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[2016] 3 R.C.F. 248

IMM-968-15

2015 CF 1415

Binder Singh (demandeur)

c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (défendeur)

Répertorié : Singh c. Canada (Citoyenneté et Immigration)

Cour fédérale, juge Annis—Toronto, 27 octobre 2015; Ottawa, 19 janvier 2016.

Citoyenneté et Immigration — Statut au Canada — Réfugiés au sens de la Convention et personnes à protéger — Contrôle judiciaire visant à obtenir une ordonnance en annulation de la décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié — Dans cette décision, la Commission a conclu que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger; il y avait absence de minimum de fondement (AMF) de sa demande au titre de l’art. 107(2) de la Loi, et il était exclu de la protection accordée aux réfugiés par application de l’art. 98 — Le demandeur a présenté une demande d’asile au Canada, mais a modifié plus tard son identité en dissimulant sa résidence antérieure aux É.-U. — Le demandeur a soutenu que la Commission n’avait pas compétence pour rendre la décision d’inclusion, étant donné que, selon la décision de la Cour fédérale dans l’arrêt Xie c. Canada (Citoyenneté et Immigration), la Commission était d’abord tenue de rendre son ordonnance d’exclusion avant de se prononcer sur les questions d’inclusion et que si une ordonnance d’exclusion était rendue, la demande d’asile faisant état de facteurs d’inclusion est rejetée, y compris la décision portant AMF — Il s’agissait de savoir si la Commission a commis une erreur en se prononçant sur les facteurs d’inclusion alors qu’elle avait conclu que le demandeur était exclu, contrairement à ce que préconise l’arrêt Xie et si, en ne se prononçant pas d’abord sur les facteurs d’exclusion et, après avoir exclu le demandeur, en statuant néanmoins sur les questions d’inclusion; ou subsidiairement, si elle n’a pas commis d’erreur en rendant les ordonnances d’exclusion et d’inclusion, si elle a eu tort de ne pas préciser que sa décision d’inclusion était rendue à titre subsidiaire — La Commission a commis une erreur en ne précisant pas que ses conclusions liées à l’inclusion étaient formulées à titre subsidiaire, et ne devaient être prises en compte que si la décision d’exclusion était subséquemment infirmée — Dès lors qu’elle conclut que le demandeur est exclu, la Commission ne doit pas aborder les questions concernant l’inclusion tant que la conclusion d’exclusion n’a pas été infirmée — L’obligation de statuer prioritairement sur la question de l’exclusion par rapport à celle du droit d’asile est d’ailleurs implicitement étayée par d’autres dispositions de la Loi — De plus, la décision portant AMF ne peut avoir le moindre effet puisqu’elle a été rejetée par l’ordonnance d’exclusion dans le contexte de la demande d’asile (art. 112(3)c)) — La décision portant AMF n’est pas une décision indépendante, mais elle n’est pertinente qu’au regard de la demande d’inclusion — Les décisions d’inclusion de la Commission, et en particulier la décision portant AMF, ne pouvaient être invoquées pour empêcher le demandeur de porter la décision de la Commission en appel devant la Section d’appel des réfugiés — L’économie des ressources judiciaires n’est pas pertinente dans les affaires d’exclusion et d’interdiction de territoire de ressortissants étrangers — Par conséquent, la Commission a commis une erreur en se prononçant sur la question de l’inclusion après avoir conclu que le demandeur était exclu — La Commission a aussi outrepassé sa compétence en statuant sur les facteurs d’inclusion à titre subsidiaire, quels qu’aient été ses motifs, y compris l’économie des ressources judiciaires — Une question quant au pouvoir de la Commission de rendre des décisions portant AMF après avoir tiré une conclusion d’exclusion a été certifiée — Demande accueillie.

Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire visant à obtenir une ordonnance en annulation d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Dans cette décision, la Commission a conclu que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger; il y avait absence de minimum de fondement (AMF) de sa demande au titre du paragraphe 107(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, et qu’il était exclu de la protection accordée aux réfugiés par application de l’article 98 de la Loi.

Le demandeur, un citoyen indien, a présenté une demande d’asile au Canada, mais n’a jamais révélé qu’il avait résidé ailleurs qu’en Inde. À l’aéroport, le demandeur s’est identifié comme « Binder Singh », mais il n’avait pas de passeport. Cependant, il a présenté plusieurs autres documents corroborant cette identité et censés avoir été délivrés par les autorités indiennes. Le défendeur est intervenu dans l’affaire et a déposé des éléments de preuve selon lesquels le demandeur avait résidé aux É.-U., qu’il y avait été arrêté pour comportement obscène impliquant un mineur, qu’il avait fait l’objet d’une mesure de renvoi, qu’il avait échappé à sa garde, et qu’il avait été finalement expulsé en Inde. Par la suite, le demandeur a modifié son formulaire « Fondement de la demande d’asile » (FDA), changeant son identité ainsi que sa date de naissance. La Commission a, entre autres, conclu que le fait que le demandeur ait admis l’infraction sexuelle commise contre un enfant, infraction aggravée par le fait qu’il s’est indûment fait passer pour un mineur lorsqu’il a été accusé, donnait des raisons sérieuses de penser qu’il avait commis un grave crime de droit commun hors du pays d’asile. La Commission a donc conclu que le demandeur était exclu de la protection des réfugiés aux termes de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. En plus de la conclusion d’exclusion, la Commission a estimé que le demandeur n’avait pas fourni assez d’éléments crédibles ou dignes de foi pour étayer ses allégations suivant lesquelles il était exposé à un risque grave de préjudice équivalant à de la persécution en Inde ou que, selon la prépondérance des probabilités, il serait personnellement exposé à une menace à sa vie ou à un risque de torture ou de traitement ou peine cruels et inusités. Enfin, la Commission a conclu à l’absence de minimum de fondement (AMF) de la demande d’asile du demandeur, conformément au paragraphe 107(2) de la Loi. Le demandeur a le droit d’interjeter appel de la décision d’exclusion de la Commission devant la Section d’appel des réfugiés (SAR) aux termes de l’article 110 de la Loi.

Le demandeur a fait valoir que la Commission n’avait pas compétence pour rendre la décision d’inclusion, affirmant que la décision de la Cour fédérale dans l’arrêt Xie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) et les nombreuses décisions dans lesquelles il a été appliqué appuient la proposition voulant que la Commission soit d’abord tenue de rendre son ordonnance d’exclusion avant de se prononcer sur les questions d’inclusion. Il a déclaré que si une ordonnance d’exclusion est rendue, la demande d’asile faisant état de facteurs d’inclusion est rejetée conformément au paragraphe 112(3) de la Loi, y compris la décision portant AMF, en vertu de quoi la décision de la Commission se résume à la décision d’exclusion.

Il s’agissait de savoir si la Commission a commis une erreur en se prononçant sur les facteurs d’inclusion alors qu’elle avait conclu que le demandeur était exclu, contrairement à ce que préconise l’arrêt Xie et si, en ne se prononçant pas d’abord sur les facteurs d’exclusion et, après avoir exclu le demandeur, en statuant néanmoins sur les questions d’inclusion; ou subsidiairement, si elle n’a pas commis d’erreur en rendant les ordonnances d’exclusion et d’inclusion, si elle a eu tort de ne pas préciser que sa décision d’inclusion était rendue à titre subsidiaire.

Jugement : la demande doit être accueillie.

La Commission a commis une erreur en ne précisant pas que ses conclusions liées à l’inclusion étaient formulées à titre subsidiaire, et ne devaient être prises en compte que si la décision d’exclusion était subséquemment infirmée. Dès lors que la Commission conclut que le demandeur est exclu, elle ne doit pas aborder les questions concernant l’inclusion tant que la conclusion d’exclusion n’a pas été infirmée. Cela s’explique par le fait qu’au moment où la Commission rend la décision d’exclusion, la demande de protection est rejetée (paragraphe 112(3) de la Loi). Qui plus est, cette décision ne peut avoir ni effet ni incidence sur la question de la protection, sans quoi il y aurait empiétement sur le pouvoir exclusif du défendeur de statuer sur la protection au titre de l’alinéa 113d) de la Loi, ce qu’interdit spécifiquement l’arrêt Xie. Compte tenu de l’arrêt Xie et du courant jurisprudentiel qui s’y rattache, la Cour fédérale pouvait faire droit à la demande à cette étape. Cependant, une telle décision ne rendrait pas justice aux observations du défendeur.

L’obligation de statuer prioritairement sur la question de l’exclusion par rapport à celle du droit d’asile est d’ailleurs implicitement étayée par d’autres dispositions de la Loi. De plus, au terme de l’audience qui s’est déroulée devant la Commission, la décision portant AMF ne peut avoir le moindre effet puisqu’elle a été rejetée par l’ordonnance d’exclusion dans le contexte de la demande d’asile (alinéa 112(3)c) de la Loi). La décision portant AMF n’est pas une décision indépendante et elle n’est pertinente qu’au regard de la demande d’inclusion. Elle ne peut être rendue qu’à titre complémentaire à l’égard d’une demande d’asile faisant état de facteurs d’inclusion, et ayant été rejetée aux termes des paragraphes 107(1) et (2) de la Loi. Les décisions portant AMF n’ont aucune pertinence pour les décisions d’exclusion et restent provisoires dans l’éventualité où l’ordonnance d’exclusion serait infirmée à l’avenir. Elles ne peuvent être invoquées pour refuser au demandeur le droit d’interjeter appel de la décision d’exclusion devant la Section d’appel des réfugiés. Par conséquent, les décisions d’inclusion de la Commission, et en particulier la décision portant AMF en l’espèce, ne peuvent être invoquées pour empêcher de porter la décision de la Commission en appel devant la Section d’appel des réfugiés.

En dépit du fait que les raisons pratiques et d’économie judiciaire sont importantes et qu’elles constituent le fondement de la jurisprudence favorable à ce que la Commission se prononce sur les facteurs d’inclusion dans la foulée d’une décision portant exclusion du demandeur d’asile, l’économie des ressources judiciaires n’est pas une considération pertinente dans les affaires d’exclusion et d’interdiction de territoire de ressortissants étrangers. Le législateur a décidé de ne pas adopter le modèle du décideur unique aux larges attributions qui statue sur toutes les questions pertinentes, à titre subsidiaire lorsqu’il est pratique de le faire, pour ce qui est du droit d’un individu de rester au Canada.

En conclusion, la Commission a commis une erreur en se prononçant sur la question de l’inclusion après avoir conclu que le demandeur était exclu. La Commission a aussi outrepassé sa compétence en statuant sur les facteurs d’inclusion à titre subsidiaire, quels qu’aient été ses motifs, y compris l’économie des ressources judiciaires. Une question quant au pouvoir de la Commission de rendre des décisions portant AMF après avoir tiré une conclusion d’exclusion a été certifiée.

LOIS ET RÈGLEMENTS CITÉS

Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18.1(3)b).

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, art. 72(1),(2)a), 74d), 96, 97, 98, 101, 105, 107(1),(2), 107.1, 110, 112(3), 113.

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, art. 225(1), 226(1).

TRAITÉS ET AUTRES INSTRUMENTS CITÉS

Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 28 juillet 1951, [1969] R.T. Can. no 6, Art. 1Fb).

JURISPRUDENCE CITÉE

DÉCISIONS NON SUIVIES :

Ezokola c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 662, [2011] 3 R.C.F. 377; Rathinasigngam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 988; Alemu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 997; Zoya c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 16634 (C.F. 1re inst.); Freitas c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 C.F. 432 (1re inst.); Brzezinski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 4 C.F. 525 (1re inst.); Cordon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1998 CanLII 7746 (C.F. 1re inst.).

DÉCISIONS APPLIQUÉES :

Xie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 250, [2005] 1 R.C.F. 304; Han c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 432; Muchai c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 944; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Cadovski, 2006 CF 364.

DÉCISION EXAMINÉE :

Gonzalez c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 3 C.F. 646 (C.A.).

DÉCISION CITÉE :

Pembina Institute for Appropriate Development c. Canada (Procureur général), 2008 CF 302.

DEMANDE de contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié ayant conclu, entre autres, que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger et qu’il était exclu de la protection accordée aux réfugiés par application de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Demande accueillie.

ONT COMPARU

Asiya Hirji pour le demandeur.

Martin Anderson pour le défendeur.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Mamann, Sandaluk & Kingwell, LLP, Toronto, pour le demandeur.

Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement et du jugement modifiés rendus par

Le juge Annis :

I.          Aperçu

[1]        La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR ou la Loi) et visant à obtenir une ordonnance en annulation de la décision dans laquelle la Section de la protection des réfugiés (la SPR ou la Commission) a tiré les trois conclusions suivantes : le demandeur n’est ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger; il y a absence de minimum de fondement (AMF) de sa demande au titre du paragraphe 107(2) de la Loi, et il est exclu de la protection accordée aux réfugiés par application de l’article 98.

[2]        La question au cœur de la présente affaire est de savoir si la Cour a compétence pour statuer sur la présente demande de contrôle judiciaire (DCJ) de la décision de la SPR. Le demandeur soutient que, lorsqu’elle rend une ordonnance d’exclusion fondée sur l’article 98 de la Loi, la SPR n’a plus compétence pour se prononcer sur le statut de réfugié du demandeur ou pour conclure à l’absence de minimum de fondement de la demande (conjointement, la décision d’inclusion), et qu’elle a eu tort de le faire (Xie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 250, [2005] 1 R.C.F. 304 (Xie)).

[3]        Le demandeur a le droit d’interjeter appel de la décision d’exclusion de la SPR devant la Section d’appel des réfugiés (SAR) aux termes de l’article 110. Comme la SPR n’a pas compétence pour rendre la décision d’inclusion, qui pourrait autrement faire l’objet d’un contrôle judiciaire puisque la conclusion AMF empêche d’interjeter appel devant la SAR (alinéa 110(2)c)), il n’y a aucune décision légale pouvant donner lieu à une demande de contrôle judiciaire (DCJ).

[4]        Cependant, sur la base de l’alinéa 18.1(3)b) de la Loi sur les Cours fédérales [L.R.C. (1985), ch. F-7], le demandeur cherche à obtenir l’ordonnance réparatrice suivante, qui lui paraît conforme au régime législatif de la LIPR et propre à favoriser l’efficacité du processus décisionnel administratif. L’ordonnance sollicitée n’annulerait pas nécessairement la décision d’inclusion, mais la maintiendrait comme une conclusion subsidiaire de la SPR, car elle pourrait être utile si l’ordonnance d’exclusion était annulée et l’affaire renvoyée à la SPR. Voici les mesures de réparation sollicitées par le demandeur :

i)          que la décision soit renvoyée au même commissaire;

ii)         qu’aucune audience ne soit tenue et que le commissaire rejette la demande au motif que le demandeur est exclu pour les raisons déjà fournies;

iii)        que toute conclusion d’inclusion déjà énoncée soit maintenue à titre strictement subsidiaire et ne porte pas préjudice au droit d’appel du demandeur devant la SAR;

iv)        que le demandeur puisse interjeter appel devant la SAR à partir de la date de la publication de la nouvelle décision de la SPR.

[5]        Le défendeur affirme que, malgré l’arrêt Xie, la SPR a compétence pour trancher toutes les questions, sauf celles qui touchent à l’irrecevabilité et aux demandes d’extradition (articles 101 et 105). Lorsqu’il intervient pour demander une ordonnance d’exclusion au titre de l’article 98 de la Loi, le ministre défendeur [traduction] « ne conteste pas la compétence » de la SPR. La Commission n’est pas tenue de rendre ses décisions dans un ordre précis. Elle peut statuer en premier lieu sur les demandes de protection présentées au Canada, ce qui inclut les décisions dans lesquelles la SPR conclut à l’absence d’un minimum de fondement de la demande. Comme sa conclusion AMF fait partie de la décision d’inclusion, au titre de l’alinéa 110(2)c) de la Loi, les ordonnances d’inclusion et d’exclusion de la SPR ne peuvent être portées en appel devant la SAR ― à cause de la conclusion AMF. Je rejette également cet argument, car je conclus que l’alinéa 110(2)c) ne saurait s’appliquer pour soustraire la décision d’exclusion de la SPR à un appel devant la SAR.

II.         Contexte et décision contestée

[6]        Le 19 mai 2014, le demandeur, un citoyen indien, est entré au Canada où il a présenté une demande d’asile au point d’entrée en omettant de révéler qu’il avait résidé ailleurs qu’en Inde.

[7]        Le demandeur a déclaré qu’il craignait son ancien collègue et son frère. Après une série d’événements, il a quitté l’Inde avec l’aide d’un agent et est arrivé le 19 mai 2014 au Canada où il a présenté sa demande d’asile.

[8]        Au point d’entrée, il s’est identifié comme « Binder Singh », né le 16 mai 1979. Il n’avait pas de passeport, mais a présenté plusieurs autres documents corroborant cette identité et censés avoir été délivrés par les autorités indiennes. Ceux-ci comprenaient une carte du ministère de l’Impôt sur le revenu, un permis de conduire, une carte d’identité de la commission électorale indienne ainsi qu’une carte délivrée par l’autorité du gouvernement indien chargée de l’identification unique.

[9]        Le demandeur a également fourni à la Commission plusieurs autres documents confirmant son identité après avoir soumis son formulaire « Fondement de la demande d’asile » (FDA). Ceux-ci incluaient une carte de rationnement, un certificat de mariage portant le nom et la date de naissance (DDN) susmentionnés, ainsi que les certificats de naissance de ses deux enfants mineurs, sur lesquels « Binder Singh » figurait comme nom du père. Il a également soumis deux autres déclarations sous serment jointes à des dossiers médicaux d’après lesquelles il était connu en Inde, et après son arrivée au Canada, sous le nom de « Binder Singh ». Ces derniers documents indiquaient également que sa DDN était le 16 mai 1979.

[10]      Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration est intervenu, d’abord en déposant des éléments de preuve documentaire, puis en personne à l’audience, pour interroger le demandeur et présenter des observations orales concernant l’applicabilité de la section Fb) de l’article premier de la Convention des Nations Unies relative au statut de réfugié [28 juillet 1951, [1969] R.T. Can. no 6] [Convention sur les réfugiés], ainsi que l’identité du demandeur et la crédibilité de ses allégations.

[11]      La preuve soumise par le ministre a été reçue le 8 juillet 2014 et contenait notamment les résultats d’un contrôle biométrique provenant des registres d’immigration américains et établissant que le demandeur :

•           avait résidé illégalement aux États-Unis entre 1995 et 2007;

•           a été arrêté le 25 septembre 1998 au New Jersey pour comportement obscène puis condamné à une peine de probation;

•           a fait l’objet d’une mesure de renvoi des États-Unis prise par un juge d’immigration par contumace, le 24 novembre 1998;

•           a échappé à sa garde, mais a été appréhendé le 20 août 2007;

•           a été expulsé en Inde en novembre 2007.

[12]      Après avoir été informé des résultats du contrôle biométrique américain, le demandeur a modifié son formulaire FDA, le 27 août 2014, et indiqué que son nom était « Ravinder Singh » et que sa date de naissance était le 17 mai 1981 plutôt que le 16 mai 1979, se rajeunissant ainsi de deux ans.

[13]      La SPR a noté que le seul document officiel fourni par le demandeur dans lequel il était désigné comme « Ravinder Singh » était le relevé d’empreintes digitales délivré par le FBI le 18 août 2014. Le document précisait qu’il avait été arrêté aux États-Unis à deux reprises, en 1998 puis en 2007, et que les empreintes digitales fournies correspondaient à celle d’un homme répondant au pseudonyme de « Binder Singh » ayant encore une autre DDN : le 17 mai 1979.

[14]      La Commission a conclu que le demandeur était « Binder Singh », né le 16 mai 1979, comme il l’avait déclaré initialement, et non « Ravinder Singh », né le même jour en 1981.

[15]      S’agissant de la condamnation de 1998, le demandeur a été arrêté au New Jersey le 25 septembre de cette année-là pour [traduction] « contact sexuel criminel avec une personne mineure » et a été placé en détention dans un établissement pour mineurs. Comme il était censé être né en 1981, son dossier a été instruit comme s’il était mineur et il a été condamné à une peine de probation pour comportement obscène.

[16]      Les documents indiquent que le demandeur avait déjà fait l’objet d’une mesure de renvoi des États-Unis et qu’il avait échappé à sa garde le 24 novembre 1998; il n’a été appréhendé que le 20 août 2007, après quoi il a été expulsé.

[17]      La SPR a conclu qu’il existait de sérieuses raisons de penser que le demandeur avait commis un parjure en faisant croire au juge américain qui avait prononcé sa peine qu’il n’avait que 17 ans, d’après sa fausse DDN en 1981.

[18]      La SPR a noté que, même s’il n’a pas explicitement reconnu que le demandeur devait être exclu au titre de la section Fb) de l’article premier [de la Convention], son conseil n’a pas vraiment répondu aux observations du ministre, sinon pour évoquer les facteurs aggravants et atténuants.

[19]      La SPR a conclu que le demandeur avait admis l’infraction sexuelle commise contre un enfant, infraction aggravée par le fait qu’il s’est indûment fait passer pour un mineur lorsqu’il a été accusé, ce qui donnait des raisons sérieuses de penser qu’il avait commis un grave crime de droit commun hors du pays d’asile. La SPR a donc conclu que le demandeur était exclu de la protection des réfugiés aux termes de l’article 98 de la Loi.

[20]      En plus de la conclusion d’exclusion, la SPR a estimé que le demandeur n’avait pas fourni assez d’éléments crédibles ou dignes de foi pour étayer ses allégations suivant lesquelles il était exposé à un risque grave de préjudice équivalant à de la persécution en Inde ou que, selon la prépondérance des probabilités, il serait personnellement exposé à une menace à sa vie ou à un risque de torture ou de traitement ou peine cruels et inusités.

[21]      Enfin, la Commission a conclu à l’absence de minimum de fondement de la demande d’asile du demandeur, conformément au paragraphe 107(2) de la Loi.

III.        Dispositions législatives

[22]      Les dispositions suivantes, pertinentes en l’espèce, sont jointes en annexe à la présente décision : alinéas 72(2)a), 110(2)c), 112(3)b) , 112(3)c) et 113d), paragraphe 107(2) et article 98 de la LIPR; alinéa 18.1(3)b) de la Loi sur les Cours fédérales.

IV.       Questions à trancher

[23]      La question centrale en l’espèce est de savoir si la Cour a compétence pour procéder au contrôle judiciaire de la décision de la SPR, ou si l’alinéa 72(2)a) de la Loi l’en empêche parce que le demandeur a le droit d’interjeter appel de la décision de la SPR devant la SAR.

[24]      La question ci-dessus soulève les sous-questions suivantes, telles qu’elles sont formulées par le demandeur :

i)          La Commission a-t-elle commis une erreur en se prononçant sur les facteurs d’inclusion alors qu’elle avait conclu que le demandeur était exclu, contrairement à ce que préconise l’arrêt Xie?

ii)         Comme corollaire à la question précédente, la Commission a-t-elle commis une erreur :

a)         en ne se prononçant pas d’abord sur les facteurs d’exclusion et, après avoir exclu le demandeur, en statuant néanmoins sur les questions d’inclusion; ou subsidiairement,

b)         si elle n’a pas commis d’erreur en rendant les ordonnances d’exclusion et d’inclusion, a-t-elle eu tort de ne pas préciser que sa décision d’inclusion était rendue à titre subsidiaire pour des raisons pratiques conformément à l’arrêt Gonzalez c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 3 C.F. 646 (C.A.) (Gonzalez), afin d’échapper à l’obligation de tenir une autre audience, au cas où une cour de justice conclurait que l’exclusion avait été invoquée à tort?

[25]      La SPR n’a formulé ni commentaires ni conclusions quant à ces questions.

V.        Norme de contrôle

[26]      La question de savoir quel est le recours approprié au titre de la LIPR relativement à une décision de la SPR, un appel à la SAR ou une demande de contrôle judiciaire, et les autres questions concernant la compétence de la Cour, doivent être examinées suivant la norme de la décision correcte, d’autant qu’il ne convient de faire preuve d’aucune retenue à l’égard d’une décision de la SPR qui n’a pas abordé ces questions.

VI.       Analyse

A.        Question 1 : La Commission a-t-elle commis une erreur en se prononçant sur les questions d’inclusion alors qu’elle avait conclu que le demandeur était exclu, contrairement à ce que préconise l’arrêt Xie?

[27]      Dans cette partie de l’analyse, la Cour reconnaît que l’arrêt Gonzalez expose bien le droit en vertu duquel la SPR peut se prononcer à la fois sur les questions d’exclusion et d’inclusion. Cependant, il est impossible dans le cadre de l’analyse concernant la première question de fond de ne pas conclure implicitement que la SPR a commis une erreur en ne précisant pas que ses conclusions liées à l’inclusion étaient formulées à titre subsidiaire, et ne devaient être prises en compte que si la décision d’exclusion était subséquemment infirmée. La question de l’obligation de formuler une telle précision intéresse le fond, et l’analyse des deux autres questions.

[28]      Le demandeur fait valoir que la SPR n’avait pas compétence pour rendre la décision d’inclusion. Il affirme que l’arrêt Xie et les nombreuses décisions dans lesquelles il a été appliqué appuient la proposition voulant que la SPR soit d’abord tenue de rendre son ordonnance d’exclusion avant de se prononcer sur les questions d’inclusion. Si une ordonnance d’exclusion est rendue, la demande d’asile faisant état de facteurs d’inclusion est rejetée conformément au paragraphe 112(3), y compris la décision portant AMF, en vertu de quoi la décision de la SPR se résume à la décision d’exclusion. En l’absence de décision portant AMF, le demandeur a le droit d’interjeter appel de la décision de la SPR devant la SAR. Par conséquent, la Cour fédérale ne peut pas procéder au contrôle judiciaire de la décision de la SPR au titre de l’alinéa 72(2)a) de la Loi, puisqu’il existe un droit d’appel devant la SAR qui n’a pas été exercé.

[29]      L’argument du demandeur relativement aux deux sous-questions susmentionnées repose sur la prémisse voulant que la décision d’exclusion entraîne le rejet de toute décision d’inclusion de la SPR, puisque la décision d’exclusion prive le demandeur de tout droit à un jugement lui octroyant le droit d’asile. Les paragraphes 27 et 28 des observations du demandeur décrivent la logique qui sous-tend sa position, qui renvoie aux compétences concurrentes dont pourraient relever les questions de protection si la SPR était autorisée à rendre une décision d’inclusion :

La CISR et le ministre sont chacun responsables de catégories spécifiques et distinctes d’individus invoquant un risque. Les domaines distincts de compétence à cet égard sont hermétiques et mutuellement exclusifs. Pour ne citer qu’un exemple, la CISR ne peut instruire la demande de protection d’un individu visé par une mesure de renvoi (par. 99(3) de la LIPR) alors que le ministre saisi d’un ERAR ne peut instruire que la demande de protection de l’individu visé par une mesure de renvoi (par. 112(1) de la LIPR).

Le législateur a clairement indiqué, par l’art. 98 et l’al. 112(2)b.1) de la LIPR, que l’exclusion au titre de la section Fb) de l’article premier de la Convention relative au statut des réfugiés opère une telle division entre la compétence de la CISR et celle du ministre. L’article 98 de la LIPR prive la CISR de la compétence d’accorder une protection à quiconque est exclu au titre de cette disposition, aussi convaincante ou méritoire que puisse être sa demande. En même temps, l’alinéa 112(2)b.1) de la LIPR accorde au ministre le pouvoir d’examiner cette même demande de protection en première instance dans le cadre de l’ERAR. Le législateur a même dispensé les personnes exclues par la CISR aux termes de la section Fb) de l’article premier de l’interdiction d’ERAR d’une durée d’un an, ce qui confirme l’idée que ces demandes doivent toujours être instruites en première instance par le ministre et non par la CISR […]

[30]      Comme je l’ai mentionné, le demandeur cite l’arrêt Xie de la Cour d’appel fédérale et les décisions dans lesquelles cet arrêt est ensuite appliqué. Les extraits pertinents de la décision du juge Pelletier (aux paragraphes 36 à 38) dans l’affaire Xie sont les suivants (c’est moi qui souligne) :

À mon avis, ces deux questions reposent sur la prémisse que l’application de l’exclusion équivaut à une décision définitive de renvoi. Ainsi que notre examen de l’économie de la Loi l’a démontré, l’exclusion n’a pas pour objet d’expulser des demandeurs du Canada. Elle vise à les empêcher de bénéficier du droit d’asile. Les demandeurs qui sont exclus en vertu de l’article 98 conservent leur droit de revendiquer la protection prévue à l’article 112.

S’ils sont retenus, les arguments formulés par l’appelante sur la question de la pondération, tant en ce qui concerne le type d’infraction qui donne lieu à l’application de l’exclusion qu’en ce qui a trait au risque de torture en cas de retour au pays d’origine, auraient pour effet de soustraire les demandeurs au volet ERAR en conférant à la Section de la protection des réfugiés le pouvoir discrétionnaire de trancher des questions que la Loi a expressément réservées au ministre. Les motifs que peut invoquer une personne pour se voir reconnaître la qualité de personne à protéger par la Section de la protection des réfugiés sont les mêmes que ceux que peut faire valoir le demandeur débouté qui présente une demande de protection au ministre. La seule différence est que le ministre peut tenir compte de la question de savoir si l’octroi de la protection à l’intéressé constituerait un danger pour le public ou mettrait en danger la sécurité du Canada. Ce sont là des facteurs dont la Section de la protection des réfugiés ne tient pas compte. Du point de vue de l’interprétation des lois, il n’y a aucune raison de croire que les décisions que seul le ministre peut prendre devraient pour une raison ou pour une autre être déférées à la Section de la protection des réfugiés dès lors qu’il existe un risque de torture.

Ce qui nous amène à la question de savoir si l’arrêt Suresh exige une interprétation différente de la Loi. Je tiens à souligner que la question relative à l’arrêt Suresh ne se pose qu’à ce moment-ci parce qu’ayant conclu que l’exclusion s’appliquait, la Commission s’est ensuite demandée si la demanderesse risquait d’être torturée si elle devait retourner en Chine. À mon avis, la Commission a outrepassé son mandat en décidant de se prononcer sur les risques de torture auxquels serait exposée l’appelante en cas de retour en Chine, et j’estime que le ministre n’est pas lié par cette conclusion. Dès lors qu’elle avait conclu que l’exclusion s’appliquait, la Commission avait fait tout ce qu’elle devait faire pour l’appelante et elle ne pouvait rien faire de plus pour elle. L’appelante était dès lors exclue du droit à l’asile, une question qui relevait de la compétence de la Commission, et son seul recours était de présenter une demande de protection, une question qui ressortissait au ministre. Les conclusions de la Commission au sujet des risques de torture de l’appelante étaient gratuites et constituaient un empiétement sur les attributions du ministre.

[31]      L’arrêt Xie a été appliqué à d’innombrables occasions. Dans la décision Han c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 432 (Han), au paragraphe 40 de sa décision, la juge Layden-Stevenson a interprété cet arrêt comme obligeant la SPR à « trancher la question de l’exclusion d’un demandeur du statut de réfugié avant de traiter du bien-fondé de sa demande. Une fois que la Commission conclut qu’un demandeur est exclu de la protection accordée aux réfugiés, elle ne peut et ne doit rien faire de plus ». De même, dans les décisions Muchai c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 944 (Muchai), au paragraphe 12, et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Cadovski, 2006 CF 364 (Cadovski), aux paragraphes 1 et 2, les juges Hughes et O’Reilly ont dit que, dès lors qu’elle conclut que le demandeur est exclu, la Commission ne doit pas aborder les questions concernant l’inclusion. Compte tenu de l’arrêt Xie et de ces décisions, la Cour peut faire droit à la demande sur ce point, mais une telle décision ne rendrait pas justice aux observations du défendeur.

[32]      Le défendeur tente d’établir une distinction entre la présente espèce et l’arrêt Xie et le courant jurisprudentiel qui s’y rattache au motif que dans ces décisions, c’était le ministre qui défendait sa compétence de statuer sur la question de la protection au titre de l’alinéa 113d). En l’espèce, le ministre ne craint pas d’empiétement sur sa compétence en cette matière. D’après ce que comprend la Cour, le ministre cherche plutôt à invoquer l’ordonnance d’inclusion, et en particulier la décision portant AMF, pour conférer à la Cour fédérale la compétence de procéder au contrôle judiciaire de l’ordonnance d’exclusion de la SPR. Si la Cour exerce cette compétence et n’infirme pas la décision de la SPR, l’affaire peut être déférée au délégué du ministre pour qu’il examine la question de la protection, sans qu’il soit nécessaire d’interjeter appel de la décision d’exclusion devant la SAR. Le ministre paraît donc vouloir favoriser l’économie des ressources judiciaires en évitant des procédures futiles.

[33]      La Cour voit évidemment d’un bon œil tout argument visant à favoriser l’économie des ressources judiciaires. Cependant, je ne pense pas que cette observation permette d’éviter le problème qui surviendrait si le ministre plaçait son agent d’ERAR [examen des risques avant renvoi] (l’agent) dans la situation délicate et potentiellement embarrassante d’avoir à rendre une décision identique ou différente quant à l’applicabilité de l’article 97, au regard de celle de la SPR.

[34]      Si l’agent rend la même décision, certains craindront que la décision de la SPR soit simplement mise en application. Une décision contradictoire serait autrement plus embarrassante et aboutirait à deux décisions intéressant globalement les mêmes faits et la même norme juridique, mais dont les issues seraient différentes. Dans un cas comme dans l’autre, c’est le type de situations que l’arrêt Xie cherchait à éviter en reconnaissant la compétence exclusive du délégué du ministre de statuer sur la question de la protection et en empêchant du coup la SPR de rendre toute décision d’inclusion lorsqu’elle conclut que le demandeur d’asile est exclu.

[35]      L’obligation de statuer prioritairement sur la question de l’exclusion par rapport à celle du droit d’asile est d’ailleurs implicitement étayée par d’autres dispositions de la Loi. Le demandeur fait remarquer plus haut dans l’extrait de son mémoire que le législateur a dispensé certaines personnes exclues par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (C.I.S.R.) au titre de la section Fb) de l’article premier [de la Convention sur les réfugiés] de l’interdiction d’un an relative à l’ERAR, ce qui confirme que de telles demandes devaient toujours être instruites en première instance par le ministre et non la C.I.S.R.

[36]      Il est également significatif que le demandeur susceptible d’être un jour renvoyé à cause d’une décision d’exclusion soit visé par une mesure d’expulsion qui l’oblige à obtenir une autorisation écrite s’il veut revenir au Canada après son renvoi (paragraphe 226(1) du Règlement [Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227]). Le demandeur d’asile débouté est normalement visé par une mesure d’exclusion, qui ne rend nécessaire l’autorisation de retour que durant l’année qui suit son exécution (paragraphe 225(1) du Règlement). Il existe donc une raison logique pour ne pas aborder les questions de protection des réfugiés devant la SPR au titre des articles 96 et 97 lorsque la Loi établit que le ministre doit statuer sur la question ultérieure de la protection au regard de facteurs d’un autre ordre et de conséquences plus graves pour le demandeur.

[37]      Si je comprends bien l’argument du défendeur, l’arrêt Xie n’interdisait pas de rendre une décision subsidiaire quant à l’inclusion une fois que l’exclusion a été prononcée contre le demandeur. Le ministre ajoute que dans l’arrêt Xie, la Cour n’a pas précisé quand et dans quel ordre les décisions d’inclusion et d’exclusion devaient être rendues. De plus, le ministre fait valoir que la Cour d’appel fédérale a entériné la pratique de la SPR consistant à examiner les questions d’inclusion et d’exclusion dans le cadre de la demande d’asile, et cite l’arrêt Gonzalez à l’appui de cet argument.

[38]      Dans l’arrêt Gonzalez, la Cour d’appel a conclu que la Commission pouvait rendre une décision d’exclusion puis entreprendre de trancher les questions d’inclusion aux fins pratiques d’éviter d’avoir à renvoyer l’affaire en vue d’une autre audition complète, si la cour devait conclure que l’exclusion avait été invoquée à tort. Le juge Mahoney a déclaré ce qui suit [aux pages 657 et 658] :

À mon avis, rien dans la Loi ne permet à la section du statut de réfugié d’apprécier la sévérité de la persécution potentielle au regard de la gravité de la conduite qui l’a amenée à conclure qu’il s’agissait d’un crime visé par la section Fa) de l’article premier. L’exclusion de la section Fa) de l’article premier fait, en vertu de la loi, partie intégrante de la définition. Quel que soit par ailleurs le bien-fondé de sa revendication, le demandeur ne peut aucunement être un réfugié au sens de la Convention si l’exclusion s’applique.

À mon avis, l’une ou l’autre voie est exempte d’erreur de droit mais il serait souhaitable, pour des raisons pratiques, que la section du statut de réfugié traite dans sa décision de tous les éléments d’une revendication. Si, en l’absence d’erreur susceptible d’examen, elle devait décider que, n’eût été l’exclusion, la revendication était mal fondée, il ne serait pas nécessaire, contrairement à ce qui s’est passé dans l’arrêt Moreno, de renvoyer l’affaire pour une nouvelle audition dans le cas où le tribunal conclurait que l’exclusion a été invoquée à tort. Par contre, si elle devait décider, comme dans les arrêts Ramirez et Sivakumar, que la revendication aurait été bien fondée n’eût été l’application de la clause d’exclusion mais qu’à la différence de ces arrêts, il était jugé en appel que la section avait commis une erreur en appliquant cette clause, le tribunal ferait alors la déclaration nécessaire mais sans exiger que la section du statut se saisisse à nouveau de l’affaire. Les contribuables apprécieraient peut-être l’économie ainsi réalisée. [Non souligné dans l’original.]

[39]      L’arrêt Gonzalez doit être interprété dans son contexte législatif. À l’époque, aucune disposition de la loi ne prévoyait la prise en compte des besoins de protection d’un demandeur d’asile qui aurait été exclu de la protection accordée aux réfugiés. La phrase soulignée dans le deuxième paragraphe de la décision précitée le montre clairement. En fait, la Cour d’appel a indiqué qu’il fallait pondérer les besoins de protection du demandeur avec les motifs de l’exclusion; elle a déclaré [à la page 656] :

[traduction] L’article 1F exclut les « personnes » et non les « réfugiés » de la protection de la Convention, laissant ainsi croire que la question du bien-fondé de la crainte de persécution n’est pas pertinente et qu’il n’y a pas lieu de l’examiner s’il existe des « raisons sérieuses de penser » qu’un individu est visé par ces dispositions. En pratique, il peut rarement ne pas être tenu compte de la revendication du statut de réfugié car il faut aussi établir une pondération entre la nature de l’infraction reprochée et le degré de persécution appréhendée. La personne qui craint avec raison de subir des persécutions de nature à mettre sa vie ou sa liberté en danger ne devrait être exclue que pour des motifs très sérieux. Si le degré de persécution appréhendée est moindre, la nature du ou des crimes en cause doit être appréciée pour voir si, de fait, la moralité criminelle du requérant empêche de le considérer comme un réfugié de bonne foi. [Non souligné dans l’original.]

[40]      Ce sont probablement des commentaires comme ceux du juge Mahoney dans cette affaire qui ont amené à prendre également en compte les besoins de protection des demandeurs d’asile exclus, tel que le prévoit l’article 113 de la Loi.

[41]      Par conséquent, l’arrêt Gonzalez, à supposer qu’il soit juste, ne peut s’appliquer qu’à la question de savoir si la SPR pouvait à bon droit examiner et trancher les questions d’exclusion comme d’inclusion en vue d’économiser les ressources judiciaires. Autrement, je conviens avec le demandeur que cet arrêt ne peut être concilié avec l’arrêt Xie (qui lui est postérieur) que s’il est interprété de manière à ne pas revenir sur le principe suivant lequel la décision d’exclusion empêche tout recours ou demande efficace à l’égard des décisions d’inclusion tant que la conclusion d’exclusion n’a pas été infirmée.

[42]      Cela s’explique par le fait qu’au moment où la SPR rend la décision d’exclusion, la demande de protection est rejetée (paragraphe 112(3)). Qui plus est, cette décision ne peut avoir ni effet ni incidence sur la question de la protection, sans quoi il y aurait empiétement sur le pouvoir exclusif du ministre de statuer sur la protection au titre de l’alinéa 113d), ce qu’interdit spécifiquement l’arrêt Xie.

[43]      Cela signifie que la décision portant AMF — en admettant aux fins de la discussion que la SPR puisse dans une même affaire rendre une décision d’inclusion et d’exclusion pour les raisons de commodité énoncées dans l’arrêt Gonzalez — peut aussi bien n’avoir qu’un effet futur, à condition que la décision d’exclusion soit infirmée d’une manière ou d’une autre. Mais le bon recours (c.-à-d. un appel devant la SAR ou une DCJ devant la Cour fédérale) doit être déterminé sur la base des conclusions de la SPR et non de l’éventualité que la décision d’exclusion soit annulée dans le cadre d’une future DCJ.

[44]      Au terme de l’audience qui s’est déroulée devant la SPR, la décision portant AMF — la seule composante de la décision d’inclusion qui soit pertinente en l’espèce — ne peut avoir le moindre effet puisqu’elle a été rejetée par l’ordonnance d’exclusion dans le contexte de la demande d’asile (alinéa 112(3)c) : « il a été débouté de sa demande d’asile au titre de la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés ») (non souligné dans l’original).

[45]      Je tiens à souligner que la décision portant AMF n’est pas une décision indépendante. Elle n’est pertinente qu’au regard de la demande d’inclusion et ne peut être rendue qu’à titre complémentaire à l’égard d’une demande d’asile faisant état de facteurs d’inclusion, et ayant été rejetée aux termes des paragraphes 107(1) et (2), reproduits ci-après. Je souligne le mot « demande » dans ces dispositions puisqu’il restreint la portée des décisions portant AMF aux demandes d’asile :

Décision

107 (1) La Section de la protection des réfugiés accepte ou rejette la demande d’asile selon que le demandeur a ou non la qualité de réfugié ou de personne à protéger.

Preuve

(2) Si elle estime, en cas de rejet, qu’il n’a été présenté aucun élément de preuve crédible ou digne de foi sur lequel elle aurait pu fonder une décision favorable, la section doit faire état dans sa décision de l’absence de minimum de fondement de la demande. [Non souligné dans l’original.]

[46]      Par conséquent, les décisions portant AMF n’ont aucune pertinence pour les décisions d’exclusion et, dans le meilleur des cas, restent provisoires dans l’éventualité où l’ordonnance d’exclusion serait infirmée à l’avenir. Elles ne peuvent être invoquées pour refuser au demandeur le droit d’interjeter appel de la décision d’exclusion devant la SAR.

[47]      Compte tenu de mon raisonnement ci-dessus, je suis convaincu que les décisions d’inclusion de la SPR, et en particulier la décision portant AMF, ne peuvent être invoquées pour empêcher de porter la décision de la SPR en appel devant la SAR. Je conclus que la Commission a commis une erreur en statuant sur la question de l’inclusion sans indiquer qu’elle le faisait à titre subsidiaire en cas de rejet futur de l’ordonnance d’exclusion.

B.        Question 2 : la Commission a-t-elle commis une erreur

1)         en ne se prononçant pas d’abord sur la question d’exclusion et, après avoir exclu le demandeur, en statuant néanmoins sur les questions d’inclusion; ou subsidiairement,

2)         si elle n’a pas commis d’erreur en rendant les ordonnances d’exclusion et d’inclusion, a-t-elle eu tort de ne pas préciser que sa décision d’inclusion était rendue à titre subsidiaire pour des raisons pratiques conformément à l’arrêt Gonzalez, afin d’échapper à l’obligation de tenir une autre audience, au cas où une cour de justice conclurait que l’exclusion avait été invoquée à tort?

[48]      J’ai déjà indiqué que, pour autant que l’arrêt Gonzalez s’applique, la SPR doit clairement indiquer dans ses motifs, si elle s’est prononcée sur les facteurs d’exclusion et d’inclusion, que la décision d’inclusion n’a aucun effet à moins que la décision d’exclusion ne soit annulée, attendu que celle-ci exclut le demandeur de la protection accordée aux réfugiés. Elle contreviendrait autrement aux principes qui sous-tendent l’arrêt Xie.

[49]      Je pense qu’il est plus pertinent de se demander si, compte tenu de cet arrêt, la SPR peut tirer une conclusion d’inclusion, même si elle précise que cette conclusion [traduction] « sera sans effet tant que la décision d’exclusion n’est pas annulée ». Je souscris aux observations du demandeur voulant qu’il faille favoriser un appel devant la SAR puisqu’il permet un réexamen plus large et plus exhaustif que ne le fait une DCJ. En particulier, il est possible de présenter de nouveaux éléments de preuve devant la SAR, laquelle instruit l’appel sous la forme d’un examen de novo restreint. Le réexamen de la décision de la SPR offre ainsi plus de souplesse qu’une DCJ, qui suppose l’application de la norme de la raisonnabilité. La voie du contrôle judiciaire priverait donc le demandeur de recours qui protégeraient mieux ses droits.

[50]      Un certain nombre de décisions sont favorables à ce que la SPR se prononce sur les facteurs d’inclusion dans la foulée d’une décision portant exclusion du demandeur d’asile, pour des raisons « pratiques » et d’« économie judiciaire » : Ezokola c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 662, [2011] 3 R.C.F. 377, aux paragraphes 109 et 110; Rathinasigngam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 988, au paragraphe 48; Alemu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 997, au paragraphe 42; Zoya c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 16634 (C.F. 1re inst.), aux paragraphes 12 à 14; Freitas c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 C.F. 432 (1re inst.); Brzezinski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 4 C.F. 525 (1re inst.), à la page 542; et Cordon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1998 CanLII 7746 (C.F. 1re inst.).

[51]      Je ne souscris pas à ces décisions. Je conclus que les décisions Han, Muchai et Cadovski, précitées, illustrent fidèlement le raisonnement tenu par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Xie. Je rappelle que ces décisions obligent la SPR à trancher d’abord la question de l’exclusion avant d’examiner la demande d’asile, et si le demandeur d’asile est exclu de la protection des réfugiés, la SPR ne peut et ne doit rien faire d’autre.

[52]      Le courant jurisprudentiel découlant de la décision Han respecte la prémisse qui sous-tend l’arrêt Xie et suivant laquelle le régime de la LIPR vise à ce que deux décideurs ne puissent rendre des décisions incompatibles ou identiques, de manière subsidiaire ou autre, relativement à la même question et aux mêmes faits. Une fois le demandeur d’asile exclu ou déclaré interdit de territoire, la Loi prévoit que le ministre seul doit décider s’il a besoin de protection.

[53]      Bien que je convienne absolument qu’il faut favoriser davantage l’« économie des ressources judiciaires », il semble que cette considération ne soit pas pertinente dans les affaires d’exclusion et d’interdiction de territoire de ressortissants étrangers. Le législateur a décidé de ne pas adopter le modèle du décideur unique aux larges attributions qui statue sur toutes les questions pertinentes, à titre subsidiaire lorsqu’il est pratique de le faire, pour ce qui est du droit d’un individu de rester au Canada, tel qu’il se rencontre en droit du travail ou en d’autres matières civiles. En fait, ce domaine abonde en décideurs multiples aux attributions similaires, qui rendent souvent des décisions identiques en substance, mais dans des champs de compétence exclusifs, comme en l’espèce, ce qui entraîne de trop nombreux contrôles judiciaires, avec tous les retards et coûts que ce régime suppose. Tel est le choix du législateur. Il n’appartient pas aux tribunaux d’introduire la notion d’« économie des ressources judiciaires » dans les procédures prescrites alors que la Loi la rejette.

VII.      Conclusion

[54]      Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la Commission a commis une erreur en se prononçant sur la question de l’inclusion après avoir conclu que le demandeur était exclu. La Commission a aussi outrepassé sa compétence en statuant sur les facteurs d’inclusion à titre subsidiaire, quels qu’aient été ses motifs, y compris l’économie des ressources judiciaires.

[55]      Conformément à la décision rendue par la juge Tremblay-Lamer dans Pembina Institute for Appropriate Development c. Canada (Procureur général), 2008 CF 302, j’infirme la décision de la Commission pour ce qui est de ses conclusions relatives à l’inclusion concernant la demande d’asile du demandeur aux termes des articles 96 et 97, ainsi que sa conclusion quant à l’absence de minimum de fondement au titre du paragraphe 107(2).

[56]      Cela étant, mon ordonnance est la suivante :

i)          je renvoie la décision au même commissaire;

ii)         j’ordonne qu’aucune audience ne soit tenue et que le commissaire rejette la demande au motif que le demandeur est exclu pour les raisons susmentionnées;

iii)        j’ordonne que la date à partir de laquelle le demandeur pourra interjeter appel devant la SAR soit celle de la publication de la nouvelle décision de la SPR.

VIII.     Question à certifier

[57]      Les parties conviennent qu’une question doit être certifiée en l’espèce. J’estime que la question proposée par le défendeur satisfait aux exigences de l’alinéa 74d) de la Loi, en ce qu’il s’agit d’une question grave de portée générale.

[58]      La seule différence entre les questions proposées par les parties est que le demandeur s’est opposé à l’expression « à titre subsidiaire ». Il a plaidé pour qu’elle soit supprimée, car la SPR n’avait pas rendu sa décision d’inclusion à titre subsidiaire. J’estime que la question a été soulevée de manière implicite et qu’elle concerne d’ailleurs un sujet sur lequel les décisions de la Cour contiennent des avis contradictoires. La Cour certifie la question suivante en vue d’un appel :

Compte tenu du pouvoir conféré à la SPR aux termes du paragraphe 107(2) et de l’article 107.1 de la LIPR de déterminer qu’une demande d’asile n’a pas de fondement crédible ou qu’elle est manifestement infondée, est-il interdit à la SPR de rendre une telle décision après avoir conclu que le demandeur d’asile est exclu au titre de la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés, ou de le faire à titre subsidiaire?

[59]      La demande de contrôle judiciaire est accueillie et une question est certifiée en vue d’un appel.

JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

i)          les décisions de la Commission concernant la demande d’asile du demandeur rendues aux termes des articles 96 et 97, ainsi que sa conclusion quant à l’absence d’un minimum de fondement au titre du paragraphe 107(2), sont infirmées;

ii)              la décision est renvoyée au même commissaire;

iii)        aucune audience ne sera tenue, et la Commission doit rejeter la demande au motif que le demandeur est exclu pour les raisons susmentionnées;

iv)        la date à partir de laquelle le demandeur peut interjeter appel devant la SAR sera celle de la publication de la nouvelle décision de la SPR.

ANNEXE A

Alinéas 72(2)a), 110(2)c), 112(3)b), 112(3)c) et 113d), paragraphe 107(2) et article 98 de la LIPR.

Demande d’autorisation

72 (1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est, sous réserve de l’article 86.1, subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

Application

(2) Les dispositions suivantes s’appliquent à la demande d’autorisation :

a) elle ne peut être présentée tant que les voies d’appel ne sont pas épuisées;

[…]

Exclusion par application de la Convention sur les réfugiés

98 La personne visée aux sections E ou F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés ne peut avoir la qualité de réfugié ni de personne à protéger.

[…]

107 […]

Preuve

(2) Si elle estime, en cas de rejet, qu’il n’a été présenté aucun élément de preuve crédible ou digne de foi sur lequel elle aurait pu fonder une décision favorable, la section doit faire état dans sa décision de l’absence de minimum de fondement de la demande.

[…]

110 […]

Restriction

(2) Ne sont pas susceptibles d’appel :

[…]

c) la décision de la Section de la protection des réfugiés rejetant la demande d’asile en faisant état de l’absence de minimum de fondement de la demande d’asile ou du fait que celle-ci est manifestement infondée;

[…]

112 […]

Restriction

(3) L’asile ne peut être conféré au demandeur dans les cas suivants :

[…]

b) il est interdit de territoire pour grande criminalité pour déclaration de culpabilité au Canada pour une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou pour toute déclaration de culpabilité à l’extérieur du Canada pour une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans;

c) il a été débouté de sa demande d’asile au titre de la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés;

[…]

Examen de la demande

113 Il est disposé de la demande comme il suit :

[…]

d) s’agissant du demandeur visé au paragraphe 112(3) — sauf celui visé au sous-alinéa e)(i) ou (ii) —, sur la base des éléments mentionnés à l’article 97 et, d’autre part :

(i) soit du fait que le demandeur interdit de territoire pour grande criminalité constitue un danger pour le public au Canada,

(ii) soit, dans le cas de tout autre demandeur, du fait que la demande devrait être rejetée en raison de la nature et de la gravité de ses actes passés ou du danger qu’il constitue pour la sécurité du Canada.

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