ministère responsable. Le problème ne surgit pas du jour au lendemain, lorsque l'autorité locale soumet une ordonnance d'expropriation pour confirma tion. Les conditions de logement dans les grandes villes sont continuellement à l'étude non seulement par un ministère mais
e [1947] 2 All E.R. 395.
par plusieurs. Il arrive que des renseignements soient reçus, des rapports obtenus et que d'autres ministères fassent des repré- sentations ou avancent des arguments de sorte que dans bien des cas, il existe un dossier imposant contenant des renseigne- ments dont une grande partie, sinon la totalité, porte sur une demande particulière. Bien sûr, il serait absurde de dire que, lorsqu'il décide de confirmer ou non l'ordonnance d'expropria- tion, le Ministre ne doit tenir compte d'aucun renseignement ou observation dont il a ainsi eu connaissance. Le présent litige porte sur la prétendue obligation de divulguer des renseigne- ments de cette nature. Il n'est pas injuste de dire qu'en règle générale, la thèse selon laquelle le Ministre peut être tenu de dévoiler à quiconque des renseignements de cette nature, qu'il n'a obtenus qu'en sa qualité d'administrateur, est contraire à toute notre conception du gouvernement dans ce pays.
Je ne prétends pas qu'à certaines étapes de l'audition l'on n'atteigne pas une sorte de «lis» entre les parties, auquel cas la règle «audi» peut être invoquée pour assurer une audition équitable, mais je suis convaincu qu'en l'espèce, à la lumière du dictum de l'arrêt Johnson, on ne peut l'invo- quer contre la Commission.
Pour ces motifs et pour les motifs plus complets prononcés par Monsieur le juge Pratte, je rejette- rais ces appels.
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