Arthur G. Roberts & Richard Britton-Foster,
Exécuteurs de la succession d'Elizabeth Ann
Roberts (Appelants)
c.
Le ministre du Revenu national (Intime)
Division de première instance, le juge Heald—
Toronto, les 14 et 15 septembre; Ottawa, le 29
septembre 1971.
Impôt sur les biens transmis par décès—Transfert de biens
en fiducie â une compagnie—Actions de la compagnie don-
nées en paiement—Émission subséquente d'actions supplé-
mentaires par la compagnie—Valeur des actions dépendant
de la succession—S'agit-il d'«une disposition ayant l'effet
d'une donation immédiate entre vifs»—Loi de l'impôt sur les
biens transmis par décès, 1958, c. 29 [maintenant S.R.C.
1970, c. E-9], art. 3(1)c).
Mme R est décédée le 5 septembre 1966. Le 31 août 1966,
elle a, conformément à un projet de règlement de sa succes
sion, transféré des valeurs estimées à $324,484 à la compa-
gnie Lillooet (corporation privée constituée par lettres
patentes sous le régime du Corporations Act de l'Ontario)
moyennant 200 actions ordinaires sans valeur au pair de
cette compagnie et, le même jour, elle a remis ces actions à
son mari et à son frère en fiducie au bénéfice de ses
enfants. Le 31 août 1966, les trois administrateurs de la
compagnie Lillooet (le mari de Mme R, le frère de celle-ci et
l'épouse de ce dernier) ont approuvé des résolutions (1)
autorisant l'émission de 200 actions à MTe R, (2) autorisant
le transfert de ces actions de Mme R aux fiduciaires au
bénéfice de ses enfants et (3) permettant aux actionnaires
de la compagnie de souscrire 9 actions ordinaires à 10 cents
l'action pour chaque action déjà détenue. Les actions leur
ont été dûment réparties.
Les lettres patentes de la compagnie Lillooet autorisaient
l'émission de 2,000 actions ordinaires sans valeur au pair,
mais prévoyaient (comme le permet l'art. 26(4) du Corpora
tions Act de l'Ontario) qu'elles ne seraient pas émises pour
une considération excédant $2,000, sauf après paiement à
l'Ontario des droits acquittables sur un montant plus élevé
et après l'émission par le Secrétaire provincial du certificat
attestant un tel paiement. Un accord que MTe R a signé le
31 août 1966, et qui faisait partie du projet de règlement de
ladite succession, prévoyait expressément que la compagnie
Lillooet prendrait les mesures nécessaires pour permettre
l'émission des actions ordinaires de la compagnie pour une
considération égale au prix d'achat des valeurs de Mme R, et
que ces actions seraient émises à son nom immédiatement
après la réception du certificat de paiement des droits
supplémentaires requis. Pour favoriser la réalisation de cet
objectif, les administrateurs de la compagnie ont, le 31 août
1966, adopté une résolution faisant passer la considération
maximum des 2,000 actions ordinaires autorisées de la
compagnie à $350,000. Le ler septembre 1966, le Secrétaire
provincial a reçu une copie de la résolution ainsi qu'un
chèque destiné à acquitter les droits supplémentaires. Il n'a
cependant envoyé le certificat de paiement que le 16 sep-
tembre 1966.
Arrêt: le paiement des droits supplémentaires et l'émis-
sion d'un certificat de paiement constituaient aux termes
des lettres patentes et de l'art. 26(4) du Corporations Act de
l'Ontario les conditions préalables à l'émission d'actions
ordinaires pour un montant plus élevé, et il était évident à la
lecture de l'accord signé par M me R que les actions qu'elle
devait recevoir ne pouvaient être légalement émises à une
date plus ancienne que celle à laquelle le Secrétaire provin
cial a envoyé le certificat de paiement des droits supplémen-
taires, c'est-à-dire le 16 septembre 1966. En conséquence,
les actions n'ont pas été émises avant le 5 septembre, date
du décès de Mme R, et étaient donc imposables à titre de
biens de sa succession. Les décisions Oakfield Develop
ments (Toronto) Ltd. c. M.R.N. [1969] 2 R.C.É. 149 et
Deltona Corp. c. M.R.N. [1971] D.T.C. 5186, s'appliquent
en l'espèce.
En outre, la série d'opérations qui a permis le transfert
des valeurs de Mme R aux fiduciaires au bénéfice de ses
enfants constituait «une disposition ayant l'effet d'une
donation immédiate entre vifs» au sens de l'art. 3(1)c) de la
Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès et, en
conséquence, les valeurs étaient imposables puisqu'elles
faisaient partie de la succession. Le fond plus que la forme
prévaut dans les affaires fiscales. Les décisions West Hill c.
M.R.N. [1969] 2 R.C.É. 441; M.R.N. c. Cox [1971] D.T.C.
5150, sont citées; l'arrêt Le procureur général c. Oldham
[1940] 1 B.R. 599, confirmé par [1940] 2 B.R. 485 est
distingué.
APPEL en matière d'impôt sur les biens
transmis par décès.
W. D. Goodman, c.r., et F. Cappell pour les
appelants.
G. W. Ainslie, c.r., et I. H. Pitfield pour
l'intimé.
LE JUGE HEALD—Le présent appel porte sur
une cotisation établie à l'encontre de la succes
sion d'Elizabeth Ann Roberts, d'après laquelle
un impôt sur les biens transmis par décès, s'éle-
vant à $36,341.07, a été réclamé aux appelants
en leur qualité d'exécuteurs de ladite
succession.
A la date de son décès, le 5 septembre 1966,
la défunte était la femme d'Arthur G. Roberts,
l'un des appelants en l'espèce. L'autre appelant
était le frère de la défunte. La défunte avait
quarante-deux ans au moment de son décès.
L'appelant Roberts et elle-même étaient les
parents de quatre enfants dont l'âge allait de
huit à quatorze ans au moment du décès de leur
mère. M me Roberts avait joui d'une bonne santé
jusqu'en février 1966 environ. Elle est entrée à
l'hôpital en avril 1966 et, à cette époque, ses
médecins ont conclu qu'elle était la victime
d'une maladie fatale. Il n'y a eu aucune preuve
selon laquelle cette maladie aurait eu une quel-
conque influence sur ses capacités intellectuel-
les ou sur son aptitude à comprendre et à signer
des documents et des accords, de sorte que sa
capacité juridique de signer les documents
qu'elle a en fait signés peu avant son décès n'est
pas en cause.
Le 27 mai 1966, la défunte a signé une procu-
ration générale en faveur de son frère, Richard
Britton-Foster, et de l'épouse de ce dernier,
Liselotte Britton-Foster. Je n'ai pas de preuve
d'une éventuelle révocation de cette procura-
tion avant son décès le 5 septembre 1966. L'ap-
pelant Roberts et la défunte se sont séparés en
septembre 1965, époque à laquelle l'appelant
Roberts a quitté le foyer conjugal où vivaient sa
femme et ses enfants. M. Roberts est retourné
vivre avec sa femme et ses enfants en juillet
1966, ce qu'il a continué de faire jusqu'au décès
de sa femme.
La défunte possédait en propre des biens
importants. Son mari, Arthur G. Roberts, a
déclaré qu'elle possédait un portefeuille de
valeurs de placement d'une valeur marchande
de $324,484 à la date du décès. Les deux partis
admettent cette valeur. M me Roberts était égale-
ment la propriétaire du foyer conjugal, d'une
cabine de ski ainsi que d'autres biens divers.
Le présent appel ne concerne que le susdit
portefeuille de valeurs.
M. Roberts a déclaré qu'au cours des semai-
nes ayant précédé immédiatement le décès, il
avait eu de nombreuses conversations avec sa
femme et que beaucoup de leurs entretiens
tournaient autour de l'avenir des enfants et de
la façon dont l'usage ,des biens de M me Roberts
pourrait le mieux profiter aux enfants. A la
suite de ces conversations et entretiens, il fut
décidé de consulter M. W. D. Goodman, c.r.,
avocat de Toronto. En conséquence, M.
Roberts a consulté une première fois M. Good-
man le 30 août 1966, lequel a recommandé
l'adoption d'un programme et d'une ligne de
conduite particuliers à propos du portefeuille de
M me Roberts. Dans l'après-midi du 31 août
1966, M. et M me Roberts ont, chez eux, discuté
en détail la proposition de M. Goodman. Le 31
août 1966, au soir, M. Goodman est venu chez
les Roberts au 55 Castle Frank Road à Toronto
et a expliqué à M. et Mme Roberts les différentes
dispositions et procédures qu'impliquait le plan
proposé. Les Roberts ont décidé d'accepter les
conseils de M. Goodman et de suivre le pro
gramme qu'il avait proposé. En conséquence,
au cours de cet entretien, Mme Roberts a signé
une lettre d'instructions à son frère, Richard
Britton-Foster, laquelle lettre a été admise en
preuve, pièce P.2. Dans cette lettre, Mme
Roberts a averti son frère qu'elle avait l'inten-
tion de vendre son portefeuille de valeurs à une
compagnie connue sous le nom de Lillooet
Investments Limited (ci-après désignée la Lil-
looet) moyennant 200 actions ordinaires sans
valeur au pair du capital social de cette compa-
gnie, ce qui représentait toutes les actions
émises par cette compagnie à cette époque, et
qu'elle souhaitait donner lesdites actions à son
frère et à son mari en leur qualité de fiduciaires
de la fiducie de la famille d'Elizabeth Ann
Roberts. La lettre prescrivait en outre à son
frère d'utiliser la procuration qu'elle lui avait
donnée pour signer en son nom tous les docu
ments éventuellement nécessaires pour accom-
plir ladite vente de ses valeurs à la Lillooet et
pour effectuer le transfert desdites 200 actions
de la Lillooet à son frère et à son mari en leur
qualité de fiduciaires de la fiducie de la famille
d'Elizabeth Ann Roberts.
Au cours du même entretien, le soir du 31
août 1966, chez les Roberts, Mme Roberts a
également signé l'accord daté du 31 août 1966
et conclu entre la Lillooet et elle-même relatif à
la vente à la Lillooet de son portefeuille de
valeurs (de tout premier ordre) et d'obligations,
qui s'élevait à $324,484 moyennant les 200
actions ordinaires sans valeur au pair de cette
compagnie (ledit accord a été admis en preuve,
pièce P.3). Mme Roberts a également signé ladite
fiducie de la famille d'Elizabeth Ann Roberts,
datée du 31 août 1966, lors de la même réunion
avec M. Goodman, le soir du 31 août 1966. Ce
document a été admis en preuve, pièce P.4. Il
s'agit d'un document très long. En quelques
mots, son objet consistait à mettre les 200
actions de la Lillooet sous les noms d'Arthur
George Roberts (le mari) et de Richard Britton-
Foster (le frère), qui détiendraient certaines
fiducies au bénéfice des enfants Roberts et de
leur descendance.
La preuve apportée par M. Roberts au procès
consistait en ce que les pièces P.2, P.3 et P.4
ont été signées par son épouse lors de l'entre-
tien avec M. Goodman, le soir du 31 août 1966,
à leur domicile, au 55 Castle Frank Road. Cette
preuve n'est contredite par aucune autre et est
conforme aux réponses qu'il a données lors de
l'interrogatoire préalable. Je considère donc
comme un fait établi qu'Elizabeth Ann Roberts
a approuvé et signé les pièces P.2, P.3 et P.4 au
cours de la soirée du 31 août 1966, au 55 Castle
Frank Road à Toronto. Toutefois, une impor-
tante documentation ultérieure, qui fait partie
intégrante de ce programme (que, pour plus de
commodité, je désignerai sous le nom de plan
Goodman) se trouve principalement dans la
pièce P.5, soit aux pages numérotées de 1 à 36;
il s'agit de résolutions et de procès-verbaux
émanant des actionnaires et des administrateurs
de la Lillooet. Les dates de signature de ces
résolutions et de ces procès-verbaux ne sont
pas établies de façon tellement claire et sont
contestées. Pour l'instant, je me référerai à ces
procès-verbaux en prenant la date qui y figure,
mais par la suite j'en dirai davantage en ce qui
concerne les dates réelles de leur signature.
La Lillooet Investments Limited a reçu sa
charte que le Secrétaire provincial de l'Ontario
a, en bonne et due forme, délivrée par lettres
patentes le 6 mai 1966, en vertu des pouvoirs
que lui accorde le Corporations Act de l'Onta-
rio, S.R.O. 1970, c. 89. Le capital social auto-
risé de la compagnie se composait de: 2,000
actions ordinaires sans valeur au pair, la charte
prévoyant une considération maximum de
$2,000, 2,000 actions privilégiées de classe A
d'une valeur au pair de $1.00 chacune, 34,000
actions privilégiées sans droit de vote de classe
B, d'une valeur au pair de $1.00 chacune, 2,000
actions privilégiées sans droit de vote de classe
C, d'une valeur au pair de $1.00 chacune. On
n'a fourni aucune preuve de transactions pour
ce qui est des actions privilégiées. Toutes les
transactions d'actions en cause sont donc des
transactions relatives aux actions ordinaires
sans valeur au pair. Herbert A. Abramson, Sol
Shulman et Allen Karp, fondateurs de la com-
pagnie, étaient tous avocats à Toronto et mem-
bres du cabinet de M. Goodman à cette épo-
que-là. Après la constitution en corporation, on
a pris les mesures suivantes que la lecture de la
pièce P.5 révèle. Je les ai placées dans l'ordre
chronologique suivant lequel elles figurent à la
pièce P.5.
Première mesure. Transfert d'une seule
action par chacun des fondateurs, à l'appelant
Roberts, à l'appelant Britton-Foster et à Mme
Britton-Foster, les trois cessionnaires en ques
tion étant nommés administrateurs de la compa-
gnie, l'appelant Roberts président et l'appelant
Britton-Foster secrétaire-trésorier. Le procès-
verbal attestant cette mesure porte la date du 6
mai 1966.
Deuxième mesure. Les administrateurs de la
compagnie ont approuvé une résolution pré-
voyant une augmentation de $2,000 à $350,000
de la considération maximum relative à l'émis-
sion des 2,000 actions ordinaires et ils ont en
outre décidé de prendre les mesures nécessaires
pour acquitter le droit concernant ce montant
plus élevé et de demander au Secrétaire provin
cial d'émettre un certificat attestant le paiement
de ce droit. Le procès-verbal attestant cette
mesure porte la date du 6 mai 1966.
Troisième mesure. Les trois actionnaires,
soit l'appelant Roberts, l'appelant Britton-Fos
ter et M me Britton-Foster, ont signé chacun une
déclaration de fiducie selon laquelle ils décla-
rent détenir chacun une action de la Lillooet en
fiducie pour Elizabeth Ann Roberts. Ces décla-
rations de fiducie portent chacune la date du 31
août 1966.
Quatrième mesure. Les administrateurs de la
compagnie ont approuvé une résolution autori-
sant l'achat du portefeuille de valeurs de la
défunte, estimé à $324,484, moyennant l'émis-
sion et la répartition de 200 actions ordinaires
de la compagnie et ont habilité le président et le
secrétaire-trésorier à passer l'acte au nom de la
compagnie. Il s'agit de l'acte de vente admis en
preuve comme pièce P.3. Cette résolution porte
la date du 31 août 1966.
Cinquième mesure. Les administrateurs de la
compagnie ont approuvé une résolution pré-
voyant l'émission et la répartition de 197
actions ordinaires nouvelles de la compagnie au
profit d'Elizabeth Ann Roberts et ont également
fixé la considération de ces émission et réparti-
tion à $324,481. Cette résolution porte la date
du 31 août 1966.
Sixième mesure. Elizabeth Ann Roberts a
transféré par voie de donation aux appelants
Roberts et Britton-Foster en leur qualité de
fiduciaires de la fiducie de la famille d'Elizabeth
Ann Roberts les 197 actions ordinaires en ques
tion de la Lillooet. Ce transfert porte la date du
31 août 1966.
Septième mesure. Cette mesure consiste en
une déclaration de fiducie distincte faite respec-
tivement par MM. Roberts et Britton-Foster et
par Mme Britton-Foster aux termes de laquelle
chacun d'entre eux a déclaré détenir une action
ordinaire de la Lillooet en fiducie au bénéfice
des appelants Roberts et Britton-Foster en leur
qualité de fiduciaires de la fiducie de la famille
d'Elizabeth Ann Roberts. Les déclarations de
fiducie constituant la septième mesure portent
la date du 31 août 1966.
Huitième mesure. Les administrateurs de la
compagnie ont approuvé une résolution qui con-
férait à chaque actionnaire existant le droit de
souscrire et de se faire émettre neuf actions
ordinaires à dix cents l'action pour chaque
action ordinaire qu'il détenait à l'époque. On a
ainsi émis et réparti 1,800 actions ordinaires au
prix de dix cents l'action au profit des appelants
Roberts et Britton-Foster en leur qualité de
fiduciaires de la fiducie de la famille d'Elizabeth
Ann Roberts. Ces émission et répartition repo-
saient sur l'hypothèse que les appelants en
question, en leur qualité de fiduciaires de la
fiducie de la famille d'Elizabeth Ann Roberts
possédaient la totalité des 200 actions émises
auparavant.
En résumé, le 30 août 1966, Elizabeth Ann
Roberts possédait un portefeuille de valeurs
évalué à $324,484. Si elle était décédée le 30
août 1966, cette somme aurait été comprise
dans la valeur globale nette de sa succession
aux fins de l'impôt sur les biens transmis par
décès. Toutefois, le 31 août 1966, le plan Good-
man esquissé ci-dessus avait été exécuté. Les
appelants soutiennent que l'exécution de ce
plan a entraîné les résultats suivants:
a) Les actions des trois personnes qui à l'ori-
gine ont constitué la compagnie appartenaient
réellement à Elizabeth Ann Roberts, qui les a
données à la fiducie de la famille d'Elizabeth
Ann Roberts avant son décès.
b) Aux termes de l'acte de vente, Elizabeth
Ann Roberts était fondée à recevoir de la Lil-
looet les 197 actions ordinaires supplémentaires
qu'elle a également données à la fiducie avant
son décès.
c) Finalement, Elizabeth Ann Roberts a
abandonné toute participation dans la Lillooet
avant son décès.
d) Les administrateurs de la Lillooet ont
régulièrement émis 1,800 actions ordinaires
supplémentaires à dix cents l'action.
e) Au décès de M me Roberts, le 5 septembre
1966, il y avait 2,000 actions ordinaires de la
Lillooet régulièrement émises. Les 200 actions
que M me Roberts avait données ne représen-
taient que dix pour cent de la valeur nette de la
compagnie. En conséquence, les appelants plai-
dent que seuls, dix pour cent de la valeur de
$324,484, soit $32,448, devraient être compris
dans la valeur globale nette de la succession.
L'intimé a cotisé la succession d'après sa pleine
valeur marchande, soit $324,484 et le présent
appel porte sur cette cotisation.
J'ai considéré précédemment comme un fait
établi qu'Elizabeth Ann Roberts a approuvé et
signé les pièces P.2, P.3 et P. 4 au cours de la
soirée du 31 août 1966 son domicile, au 55
Castle Frank Road à Toronto. J'ai également
déclaré que la date de signature des documents
ultérieurs qui font partie intégrante du plan en
question n'était pas établie de façon tellement
claire et était contestée malgré la présence de
certaines dates dans ceux-ci.
La Lillooet Investments Limited a été consti-
tuée en corporation le 6 mai 1966 par MM.
Abramson, Shulman et Karp, mais cette compa-
gnie n'a pas eu d'activité tant que ces derniers
en ont été les seuls actionnaires. M. Roberts
déclare qu'elle constituait ce qu'on appelle une
compagnie «de façade»; en d'autres termes, il
s'agit d'une compagnie réelle qui possède un
statut juridique entier, mais qui est «de façade»
en ce sens qu'elle n'exploite pas activement une
entreprise de quelque genre que ce soit. Son
témoignage revenait à dire que puisqu'une cor
poration privée était nécessaire pour exécuter le
plan recommandé par M. Goodman, et puisque
cette compagnie était disponible, on a décidé
d'acheter toutes les actions de la Lillooet, pro-
bablement pour gagner du temps et peut-être
pour économiser certains des frais qu'entraîne
la constitution d'une nouvelle compagnie. Cela
explique pourquoi les pages 1 à 9 de la pièce
P.5 portent la date du 6 mai 1966. Ces résolu-
tions ont été évidemment rédigées au moment
de la constitution en compagnie, le 6 mai 1966.
Les noms de MM. Roberts et Britton-Foster,
ainsi que celui de M me Britton-Foster ont été
insérés beaucoup plus tard, puisque la décision
d'acheter les actions de cette compagnie n'a été
prise que le 31 août. Il n'existait pas de preuve
sur le point de savoir si les fondateurs ont signé
les résolutions le 6 mai ou à quelque date posté-
rieure, mais, à mon avis, la date de cette signa
ture n'est pas fondamentale pour trancher la
présente affaire. Toutefois, toutes les autres
résolutions et déclarations et tous les autres
procès-verbaux et documents figurant aux
pages 10 36 incluse de la pièce P.5 sont datés
du 31 août 1966.
Dans leurs plaidoiries, les appelants déclarent
que toutes les transactions d'actions concernant
la Lillooet se sont produites le 31 août 1966. Je
cite à ce sujet les alinéas 2, 3 et 4 de l'avis
d'appel. L'appelant Roberts confirme cela dans
son interrogatoire préalable.
En outre, le cabinet de M. Goodman a envoyé
aux appelants une lettre datée du 14 octobre
1966 qu'on peut mieux décrire en la qualifiant
de compte rendu. Cette lettre, signée de Richard
W. J. Posluns, avocat du cabinet de M. Good-
man, compte quelque dix pages et décrit en
détail les différentes mesures mises en oeuvre et
accomplies pour exécuter le plan Goodman. A
la page 9 de la lettre, M. Posluns écrit: [TRA-
DUCTION] «Naturellement, il est très important
que toute déclaration, tant d'impôt sur les biens
transmis par décès que de droits successoraux,
ainsi que toute correspondance avec les minis-
tères respectifs, donne une description exacte
des techniques du projet de règlement de la
succession que nous avons mises en ouvre et
qui vous sont indiquées dans cette lettre.» M.
Posluns a écrit cette lettre à un moment où il
avait encore très présentes à l'esprit les diverses
mesures et rencontres. Il s'est rendu compte
que l'exactitude était essentielle dans la commu
nication de ce plan et de chacune de ses étapes
au ministère, car il était bien conscient que ce
dernier examinerait de très près et à fond le
plan au regard de son objectif qui était de
réduire considérablement le montant de l'impôt
sur les biens transmis par décès frappant la
succession de M me Roberts.
A la page 4 de ce compte rendu, M. Posluns
écrit: [TRADUCTION] «Le 31 août 1966 (les itali-
ques sont de moi), les administrateurs ont
approuvé une résolution de la compagnie émet-
tant et repartissant 197 actions ordinaires sup-
plémentaires sans valeur au pair pour la somme
de $324,481 au bénéfice d'Elizabeth Ann
Roberts, ce qui représente le prix d'achat que la
compagnie devait acquitter au regard de l'achat
de certaines actions à Mme Roberts ... Le même
jour (les italiques sont de moi), le conseil d'ad-
ministration a adopté une résolution approuvant
le transfert des 197 actions ordinaires du capital
de la compagnie par Elizabeth Ann Roberts au
profit d'Arthur George Roberts et de Richard
Britton-Foster, fiduciaires de la fiducie de la
famille d'Elizabeth Ann Roberts ...» «Lors
d'une réunion du conseil d'administration de la
compagnie qui eut lieu le 31 août 1966 (les
italiques sont de moi), à quatre heures de l'a-
près-midi, on a approuvé une résolution don-
nant le droit à chacun des actionnaires actuels
de la compagnie de souscrire et de se faire
émettre neuf actions ordinaires du capital de la
compagnie à dix cents l'action pour chaque
action ordinaire que chacun détenait déjà ...»
«Comme je l'ai déjà indiqué, les administrateurs
de la compagnie ont adopté le 31 août 1966 (les
italiques sont de moi), une résolution approu-
vant tant l'achat des valeurs que la forme de
l'acte d'achat et de vente.»
Néanmoins, l'appelant Arthur G. Roberts,
dans la preuve qu'il a présentée au procès, a
juré que toutes les résolutions et tous les pro-
cès-verbaux de la Lillooet signés par l'appelant
Britton-Foster, par M me Britton-Foster et par
lui-même, n'ont pas été signés le 31 août, mais
le ler septembre 1966 au matin dans le bureau
de M. Goodman. Il reconnaît que M. Britton-
Foster et lui-même se sont réunis avec M.
Goodman dans le bureau de ce dernier dans
l'après-midi du 31 août de 15h30 à 17h environ
et que M. Posluns était également présent à
cette réunion, mais il nie que cette réunion ou
toute partie de celle-ci ait constitué la réunion
des administrateurs décrite aux pages 30 et 31
de la pièce P.5 comme ayant eu lieu à 16h le 31
août 1966. (Il s'agissait de la réunion qui a
proclamé le droit d'obtenir neuf actions pour
une.) La seule explication que Roberts a fournie
de cette contradiction directe entre la preuve
qu'il a présentée au procès et celle qu'il a pré-
sentée lors de l'interrogatoire préalable était
que, puisque toutes les résolutions et tous les
documents étaient datés du 31 août, il supposait
qu'ils avaient été réellement signés et que les
réunions avaient véritablement eu lieu à cette
date, mais qu'entre l'interrogatoire préalable et
la date du procès, il a découvert son erreur et
qu'il modifiait maintenant son témoignage. Je
n'accepte pas cette explication. D'une part,
l'avis d'appel donne comme date appropriée
celle du 31 août; Roberts, dans son interroga-
toire préalable, jure que le 31 août est la date
exacte et M. Posluns, dans la lettre de compte
rendu qu'il a adressée le 14 octobre 1966 aux
appelants, après avoir souligné à ses clients la
nécessité de l'exactitude ainsi que celle d'une
divulgation complète, donne également comme
date appropriée celle du 31 août; d'autre part, il
y a le témoignage de l'appelant Roberts au
procès, selon lequel il était auparavant dans
l'erreur et, conséquence inévitable de cette
preuve, que les plaidoiries ainsi que M. Posluns
étaient dans l'erreur. L'avocat de l'intimé a fait
très justement remarquer au procès qu'on n'a
déployé aucun effort pour expliquer cette con
tradiction. On n'a pas essayé de confirmer la
preuve que Roberts a présentée au procès à
l'aide, par exemple, d'une inscription sur un
registre ou sur un agenda du cabinet Goodman.
MM. Britton-Foster, Goodman et Posluns
étaient présents lors de la signature des docu
ments et de la tenue des réunions. Il aurait été
facile à l'un ou à l'autre de témoigner à propos
de cette pattie très importante de l'affaire. Je
n'accepte pas la preuve que M. Roberts a pré-
sentée au procès sur cette question. En consé-
quence, je considère comme un fait établi que
toutes les résolutions et déclarations et tous les
procès-verbaux et documents signés par les
appelants et par M me Britton-Foster, qui figurent
dans la pièce P.5, avaient été en réalité approu-
vés et signés par eux le 31 août 1966. En outre
je considère comme un fait établi que la réunion
des administrateurs, qui a eu lieu d'après les
dossiers le 31 août à 16h, a vraiment eu lieu à
cette date et à cette heure et qu'ils y ont traité
les opérations, indiquées dans le procès-verbal
de celle-ci, qui figurent aux pages 30 à 32
incluse de la pièce P.5.
Les lettres patentes de la Lillooet disposent
que les 2,000 actions ordinaires sans valeur au
pair ne seront pas émises pour une considéra-
tion excédant $2,000 [TRADUCTION] «ou telle
somme plus élevée que le conseil d'administra-
tion de la compagnie juge convenable après
paiement au Trésorier de l'Ontario des droits
acquittables sur cette somme plus élevée et après
l'émission par le Secrétaire provincial du certifi-
cat attestant un tel paiement». ( Les italiques
sont de moi).
Il est possible d'inscrire une telle disposition
dans des lettres patentes, en vertu des termes
de l'art. 26(4) du Corporations Act de l'Ontario,
S.R.O. 1970, c. 89.'
Les administrateurs de la Lillooet ont agi
conformément à cette disposition des lettres
patentes et, en conséquence, ont approuvé une
résolution faisant passer la limite de la considé-
ration de $2,000 à $350,000 pour l'émission des
2,000 actions ordinaires sans valeur au pair. Le
procès-verbal en question est daté du 6 mai
1966, mais j'ai déjà décidé que les administra-
teurs l'avaient signé le 31 août 1966. Ensuite, le
1 e " septembre 1966, M. Posluns, du cabinet
Goodman, a écrit une lettre (pièce D.4), expé-
diée au Secrétariat provincial le même jour, qui
contenait une copie certifiée conforme de ladite
résolution ainsi qu'un chèque pour acquitter au
Trésorier les droits supplémentaires indispensa
bles, et qui demandait au Secrétaire provincial
d'émettre le certificat attestant ce paiement.
Selon la preuve de M. McCormack, contrô-
leur des archives à la Direction des compagnies
de l'Ontario, le Secrétaire provincial a signé le
15 septembre 1966 le certificat de paiement des
droits (pièce P.6) qu'on a envoyé au cabinet
Goodman le 16 septembre 1966.
Les lettres patentes de la Lillooet énoncent
clairement que les actions ordinaires ne peuvent
être émises pour une considération plus élevée
qu'après paiement au Trésorier de droits plus
élevés et qu'après l'émission du certificat par le
Secrétaire provincial (les italiques sont de moi).
Les termes des lettres patentes font bien com-
prendre que ces deux mesures constituent les
conditions préalables à l'émission d'actions
ordinaires pour une considération plus élevée.
En l'espèce, la première mesure a été prise le ler
septembre 1966, mais la seconde ne l'a été que
le 15 septembre 1966. Il convient également de
remarquer que l'art. 26(4) du Corporations Act
de l'Ontario qui autorise l'adoption de ce genre
de procédure dans des lettres patentes, utilise
des termes identiques et il est donc également
évident que les deux mesures précitées consti
tuent des conditions préalables selon la loi
applicable.
J'aimerais également citer l'acte de vente
conclu entre Elizabeth Ann Roberts et la Lil-
looet, dont l'al. 7 dispose:
[TRADUCTION] Sans restreindre la généralité de ce qui
précède, il est expressément convenu entre les parties aux
présentes que l'acheteur prendra sans délai les mesures
nécessaires en vue de permettre l'émission des actions
ordinaires pour une considération totale égale au prix d'a-
chat ci-dessous et que, sans délai après la réception du
certificat demandé au Secrétaire provincial de la province
de l'Ontario, autorisant l'acheteur à émettre les actions en
question pour ladite considération, il fera émettre les
actions ordinaires au profit du vendeur conformément aux
termes du présent acte. (Les italiques sont de moi).
D'après l'al. 7, il est évident qu'il était impos
sible que les actions qui devaient être émises au
profit de Mme Roberts puissent l'être légalement
avant le 16 septembre 1966, date à laquelle le
Secrétaire provincial a fait envoyer le certificat
au cabinet Goodman.
Je pense qu'il est également significatif que
M. Posluns, à la page 6 de sa lettre de compte
rendu aux appelants (D.5), déclare:
[TRADUCTION] On a obtenu un certificat de paiement
daté du 1er septembre 1966 et on peut maintenant émettre
les actions ordinaires de la compagnie pour une considéra-
tion n'excédant pas $350,000. (Les italiques sont de moi).
Il convient de rappeler que cette lettre a été
écrite le 14 octobre 1966.
Les appelants soutiennent que toutes les
mesures nécessaires à l'accomplissement du
plan Goodman ont été prises avant le 5 septem-
bre 1966, date du décès. Je ne peux le croire. A
mon avis, l'émission et la répartition des 197
actions supplémentaires au profit d'Elizabeth
Ann Roberts étaient sans effet avant le 5 sep-
tembre 1966, puisqu'aucune autorisation d'é-
mission et de répartition n'a été émise avant le
15 septembre 1966.
J'ai lu le jugement de mon confrère le juge
Cattanach dans l'affaire Oakfield Developments
(Toronto) Ltd. c. M.R.N. [1969] 2 R.C.É. 149.
Dans cette affaire, le juge Cattanach a décidé
que le Ministre avait la faculté d'établir que les
lettres patentes supplémentaires portaient une
date antérieure à celle de leur émission vérita-
ble. En l'espèce, les lettres patentes supplémen-
taires autorisant l'émission d'actions privilé-
giées étaient datées du 20 décembre 1960, mais
en fait, elles n'avaient été émises que le 15
février 1961. Il s'ensuivait qu'aucune action
privilégiée n'avait valablement été émise le 21
décembre 1960, car, à cette époque, le capital
social de la compagnie ne comportait pas d'ac-
tions de ce genre. On a fait appel devant la Cour
suprême du Canada de la décision du juge Cat-
tanach et c'est le juge Judson qui a prononcé le
jugement de la Cour suprême [1971] D.T.C.
5175.
L'appel a été rejeté pour d'autres motifs et la
Cour suprême n'a pas traité le principe énoncé
par le juge Cattanach.
Je souscris au raisonnement de mon confrère
le juge Cattanach dans l'affaire Oakfield, ainsi
que dans l'affaire The Deltona Corp. c. M.R.N.
[1971] D.T.C. 5186, la page 5201.
En l'espèce présente, les faits sont, à mon
avis, encore plus convaincants que dans l'af-
faire Oakfield précitée. En l'occurrence, l'émis-
sion projetée des 197 actions supplémentaires
au profit de M me Roberts a eu lieu le 31 août
1966, ainsi que le don ultérieur à la fiducie des
200 actions ordinaires et la réunion des admi-
nistrateurs où l'on a émis et réparti les 1,800
actions ordinaires; toutes ces opérations ont eu
lieu le 31 août 1966, soit une journée avant la
date de l'émission du certificat par le Secrétaire
provincial. En mettant les choses au mieux pour
les appelants et abstraction faite des affaires
Oakfield et Deltona, le droit des appelants de
transférer les 200 actions et d'émettre les 1,800
actions supplémentaires date du l er septembre
1966, et cependant toutes ces mesures ont été
prises le 31 août 1966.
Il s'ensuit donc que le 5 septembre 1966, date
du décès, le transfert et la disposition du porte-
feuille de valeurs de Mme Roberts n'avaient pas
eu lieu et que le Ministre a, à bon droit, inclus
ledit portefeuille dans le calcul de la valeur
globale nette de sa succession.
L'avocat de l'intimé m'a demandé, si je pen-
sais qu'on avait exécuté le plan Goodman, de
décider en outre qu'il y avait en l'espèce, en la
forme et au fond, une suite d'opérations en
relation mutuelle et intimement liées, aux
termes desquelles le portefeuille de valeurs de
la défunte avait été transféré à une corporation
contrôlée par la défunte au moment du transfert
moyennant l'émission et la répartition de tout
son capital actions émis en faveur des fiduciai-
res pour qu'ils le détiennent en fiducie au béné-
fice des enfants de la cédante et qu'en consé-
quence, ces opérations ont engendré, en la
forme et au fond, une disposition ayant l'effet
d'une donation immédiate entre vifs. Par consé-
quent, il convient d'inclure la pleine valeur mar-
chande de ces titres dans la valeur globale nette
de la succession, conformément à l'art. 3(1)c)
de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par
décès. 2
Ayant conclu qu'on n'avait pas achevé l'exé-
cution du plan Goodman et que le transfert et la
disposition du portefeuille de valeurs de Mme
Roberts n'avait pas eu lieu avant son décès, je
ne vois pas l'utilité de traiter de cette préten-
tion. Toutefois, je n'hésite pas à formuler l'opi-
nion que, lorsqu'on considère le programme, le
plan et toute la preuve, il aurait pu exister une
disposition des valeurs négociables qui se serait
faite par voie de donation au sens de l'art.
3(1)c) si le plan avait été exécuté pleinement. Il
semble bien établi d'après la jurisprudence en
matière fiscale qu'on s'attache plus au fond qu'à
la forme, qu'en outre l'intention dans laquelle
une transaction est conclue constitue un élé-
ment important et qu'il convient de tenir
compte de l'ensemble des circonstances en
cause. (West Hill Redevelopment Co. c. M.R.N.
[1969] 2 R.C.É. 441 la page 455.)
Je crois que le plan mis en œuvre en l'espèce
était purement et simplement un mécanisme
destiné à réaliser une donation du portefeuille
de valeurs au bénéfice des enfants et qu'en
conséquence, la décision de la Cour suprême
dans l'affaire M.R.N. c. Cox [1971] D.T.C.
5150, la page 5151 (le juge Judson) s'applique
bien à l'espèce.
Les avocats des appelants se sont fortement
appuyés sur l'affaire Oldham (Le procureur
général c. Oldham [1940] 1 B.R. 599, aux pages
606, 607 et 608; confirmé par [1940] 2 B.R.
485) dans laquelle un certain Tate avait donné
en janvier 1934 à sa fille Mme Oldham, la défen-
deresse, 25,000 actions ordinaires d'une compa-
gnie. En mai 1935, la compagnie a augmenté
son capital en émettant au profit de ses action-
naires ordinaires des actions gratuites, intégrale-
ment libérées sur la réserve générale de la com-
pagnie, à raison de deux actions gratuites pour
cinq actions existantes, ce qui a eu pour effet
que la défenderesse a reçu 10,000 actions gra-
tuites. Tate est décédé en avril 1936 et la Cou-
ronne a réclamé des droits de succession sur la
valeur des 10,000 actions gratuites ainsi que sur
celle des 25,000 actions primitives. (La défen-
deresse a admis que des droits étaient dus sur
les 25,000 actions primitives, parce qu'il s'agis-
sait d'une disposition volontaire que Tate avait
faite moins de trois ans avant son décès.)
Le juge Wrottesley a décidé que les actions
gratuites ne constituaient pas des biens transmis
aux termes de la disposition faite par Tate et
que, par conséquent, des droits de succession
n'étaient pas dus sur leur valeur.
Je voudrais faire remarquer que, bien que les
termes essentiels de la loi anglaise applicable
dans l'affaire Oldham soient semblables à ceux
de l'art. 3(1)c) de notre loi, la loi anglaise ne
comporte pas de définition du mot «disposi-
tion». L'article 58(1)e) de notre loi définit le
mot «disposition» . 3 Les faits de l'affaire
Oldham sont entièrement différents de ceux de
l'espèce présente et la loi en cause comporte
des différences importantes. Je suis donc d'avis
que l'affaire Oldham ne peut s'appliquer à l'es-
pèce présente. Il est intéressant cependant de
lire à la page 606 du jugement Oldham l'exposé
de droit suivant du savant juge: [TRADUCTION]
«Si on soutient que la Cour ne doit pas fermer
les yeux sur le contenu réel d'une opération, au
cas où il est différent de ce que la forme de
l'opération laisse supposer, il ne fait pas de
doute que c'est le devoir de la Cour d'agir
ainsi.» Cet exposé de droit du juge Wrottesley
ne contredit en aucune façon la décision rendue
dans les affaires West Hill et Cox, déjà
mentionnées.
Après avoir examiné soigneusement les dis
positions des art. 3(1)c) et 58(1)e) de la Loi de
l'impôt sur les biens transmis par décès, 1958, c.
29, j'en conclus que le plan, en l'espèce, consti-
tue clairement une disposition des valeurs au
sens ordinaire du mot «disposition», ainsi qu'au
sens large exposé dans l'art. 58(1)e).
J'ai consulté la jurisprudence anglaise citée
par l'avocat de l'intimé en ce qui concerne
l'interprétation qu'il convient de donner à ce
mot dans les lois fiscales et je suis d'avis que le
plan, dans l'espèce présente, constitue très cer-
tainement «une disposition» au sens de cette
jurisprudence. Voir les arrêts Duke of Northum-
berland c. Le procureur général [1905] A.C.
406, prononcé par Lord Macnaghten, aux pages
410 412; Parr c. Le procureur général [1926]
A.C. 239, prononcé par Lord Carson, aux pages
267 et 268; et Grey c. I.R.C. [1959] 3 All E.R.
603, prononcé à la Chambre des Lords par le
vicomte Simonds, à la page 605.
L'appel est rejeté avec frais.
1 [TRADUCTION] 26. (4) Lorsque les actions d'une com-
pagnie sont sans valeur au pair ou lorsqu'une partie de ces
actions sont avec valeur au pair et l'autre sans valeur au
pair, les lettres patentes ou les lettres patentes supplémen-
taires peuvent prévoir que chaque action sans valeur au pair
ou que les actions de chaque classe d'actions sans valeur au
pair ne doivent pas être émises pour une considération
excédant, en montant ou en valeur, une somme énoncée en
dollars, en livres, en francs, ou dans une autre monnaie. Les
lettres patentes ou les lettres patentes supplémentaires peu-
vent prévoir, en outre, que cette action ou ces actions
peuvent être émises pour telle somme plus élevée que le
conseil d'administration de la compagnie juge convenable
après paiement au Trésorier de l'Ontario des droits acquitta-
bles sur cette somme plus élevée et après l'émission par le
Ministre du certificat attestant un tel paiement.
2 3. (1) Dans le calcul de la valeur globale nette des biens
transmis au décès d'une personne, on droit inclure la valeur
de tous les biens, quelle qu'en soit la situation, transmis au
décès de cette personne, y compris, sans restreindre la
généralité de ce qui précède,
c) les biens que le défunt a aliénés en vertu d'une disposi
tion ayant l'effet ou étant censée avoir l'effet d'une
donation immédiate entre vifs, que ce soit par voie de
transfert, délivrance, déclaration de fiducie ou autrement,
faite dans les trois années antérieures à son décès;
3 58. (1) Dans la présente loi,
e) «disposition» comprend tout arrangement ou toutes
mesures ayant le caractère d'une disposition, au moyen
d'une opération ou de plusieurs opérations effectuées à
cette fin, ou de quelque autre manière;
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