Vapor Canada Limited (Demanderesse)
c.
John A. MacDonald, Railquip Enterprises Limit
ed et Vapor Corporation (Défendeurs)
N° 1
Division de première instance, le juge Walsh—
Ottawa, les 19 août et 25 novembre 1971.
Plaidoiries—Allégations à l'appui dans la déclaration—
Contrefaçon de brevet et de marque de commerce—Révéla-
tion de secrets commrrciaux—Insuffisance des détails—
Radiation.
Les allégations à l'appui d'une déclaration, selon lesquel-
les les défendeurs ont contrefait le brevet et la marque de
commerce de la demanderesse, le défendeur M a révélé ses
secrets commerciaux et les défendeurs se sont livrés à des
pratiques commerciales incorrectes, sont trop imprécises et
doivent être supprimées. Les détails concernant le brevet, la
marque de commerce et les secrets commerciaux, la façon
dont le brevet et la marque de commerce ont été contrefaits
et les personnes à qui les secrets commerciaux ont été
révélés doivent être tous divulgués.
La demande de remise par les défendeurs de tous les
articles contrefaits est radiée pour imprécision.
Renvoi aux arrêts Dow Chemical Co. c. Kayson Plas
tics & Chemicals Ltd. [1967] 1 R.C.E. 71; Precision
Metalsmiths Inc. c. Cercast Inc. [1967] 1 R.C.E. 214;
Union Carbide Canada Ltd. c. Canadian Industries
Ltd. [1969] 2 R.C.E. 422; Hassenfeld Bros. Inc. c.
Parkdale Novelty Co. [1967] 1 R.C.E. 277.
Redmond Quain pour la demanderesse.
J. Nelson Landry pour les défendeurs.
LE JUGE WALSH—Les défendeurs demandent
la radiation de la déclaration et de la déclaration
modifiée de la demanderesse, déposées respec-
tivement les 11 août et 3 novembre 1971, parce
qu'elles ne révèlent aucune cause raisonnable
d'action, qu'elles sont vexatoires et peuvent
causer préjudice, gêner ou retarder l'instruction
équitable de l'action. Le 9 novembre 1971, la
demanderesse a produit une nouvelle déclara-
tion modifiée, apportant quelques modifications
très mineures à la déclaration modifiée du 3
novembre 1971; l'avocat y ayant consenti, lors
de l'audience que j'ai présidée sur la requête
des défendeurs, le jugement portera sur cette
nouvelle déclaration modifiée.
Il est bon de résumer brièvement ces procé-
dures, que nous révèlent le dossier de la cour et
la plaidoirie de l'avocat. La première déclara-
tion, qu'accompagnait un avis de requête aux
fins d'injonction interlocutoire, invoquait une
prétendue contrefaçon de brevet, l'existence
d'une concurrence déloyale et la révélation, par
les défendeurs John A. MacDonald et Railquip
Enterprises Ltd., de secrets commerciaux et de
renseignements confidentiels; le troisième
défendeur, Vapor Corporation, à qui l'on ne
demande aucune réparation, a été mis en cause
comme détenteur de certains des brevets, con-
formément à l'article 57(2) de la Loi sur les
brevets. La nouvelle déclaration modifiée ajou-
tait, à la contrefaçon du brevet, à la concur
rence déloyale, à la révélation de secrets com-
merciaux et de renseignements confidentiels
invoqués dans la déclaration originale, des para-
graphes insistant tout particulièrement sur la
violation, par les défendeurs, d'une marque de
commerce et d'un droit d'auteur. Puisque les
défendeurs n'ont pas encore plaidé à l'instance,
la demanderesse peut, sans autorisation, amen-
der sa déclaration et sa nouvelle déclaration
modifiée, en vertu de la Règle 421; même si la
Règle 424 avait exigé cette autorisation, celle-ci
aurait été accordée en vertu de la Règle 427
quoiqu'on puisse peut-être prétendre qu'elle
ajoutait de nouvelles causes d'action, puisque
celles-ci provenaient manifestement des mêmes
faits, ou sensiblement des mêmes faits, que
ceux pour lesquels on recherchait déjà répara-
tion dans la déclaration originale.
A l'appui de sa demande d'injonction interlo-
cutoire, la demanderesse a produit en temps
utile trois affidavits en réponse auxquels les
défendeurs prétendent avoir remis neuf affida
vits. Les divers témoins ont été et sont encore
longuement contre-interrogés sur ces affidavits
et l'avocat a informé la cour que la transcription
de ces interrogatoires représentait déjà quelque
3,000 pages. C'est pourquoi la demande d'in-
jonction interlocutoire n'a pas encore été exa
minée. Comme les défendeurs ne sont pas
venus contester la déclaration originale, la
demanderesse a demandé que soit rendu un
jugement par défaut conformément à la Règle
437; le juge Gibson a rejeté cette demande le 14
octobre 1971, avec dépens en faveur des défen-
deurs, quelle que soit l'issue de la cause.
Dans la plaidoirie qu'il m'a exposée, l'avocat
de lâ demanderesse s'appuyait fortement sur le
fait que la requête des défendeurs n'avait été
présentée que le 10 novembre 1971, soit près
de trois mois après la date de production et de
signification aux défendeurs de la déclaration
originale, déclarant que cette déclaration origi-
nale était moins complète et moins détaillée que
la déclaration modifiée et que la nouvelle décla-
ration modifiée et que, si les défendeurs avaient
voulu faire opposition à la déclaration, au motif
qu'elle ne révélait aucune cause raisonnable
d'action, qu'elle était vexatoire et pouvait
causer préjudice, gêner ou retarder l'instruction
équitable de l'action, ils auraient dû le faire à ce
moment-là, qu'il ne faudrait par conséquent pas
les autoriser à le faire et retarder encore mainte-
nant par cette motion, le règlement du procès.
Rien dans les règles ni dans la jurisprudence qui
m'a été citée ne permet de soutenir cet argu
ment. La demanderesse elle-même, en ne dépo-
sant une déclaration modifiée que le 3 novem-
bre 1971 et une nouvelle déclaration modifiée le
9 novembre 1971, comme l'y autorisaient les
règles sur les modifications, rendait possible le
dépôt de la requête des défendeurs et, de toute
façon, les règles n'imposaient à ces derniers de
délai pour le faire, la Règle 419 autorisant la
Cour «à tout stade d'une action» d'ordonner la
radiation d'une plaidoirie, ou autre, avec ou
sans permission d'amendement. De plus, la pré-
sente requête, si elle est accordée et même si
elle retarde le règlement de l'action elle-même,
ne pourra retarder l'audition de la requête aux
fins d'injonction interlocutoire, qui ne peut être
examinée qu'à la fin du contre-interrogatoire
des témoins des défendeurs par le procureur de
la demanderesse.
Quant au fond de la requête présentée par les
défendeurs, j'estime que la nouvelle déclaration
modifiée de la demanderesse est défectueuse à
de nombreux égards, compte tenu de la juris
prudence établie récemment par cette Cour
dans une série d'arrêts tels que Dow Chemical
Co. c. Kayson Plastics & Chemicals Ltd. [1967]
1 R.C.É. 71; Precision Metalsmiths Inc. c. Cer-
cast Inc. [1967] 1 R.C.É. 214, décisions du
président Jackett, dont c'était alors le titre, que
le juge Thurlow a suivies dans les arrêts Union
Carbide Canada Ltd. c. Canadian Industries
Ltd. [1969] 2 R.C.É. 422, et, plus récemment, le
jugement non encore publié du juge Pratte, dans
l'arrêt Posting Equipment Corp. c. B & F Metal
Works Ltd. T-2286-71, 4 août 1971, toutes ces
décisions portaient sur des actions en contrefa-
çon de brevet. Le juge Noël, fonction qu'il
occupait alors, a appliqué les mêmes principes
en matière de contrefaçon de dessins industriels
et de marques de commerce dans les arrêts
Hassenfeld Bros. Inc. c. Parkdale Novelty Co.
[1967] 1 R.C.É. 277, et dans son jugement, non
encore publié, rendu dans l'affaire Lovable
Brassiere Co. of Canada Ltd. c. Lovable Knits
Inc. B-4229, 1 avril 1971.
Voici quelques extraits de ces jugements pour
illustrer les principes de plaidoirie établis en
matière de propriété industrielle. Dans l'affaire
Dow Chemical le président Jackett déclarait à la
page 75:
[TRADUCTION] ... Le simple fait d'affirmer que le défendeur
a violé les droits du demandeur n'équivaut pas à alléguer des
faits qui constituent une cause d'action et une déclaration
dans laquelle c'est là la seule affirmation de violation pour-
rait être radiée comme un abus des procédures judiciaires.
Voir l'affaire Marsden c. Albrecht (1910) 27 R.P.C. 785
(C.A.) par le Lord juge Buckley aux pages 788-789. Les
faits doivent être énoncés de manière à convaincre la Cour
que, en supposant que l'affirmation soit vraie, la demande-
resse a un motif d'action défendable. (Philipps c. Philipps,
(1878) 4 D.B.R., 127). Le demandeur ne saurait résister à la
demande de radiation, en pareil cas, en prétendant que, s'il
est autorisé à demander un interrogatoire illimité du défen-
deur, il pourrait alors être en mesure de plaider une cause
d'action.
Ce jugement fait également jurisprudence lors-
qu'un demandeur, ne pouvant donner de détails
sur une violation particulière dont il se plaint,
ajoute alors de vagues allégations concernant
d'autres violations qu'il soupçonne mais dont il
n'a pas véritablement connaissance. A la page
73, le jugement déclare:
[TRADUCTION] L'avocat du demandeur soutient que, si le
demandeur a des renseignements sur l'une des violations de
son brevet, il est fondé à intenter des procédures pour des
violations de cette nature et pour toute autre chose que le
défendeur peut avoir faite, constituant une violation du
même brevet, de sorte que, au cours de l'interrogatoire du
défendeur, il pourra y découvrir la possibilité de différents
genres de violation qu'il ignorait lorsqu'il a intenté l'action.
Il admet qu'avant le procès, il doit, si le défendeur insiste,
modifier son exposé des détails des violations en ajoutant
toute autre violation qu'il a découverte entre temps et sur
laquelle il a l'intention de s'appuyer, de manière qu'au
procès, on s'en tienne à son égard à son exposé des détails
modifiés.
Commentant cette prétention, le jugeme_it
énonce à la page 74:
[TRADUCTION] Il se peut naturellement que le demandeur,
lorsqu'une action est intentée, ait des indices lui permettant
d'affirmer que le défendeur a accompli certains actes, sans
pouvoir dire avec précision quand, où et comment le défen-
deur a accompli ces actes. Le défendeur peut être seul à
connaître en détail les circonstances d'un cas particulier.
Par exemple, le demandeur peut être en mesure de prouver
qu'un fabricant a vendu une certaine catégorie de marchan-
dises fabriquées selon un procédé dont il détient le brevet.
Seul le défendeur peut néanmoins savoir quand, comment et
à quel endroit ces marchandises ont été fabriquées. En
pareil cas, évidemment, il ne serait pas nécessaire au
demandeur de fournir ces détails, au moins avant l'interro-
gatoire. Il y a aussi des cas où la connaissance du deman-
deur est suffisante pour autoriser l'ouverture de poursuites,
mais où il convient d'octroyer à ce dernier une ordonnance
d'inspection du bien en cause en vertu de la Règle 148A
avant de lui demander d'exposer ses détails des violations.
A comparer avec l'arrêt Edler c. Victoria Press Manufactu
ring Company (1910) 27 R.P.C. 114.
Le jugement déclare ensuite à la page 78:
[TRADUCTION] A mon avis, cependant, aucun de ces pro-
blèmes ne se pose lorsque le demandeur, en plus d'exposer
en détail les faits qu'il connaît et qui constituent une viola
tion, tente d'inclure dans la déclaration des faits qu'il ne
connaît pas et qui, même s'il a quelque motif d'y croire,
n'existent pas. Toute tentative d'inclure, dans la déclaration,
des causes d'action fondées sur des faits qu'on ne connaît
pas, doit être rejetée. Que le demandeur puisse prouver qu'il
s'agit de faits justifiant l'inclusion dans la déclaration d'une
seconde cause d'action, ou qu'il s'agisse d'une allusion à
une éventuelle cause d'action, dans les deux cas les moyens
ne sont pas pertinents et doivent être supprimés des
plaidoiries.
Le président Jackett consacre à nouveau ces
principes dans l'arrêt Precision Metalsmiths, qui
renvoyait à l'affaire Dow Chemical. A la page
220, il déclare:
[TRADUCTION] Dans une action poùr contrefaçon intro-
duite en conformité de la Loi sur les brevets, l'exposé de
demande doit donc alléguer:
a) les faits fondant en droit le monopole, conféré au
demandeur en vertu de la Loi sur les brevets, à l'égard de
certaines activités bien définies, et
b) que le défendeur a exercé l'une ou plusieurs des
activités bien définies dont le demandeur a le monopole.
Ce n'est donc pas se conformer à cette exigence que d'allé-
guer les faits importants uniquement en établissant les con
clusions que la Cour devra en tirer, à savoir:
a) que le demandeur est le détenteur d'un ou plusieurs
brevets canadiens nommément désignés, et
b) que le défendeur a violé les droits découlant pour le
demandeur de la possession de ces brevets.
Dans l'affaire Union Carbide, le juge Thurlow
a poussé encore plus loin les principes énoncés
dans ces deux arrêts; en l'espèce, bien que les
détails des violations indiquassent avec préci-
sion les paragraphes qui, dans le brevet en
question, avaient été violés, le juge, soutenant
que ceci était insuffisant, déclarait à la page
425:
[TRADUCTION] ... lorsque l'empiètement sur un droit de
propriété fonde une action en réparation, une description
succincte du droit allégué, accompagnée d'une exposé des
faits démontrant comment ce droit a pris naissance. Plus
précisément, on exige non pas un renvoi à une source de
renseignements sur le droit du demandeur, mais une des
cription succincte de ce droit pouvant indiquer sans équivo-
que ce que le défendeur a violé.
Il ajoutait également, page 427:
[TRADUCTION] .. Je dois préciser, cependant, que si, par
une description du droit allégué comportant un énoncé long
et peu intelligible d'un certain nombre de revendications du
brevet, on peut, dans de nombreux cas, sinon presque
toujours, éviter de se faire opposer l'absence apparente de
cause d'action, un exposé dans cette forme reste sujet à
l'objection qu'il ne constitue pas un exposé succinct d'un
fait important, et peut donc tout aussi bien être rejeté en
vertu des alinéas c) et e) de la Règle 114, soit parce que
susceptible d'entraver l'instruction équitable de l'action ou
de lui nuire, soit à titre de recours abusif à des procédures
judiciaires. A mon sens, il faut exiger une description suc-
cincte, dégagée de tout verbiage inutile et non pertinent,
exprimant l'essentiel du droit que l'on allègue avoir été violé
par le défendeur. Cette description s'avérera sans doute une
tâche longue et difficile, mais j'estime qu'un demandeur et
son avocat devraient, avant d'intenter un procès, connaître
la nature du droit dont ils entendent prouver la violation, et
par suite pouvoir en donner une description suffisante.'
En appliquant ces mêmes principes aux des-
sins industriels, dans l'affaire Hassenfeld Bros.,
le juge Noël, aujourd'hui juge en chef adjoint,
invoquait l'arrêt Precision Metalsmiths et décla-
rait à la page 281:
[TRADUCTION] ... L'allégation de violation contenue dans la
déclaration, selon laquelle le défendeur «en important, dis-
tribuant et vendant ce petit personnage «Johnny Canuck,
soldat canadien au combat, entièrement articulé, pouvant
adopter 1001 positions» ... a contrefait le dessin industriel
enregistré sous le numéro 204, folio 26805» de la demande-
resse Hassenfeld Bros., Inc., n'est pas suffisante, car elle ne
contient pas une description du dessin ou de la prétendue
imitation frauduleuse de ce que le défendeur est présumé
avoir importé, distribué et vendu, pour prouver qu'il s'agit
en fait d'une violation des droits des demandeurs. En l'ab-
sence d'une telle description, il n'y a donc aucune allégation
de faits importants, nécessaires pour prouver une cause
d'action en contrefaçon.
Dans l'affaire Dow Chemical, le président
Jackett étudiait une requête à fin de détails bien
que, comme il l'a souligné, les objections quant
à la forme de la plaidoirie auraient très bien pu
être faites par voie de requête en radiation. En
l'espèce présente, nous avons la situation con-
traire. Les défendeurs ont présenté une requête
en radiation et même si des résultats fondamen-
talement semblables auraient pu être atteints, en
ce qui concerne en tout cas certains des para-
graphes incorrectement rédigés de la nouvelle
déclaration modifiée, par la voie d'une requête à
fin de détails, la requête qu'ils ont présentée est
tout à fait correcte. Il ne semble pas y avoir
d'avantage pratique; au contaire, les procédures
au fond n'en seraient que retardées si seuls les
paragraphes qui sont manifestement mal rédigés
étaient radiés, et seuls conservés ceux pour
lesquels une requête à fin de détails devrait
ultérieurement être présentée; c'est pourquoi
j'ai l'intention de radier tous les paragraphes qui
me semblent demander quelques éclaircisse-
ments, réservant à la demanderesse le droit de
demander l'autorisation de remplacer par d'au-
tres plaidoiries celles qui auront été radiées.
Étudions maintenant les paragraphes particu-
liers de la nouvelle déclaration modifiée de la
demanderesse, savoir les paragraphes 3 et 4 que
voici:
[TRADUCTION] 3. Les défendeurs MacDonald et Railquip
Enterprises (appelés en l'espèce les défendeurs) ont violé
lesdits brevets aux temps et lieux énoncés dans les détails
des violations ci-joints, en fabriquant, construisant, utilisant
et vendant, eux-mêmes ou par des intermédiaires, à d'autres
personnes et sur le territoire canadien, les inventions énon-
cées auxdites lettres patentes.
4. La violation consiste à avoir contrefait chacune des
revendications énoncées auxdites lettres patentes et chacun
des éléments de combinaison respectivement énoncés dans
chacune des revendications, en utilisant (1) dans certains
produits, les mêmes combinaisons et les mêmes éléments et
(2) dans d'autres produits, de légères variantes de ces
derniers.
ainsi que les détails des violations mentionnés
au paragraphe 3:
[TR:\ Duc noN] 1. Les défendeurs (autres que Vapor Cor
poration) ont, à différentes dates de l'année 1971, actuelle-
ment inconnues de la demanderesse, violé les brevets (cor-
respondant à chacune des revendications et chacun des
éléments de chaque revendication) énoncés à la déclaration,
et tout particulièrement le 30 avril 1971 ou vers cette date,
en fabriquant, construisant, utilisant et vendant à d'autres
personnes pour des fins d'utilisation, lesdites inventions; les
défendeurs ont, en particulier, vendu 150 radiateurs à la
National Steel Car Company Limited à Hamilton (pour être
installés dans les wagons de chemin de fer du Canadien
National) ce qui violait le brevet n° 774,371 et les autres
brevets mentionnés, à Hamilton, Montréal et autres endroits
actuellement inconnus de la demanderesse.
Ces paragraphes et les détails en question
reviennent à accuser les défendeurs d'avoir
violé chacune des revendications du brevet de
la demanderesse en vendant les radiateurs à la
National Steel Car Company; cependant, ces
paragraphes sont trop vagues, ne donnant
aucune description succincte des brevets ni de
la partie des brevets que l'on prétend avoir été
violés, et ne précisant pas ce qui dans les radia-
teurs des défendeurs constitue une violation et
de quelle façon on pourrait y remédier.
Voici les paragraphes 7 et 7.A.1.:
[TRADUCTION] 7. M. MacDonald, vice-président de la
demanderesse, a révélé, pour son propre compte et contrai-
rement au contrat écrit passé avec la demanderesse, cer-
tains secrets commerciaux en contravention des lois en la
matière; il s'est lancé dans cette entreprise parmi d'autres,
contrairement aux usages loyaux de l'industrie et du com
merce pratiqués au Canada, comme l'énoncent les
plaidoiries.
7.A.1. La demanderesse est la première, et l'actuelle pro-
priétaire du droit d'auteur de plusieurs centaines de fabrica
tions et autres dessins, et des mémoires descriptifs et autres
dont se sont frauduleusement accaparés les défendeurs, par
eux-mêmes ou par d'autres, dans les locaux de la demande-
resse et dont le nombre précis, les descriptions et les dates
sont actuellement inconnues de la demanderesse mais con-
nues des défendeurs.
Ces paragraphes, ne donnant aucun détail sur
les secrets commerciaux que le défendeur Mac-
Donald, aurait révélés ni sur les personnes à qui
il les aurait révélés, ni sur les fabrications et
dessins précis, mémoires descriptifs et autres,
protégés par le droit d'auteur, dont il se serait
accaparé, doivent être radiés.
Le paragraphe 8 précise:
[TRADUCTION] 8. Les défendeurs ont contrefait, sur le
territoire canadien la marque de commerce de la demande-
resse «Scotch Guard» appliquée aux radiateurs de wagons
de chemin de fer (que la demanderesse a utilisée pendant au
moins 15 ans pour distinguer ces radiateurs, qu'elle fabri-
quait, de ceux des autres fabricants et que le défendeur
MacDonald lui-même, alors employé de la demanderesse, a
ainsi utilisée) depuis février 1971, en utilisant ce nom pour
des radiateurs de wagons de chemin de fer et en vendant,
distribuant et faisant de la publicité pour lesdits radiateurs
en rapport avec ladite marque de commerce.
Ce paragraphe ne nous donne cependant aucun
détail précis sur l'utilisation de la marque de
commerce «Scotch Guard» par les défendeurs,
ni sur la vente, la distribution et le lancement
publicitaire de ces radiateurs en rapport avec
cette marque de commerce qu'on allègue. C'est
pourquoi il doit également être radié.
Le paragraphe 10 précise:
[TRADUCTION] 10. Les défendeurs, poursuivant un des-
sein illégal, ont fait des offres légèrement inférieures à
celles de la demanderesse pour des travaux à effectuer, qui
impliquaient nécessairement la connaissance des renseigne-
ments confidentiels, droits d'auteur, marque de commerce,
secrets commerciaux et brevets mentionnés ci-dessus.
Ce paragraphe ne nous précise pas quels étaient
les renseignements confidentiels, droits d'au-
teur, marque de commerce, secrets commer-
ciaux et brevets, appartenant à la demande-
resse, nécessaires dans la réalisation des
travaux à effectuer en vertu desdites soumis-
sions. Il doit donc être également radié.
Le paragraphe 15 précise:
[TRADUCTION] 15. M. MacDonald, alors au service de la
demanderesse, jusqu'à la fin du mois d'avril 1971, a tou-
jours considéré comme valides les brevets qu'il avait violés
à l'occasion de la construction des appareils pour lesquels il
faisait maintenant des offres venant concurrencer celles de
la demanderesse et proclamait même, au nom de celle-ci, la
validité de ces brevets.
Ce paragraphe ne nous donne pas plus de
détails sur les brevets que M. MacDonald aurait
contrefaits. Il doit donc être radié.
Voici le paragraphe 17:
[TRADUCTION] 17. Les défendeurs, ou l'un d'entre eux,
ont présenté une demande de brevet pour des appareils
pratiquement identiques aux inventions énoncées dans les-
dits brevets, à l'exception de quelques modifications mineu-
res, reconnaissant par conséquent la validité des brevets en
question.
Ce paragraphe ne nous renseigne pas sur la
prétendue demande de brevet des défendeurs ni
sur ce qui la rendait pratiquement identique aux
inventions énoncées aux brevets de la demande-
resse et ne nous dit pas de quel brevet de la
demanderesse il s'agit. Il doit donc être aussi
radié.
Paragraphes 22 et 23:
[TRADUCTION] 22. M. MacDonald s'est approprié certains
appareils de la demanderesse, certains de leurs éléments et
descriptions, ainsi que les plans à utiliser, en effaçant le
nom de la demanderesse mais en conservant les numéros
qu'elle avait inscrits sur les pièces.
23. M. MacDonald et la Railquip, à l'insu de la demande-
resse, ont illégalement détourné de l'usine de celle-ci et
gardé au bureau de la Railquip, 11387 boulevard Gouin
ouest à Roxboro (Québec), près de 200 plans, mémoires
descriptifs et lettres, appartenant à la demanderesse, qu'ils y
détenaient le 15 juillet 1971.
Ces paragraphes ne précisent pas quels appa-
reils, éléments et descriptions, plans, mémoires
descriptifs et lettres, appartenant à la demande-
resse, dont M. MacDonald et la Railquip s'é-
taient accaparés. Ils doivent donc être radiés.
Le paragraphe 27 énonce:
[TRADUCTION] 27. Entre le moment où M. MacDonald a
essayé de se rapprocher de lui et le moment où il a finale-
ment écarté les tentatives de ce dernier, M. James a remis à
MacDonald certains papiers que le premier avait en sa
possession et dont tous les détails n'ont pas été actuelle-
ment portés à la connaissance de la demanderesse.
Ceci est encore trop vague et doit être
supprimé.
Paragraphe 30:
[TRADUCTION] 30. Depuis le 30 avril 1971, les défendeurs
ont, par des offres plus avantageuses que celles de la
demanderesse, vendu 150 radiateurs de wagon à la National
Steel Car (constructeur de wagons pour les chemins de fer
du Canadien National) violant ainsi le brevet n° 774,371
ainsi que les autres brevets précités, et procurant la somme
de $90,000; ils ont également vendu d'autres appareils,
fabriqués à partir des secrets commerciaux et autres rensei-
gnements confidentiels de la demanderesse, pour la somme
totale d'environ $260,000, par comparaison à la somme de
$289,000 que demandait la demanderesse. M. MacDonald,
alors au service de la compagnie, avait participé à l'élabora-
tion de l'offre secrète de la demanderesse.
En nous renvoyant au «brevet n° 774,371, ainsi
qu'aux autres brevets précités» tout comme en
mentionnant «les autres appareils fabriqués à
partir des secrets commerciaux et autres rensei-
gnements confidentiels», ce paragraphe ne nous
donne aucun détail sur la nature des revendica-
tions violées, contenues aux brevets, ni sur la
nature des autres appareils vendus, et ne nous
dit pas quels secrets commerciaux ou renseigne-
ments confidentiels de la demanderesse
auraient été utilisés. Il doit donc être supprimé.
Paragraphe 32:
[TRADUCTION] 32. Voici les brevets contrefaits, délivrés à
la Vapor Corporation et dûment cédés par elle à la
demanderesse:
(1) brevet no 621,537 du 6 juin 1961, sur demande datée
du 22 septembre 1958, cédé par cession enregistrée sous le
numéro 540,140.
�) brevet no 774,371 du 26 décembre 1967, sur demande
datée du 3 juin 1966, cédé par cession enregistrée sous le no
814,857.
(3) brevet no 784,491 du 7 mai 1968, sur demande datée
du 24 octobre 1966, cédé par cession enregistrée sous le n°
818,858.
Comme ce paragraphe ne fait que citer les bre-
vets, sans en donner de description succincte ou
sans nous dire quelles en sont les parties qui
auraient été violées, il doit être radié.
Les paragraphes d), e) et f) des conclusions
énonçant les revendications de la demanderesse
précisent:
[TRADUCTION] d) Remise à la demanderesse de tous les
produits actuellement en la possession ou sous le contrôle
des défendeurs, de leurs préposés, commis ou agents,
constituant les combinaisons énoncées aux revendications
desdits brevets ou représentant des éléments desdites
combinaisons.
e) Remise de tous les produits actuellement en la posses
sion ou sous le contrôle des défendeurs, de leurs prépo-
sés, commis ou agents dans la fabrication desquels la
connaissance, les renseignements, dessins ou pièces (et
tous renseignements ou autres éléments confidentiels) ont
été utilisés grâce à M. MacDonald, alors qu'il était au
service de la demanderesse.
f) Remise de tous les plans, dessins, mémoires descriptifs,
pièces ou lettres mentionnés ci-dessus, actuellement en la
possession ou sous le contrôle des défendeurs, de leurs
préposés, commis ou agents.
Ces paragraphes sont trop imprécis quant aux
renseignements, dessins, pièces, plans, mémoi-
res descriptifs, lettres et renseignements confi-
dentiels et doivent être supprimés.
En décidant de procéder à toutes ces radia
tions, je n'oublie pas pour autant la difficulté
que représentait pour la demanderesse la néces-
sité d'être précise lorsqu'elle a intenté son
action, tout particulièrement de spécifier les-
quels de ses brevets, dessins, plans, mémoires
descriptifs etc. ...les défendeurs avaient utili-
sés dans la fabrication et la vente du radiateur
en cause. Le président Jackett a esquissé cette
difficulté dans l'un des passages que j'ai cité,
extrait de l'affaire Dow Chemical (précitée).
Cependant, un interrogatoire détaillé a mainte-
nant eu lieu, bien qu'il ne soit pas encore com-
plètement terminé, et un modèle du radiateur
que les défendeurs prétendent être celui qu'ils
construisent a été produit à titre de pièce, si
bien que les agents et préposés de la demande-
resse ont maintenant eu l'occasion de l'exami-
ner en détail. La demanderesse devrait être
suffisamment informée à ce stade du procès
pour pouvoir déclarer avec précision lesquels
de ses brevets, dessins, plans et mémoires des-
criptifs le défendeur MacDonald lui aurait sous-
traits ou aurait copiés avant de quitter son
emploi, tout comme elle devrait pouvoir mainte-
nant déclarer lesquels de ces brevets, dessins,
plans et mémoires descriptifs, la défenderesse,
Railquip Enterprises Ltd., a utilisés dans la
fabrication de son radiateur. Le fait que les
défendeurs eux-mêmes ont tous ces renseigne-
ments en leur possession ne dispense pas la
demanderesse de l'obligation d'énoncer avec
précision lesquels de ces brevets, plans, mémoi-
res descriptifs, dessins, secrets commerciaux et
autres objets de litige ont été ou sont utilisés
par les défendeurs. Le défendeur MacDonald
avait le droit, après avoir quitté la compagnie
demanderesse, d'entrer en concurrence avec
elle et il faudra faire une distinction, à l'instruc-
tion, entre l'utilisation de ses connaissances
générales en la matière, qui lui appartiennent
personnellement, tout comme les plans, dessins,
mémoires descriptifs etc.. ..qu'il a réalisés
après avoir quitté la demanderesse et l'utilisa-
tion que lui ou la Railquip aurait pu faire des
plans, dessins et mémoires descriptifs sur les-
quels la demanderesse a un droit d'auteur, ou
des objets ou procédés que la demanderesse a
fait breveter. A ce stade du procès, la demande-
resse doit avoir désormais suffisamment de ren-
seignements pour lui permettre de fonder son
action sur des faits précis qui donnent ouver-
ture au droit qu'elle réclame plutôt que d'invo-
quer un préjudice vague et imprécis qui, elle
l'espère, couvrira toutes les violations qu'elle
pourrait avoir omises ou dont elle n'est pas
actuellement au courant.
J'ordonne par conséquent que:
1. Les paragraphes 3, 4, 7, 7.A.1., 8, 10, 15,
17, 22, 23, 27, 30 et 32 de la nouvelle déclara-
tion modifiée, les nouveaux détails modifiés des
violations et les paragraphes d), e), f) des con
clusions de la nouvelle déclaration modifiée de
la demanderesse, soient radiés.
2. La demanderesse est néanmoins autorisée
à demander la permission de remplacer par
d'autres plaidoiries la nouvelle déclaration
modifiée et les détails des violations qui ont été
radiés.
3. Si une telle demande n'est pas faite dans
les quatre semaines à compter de la date de la
présente ordonnance ou dans tout autre délai
que la Cour pourra accorder, les défendeurs
pourront demander le rejet de l'action.
4. Les frais de la présente demande en radia
tion sont en faveur des défendeurs, quelle que
soit l'issue de la cause.
'Voici la Règle 114(1)c) et e) mentionnée dans ce
jugement:
114.(1) La Cour peut, à tout stade de la procédure,
ordonner le rejet ou l'amendement de toute plaidoirie ou de
toute question dans une plaidoirie par le motif
c) qu'elle peut entraver ou retarder l'instruction équitable
de l'action ou lui nuire, ou
e)qu'elle constitue par ailleurs un recours abusif à des
procédures judiciaires; et elle peut ordonner que l'action
soit arrêtée ou rejetée ou que jugement soit enregistré en
conséquence, selon le cas.
La Règle 419 des nouvelles Règles contient en substance les
mêmes dispositions.
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