T-1823-13
2014 CF 1100
Guida Belo Alves (demanderesse)
c.
Procureur général du Canada (défendeur)
Répertorié : Alves c. Canada (Procureur général)
Cour fédérale, juge Heneghan—Ottawa, 22 mai et 21 novembre 2014.
Pensions — Contrôle judiciaire d’une décision de la Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (TSS) de refuser la demande d’autorisation de la demanderesse d’interjeter appel d’une décision d’un tribunal de révision déterminant qu’il n’avait pas compétence pour trancher l’affaire dont il était saisi parce qu’une décision finale avait déjà été rendue par un autre tribunal de révision à l’égard des questions soulevées — La demanderesse, gravement blessée, s’est vu refuser des prestations d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) — Le tribunal de révision a conclu que la demanderesse n’était pas incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice et qu’elle n’était donc pas invalide au sens de l’art. 42(2)a) du RPC — Les autres demandes ont été rejetées au motif que la question était chose jugée — Le TSS a rejeté la demande d’autorisation de la demanderesse d’interjeter appel de la décision du tribunal de révision au motif qu’elle n’avait pas produit de nouvelle preuve, ni souligné une erreur de fait ou de droit, ni présenté un argument ayant une chance raisonnable de succès — Il s’agissait de déterminer si le TSS a commis une erreur susceptible de contrôle en rejetant la demande d’autorisation d’interjeter appel — Le TSS n’a pas appliqué le bon critère pour évaluer la demande d’autorisation d’interjeter appel — Le critère de « cause défendable » peut être écarté par une loi — Le TSS a commis une erreur lorsqu’il a examiné la demande d’autorisation d’interjeter appel en fonction des attentes de la demanderesse au moment du dépôt de sa demande et conformément à l’art. 84(1) du RPC dans la version qui était en vigueur immédiatement avant que le TSS remplace la Commission d’appel des pensions — Le nouveau critère est d’avoir une chance raisonnable de succès, et il n’existe que trois motifs d’appel aux termes de l’art. 58 de la Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences — Le TSS était tenu d’appliquer le critère de l’art. 58 et n’avait pas le pouvoir discrétionnaire d’appliquer l’ancien critère — Il a commis une erreur en examinant la demande en fonction des attentes légitimes de la demanderesse au moment du dépôt de sa demande auprès de la Commission d’appel des pensions — La doctrine des attentes légitimes se limite aux règles de l’équité procédurale — Le législateur avait clairement pour intention d’assujettir à la nouvelle loi les affaires dont est saisi le TSS — Toutefois, l’erreur commise par le TSS en l’espèce ne constituait pas un motif suffisant pour accueillir la demande de contrôle judiciaire — Le renvoi de cette affaire au TSS afin qu’il rende une nouvelle décision n’aurait eu aucun effet pratique — La règle de la chose jugée et le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquaient en l’espèce — Demande rejetée.
Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (TSS) de refuser la demande d’autorisation de la demanderesse d’interjeter appel d’une décision d’un tribunal de révision déterminant qu’il n’avait pas compétence pour trancher l’affaire dont il était saisi parce qu’une décision finale avait déjà été rendue par un autre tribunal de révision à l’égard des questions soulevées.
La demanderesse a subi des blessures graves dans un accident de véhicule à moteur. Sa demande initiale de prestations d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) a été rejetée. En appel, un tribunal de révision du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision a conclu que la demanderesse n’était pas incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice et qu’elle n’était donc pas invalide au sens de l’alinéa 42(2)a) du RPC. Les autres demandes de prestations d’invalidité que la demanderesse a présentées en vertu du RPC ont été rejetées au motif que la question était chose jugée, le premier tribunal de révision ayant déjà rendu une décision finale à cet égard. Le TSS, qui a remplacé la Commission d’appel des pensions, a rejeté la demande d’autorisation de la demanderesse d’interjeter appel de la décision du troisième tribunal de révision au motif que la demanderesse n’avait pas produit de nouvelle preuve, ni souligné une erreur de fait ou de droit, ni présenté un argument ayant une chance raisonnable de succès.
Il s’agissait de déterminer si le TSS a commis une erreur susceptible de contrôle en rejetant la demande d’autorisation d’interjeter appel de la demanderesse.
Jugement : la demande doit être rejetée.
Le TSS n’a pas appliqué le bon critère pour évaluer la demande d’autorisation d’interjeter appel. Le critère auquel il faut satisfaire pour être autorisé à interjeter appel d’une décision a changé. Dans la mesure où le critère de « cause défendable » a été établi par des décisions des tribunaux, il peut être écarté par une loi. Le TSS a commis une erreur lorsqu’il a examiné la demande d’autorisation d’interjeter appel en fonction des attentes de la demanderesse au moment du dépôt de sa demande et conformément au paragraphe 84(1) du RPC dans la version qui était en vigueur immédiatement avant que le TSS remplace la Commission d’appel des pensions le 1er avril 2013. Conformément à l’article 58 de la Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences (LMRHDC), le facteur essentiel pour obtenir l’autorisation d’interjeter appel devant le TSS est d’avoir une chance raisonnable de succès, et il n’existe que trois motifs d’appel : un manquement au principe de justice naturelle, une erreur de droit et une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire. Ce critère est plus strict que le critère précédemment appliqué, qui n’énumérait pas de motifs d’appel. Le TSS s’est fondé à tort sur les facteurs de common law selon lesquels il faut présenter de nouveaux éléments de preuve ou démontrer une erreur de droit ou une erreur de fait importante alors qu’il était tenu d’appliquer le critère énoncé à l’article 58 de la LMRHDC. Il n’avait pas le pouvoir discrétionnaire de s’écarter de ce régime législatif et d’appliquer l’ancien critère, malgré le fait que la demanderesse avait présenté une demande d’autorisation d’interjeter appel avant l’introduction de la nouvelle loi régissant les demandes d’autorisation d’interjeter appel en vertu du RPC. Le TSS a également commis une erreur en examinant la demande de la demanderesse en fonction de ses attentes légitimes au moment du dépôt auprès de la Commission d’appel des pensions. La doctrine des attentes légitimes est un aspect de l’équité procédurale et se limite aux règles de ce principe. Personne n’a le droit acquis de se prévaloir de la loi telle qu’elle existait par le passé. En l’espèce, le législateur avait clairement pour intention d’assujettir à la nouvelle loi les affaires dont est saisi le TSS.
L’erreur commise par le TSS en l’espèce ne constituait pas un motif suffisant pour accueillir la demande de contrôle judiciaire. Le renvoi de cette affaire au TSS afin qu’il rende une nouvelle décision n’aurait eu aucun effet pratique. Si l’affaire avait été renvoyée et qu’un membre différent avait appliqué le bon critère, la demande d’autorisation d’interjeter appel aurait été rejetée, car une décision finale avait déjà été rendue à l’égard de la question de savoir si la demanderesse était invalide au sens de l’alinéa 42(2)a) du Régime. Une nouvelle évaluation de la demande d’autorisation d’interjeter appel de la demanderesse aurait également été rejetée en raison de la tentative de la demanderesse de présenter de « nouveaux faits » pour contester la conclusion selon laquelle elle n’est pas invalide. Si l’on applique la règle de la chose jugée et le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, ni la question de « l’invalidité » de la demanderesse ni celle de la considération des rapports médicaux comme des « nouveaux faits importants » ne peut être débattue à nouveau.
LOIS ET RÈGLEMENTS CITÉS
Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, art. 44c).
Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, L.C. 2012, ch. 19, art. 258(1), 260, 262.
Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34.
Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, L.C. 2005, ch. 34, art. 58 (mod. par L.C. 2012, ch. 19, art. 224).
Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18.1.
Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8, art. 42(2)a), 84(1).
Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, règle 400.
JURISPRUDENCE CITÉE
décision appliquée :
Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc., 2001 CSC 44, [2001] 2 R.C.S. 460.
décisions examinées :
Callihoo c. Canada (Procureur général), 2000 CanLII 15292 (C.F. 1re inst.); Renvoi relatif au régime d’assistance publique du Canada (C.-B.), [1991] 2 R.C.S. 525; Granovsky c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 2000 CSC 28, [2000] 1 R.C.S. 703.
décisions citées :
Belo-Alves c. Canada (Développement social), 2009 CF 413; G.B.A. c. Le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, appel CP26558, 2010 LNCCAP 125 (QL); Belon Alves c. Canada (Ressources humaines et Développement social), 2011 CAF 169; Canada (Procureur général) c. Zakaria, 2011 CF 136; Pantic c. Canada (Procureur général), 2011 CF 591; Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 R.C.S. 654; Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 R.C.S. 559; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339; Atkinson c. Canada, 2014 CAF 187, [2015] 3 R.C.F. 461; Consiglio c. Canada (Ressources humaines et Développement des compétences), 2014 CF 485; Martin c. Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines), 1999 CanLII 9245 (C.A.F.); Prebushekski c. Dodge City Auto (1984) Ltd., 2005 CSC 28, [2005] 1 R.C.S. 649; Gustavson Drilling (1964) Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1977] 1 R.C.S. 271; Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817; Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3; Lavoie c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2002 CAF 268; Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, 2003 CSC 63, [2003] 3 R.C.S. 77.
DOCTRINE CITÉE
Sullivan, Ruth. Statutory Interpretation, 2e éd. Toronto : Irwin Law, 2007.
The Oxford English Dictionary, 2e éd. vol. X, Oxford : Clarendon Press, 1989, « only ».
Demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale de refuser la demande d’autorisation du demandeur d’interjeter appel d’une décision d’un tribunal de révision déterminant qu’il n’avait pas compétence pour trancher l’affaire dont il était saisi parce qu’une décision finale avait déjà été rendue par un autre tribunal de révision à l’égard des questions soulevées. Demande rejetée.
ONT COMPARU
Guida Belo Alves pour son propre compte.
Sarah Jane Harvey pour le défendeur.
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement et du jugement rendus par
La juge Heneghan :
I. INTRODUCTION
[1] Mme Guida Belo Alves (la demanderesse) sollicite le contrôle judiciaire, en application de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 (la Loi sur les Cours fédérales), d’une décision datée du 16 juillet 2013 par laquelle une membre (la membre du TSS) de la Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (le TSS ou le Tribunal) a refusé de lui accorder l’autorisation de porter en appel une décision d’un tribunal de révision (le tribunal de révision). Dans sa décision, ce tribunal avait conclu qu’il n’était pas compétent pour entendre l’affaire qui lui était soumise, parce que les questions soulevées avaient déjà été tranchées de manière définitive par un autre tribunal de révision et que, de ce fait, le principe de la chose jugée s’appliquait.
II. LE CONTEXTE
[2] La présente affaire est longue et compliquée; elle résulte d’une série de demandes que la demanderesse a présentées en vue d’obtenir des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada (les prestations d’invalidité du RPC), en vertu de l’alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8 (le Régime). Les faits qui suivent sont tirés du dossier du tribunal ainsi que des dossiers de demande qu’ont déposés la demanderesse et le défendeur.
[3] La demanderesse travaillait auparavant comme [traduction] « coordonnatrice de systèmes » dans une entreprise de confection de robes, ainsi que comme traductrice à temps partiel pour le ministère de l’Immigration à l’aéroport de Toronto.
[4] En septembre 1988, la demanderesse a été victime d’un accident de la route dans lequel elle a subi une lésion du type « coup du lapin ». Elle est retournée au travail après l’accident, mais a eu besoin de traitements de physiothérapie.
[5] En mai 1989, la demanderesse a été une fois de plus victime d’un accident de la route, plus grave celui-là, qui lui a causé de sérieuses lésions au cuir chevelu, à la nuque, au dos, au pied et au genou gauches ainsi qu’à la main droite. Ces lésions ont entraîné des problèmes de santé récurrents chez la demanderesse, et elle ne travaille pas depuis le 6 mai 1989.
[6] La demanderesse a présenté une première demande de prestations d’invalidité du RPC le 10 octobre 1995. Le début de sa période minimale d’admissibilité (la PMA), c’est-à-dire la date à compter de laquelle elle aurait eu droit à des prestations d’invalidité du RPC en faisant la preuve qu’elle était invalide, était — et est toujours — le 31 décembre 1996.
[7] La première demande de prestations d’invalidité du RPC de la demanderesse a été rejetée le 18 décembre 1995. Dans une décision datée du 10 septembre 1997, le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences a confirmé le rejet de sa demande. La demanderesse a porté cette décision en appel devant un tribunal de révision du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision.
[8] Dans une décision datée du 25 février 1999, le tribunal de révision a rejeté l’appel de la demanderesse. Il a conclu que rien n’empêchait cette dernière d’exercer une forme quelconque d’occupation véritablement rémunératrice et qu’elle n’était donc pas invalide au sens de l’alinéa 42(2)a) du Régime. La demande d’autorisation d’interjeter appel auprès de la Commission d’appel des pensions a été rejetée.
[9] Le 20 mai 2003, la demanderesse a présenté une deuxième demande de prestations d’invalidité du RPC. Ressources humaines et Développement des compétences Canada a refusé cette deuxième demande au motif qu’il y avait chose jugée, la question ayant déjà été tranchée de manière définitive par le premier tribunal de révision.
[10] La demanderesse a présenté une demande à un deuxième tribunal de révision en vue de porter en appel le refus de sa deuxième demande de prestations d’invalidité du RPC. En même temps, elle a demandé la réouverture de son premier appel en raison de rapports médicaux supplémentaires qui, a-t-elle soutenu, soulevaient des faits nouveaux. L’audience du deuxième tribunal de révision a eu lieu le 10 mars 2005.
[11] Dans une décision datée du 12 avril 2005, le tribunal de révision a rejeté l’appel ainsi que la demande de réouverture du premier appel. Il a conclu que la question de l’admissibilité de la demanderesse à des prestations d’invalidité du RPC était chose jugée, ayant été tranchée de manière définitive dans le cadre de l’instance résultant de la première demande de la demanderesse.
[12] Pour ce qui était de la demande fondée sur des faits nouveaux, le tribunal de révision a conclu que les rapports présentés ne constituaient pas des faits nouveaux ou qu’ils avaient été établis trop longtemps après la PMA de la demanderesse, soit le 31 décembre 1996, pour qu’ils aident à évaluer quel était son état à l’époque de sa PMA.
[13] Le 19 décembre 2007, la demanderesse a présenté une demande à la Commission d’appel des pensions en vue d’obtenir une prorogation du délai prévu pour porter en appel la décision du deuxième tribunal de révision. La Commission d’appel des pensions a rejeté cette demande dans une décision datée du 1er mai 2007. La demanderesse a présenté une demande de contrôle judiciaire concernant cette décision.
[14] Le 24 avril 2009, le juge Campbell de la Cour fédérale a annulé la décision de la Commission d’appel des pensions [Belo-Alves c. Canada (Développement social), 2009 CF 413] et renvoyé l’affaire en vue d’une nouvelle décision.
[15] Le 27 mai 2009, la Commission d’appel des pensions a accordé à la demanderesse l’autorisation d’interjeter appel. Le 16 septembre 2010, la Commission d’appel des pensions a rejeté l’appel [G.B.A. c. Le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, appel CP26558, 2010 LNCCAP 125 (QL)], concluant que les preuves que la demanderesse avait présentées ne constituaient pas des « faits nouveaux ».
[16] Le 18 octobre 2010, la demanderesse a déposé auprès de la Cour d’appel fédérale un avis de demande de contrôle judiciaire concernant la décision de la Commission d’appel des pensions. Le 18 mai 2011, la Cour d’appel fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire [Belo Alves c. Canada (Ressources humaines et Développement social), 2011 CAF 169], jugeant que la Commission d’appel des pensions, dans sa décision, avait conclu de manière raisonnable que les rapports ne constituaient pas des faits nouveaux.
[17] Le 19 décembre 2005, la demanderesse a présenté une troisième demande de prestations d’invalidité du RPC, et cette demande a été rejetée dans une décision datée du 31 août 2006. La demanderesse a sollicité le réexamen du refus.
[18] Dans une décision datée du 30 janvier 2007, Ressources humaines et Développement des compétences Canada a confirmé le refus de la demande. La demanderesse a porté une fois de plus en appel la décision auprès du tribunal de révision. L’audition de ce troisième appel a été mise en suspens en attendant le règlement de divers appels liés à sa deuxième demande de prestations d’invalidité du RPC.
[19] Le 31 juillet 2012, l’audition du refus de la troisième demande de prestations d’invalidité du RPC de la demanderesse a eu lieu devant le tribunal de révision. Dans sa décision du 21 septembre 2012, ce tribunal a conclu qu’il n’était pas compétent pour examiner la totalité des preuves et substituer sa décision à celle du premier tribunal de révision. Il a conclu que la question avait déjà été tranchée et qu’elle était donc chose jugée.
[20] Le 17 décembre 2012, la demanderesse a demandé à la Commission d’appel des pensions l’autorisation de porter en appel la décision du troisième tribunal de révision.
[21] Le 1er avril 2013, le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision et la Commission d’appel des pensions ont respectivement été remplacés par le Tribunal de la sécurité sociale — Division générale et par le Tribunal de la sécurité sociale — Division d’appel. Conformément à l’article 260, qui est une disposition transitoire de la loi habilitante, soit la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, L.C. 2012, ch. 19 (la LECPD), la demande d’autorisation d’interjeter appel de la demanderesse a été traitée comme si elle avait été déposée auprès du TSS le 1er avril 2013.
[22] Le 16 juillet 2013, le TSS a rejeté la demande d’autorisation d’interjeter appel qui avait été présentée par la demanderesse.
[23] Le 8 août 2013, la demanderesse a déposé son avis de demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour d’appel fédérale. Par une ordonnance datée du 31 octobre 2013, le juge Stratas, de cette Cour, a transféré à la Cour fédérale la demande de contrôle judiciaire. Le 14 novembre 2013, le juge Roy, de la Cour fédérale, a rendu une ordonnance en vue de modifier l’intitulé de la cause.
III. LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU PRÉSENT CONTRÔLE
[24] Dans sa décision, la membre du TSS a brièvement récapitulé les instances qui ont conduit à la demande présentée par la demanderesse en vue d’obtenir l’autorisation d’interjeter appel de la décision du tribunal de révision.
[25] Conformément au paragraphe 58(2) [mod. par L.C. 2012, ch. 19, art. 224] de la Loi sur le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, L.C. 2005, ch. 34 (la LMRHDC), la membre du TSS a indiqué que la question en litige consistait à savoir si l’appel relatif à la décision du 21 septembre 2012 du tribunal de révision avait une chance raisonnable de succès.
[26] La membre du TSS a conclu que la demande serait examinée en fonction des attentes légitimes de la demanderesse à l’époque du dépôt de la demande d’autorisation auprès de la Commission d’appel des pensions. Par conséquent, la question de savoir si la demande avait une chance raisonnable de succès serait examinée comme un nouvel appel, conformément au paragraphe 84(1) du Régime, tel qu’il était libellé juste avant le 1er avril 2013.
[27] La membre du TSS a fait remarquer que le fait de produire de nouveaux éléments de preuve et de démontrer qu’une erreur de droit ou une erreur de fait importante a été commise peut dénoter qu’un appel a une chance raisonnable de succès, en invoquant à cet égard la décision Canada (Procureur général) c. Zakaria, 2011 CF 136.
[28] En réponse à l’argument de la demanderesse selon lequel son dossier n’avait pas été examiné convenablement lors d’audiences antérieures à celle du troisième tribunal de révision, la membre du TSS a conclu que les décisions des tribunaux de révision antérieurs étaient définitives et que le tribunal de révision n’était pas compétent pour examiner des questions liées à ces décisions.
[29] La membre du TSS a conclu que l’argument de la demanderesse selon lequel le troisième tribunal de révision ne lui avait pas renvoyé le dossier du tribunal de révision n’était pas un motif d’appel qui avait une chance raisonnable de succès. Elle a conclu que l’argument de la demanderesse se rapportant aux procédures administratives du processus d’appel en matière d’invalidité du Régime n’avait lui non plus aucune chance raisonnable de succès. Elle a fait remarquer que ni l’un ni l’autre des deux arguments ne présentait de nouveaux éléments de preuve, ni ne faisait état d’une erreur de fait ou de droit susceptible de contrôle que le tribunal de révision aurait commise.
[30] La membre du TSS a conclu que l’argument de la demanderesse selon lequel le tribunal de révision n’avait pas fourni un dossier complet en vue de l’audience était sans fondement. Elle a fait remarquer que les parties à une instance sont tenues de veiller à ce que le tribunal dispose de tous les documents pertinents.
[31] Enfin, la membre du TSS a examiné l’argument de la demanderesse selon lequel le tribunal de révision avait fait preuve de discrimination à son endroit ainsi qu’à l’endroit de ses enfants. Elle a conclu que les arguments de la demanderesse à l’appui de cette plainte étaient vagues et qu’ils n’avaient pas de chance raisonnable de succès. À cet égard, elle s’est fondée sur la décision Pantic c. Canada (Procureur général), 2011 CF 591.
[32] La membre du TSS a refusé la demande d’autorisation d’interjeter appel au motif que la demanderesse n’avait pas produit de nouveaux éléments de preuve, qu’elle n’avait pas fait état d’une erreur de fait ou de droit et qu’elle n’avait présenté aucun argument qui aurait une chance raisonnable de succès.
IV. LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES
[33] Les dispositions législatives qui suivent sont pertinentes dans le cas de la présente demande de contrôle judiciaire.
[34] L’alinéa 42(2)a) du Régime est libellé ainsi :
42. […] |
|
(2) Pour l’application de la présente loi : a) une personne n’est considérée comme invalide que si elle est déclarée, de la manière prescrite, atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée, et pour l’application du présent alinéa : (i) une invalidité n’est grave que si elle rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice, (ii) une invalidité n’est prolongée que si elle est déclarée, de la manière prescrite, devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès; |
Personne déclarée invalide |
[35] Les articles 260 et 262 de la LECPD est libellé ainsi :
260. Toute demande de permission d’interjeter appel présentée avant le 1er avril 2013, au titre du paragraphe 83(1) du Régime de pensions du Canada, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 229, est réputée être une demande de permission d’en appeler présentée le 1er avril 2013 à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale si aucune décision n’a été rendue relativement à cette demande. […] |
Demande d’appel — Tribunal de la sécurité sociale |
262. Les dispositions du Régime de pensions du Canada et de la Loi sur la sécurité de la vieillesse abrogées par la présente loi et leurs règlements continuent de s’appliquer, avec les adaptations nécessaires, aux appels dont un tribunal de révision ou la Commission d’appel des pensions demeure saisi au titre de la présente loi. [En caractère gras dans l’original.] |
Application continue |
[36] La LMRHDC, qui est la loi régissant le TSS, a depuis ce temps été renommée [dans L.C. 2013, ch. 40, art. 205] la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34. Toutefois, les dispositions applicables de la loi n’ont pas changé. Quoi qu’il en soit, à l’époque où la membre du TSS a rendu sa décision, le libellé des paragraphes 58(1) [mod. par L.C. 2012, ch. 19, art. 224] et 58(2) de la LMRHDC était le suivant :
58. (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants : a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence; b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. |
Moyen d’appel |
(2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. |
Critère |
V. LES QUESTIONS EN LITIGE
[37] La présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :
1. Quelle est la norme de contrôle applicable?
2. Le TSS a-t-il commis une erreur susceptible de contrôle en rejetant la demande d’autorisation d’interjeter appel de la décision du troisième tribunal de révision qu’avait présentée la demanderesse?
VI. LES OBSERVATIONS PRÉSENTÉES
A. Les observations de la demanderesse
[38] La demanderesse n’a pas présenté d’observations sur la norme de contrôle applicable.
[39] La demanderesse soutient que le TSS a commis une erreur en rejetant sa demande d’autorisation d’interjeter appel. Elle soutient qu’elle est invalide au sens de l’alinéa 42(2)a) du Régime et qu’on devrait l’autoriser à produire certains rapports médicaux qu’elle considère comme des faits nouveaux, pour qu’elle puisse démontrer qu’elle est invalide.
[40] La demanderesse prétend que ces rapports soulèvent de nouveaux faits importants qu’on n’aurait pas pu découvrir plus tôt en faisant preuve de diligence raisonnable. Elle allègue que certaines demandes d’invalidité doivent être évaluées à mesure que l’état, le traitement et le pronostic de la personne évoluent.
[41] En outre, la demanderesse fait valoir que des manquements à l’équité procédurale ont été commis. Elle ajoute que le refus d’admettre les rapports en preuve l’a privée du droit à une audience équitable.
[42] La demanderesse soutient par ailleurs que certains renseignements qu’elle a demandés au ministre et au Bureau du commissaire des tribunaux de révision n’ont pas été produits. En outre, l’état du dossier du tribunal de révision relativement à sa troisième demande de prestations d’invalidité du RPC donnait lieu à un manquement à l’équité procédurale, car les pages n’étaient pas numérotées.
B. Les observations du défendeur
[43] Le défendeur est d’avis que la norme de contrôle qui s’applique à la décision de refuser l’autorisation d’interjeter appel est la raisonnabilité.
[44] Le défendeur prétend ensuite que la question de savoir si le Tribunal a choisi le bon critère relativement à l’autorisation d’interjeter appel est elle aussi susceptible de contrôle selon la norme de la raisonnabilité. Il se fonde à cet égard sur deux arrêts : Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 R.C.S. 654, au paragraphe 30, et Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 R.C.S. 559.
[45] Le défendeur soutient que, dans le passé, le critère applicable à l’autorisation d’interjeter appel était celui de savoir s’il existait une « cause défendable ». Selon le paragraphe 58(2) de la LMRHDC, il existe un nouveau critère pour accorder cette autorisation, et il s’agit de savoir si l’appel à une « chance raisonnable de succès ». Le paragraphe 58(1) énonce expressément quels sont les motifs d’appel : le défaut d’observer un principe de justice naturelle, une erreur de droit, et une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire. Le nouveau critère n’inclut pas la présentation et l’examen de nouveaux éléments de preuve.
[46] Le défendeur ajoute que, bien que la membre du TSS semble avoir analysé la demande d’autorisation de la demanderesse en se fondant sur l’ancien critère, elle a quand même examiné dans sa décision les motifs d’appel énoncés au paragraphe 58(1) de la LMRHDC.
[47] Il soutient que le principe de la chose jugée s’applique et que la décision de la membre du TSS de refuser l’autorisation est raisonnable. De plus, la demanderesse n’a pas présenté de faits nouveaux qui justifieraient la réouverture de la décision du premier tribunal de révision, et le TSS n’est pas habilité à réexaminer les questions qui ont été soumises aux deux tribunaux de révision antérieurs ou à la Commission d’appel des pensions.
[48] De plus, le défendeur soutient que la demanderesse n’a aucune chance raisonnable de succès dans le cadre de la présente demande, car il avait été décidé lors d’instances antérieures que les éléments de preuve que la demanderesse a présentés, plus précisément les rapports des Drs Esperanca et Brock ainsi que le rapport d’analyse du sommeil, ne constituent pas des faits nouveaux. Cette question est chose jugée.
[49] Enfin, le défendeur fait valoir que la plainte de la demanderesse selon laquelle le troisième tribunal de révision ne lui a pas renvoyé le dossier du tribunal est de nature administrative, et qu’elle n’a rien à voir avec la présente demande. Cette plainte, ajoute-t-il, n’est pas un motif d’appel qui a une chance raisonnable de succès.
VII. L’ANALYSE ET LA DÉCISION
[50] Je traiterai en premier des arguments de la demanderesse à propos de l’équité procédurale. Les questions liées à l’équité procédurale sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte; voir l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, au paragraphe 43.
[51] À mon avis, il n’y a pas eu de manquement à l’équité procédurale en ce qui concerne la préparation du dossier du tribunal. Le fait que les pages de ce dossier n’étaient pas numérotées est sans importance et ne donne pas lieu à un manquement à l’équité procédurale.
[52] De plus, le fait que les documents n’ont pas été intégrés au dossier est une question liée au bien-fondé de la décision, puisqu’on a jugé que ces documents ne constituaient pas des faits nouveaux. Cette question est chose jugée. Il ne s’agit pas d’une question d’équité procédurale.
[53] J’examinerai maintenant la décision du TSS de rejeter la demande d’autorisation d’interjeter appel qu’avait présentée la demanderesse.
[54] Le TSS est un nouveau tribunal administratif fédéral qui a remplacé la Commission d’appel des pensions le 1er avril 2013, en application de l’article 260 de la LECPD.
[55] Même si le TSS est un nouveau tribunal administratif, ses fonctions sont semblables à celles de sa prédécesseure, la Commission d’appel des pensions, et cela inclut l’interprétation et l’application du Régime; voir l’arrêt Atkinson c. Canada, 2014 CAF 187, [2015] 3 R.C.F. 461.
[56] Sous le régime de la nouvelle loi, les motifs d’appel ainsi que le critère appliqué pour accorder l’autorisation d’interjeter appel ont changé; cependant, le processus à suivre pour demander cette autorisation est essentiellement semblable à celui du régime antérieur et, de ce fait, l’analyse continuera d’être la même dans le cadre du contrôle judiciaire des décisions rendues sous le nouveau régime.
[57] Dans le cadre de l’ancien régime, la Cour a conclu que le contrôle judiciaire d’une décision d’accueillir ou de rejeter une demande d’autorisation d’interjeter appel comporte un examen en deux étapes. La Cour doit, premièrement, se demander si le tribunal administratif a appliqué le bon critère et, deuxièmement, si une erreur susceptible de contrôle a été commise au moment d’établir si les exigences du critère ont été remplies; voir la décision Consiglio c. Canada (Ressources humaines et Développement des compétences), 2014 CF 485, au paragraphe 20.
[58] La première question, soit celle de savoir le bon critère a été appliqué, est susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte; voir la décision Zakaria, précitée, au paragraphe 35. La première étape ne comporte pas un examen de la décision sur le fond; voir la décision Callihoo c. Canada (Procureur général), 2000 CanLII 15292 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 15. La seconde question, soit celle de savoir si le critère a été appliqué correctement, est susceptible de contrôle selon la norme de la raisonnabilité; voir la décision Consiglio, précitée, au paragraphe 25.
[59] Je ne souscris pas aux observations du défendeur selon lesquelles la première question est susceptible de contrôle selon la norme de la raisonnabilité.
[60] Même si le fait d’accorder ou de refuser l’autorisation d’interjeter appel comporte une interprétation de la loi habilitante du TSS, la question de savoir si la membre du TSS a choisi le bon critère n’a que deux issues possibles : soit que le bon critère a été choisi, soit qu’il ne l’a pas été. L’adoption de la norme de la raisonnabilité pourrait susciter une certaine incertitude quant au critère qu’il convient d’appliquer pour décider d’accorder l’autorisation. Dans la jurisprudence antérieure, c’est la norme de la décision correcte qui a été appliquée à la question du choix du critère approprié.
[61] Je traiterai tout d’abord du fait de savoir si la membre du TSS a choisi le bon critère pour évaluer la demande d’autorisation d’interjeter appel. À mon avis, cela n’a pas été le cas.
[62] Au paragraphe 7 de la décision, la membre du TSS a déclaré :
[traduction] Pour garantir l’équité, la demande sera examinée en fonction des attentes légitimes du demandeur au moment du dépôt de sa demande d’appel devant la CAP. Pour cette raison, la décision visant à déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès sera rendue sur la base d’un appel de novo en application du paragraphe 84(1) du Régime de pensions du Canada (la Loi) dans sa version antérieure au 1er avril 2013.
[63] Le critère applicable pour ce qui est de l’autorisation d’interjeter appel selon la loi actuellement en vigueur doit être distingué des dispositions de la LMRHDC. Il est question dans la nouvelle loi d’une « chance raisonnable de succès »; voir le paragraphe 58(2) de la LMRHDC.
[64] Dans l’ancien régime, le critère avait été établi par la jurisprudence, c’est-à-dire en common law. Il obligeait l’appelant à démontrer qu’un appel soulevait une « cause défendable »; voir l’arrêt Martin c. Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines), 1999 CanLII 9245 (C.A.F.).
[65] Dans le cadre de l’ancien régime, l’appelant pouvait se fonder sur la présentation de nouveaux faits importants pour établir que sa cause était défendable. Je renvoie à la décision Callihoo, précitée, au paragraphe 15, où la Cour a déclaré :
Sur le fondement de cette jurisprudence récente, je suis d’avis que le contrôle d’une décision relative à une demande d’autorisation d’interjeter appel à la CAP donne lieu à deux questions :
1. la question de savoir si le décideur a appliqué le bon critère, c’est-à-dire la question de savoir si la demande a des chances sérieuses d’être accueillie, sans que le fond de la demande soit examiné;
2. la question de savoir si le décideur a commis une erreur de droit ou d’appréciation des faits au moment de déterminer s’il s’agit d’une demande ayant des chances sérieuses d’être accueillie. Dans le cas où une nouvelle preuve est présentée lors de la demande, si la demande soulève une question de droit ou un fait pertinent qui n’a pas été pris en considération de façon appropriée par le tribunal de révision dans sa décision, une question sérieuse est soulevée et elle justifie d’accorder l’autorisation.
[66] Le critère relatif à l’obtention de l’autorisation d’interjeter appel a changé. Le critère de la « cause défendable » peut être écarté par la loi, du fait qu’il a été établi par des décisions judiciaires. S’il y a conflit entre la loi et la common law, c’est la loi qui l’emporte; voir Ruth Sullivan, Statutory Interpretation, 2e éd. (Toronto : Irwin Law, 2007), aux pages 313 et 314.
[67] La Cour suprême du Canada a statué que rien ne justifie d’incorporer les critères prévus par la common law lorsque le législateur a clairement conçu les dispositions pour qu’elles remplacent la common law; voir l’arrêt Prebushekski c. Dodge City Auto (1984) Ltd., 2005 CSC 28, [2005] 1 R.C.S. 649, au paragraphe 37.
[68] À mon avis, la membre du TSS a commis une erreur en examinant la demande d’autorisation de la demanderesse sous l’angle des attentes qu’avait cette dernière au moment du dépôt de sa demande d’autorisation d’interjeter appel, et conformément au paragraphe 84(1) du Régime, tel qu’il était libellé juste avant le 1er avril 2013.
[69] Aux termes de l’article 260, qui est une disposition transitoire de la LECPD, il a été considéré que la demande d’autorisation d’interjeter appel de la demanderesse avait été déposée auprès du TSS le 1er avril 2013.
[70] Conformément au paragraphe 58(2) de la LMRHDC, c’est-à-dire la loi régissant les appels interjetés auprès du TSS, l’autorisation d’interjeter appel auprès de ce tribunal est refusée si l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Cela veut dire que le facteur crucial, pour ce qui est de l’obtention de l’autorisation d’interjeter appel, est la chance raisonnable de succès.
[71] Aux termes du paragraphe 58(1), il n’existe aujourd’hui que trois motifs d’appel : premièrement, un manquement à la justice naturelle, deuxièmement, une erreur de droit et, troisièmement, une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire.
[72] L’emploi du mot « seuls » au paragraphe 58(1) de la LMRHDC (« only » en anglais) signifie qu’aucun autre motif d’appel ne peut être pris en considération. Selon The Oxford English Dictionary, vol. X, 2e éd., le mot « only » désigne [traduction] « une chose ou un fait unique; personne ou rien de plus que […]. [Ce mot] peut restreindre un énoncé à une personne, une chose ou un nombre défini et unique a) contrairement à plus, ou b) par opposition à tout autre ».
[73] Selon la loi actuellement en vigueur, un appel n’a une chance raisonnable de succès que s’il repose sur l’un des trois motifs énumérés. Ce critère est plus étroit que celui que l’on appliquait antérieurement, qui n’énumérait pas de motifs d’appel. La production de nouveaux éléments de preuve n’est plus un motif d’appel, et la membre du TSS a commis une erreur en examinant la situation sous cet angle.
[74] Dans sa décision de rejeter l’autorisation d’interjeter appel, la membre du TSS n’a pas fait référence au paragraphe 58(1) de la LMRHDC. Elle s’est plutôt fondée sur les facteurs tirés de la common law que sont le fait de produire de nouveaux éléments de preuve ou de démontrer l’existence d’une erreur de droit ou d’une erreur de fait importante, comme il en a été question dans la décision Zakaria, précitée.
[75] À mon avis, la membre du TSS était tenue d’appliquer le critère énoncé à l’article 58 de la LMRHDC. Elle n’avait pas le pouvoir discrétionnaire de s’écarter de ce régime législatif et d’appliquer l’ancien critère, même si la demanderesse avait sollicité l’autorisation d’interjeter appel avant l’introduction de nouvelles dispositions législatives régissant les demandes d’autorisation d’interjeter appel dans le cadre du Régime. Je conclus qu’elle a commis une erreur en omettant d’appliquer le bon critère pour décider s’il y avait lieu d’accueillir la demande d’autorisation d’interjeter appel de la demanderesse ou non.
[76] De plus, à mon avis et indépendamment du fait qu’elle a agi par souci d’équité envers la demanderesse, la membre du TSS a commis une erreur en examinant la demande de la demanderesse en fonction des attentes légitimes que celle-ci avait au moment du dépôt de sa demande auprès de la Commission d’appel des pensions.
[77] Ce que la membre du TSS veut dire par les mots [traduction] « attentes légitimes » de la demanderesse à l’époque où celle-ci a déposé la demande d’autorisation d’interjeter appel n’est pas clair. La théorie des attentes légitimes (aussi appelée « théorie de l’expectative légitime ») est un aspect de l’équité procédurale, et elle se limite aux règles d’équité procédurale. Je me reporte à cet égard au Renvoi relatif au régime d’assistance publique du Canada (C.-B.), [1991] 2 R.C.S. 525, aux pages 557 et 558 :
La théorie de l’expectative légitime est traitée dans les motifs des juges formant la majorité dans l’affaire Assoc. des résidents du Vieux St-Boniface Inc. c. Winnipeg (Ville), [1990] 3 R.C.S. 1170. Dans ces motifs, on cite sept causes portant sur cette théorie et on ajoute ensuite (à la p. 1204) :
Le principe élaboré dans cette jurisprudence n’est que le prolongement des règles de justice naturelle et de l’équité procédurale. Il accorde à une personne touchée par la décision d’un fonctionnaire public la possibilité de présenter des observations dans des circonstances où, autrement, elle n’aurait pas cette possibilité. La cour supplée à l’omission dans un cas où, par sa conduite, un fonctionnaire public a fait croire à quelqu’un qu’on ne toucherait pas à ses droits sans le consulter.
[…]
Or, ni la jurisprudence canadienne ni celle d’Angleterre n’appuient la position suivant laquelle la théorie de l’expectative légitime peut créer des droits fondamentaux. Cette théorie fait partie des règles de l’équité procédurale auxquelles peuvent être soumis les organismes administratifs. Dans les cas où elle s’applique, elle peut faire naître le droit de présenter des observations ou d’être consulté. Elle ne vient pas limiter la portée de la décision rendue à la suite de ces observations ou de cette consultation.
[78] La Cour suprême du Canada a conclu que nul n’a le droit acquis de se prévaloir de la loi telle qu’elle existait par le passé; voir l’arrêt Gustavson Drilling (1964) Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1977] 1 R.C.S. 271, à la page 282.
[79] En l’espèce, les dispositions transitoires de la LECPD prévoient que les dispositions du Régime qui ont été abrogées par cette loi continuent de s’appliquer aux questions dont la Commission d’appel des pensions demeure saisie, c’est-à-dire les appels déposés et entendus avant le 1er avril 2013; voir le paragraphe 258(1) et l’article 262 de la LECPD. Il ressort clairement de ces dispositions que le législateur prévoyait que les questions dont le TSS était saisi seraient assujetties à la nouvelle loi. Pendant la période de transition, la Commission d’appel des pensions est demeurée assujettie à l’ancienne loi.
[80] Je signale que l’alinéa 44c) de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, prévoit que, lorsqu’un texte antérieur est abrogé et remplacé par un nouveau texte, les procédures engagées sous le régime du texte antérieur se poursuivent conformément au nouveau texte, dans la mesure de leur compatibilité avec celui-ci.
[81] À mon avis, la membre du TSS a commis une erreur en examinant la demande d’autorisation de la demanderesse sous l’angle de la théorie des attentes légitimes au moment du dépôt de cette demande. La théorie s’applique aux questions d’équité procédurale; voir l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 26. Elle ne s’applique pas à une attente ou à une expectative selon laquelle la loi ne changerait pas.
[82] La prochaine question à examiner est l’effet qu’a eu l’erreur commise par la membre du TSS dans son choix du critère. Autrement dit, cette erreur est-elle un motif suffisant pour faire droit à la présente demande de contrôle judiciaire?
[83] Au titre du paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, la réparation accordée à la suite d’une demande de contrôle judiciaire est de nature discrétionnaire; voir l’arrêt Khosa, précité, au paragraphe 40. Dans ce contexte, le mot « discrétionnaire » signifie que ce ne sont pas toutes les erreurs de droit qui se solderont par l’octroi d’une réparation à un demandeur.
[84] La Cour suprême du Canada a décrété qu’un bref de prérogative, comme infirmer la décision faisant l’objet du contrôle, peut être refusé pour cause de futilité dans des circonstances où sa délivrance ne serait d’aucune valeur ou n’aurait aucun effet pratique; voir les arrêts Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3, à la page 80, et Lavoie c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2002 CAF 268, aux paragraphes 18 et 19.
[85] À mon avis, le fait de renvoyer l’affaire au TSS en vue d’une nouvelle décision n’aura aucun effet pratique.
[86] Si l’affaire est renvoyée et si un membre différent applique le bon critère, la demande d’autorisation d’interjeter appel sera rejetée, puisqu’une décision définitive a déjà été rendue sur la question de savoir si la demanderesse est invalide au sens de l’alinéa 42(2)a) du Régime. Un nouvel examen de la demande d’autorisation d’interjeter appel sera également refusé pour une autre raison, soit la tentative de la demanderesse pour introduire des « faits nouveaux » en vue de contester la conclusion selon laquelle elle n’est pas invalide.
[87] Ces deux questions — la conclusion d’absence d’invalidité au sens du Régime et la conclusion d’absence de faits nouveaux — ont déjà été tranchées de manière définitive et sont soumises à la règle de preuve de la chose jugée ainsi qu’au droit relatif à la préclusion.
[88] L’application du principe juridique de la chose jugée signifie que la demanderesse ne dispose pas d’un motif d’appel qui aurait une chance raisonnable de succès et que ce critère est la norme applicable à laquelle elle doit satisfaire.
[89] Le principe de la chose jugée est une règle de preuve et un élément du droit de la préclusion. De façon générale, le droit de la préclusion empêche les parties d’intenter certaines actions. Le principe de la chose jugée s’entend de l’idée selon laquelle un litige, une fois qu’il a été tranché de manière définitive, ne peut pas être débattu de nouveau; voir l’arrêt Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc., 2001 CSC 44, [2001] 2 R.C.S. 460, au paragraphe 20. Quand le principe de la chose jugée s’applique, la partie est empêchée par préclusion, du fait de l’instance antérieure.
[90] Le principe de la chose jugée comporte un élément d’intérêt public, parce qu’il vise à favoriser les intérêts de la justice et à éviter les abus du processus décisionnel. Il a pour objet d’éviter les instances faisant double emploi, les résultats contradictoires éventuels et les dépens excessifs et de ne pas tracasser plusieurs fois des parties à l’égard d’une même cause; voir l’arrêt Danyluk, précité, aux paragraphes 18 à 20.
[91] Au Canada, le principe de la chose jugée se présente sous deux formes : la préclusion fondée sur la cause d’action et la préclusion découlant d’une question déjà tranchée; voir l’arrêt Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, 2003 CSC 63, [2003] 3 R.C.S. 77, au paragraphe 23.
[92] En l’espèce, le défendeur soutient que c’est la préclusion découlant d’une question déjà tranchée qui s’applique. Selon cette forme de préclusion, une fois qu’une question de fait ou de droit a été plaidée et tranchée par un décideur compétent, la décision rendue est définitive et ne peut pas être réexaminée dans le cadre d’une instance ultérieure; voir l’arrêt Danyluk, précité, aux paragraphes 24 et 25.
[93] Dans l’arrêt Danyluk, précité, au paragraphe 25, la Cour suprême du Canada a statué que les éléments de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée sont les suivants :
(1) que la même question a été décidée;
(2) que la décision judiciaire invoquée comme créant la [préclusion] soit finale; et
(3) que les parties dans la décision invoquée, ou leurs ayants droit, soient les mêmes que les parties engagées dans l’affaire où la [préclusion] est soulevée, ou leurs ayants droit.
[94] En l’espèce, deux questions ont été tranchées de manière définitive. La première est celle de l’état de la demanderesse, qui a été jugée comme non invalide pour les besoins du Régime. À cette fin, une « invalidité » signifie qu’une personne tombe sous le coup de la définition d’une « invalidité » aux termes de l’alinéa 42(2)a) du Régime. Celui-ci n’autorise pas une personne à s’autoévaluer comme « invalide ».
[95] La seconde question qui a été tranchée de manière définitive est que les rapports médicaux présentés par la demanderesse ne constituent pas des faits nouveaux importants.
[96] Si l’on applique la règle de la chose jugée et le principe de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, ni la question de l’« invalidité » de la demanderesse ni celle de considérer les rapports médicaux comme des « nouveaux faits importants » ne peuvent être plaidées de nouveau.
[97] La demanderesse souhaite obtenir des prestations d’invalidité en vertu du Régime. Je signale que ce dernier est un régime législatif qui prévoit le paiement de prestations dans des situations qui sont définies dans la loi.
[98] Conformément à l’analyse effectuée dans l’arrêt Granovsky c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 2000 CSC 28, [2000] 1 R.C.S. 703, le Régime n’est pas un régime d’aide sociale, mais plutôt un programme destiné à fournir une assurance sociale aux Canadiens admissibles qui sont privés de gains en raison, notamment, d’une « déficience ».
[99] La question de savoir si une personne est admissible ou non à des prestations d’invalidité du RPC dépend de celle de savoir si cette personne correspond à la définition de l’invalidité qui est donnée à l’alinéa 42(2)a) du Régime. Il ne s’agit pas d’un processus d’auto-évaluation. Aux termes du Régime, l’« invalidité » est déterminée par un arbitre, et la décision d’accorder des prestations d’invalidité exige que l’on se conforme aux dispositions de la loi.
[100] Selon le critère législatif de l’invalidité, la question n’est pas de savoir si un requérant a des problèmes de santé, mais plutôt s’il a une invalidité à la fois grave et prolongée, de façon à le rendre invalide au sens du Régime.
[101] Une invalidité n’est considérée comme grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice; voir le sous-alinéa 42(2)a)(i) du Régime. Une invalidité n’est considérée comme prolongée que s’il est déterminé qu’elle durera pendant une période longue, continue et indéfinie ou qu’elle entraînera vraisemblablement le décès; voir le sous-alinéa 42(2)a)(ii) du Régime. Il est nécessaire de satisfaire à ces deux éléments pour avoir droit à des prestations d’invalidité du RPC.
[102] La première décision par laquelle la demande de la demanderesse a été rejetée a été rendue le 10 décembre 1995, et il y a été conclu que cette dernière n’était pas invalide au sens du Régime, parce qu’on a jugé qu’elle était capable d’exécuter de façon régulière des travaux légers. La décision a été confirmée à la suite d’un réexamen le 10 septembre 1997. Elle a été révisée et confirmée par le premier tribunal de révision le 25 février 1999, et la demande d’autorisation d’interjeter appel de la demanderesse a été rejetée le 29 octobre 1999. C’est à ce stade que la décision portant que la demanderesse n’était pas invalide au sens du Régime est devenue définitive.
[103] La demanderesse a déposé sa deuxième demande de prestations d’invalidité du RPC le 20 mai 2003. Cette demande comportait une demande de réouverture de la décision du premier tribunal de révision pour cause de faits nouveaux, énoncés dans certains rapports médicaux. Le tribunal de révision a conclu que ces rapports ne constituaient pas des faits nouveaux. Cette conclusion a été confirmée en fin de compte en appel devant la Cour d’appel fédérale. À ce stade de l’instance, il a été décidé de manière définitive qu’il n’y avait pas de faits nouveaux.
[104] La présente instance découle de la troisième demande présentée par la demanderesse en vue d’obtenir des prestations d’invalidité du RPC. Cette demande a trait aux mêmes lésions, causées par le même accident, que celles qui ont été évaluées dans le cadre de sa première demande. Sa PMA n’a pas changé depuis le 31 décembre 1996.
[105] Cela étant, la question de savoir si la demanderesse est invalide au sens du Régime a été tranchée. La première décision, ayant été révisée et portée en appel dans le cadre de tous les processus prévus par le Régime, était définitive. Les demandes de prestations ont toutes été faites en vertu du Régime et mettaient en cause les mêmes parties, même si c’est aujourd’hui le TSS qui remplit la fonction de la Commission d’appel des pensions.
[106] Dans le même ordre d’idées, la question de savoir si les rapports médicaux présentés par la demanderesse constituaient des faits nouveaux a elle aussi été tranchée de manière définitive dans le cadre de l’instance liée à sa deuxième demande.
[107] À mon avis, la doctrine de la préclusion découlant d’une question tranchée s’applique, et l’affaire est chose jugée. Il a été conclu que la demanderesse n’était pas invalide au sens de l’alinéa 42(2)a) du Régime. Il a été conclu que les rapports supplémentaires qu’elle a présentés ne soulevaient pas de faits nouveaux dans l’instance découlant de sa deuxième demande de prestations d’invalidité du RPC.
[108] De plus, par suite des changements apportés au régime législatif, la production de faits nouveaux n’est plus un motif d’appel. La demanderesse n’a pas de motif d’appel ayant une chance raisonnable de succès, et le renvoi de l’affaire au TSS en vue d’une nouvelle décision ne fera aucune différence dans l’issue de la demande d’autorisation d’interjeter appel.
[109] Dans le cadre de l’exercice du pouvoir discrétionnaire qui me confère le paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, je refuse d’accorder une réparation pour l’erreur de droit que la membre du TSS a commise, et la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[110] Le défendeur sollicite les dépens au motif que la demanderesse a poursuivi sa demande de prestations d’invalidité du RPC dans le cadre de plusieurs instances, et ce, jusqu’au palier de la Cour d’appel fédérale.
[111] Conformément à la règle 400 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, la Cour a le pouvoir discrétionnaire de déterminer le montant des dépens. Je ne suis pas convaincue qu’il est justifié en l’espèce d’adjuger des dépens à l’encontre de la demanderesse et je ne rends aucune ordonnance quant aux dépens.
JUGEMENT
LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire que me confèrent les Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, je ne rends aucune ordonnance quant aux dépens.