A-7-02
2002 CAF 184
Le procureur général du Canada (demandeur)
c.
McNally Construction Inc. et ABCO Industries Limited (défenderesses)
et
Le Tribunal canadien du commerce extérieur (intervenant)
Répertorié: Canada (Procureur général) c. McNally Construction Inc. (C.A.)
Cour d'appel, juges Stone, Sexton et Sharlow, J.C.A.-- Ottawa, 17 avril et 9 mai 2002.
Droit administratif -- Contrôle judiciaire -- Norme de contrôle -- Le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) a jugé que l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) et l'Accord sur les marchés publics (AMP) s'appliquent à un marché public portant sur un bateau patrouilleur propulsé par réaction -- La détermination de la norme de contrôle se fait selon l'analyse «pragmatique et fonctionnelle» -- La Loi ne contient pas de clause privative, ce qui indique que la Cour doit faire preuve d'une retenue moindre à l'égard des décisions du TCCE -- La question essentielle porte sur l'interprétation des mots «marchés de construction et de réparation des navires» dans les exclusions de l'ALÉNA et de l'AMP -- Depuis 1994, le TCCE a acquis une expertise spécialisée considérable dans l'interprétation des accords commerciaux et des questions touchant les marchés publics -- Compte tenu des différents facteurs, la norme du «caractère manifestement déraisonnable» est appropriée.
Commerce intérieur -- Contrôle judiciaire d'une décision du TCCE portant que l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) et l'Accord sur les marchés publics(AMP) s'appliquent à un marché public portant sur un bateau patrouilleur propulsé par réaction -- Dans l'application de la norme de contrôle du caractère manifestement déraisonnable, seule la décision clairement irrationnelle, c'est-à-dire, de toute évidence non conforme à la raison, est annulée -- Le TCCE n'a pas commis d'erreur en tenant compte de diverses définitions et de l'objet des dispositions sur les marchés publics de l'ALÉNA et de l'AMP -- L'interprétation donnée par le TCCE des exclusions relatives à la construction et la réparation des navires dans l'ALÉNA et l'AMP n'était pas manifestement déraisonnable.
Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) statuant que l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) et l'Accord sur les marchés publics (AMP) s'appliquent au marché public conclu par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (MTPSG) au nom du ministère des Pêches et des Océans, visant un bateau patrouilleur propulsé par réaction destiné à être utilisé dans les eaux côtières des provinces Maritimes. La défenderesse McNally Construction Inc., soumissionnaire non retenu, a déposé une plainte auprès du TCCE alléguant que le MTPSG, en contravention de l'ALÉNA et de l'AMP, n'avait pas attribué le marché conformément aux critères indiqués dans les documents d'appel d'offres. Le MTPSG a soutenu que l'invitation à soumissionner entrait dans la portée de l'exclusion spécifique pour les marchés de construction et de réparation des navires dans l'ALÉNA et l'AMP, de sorte que le marché public n'était soumis qu'aux dispositions de l'Accord sur le commerce intérieur (ACI). Après avoir déterminé que le terme «navire» avait un sens large et un sens étroit, le TCCE a décidé de résoudre le problème d'interprétation en choisissant la définition qu'il jugeait la plus conforme à l'objet des dispositions sur les marchés publics de l'ALÉNA et de l'AMP. Il a donc adopté le sens étroit du mot «navire», comme «tout gros bâtiment de mer», ce qui donne à entendre qu'il est destiné à traverser la mer et qu'il fait de longs voyages par opposition à un navire de cabotage, un bateau servitude ou une embarcation fluviale. Il a conclu que le bateau de patrouille n'est pas un navire et que le marché public n'est pas un marché «de construction de navires» au sens de l'ALÉNA et de l'AMP. Il a donc jugé qu'il avait compétence pour connaître de la plainte non seulement aux termes de l'ACI mais aussi aux termes de l'ALÉNA et de l'AMP. Le TCCE est l'organe canadien compétent à l'égard des contestations ayant trait aux marchés publics du gouvernement fédéral dans le cadre du chapitre 10 de l'ALÉNA depuis le 1er janvier 1994, dans le cadre de l'ACI depuis le 1er juillet 1995 et dans le cadre de l'AMP, depuis le 1er janvier 1996. Selon l'article 11 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics, le TCCE doit «déterminer si le marché public a été passé conformément aux exigences» de l'ALÉNA, de l'ACI ou de l'AMP.
Les questions en litige sont: 1) la norme de contrôle que la Cour doit appliquer pour l'examen de la décision du Tribunal statuant que le marché public en cause n'était pas exclu du champ d'application de l'ALÉNA et de l'AMP; 2) si le Tribunal a commis une erreur dans l'interprétation des termes «les marchés de construction et de réparation des navires» dans les exclusions de l'ALÉNA et «construction navale et réparations de navires» dans les exclusions de l'AMP.
Jugement: la demande doit être rejetée.
1) Traditionnellement, l'analyse commence par classer la décision examinée soit comme une décision au sujet de la compétence, soit comme une décision portant sur une matière relevant de la compétence. La norme applicable à une décision au sujet de la compétence est celle de la «décision correcte» tandis que la norme applicable à une décision portant sur une matière relevant de la compétence est celle du «caractère manifestement déraisonnable». Le TCCE interprétait certaines formulations des accords commerciaux pour déterminer si le marché public en cause était couvert par les exclusions relatives à la construction et la réparation de navires. Il en résultait une incidence sur la compétence, puisque le TCCE ne pouvait appliquer l'ALÉNA et l'AMP au marché public en cause avant de décider d'abord que les exclusions relatives à la construction et la réparation de navires ne s'appliquaient pas. La détermination de la norme doit se faire selon une démarche «pragmatique et fonctionnelle», qui exige qu'on tienne compte de divers facteurs. De façon générale, ces facteurs sont: l'objet de la loi et de la disposition en cause, le texte de cette disposition et des clauses privatives prévues par la loi constituant le tribunal administratif, la nature de la décision rendue par le tribunal et l'expertise relative de celui-ci sur ces questions par rapport à celle des tribunaux judiciaires. La Loi ne contient pas de clause privative. Pris isolément, ce facteur indique que la Cour doit faire preuve d'une retenue moindre, plutôt que plus grande, à l'égard de la décision du TCCE. On ne trouve pas d'indications dans le dossier sur les raisons justifiant ces exclusions. À première vue, les exclusions semblent rendre l'ALÉNA et l'AMP non applicables à un marché public pour la construction ou la réparation de tout navire, sans égard à sa taille et au fait qu'il soit destiné à naviguer en haute mer. La question essentielle porte donc sur l'interprétation des mots «marchés de construction et de réparation des navires» et «construction navale et réparations de navires» dans les exclusions de l'ALÉNA et de l'AMP respectivement. Le critère de l'expertise du tribunal administratif et la nature de la question sont étroitement interreliés. L'expertise relative du tribunal administratif est le facteur le plus important à examiner pour arrêter la norme de contrôle applicable. Depuis 1994, le TCCE a acquis une expertise spécialisée considérable en ce qui concerne l'interprétation des accords commerciaux en cause. Compte tenu des différents facteurs, particulièrement la nature de la question et l'expertise du TCCE en matière commerciale, la norme du «caractère manifestement déraisonnable», appelant une retenue plus grande, a été adoptée. Une décision est «manifestement déraisonnable» si elle est «clairement irrationnelle, c'est-à-dire, de toute évidence non conforme à la raison».
2) Le TCCE n'a pas commis une erreur en tenant compte des différentes définitions de «construction de navires» et de «navire» ainsi que de l'objet des dispositions sur les appels d'offres de l'ALÉNA et de l'AMP pour interpréter la formulation des exclusions. La façon dont les exclusions sont formulées a amené le TCCE à penser qu'elles ne visent pas à s'appliquer à toute embarcation qui pourrait en théorie correspondre à une définition large des termes, mais seulement à un gros bâtiment de mer construit ou réparé dans le cadre d'un marché public attribué par le gouvernement fédéral.
Aucun élément du dossier dont était saisi le TCCE n'indique que les exclusions relatives à la construction et la réparation des navires devaient s'appliquer, selon l'intention du Canada, aux «navires» dans l'acception large du terme. On ne trouve dans le dossier aucun élément de preuve sur l'historique des négociations qui éclairerait la portée des exclusions en cause ou qui permettrait de conclure qu'il y ait eu une intention d'établir la réciprocité avec les États-Unis, qui ont adopté des mesures pour protéger leurs branches de la construction et de la réparation de navires et ont exclu une bonne partie de ces activités de l'ALÉNA. L'interprétation donnée par le TCCE des exclusions relatives à la construction et la réparation des navires dans l'ALÉNA et l'AMP n'était pas manifestement déraisonnable.
lois et règlements
Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d'Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique, le 17 décembre 1992, [1994] R.T. Can. no 2, art. 1015(4)d), 1017, Annexe 1001.1b-1, art. 5h), Annexe 1001b-2, art. J019, Annexe 1001.2b.
Accord sur le commerce intérieur, Gazette du Canada, Partie I, vol. 129, n 17 (29 avril 1995), art. 506(6). |
Accord sur les marchés publics, Annexe 4 de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, signé à Marrakech, le 15 avril 1994, art. XIII(4)c). |
Jones Act, 46 U.S.C., §. 688 (1994). |
Loi de mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange nord-américain, L.C. 1993, ch. 44. |
Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, L.C. 1996, ch. 17. |
Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce, L.C. 1994, ch. 47. |
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 28(1)e) (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 8). |
Loi sur la marine marchande au Canada, L.R.C. (1985), ch. S-9, art. 2, «navire», 673. |
Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 47, art. 30.1 (édicté par L.C. 1993, ch. 44, art. 44; 1994, ch. 47, art. 39), 30.11 (édicté par L.C. 1993, ch. 44, art. 44), 30.13 (édicté, idem), 30.14(2) (édicté, idem), 30.15(2) (édicté, idem). |
Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 70(1)b) (mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 13). |
Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics, DORS/93-602 (mod. par DORS/95-300, art. 2), art. 3(1) (mod. par DORS/96-30, art. 2), 7(1) (mod. par DORS/95-300, art. 7; 96-30, art. 5), 11 (mod., idem, art. 8). |
Règlement sur les voyages de cabotage, en eaux intérieures et en eaux secondaires, C.R.C., ch. 1430, art. 4(3). |
jurisprudence
décisions appliquées:
Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982; (1998), 160 D.L.R. (4th) 193; 11 Admin. L.R. (3d) 1; 43 Imm. L.R. (2d) 117; 226 N.R. 201; motifs modifiés [1998] 1 R.C.S. 1222; (1998), 11 Admin. L.R. (3d) 130; Canada (Procureur général) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1993] 1 R.C.S. 941; (1993), 101 D.L.R. (4th) 673; 11 Admin. L.R. (2d) 59; 93 CLLC 14,022; 150 N.R. 161.
distinction faite d'avec:
Canada (Sous-ministre du Revenu national -- M.R.N.) c. Mattel Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 100; (2001), 199 D.L.R. (4th) 598; 29 Admin. L.R. (3d) 56; 12 C.P.R. (4th) 417; 270 N.R. 153.
décisions citées:
U.E.S., Local 298 c. Bibeault, [1988] 2 R.C.S. 1048; (1988), 35 Admin. L.R. 153; 89 CLLC 14,045; 95 N.R. 161; 24 Q.A.C. 244; Syndicat des employés de production du Québec et de l'Acadie c. Conseil canadien des relations du travail, [1984] 2 R.C.S. 412; (1984), 14 D.L.R. (4th) 457; 55 N.R. 321; 14 Admin. L.R. 72; 84 CLLC 14,069; Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2002), 208 D.L.R. (4th) 107; 18 Imm. L.R. (3d) 93; 280 N.R. 268 (C.S.C.); Cougar Aviation Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernmentaux) (2000), 26 Admin. L.R. (3d) 30; 264 N.R. 49 (C.A.F.); Profac Facilities Management Services Inc. c. FM One Alliance Corp. (2001), 19 B.L.R. (3d) 1 (C.A.F.); Halifax Longshoremen's Assn., section locale 269 c. Offshore Logistics Inc. (2000), 25 Admin. L.R. 224; 257 N.R. 338 (C.A.F.); Syndicat international des débardeurs et magasiniers, Ship and Dock Foremen, section locale 514 c. Prince Rupert Grain Ltd., [1996] 2 R.C.S. 432; (1996), 135 D.L.R. (4th) 385; 40 Admin. L.R. (2d) 1; 96 CLLC 210-037; 198 N.R. 99; National Corn Growers Assn. c. Canada (Tribunal des importations), [1990] 2 R.C.S. 1324; (1990), 74 D.L.R. (4th) 449; 45 Admin. L.R. 161; 114 N.R. 81; 3 T.C.T. 5303; 4 T.T.R. 267.
décisions citées:
Canada (Procureur général) c. McNally Construction Inc., 2002 CAF 111; [2002] A.C.F. no 405 (QL); Canada (Procureur général) c. Symtron Systems Inc., [1999] 2 C.F. 514; (1999), 236 N.R. 143 (C.A.); Canada (Procureur général) c. Corel Corp. (1999), 241 N.R. 190 (C.A.F.); Novell Canada Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux) (2000), 257 N.R. 179 (C.A.F.); E.H. Industries Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux) (2001), 267 N.R. 173 (C.A.F.); Siemens Westinghouse Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux), [2002] 1 C.F. 292; (2001), 202 D.L.R. (4th) 610; 274 N.R. 69 (C.A.); autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée [2001] S.C.C. no 490 (QL); Nanaimo (Ville) c. Rascal Trucking Ltd., [2000] 1 R.C.S. 342; (2000), 143 D.L.R. (4th) 1; [2000] 6 W.W.R. 403; 76 B.C.L.R. (3d) 201; 132 B.C.A.C. 298; 9 M.P.L.R. (3d) 1; 251 N.R. 42; Université Trinity Western c. British Columbia College of Teachers, [2001] 1 R.C.S. 772; (2001), 199 D.L.R. (4th) 1; 31 Admin. L.R. (3d) 163; 151 B.C.A.C. 161; 269 N.R. 1; Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos Ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), [2001] 2 R.C.S. 132; (2001), 199 D.L.R. (4th) 577; 29 Admin. L.R. (3d) 1; 14 B.L.R. (3d) 1; 269 N.R. 311; 146 O.A.C. 201.
doctrine
Gage Canadian Dictionary, Toronto: Gage Educational Publishing Co., 1997.
DEMANDE de contrôle judiciaire d'une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur statuant que les dispositions de l'Accord de libre-échange nord-américain et de l'Accord sur les marchés publics s'appliquent au marché public visant un bateau patrouilleur propulsé par réaction conclu par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (McNally Construction Inc. (Re), [2001] T.C.C.E. no 87 (QL)). Demande rejetée.
ont comparu:
Anne M. Turley pour le demandeur.
Personne n'a comparu pour les défendeurs.
John C. Dodsworth et Michele Hurteau pour l'intervenant.
avocats inscrits au dossier:
Le sous-procureur général du Canada pour le demandeur.
Tribunal canadien du commerce extérieur, Services juridiques, pour l'intervenant.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
[1]Le juge Stone, J.C.A.: Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire visant l'annulation de la décision du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) datée du 6 décembre 2001 [[2001] T.C.C.E. no 87 (QL)], prononcée en vertu du paragraphe 30.14(2) [édicté par L.C. 1993, ch. 44, art. 44] de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 47 (la Loi), ayant trait à un marché public du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (MTPSG) au nom du ministère des Pêches et des Océans, dans le cadre de l'Accord sur le commerce intérieur [Gazette du Canada, Partie I, vol. 129, no 17 (29 avril 1995)] (ACI), en vue de la construction d'un bateau patrouilleur propulsé par réaction destiné à être utilisé dans les eaux côtières des provinces maritimes pendant toutes les saisons de l'année.
INTRODUCTION
[2]La défenderesse McNally Construction Inc. avait présenté une soumission qui n'a pas été retenue dans le cadre de cet appel d'offres. Le 7 septembre 2001, McNally a déposé une plainte auprès du Tribunal alléguant que le MTPSG, en contravention du paragraphe 506(6) de l'ACI, de l'alinéa 1015(4)d) de l'Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d'Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique [17 décembre 1992, [1994] R.T. Can. no 2] (ALÉNA) et de l'alinéa XIII(4)c) de l'Accord sur les marchés publics [Annexe 4 de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, signé à Marrakech, le 15 avril 1994] (AMP), n'avait pas attribué le marché conformément aux critères indiqués dans les documents d'appel d'offres. Le chapitre 10 de l'ALÉNA s'applique aux marchés publics. Le MTPSG a soutenu devant le Tribunal que le marché public en question n'était soumis qu'aux dispositions de l'ACI parce que l'invitation à soumissionner entrait dans la portée de l'exclusion spécifique pour les marchés de construction et de réparation des navires à l'annexe 1001.2b, Liste du Canada, de l'ALÉNA et dans les Notes générales de l'AMP. Ces exclusions sont ainsi conçues:
Annexe 1001.2b, Liste du Canada, de l'ALÉNA:
1. Le présent chapitre ne s'applique pas:
a) aux marchés de construction et de réparation des navires;
Notes générales de l'AMP
Nonobstant les présentes annexes, l'accord n'est pas applicable dans les cas suivants:
a) construction navale et réparations de navires.
[3]Du fait que les défenderesses n'ont plus d'intérêt dans la présente demande, elle est devenue théorique. Cependant, une autre formation de la Cour, exerçant son pouvoir discrétionnaire malgré ce caractère théorique, a décidé que la Cour devrait néanmoins instruire et trancher la question de savoir si le Tribunal a interprété correctement les dispositions pertinentes de l'ALÉNA et de l'AMP. Le 20 mars 2002 [2002 CAF 111; [2002] A.C.F. no 405 (C.A.) (QL)], le juge d'appel Décary a accueilli la requête du Tribunal pour intervenir dans le but énoncé au paragraphe 4 de l'ordonnance, soit «aider la Cour à déterminer quelles sont les normes d'examen applicables et d'offir à la Cour une perspective différente de celle adoptée par le procureur général en ce qui a trait à la question de "la construction navale et la réparation de navires"». Le demandeur limite donc le redressement demandé à la Cour à l'annulation de la décision du Tribunal pour autant que le Tribunal a conclu que les dispositions de l'ALÉNA et de l'AMP s'appliquaient au marché public portant sur le bateau propulsé par réaction en question.
LE CONTEXTE FACTUEL
[4]Le bateau de patrouille en cause doit mesurer entre 43 et 46 pieds de long et avoir une largeur représentant environ le tiers de sa longueur. Il doit être propulsé par deux moteurs diesels de marine d'environ 600 chevaux-vapeur. L'Énoncé des besoins (ÉB) établi par le ministère des Pêches et des Océans décrit les missions du bateau et les autres besoins de la façon suivante au paragraphe G 1.1:
[traduction]
G 1.1 Besoins d'exécution de programme
1.1.1 Pêches et Océans Canada (MPO), Garde côtière canadienne (GCC), Région des Maritimes, a besoin d'un bateau de patrouille rapide pour les eaux intérieures, à des fins d'application de la loi dans le domaine des pêches. Le bateau de patrouille sera utilisé comme bateau de patrouille dont l'équipage est logé à terre (vedette de poste) dans les eaux côtières dans la Région pendant toutes les saisons de l'année. |
1.1.2 La mission première du bateau de patrouille sera de permettre aux agents des pêches de récupérer et de haler (ramener au port) les casiers à homard illégalement placés ou non marqués et d'autres engins de pêche. À cette fin, le bateau de patrouille doit pouvoir transporter au moins cent (100) casiers à homard empilés de façon sûre et fixés en place. |
1.1.3 La mission secondaire du bateau de patrouille portera sur toutes les autres fonctions d'application de la loi dans le domaine des pêches, comme les fonctions d'arraisonnement et de surveillance, et des fonctions de recherche et sauvetage (SAR), qui entrent dans les capacités raisonnables d'un bateau de patrouille de ce type et de cette taille. Parfois, le bateau de patrouille fournira des services ambulanciers pour l'évacuation de personnes depuis l'île Grand Manan. |
1.1.4 Le bateau de patrouille doit être rapide pour permettre le déploiement rapide du port d'attache à la zone d'affectation et capable de naviguer sur la mer pour permettre une exploitation prudente et sûre et offrir une bonne aptitude à la mer pour minimiser la fatigue de l'équipage. |
1.1.5 Le bateau de patrouille doit aussi être stable de manière à permettre de rentrer les engins de façon sûre et de transporter les engins saisis, robuste pour supporter l'usure normale et d'entretien facile. Il doit également comporter un bon accès aux machines principales et auxiliaires, sans qu'il soit nécessaire d'enlever des équipements, la tuyauterie, etc., pour effectuer les tâches courantes d'entretien, de remplacement et d'inspection. |
[5]L'ÉB comporte à l'article G1.4.1 une exigence générale que le bateau de patrouille soit [traduction] «conçu, construit et classé selon la classification de la Direction de la sécurité maritime de Transports Canada Marine [. . .] pour les voyages de cabotage, classe III». L'avocat du demandeur a concédé que «voyages de cabotage, classe III» y est utilisé au sens défini dans le Règlement sur les voyages de cabotage, en eaux intérieures et en eaux secondaires, C.R.C., ch. 1430, pris en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, L.R.C. (1985), ch. S-9. Le paragraphe 4(3) de ce Règlement définit le «voyage de cabotage, classe III» comme un voyage de cabotage au cours duquel, notamment, le navire ne va pas au sud du port de New York et ne se trouve jamais à plus de 20 milles nautiques de la rive.
LA DÉCISION DU TRIBUNAL
[6]Dans son interprétation des exclusions de l'ALÉNA et de l'AMP indiquées ci-dessus, le Tribunal, après avoir examiné une définition du terme «shipbuilding» (construction de navires), s'est tourné vers diverses définitions du mot «ship» (navire) données dans des dictionnaires. Ainsi que le fait observer le Tribunal, certaines de ces définitions sont larges et comprennent «tout type de bâtiment ou de bateau utilisé ou destiné à la navigation, indépendamment de son mode de propulsion ou de l'absence de propulsion». Le Tribunal a relevé qu'on trouve une définition large du genre dans les lois fédérales canadiennes, par exemple à l'article 2 de la Loi sur la marine marchande du Canada: «[l]es bâtiments de toute sorte employés à la navigation et non mus par des rames». Le Tribunal a fait état d'autres définitions données dans les dictionnaires, correspondant à un sens plus étroit du mot «navire», comme «tout gros bâtiment de mer», ce qui donne à entendre qu'il est destiné à traverser la mer et qu'il fait de longs voyages par opposition à un navire de cabotage, un bateau servitude ou une embarcation fluviale. En choisissant cette définition plus étroite, le Tribunal a tenu compte de l'objet des dispositions sur les marchés publics de l'ALÉNA et de l'AMP, en indiquant, aux paragraphes 36 et 37 de sa décision:
Étant donné qu'il est possible de définir le mot «ship» (navire) au sens large ou au sens étroit, le Tribunal doit déterminer s'il convient d'adopter une définition large ou une définition étroite en l'espèce.
D'une façon générale, l'objet des dispositions sur les marchés publics de l'ALÉNA et de l'AMP est de promouvoir la libéralisation du commerce en veillant à ce que les procédures d'appel d'offres soient appliquées d'une manière non discriminatoire et transparente. Pour répondre à un tel objet d'une manière aussi complète que possible, le Tribunal est d'avis que les catégories de marchés publics exclues de la portée de l'ALÉNA et de l'AMP doivent normalement être interprétées étroitement. De ce fait, le Tribunal adopte la définition plus étroite du terme «navire» et conclut que, en l'espèce, un navire est «tout gros bâtiment de mer».
[7]Le Tribunal a ensuite examiné les fonctions requises du bateau de patrouille, selon la description donnée dans l'ÉB et a noté, au paragraphe 44, que le bateau «doit être basé dans un port d'attache, d'où il sera détaché vers diverses zones d'affectation dans les eaux côtières» et qu'il [au paragraphe 45] «ne doit ni traverser la mer ni faire de longs voyages en mer». Le Tribunal a conclu [au paragraphe 47]:
Par conséquent, le Tribunal est d'avis que le bateau de patrouille propulsé par réaction n'est pas un navire et que le marché public qui porte sur un bateau de patrouille propulsé par réaction n'est pas un marché «de construction de navires» au sens de l'ALÉNA et de l'AMP. Par conséquent, le Tribunal a compétence pour connaître de la plainte non seulement aux termes de l'ACI mais aussi aux termes de l'ALÉNA et de l'AMP.
LE CADRE LÉGISLATIF
[8]L'ALÉNA, l'AMP et l'ACI ont été mis en oeuvre dans la législation fédérale: Loi de mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange nord-américain, L.C. 1993, ch. 44; Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce, L.C. 1994, ch. 47; Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, L.C. 1996, ch. 17. À la suite de la mise en oeuvre de l'ALÉNA le 1er janvier 1994, le Tribunal est devenu l'organe canadien compétent à l'égard des contestations ayant trait aux marchés publics du gouvernement fédéral dans le cadre du chapitre 10 de cet accord. Le 1er juillet 1995 et le 1er janvier 1996, le Tribunal est devenu l'organe compétent à l'égard des contestations ayant trait aux marchés publics dans le cadre de l'ACI et de l'AMP, respectivement.
[9]La plainte en cause a été déposée auprès du Tribunal en vertu de l'article 30.11 [édicté par L.C. 1993, ch. 44, art. 44] de la Loi; le Tribunal a décidé d'enquêter sur la plainte en vertu de l'article 30.13 [édicté, idem]. L'enquête visait à déterminer la validité de la plainte. Le pouvoir du Tribunal à l'égard des plaintes est défini au paragraphe 30.14(2) [édicté, idem] de la Loi, ainsi conçu:
30. 14 [. . .]
(2) Le Tribunal détermine la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique ou la catégorie dont il fait partie.
Le Tribunal, lorsqu'il donne gain de cause au plaignant, peut recommander que soient prises les mesures correctives qui sont énumérées au paragraphe 30.15(2) [édicté, idem] de la Loi.
[10]Selon l'article 30.13 de la Loi, le Tribunal doit déterminer s'il y a lieu d'enquêter sur la plainte. Selon le paragraphe 7(1) [mod. par DORS/95-300, art. 7; 96-30, art. 5] du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics, DORS/93-602 [mod. par DORS/95-300, art. 2] (le Règlement), le Tribunal doit déterminer si les conditions pour enquêter sont remplies. L'une de ces conditions est que la plainte porte sur un «contrat spécifique». Aucune contestation n'est formulée sur le point que le marché public en cause correspondait aux définitions du «contrat spécifique» données à l'article 30.1 [édicté par L.C. 1993, ch. 44, art. 44; 1994, ch. 47, art. 39] de la Loi et au paragraphe 3(1) [mod. par DORS/96-30, art. 2] du Règlement. L'article 11 [mod., idem, art. 8] du Règlement décrit l'objet de l'enquête sur une plainte. Il est ainsi conçu:
11. Lorsque le Tribunal enquête sur une plainte, il détermine si le marché public a été passé conformément aux exigences de l'ALÉNA, de l'Accord sur le commerce intérieur ou de l'Accord sur les marchés publics, selon le cas.
LES QUESTIONS EN LITIGE
[11]La question fondamentale dans le présent appel porte sur la détermination de la norme de contrôle que la Cour doit appliquer pour l'examen de la décision du Tribunal statuant que le marché public en cause n'était pas exclu du champ d'application de l'ALÉNA et de l'AMP. La Cour doit ensuite décider, en appliquant la norme appropriée, si le Tribunal a commis une erreur dans l'interprétation des termes «les marchés de construction et de réparation des navires» dans les exclusions de l'ALÉNA et «construction navale et réparations de navires» dans les exclusions de l'AMP.
ANALYSE
La norme de contrôle
[12]La question de la norme de contrôle que la Cour doit appliquer à la décision du Tribunal sur l'interprétation des exclusions de la construction de navires est centrale pour la présente demande. Le demandeur soutient que la norme de contrôle devrait être celle de la «décision correcte», puisque les exclusions en cause définissent les limites de la compétence du Tribunal permettant à ce dernier de traiter le marché public comme n'étant assujetti qu'à l'ACI ou comme étant assujetti non seulement à l'ACI, mais également à l'ALÉNA et à l'AMP. L'intervenant tient, de son côté, que la norme du «caractère manifestement déraisonnable» est plus appropriée en l'espèce: bien que la décision du Tribunal puisse avoir une incidence sur sa compétence, l'application des exclusions est une question que le législateur, selon le régime prévu par la loi, a déléguée au Tribunal.
[13]Dans l'arrêt Canada (Sous-ministre du Revenu national--M.R.N.) c. Mattel Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 100, au paragraphe 24, la Cour suprême a réitéré que les différentes normes de contrôle reconnues par elle vont de la décision «manifestement déraisonnable»--point où la retenue est la plus grande--à la décision «correcte»--norme la plus exigeante--en passant par la décision «raisonnable simpliciter». La Cour a réaffirmé que, dans toute affaire, la détermination de la norme doit se faire selon une démarche «pragmatique et fonctionnelle», compte tenu que l'examen s'attache principalement à déterminer «si le législateur entendait que la question soulevée relève exclusivement de la compétence du tribunal administratif». La Cour a énuméré les facteurs à prendre en compte dans l'examen en vue de déterminer la norme de contrôle appropriée: «l'objet de la loi et de la disposition en cause, le texte de cette disposition et des clauses privatives prévues par la loi constituant le tribunal administratif, la nature de la décision rendue par le tribunal et l'expertise relative de celui-ci sur ces questions par rapport à celle des tribunaux judiciaires». La Cour a insisté à nouveau sur le fait qu'«aucun de ces facteurs n'est déterminant à lui seul».
[14]Traditionnellement, pour déterminer la norme appropriée de contrôle des décisions du Tribunal, notre Cour a commencé son analyse en classant la décision examinée soit comme une décision au sujet de la compétence du Tribunal, soit comme une décision portant sur une matière relevant de sa compétence. La Cour a adopté la position que la norme applicable à une décision au sujet de la compétence est celle de la «décision correcte» tandis que la norme applicable à une décision portant sur une matière relevant de la compétence du Tribunal est celle du «caractère manifestement déraisonnable»: Canada (Procureur général) c. Symtron Systems Inc., [1999] 2 C.F. 514 (C.A.); Canada (Procureur général) c. Corel Corp. (1999), 241 N.R. 190 (C.A.F.); Novell Canada Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux) (2000), 257 N.R. 179 (C.A.F.); E. H. Industries Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) (2001), 267 N.R. 173 (C.A.F.); Siemens Westinghouse Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux), [2002] 1 C.F. 292 (C.A.); autorisation d'appel à la C.S.C. refusée, 18 avril 2002, [2001] S.C.C.A. no 490 (QL). Dans l'arrêt Siemens, précité, le juge d'appel Malone a exprimé l'avis que ce n'est «que rarement» que la Cour appliquera la norme de la «décision correcte» à une question juridique qui relève de la compétence du Tribunal, mais tombe en dehors de son domaine d'expertise.
[15]Cette distinction entre la décision d'un tribunal administratif sur une «question de compétence» et la décision sur une question «relevant de sa compétence» a même été notée dans l'arrêt U.E.S., Local 298 c. Bibeault, [1988] 2 R.C.S. 1048, dans lequel la démarche «pragmatique et fonctionnelle» trouve sa source. Dans cet arrêt, le juge Beetz a fait observer, à la page 1086, qu'«un tel tribunal ne [peut], par une interprétation erronée d'une disposition de loi, s'arroger un pouvoir que le législateur ne lui a pas donné». Le juge Beetz avait exprimé une position semblable dans l'arrêt Syndicat des employés de production du Québec et de l'Acadie c. Conseil canadien des relations du travail, [1984] 2 R.C.S. 412, à la page 441, où il a déclaré que, s'«il est souvent difficile de déterminer ce qui constitue une question de compétence», cette qualification une fois retenue, «il importe peu qu'une erreur portant sur une telle question soit discutable, excusable ou non déraisonnable ou bien, au contraire, extravagante, criante ou manifestement déraisonnable», puisque «[c]e qui rend fatale cette sorte d'erreur, légère ou lourde, c'est son caractère juridictionnel». Plus récemment, dans l'arrêt Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982, le juge Bastarache a adhéré à cette vue générale lorsqu'il a écrit, au paragraphe 28:
Bien que la terminologie et la méthode de la question «préalable», «accessoire» ou «de compétence» aient été remplacées par cette analyse pragmatique et fonctionnelle, l'accent est tout de même mis sur la disposition particulière invoquée et interprétée par le tribunal. Certaines dispositions d'une même loi peuvent exiger plus de retenue que d'autres, selon les facteurs qui seront exposés plus en détail plus loin. Voilà pourquoi il convient toujours, et il est utile, de parler des «questions de compétence» que le tribunal doit trancher correctement pour ne pas outrepasser sa compétence. Mais il faut bien comprendre qu'une question qui «touche la compétence» s'entend simplement d'une disposition à l'égard de laquelle la norme de contrôle appropriée est celle de la décision correcte, en fonction du résultat de l'analyse pragmatique et fonctionnelle. Autrement dit, une «erreur de compétence» est simplement une erreur portant sur une question à l'égard de laquelle, selon le résultat de l'analyse pragmatique et fonctionnelle, le tribunal doit arriver à une interprétation correcte et à l'égard de laquelle il n'y a pas lieu de faire preuve de retenue.
[16]Contrairement à la situation dans l'affaire Mattel, précitée, la Cour n'examine pas en l'espèce l'interprétation par le Tribunal d'un terme de la loi, question à laquelle la Cour suprême avait appliqué, dans cette affaire, la norme de la «décision correcte» sur le fondement que l'interprétation des dispositions législatives qui étaient en cause soulevait de «pures questions de droit». En l'espèce, le Tribunal n'avait pas à interpréter une disposition législative, mais certaines formulations de l'ALÉNA et de l'AMP pour déterminer si le marché public en cause était couvert par les exclusions relatives à la construction et la réparation de navires. Néanmoins, ainsi que le Tribunal l'a lui-même indiqué au paragraphe 26 de sa décision, l'interprétation des exclusions comportait une incidence sur sa compétence, puisque le Tribunal ne pouvait entreprendre d'appliquer l'ALÉNA et l'AMP au marché public en cause avant de décider que les exclusions relatives à la construction et la réparation de navires ne s'appliquaient pas.
[17]La Cour suprême a constamment insisté sur le fait qu'il faut déterminer la norme appropriée selon l'analyse «pragmatique et fonctionnelle». Comme exemples de cette analyse en vue de déterminer la norme de contrôle, on peut citer, outre l'arrêt Pushpanathan, précité, les arrêts Nanaimo (Ville) c. Rascal Trucking Ltd., [2000] 1 R.C.S. 342; Université Trinity Western c. British Columbia College of Teachers, [2001] 1 R.C.S. 772; Mattel, précité; et Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos Ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), [2001] 2 R.C.S. 132. On trouve un autre exemple récent dans l'arrêt Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2002), 208 D.L.R. (4th) 107 (C.S.C.), où, en procédant à cette analyse, la Cour a déterminé qu'une décision de la section d'appel de l'immigration prise en vertu de l'alinéa 70(1)b) [mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 13] de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, sur le point de savoir si, «eu égard aux circonstances particulières de l'espèce», une personne ne devrait pas être renvoyée du Canada, devait être contrôlée selon la norme de la «décision correcte».
[18]Je ferai remarquer dès le départ, en appliquant l'analyse «pragmatique et fonctionnelle» à l'espèce, que la Loi ne contient pas de clause privative. Les décisions du Tribunal sont soumises au contrôle de la Cour en vertu de l'alinéa 28(1)e) [mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 8] de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7. Pris isolément, ce facteur indique que la Cour doit faire preuve d'une retenue moindre, plutôt que plus grande, à l'égard de la décision du Tribunal.
[19]Le but évident des exclusions relatives à la construction et la réparation de navires est de soustraire un marché public de cette nature à l'application de l'ALÉNA et de l'AMP, de sorte qu'un tel marché public n'est assujetti qu'aux dispositions de l'ACI. On ne trouve pas d'indications dans le dossier sur les raisons justifiant ces exclusions. L'avocat du demandeur a expliqué que le demandeur, malgré les efforts déployés, n'était pas parvenu à trouver d'éléments de preuve touchant la portée de ces exclusions. La découverte d'éléments du genre de ceux qu'on trouve ordinairement dans les travaux préparatoires aurait pu jeter de la lumière sur la portée qu'on avait voulu donner à ces exclusions. Malheureusement, le demandeur n'a pu trouver aucun élément du genre. À première vue, les exclusions semblent rendre l'ALÉNA et l'AMP non applicables à un marché public pour la construction ou la réparation de tout navire, sans égard à sa taille et au fait qu'il soit destiné à naviguer en haute mer. La question essentielle porte donc sur l'interprétation des mots «marchés de construction et de réparation des navires» et «construction navale et réparations de navires» dans les exclusions de l'ALÉNA et de l'AMP respectivement.
[20]Dans l'arrêt Mattel, précité, au paragraphe 32, le juge Major a fait observer que le critère de l'expertise du tribunal administratif et la nature de la question sont étroitement interreliés. La Cour avait auparavant indiqué, au paragraphe 28, que l'expertise relative du tribunal administratif était le facteur le plus important à examiner pour «arrêter la norme de contrôle applicable». Comme l'a signalé le juge Major au paragraphe 29, la Loi n'exige pas que les membres du tribunal soient experts dans un domaine particulier ni que des experts donnent des conseils à l'égard des nominations au tribunal. Il a noté que le gouverneur en conseil doit nommer un président, deux vice-présidents et au plus six autres titulaires. Le juge Major a ensuite expliqué la signification de ce mode de nomination pour l'expertise du Tribunal en matière commerciale, lorsqu'il a indiqué au paragraphe 30:
La durée maximale du mandat des titulaires est de cinq ans (par. 3(3)). Étant des titulaires, les membres du TCCE acquièrent de l'expérience relativement aux questions qu'ils examinent pendant la durée de leur mandat. Selon la nature de la question en cause, les membres du TCCE acquièrent de l'expérience et de l'expertise que les tribunaux judiciaires ne possèdent pas. Cette constatation est également compatible avec la façon dont le juge Wilson a décrit l'organisme prédécesseur du TCCE, savoir un tribunal «composé d'experts qui sont versés dans les complexités des relations commerciales internationales et dont les fonctions consistent à entendre un nombre considérable de causes en matière commerciale» (National Corn Growers Assn., précité, p. 1348).
[21]Comme il a été indiqué ci-dessus, l'article 11 du Règlement dispose que le Tribunal «détermine si le marché public a été passé conformément aux exigences» de l'ALÉNA, de l'ACI ou de l'AMP, selon le cas. Il est indubitable que, depuis 1994, le Tribunal a acquis une expertise spécialisée considérable, du fait des nombreuses plaintes en matière de marchés publics qui lui sont soumises, expertise qui s'étend évidemment à l'interprétation des accords commerciaux en cause--l'ACI, l'ALÉNA et l'AMP. L'intervenant indique qu'au cours des sept dernières années, le Tribunal a traité plus de 350 plaintes en matière de marchés publics. J'accepte l'argument de l'intervenant que l'interprétation des exclusions relatives à la construction et la réparation des navires dans l'ALÉNA et l'AMP suppose que l'on comprend les dispositions sur les marchés publics de ces accords, notamment le mécanisme des exceptions et exemptions qui y est contenu, et fait appel à l'expertise spécialisée du Tribunal dans l'interprétation de ces traités internationaux dans le contexte de la Loi et du Règlement.
[22]Dans deux arrêts récents, la Cour a eu à déterminer la norme appropriée de contrôle d'une décision du Tribunal. Ces deux arrêts forment un contraste intéressant. Dans l'arrêt Cougar Aviation Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux) (2000), 26 Admin. L.R. (3d) 30 (C.A.F.), la Cour a décidé d'appliquer la norme de la «décision correcte» dans le cas d'une allégation de partialité du Tribunal dans la détermination de la validité d'une plainte. Dans l'arrêt Profac Facilities Management Services Inc. c. FM One Alliance Corp. (2001), 19 B.L.R. (3d) 1 (C.A.F.), le Tribunal devait déterminer si une clause de renouvellement dans des contrats de 1994 entre la Société canadienne des postes et des fournisseurs de services était suffisamment précise pour que cette dernière puisse l'invoquer pour soustraire un contrat ultérieur daté du 23 mars 2001 aux règles de l'ALÉNA relatives aux marchés publics. Il avait été plaidé que la question en litige n'entrait pas dans l'expertise du tribunal parce qu'elle dépendait de l'interprétation de documents contractuels ainsi que de l'attribution, à ces documents et à la conduite des parties, de conséquences juridiques découlant du droit général des contrats, et que c'est la norme de la décision correcte qui devait être appliquée. La Cour n'a pas suivi cette argumentation. Le juge d'appel Evans, au nom de la Cour, a pris la position, au paragraphe 24, qu'il était «tout simplement irréaliste d'affirmer que le Tribunal examinait surtout une question relevant du droit général des contrats et officiait donc en dehors de son champ de spécialisation» et a conclu que «le Tribunal a fait reposer sa conclusion sur la nécessité pour Postes Canada de se conformer aux obligations énoncées dans l'ALÉNA»; la norme appliquée a donc été celle du «caractère manifestement déraisonnable».
[23]Le demandeur insiste fortement sur le fait que le Tribunal devait d'abord interpréter les exclusions en cause avant de commencer à appliquer l'ALÉNA et l'AMP à ce marché public particulier et qu'il fallait donc voir dans une décision sur ce point une décision sur la compétence, à laquelle s'applique la norme de la «décision correcte». Le demandeur note encore que le Tribunal lui-même, au paragraphe 47, a reconnu qu'il devait trancher une question «de compétence» en déclarant dans sa conclusion sur ce point qu'il avait «compétence pour connaître de la plainte non seulement aux termes de l'ACI mais aussi aux termes de l'ALÉNA et de l'AMP». J'accepte que, dans un sens, il est possible de voir là une question de compétence. Par contre, ainsi que le juge Rothstein l'a déclaré dans l'arrêt Halifax Longshoremen's Assn., section locale 269 c. Offshore Logistics Inc. (2000), 25 Admin. L.R. 224 (C.A.F.), au paragraphe 15, «chaque fois qu'un organisme tire une conclusion positive qui emporte l'exercice de sa compétence, sa décision peut être qualifiée de décision portant sur une question de compétence» et il a ajouté: «L'approche fonctionnelle et pragmatique vise notamment [. . .] à guider les tribunaux lorsqu'ils déterminent si les décisions qui pourraient avoir une connotation ou comporter un aspect touchant la compétence sont néanmoins à l'abri du contrôle judiciaire selon la norme de la décision correcte.» Le juge Rothstein a pris note des avertissements déjà donnés par la Cour suprême d'éviter les qualifications trop rapides dans la fonction de contrôle judiciaire. Il a cité un arrêt récent de la Cour suprême reprenant cet avertissement, Syndicat international des débardeurs et magasiniers, Ship and Dock Foremen, section locale 514 c. Prince Rupert Grain Ltd., [1996] 2 R.C.S. 432, à la page 446, où le juge Cory a indiqué:
Si l'on ne tient pas compte de ces avertissements, c'est le fonctionnement et même tout le concept des tribunaux administratifs qui pourront être en péril. Ces tribunaux sont souvent créés pour oeuvrer dans des domaines où des connaissances techniques, une expérience et une attention précises sont indispensables pour résoudre les problèmes particuliers qui se posent. Les tribunaux administratifs sont conçus pour fonctionner rapidement, à peu de frais et moins cérémonieusement que les cours de justice. Il y a peu de doute que ces tribunaux sont nécessaires ou qu'ils jouent un rôle fort important dans la société canadienne.
[24]La question que devait trancher le Tribunal en l'espèce était de savoir si l'ALÉNA et l'AMP s'appliquaient au marché public en cause. La solution dépendait de l'interprétation des formules «les marchés de construction et de réparation des navires» dans l'ALÉNA et «construction navale et réparations de navires» dans l'AMP, qui sont tous les deux des accords de commerce international à l'égard desquels le Tribunal est l'organe chargé de connaître des contestations des marchés publics. Je conviens que les formules «marchés de construction et de réparation des navires» et «construction navale et réparations de navires» soulèvent une question juridique dans la mesure où le Tribunal doit leur attribuer une signification dans le contexte global des accords commerciaux et en fonction de l'objet de l'ALÉNA et de l'AMP. Le Tribunal, semble-t-il, n'avait pas eu à interpréter ces formules particulières, mais il avait néanmoins participé activement à la résolution de différends en matière de marchés publics dans le cadre de ces divers accords commerciaux depuis leur mise en oeuvre par le Parlement au cours de la dernière décennie. Du fait de cette expérience, le Tribunal a acquis une expertise considérable dans les questions de marchés publics en général. Dans l'arrêt National Corn Growers Assn. c. Canada (Tribunal des importations), [1990] 2 R.C.S. 1324, à la page 1336, Mme le juge Wilson a signalé qu'une gestion prudente de secteurs comme les relations économiques internationales «nécessite souvent le recours à des experts ayant à leur actif des années d'expérience et une connaissance spécialisée des activités qu'ils sont chargés de surveiller». En l'espèce, le Tribunal devait déterminer, en vertu de l'article 11 du Règlement, si le marché public avait été passé conformément aux exigences de l'ACI, de l'ALÉNA et de l'AMP. À mon sens, cette mission comprenait l'interprétation de ces accords commerciaux, notamment des exclusions qui sont en cause, interprétation qui ressortait du mandat du Tribunal.
[25]Compte tenu des différents facteurs qui doivent être considérés dans l'analyse «pragmatique et fonctionnelle», particulièrement la nature de la question et l'expertise du Tribunal en matière commerciale, j'ai conclu qu'ils vont dans le sens de la norme du «caractère manifestement déraisonnable», appelant une retenue plus grande, plutôt que de la norme plus exigeante de la «décision correcte».
L'application de la norme
[26]La seconde question en litige porte sur le point de savoir si le Tribunal a rendu une décision manifestement déraisonnable en décidant que les exclusions relatives à la construction et la réparation des navires à l'annexe 1001.2b, Annexe du Canada, de l'ALÉNA et dans les Notes générales de l'AMP ne s'appliquaient pas au marché public en cause. Ainsi qu'il a été statué, la norme du «caractère manifestement déraisonnable» est une norme très stricte, qui entraîne un degré élevé de retenue des tribunaux judiciaires à l'égard des décisions des tribunaux administratifs. Comme l'a indiqué le juge Cory dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1993] 1 R.C.S. 941, aux pages 963 et 964, une décision est «manifestement déraisonnable» si elle est «clairement irrationnelle, c'est-à-dire, de toute évidence non conforme à la raison».
[27]En l'espèce, ainsi que l'a noté le Tribunal, ni l'ALÉNA ni l'AMP ne définit la formule «construction et [. . .] réparation des navires» ou «construction navale et réparations de navires». Le Tribunal s'est alors tourné vers la définition du terme «shipbuilding» (construction de navires) dans le Gage Canadian Dictionary, 1997, soit [traduction] «la conception ou la construction de navires» et «l'art de construire les navires». Le Tribunal a ensuite considéré deux façons possibles d'aborder la définition du terme «navire». La première consistait à adopter la [au paragraphe 30] «définition extrêmement large qui, pour l'essentiel, indique qu'un navire est tout type de bateau». Le Tribunal a noté que la définition du terme «navire» à l'article 673 de la Loi sur la marine marchande du Canada est large. La seconde façon était d'adopter une définition plus étroite qui restreint l'usage du terme «navire» à un type particulier de bateau. Les dictionnaires généraux consultés par le Tribunal indiquaient que les caractéristiques d'un «navire» sont qu'il a un gros tonnage et qu'il navigue en mer. Après avoir déterminé que le terme «navire» avait un sens large et un sens étroit, le Tribunal a décidé de résoudre le problème d'interprétation en choisissant la définition qu'il jugeait la plus conforme à l'objet des dispositions sur les marchés publics de l'ALÉNA et de l'AMP, décrit dans les termes suivants [au paragraphe 37] «promouvoir la libéralisation du commerce en veillant à ce que les procédures d'appel d'offres soient appliquées d'une manière non discriminatoire et transparente».
[28]Je ne suis pas persuadé que le Tribunal ait commis une erreur en tenant compte des différentes définitions citées et de l'objet des dispositions sur les appels d'offres de l'ALÉNA et de l'AMP pour interpréter la formulation des exclusions. La façon dont les exclusions sont formulées a amené le Tribunal à penser qu'elles ne visent pas à s'appliquer à toute embarcation qui pourrait en théorie correspondre à une définition large des termes, mais seulement à un gros bâtiment de mer construit ou réparé dans le cadre d'un marché public attribué par le gouvernement fédéral.
[29]Il convient d'insister sur le fait qu'aucun élément du dossier dont était saisi le Tribunal n'indique que les exclusions relatives à la construction et la réparation des navires devaient s'appliquer, selon l'intention du Canada, aux «navires» dans l'acception large du terme. Le Tribunal a tenté de concilier les définitions divergentes en faisant appel à l'objet de l'ALÉNA et de l'AMP. Cela semblerait conforme aux obligations du Canada au titre de l'ALÉNA et de l'AMP. Selon l'article 1017 de l'ALÉNA, la procédure de contestation vise à «favoriser des procédures équitables, ouvertes et impartiales en matière de marchés publics». Également, dans le premier attendu de l'AMP, les parties reconnaissent «qu'un cadre multilatéral efficace de droits et d'obligations concernant les lois, règlements, procédures et pratiques en matière de marchés publics est nécessaire en vue de réaliser l'expansion et une libéralisation plus large du commerce mondial». J'accepte l'argument de l'intervenant que l'interprétation et l'application des exclusions relatives à la construction et la réparation des navires supposent que l'on comprend les dispositions sur les marchés publics de l'ALÉNA et de l'AMP, notamment le mécanisme des exceptions et exemptions qui y est contenu, et font appel à l'expertise spécialisée du Tribunal dans l'interprétation de ces traités internationaux dans le contexte de la Loi et des règles et règlements d'application.
[30]Je n'ai pas oublié l'argument final invoqué par le demandeur en faveur d'attribuer un sens large au mot «navire» et aux exclusions. L'essentiel de l'argumentation sur ce point se résume comme suit: comme les États-Unis, qui sont partie à l'ALÉNA, ont adopté des mesures pour protéger leurs branches de la construction et de la réparation de navires et ont exclu une bonne partie de ces activités de l'ALÉNA, les exclusions en cause traduisent l'objectif du Canada d'obtenir une certaine réciprocité à cet égard avec les États-Unis. Le demandeur a cité § 688 du Jones Act, 46 U.S.C. des États-Unis et invoqué également l'article 5(h) de l'annexe 1001.1b-1 de l'ALÉNA, aux termes duquel les États-Unis ont exclu de cet accord les achats par le Department of Defense des États-Unis de certains produits sur le fondement de la sécurité nationale et indiqué que cette exclusion couvre également les achats de la Coast Guard des États-Unis. De même, par l'article J019 dans l'annexe 1001.1b-2 de l'ALÉNA, les États-Unis excluent les activités suivantes: «Entretien, réparation, modification, reconstruction et installation d'équipements afférents aux navires» des règles du chapitre 10 sur les marchés publics. L'ALÉNA ne contient pas d'exclusions spécifiques semblables des règles sur les marchés publics pour la construction et la réparation des navires par le Canada. En outre, ainsi qu'il a déjà été indiqué, on ne trouve dans le dossier aucun élément de preuve sur l'historique des négociations qui éclairerait la portée des exclusions en cause et certainement aucun élément qui permettrait de conclure avec assurance que les exclusions contenues à l'annexe 1001.2b, Annexe du Canada, de l'ALÉNA et dans les Notes générales de l'AMP visaient à établir la réciprocité avec les États-Unis.
[31]À mon avis, l'interprétation donnée par le Tribunal des exclusions relatives à la construction et la réparation des navires dans l'ALÉNA et l'AMP n'était pas manifestement déraisonnable. Je rejetterais donc la demande mais, dans les circonstances, sans frais.
Le juge Sexton, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.
Le juge Sharlow, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.