T-4105-73; T-4106-73; T-4107-73
Canadien Pacifique Limitée (Demanderesse)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Walsh—
Montréal, les 24, 25 et 26 février; Ottawa, le 17
mars 1976.
Impôt sur le revenu—Calcul du revenu—Le revenu tiré par
la demanderesse d'obligations de compagnies non résidantes
sous son contrôle est-il un revenu provenant de dividendes en
vertu de l'art. 8(3) ou un revenu provenant d'intérêt?—St ce
n'est pas un revenu provenant de dividendes, la demanderesse
peut-elle bénéficier d'un dégrèvement pour impôt étranger à
l'égard des recettes de redevances «journalières» pour l'utili-
sation de ses autorails sur des voies de chemins de fer améri-
cains?—La demanderesse a-t-elle droit à des déductions pour
amortissement sur certains biens classés comme dons et octrois
conformément à la classification uniforme des comptes?—Lbi
de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, art. 8(3), 12(1)f),
20(6)h), 28(1)d), 84A et 139(1)t); S.C. 1970-71-72, c. 63, art.
15(3)—Loi de 1943 sur la Convention relative à l'impôt entre
le Canada et les États-Unis d'Amérique, S.C. 1943-44, c. 21,
art. I, II et XV(1), le Protocole, art. 3f) et 6a).
(1) La demanderesse détenait une participation majoritaire
dans trois compagnies de chemins de fer qui ont fusionné en
1960 et elle a tiré un revenu provenant d'obligations à intérêt
conditionnel qu'elle détenait dans les trois compagnies. La
corporation payeuse a versé à la demanderesse des montants
annuels ou autrement périodiques pendant les années en cause
au sens de l'article 8(3) de la Loi, et elle a déduit le montant de
l'intérêt ainsi acquitté en calculant son revenu aux fins de
l'impôt sur le revenu aux États-Unis.
(2) La demande de dégrèvement pour impôt étranger, qui
n'existe que si le revenu provenant des obligations peut être
considéré comme un revenu provenant d'intérêt, a trait à des
impôts prélevés par le fisc américain sur le revenu de la
demanderesse gagné aux États-Unis, dont $255,225 sont rela-
tifs à des recettes de redevances «journalières» versées par des
chemins de fer américains pour l'utilisation de ses autorails sur
leurs voies. La demanderesse avait un établissement stable aux
États-Unis au sens de l'article 3f) du Protocole et lesdites
recettes de redevances «journalières» ne lui sont pas imputables.
En 1965, le Canada les a imposées pour une somme au moins
égale à celle qu'a prélevée le Trésor américain. Celui-ci a
considéré les redevances «journalières» comme un revenu tiré
d'une location se rattachant effectivement aux affaires de la
demanderesse aux États-Unis.
(3) Les sommes représentent les déductions pour amortisse-
ment réclamées relativement à certains biens de la demande-
resse lorsque celle-ci a reçu d'une autre personne une somme
qui a été inscrite à la catégorie «Dons et octrois» au sens que lui
accorde la «classification uniforme des comptes». Les sommes
appartiennent à trois catégories:
(I) Débours pour exécuter certains travaux sur des biens
dont la demanderesse est propriétaire, lorsqu'elle a reçu une
somme d'une autre personne
a) débours engagés à la demande d'un «gouvernement,
d'une municipalité ou d'une autre autorité publique» (arti-
cle 20(6)h)) ou
b) d'une corporation ou d'un particulier autre que ceux
décrits à la sous-catégorie a);
(II) Des sommes qu'a ajoutées la demanderesse à l'assiette
de la déduction pour amortissement en même temps que des
dégrèvements à des «Dons et octrois», sur remise qu'a faite à
celle-ci des éléments constituants sujets à détérioration d'une
voie de garage particulière une partie à une convention
portant sur une voie de garage particulière; et
(III) Des sommes qu'a déjà inscrites la demanderesse à
l'assiette du coût en capital et qu'elle a classées comme
améliorations apportées à des biens qu'elle a loués et qu'elle a
transférés à la catégorie des biens qu'elle possède avec trans-
fert simultané en 1956 de la catégorie «Dons et octrois—
lignes louées» à celle des «Dons et octrois—lignes possédées»,
du fait que certains biens loués auparavant étaient devenus sa
propriété à la suite de diverses lois qu'avait adoptées le
Parlement.
Arrêt: (1) La demanderesse est fondée à considérer comme
revenu provenant de dividendes le revenu tiré des obligations à
intérêt conditionnel, conformément à l'article 8(3). La défende-
resse a prétendu que l'article 8(3) se suffit à lui-même et qu'il
n'est pas nécessaire de tenir compte de l'article 12(1)J); elle a
fait valoir subsidiairement que la Soo Line aurait pu déduire les
sommes versées, et le C.P. ne peut, conformément aux disposi
tions de l'article 8(3), être réputé avoir reçu ces versements à
titre de dividende. Cet argument accorderait au mot «débiteur»
à l'article 12(1)J) un sens assez large pour englober les ancien-
nes compagnies, ce qui n'est pas exact. Ce n'est pas la Soo
Corporation qui éprouvait des difficultés financières et le mot
«débiteur» doit désigner la corporation qui paie l'intérêt des
obligations. Les anciennes compagnies ne versaient pas l'intérêt
en 1965, 1966 et 1967. Les nouvelles obligations n'ont pas été
émises «pour remplacer» les anciennes portant intérêt à taux
fixe, au sens de l'article 12(1)J)(ii). Donc, la corporation
payeuse (article 12(1)J)) ne pourrait pas déduire ces paiements
si elle était une contribuable résidant au Canada et l'article
8(3) n'empêche pas le C.P., à titre de contribuable bénéficiaire,
d'appliquer ledit article et de prétendre que ces sommes ont été
reçues comme dividende. Subsidiairement encore, la défende-
resse affirme que si le terme «corporation» au sens où il est
employé à l'article 8(3) se limite à des corporations assujetties
aux lois fiscales canadiennes, puisque l'intérêt qu'a perçu le
C.P. provenait d'une corporation américaine non résidante, il
ne peut être considéré comme un dividende que régit l'article
8(3). Cependant, dans sa thèse principale, la défenderesse a
prétendu que le terme «corporation» qui figure à l'article 8(3)
s'applique à une compagnie non résidante. En dernier lieu, la
défenderesse a fait valoir que les mots «n'ait droit» et «dans le
calcul de son revenu» (article 8(3)) n'ont pas un sens étroit.
Bien que ce soit exact, lorsqu'il s'agit de deux corporations
canadiennes, que l'intention de l'article 8(3) est de traiter de
façon uniforme, en matière fiscale entre compagnies, les trans-
ferts de capitaux ayant un caractère de dividendes et de ne pas
accorder à la corporation payeuse la déduction du montant de
l'intérêt versé tout en permettant à la corporation bénéficiaire
de recevoir cet intérêt exempt d'impôt, le fait que la corporation
payeuse n'étaitas assujettie à cet impôt , mais n'en bénéficiait
pas moins aux Etats-Unis de l'avantage fiscal que lui procurait
la déduction de l'intérêt payé, et le fait que le C.P., à titre de
détenteur d'une participation majoritaire dans les corporations
payeuses, tire indirectement profit de cet état de choses, ne
suffisent pas à l'empêcher de considérer comme dividendes les
sommes ainsi reçues au sens des dispositions de l'article 8(3) et
par suite, de jouir au Canada de l'avantage fiscal résultant de
l'application de l'article 28(1)d). En réponse aux arguments
subsidiaires avancés par la demanderesse, bien que le Ministre
ne soit aucunement lié par le fait qu'il a permis de considérer
comme dividendes, au cours des années d'imposition précéden-
tes, les sommes qu'a reçues la demanderesse à titre d'intérêt,
non plus que par les bulletins d'interprétation confirmant que
c'était la façon dont il convenait de traiter ces recettes, et bien
qu'on ne puisse tirer aucune conclusion des modifications conte-
nues dans la nouvelle Loi qui suppriment l'échappatoire grâce
auquel la Soo Line et le C.P. pouvaient réclamer les déductions
en question, ces arguments prêtent quelque crédit à la conclu
sion déjà atteinte.
(2) Le Canadien Pacifique a versé au Trésor américain
$255,225 sur les redevances «journalières» à titre de revenu de
loyers «effectivement lié» à son «établissement stable» aux É.-U.
La défenderesse a prétendu que les recettes auraient dû être
considérées comme des «bénéfices industriels et commerciaux»
au sens de l'article I de la Convention, et comme n'étant pas
imposables aux É.-U. parce qu'elles ne sont pas «imputables» à
son «établissement stable» dans ce pays. Bien qu'il soit très
possible que les loyers journaliers ne soient pas à proprement
parler «imputables» à l'établissement stable aux États-Unis, le
ministère des Finances américain emploie au contraire les
termes «effectivement lié», qui ne figurent pas à la Convention.
Les recettes possèdent certains aspects des «bénéfices indus-
triels et commerciaux» et des loyers, mais comme le C.P. n'a
rien fait pour pousser ou développer cette source de revenu, il
n'existe aucune raison obligeant à ne pas souscrire à la façon
dont les États-Unis ont interprété la Convention. Bien que l'on
puisse partager l'opinion que la simple utilisation des wagons
que font aux États-Unis d'autres chemins de fer ne constitue
pas un établissement stable au sens de l'article 3f) du Protocole,
cette conclusion ne modifie pas le droit de la demanderesse de
réclamer ce dégrèvement.
(3) La demanderesse est fondée à des déductions pour amor-
tissement sur les sommes portées à -son compte de Dons et
octrois, sauf celles appartenant à la catégorie III. Il ne faut
faire aucune distinction fondée sur la question de savoir qui a
réellement fait le travail ou engagé la dépense initiale, puisque
les installations reconstruites sont devenues la propriété du
C.P., l'Administration de la Voie maritime en supportant le
coût. On ne peut interpréter le terme «dépense» à l'article
84A(3) de la Loi comme signifiant «dépense nette». Et si l'on
étudie l'article 20(6)h), il est douteux que `lés sommes que le
C.P. a reçues des autorités publiques avaient pour objet «de
faire progresser les possibilités techniques». De plus, les verse-
ments ne peuvent être considérés comme «un octroi, une sub-
vention ou une autre aide» pour inciter la demanderesse à
entreprendre un travail dans l'intérêt du public. Quant aux
biens classés à la catégorie III, puisque le C.P. n'en est devenu
propriétaire qu'en 1956, le paragraphe 84A(1) ne s'applique pas
mais le paragraphe 84A(2) doit se rapporter non seulement au
paragraphe 84w(1) mais à l'article dans son ensemble. Et à la
fin de 1955, les biens étaient loués; par conséquent, en vertu du
paragraphe (2), «aucun montant ne doit être inclus..... Il
semble que ce soit assez large pour viser non seulement des
sommes résultant du coût en capital de biens inscrits dans les
livres de l'ancien propriétaire, mais aussi toutes sommes s'y
rapportant, portées aux livres du C.P. pour des améliorations
qu'il a faites aux biens loués.
Arrêts analysés: Van Schaick c. McCarthy 116 F. 2e 987;
Baker c. Gold Seal Liquors, Inc. (1974) 94 S.Ct. 2504,
417 US 468 et Lea -Don Canada Limited c. M.R.N.
[1971] R.C.S. 95. Arrêts appliqués: Stickel c. M.R.N.
[1972] C.F. 672; Le Roi c. Consolidated Lithographing
Manufacturing Company, Limited [1934] R.C.S. 298; St.
John Dry Dock and Shipbuilding Co. Ltd. c. M.R.N.
[1944] R.C.É. 186; Birmingham c. Barnes (1935) 19 T.C.
195; Ottawa Valley Power Company c. M.R.N. [1969] 2
R.C.É. 64; Partington c. Le procureur général (1869) L.R.
4 H.L. 100; United Geophysical Company of Canada c.
M.R.N. [1961] R.C.É. 283; M.R.N. c. Massawippi Valley
Railway Company [1961] R.C.É. 191 et G.T.E. Sylvania
Canada Limited c. La Reine [1974] 1 C.F. 726, confirmé
par [1974] 2 C.F. 212. Arrêt approuvé: Saunders c.
M.R.N. (1954) 11 Tax A.B.C. 399. Distinction faite avec
l'arrêt: Okalta Oils Limited c. M.R.N. [1955] R.C.É. 66.
Arrêt critiqué: Detroit Edison Co. c. Commissioner of
Internal Revenue (1942) 319 US 98.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
G. S. Bistrisky et E. J. Brown pour la
demanderesse.
N. W. Nichols pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Bistrisky et Brown, Montréal, pour la
demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Ces trois affaires, instruites
sur une preuve commune, portent respectivement
sur les années d'imposition de la demanderesse
ayant pris fin les 31 décembre 1965, 31 décembre
1966 et 31 décembre 1967. A la suite de diverses
nouvelles cotisations, dont la dernière est interve-
nue le 23 juillet 1973, il ne reste que trois ques
tions en litige entre les parties. Le revenu imposa-
ble de la demanderesse pour l'année ayant pris fin
le 31 décembre 1965 a été fixé à $56,158,093 et
assujetti à un impôt de $26,119,368.69, ce qui
représente une diminution d'intérêt de $10,482.84
sur la réduction de l'impôt établi antérieurement.
Pour l'année ayant pris fin le 31 décembre 1966, le
revenu imposable de la demanderesse a été fixé à
$87,387,215 et assujetti à un impôt de $40,759,-
391.24; pour l'année ayant pris fin le 31 décembre
1967, le revenu imposable de la demanderesse a
été établi à $47,473,815 et assujetti à un impôt de
$21,965,574.08.
Les trois points restant en litige sont les
suivants:
1. La demanderesse peut-elle considérer le revenu
provenant de certaines obligations à intérêt condi-
tionnel de la Duluth South Shore & Atlantic
Railroad, de la Minneapolis, St. Paul & Sault Ste.
Marie Railway Company et de la Wisconsin Cen
tral Railroad Company, toutes compagnies non
résidantes dans lesquelles la demanderesse détenait
une participation majoritaire et qui ont fusionné en
1960 pour former la Soo Line, comme étant un
revenu provenant de dividendes en vertu de l'arti-
cle 8(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu en
vigueur à l'époque' et venant par conséquent
réduire l'impôt payé conformément aux disposi
tions de l'article 28(1)d) de la Loi, ou doit-elle
considérer ce revenu comme étant un revenu pro-
venant d'intérêt? Les sommes en cause pour les
années d'imposition 1965, 1966 et 1967 étaient
respectivement de $841,871, $833,346 et $828,637
et les déductions réclamées pour les mêmes années
s'élevaient respectivement à $404,893, $388,930 et
$383,912.
2. Subsidiairement et dans l'éventualité où ces
déductions seraient rejetées, la demanderesse
affirme avoir le droit de bénéficier d'un dégrève-
ment pour impôt étranger de $260,866 pour l'an-
née d'imposition 1965. La défenderesse reconnaît
ce droit à la demanderesse jusqu'à concurrence de
la somme de $5,641 seulement; quant au reste, soit
$255,225, qui est relatif à des recettes de redevan-
ces ((journalières» pour l'utilisation de ses autorails
sur des voies de chemins de fer américains, la
défenderesse n'en conteste pas le montant, mais
elle nie que la demanderesse ait droit audit dégrè-
vement. Cela ne s'applique qu'à l'année d'imposi-
tion 1965, puisque pour les années d'imposition
1966 et 1967, faute d'avoir été imposée par les
États-Unis sur ces recettes, la demanderesse ne
réclame pas le dégrèvement en question.
S.R.C. 1952, c. 148, et ses modifications.
3. La demanderesse a-t-elle droit à des déductions
pour amortissement sur certains biens classés
comme Dons et octrois conformément_ à la classifi
cation uniforme des comptes qu'a établie la Com
mission canadienne des transports mais qu'a reje-
tée le Ministre, ces déductions s'élevant
respectivement à $66,177 pendant l'année d'impo-
sition 1965, $63,614 pendant l'année d'imposi-
tion 1966 et à $66,507 pendant l'année d'imposi-
tion 1967, ce qui a entraîné respectivement pour
ces trois années une réduction des versements
d'impôt sur le revenu de $31,827, $29,689 et
$30,812.
Lorsqu'une décision de principe sera rendue sur
chacune des trois questions en cause, sans doute les
parties pourront-elles se mettre d'accord sur des
chiffres définitifs rectifiés.
La plupart des éléments de preuve ont été pré-
sentés au dossier au moyen d'un exposé conjoint
des faits, qu'il convient de citer intégralement.
[TRADUCTION] EXPOSE CONJOINT DES FAITS
Partie I
Exposé conjoint des faits relatifs aux obligations à intérêt
conditionnel
1. Les années d'imposition en litige sont les années d'imposition
de la compagnie demanderesse ayant pris fin les 31 décembre
1965, 31 décembre 1966 et 31 décembre 1967.
Minneapolis
2. Avant 1944, la demanderesse détenait les valeurs mobilières
suivantes de la Minneapolis, St. Paul and Sault Ste. Marie
Railway Company («Minneapolis Railway»), contre laquelle
elle possédait les créances suivantes:
Actions privilégiées, actions ordinaires, obligations hypothé-
caires consolidées de premier rang à 4% et 5%, obligations
hypothécaires de second rang à 4%, obligations hypothécaires
de remboursement de premier rang à 5 1 / 2 %, billets à 25 ans
garantis sur l'or, certificats de compagnies concédant des
lignes, billets de sociétés de financement pour la reconstruc
tion, billets de corporations de crédit des chemins de fer,
avances de fonds, intérêt sur obligations échues et intérêt
garanti.
3. La Minneapolis Railway a été constituée en vertu des lois
des États du Michigan, du Wisconsin et du Territoire du
Dakota, aux États-Unis d'Amérique.
4. Avant 1937, la Minneapolis Railway a subi des revers
financiers et, en 1937, elle a déposé son bilan conformément
aux dispositions de l'article 77 de l'United States Bankruptcy
Act, son actif ayant été confié à des syndics qu'a agréés
l'United States Court.
5. L'Interstate Commerce Commission des États-Unis
(«I.C.C.») a approuvé en janvier 1943 un «plan d'assainissement
financier», inscrit au rôle des finances n« 11897, qu'a ratifié la
District Court des États-Unis en août 1944 par ordonnance no
100.
6. En 1944, une compagnie a été constituée sous la raison
sociale de Minneapolis, St. Paul & Sault Ste. Marie Railroad
Company («Minneapolis Railroad Company»).
7. Un contrat d'hypothèque et un acte de fiducie portant la
date du 1»> janvier 1944 ont créé la série A d'obligations
hypothécaires générales à intérêt conditionnel de 4% (General
Mortgage 4% Series A Income Bonds) de la Minneapolis
Railroad Company.
8. Conformément à ce plan d'assainissement financier, la
demanderesse a reçu un certain nombre des obligations hypo-
thécaires générales à intérêt conditionnel série A à 4% (General
Mortgage 4% Series A Income Bonds) de la Minneapolis
Railroad Company, des actions du capital de la Minneapolis
Railroad Company, ainsi qu'une somme en argent et un certain
nombre d'obligations hypothécaires de premier rang et d'obli-
gations de remboursement de la Wisconsin Central Railway
Company, décrites à l'alinéa 18.
9. Conformément au plan d'assainissement financier, la
créance de la demanderesse découlant des obligations hypothé-
caires consolidées de premier rang de la Minneapolis Railway,
la compagnie en faillite, s'est trouvée éteinte et la demanderesse
a remis les certificats d'obligations.
Duluth
10. Avant 1949, la demanderesse détenait les valeurs mobiliè-
res suivantes de la Duluth, South Shore & Atlantic Railway
Company («Duluth Railway») et de la Mineral Range Railroad
Company («Mineral Range»), contre lesquelles elle possédait
les créances suivantes:
Duluth Railway
Actions privilégiées, actions ordinaires, certificats d'intérêt
conditionnel, obligations hypothécaires consolidées de pre
mier rang à 4%, titres hypothécaires à 6% de la Marquette,
Houghton and Ontonagon Railroad Company et obligations
hypothécaires de premier rang à 5%.
Mineral Range
Obligations hypothécaires de premier rang à 4%, titres hypo-
thécaires consolidés à 4%, titres hypothécaires consolidés à
5% de la Hancock and Calumet Railroad Company et avari-
ces de fonds.
11. La Duluth Railway a été constituée conformément aux lois
du Wisconsin et du Michigan, aux États-Unis d'Amérique. La
Mineral Range était une compagnie constituée en vertu des lois
de l'État du Michigan et, avant 1949, elle était une filiale de la
Duluth Railway, dont celle-ci était propriétaire exclusive.
12. Avant 1937, la Duluth Railway et la Mineral Range ont eu
des ennuis financiers et, en 1937, ces deux compagnies ont
déposé leurs bilans conformément à l'article 77 de l'United
States Bankruptcy Act, leur actif ayant été remis entre les
mains de syndics qu'a agréés l'United States Court.
13. En décembre 1948, l'I.C.C. a approuvé un «plan d'assainis-
sement financier» de la Duluth Railway et de la Mineral Range
sous le numéro 11484 de son rôle des finances, et la District
Court des États-Unis a ratifié ce projet en octobre 1949 par
ordonnance n° 27.
14. En 1949, une compagnie a été constituée sous la raison
sociale de Duluth, South Shore and Atlantic Railroad Com
pany («Duluth Railroad Company»).
15. Un contrat d'hypothèque et un acte de fiducie portant la
date du Zef janvier 1949 ont créé les obligations hypothécaires
de premier rang à 50 ans, à intérêt conditionnel de 4% (First
Mortgage 4% 50 year Income Bonds) de la Duluth Railroad
Company.
16. Conformément au plan d'assainissement financier, la
demanderesse a reçu un certain nombre d'obligations hypothé-
caires en premier rang à 50 ans, à intérêt conditionnel de 4%
(First Mortgage 4% 50 year income bonds) de la Duluth
Railroad Company, ainsi que des actions du capital de celle-ci
et une somme d'argent.
17. Conformément au plan d'assainissement financier, les
créances de la demanderesse découlant des obligations hypothé-
caires en premier rang de la Duluth Railway et des titres
hypothécaires consolidés de la Mineral Range, les compagnies
ayant fait faillite, se sont trouvées éteintes et la demanderesse a
remis les certificats d'obligations.
Wisconsin
18. Avant 1954, la demanderesse détenait les valeurs mobiliè-
res suivantes- de la Wisconsin Central Railway Company («Wis-
consin Railway») contre laquelle elle possédait les créances
suivantes:
Actions privilégiées, actions ordinaires, obligations hypothé-
caires en premier rang à 4% de la Superior and Duluth
Division, obligations hypothécaires de remboursement en
premier rang à 4% et obligations hypothécaires de rembour-
sement en premier rang à 5%.
19. La Wisconsin Railway a été constituée en vertu des lois de
l'État du Wisconsin, aux Etats-Unis d'Amérique.
20. Avant 1932, la Wisconsin Railway a subi des revers finan
ciers et, en 1932, ses biens ont été placés sous séquestre. En
1944, ce séquestre a été converti en faillite conformément à
l'article 77 de l'United States Bankruptcy Act, l'actif de la
compagnie ayant été remis entre les mains de syndics qu'a
agréés l'United States Court.
21. Un «plan d'assainissement financier» de la Wisconsin Rail
way a reçu l'approbation de l'Interstate Commerce Commission
en juin 1953, sous le numéro 14720 de son rôle des finances,
l'United District Court ayant ratifié ce projet en février 1954
par ordonnance n° 17104.
22. En 1954, une compagnie a été constituée sous la raison
sociale de Wisconsin Central Railroad Company («Wisconsin
Railroad Company»).
23. Un contrat d'hypothèque et un acte de fiducie portant la
date du 1e< janvier 1954 ont créé les obligations hypothécaires
générales à 4% de la Wisconsin Railroad Company.
24. Conformément au plan d'assainissement financier, la
demanderesse a reçu un certain nombre d'obligations hypothé-
caires générales à 4 1 / 2 % de la Wisconsin Railroad Company,
ainsi que des actions du capital de cette même compagnie et
une somme d'argent.
25. Conformément au plan d'assainissement financier, les
créances de la demanderesse découlant des obligations hypothé-
caires de premier rang de la Superior and Duluth Division et
des obligations hypothécaires de remboursement de premier
rang de la Wisconsin Railway, la compagnie en faillite, se sont
trouvées éteintes et la demanderesse a remis les certificats
d'obligations.
26. Dans chacun de ces trois plans d'assainissement financier,
l'actif des compagnies en faillite a été transféré et transmis aux
compagnies constituées en application de ceux-ci, libres de tous
droits, créances, intérêts, charges et hypothèques des créanciers
des compagnies en faillite.
Soo Line
27. En 1960, la Duluth Railroad Company a changé sa raison
sociale pour celle de «Soo Line Railroad Company».
28. En 1960, la Minneapolis Railroad Company a fusionné
avec la Soo Line Railroad Company et la Wisconsin Central
Railroad Company pour former une compagnie connue sous la
raison sociale de Soo Line Railroad Company, («Soo Line»), les
obligations à intérêt conditionnel étant restées en vigueur en
tant qu'obligations de la Soo Line.
29. Pendant les années d'imposition en litige, la Soo Line était
une corporation résidante des États-Unis, elle n'était pas rési-
dante du Canada, où elle n'exploitait pas d'entreprise, et elle
n'a pas déposé de déclaration d'impôt en vertu de la Loi de
l'impôt sur le revenu du Canada.
30. Les versements qu'a effectués en 1965, 1966 et 1967 la Soo
Line Railroad Company à la demanderesse ont été perçus
respectivement au titre des obligations à intérêt conditionnel, à
savoir les obligations hypothécaires générales à intérêt condi-
tionnel série A à 4% de la Minneapolis Railroad Company, les
obligations hypothécaires de premier rang à intérêt condition-
nel, à 50 ans, à 4% de la Duluth Railroad Company et les
obligations hypothécaires générales à intérêt conditionnel à
4 1 / 2 % de la Wisconsin Railroad Company.
31. A toutes les époques qui nous intéressent, la demanderesse
était propriétaire des obligations suivantes, qui sont des obliga
tions à intérêt conditionnel au sens de l'article 139(1)t) et de
l'article 8(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu:
Obligations hypothécaires de premier rang à intérêt condi-
tionnel, à 4%, de la Duluth, South Shore & Atlantic
Railroad
Obligations hypothécaires générales à intérêt conditionnel, à
4%, de la Minneapolis, St. Paul & Sault Ste. Marie Railway
Company
Obligations hypothécaires générales à intérêt conditionnel, à
4 1 / 2 %, de la Wisconsin Central Railroad Company
32. A toutes les époques qui nous intéressent, la Soo Line
(appelée aux présentes la «corporation payeuse») qui était impo-
sable relativement aux obligations décrites ci-dessus,
(i) était une corporation non résidante, étant résidante des
Etats-Unis d'Amérique, dont plus de 25% du capital-actions
émis (ayant en toutes circonstances plein droit de vote) appar-
tenait à la demanderesse au sens de l'alinéa d) du paragraphe
(1) de l'article 28 de la Loi de l'impôt sur le revenu, selon détail
ci-après:
a) La Soo Line Railroad Company: 56.4%
b) Part des actions des corporations dont la demanderesse
était propriétaire avant la fusion de 1960 dont est issue la
Soo Line:
A) Minneapolis, St. Paul and Sault Ste.
Marie Railroad: 50.26%
B) Wisconsin Central Railroad: 56.79%
C) Duluth South Shore & Atlantic Railroad: 100%
(ii) a versé à la demanderesse les intérêts ci-dessous décrits
pour les sommes suivantes, cet intérêt étant un montant annuel
ou autrement périodique payé par la corporation payeuse au
sens de l'article 8(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu:
1965—$841,871
1966—$833,346
1967—$828,637 '
(iii) était autorisée à déduire et a en fait déduit le montant de
l'intérêt ainsi acquitté à la demanderesse sur les obligations à
intérêt conditionnel en calculant son revenu aux fins de l'impôt
sur le revenu aux États-Unis;
(iv) à toutes les époques qui nous intéressent, la corporation
payeuse
a) n'était pas une corporation personnelle
b) a acquitté l'intérêt sur les obligations à intérêt condition-
nel qui avaient été émises depuis 1930.
Partie 2
Exposé conjoint des faits relatifs au dégrèvement pour impôt
étranger
1. La demanderesse ne peut réclamer la déduction de $260,866
à titre de dégrèvement pour impôt étranger pour l'année d'im-
position 1965 que si les paiements reçus sur les obligations à
intérêt conditionnel sont considérés, aux fins d'impôt au
Canada, comme un revenu provenant d'intérêts.
2. Le dégrèvement de $260,866 pour impôt étranger concerne
un impôt sur le revenu qu'a perçu le gouvernement des États-
Unis d'Amérique sur le revenu de la demanderesse gagné aux
États-Unis, dont la somme de $255,225 concerne des recettes
pour redevances «journalières» provenant de chemins de fer sis
aux États-Unis; ce n'est pas la somme de $255,225 qui est
contestée, mais le droit à ce dégrèvement. Les parties sont
d'accord qu'en ce qui concerne le solde de $5,641, la demande-
resse a droit à un dégrèvement pour impôt étranger.
3. Au cours de l'année d'imposition 1965, l'expression redevan-
ces «journalières» était utilisée pour décrire des paiements
effectués pour l'utilisation de matériel roulant le chemin de fer,
la compagnie de chemin de fer dite «utilisatrice» acquittant ces
versements entre les mains de la compagnie de chemin de fer
«propriétaire».
4. L'obligation qu'a une compagnie de chemin de fer de payer
des redevances «journalières» à la propriétaire du matériel
roulant dont elle se sert est constatée par une série de conven
tions établies entre les compagnies de chemin de fer:
(i) Conventions établies entre des chemins de fer en vertu de
l'article 5a de l'Interstate Commerce Act en date du lei avril
1950, du lu février 1958 et du 1«u avril 1965;
(ii) Convention relative au service de wagons et aux redevan-
ces journalières, que la demanderesse a signée le 11 février
1938;
(iii) Code concernant les règles applicables aux redevances
journalières (Code of Per Diem Rules)—Marchandises.
5. Tous les mois, chaque compagnie de chemin de fer signa-
taire des Conventions et Règles décrites en 4 ci-dessus fait le
compte de tous les wagons de marchandises (appartenant à
d'autres compagnies de chemin de fer également signataires
desdites Conventions et Règles) qui se sont trouvés sur ses voies
ferrées au cours du mois précédent. A l'aide du code précité, on
établit le montant des redevances journalières applicables à la
location de chaque catégorie de matériel roulant et on multiplie
le montant de la redevance appropriée par le nombre de jours
d'utilisation. C'est en se fondant sur ce calcul qu'on paie les
redevances «journalières» aux chemins de fer propriétaires du
matériel roulant en question.
6. Lorsque la demanderesse livre du matériel roulant sur les
lignes d'un chemin de fer américain, la perception des redevan-
ces journalières n'exige de sa part aucune autre opération d'une
nature commerciale et elle ne perçoit aucune recette pour le
trafic circulant sur ledit chemin de fer.
7. La demanderesse a un «établissement stable» dans les États
du Maine et du Vermont aux États-Unis d'Amérique, au sens
que donne à cette expression l'article 20* du Protocole de la
Convention relative à l'impôt entre le Canada et les É.-U.
8. Aux fins des articles I et II de la Convention relative à
l'impôt entre le Canada et les É.-U., lesdites recettes des
redevances journalières ne peuvent pas être «affectées» aux
«établissements stables» de la demanderesse situés dans les
États du Maine et du Vermont.
9. Le revenu provenant des redevances journalières faisait
partie du revenu du Canadien Pacifique aux fins de l'impôt sur
le revenu du Canada et, au cours de l'année d'imposition 1965,
le Canada a imposé ces recettes pour une somme au moins
égale à celle qu'a prélevée le Trésor américain.
10. Pour imposer le revenu que la contribuable a tiré des
redevances journalières provenant de sources américaines, les
États-Unis d'Amérique se sont fondés sur une décision du
ministère américain des Finances (United States Department
of the Treasury) selon laquelle ces redevances journalières
étaient un revenu tiré d'une location, «se rattachant effective-
ment au commerce ou aux affaires (de la contribuable) aux
États-Unis», comme l'exprime une lettre en date du 19 mai
1971, qu'a adressée à J. Edward Day, avocat américain de la
demanderesse, le secrétaire adjoint intérimaire du ministère des
Finances, lettres que celle-ci a produite.
Partie III
Exposé conjoint des faits portant sur les déductions pour
amortissement relatives aux Dons et octrois
1. Pendant les années d'imposition en litige, le Ministre a rejeté
les sommes suivantes dont la demanderesse a réclamé la déduc-
tion pour amortissement:
1965—$66,177
1966—$63,614
1967—$66,507
2. Lesdites sommes représentent les déductions pour amortisse-
ment réclamées relativement à certains biens de la demande-
resse lorsque celle-ci a reçu une somme d'une autre personne et
lorsque ce paiement a été inscrit à la catégorie «Dons et octrois»
au sens que donne à cette expression la classification uniforme
des comptes, que prévoit la Commission des Transports du
Canada (désignée maintenant sous le nom de «Commission
canadienne des Transports»).
3. Les diverses déductions pour amortissement en litige pour
les années d'imposition en cause ont été réclamées relativement
à des opérations ayant eu lieu entre 1956 et 1967, et à certaines
fins du présent procès, on peut les séparer en trois catégories.
4. Pour plus de certitude, la défenderesse n'admet pas que le
montant total des débours de la demanderesse est égal au coût
*II faut lire: article 3f).
ou à la dépense engagé aux fins de la Loi de l'impôt sur le
revenu, et l'expression «débours» employée aux présentes signi-
fie la dépense qu'a engagée la demanderesse en fait et non en
droit, la Cour devant trancher ce dernier point.
CATÉGORIE I
5.1 Cette catégorie comprend des débours qu'a engagés la
demanderesse pour exécuter certains travaux sur des biens dont
elle est propriétaire, lorsqu'elle a reçu une somme d'une autre
personne.
5.2 Dans chaque cas, l'autre partie a prié la demanderesse
d'apporter certaines modifications à ces installations ferroviai-
res ou de télécommunications pour lui permettre de mener à
bonne fin sa propre entreprise, en s'engageant à la rembourser
de ses débours, en tout ou en partie.
5.3 Les modifications apportées, les biens appartenaient et ont
contribué à appartenir à la demanderesse.
SOUS-CATÉGORIE la
5.4 Cette sous-catégorie comprend des débours qu'a engagés la
demanderesse lorsque la demande émanait du gouvernement
fédéral, d'un gouvernement provincial, d'un gouvernement
municipal, d'un organisme du gouvernement fédéral, d'un orga-
nisme d'un gouvernement provincial ou d'une administration
publique d'expansion industrielle, chacun étant un «gouverne-
ment, une municipalité ou autre autorité publique» au sens que
lui accorde l'article 20(6)h) de la Loi de l'impôt sur le revenu
applicable aux années d'imposition en question (et qui sont
désignées aux présentes comme les «autorités»).
5.5 A la réception de cette demande, la demanderesse infor-
mait l'autorité du coût estimatif total des matériaux et de la
main-d'oeuvre nécessaires à l'exécution des travaux, et l'autorité
s'engageait à verser cette somme à la demanderesse, en tout ou
en partie, de l'une des façons suivante, savoir:
a) par versements échelonnés au fur et à mesure de l'avance-
ment des travaux,
b) à la fin des travaux, ou
c) avant le début des travaux.
5.6 La demanderesse exécutait alors les travaux en se servant
de ses propres ouvriers ou en engageant des entrepreneurs et
elle présentait les factures à l'autorité aux fins de paiement ou à
titre de reçu des paiements anticipés.
5.7 Les postes de la catégorie la figurent aux pièces communi
quées portant les numéros 1, 2, 3, 4, 5, 10.1, 12, 13, 15, 20, 21,
21.1, 30, 34, 36 et 38. Aux fins du présent procès, seul les
postes figurant aux pièces communiquées portant les numéros
2, 4, 10.1, 21.1 et 15 sont présentés en preuve.
5.8 Les parties conviennent par les présentes qu'aux fins du
présent litige, la décision relative aux postes portant les numé-
ros 2, 4, 10.1, 21.1 et 15, pour autant que cette décision est
uniforme et applicable en principe, s'appliquera aux autres
postes et qu'il sera statué à leur sujet en conséquence.
SOUS-CATÉGORIE Ib
6.1 Cette sous-catégorie comprend des débours engagés à la
demande d'une corporation ou d'un particulier autre que ceux
décrits à la sous-catégorie la (ces corporations ou ces particu-
liers sont désignés comme «l'industrie»). Dans ces cas égale-
ment, l'industrie a prié la demanderesse d'exécuter des travaux
sur des biens situés sur des terrains de la demanderesse, ces
biens devenant et demeurant la propriété de cette dernière.
Celle-ci informait l'industrie du coût estimatif total des maté-
riaux et de la main-d'oeuvre nécessaires à l'exécution des
travaux, et l'industrie s'engageait à lui rembourser cette somme
en tout ou en partie, soit
a) par versements échelonnés au fur et à mesure de l'avance-
ment des travaux, ou
b) à la fin des travaux.
La demanderesse exécutait alors les travaux en se servant de
ses propres ouvriers ou en engageant des entrepreneurs et elle
demandait à l'industrie de la rembourser.
6.2 Les postes de la catégorie Ib figurent aux pièces communi
quées portant les numéros 6, 7, 8, 9, 11, 14, I8, 19, 22, 23, 25,
28 et 38.1, 35, 40, 44, 45, 46, 47, 52, 54, 57, 59 et 60. Aux fins
du présent procès, seuls les postes figurant aux pièces portant
les numéros 9, 28, 38.1 et 44 sont présentés en preuve.
6.3 Les parties conviennent par les présentes qu'aux fins du
présent litige, la décision relative aux postes portant les numé-
ros 9, 28, 38.1 et 44, pour autant que cette décision est
uniforme et applicable en principe, s'appliquera aux autres
postes de la sous-catégorie Ib et qu'il sera statué à leur sujet en
conséquence.
7.1 Aux fins de ces sous-catégories, et dans l'éventualité où les
conclusions ne seraient pas uniformes dans chaque catégorie,
les parties conviennent d'appliquer les principes aux autres
postes; s'il y avait désaccord, chaque partie se réserve le droit
de soumettre à la Cour le point contesté, sur avis de requête.
CATÉGORIE 2
8.1 Cette catégorie comprend des sommes qu'a ajoutées la
demanderesse à l'assiette de la déduction pour amortissement,
en même temps que des dégrèvements, à des «Dons et octrois»,
sur remise qu'a faite à celle-ci une partie à une convention
portant sur une voie de garage particulière des éléments consti-
tuants sujets à déterioration d'une voie de garage particulière.
Les postes de la catégorie 2 figurent aux pièces communiquées
portant lès numéros 10, 16, 26, 29, 39, 41, 42, 43, 48, 49, 50,
51, 53 et 56. Dans chacun de ces cas, la personne (ou l'indus-
trie) a tout d'abord demandé la construction d'une voie de
garage particulière et a convenu de rembourser à la demande-
resse le prix réel des matériaux sujets à détérioration et de la
main-d'oeuvre nécessaires à cette construction. La personne en
question et la demanderesse signaient une convention portant
sur une voie de garage particulière, aux termes de laquelle
ladite personne autorisait la construction, s'engageait à en
effectuer le remboursement et louait les rails et les voies, dont
le prix n'était pas remboursé. Lorsque la personne en question
n'avait plus besoin de la voie de garage particulière, elle la
restituait à la demanderesse pour son usage exclusif. Ce n'est
qu'au moment de cette restitution que la demanderesse inscri-
vait un «Don et octroi» conformément aux dispositions de la
classification uniforme des comptes. Le prix initial réel des
matériaux sujets à détérioration et le coût de l'installation de la
voie de garage particulière étaient portés au débit des comptes
de placements immobiliers de la demanderesse, de façon que les
matériaux de la voie de garage fassent partie de son réseau
ferroviaire. Ce n'est qu'au moment où ces biens devenaient la
propriété exclusive de la demanderesse conformément à la
convention portant sur la voie de garage que leur prix était
incorporé à l'assiette du coût en capital en vertu des règlements
relatifs aux déductions pour amortissement. La défenderesse ne
reconnaît pas que les biens restitués sont la propriété de la
demanderesse.
8.2 Aux fins du présent litige, seul le poste - est
présenté en preuve.* La décision rendue sur ce poste s'appli-
quera à tous les postes de la catégorie 2.
CATÉGORIE 3
9.1 Cette catégorie comprend des sommes qu'a déjà inscrites la
demanderesse à l'assiette du coût en capital et qu'elle a classées
comme des améliorations apportées à des biens qu'elle a loués
et qu'elle a transférés à la catégorie des biens qu'elle possède
avec transfert simultané en 1956 de la catégorie «Dons et
octrois—lignes louées» à celle des «Dons et octrois—lignes
possédées», du fait que certains biens que la demanderesse avait
loués auparavant de «compagnies de chemin de fer concédant
des lignes» étaient devenus sa propriété à la suite de diverses
lois qu'avait adoptées le Parlement. La pièce numéro 65 des
pièces communiquées fait état des postes de la catégorie 3.
10.1 La classification uniforme des comptes prévoit notam-
ment que les rajouts, pièces de rechange et remplacements
majeurs apportés aux biens des compagnies de chemin de fer et
de télécommunications seront comptabilisés de la façon
suivante.
7(B) Contributions. Lorsqu'une partie des fonds que dépense
le transporteur ou qui sont dépensés pour lui, proviennent de
crédits qu'y affecte le gouvernement, de contributions de
particuliers, ou d'autres sources, elle sera comptabilisée de la
façon suivante, à moins que la Commission n'autorise expres-
sément une autre façon de procéder:
(i) Biens exclusifs. Le prix des biens relatifs aux trans
ports dont le transporteur acquiert la propriété exclusive et
le droit exclusif d'utilisation sera porté à ces comptes sans
déduction pour contributions provenant d'autres sources.
Les contributions destinées à la construction de biens
relatifs aux transports seront créditées au compte no 799,
«Dons et octrois—biens des chemins de fer» ou au compte
no 799 NR, «Dons et octrois—biens des chemins de fer—
lignes américaines.»
Les contributions destinées à certains projets, comme la
reconstruction ou le déplacement de voies et des installa
tions s'y rattachant seront d'abord affectées à la réduction
ou à l'annulation des sommes qui seraient autrement débi-
tées au compte d'amortissement accumulé et le reste, sera
le cas échéant, crédité au compte no 799, intitulé «Dons et
octrois—biens des chemins de fer» ou au compte no
799NR, «Dons et octrois—biens des chemins de fer—
lignes américaines.»
11.1 La Commission n'a autorisé l'adoption d'aucune autre
méthode pour remplacer celle qui est exposée à la clause
7(B)(i).
12.1 La classification uniforme des comptes relative aux trans-
porteurs publics de classe 1 par chemin de fer, communiquée
comme pièce 64 et portant le certificat de la Commission
canadienne des transports, a été adoptée régulièrement et mise
en vigueur par la Commission des transports du Canada en
vertu des pouvoirs que lui a conférés la Loi sur les chemins de
* On a également présenté des éléments de preuve en ce qui
concerne le poste no 50.
fer, et cette classification a régi l'organisation comptable de la
demanderesse pendant les années d'imposition en litige.
13.1 La classification uniforme des comptes, communiquée
comme pièce 64, est la «classification uniforme» à laquelle fait
allusion l'article 84A(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu.
14.1 Chaque bien dont il est question aux catégories 1, 2 et 3
était un «bien» au sens des articles 139 et 11(1)a) de la Loi de
l'impôt sur le revenu applicable.
15.1 Dans chacun des cas dont font état les catégories 1, 2 et 3,
la somme qu'a reçue la demanderesse n'était pas supérieure à
celle qu'elle avait réellement dépensée pour exécuter les travaux
sur les biens et l'opération ne lui avait procuré ni revenu net ni
bénéfice.
Les articles de la Loi de l'impôt sur le revenu
qui influent ou peuvent influer sur la décision
relative à ces questions sont les suivants:
8. (3) Un montant annuel ou autrement périodique payé par
une corporation à un contribuable concernant une obligation
gagée sur les bénéfices ou une débenture gagée sur les bénéfices
est censé avoir été reçu par le contribuable comme dividende, à
moins que la corporation n'ait droit de déduire le montant ainsi
payé dans le calcul de son revenu.
(4) Le présent article est applicable au calcul du revenu d'un
actionnaire aux fins de la présente Partie, que la corporation ait
ou non résidé ou exercé des affaires au Canada.
11. (1) Par dérogation aux alinéas a),b) et h) du paragraphe
(1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être déduits
dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année
d'imposition:
a) la partie de ce que coûtent en capital les biens au contri-
buable, ou la somme à l'égard de ce que coûtent en capital
les biens au contribuable, s'il en est, qui est allouée par
règlement;
28. (1) Lorsque dans une année d'imposition, une corpora
tion a reçu un dividende d'une corporation qui
d) était une corporation non résidante dont plus de vingt-
cinq pour cent du capital-actions émis (ayant en toutes
circonstances plein droit de vote) appartenait à la corpora
tion bénéficiaire, ..
un montant égal au dividende, moins tout montant déduit en
vertu du paragraphe (2) de l'article 11 dans le calcul du revenu
de la corporation bénéficiaire, peut être déduit du revenu de
cette corporation pour l'année aux fins d'établir son revenu
imposable.
12. (1) Dans le calcul du revenu, il n'est opéré aucune
déduction à l'égard
f) d'un montant versé par une corporation autre qu'une
corporation personnelle, à titre d'intérêt ou autrement, aux
détenteurs de ses obligations ou débentures gagées sur les
bénéfices, à moins que les obligations ou débentures n'aient
été émises ou les dispositions y renfermées relatives aux
bénéfices n'aient été adoptées depuis 1930
(i) en vue de procurer au débiteur quelque soulagement à
ses difficultés financières, et
(ii) pour remplacer ou modifier des obligations ou dében-
tures qui, à la fin de 1930, portaient un taux d'intérêt fixe
sans condition,
139. (1) Dans la présente loi,
t) «obligation gagée sur les bénéfices ou débenture gagée sur
les bénéfices» signifie une obligation ou une débenture à
l'égard desquelles l'intérêt ou les dividendes ne sont payables
que lorsque la compagnie débitrice a réalisé des bénéfices
avant de tenir compte de ses obligations quant aux intérêts
ou aux dividendes;
84A. (3) Lorsque, d'après une classification et un système
uniformes de comptes et relevés prescrits par la Commission
canadienne des transports conformément à la Loi sur les
chemins de fer, un montant à l'égard d'une dépense supportée
par un contribuable, pour ou concernant la réparation, le
remplacement, la modification ou la rénovation de biens du
contribuable susceptibles de dépréciation, d'une catégorie pres-
crite par des règlements du gouverneur en conseil établis aux
fins du présent article, doit être inscrit dans les livres du
contribuable autrement qu'à titre de dépense,
a) aucune déduction ne peut être faite à l'égard de cette
dépense dans le calcul du revenu du contribuable pour une
année d'imposition; et
b) aux fins de l'article 20 et des règlements établis selon
l'alinéa a) du paragraphe (1) de l'article 11, le contribuable
est réputé avoir acquis, au moment où la dépense a été
effectuée, des biens susceptibles de dépréciation de cette
catégorie à un coût en capital égal audit montant.
Certaines parties de la Convention relative à l'im-
pôt entre le Canada et les États-Unis, et du
Protocole au même sujet, en date du 4 mars 1942,
qui s'appliquent également, sont les suivantes:
CONVENTION
ARTICLE I
Toute entreprise de l'un des États contractants n'est imposa-
ble par l'autre État contractant en raison de ses bénéfices
industriels et commerciaux que pour la part de ces bénéfices
imputables, aux termes de la présente convention, à l'établisse-
ment stable qu'elle exploite dans ce dernier État.
ARTICLE II
Pour les fins de la présente Convention, l'expression «bénéfi-
ces industriels et commerciaux» ne vise pas le revenu qui se
présente sous la forme de loyers, de redevances, d'intérêts, de
dividendes, de droits de gestion ou de gains retirés de la vente
ou de l'échange de biens de capital.
Sous réserve des clauses de la présente Convention, ces chefs
de revenu seront taxés séparément ou avec les bénéfices indus-
triels et commerciaux suivant les lois respectives des États
contractants.
ARTICLE XV
Dans la mesure où le permettent les dispositions de la Loi de
l'impôt sur le revenu, le Canada est convenu de permettre qu'il
soit défalqué des impôts fédéraux sur le revenu et sur les
super-bénéfices qui frappent tout revenu provenant de sources
se trouvant aux États-Unis d'Amérique et imposé par ces
derniers, le juste montant desdits impôts payés aux États-Unis
d'Amérique.
PROTOCOLE
3. Dans ladite Convention:
f) l'expression «établissement stable» vise les succursales, les
exploitations minières et pétrolifères, agricoles et forestières,
les plantations, les fabriques, les ateliers, les entrepôts, les
bureaux, les agences et les autres places fixes d'affaires de
toute entreprise, mais non pas les sociétés filiales. L'utilisa-
tion d'une quantité considérable de matériel ou de machine-
rie dans l'un des États contractants, pendant toute partie
d'une année d'imposition quelconque, par une entreprise de
l'autre État contractant, constituera pour cette entreprise un
établissement stable dans le premier État pendant ladite
année d'imposition.
6. a) L'expression «loyers et redevances» dont il est fait
usage à l'article II de ladite Convention comprend les loyers
et les redevances que rapportent la location de biens meubles
ou immeubles ou un intérêt quelconque dans ces biens, y
compris les loyers et redevances pour usage ou droit de se
servir de brevets, de droits d'auteur, de formules et de
procédés secrets, d'achalandage, de marques de fabrique et
de commerce, de concessions et de tous autres biens
analogues;
Au début de l'audience, on a ajouté à l'exposé
conjoint des faits le paragraphe 25A, qui déclare
«Les obligations des corporations énumérées aux
paragraphes 2, 10 et 18 étaient toutes des obliga
tions qui, à la fin de 1930, portaient sans réserve
intérêt à un taux fixe». Une modification a été
apportée au paragraphe 5.7 de la Partie III pour
retrancher les numéros 10.1, 21.1 et 34 de la
sous-catégorie la et les placer au paragraphe 6.2
de la sous-catégorie lb; en outre, cette modifica
tion a ajouté le poste n° 61 au paragraphe 5.7.
REVENU PROVENANT D'OBLIGATIONS À INTÉRÊT
CONDITIONNEL
Deux experts en droit étranger ont été cités pour
régler une controverse portant sur la façon de
considérer l'intérêt tiré d'obligations à intérêt con-
ditionnel, que soulève l'application de l'article
12(1)f) à cet intérêt. Robert T. Beam, avocat de
Chicago, a été cité au nom de la demanderesse,
son affidavit était recueilli comme s'il avait été lu.
Il a agi à titre de conseil lors du plan d'assainisse-
ment qu'a conclu la Soo Line Railroad Company
avec ses chemins de fer constituants, il connaît
bien les antécédents de la compagnie ainsi que les
lois américaines relatives aux plans d'assainisse-
ment des compagnies de chemin de fer et en
particulier l'article 77 de l'United States Bank
ruptcy Act. Il a expliqué qu'en vertu de cet article,
un chemin de fer inter-états en état d'insolvabilité
peut faire une demande de plan d'assainissement.
Un syndic est désigné et on dépose devant l'Inter-
state Commerce Commission un plan d'assainisse-
ment afin qu'elle l'approuve ou lui substitue le
sien. Cela fait, la Cour homologue ce projet si elle
l'approuve et un administrateur du plan est dési-
gné. Ce plan d'assainissement peut revêtir deux
formes: on peut soit constituer une corporation
nouvelle à la suite de la fusion des anciennes
corporations, soit conserver ces dernières sous
réserve des conditions du plan d'assainissement. En
l'espèce, la Cour a autorisé l'une et l'autre solu
tion, mais l'administrateur a décidé de constituer
une nouvelle corporation parce que selon lui,
c'était la façon la plus simple d'agir et cela per-
mettait d'éviter une confusion entre les valeurs
mobilières des anciennes corporations, les ancien-
nes raisons sociales, les règlements différents et
ainsi de suite. Dans le cas de la Minneapolis, St.
Paul and Sault Ste. Marie Railway Company, une
nouvelle compagnie a été constituée en 1944, bien
que l'ancienne compagnie, qui avait été constituée
conformément aux lois de plusieurs États, y com-
pris le Minnesota, le Wisconsin, l'Illinois et ce qui
était à l'époque de la constitution initiale le Terri-
toire du Dakota, n'ait pas été dissoute mais que ses
biens aient été transmis par les syndics à la nou-
velle compagnie. Cette dernière n'est pas devenue
responsable des obligationç de l'ancienne compa-
gnie, mais elle a assumé certaines obligations, par
exemple en ce qui concerne les impôts, les récla-
mations de dommages-intérêts en responsabilité
quasi délictuelle et les chèques en coursa Selon les
témoins, les obligations de la nouvelle compagnie
n'ont pas été émises en remplacement de celles de
l'ancienne compagnie, mais elles constituaient un
nouveau capital qu'avait approuvé l'Interstate
Commerce Commission, et qui tenait compte par
exemple du fait que la nouvelle compagnie tirerait
profit du transfert d'une convention relative aux
transports, conclue avec le Canadien Pacifique,
sans laquelle le plan d'assainissement n'aurait pas
été approuvé. Autrement dit, on a pris en considé-
ration la valeur totale de tous les droits des déten-
teurs primitifs d'obligations et le plan d'assainisse-
ment n'a pas constitué un simple échange
d'obligations. Les détenteurs des anciennes obliga
tions ont reçu des obligations à intérêt conditionnel
de la nouvelle compagnie, de l'argent liquide et ils
ont bénéficié de l'option d'achat d'actions
ordinaires.
Dans le cas du plan d'assainissement de la Wis-
consin Central Railroad Company en 1954, on a
suivi la même méthode, une nouvelle compagnie
ayant été constituée et, bien que l'ancienne compa-
gnie n'ait pas été dissoute, son actif a été transmis
en totalité à la nouvelle compagnie. Les détenteurs
d'obligations de l'ancienne compagnie ont reçu des
obligations hypothécaires de premier rang à intérêt
conditionnel, des obligations hypothécaires généra-
les à intérêt conditionnel et des actions ordinaires
de la nouvelle compagnie.
Dans le cas du plan d'assainissement de la
Duluth South Shore and Atlantic Railroad Com
pany, en 1949, qui a eu lieu au Minnesota, on a
encore procédé de la même façon, mais il s'agissait
en l'occurrence de deux anciennes compagnies, la
seconde étant la Mineral Range Railroad Com
pany, dont la Duluth était propriétaire exclusive.
L'ancienne compagnie Duluth n'a pas été dissoute
et, là encore, on a transmis à la nouvelle compa-
gnie l'actif des deux anciennes et les détenteurs
d'obligations de ces dernières ont reçu de l'argent
liquide, des obligations à intérêt conditionnel et
des actions ordinaires. Il a été précisé dans ce cas
aussi que le plan d'assainissement réglait toutes les
créances au moyen de la répartition d'un nouveau
portefeuille de valeurs.
Contre-interrogé, Beam a admis que l'objet
principal de l'article 77 de l'United States Bank
ruptcy Act est la réhabilitation du débiteur grâce
au plan d'assainissement de la compagnie. Il ne
s'agit pas d'une liquidation, mais d'un plan d'assai-
nissement visant à maintenir dans l'intérêt du
public un chemin de fer en activité. La nouvelle
compagnie a été constituée, puisqu'on a choisi
cette solution, pour soulager les corporations en
faillite des difficultés que leur causaient des obli
gations à intérêt fixe, alors que leurs gains ne
suffisaient pas à couvrir ces obligations, en leur
permettant d'émettre à la place des obligations à
intérêt conditionnel, cet intérêt ne s'accumulant
pas lorsque les recettes étaient insuffisantes pour
couvrir le service de l'intérêt. On entendait ainsi
libérer les corporations en faillite et non pas les
nouvelles corporations ainsi créées. Seul le plan
d'assainissement de la Duluth South Shore and
Atlantic Railroad comprenait également un com-
promis portant sur certaines créances contre le
Canadien Pacifique.
La défenderesse a cité Me Robert Ginnane,
avocat, comme expert en la matière, et la lettre
dans laquelle il exprime son opinion, ainsi que le
certificat de l'avocat de la défenderesse qui y était
joint, ont été versés au dossier comme s'ils avaient
été lus. Me Ginnane est conseil auprès d'un cabinet
d'avocats de Washington (D. de C.), membre du
barreau de la Cour suprême des États-Unis et il a
été le conseil général de l'Interstate Commerce
Commission aux États-Unis de 1955 à 1970; il a
donc une grande expérience des plans d'assainisse-
ment des compagnies de chemins de fer. Il a
témoigné que le Canadien Pacifique était proprié ,
taire d'obligations à intérêt fixe des trois compa-
gnies de chemin de fer ci-dessus avant 1930 et que
par suite du plan d'assainissement, les détenteurs
des obligations à intérêt fixe ont reçu des obliga
tions à intérêt conditionnel, de l'argent liquide, et
des- obligations, ou les uns ou les autres, en rempla-
cement desdites obligations à intérêt fixe. Il a cité
la jurisprudence qu'a établie l'affaire Van Schaick
c. McCarthy 2 , où il est indiqué à la page 992:
[TRADUCTION] L'article 77 vise principalement la réhabili-
tation de la corporation endettée au moyen du remaniement de
sa structure financière dans l'intérêt de la débitrice, de ses
créanciers et des détenteurs de ses valeurs mobilières, confor-
mément à un plan d'assainissement juste et équitable, qui
modifiera ou changera les droits des créanciers nantis et chiro-
graphaires de façon que les charges fixes ne dépassent pas les
gains futurs probables et disponibles dont on disposera pour les
acquitter.
Me Ginnane a également cité l'arrêt Baker c. Gold
Seal Liquors, Inc. 3 , où il est déclaré aux pages
2506 2507:
[TRADUCTION] Le problème de la Reorganization Court en
matière de faillite est quelque peu différent. Le but n'est pas la
liquidation. On s'efforce au contraire, au moyen d'une restruc-
turation financière, de remettre en exploitation une entreprise
en marche. Doivent entrer en ligne de compte deux soucis
principaux:
2 116 F. 2' 987.
3 (1974) 94 S.Ct. 2504 [417 US 468 aux pages 470-71].
Tout d'abord, il faut recouvrer les sommes dues à la faillie
afin que les rentrées lui permettent de poursuivre ses activités,
si réduites soient-elles. Ensuite, il faut élaborer un plan qui
recueille l'approbation des créanciers et des autres ayants droit,
qu'approuvera l'Interstate Commerce Commission, qui satis-
fera aux normes de justice et d'équité qu'impose la Loi à
l'homologation de la Cour, et qui maintiendra un chemin de fer
en activité dans l'intérêt du public.
Me Ginnane a déclaré que dans le présent cas,
c'est précisément ce qu'ont réalisé les plans d'as-
sainissement et que ce sont les détenteurs d'obliga-
tions à intérêt fixe de l'ancienne compagnie qui ont
reçu les nouvelles obligations à intérêt conditionnel
dans le cadre de ce plan et non de leur plein gré, la
nouvelle corporation n'étant qu'un simple instru
ment permettant de réaliser cette fin.
Admettant volontiers que l'interprétation de
cette question appartient à une cour canadienne,
W Ginnane, lorsqu'il a exprimé son opinion sur
l'application de l'article 12(1)f)(ii) de la Loi de
l'impôt sur le revenu, était moins certain de son
applicabilité dans le cas des obligations à intérêt
conditionnel de la Duluth South Shore and Atlan-
tic Railroad; au dernier paragraphe de son rap
port, il a déclaré:
[TRADUCTION] Quant au sous-alinéa (ii) précité de l'article
12(1)f), il semble évident que les obligations à intérêt condi-
tionnel de la Minneapolis et de la Wisconsin ont été émises
«pour remplacer» des obligations «qui, à la fin de 1930, por-
taient intérêt à un taux fixe, sans condition.» Dans le cas de la
Duluth, les faits dont je dispose ne me permettent pas de me
prononcer sur la question de savoir si les obligations à intérêt
conditionnel de cette compagnie de chemin de fer satisfont à la
condition exposée au sous-alinéa (ii).
La défenderesse prétend que l'article 8(3) se
suffit à lui-même et qu'il n'est pas nécessaire de
tenir compte des conséquences de l'article 12(1)j)
mais, dans l'éventualité où la Cour en déciderait
autrement, elle fait valoir subsidiairement que la
Soo aurait pu déduire les sommes versées au Cana-
dien Pacifique en qualité de détenteur de ses obli
gations à intérêt conditionnel et que par suite,
cette dernière compagnie ne peut, conformément
aux dispositions de l'article 8(3) être réputée avoir
reçu ces versements à titre de dividende. La dépo-
sition du témoin-expert portant sur ce second argu
ment, il convient d'en traiter ici. Si la Soo, quoique
non résidante, est une corporation au sens de
l'article 12(1)f) (et l'on étudiera plus loin cet
argument) cet article s'applique du fait qu'elle
n'est pas une corporation personnelle, de sorte
qu'elle ne pouvait pas déduire les versements faits
au Canadien Pacifique à titre de détenteur des
obligations à intérêt conditionnel des trois compa-
gnies qui ont fusionné en 1960 pour constituer la
Soo, «à moins que ces obligations ou débentures
n'aient été émises ou que les dispositions de cel-
les-ci relatives aux bénéfices n'aient été adoptées
depuis 1930» (ce qui est le cas),
(i) en vue de procurer au débiteur quelque soulagement à ses
difficultés financières, et
(ii) pour remplacer ou modifier des obligations ou débentu-
res qui, à la fin de 1930, portaient intérêt à un taux fixe, sans
condition.
Si l'on applique les dispositions de ces deux
conditions à la preuve présentée, l'argument de la
défenderesse accorderait au mot «débiteur» que
l'on trouve au sous-alinéa (i) un sens assez large
pour englober les compagnies qui ont précédé la
Duluth South Shore and Atlantic Railroad, la
Minneapolis, St. Paul and Sault Ste. Marie Rail
way Company et la Wisconsin Central Railroad
Company, que l'émission de ces obligations à inté-
rêt conditionnel a soulagées de leurs difficultés
financières. Ce résultat était sans aucun doute le
but des plans d'assainissement, qu'on aurait pu
atteindre sans la constitution de nouvelles compa-
gnies; toutefois, je ne puis conclure que le mot
«débiteur», qui figure au sous-alinéa (i), a un sens
si étendu qu'il englobe les anciennes compagnies
sans laisser totalement de côté les principes fonda-
mentaux du droit des compagnies relatifs à l'exis-
tence distincte des compagnies nouvellement cons-
tituées. Ce ne sont pas ces dernières qui
éprouvaient des difficultés financières, mais les
compagnies qui les avaient précédées, et le mot
«débiteur», qui figure au sous-alinéa (i), doit dési-
gner la corporation qui paie l'intérêt des obliga
tions à intérêt conditionnel, c'est-à-dire la nouvelle
compagnie. Bien que les anciennes corporations
aient continué à exister en ce sens qu'elles n'ont
pas renoncé à leur charte, ce ne sont pas elles qui
versaient au Canadien Pacifique en 1965, 1966 et
1967 l'intérêt sur ces obligations.
De plus, je n'estime pas que les nouvelles obliga
tions à intérêt conditionnel ont été émises «pour
remplacer» les obligations portant intérêt à un taux
fixe des anciennes corporations, au sens du sous-
alinéa (ii) de l'article 12(1)f). Elles ont été émises
ainsi que certaines sommes d'argent et certaines
actions en échange des anciennes obligations et de
certaines autres contreparties, notamment, dans le
cas de la Minneapolis, St. Paul and Sault Ste.
Marie Railway de contrats conclus avec le Cana-
dien Pacifique et, dans le cas de la Duluth South
Shore and Atlantic Railroad, l'abandon de certai-
nes créances contre le Canadien Pacifique. Bien
qu'il semble que le plan d'assainissement qu'a
approuvé l'Interstate Commerce Commission dans
chaque cas et qu'ont homologué les Cours ait
estimé qu'il s'agissait là d'une contrepartie équiva-
lente de nature à sauvegarder autant que possible
les intérêts des créanciers des anciennes compa-
gnies qui avaient fait face à des difficultés finan-
cières, il serait simpliste de dire que les nouvelles
obligations à intérêt conditionnel ont été émises
simplement «pour remplacer» les anciennes obliga
tions portant intérêt à un taux fixe.
Il s'ensuit donc que la corporation payeuse, qui
est la corporation mentionnée à l'article 12(1)f) ne
pourrait pas, en vertu de cet article, déduire ces
paiements dans le calcul de son revenu si elle était
une contribuable résidant au Canada; il s'ensuit
également que la clause qui figure à la fin de
l'article 8(3) n'empêche pas le Canadien Pacifique,
à titre de contribuable bénéficiaire, d'appliquer
ledit article et de prétendre que ces sommes ont été
reçues comme dividende.
Bien que ce qui précède tranche cet argument
subsidiaire en faveur de la demanderesse, il n'en
est pas de même de l'argument principal du Cana-
dien Pacifique, qui a considéré ce revenu comme
étant un revenu provenant de dividendes, confor-
mément aux dispositions de l'article 8(3). Subsi-
diairement encore, la défenderesse affirme que si
le terme corporation, au sens où il est employé à
l'article 8(3), se limite à des corporations assujet-
ties à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada
(ce que conteste la défenderesse), il s'ensuit tout
d'abord, puisque l'intérêt qu'a perçu le Canadien
Pacifique sur ces obligations à intérêt conditionnel
provenait d'une corporation américaine ne faisant
pas d'affaires au Canada et n'y résidant pas, que
cet intérêt ne peut être considéré comme un divi-
dende que régit l'article 8(3). Cependant, dans sa
thèse principale sur les obligations à intérêt condi-
tionnel, la défenderesse a prétendu que le terme
«corporation» qui figure à l'article 8(3) ne se limite
pas à une corporation résidante du Canada et, si
cette prétention est accueillie, la seconde thèse
subsidiaire tombe. A l'appui de cette prétention,
elle renvoie à l'article 8(4) (précité), qui applique
l'article 8 au calcul du revenu d'un actionnaire
«que la corporation ait ou non résidé ou exercé des
affaires au Canada». L'article 8 porte en marge la
mention «Affectation de biens aux actionnaires» et
le mot «actionnaire» qui figure à l'article 8(4) ne se
limite certainement pas à un actionnaire d'une
compagnie. Le mot «corporation» qui figure à l'ar-
ticle 8(4), lu en le rapprochant de l'article 8(3),
doit désigner la corporation payeuse, et j'ai conclu
que cette dernière ne peut prétendre déduire les
sommes ainsi versées dans le calcul de son revenu.
Aux fins de l'impôt sur le revenu du Canada, il
semble que ce soit le cas, sans qu'il y ait à recher-
cher si la corporation a ou non résidé ou exercé des
affaires au Canada. Le fait que la Soo Line,
comme on le reconnaît dans l'exposé conjoint des
faits, était à titre de corporation payeuse fondée à
déduire dans le calcul de son revenu aux fins de
l'impôt sur le revenu des États-Unis, et a en fait
déduit, le montant de l'intérêt ainsi versé à la
demanderesse sur les obligations à intérêt condi-
tionnel, ne peut rien y changer.
La conclusion selon laquelle le mot «corpora-
tion», employé à l'article 8(3) comprend une cor
poration non résidante, résulte encore du fait que
l'article 139(1)h) de la Loi, qui définit la «corpora-
tion», énonce que ce terme «comprend une compa-
gnie constituée» et définit plus loin une «corpora-
tion constituée au Canada». Si le législateur avait
voulu limiter l'application de l'article 8(3) à «une
corporation constituée au Canada» c'est l'expres-
sion qu'il aurait dû employer, et non pas simple-
ment «une corporation».
En outre, l'article 28(1)d) dont tirera profit le
Canadien Pacifique en retenant comme dividende
l'intérêt reçu sur les obligations à intérêt condi-
tionnel, conformément à l'article 8(3), prévoit un
dividende reçu d'«une corporation non résidante»
dont plus de 25% du capital-actions émis (ayant en
toutes circonstances plein droit de vote) apparte-
nait à la «corporation» bénéficiaire,, ce qui était le
cas en l'espèce.
Le fait que j'ai conclu que le terme «corpora-
tion», employé à l'article 8(3), s'applique aussi
bien à une corporation non résidante qu'à une
corporation canadienne ne conduit pas nécessaire-
ment à une décision sur la question relative au fait
que le Canadien Pacifique considère l'intérêt reçu
sur les obligations à intérêt conditionnel comme un
dividende. La défenderesse prétend qu'il ne pou-
vait le faire parce que la corporation payeuse, la
Soo Line, était fondée à déduire, dans le calcul de
son revenu gagné aux États-Unis, la somme ainsi
versée, et c'est là le point sur lequel les parties ne
sont pas d'accord, la demanderesse prétendant que
cela est sans importance et que cette exception ne
s'applique pas, à moins que la corporation payeuse
n'ait été fondée à déduire, dans le calcul de son
revenu gagné au Canada, la somme ainsi versée, ce
qui n'était pas le cas. J'ai déjà conclu (ci-dessus)
que si l'on interprète rigoureusement l'article
12(1)f), la corporation payeuse ne serait pas
fondée à effectuer cette déduction, même si elle
avait été une contribuable résidant au Canada, du
fait que ces obligations avaient été émises par les
nouvelles compagnies et non pour remplacer les
obligations initiales portant intérêt à un taux fixe,
mais puisque la défenderesse prétend que l'article
8(3) doit s'interpréter isolément, sans tenir compte
de l'article 12(1)f), il est nécessaire d'étudier ici sa
thèse principale. Elle fait valoir que les mots «n'ait
droit» et «dans le calcul de son revenu», qui figu-
rent à l'article 8(3), n'ont pas un sens étroit,
impliquant qu'ils désignent un revenu imposable
au Canada, mais s'appliquent également à une
corporation non résidante. La demanderesse ren-
voie à l'arrêt Lea -Don Canada Limited c.
M.R.N. 4 , qui traitait d'un tout autre article de la
Loi, mais dans lequel le juge Hall, en rendant le
jugement unanime de la Cour suprême, a déclaré à
la page 99:
On ne peut aucunement admettre la prétention que les
dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui autorisent
une déduction à l'égard du coût en capital des biens suscepti-
bles de dépréciation, s'appliquent à ceux qui, ne résidant pas au
Canada, ne sont pas assujettis à la cotisation pour fins d'impôt
en vertu de la Partie I de la Loi sous prétexte que cette
déduction se calcule à partir du revenu. Il est clair que le par.
(4) de l'art. 20 vise les contribuables qui ont droit à une
déduction et non les personnes qui ne sont pas assujetties à la
cotisation en vertu de la Partie I. Celui qui ne réside pas au
Canada et qui n'y fait pas affaires n'est pas une personne qui a
droit à une telle déduction; donc, on ne saurait à proprement
parler, dire que le par. (4) de l'art. 20 s'applique à lui.
Il est malheureusement vrai que cette interpré-
tation nuit à l'esprit du régime fiscal tel que le
prévoit la Loi, prise globalement. Comme l'a dit
l'avocat de la défenderesse dans ses notes avec
lesquelles je suis d'accord sur ce point, «l'intention
4 [1971] R.C.S. 95.
de l'article 8(3) est de traiter de façon uniforme,
en matière fiscale entre compagnies, les transferts
de capitaux ayant un caractère de dividendes,
réputés ou réels. Le but de cet article n'est pas
d'accorder à la corporation payeuse la déduction
du montant de l'intérêt versé tout en permettant à
la corporation bénéficiaire de recevoir cet intérêt
exempt d'impôt.» Bien que ce qui précède soit tout
à fait exact lorsqu'il s'agit de deux corporations
canadiennes assujetties à l'impôt sur le revenu au
Canada, le fait qu'en l'espèce la corporation
payeuse n'était pas assujettie à cet impôt, mais
n'en bénéficiait pas moins aux États-Unis de
l'avantage fiscal que lui procurait la déduction,
dans le calcul de son revenu aux fins de l'impôt sur
le revenu dans ce pays, de l'intérêt ainsi payé sur
les obligations à intérêt conditionnel, et le fait que
le Canadien Pacifique, à titre de détenteur d'une
participation majoritaire dans les corporations
payeuses, tire indirectement profit de cet état de
choses, ne suffisent pas, à mon avis, à l'empêcher
de considérer comme dividendes les sommes ainsi
reçues au sens des dispositions explicites de l'arti-
cle 8(3) de la Loi et par suite, de jouir au Canada
de l'avantage fiscal résultant de l'application de
l'article 28(1)d).
A l'appui de son interprétation de l'article 8(3),
la demanderesse a avancé certains arguments sub-
sidiaires, insoutenables mais non totalement
dénués d'intérêt. Tout d'abord, elle 'a fait observer
que pendant un certain nombre d'années antérieu-
res à l'année d'imposition 1965, elle avait toujours
déclaré comme dividende, en vertu de l'article
8(3), le revenu tiré de ces obligations, sans que la
défenderesse ne s'y oppose. Le principe selon
lequel le fisc n'a pas à traiter de manière uniforme
les déclarations d'impôt d'un contribuable d'une
année à une autre est si bien établi qu'il n'est pas
nécessaire de citer de jurisprudence à l'appui. Si,
sur ce point, la défenderesse s'est autrefois trom-
pée en établissant la cotisation de la demanderesse,
comme elle ne manquerait pas de l'affirmer, cela
ne l'empêche pas d'imposer de la façon qu'elle juge
maintenant appropriée ledit revenu pendant les
années d'imposition en cause. Le second argument
est quelque peu semblable. Le bulletin d'interpré-
tation IT-10 en date du 19 mai 1971 indique
notamment:
Normalement, le montant que reçoit un contribuable en ce
qui concerne une obligation ou débenture gagée sur les bénéfi-
ces dont il est détenteur est réputé lui avoir été payé à titre de
dividende. Cette règle comporte, toutefois, une exception dans
le cas où la corporation qui effectue le paiement a le droit d'en
déduire le montant dans le calcul de son revenu. L'article
12(1)f) établit les circonstances dans lesquelles une corporation
a droit à une telle déduction. Le fait que l'intérêt est déductible,
en vertu de la loi d'une administration fiscale étrangère, dans le
calcul du revenu imposable dans le pays étranger, ne modifiera
en rien l'application de l'article 8(3). Donc, lorsqu'une corpora
tion canadienne touche des intérêts à l'égard d'une obligation
gagée sur les bénéfices d'une corporation des États-Unis qui
n'est pas assujettie à l'impôt au Canada, ces intérêts seront
réputés en vertu de l'article 8(3) être un dividende, peut
importe que la corporation des États-Unis puisse déduire ou
non le montant qu'elle a payé dans le calcul de son revenu
imposable aux États-Unis.
Ce bulletin est antérieur au dernier avis de nou-
velle cotisation en date du 23 juillet 1973. La
nouvelle Loi de l'impôt sur le revenu, entrée en
vigueur le ler janvier 1972, comporte un article
essentiellement semblable à l'article 8(3), à savoir
l'article 15(3), ainsi rédigé:
Toute somme versée à intervalle périodique, annuel ou autre,
par une corporation qui réside au Canada à un contribuable au
titre d'une obligation à intérêt conditionnel est réputée avoir été
payée par la corporation et reçue par le contribuable à titre de
dividende sur une action du capital-actions de la corporation,
sauf si la corporation a le droit de déduire la somme ainsi
versée lors du calcul de son revenu.
L'article 15(4) est ainsi rédigé:
Toute somme versée à intervalle périodique, annuel ou autre,
à un contribuable par une corporation ne résidant pas au
Canada, au titre d'une obligation à intérêt conditionnel, est
réputée avoir été reçue par le contribuable à titre de dividende
à moins que la somme ainsi versée n'ait été, en vertu des lois du
pays où la corporation résidait, déductible lors du calcul de la
somme, pour l'année, sur laquelle la corporation était tenue de
payer un impôt sur le revenu ou sur les bénéfices établi par le
gouvernement de ce pays.
Il convient d'observer qu'en vertu de ces modifica
tions, le Canadien Pacifique ne peut plus réclamer
comme dividende l'intérêt reçu sur ces obligations
à intérêt conditionnel. A la suite de l'entrée en
vigueur de la nouvelle Loi, il a été publié le 16 juin
1972 un nouveau bulletin d'interprétation, le bulle
tin IT-52, qui remplace le bulletin IT-10 et indique
notamment:
En vertu de l'ancienne loi, qu'une telle somme soit considérée
comme étant un dividende, ne dépendait pas du fait qu'elle était
déductible lors du calcul du revenu, dans le pays étranger. Il
fallait déterminer plutôt, si la corporation non résidante pouvait
bénéficier d'une déduction en vertu de l'ancien alinéa 12(1)f),
lorsqu'elle avait été assujetti à l'impôt au Canada. A moins que
le montant ne fût déductible dans ces conditions, il était réputé
être un dividende entre les mains du bénéficiaire.
Traitant de la portée des bulletins d'interpréta-
tion, mon collègue le juge Cattanach a déclaré
dans l'arrêt Stickel c. M.R.N. 5 , à la page 684:
En premier lieu, le Bulletin d'information n° 41 est précisé-
ment ce qu'indique son titre, c'est-à-dire un bulletin d'informa-
tion publié par le sous-ministre du Revenu national. Le sous-
ministre n'a pas le pouvoir de légiférer dans les domaines qui
lui sont confiés. En réalité, ce bulletin d'information n'est rien
de plus que l'interprétation que fait le Ministre de l'article VIII
A de la Convention, publiée à des fins administratives.
En réponse à l'argument fondé sur les bulletins
d'interprétation, l'avocat de la défenderesse a sim-
plement déclaré qu'il n'y souscrit pas et les consi-
dère comme erronés. Il ne fait aucun doute que
c'est la Cour qui doit interpréter la Loi, et non des
décisions administratives, de sorte qu'en l'espèce
on ne peut opposer à la défenderesse une fin de
non-recevoir lorsqu'elle refuse d'appliquer ces bul
letins d'interprétation.
Selon la demanderesse, et puisqu'il a fallu modi
fier la Loi afin que ces versements ne soient plus
considérés comme des dividendes quand c'est une
corporation non résidanteui les a versés et les a
déduits de son impôt aux Etats-Unis, il en ressort
qu'antérieurement à ces modifications, la Loi ne
pouvait s'interpréter comme aujourd'hui. Pour
réfuter cet argument, l'avocat de la défenderesse
invoque la Loi d'interprétation 6 , article 37(2),(3)
et (4), ainsi rédigé:
37. (2) La modification d'un texte législatif n'est censée ni
être ni impliquer une déclaration portant que le droit aux
termes dudit texte différait de ce qu'est le droit aux termes du
texte législatif modifié, ou que le Parlement ou autre corps ou
personne, ayant édicté le texte législatif le considérait comme
différent de ce qu'est le droit aux termes du texte législatif
modifié.
(3) L'abrogation ou la modification, totale ou partielle, d'un
texte législatif n'est censée ni être ni impliquer une déclaration
quelconque sur l'état antérieur du droit.
(4) La réadoption, la révision, la codification ou la modifica
tion d'un texte législatif n'est censée ni être ni impliquer une
adoption de l'interprétation qui, par décision judiciaire ou
autrement, a été donnée aux termes employés dans ledit texte
ou à des termes analogues.
Autrement dit, il n'est pas permis d'interpréter une
loi à laquelle s'applique la Loi d'interprétation par
rapport à une Loi postérieure, à moins que cette
dernière ne précise la façon d'interpréter l'an-
5 [1972] C.F. 672.
6 S.R.C. 1970, c. I-23.
cienne Loi (Voir Home Oil Company Limited c.
M.R.N. [1954] R.C.É. 622, à la page 627).
Par conséquent, et bien que le Ministre ne soit
aucunement lié par la façon dont il a permis de
considérer au cours des années d'imposition précé-
dentes, conformément à l'article 8(3), les sommes
qu'a reçues la demanderesse à titre d'intérêt sur
ces obligations à intérêt conditionnel, non plus que
par les bulletins d'interprétation qu'a publiés le
ministère pour confirmer que c'était la façon dont
il convenait de traiter ces recettes, et bien qu'on ne
puisse tirer aucune conclusion des modifications
contenues dans la nouvelle Loi de l'impôt sur le
revenu, lesquelles changent la rédaction de l'article
8(3) et (4) de façon à supprimer l'échappatoire
grâce auquel la Soo Line, qui n'est pas une contri-
buable au Canada, a pu déduire dans le calcul de
son revenu imposable aux États-Unis ces verse-
ments d'intérêt alors que de son côté, le Canadien
Pacifique pouvait, en vertu des articles 8(3) et
28(1)d), déduire ces recettes de son revenu impo-
sable, il n'en reste pas moins que tous ces argu
ments prêtent quelque crédit à la conclusion déjà
atteinte, à savoir que la demanderesse est fondée à
effectuer ces déductions, sans égard aux consé-
quences qui peuvent sembler contraires à l'esprit
de la Loi. Voir à ce sujet l'arrêt Le Roi c. Con
solidated Lithographing Manufacturing Com
pany, Limited' dans lequel le juge Hughes cite en
y souscrivant la déclaration de lord Cairns dans
l'arrêt Partington c. Le procureur général (1869)
L.R. 4 H.L. 100, à la page 122:
[TRADUCTION] Je ne suis pas du tout sûr que dans une
affaire de cette nature, c'est-à-dire une affaire fiscale, la forme
ne suffise pas amplement. Car j'estime que le principe de toute
législation fiscale est le suivant: lorsque la lettre de la loi
indique que la personne que l'on veut imposer entre dans son
champ d'application, elle doit l'être, si rigoureux que cela
puisse sembler à un esprit juridique. D'un autre côté, si la
Couronne, cherchant à percevoir l'impôt, ne parvient pas à
placer le sujet dans la lettre de la loi fiscale, celui-ci est
exonéré, même si par ailleurs l'affaire semble clairement en
accord avec l'esprit de la loi.
DÉGRÈVEMENT POUR IMPÔT ÉTRANGER
Puisque j'ai conclu que la demanderesse pouvait
considérer comme dividendes les versements reçus
à titre d'intérêt des obligations à intérêt condition-
nel, il n'est peut-être pas nécessaire d'étudier ce
second moyen de la demanderesse, qui de toute
7 [1943] R.C.S. 298 à la page 302.
façon ne s'applique qu'à l'année d'imposition 1965,
mais comme les deux parties en ont discuté lon-
guement et qu'il est possible que mes conclusions
sur le premier point soient infirmées en appel, il est
préférable de traiter de ce moyen.
Le témoin John Clough, contrôleur financier du
Canadien Pacifique, a déposé sur la signification
des redevances «journalières», disant qu'elles sont
les loyers que verse une compagnie de chemin de
fer à une autre pour l'utilisation de son matériel,
particulièrement des wagons de marchandises sur
des lignes à l'étranger. Ces accords sont conclus
sous le contrôle de l'Interstate Commerce Com
mission. Le Canadien Pacifique a certaines de ses
propres lignes dans les États du Maine et du
Vermont, de sorte qu'il ne saurait être question de
redevances «journalières» lorsque ses wagons sont
sur ces lignes. Cependant, lors du transport de
marchandises du Canada aux États-Unis, par
exemple, les frais tarifaires sont partagés selon les
distances parcourues entre les divers chemins de
fer sur les voies desquels les wagons circulent. Le
Canadien Pacifique ne perçoit pas de fret lorsque
ses wagons empruntent des lignes à l'étranger. Il
reçoit cependant une redevance «journalière» basée
sur l'âge et le modèle des wagons et sur d'autres
facteurs, particulièrement la durée pendant
laquelle les wagons restent sur chacune de ces
autres lignes. Naturellement, en Amérique du
Nord, les wagons passent souvent d'une ligne de
chemin de fer à une autre et les rapports relatifs
au trafic sont ensuite réunis aux fins de règlement.
Le Canadien Pacifique a également aux États-
Unis quelques bureaux des ventes marchandises,
destinés à promouvoir au Canada le transport des
marchandises sur ses lignes, de même que pour
exploiter les lignes qu'il possède dans le Maine et
le Vermont; elle est donc propriétaire aux États-
Unis d'un établissement assujetti à l'impôt de ce
pays, mais le témoin a déclaré que cela n'a rien à
voir avec les redevances «journalières» que versent
directement à la compagnie au Canada les divers
chemins de fer qui les doivent. Les redevances
«journalières» sont censées être égales aux dépenses
qu'engage le propriétaire pour l'entretien des
wagons; elles n'ont pas pour objet de réaliser un
bénéfice. Les recettes sont portées au crédit du
compte de location de matériel. Le total des rede-
vances «journalières» est crédité au compte des
revenus et le total des dépenses qu'occasionne l'en-
tretien des wagons y est débité, le but recherché
étant de solder ces comptes. Cependant, à la suite
d'enquêtes de l'Interstate Commerce Commission,
les chemins de fer sont censés réaliser des bénéfi-
ces à concurrence de 4% des recettes «journalières»
brutes, ce montant étant imposable à titre de
revenu. En 1966 et 1967, la perte qu'a subie le
Canadien Pacifique sur ses activités dans le Maine
et le Vermont a excédé le revenu résultant des
redevances «journalières». Tel n'a pas été le cas en
1965, où la compagnie a versé $260,866 d'impôt
sur le revenu au Trésor américain, dont $255,225
concernaient des redevances «journalières».
Le 19 mai 1971, le ministère des Finances de
Washington a fait savoir à l'avocat du Canadien
Pacifique que [TRADUCTION] «le fisc (Internal
Revenue Service) nous a informés de sa décision
de considérer que les versements en litige en l'es-
pèce de redevances `journalières' (versements pro-
venant des transporteurs américains, pour l'utilisa-
tion de wagons de chemin de fer aux États-Unis)
constituent pour le Canadien Pacifique un revenu
de loyers tel que le définit l'alinéa 6a) du Protocole
de la Convention relative à l'impôt entre les États-
Unis et le Canada, et ne doivent pas être considé-
rées comme des bénéfices industriels et commer-
ciaux au sens de l'article II de cette Convention.
Cependant, le Service a en outre conclu que ce
revenu est effectivement lié à la conduite du com
merce ou de l'entreprise du Canadien Pacifique
aux États-Unis. Nous ne voyons pas pour quelle
raison le ministère des Finances s'opposerait à ces
conclusions. Par suite, et tant que les États-Unis
imposeront ces versements, l'impôt portera sur les
revenus nets et non sur les revenus bruts.»
La compagnie n'ayant pas porté appel de la
décision selon laquelle le revenu en question est
«effectivement lié», elle a pu se dispenser du paie-
ment de l'impôt aux États-Unis pendant les années
d'imposition 1966 et 1967. La demanderesse pré-
tend que le ministère des Finances américain a
justement interprété la nature de ces recettes et
que les redevances «journalières» constituent le
loyer pour l'utilisation de ses wagons de
marchandises.
Il semble que l'on puisse interpréter de façon
assez large l'expression «loyers et redevances» telle
que la définit l'article 6a) du Protocole de la
Convention. Certaines difficultés d'interprétation
se posent du fait que le revenu net tiré de loyers est
normalement considéré comme un «bénéfice indus-
triel et commercial» mais, en vertu de l'article II
(précité), les loyers sont écartés de cette classifica
tion. La demanderesse prétend que puisque son
entreprise ne consiste pas à louer ses wagons de
marchandises, le revenu tiré des loyers ne peut être
considéré comme un revenu provenant d'un com
merce, même au sens commercial habituel. Ledit
article II prévoit que de tels chefs de revenu
(c.-à-d. les loyers) «seront taxés séparément ou
avec les bénéfices industriels et commerciaux».
Conformément à la décision du ministère des
Finances américain, ces chefs de revenu ont été
considérés comme étant des revenus locatifs et ils
ont été imposés avec les bénéfices industriels et
commerciaux du Canadien Pacifique provenant de
l'exploitation de ses lignes dans le Maine et le
Vermont.
On a longuement discuté de l'acception accordée
au mot «loyer», employée à l'article 6a) du Proto-
cole de la Convention (précité). Il est exact que les
règlements portant sur le paiement par les compa-
gnies de chemins de fer du loyer de wagons appar-
tenant à d'autres compagnies de chemin de fer,
durant la période où ils se trouvent sur leurs voies,
sont dépourvus de certains des éléments que l'on
trouve dans les baux ordinaires, en ce sens qu'au-
cune durée du bail n'est fixée et que la compagnie
propriétaire des wagons ne peut y mettre unilaté-
ralement fin tant que la compagnie locataire
acquitte ses versements, basés sur un taux quoti-
dien vérifiable, ou tant qu'elle respecte par ailleurs
les stipulations relatives à la durée pendant
laquelle elle les conserve et à l'utilisation qu'elle en
fait, conformément à des règlements qui ne nous
intéressent pas ici. Ces versements sont le prix de
l'utilisation des wagons, dont la durée dépend sur-
tout de la volonté de l'utilisateur. Même si les prix
fixés ne visent pas à réaliser un bénéfice, rien
n'empêche de considérer les sommes reçues comme
des loyers, puisque le bénéfice n'est pas un élément
essentiel du contrat de location. En vertu de l'arti-
cle 106(1)d)(iii)(B) de la Loi de l'impôt sur le
revenu n'était pas assujetti à la retenue fiscale de
15% prélevée au Canada sur les paiements faits à
des non-résidents à l'égard «du loyer, de la rede-
vance ou d'un semblable paiement»
... un paiement relatif à l'emploi, par une compagnie de
chemins de fer, de matériel roulant selon la définition qu'en
donne l'alinéa (25) de l'article 2 de la Loi sur les chemins de
fer;
Ce qui précède se rapporte à des paiements de
redevances «journalières» versés à- des chemins de
fer américains pour l'utilisation de leurs wagons au
Canada.
Je ne pense toutefois pas que cet article régisse
l'interprétation des termes «loyers et redevances»
figurant à l'article 6a) du Protocole de la Conven
tion relative à l'impôt. De plus, l'imposition du
revenu du Canadien Pacifique tiré de redevances
«journalières» aux États-Unis n'était pas fondée
sur une retenue fiscale uniforme de 15% sur les
redevances «journalières» mais était basée sur la
marge bénéficiaire, de 4% qu'on leur attribuait et
que l'on considérait comme un revenu «effective-
ment lié à» l'exploitation de l'entreprise du Cana-
dien Pacifique aux États-Unis. Dans l'arrêt United
Geophysical Company of Canada c. M.R.N. 8 , le
juge Thurlow, maintenant juge en chef adjoint,
interprétant l'article 106(1)d) dans une affaire qui
ne portait pas sur des redevances «journalières» de
location de wagons de chemin de fer, a déclaré:
[TRADUCTION] Il me semble par conséquent que l'article
106(1)d) comprend tout paiement comparable à un loyer, mais
qui doit être effectué à l'égard de biens mobiliers. En outre,
dans son acception courante, à la différence de son sens pure-
ment juridique, le terme «loyer», outre qu'il s'applique à des
bénéfices de cette nature tirés de biens immobiliers, est assez
large pour comprendre un versement relatif à la location de
biens meubles. Ainsi, le Shorter Oxford Dictionary donne
comme l'un des sens du mot loyer [TRADUCTION] «La somme
payée pour l'utilisation de machines, etc., pendant un certain
temps.» Dans cette définition, la somme n'a que deux caracté-
ristiques, à savoir qu'elle concerne l'utilisation de machines,
etc., et qu'elle est versée pour cette utilisation pendant un
certain temps.
La durée est certes incertaine en l'espèce, mais je
ne pense pas que cette différence est assez impor-
tante pour amener à conclure que l'on ne peut
considérer les redevances «journalières» comme un
loyer, puisque la durée d'utilisation de chaque
wagon peut être et est calculée de façon à détermi-
ner la somme due.
En décidant s'il faut accorder ce dégrèvement
pour impôt, nous devons interpréter les clauses de
la Convention et du Protocole eux-mêmes, et non
celles de la Loi de l'impôt sur le revenu. Les
8 [1961] R.C.É. 283 à la page 295.
parties conviennent que les clauses d'un traité ont
le pas sur une Loi et qu'il faut les interpréter de
façon plus libérale. L'arrêt Saunders c. M.R.N. 9
exprime bien ce principe; R.S.W. Fordham, c.r.,
président de la Commission d'appel de l'impôt, a
déclaré à la page 402:
[TRADUCTION] Il semble que le principe reconnu est qu'une
loi fiscale doit être interprétée d'une façon très stricte; en
l'appliquant à la Couronne ou à la personne que l'on veut
imposer—dans la mesure où l'on peut découvrir l'intention du
législateur. Cependant en matière de convention fiscale, la
situation est différente et l'usage exige, par courtoisie interna-
tionale, une interprétation plus libérale. Les conventions fisca-
les sont destinées principalement non pas à aggraver mais à
alléger la charge fiscale du contribuable en lui évitant la double
imposition. Ce motif figure dans le préambule de la Conven
tion. En conséquence, il n'est pas opportun d'aller au-delà du
texte de la Convention et du Protocole, quand on essaye de
s'assurer de la signification exacte d'une phrase ou d'un terme
donnés qui y sont employés.
En l'espèce, le Canadien Pacifique a dû verser au
fisc américain un impôt sur le revenu d'un mon-
tant de $255,225 pour l'imposition 1965 sur ces
redevances «journalières», au motif qu'il s'agissait
d'un loyer effectivement lié à son établissement
stable aux États-Unis. Il a convenu au paragraphe
9 de la Partie II de l'exposé conjoint des faits que
[TRADUCTION] «le revenu provenant des redevan-
ces journalières faisait partie du revenu du Cana-
dien Pacifique aux fins de l'impôt sur le revenu du
Canada et, au cours de l'année d'imposition 1965,
le Canada a imposé ces recettes pour une somme
au moins égale à celle qu'a prélevée le Trésor
américain». Par conséquent, si le dégrèvement
n'est pas accordé, cette somme sera frappée d'une
double imposition, ce qui est contraire à l'esprit de
la Convention relative à l'impôt. L'argument de la
défenderesse revient en réalité à prétendre que les
autorités fiscales américaines se sont trompées
dans leur interprétation et qu'elles auraient dû
considérer ces recettes comme des bénéfices indus-
triels et commerciaux au sens de l'article I de la
Convention et par conséquent non imposables aux
États-Unis, puisque lesdits bénéfices n'étaient pas
«imputables» à son établissement stable dans ce
pays. (Voir paragraphe 8 de l'exposé conjoint des
faits (précité).)
Il est vrai que cette cour est en droit d'interpré-
ter elle-même la Convention relative à l'impôt
entre le Canada et les États- Unis et le Protocole
9 (1954) 11 Tax A.B.C. 399.
et n'est aucunement liée par l'interprétation que
leur accorde le ministère des Finances américain,
mais il serait malheureux qu'ils soient interprétés
de façon différente dans les deux pays, si cela
devait conduire à une double imposition. Par con-
séquent, et à moins qu'on ne puisse conclure que
l'interprétation accordée aux Etats-Unis est mani-
festement erronée, il n'est pas souhaitable de par-
venir à une conclusion différente et je ne vois
aucune raison m'obligeant à le faire. Bien qu'il soit
très possible que les loyers journaliers ne soient pas
à proprement parler «imputables» à l'établissement
stable du Canadien Pacifique aux États-Unis, on
ne trouve pas ce qualificatif dans la décision du
ministère des Finances américain, qui emploie au
contraire les termes «effectivement lié» pour
asseoir l'impôt, termes qui ne figurent pas à la
Convention. Afin d'obtenir gain de cause, la défen-
deresse doit convaincre la Cour que ces recettes
étaient des «bénéfices industriels et commerciaux»
au sens de l'article I et non des loyers. Bien que
celles-ci possèdent certains aspects des deux,
comme on l'a déjà dit, le Canadien Pacifique n'a
rien fait pour pousser ou développer cette source
de revenu, ce à quoi on reconnaît habituellement
une entreprise commerciale ou industrielle. Au
contraire, il aimerait qu'on lui rende ses wagons
plus rapidement et le taux des redevances «journa-
lières» n'est pas fixé à un taux de nature à engen-
drer des bénéfices, même si aux fins de l'impôt les
redevances sont censées produire un bénéfice net
de 4% sur le revenu brut ainsi perçu.
Je conclus donc qu'il n'existe aucune raison
m'obligeant à ne pas souscrire à la façon dont le
ministère des Finances américain a considéré cette
source de revenu et, dans l'éventualité où, en vertu
de l'article 8(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu,
la demanderesse ne serait pas autorisée à compren-
dre comme dividende la somme de $841,871
perçue en 1965 à titre d'intérêt sur les obligations
à intérêt conditionnel, elle devrait subsidiairement
être autorisée à réclamer un dégrèvement pour
impôt étranger de $260,866, ce qui comprend la
somme de $255,225 provenant de redevances
«journalières» gagnées aux États-Unis en vertu des
dispositions de la Convention relative à l'impôt
entre le Canada et les États-Unis et du Protocole
annexé à celle-ci.
En raison de cette conclusion, il n'est pas néces-
saire de traiter de l'argument subsidiaire qu'a sou-
levé la demanderesse et auquel a donné naissance
l'article 3f) du Protocole qui, en définissant l'ex-
pression «établissement stable», ajoute «l'utilisation
d'une quantité considérable de matériel ou de
machinerie dans l'un des États contractants, pen
dant toute partie d'une année d'imposition quel-
conque, par une entreprise de l'autre État contrac-
tant, constituera pour cette entreprise un
établissement stable dans le premier État pendant
ladite année d'imposition.» En vertu de ce qui
précède, la demanderesse fait valoir que même si
les revenus tirés des redevances «journalières» ne
devaient pas être considérés comme étant «effecti-
vement liés» à son établissement stable aux États-
Unis, le simple fait qu'on y utilise ses wagons suffit
en lui-même à constituer un établissement stable.
La défenderesse conteste cet argument en décla-
rant que l'utilisation que font les chemins de fer
américains de wagons de marchandises du Cana-
dien Pacifique aux États-Unis n'équivaut pas à
l'utilisation de ce matériel par le Canadien Pacifi-
que lui-même, parce que cette dernière compagnie
n'utilise pas ledit matériel une fois qu'il passe sur
la ligne d'un autre chemin de fer, et même le fret
provenant des marchandises transportées sur cel-
les-ci n'est attribué au Canadien Pacifique qu'en
proportion de la distance sur laquelle ces marchan-
dises sont transportées sur ses propres lignes. Par
conséquent, bien que je partage l'opinion de la
défenderesse sur ce point et que j'aie conclu que la
simple utilisation des wagons de marchandises que
font aux États-Unis d'autres chemins de fer ne
constitue pas en soi pour le Canadien Pacifique un
établissement stable dans ce pays au sens du para-
graphe 3f), cette conclusion ne modifie pas la
conclusion principale déjà tirée relativement au
droit de la demanderesse, le Canadien Pacifique,
de réclamer au besoin ce dégrèvement d'impôt
étranger au cours de l'année d'imposition 1965.
RÉCLAMATIONS RELATIVES AUX DÉDUCTIONS
POUR AMORTISSEMENT
Le témoin John Clough, contrôleur du Canadien
Pacifique, a longuement déposé relativement aux
exemples particuliers dont les parties ont convenu
de se servir dans l'étude des diverses catégories de
demandes de déduction pour amortissement, con-
formément à l'exposé conjoint des faits. Comme il
y est indiqué, il existe trois catégories, la première
étant subdivisée en sous-catégories. La catégorie I
comprend des débours qu'engage la demanderesse
pour exécuter certains travaux sur ses biens, à la
demande d'une autre partie, cette dernière partici
pant aux frais; la première sous-catégorie com-
prend les cas où c'est un gouvernement, une muni-
cipalité ou une autre administration publique qui a
effectué le versement, alors que la seconde sous-
catégorie traite des cas où c'est une autre corpora
tion ou un particulier qui l'a effectué. La catégorie
II concerne des demandes de déduction pour amor-
tissement sur remise à la demanderesse de parties
constituantes sujettes à détérioration de voies de
garage particulières, lorsque c'est la partie pour
qui elles avaient été construites et qui avait
acquitté le coût des matériaux et de la main-d'oeu-
vre au moment de la construction qui les restitue.
La catégorie III traite de réclamations pour amé-
liorations qu'apporte à des biens loués la demande-
resse, et dont la propriété lui a été dévolue en 1956
par une Loi du Parlement.
Catégorie I(a)
Traitant tout d'abord de la sous-catégorie I(a),
poste 2, le témoin a expliqué que ce poste provient
du déplacement, en 1957, de certaines lignes télé-
graphiques du Canadien Pacifique en Nouvelle-
Ecosse, à la demande du gouvernement et à la
suite de la construction de la digue Canso. On a dû
détourner ces lignes et quelques-unes ont été fixées
à des poteaux appartenant au Canadien National
et à la Maritime Telegraph Company. Ce travail,
qu'ont exécuté entièrement les employés du Cana-
dien Pacifique et pour lequel celui-ci à été rem-
boursé, a coûté $28,100. Sur cette somme, $8,690
ont été affectés à l'annulation de la réserve pour
dépréciation de ces lignes, le reste, soit $19,410,
étant porté à ce qu'on nomme le compte des Dons
et octrois, ainsi que l'exige la classification uni-
forme des comptes de la Commission canadienne
des transports, ou la Commission des transports du
Canada, comme on l'appelait à l'époque. Ces clas
sifications sont soumises à l'examen des vérifica-
teurs internes et externes de la compagnie et des
vérificateurs sur place de la Commission cana-
dienne des transports. En ce qui concerne ce poste
ainsi que tous ceux des trois catégories, la somme
qu'a reçue la demanderesse n'était pas supérieure
à celle qu'elle avait déboursée pour exécuter le
travail sur les biens, de sorte qu'il n'a produit
aucun revenu ni bénéfice net. (Voir article 15.1 de
l'exposé conjoint des faits précité.) Les poteaux
auxquels les nouvelles lignes ont été attachées
n'ont pas nécessairement été érigés sur les proprié-
tés du Canadien Pacifique, mais lorsque ces lignes
ont été fixées à des poteaux du Canadien National,
les traverses et les fils appartenaient cependant au
Canadien Pacifique, et il en allait de même dans le
cas de lignes attachées à des poteaux de la Mari
time Telegraph. L'imputation de la somme de
$8,690 l'annulation de la réserve pour déprécia-
tion relative aux lignes ainsi déplacées est con-
forme au troisième paragraphe de l'article 7(B) de
la classification uniforme des comptes que cite
l'article 10.1 de l'exposé conjoint des faits
(précité).
Traitant du poste 4, le témoin a expliqué qu'il
s'agissait d'une conversion effectuée à la demande
de l'Hydro-Ontario en 1958, à la suite du passage
de l'énergie électrique de 25 périodes à 60 pério-
des. Le coût total s'est chiffré à $35,500, dont
l'Hydro-Ontario a convenu de payer 40%, soit
$14,200. Cela comportait le coût d'un nouveau
redresseur dont le capital a été amorti sur une
période de 5 ans. Un cinquième en a été débité en
1958, soit $7,100, la part de l'Hydro, qui s'élevait
à 40% soit $2,840, étant portée au compte des
Dons et octrois. Les documents indiquent qu'il
s'agissait là du quatrième de cinq versements éche-
lonnés traités de cette façon. Il semble qu'on n'ait
pas rejeté les quatre autres versements échelonnés
à titre de coût en capital, trois de ceux-ci ayant été
apparemment faits au cours d'années précédentes,
car l'un des documents déposé à titre de pièce
porte une note selon laquelle aucune précision n'a
été demandée au sujet de la cinquième quote-part
acquittée en 1959. Comme c'est le cas pour tous
les postes des trois catégories, aucun rejet n'a eu
lieu avant l'année d'imposition 1965. Ce travail
représentait en fait des améliorations apportées au
Grand River Railway, qui a été loué au Canadien
Pacifique.
Le poste 15 se rapporte à des déplacements
considérables de lignes qu'avait nécessités la cons
truction de la Voie maritime du Saint-Laurent et
qui ont occasionné des dépenses totales de $2,200,-
000. Cependant, la seule somme rejetée est celle de
$314,852, portée au compte de Dons et octrois en
1961, et qui représentait la valeur de certains
travaux exécutés sur l'Ontario and Quebec Rail
way et sur l'Atlantic and Northwest Railway,
qu'exploitait tous deux le Canadien Pacifique en
vertu d'un bail à vie. C'est l'Administration de la
Voie maritime du Saint-Laurent qui a payé ces
travaux. Ici encore, ce n'est pas le Canadien Paci-
fique, satisfait de leur emplacement primitif, qui a
demandé le déplacement des lignes, mais celui-ci a
été nécessité par la construction de la Voie mari
time. Dans l'arrêt M.R.N. c. Massawippi Valley
Railway Company 10 le juge Dumoulin a eu l'occa-
sion d'étudier les baux à vie de l'Ontario and
Quebec Railway et du Quebec Central Railways
au Canadien Pacifique à la lumière des disposi
tions du Code civil de la province de Québec, dont
les parties avaient convenu qu'il s'appliquait à ces
baux emphytéotiques; le juge Dumoulin a conclu
qu'à toutes fins utiles, les compagnies bailleresses
n'étaient guère plus que des raisons sociales et
qu'en fait le locataire, c'est-à-dire le Canadien
Pacifique, assumait toutes leurs obligations.
Catégorie I(b)
En ce qui concerne maintenant les subventions
de corporations privées, les postes 10.1 et 21.1 se
rapportent tous deux à des subventions de l'Alber-
ta Mining Corporation pour la construction d'un
embranchement destiné à desservir un complexe
industriel. La dépense de capital s'est élevée à
$100,000 environ et c'est en réalité 1'Athabaska
Valley Development Corporation, à laquelle l'Al-
berta Mining Corporation a transféré ses droits
dans la convention qu'elle a conclue avec le Cana-
dien Pacifique, qui a effectué les versements. Les
sommes rejetées se sont élevées à $24,793 en 1960
et à $15,949 en 1962. Le Canadien Pacifique était
propriétaire de la voie et n'en partageait pas la
propriété avec l'Alberta Mining Corporation ni
avec l'Athabaska, bien qu'une partie de la voie
traversât des terrains de l'Alberta Mining
Corporation.
Le poste 9 concernait le remaniement, l'allonge-
ment et le déplacement de certains fils de cuivre, à
la demande de la compagnie Bell Telephone en
1959, de façon à assurer des services téléphoniques
entre White Fish Falls et Little Current. Le coût
en a été de $29,000, dont $8,100 étaient un coût en
10 [1961] R.C.É. 191.
capital, et la compagnie Bell Telephone a participé
pour la somme de $4,000 ainsi que pour un loyer
annuel de $1,520 pendant au moins cinq ans. Le
poste de $4,000, porté au compte de Dons et
octrois, a été rejeté.
Les postes 28 et 38.1 concernent le remplace-
ment d'un quai de chargement en deux nouveaux
endroits en 1963 et en 1964, le déplacement d'un
pont-grue et le remaniement de voies de triage à la
demande de l'United Grain Growers, afin de per-
mettre la construction d'un nouvel élévateur à
grains. Le coût total en a été de $14,000, dont
$9,329 ont été finalement portés au compte de
Dons et octrois.
Le poste 44 se rapporte à des octrois semblables
de la Federal Grain Company durant l'année d'im-
position 1965, pour couvrir le coût estimatif de
$4,800 du remaniement d'un ensemble de voies
ferrées et de l'extension de voies de garage pour
permettre la construction d'un élévateur à grains.
Le montant de la contribution portée au compte de
Dons et octrois et rejetée, s'est élevé à $2,141.
Catégorie II
Le poste 50 a été choisi comme cas-type de
conventions relatives à des voies de garage particu-
lières. Le témoin Clough a expliqué que lorsqu'un
client fait des démarches auprès d'une compagnie
de chemin de fer dans le but de construire une voie
de garage, celle-ci fournit à ses propres frais tous
les matériaux non sujets à détérioration, comme
les voies pour lesquelles le locataire paie un loyer.
De plus, le locataire paie ce que l'on considère être
des articles susceptibles de se détériorer, et qui
comprennent les traverses, le remblai, le gravier,
ainsi que le travail que nécessite leur mise en
place. Lorsque la voie de garage n'est plus utile, la
compagnie de chemin de fer peut l'enlever et en
récupérer ce qu'elle veut, l'ex-locataire étant fac-
turé des frais ainsi occasionnés. Dans de rares cas,
le chemin de fer préfère garder la voie de garage
pour son usage personnel. Lorsque la convention
relative à la voie de garage est résiliée, le chemin
de fer inscrit les matériaux sujets à détérioration
comme actif immobilisé, en créditant en même
temps le compte de Dons et octrois. Dans l'exem-
ple choisi, la somme en cause était de $2,851 pour
l'année ayant pris fin le 31 décembre 1966,
moment où la main-d'oeuvre et les matériaux sus-
ceptibles de détérioration sont revenus au Cana-
dien Pacifique sur résiliation de la convention rela
tive à la voie de garage particulière. Une partie de
la voie se trouve bien entendu sur des terrains
appartenant au locataire, mais le bail prévoit net-
tement qu'à la fin de celui-ci, le chemin de fer peut
enlever ces matériaux de toute partie de la voie de
garage située à l'extérieur de sa propriété ou sur
celle de l'autre partie.
Catégorie III
Le poste 65 a été choisi comme cas-type de la
troisième catégorie, traitant d'améliorations appor-
tées à des biens loués. Selon les S.C. 1956, c. 55,
dont la proclamation fixait au 18 octobre 1956
l'entrée en vigueur, le Canadien Pacifique a été
mis en possession de l'actif de ces chemins de fer
précédemment loués et une écriture a été portée
dans ses livres pour transférer ces améliorations du
compte Dons et octrois, lignes louées, à celui des
Dons et octrois, lignes en propriété. Cette opéra-
tion comptable a été faite conformément aux dis
positions de la classification uniforme des comptes
et la somme rejetée, qui était censée représenter
des plus values entre 1955 et 1956, s'élève à $107,-
639. Le Canadien Pacifique a fait remarquer qu'il
ne réclame que les améliorations qu'il a faites aux
biens qui avaient été antérieurement loués et non
la valeur des biens dans leur état initial, ces amé-
liorations étant la propriété du Canadien Pacifique
avant aussi bien qu'après la mise en possession.
J'ai exposé les faits ci-dessus, présentés en
preuve et relatifs aux exemples dont ont traité les
parties dans chacune des trois catégories, avant de
conclure si ces additions apportées à l'assiette du
coût en capital de la demanderesse auraient dû ou
non être admises pour les années d'imposition en
question, dans l'une ou l'autre des catégories, puis-
que la majorité des arguments et de la jurispru
dence qu'ont présentés et cités les parties sur cette
question s'applique à l'une ou à plusieurs de ces
catégories.
Au cours des débats, on a parlé de deux autres
articles de la Loi de l'impôt sur le revenu, qu'il
convient de citer ici:
84A. (1) Nonobstant le paragraphe (3) de l'article 84, lors-
que des biens de la nature suivante, savoir:
a) des voies ferrées ou des remblais de voies ferrées, ou
b) un passage, tel que le définit le paragraphe (9) de l'article
265 de la Loi sur les chemins de fer,
ont, avant 1956, été acquis par un contribuable, ces biens, aux
fins de l'article 20 et des règlements établis sous le régime de
l'alinéa a) du paragraphe (1) de l'article 11, sont réputés avoir
été acquis à un coût en capital égal au montant qui, selon les
livres du contribuable, était leur valeur à la fin de 1955.
(2) Aux fins du présent article, dans la détermination du
montant qui, selon les livres du contribuable, était la valeur de
biens à la fin de 1955, aucun montant ne doit être inclus à
l'égard de biens qui étaient alors loués de toute autre personne.
et l'article 20(6)h), ainsi rédigé:
20. (6) Pour l'exécution du présent article et des règlements
établis selon l'alinéa a) du paragraphe (1) de l'article 11, les
règles suivantes s'appliquent:
h) lorsqu'un contribuable a reçu ou a droit de recevoir d'un
gouvernement, d'une municipalité ou d'une autre autorité
publique, à l'égard ou en vue de l'acquisition de biens, un
octroi, une subvention ou une autre aide autre qu'un montant
dont le paiement est autorisé en vertu d'une Loi de subsides
et selon les modalités et les conditions approuvées par le
conseil du Trésor aux fins de faire progresser les possibilités
techniques de l'industrie manufacturière ou autre du
Canada, le coût en capital desdits biens est censé être le
montant que ces biens ont coûté en capital au contribuable
moins le montant de l'octroi, de la subvention ou autre aide;
Comme le fait remarquer l'avocat de la défende-
resse, le fait que ces postes aient été inscrits
comme il convient, conformément à la classifica
tion uniforme des comptes qu'exigent l'article 328
de la Loi sur les chemins de fer" et les règlements
de la Commission canadienne des transports ne lie
pas le ministre du Revenu national en ce qui
concerne l'imposition de ceux-ci, à moins que la
dépense pour laquelle il est réclamé une déduction
pour amortissement ne puisse tomber strictement
sous le coup des dispositions de l'article 84A(3)
(précité). La demanderesse prétend cependant que
même si on ne peut réclamer ces postes en vertu de
l'article 84A(3), ils peuvent encore tomber sous le
coup de l'article 11(1)a), qui traite des coûts en
capital que tout contribuable peut déduire. Cepen-
dant, je ne pense pas qu'en l'espèce, cette distinc
tion soit importante.
L'avocat de la défenderesse émet l'idée que ces
dépenses n'ont pas toutes été engagées pour «la
réparation, le remplacement, la modification ou la
rénovation de biens du contribuable susceptibles de
dépréciation» selon les termes dudit article. Je ne
puis souscrire à cet argument. Sans compter le fait
�� S.R.C. 1970, c. R-2.
que le mot «remplacement» figure dans quelques-
unes des conventions, ces termes me semblent
avoir une portée assez large pour englober les
déplacements effectués dans les cas-types étudiés.
Quelques doutes sont permis à l'égard de la caté-
gorie II, qui traite de la capitalisation au compte
Dons et octrois des matériaux sujets à détériora-
tion et du prix de la main-d'oeuvre nécessaire à la
construction de voies de garage particulières lors-
que celles-ci ont été remises à la demanderesse
pour son usage exclusif, mais l'enlèvement d'une
voie de garage est certainement analogue à son
remplacement ou à sa modification. En ce qui
concerne les autres catégories, le déplacement
équivaut sûrement au remplacement ou à la
modification.
Les deux parties conviennent que le mot
«réputé», figurant à l'article 84A(3)b) signifie dans
le présent contexte [TRADUCTION] «présumé d'une
manière concluante». L'avocat de la défenderesse a
soulevé en ce qui concerne le poste 15 de la
catégorie I un argument subsidiaire selon lequel,
puisque tous les travaux exécutés relativement à la
déviation et à la modification des voies et autres
ouvrages, nécessités par la canalisation du Saint-
Laurent, n'ont pas été exécutés par les soins du
Canadien Pacifique, quelques-uns ayant été réali-
sés par l'Administration de la Voie maritime du
Saint-Laurent pour le compte de celui-ci, une dis
tinction s'impose car tous ces travaux ne consti
tuent pas «une dépense supportée par un contri-
buable». Puisque la convention prévoit que
l'Administration de la Voie maritime se chargera
dans tous les cas de toutes les dépenses nécessaires
pour rétablir les installations ferroviaires modifiées
de sorte qu'elles soient essentiellement équivalentes
aux installations existantes et puisque la conven
tion a simplement prévu, lorsqu'il est plus expé-
dient d'agir ainsi, que le chemin de fer pouvait
exécuter une partie des travaux et les facturer à
l'Administration de la Voie maritime, cette der-
nière devant se charger elle-même des autres tra-
vaux, il semble que ce serait ne pas tenir compte
des réalités commerciales de la situation que de
faire une distinction fondée sur la rédaction précise
de l'article 84A(3). A ce sujet, je renvoie à la
décision qu'a rendue le président Jackett, mainte-
nant juge en chef, dans l'affaire Ottawa Valley
Power Company c. M.R.N. 12 , dans laquelle il
déclare aux pages 76-77:
12 [1969] 2 R.C.É. 64.
[TRADUCTION] La question suivante est de savoir si, admet-
tant que j'aie raison de conclure que l'appelante aurait pu
prétendre à la déduction pour amortissement si elle avait reçu
l'argent de l'Hydro et l'avait dépensé elle-même en additions et
améliorations immobilisées, sa situation se trouve modifiée
parce que le marché s'est présenté sous la forme d'un engage
ment de la part de l'Hydro de faire les dépenses de façon que
ces additions et améliorations soient apportées à l'actif de
l'appelante et lui appartiennent.
Au point de vue commercial, le marché effectivement conclu
et celui que l'on aurait pu conclure (selon lequel l'appelante
aurait pu prétendre au coût en capital) revient au même. Il faut
déterminer si, du point de vue fiscal, le résultat dépend de la
façon dont on s'y est pris pour y arriver. Il m'est très difficile de
parvenir à une conclusion sur cette question, compliquée par
l'existence d'un contrat de fourniture qui doit rester en vigueur
pendant une période modifiée en fonction d'un transfert d'actif
devant être utilisé comme actif immobilisé dans l'entreprise du
fournisseur.
En l'espèce, aucun contrat de fourniture entre le
Canadien Pacifique et l'Administration de la Voie
maritime du Saint-Laurent ne vient compliquer la
situation. Par conséquent, je ne ferai aucune dis
tinction fondée sur la question de savoir qui a
réellement fait le travail ou engagé la dépense
initiale, puisque dans tous les cas en cause, les
installations reconstruites sont devenues la pro-
priété du Canadien Pacifique, l'Administration de
la Voie maritime en supportant le coût.
Bien qu'on n'ait pas débattu la question devant
moi, je me suis demandé s'il faut interpréter le
terme «dépense» qu'emploie l'article 84A(3)
comme signifiant «dépense nette», de façon à
déduire de toute dépense semblable les sommes
qu'ont reçues des tiers à titre de contribution, mais
j'ai conclu qu'on ne peut le faire valablement,
même si cela réglait le problème et aboutissait à
un résultat plus équitable du point de vue du
ministre du Revenu national, car si l'on s'en tient à
la stricte rédaction de l'article 84A(3) et à l'appli-
cation de l'article 7(B) de la classification uni-
forme des comptes (précitée), les sommes reçues
ne sont pas portées au revenu ni imposées en
conséquence, mais (sauf dans la mesure où elles
sont affectées à réduire ou à annuler les sommes
déjà portées au compte de dépréciation) inscrites
au compte de Dons et octrois et font partie de
l'avoir des actionnaires. Rien ne donne à penser en
l'espèce qu'il faille traiter différemment les contri
butions et il ne semble pas approprié, par une
simple interprétation du mot «dépense» figurant à
l'article 84A(3), de les déduire de la somme qu'a
réellement dépensée le contribuable ou q'ii l'a été
en son nom pour la réparation, le remplacement, la
modification ou la rénovation des biens amortissa-
bles qu'il faut ajouter à son coût initial aux fins de
déduction pour amortissement en vertu de l'article
84A(3)b). On a cité la décision qu'a rendue le juge
Cameron dans l'affaire Okalta Oils Limited c.
M.R.N 13 , où il a déclaré à la page 72:
[TRADUCTION] Bien que l'on puisse peut-être dire que d'une
certaine façon l'appelante a «supporté» le coût en devenant
responsable et en payant le prix de la main-d'oeuvre et des
matériaux, à la lumière de ce qui s'est produit on ne peut dire
qu'elle a subi une perte ni qu'elle y a été de sa poche relative-
ment à l'opération en cause. Je trouve impossible d'interpréter
ce paragraphe de façon à permettre à une corporation qui n'y
va pas de ses propres deniers relativement à une opération, mais
au contraire a fait payer toutes ses dépenses par une autre
partie—en l'occurrence une corporation de la Couronne—
d'être remboursée de ces dépenses sur des impôts qui autrement
reviendraient à la Couronne. Une telle interprétation signifie-
rait que la Loi entendait non seulement indemniser le contri-
buable de telles pertes, mais aussi lui accorder une indemnité
d'un montant égal; je ne crois pas que le législateur ait eu cette
intention.
Cependant, la demanderesse fait une distinction
avec l'arrêt précité au motif qu'il traitait de l'arti-
cle 8(6) de la Loi de l'impôt de guerre sur le
revenu, dont le but était de promouvoir la recher-
che pétrolière en permettant à un contribuable qui
avait supporté le coût du forage d'un puits de
pétrole qui s'était révélé stérile de recouvrer ses
dépenses au moyen de déductions d'impôt, ce qui
est une toute autre affaire que celle qui nous
occupe.
L'avocat de la défenderesse a de plus prétendu
que si l'argument portant sur le coût net est inac-
ceptable, il faut alors étudier l'article 20(6)h), au
moins en ce qui concerne les postes de la catégorie
I(a). La question qui se pose est de savoir si le
Canadien Pacifique a reçu ou était fondé à rece-
voir «d'un gouvernement, d'une municipalité ou
d'une autre autorité publique, à l'égard ou en vue
de l'acquisition de biens, un octroi, une subvention
ou une autre aide... aux fins de faire progresser
les possibilités techniques de l'industrie manufac-
turière ou autre du Canada.» Bien qu'on n'ait pas
soulevé la question devant moi, je doute fort que
les sommes que le Canadien Pacifique a reçues des
autorités publiques pour le déplacement de voies
ferrées ou de lignes de télécommunications avaient
pour objet «de faire progresser les possibilités tech -
13 [1955] R.C.É. 66.
niques», puisque dans chaque cas la preuve a indi-
qué qu'il était satisfait de l'endroit où se trouvaient
les lignes et ne les a déplacées que pour obliger
l'autorité publique en question. Quoiqu'il en soit,
je n'estime pas que ces versements puissent être
considérés comme «un octroi, une subvention ou
une autre aide». De nombreuses décisions traitent
de cet article. Dans l'arrêt G.T.E. Sylvania
Canada Limited c. La Reine'", mon collègue le
juge Cattanach déclare à la page 736:
Si l'on se reporte à nouveau aux définitions des mots «octroi»
et «subvention» dans les dictionnaires, on y remarque un point
commun, le fait qu'il s'agisse d'un don ou d'une remise d'argent
provenant de fonds publics et alloué par le gouvernement ou les
autorités publiques à un particulier ou à une entreprise privée à
des fins réputées profitables au public. Quelques subtilités
mises à part, il semble donc que, selon les définitions des
dictionnaires, les termes «octroi» et «subvention» soient presque
synonymes.
Après quoi il applique la doctrine d'interprétation
«ejusdem generis» et conclut aux pages 736-737:
Il est manifeste que l'expression générique «ou autre aide» ne
peut être que subordonnée aux termes «octroi» et «subvention».
A mon avis, il est logique que des termes subordonnés à
d'autres, ne soient pas interprétés de manière à supprimer toute
signification aux termes spécifiques qui les précèdent.
Comme je l'ai déjà déclaré, le trait constant et dominant des
termes «octroi» et «subvention» est qu'ils évoquent une aide
pécuniaire provenant de fonds publics, accordée à une personne
par un gouvernement dans l'intérêt du public. Il faut qu'un tel
don soit concret et tangible. Pour les raisons que je viens
d'exposer, il faut interpréter l'expression «ou autre aide» à la
lumière des autres mots.
Cette décision a été confirmée en appel 15 , quoique
le juge en chef Jackett ait pris soin de déclarer
dans un renvoi au bas de la page 214 qu'il ne se
prononce pas sur la partie des motifs fondés sur
l'application du principe «ejusdem generis». Dans
l'arrêt Ottawa Valley Power Company c. M.R.N.
(précité), le président Jackett, aujourd'hui juge en
chef, a déclaré aux pages 71-72:
[TRADUCTION] Je ne pense pas que les mots utilisés à l'alinéa
h)—aun octroi, une subvention ou une autre aide ... d'une
autorité publique»—puissent s'appliquer à une entente commer-
ciale ordinaire conclue entre les deux parties à l'entente pour
des raisons commerciales. Si la législature se servait de l'Hy-
dro-Ontario pour réaliser quelque projet d'ordre législatif visant
à accorder des octrois pour encourager les hommes d'affaires à
14 [1974] 1 C.F. 726.
15 [1974] 2 C.F. 212.
se lancer dans certains types d'entreprises, il me serait alors
aisé d'appliquer l'alinéa h) aux octrois en cause. Ici, cependant,
me semble-t-il, la législature a simplement autorisé l'Hydro-
Ontario à accomplir certaines choses jugées favorables à la
réussite de certains changements dans ses méthodes d'exploita-
tion; ce que l'Hydro-Ontario fut ainsi autorisé à accomplir était
de même nature que ce que d'autres personnes exploitant une
entreprise semblable et obligées de faire des changements simi-
laires pourraient juger utile de faire. Je ne peux considérer ce
qui est fait dans de telles circonstances comme étant «une aide»
accordée par une autorité publique en tant qu'autorité publi-
que. A mon avis, l'article 20(6)h) ne s'applique pas aux circons-
tances de cette espèce.
Voir aussi l'arrêt St. John Dry Dock and Ship
building Co. Ltd. c. M.R.N. 16 , dans lequel le juge
Thorson déclare à la page 193:
[TRADUCTION] Le fait qu'un montant soit présenté comme
une subvention gouvernementale ne détermine pas en soi sa
nature aux fins d'imposition, à l'égard des bénéficiaires. Dans
chaque cas, il faut déterminer la nature véritable de la subven-
tion et, ce faisant, on peut à bon droit considérer le but dans
lequel elle a été accordée.
En l'espèce, bien que le déplacement des voies
ou des lignes de télécommunications ait été fait
pour permettre l'exécution de travaux ayant peut-
être le bien public pour objet, on ne peut dire que
l'argent qu'a reçu la demanderesse des autorités
gouvernementales pour l'indemniser du coût de ces
travaux est un octroi ou une subvention destiné à
l'inciter à entreprendre un ouvrage qui en lui-
même était pour le bien public. Je conclus que
l'article 29(6)h) ne s'applique pas en l'espèce.
Une partie du raisonnement qu'a appliqué le
juge en chef Jackett dans l'arrêt Ottawa Valley
Power présente de l'intérêt pour la conclusion à
tirer en l'espèce, mais il ne faut pas oublier que
cette affaire ne traite pas de l'article 84A(3) et de
plus qu'elle se compliquait de certains contrats qui
faisaient partie du prix, facteur qu'on ne retrouve
pas en l'espèce. A la page 74, il déclare:
[TRADUCTION] L'intimé insiste vivement sur le fait qu'une
analyse de la situation de l'appelante avant et après la commu
tation démontre que les additions et améliorations apportées à
son usine et qui ont rendu possible la production de courant
électrique en 60 périodes au lieu de 25 périodes ne lui ont
absolument rien coûté. L'intimé aurait pu ajouter que cette
opinion est étayée par la classification qu'attribue l'appelante à
cette acquisition dans ses propres livres. J'ai peine à ne pas
souscrire à la logique ou à la justesse de la prétention de
l'intimé. La commutation n'a pas exigé de l'appelante la moin-
dre dépense d'immobilisation.
16 [1944] R.C.É. 186.
Le juge en chef Jackett étudie ensuite l'effet
qu'aurait pu cependant avoir le contrat de fourni-
tures, si ce point avait été soulevé, faisant remar-
quer que si l'Hydro-Ontario avait payé cette
somme à l'appelante pour que soit apportée au
contrat de fournitures la modification souhaitée
celle-ci, l'Ottawa Valley Power, aurait alors sup
porté le coût en capital des additions et améliora-
tions, bien que l'Hydro l'ait en fait remboursée, et
elle aurait pu prétendre à la déduction pour amor-
tissement relativement au coût en capital ainsi
supporté. En arrivant à cette conclusion, il suit la
décision rendue dans l'affaire Corporation of Bir-
mingham c. Barnes 17 , sur laquelle la demanderesse
s'appuie également en l'espèce; dans cette affaire,
la corporation appelante avait conclu avec la com-
pagnie une entente visant à poser une voie de
tramway jusqu'à son chantier, moyennant quoi la
corporation a reçu une somme spécifiée ainsi qu'un
octroi de l'Unemployment Grants Committee pour
des sommes qu'elle avait dépensées pour le renou-
vellement de ses voies de tramway. Il a été statué
qu'il ne fallait pas tenir compte du paiement qu'a-
vait effectué la compagnie ni de l'octroi qu'avait
accordé l'Unemployment Grants Committee pour
établir le «coût réel» pour la corporation des voies
de tramway en question, aux fins du calcul de la
déduction pour l'usure de ces voies, c.-à-d. de la
dépréciation. A la page 217 de son jugement, lord
Atkin déclare:
[TRADUCTION] Il me semble que ce qu'un homme paie pour la
construction ou l'achat d'un ouvrage est ce qu'il lui coûte; et
cela, qu'on lui ait donné les fonds nécessaires à la construction
ou à l'achat ou qu'on l'ait assuré de lui remettre ceux-ci après
qu'il aura réglé les travaux ou encore, qu'une fois le travail
exécuté, on lui ait promis ou donné les fonds pour le dédomma-
ger de ses débours.
Cet arrêt va dans le même sens que ma décision
de ne pas interpréter le terme «dépense», figurant à
l'article 84A(3), au sens de «dépense nette».
Pour parvenir à sa conclusion, le juge en chef
Jackett a établi, dans un renvoi en bas de page [à
la page 76], une distinction avec l'arrêt américain
Detroit Edison Co. c. Commissioner of Internal
Revenue 18, qui exprime une conclusion contraire,
déclarant que cette dernière semble s'être fondée
sur le fait que les paiements reçus n'ont pas été
compris dans les recettes et concluant que [TRA -
17 (1935) 19 T.C. 195.
18 (1942) 319 US 98.
DUCTION] «si les paiements avaient été compris
dans les recettes, il semble que la Cour serait
peut-être arrivée à un résultat opposé». En l'espèce,
les sommes reçues n'ont bien entendu pas été
comprises dans les recettes non plus, par suite des
exigences de la classification uniforme des comp-
tes. Dans l'arrêt Detroit Edison, il est déclaré à la
page 102:
[TRADUCTION] Nous sommes d'avis que la disposition statu-
taire selon laquelle «l'assiette des biens est le coût de ces biens»
signifie habituellement le coût pour le contribuable et en l'es-
pèce le Commissioner a eu raison de lui attribuer cette
acception.
et on lit à la page 103:
[TRADUCTION] Mais il ne s'ensuit pas qu'il faille permettre
à la compagnie de récupérer à partir de l'accumulation de
l'amortissement non imposé une mise de fonds qu'elle a refusé
de faire. Le Commissioner a eu raison de rajuster l'assiette de
l'amortissement de façon à représenter la mise de fonds nette
du contribuable.
Cela serait conforme au raisonnement suivi dans
l'arrêt Okalta (précité), mais il est douteux qu'on
puisse l'appliquer à l'interprétation de l'article
84A(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu. On y
étudiait l'expression «le coût de ces biens», dans
l'arrêt Birmingham les mots «coût réel» étaient en
cause, alors qu'à l'article 84A(3)b) nous devons
examiner les termes «dépense» et «coût en capital».
J'aurais pensé que les termes «coût réel», dans le
contexte de l'arrêt Birmingham, auraient eu un
sens plus étroit que les mots employés dans la Loi
de l'impôt sur le revenu ou la Loi américaine; et
qu'ils auraient fourni des motifs plus sérieux, en
matière de dégrèvements réclamés relativement à
ce «coût réel», pour prendre en considération tout
octroi ou paiement reçu, mais nonobstant ces con-
sidérations, il en a été décidé autrement.
Pour résumer, donc, j'ai constaté (1) qu'il ne
faut faire aucune distinction entre les postes clas-
sés dans la catégorie I(a) et la catégorie I(b) et (2)
que la demanderesse, dans ses déclarations d'im-
pôt, a traité comme il convenait tous ces postes,
ainsi que ceux classés à la catégorie II, puisqu'on
peut réclamer des déductions pour amortissement
sur les sommes portées au compte de Dons et
octrois, en dépit de l'apport financier d'un gouver-
nement, d'une compagnie ou de particuliers pour
déplacer ou reconstruire les installations en ques
tion. Reste à étudier la catégorie III, traitant des
améliorations apportées à des biens autrefois loués
en vertu de baux emphytéotiques à long terme,
mais appartenant à la demanderesse depuis 1956.
Ces améliorations qu'a apportées le Canadien
Pacifique dans tout le Canada lorsque ces lignes
lui étaient louées, chacune d'entre elles en vertu de
baux à long terme, et avant qu'il n'en devienne
propriétaire en 1956, sont passées la même année
du compte intitulé Dons et octrois, lignes louées au
compte de Dons et octrois, lignes en propriété.
Comme je l'ai déjà dit, le juge Dumoulin, traitant
de deux cas semblables dans la province de
Québec, dans l'arrêt M.R.N. c. Massawippi Valley
Railway Company (précité), a conclu que puisqu'il
s'agissait de baux emphytéotiques, les obligations
du locateur étaient en réalité celles du locataire, en
l'occurrence le Canadien Pacifique; et que bien
qu'il fût question d'intérêts reçus sur des obliga
tions et non d'améliorations qu'avait apportées le
Canadien Pacifique à certains biens, il semble que
le même raisonnement puisse s'appliquer en l'es-
pèce. On n'a pas débattu devant moi la question de
savoir si le même raisonnement serait valable dans
le cas de baux à long terme de lignes de chemin de
fer situées ailleurs au Canada, et je ne pense pas
avoir à exprimer une opinion sur cette question
pour la trancher. La défenderesse s'appuie sur les
dispositions de l'article 84a(1) et (2) qui indiquent
que nonobstant l'article 84A(3), lorsque le contri-
buable a acquis des biens avant 1956, ceux-ci sont
réputés avoir été acquis à un coût en capital égal,
selon les livres du contribuable, à leur valeur à la
fin de 1955 et qu'à cette fin, aucune somme ne doit
être inscrite à l'égard de biens qui étaient alors
loués de toute autre personne. Puisque le Canadien
Pacifique n'est devenu propriétaire de ces biens
qu'en 1956, on ne peut dire qu'il les a acquis avant
1956. L'article 84A(1) ne s'applique par consé-
quent pas, mais l'article 84A(2) doit se rapporter
non seulement à l'article 84A(1), mais à l'article
84A dans son ensemble, puisqu'il emploie les
termes «aux fins du présent article» et non «aux
fins du paragraphe (1)». A la fin de 1955, les biens
étaient des biens loués et par conséquent, en vertu
du paragraphe (2), «aucun montant ne doit être
inclus à l'égard de biens qui étaient alors loués de
toute autre personne.»
La demanderesse prétend faire une distinction
entre les réclamations du coût en capital portant
sur la valeur des biens loués ainsi acquis et la
réclamation actuelle qui se limite uniquement au
coût en capital qu'elle réclame pour des améliora-
tions qu'elle a apportées aux biens loués pendant la
durée du bail et qu'elle prétend avoir toujours été
fondée à réclamer, tout comme si ces améliorations
avaient été faites à ses propres biens. A mon avis,
la rédaction même de l'article 84A(2) est plus
importante que l'argument que l'on peut soulever
relativement aux conséquences juridiques de baux
à long terme et à leurs répercussions sur la façon
dont le preneur considère le coût en capital des
améliorations apportées à ces biens. L'article
84A(2) déclare catégoriquement qu'«aucun mon-
tant ne doit être inclus.» Il semble que ce soit assez
large pour viser non seulement des sommes résul-
tant du coût en capital de biens inscrits dans les
livres de l'ancien propriétaire, mais aussi toutes
sommes s'y rapportant, portées aux livres du
Canadien Pacifique pour des améliorations qu'il a
faites auxdits biens loués. L'appel de la demande-
resse sur ce point est par conséquent rejeté.
Pour résumer, j'ai conclu comme suit sur les
différents points soulevés:
1. La demanderesse est fondée à considérer
comme revenu provenant de dividendes l'intérêt
reçu sur des obligations à intérêt conditionnel,
conformément à l'article 8(3) de la Loi de l'impôt
sur le revenu et peut par conséquent prétendre à la
déduction de $404,893 réclamée pour son année
d'imposition 1965, celle de $388,930 réclamée
pour son année d'imposition 1966 et à celle de
$383,912 réclamée pour son année d'imposition
1967.
2. Subsidiairement, et au cas où cette déduction
serait rejetée, la demanderesse est fondée à récla-
mer un dégrèvement pour impôt étranger s'élevant
à $260,866 pour son année d'imposition 1965.
3. La demanderesse est fondée à des déductions
pour amortissement sur des sommes portées à son
compte de Dons et octrois, que les parties en cause
ont classées dans les catégories I(a), I(b) et II,
mais elle ne peut bénéficier de ces déductions sur
les sommes classées dans la catégorie III.
La nouvelle cotisation de la demanderesse pour
chacune des années 1965, 1966 et 1967 est ren-
voyée au Ministre aux fins de nouvelle cotisation
conforme aux présents motifs, avec dépens en
faveur de la demanderesse.
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