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T-750-76
Anoop Kumar Kalicharan (Requérant) c.
Le ministre de la Main-d'œuvre et de l'Immigra- tion (Intimé)
Division de première instance, le juge Mahoney Toronto, le 8 mars; Ottawa, le 24 mars 1976.
Immigration Brefs de prérogative—Le requérant a été déclaré coupable de vol et frappé d'une ordonnance d'expul- sion—Par la suite, la Cour d'appel de l'Ontario a ordonné sa libération sous condition Demande de bref de prohibition en vue d'empêcher l'exécution de l'ordonnance Loi sur l'immi- gration, S.R.C. 1970, c. I-2, art. 7(1)f), 18(l)e)(ii) et (2)—Code criminel, S.R.C. 1970, c. C-34, art. 614(2), 662.1(1),(3) et (4).
Le requérant, entré au Canada à titre d'étudiant, fut déclaré coupable de vol et frappé d'une ordonnance d'expulsion en vertu de l'article 18(1)e)(ii) de la Loi sur l'immigration. Par la suite, la Cour d'appel de l'Ontario a ordonné sa libération sous condition. Le requérant demande un bref de prohibition en vue d'empêcher l'exécution de l'ordonnance d'expulsion.
Arrêt: le bref de prohibition est accordé. Rien en droit n'obligeait l'enquêteur spécial à attendre le résultat de l'appel pour émettre l'ordonnance d'expulsion; une personne déclarée coupable au procès demeure une personne déclarée coupable, nonobstant un droit d'appel non épuisé. Cependant, en vertu des dispositions du Code criminel relatives à la substitution d'une libération sous condition par une cour d'appel à une sentence imposée par un tribunal de première instance, la déclaration de culpabilité est réputée ne jamais avoir été pro- noncée. La décision de la Cour d'appel ne constitue pas seule- ment une nouvelle preuve permettant à l'enquêteur spécial de rouvrir son enquête, ni un simple fait dont la Commission d'appel de l'immigration devra tenir compte si elle entend un appel. Au contraire, la raison justifiant l'ordonnance d'expul- sion disparaît de fait et est réputée ne jamais avoir existé en droit.
Arrêt approuvé: R. c. Law Society of British Columbia (1968) 68 D.L.R. (2e) 179.
ACTION. AVOCATS:
R. Kligerman pour le requérant. K. Braid pour l'intimé.
PROCUREURS:
Shuber, Gluckstein, Toronto, pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: Le requérant demande, par avis de requête, un bref de prohibition en vue d'empêcher l'exécution d'une ordonnance d'expul- sion. Le requérant est entré au Canada à titre d'étudiant, conformément à l'article 7(1)f) de la Loi sur l'immigration'. Après avoir été déclaré coupable de vol, en contravention de l'article 294 du Code criminel 2 , il fut condamné à payer une amende de $50. Il interjeta appel de la sentence mais non de la déclaration de culpabilité.
Le 5 février 1976, un enquêteur spécial émit ladite ordonnance d'expulsion au motif que le requérant était une personne décrite au paragra- phe 18(1)e)(ii), c'est-à-dire une personne, autre qu'un citoyen canadien ou une personne ayant un domicile canadien, qui a été déclarée coupable d'une infraction visée par le Code criminel. La Loi sur l'immigration prévoit:
18. (2) Quiconque, sur enquête dûment tenue par un enquê- teur spécial, est déclaré une personne décrite au paragraphe (1) devient sujet à expulsion.
Le 19 février 1976, la Cour d'appel de l'Ontario accueillit l'appel du requérant et ordonna sa libé- ration sous condition.
Les dispositions pertinentes du Code criminel se lisent comme suit:
614. (2) Un jugement d'une cour d'appel modifiant la sen tence d'un accusé qui a été déclaré coupable a la même vigueur et le même effet que s'il était une sentence prononcée par la cour de première instance.
662.1 (1) Lorsqu'un accusé autre qu'une corporation plaide coupable ou est reconnu coupable d'une infraction autre qu'une infraction pour laquelle la loi prescrit une peine minimale ou qui est punissable, à la suite des procédures entamées contre lui, d'un emprisonnement de quatorze ans, de l'emprisonnement à perpétuité ou de la peine de mort, la cour devant laquelle il comparaît peut, si elle considère qu'une telle mesure est dans l'intérêt véritable de l'accusé sans nuire à l'intérêt public, au lieu de condamner l'accusé, prescrire par ordonnance qu'il soit libéré inconditionnellement ou aux conditions prescrites dans une ordonnance de probation.
S.R.C. 1970, c. I-2.
2 S.R.C. 1970, c. C-34.
(3) Lorsqu'une cour ordonne, en vertu du paragraphe (1), qu'un accusé soit libéré, l'accusé n'est pas censé avoir été déclaré coupable de l'infraction quant à laquelle il a plaidé coupable ou dont il a été déclaré coupable et à laquelle la libération se rapporte, sauf que
a) l'accusé ou le procureur général peut interjeter appel de l'ordre de libération de l'accusé comme si cet ordre était une déclaration de culpabilité relativement à l'infraction à laquelle se rapporte la libération ou, dans le cas d'un appel interjeté par le procureur général, une conclusion portant que l'accusé n'était pas coupable de cette infraction; et
b) l'accusé peut plaider autrefois convict relativement à toute inculpation subséquente relative à l'infraction à laquelle se rapporte la libération.
(4) Lorsqu'un accusé qui est soumis aux conditions d'une ordonnance de probation rendue à une époque sa libération a été ordonnée en vertu du présent article est déclaré coupable d'une infraction, y compris une infraction prévue par l'article 666, la cour qui a rendu l'ordonnance de probation peut, en plus ou au lieu d'exercer le pouvoir que lui confère le paragra- phe 664(4), tout moment elle peut prendre une mesure en vertu de ce paragraphe, annuler la libération, déclarer l'accusé coupable de l'infraction à laquelle se rapporte la libération et infliger toute sentence qui aurait pu être infligée s'il avait été déclaré coupable au moment de sa libération, et il ne peut être interjeté appel d'une déclaration de culpabilité prononcée en vertu du présent paragraphe lorsqu'il a été fait appel de l'or- donnance prescrivant que l'accusé soit libéré.
Quelles que fussent les considérations d'ordre pra- tique qui auraient prévaloir, rien en droit n'obligeait l'enquêteur spécial à attendre le résul- tat de l'appel pour émettre l'ordonnance d'expul- sion. Une personne déclarée coupable au procès demeure une personne déclarée coupable, nonob- stant un droit d'appel non épuisé qui pourrait modifier son état'. Le 5 février 1976, le requérant était une personne décrite au paragraphe 18(1)e)(ii) et donc sujet à expulsion.
Selon mon interprétation des dispositions du Code criminel relatives à la substitution d'une libération sous condition à la sentence imposée par la Cour de première instance, la déclaration de culpabilité n'est pas infirmée; elle est réputée ne jamais avoir été prononcée. La décision de la Cour d'appel de l'Ontario ne constitue pas seulement une nouvelle preuve permettant à l'enquêteur spé- cial de rouvrir son enquête, ni un simple fait dont la Commission d'appel de l'immigration devra tenir compte si elle entend éventuellement un appel de la décision de l'enquêteur spécial. Au
R. c. Law Society of British Columbia, Ex parte MacKrow (1968) 68 D.L.R. (2e) 179.
contraire, non seulement entraîne-t-elle la dispari- tion de fait de la raison justifiant l'ordonnance d'expulsion, mais cette dernière est réputée ne jamais avoir existé en droit. Il convient donc en l'espèce d'émettre un bref de prohibition et l'or- donnance demandée sera rendue en conséquence.
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