[1994] 1 C.F. 453
T-3033-92
Procureur général du Canada (requérant)
c.
Kahn-Tineta Horn (intimée)
Répertorié : Canada (Procureur général) c. Horn (1re inst.)
Section de première instance, juge MacKay— Ottawa, 20 septembre et 15 octobre 1993.
Fonction publique — Fin d’emploi — Abandon de poste — Demande d’annulation de la décision rendue par l’arbitre à l’égard d’un grief présenté en vertu de l’art. 92(1) de la LRTFP — Après avoir pris un congé d’études, l’intimée n’est pas retournée travailler, parce qu’elle était dans une zone encerclée d’un barbelé fait de fil plat tranchant lors d’un affrontement entre les Forces canadiennes et les Indiens à Kanesatake — En vertu de l’art. 27 de la LEFP, l’employeur a déclaré que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté — L’arbitre a conclu que la déclaration d’abandon constituait de fait un congédiement disciplinaire — Absence d’erreur dans l’application de la loi — Absence d’intention de la part de l’intimée d’abandonner son poste — Absence d’exigences expresses établies par la loi permettant à l’arbitre de tirer une conclusion à l’égard de faits particuliers — Existence de nombreux éléments de preuve étayant la conclusion tirée par l’arbitre dans l’exercice de sa compétence en vertu de l’art. 92(1) — L’employeur n’avait pas agi de bonne foi.
Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire visant à l’annulation de la décision par laquelle l’arbitre avait en partie fait droit à un grief présenté par l’intimée en vertu du paragraphe 92(1) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) et avait ordonné que celle-ci soit réintégrée sans rémunération. Après avoir pris un congé d’études de deux ans, lequel avait commencé en septembre 1988, l’intimée n’était pas retournée travailler, le 4 septembre 1990, parce qu’elle était dans une zone encerclée par un barbelé fait de fil plat tranchant que les Forces armées canadiennes avaient installé à Kanesatake. Le 12 septembre, l’intimée était encore absente de son travail, et son employeur, estimant que le fait que celle-ci n’était pas retournée travailler ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, s’est fondé sur l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP) pour déclarer qu’elle avait abandonné son poste, ce qui mettait fin à son emploi. Après avoir examiné tous les éléments de preuve mis à sa disposition, l’arbitre a conclu que la mesure prise contre la fonctionnaire s’estimant lésée était fondée sur les actions de celle-ci lorsqu’il s’était agi d’appuyer l’équipe de négociation mohawk et que la décision d’avoir recours à l’article 27 de la LEFP était liée à un désir de répondre aux actions de la fonctionnaire s’estimant lésée plutôt qu’à son absence. Il s’agissait de savoir si l’arbitre avait excédé la compétence que lui conférait le paragraphe 92(1) de la LRTFP en concluant que la déclaration d’abandon que l’employeur avait faite constituait en réalité un congédiement disciplinaire.
Jugement : la demande doit être rejetée.
Lorsque le législateur limite le contrôle des décisions d’un organisme administratif au moyen d’une clause privative, le tribunal n’interviendra que s’il conclut que celui-ci a excédé sa compétence en rendant une décision erronée sur une question de droit relative à sa compétence pour examiner l’affaire dont il est saisi ou, si la question en litige relève de sa compétence, en commettant une erreur manifestement déraisonnable. L’arbitre, en décidant si le grief se rapportait à une « mesure disciplinaire entraînant le congédiement » en vertu du paragraphe 92(1), examinait une question de compétence, de sorte qu’une simple erreur justifiait l’intervention de la Cour par voie de contrôle judiciaire. Il s’agissait d’une décision de fait, parfois décrite comme se rapportant à un fait juridictionnel, étant donné que le pouvoir de l’arbitre d’examiner le grief au fond dépendait de la détermination de ce fait. L’intention du législateur était que la détermination de ce qui constitue une « mesure disciplinaire », dans un cas donné, relève des personnes désignées à titre d’arbitres par la Commission des relations de travail dans la fonction publique, conformément à l’article 93 de la LRTFP. Il incombait en fin de compte au requérant de convaincre la Cour que l’arbitre avait commis une erreur en concluant que l’intimée avait été congédiée pour des raisons disciplinaires.
L’arbitre n’a pas commis d’erreur de droit en examinant le cas de l’intimée, et ce, pour trois raisons. Premièrement, afin de justifier sa conclusion, l’arbitre n’était pas tenu en droit de conclure d’abord que l’opinion de l’employeur, à savoir que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, était fondée sur des motifs futiles ou sur des motifs fondés sur autre chose que la bonne foi. Le fondement de la mesure prise par l’employeur dépendait du but dans lequel cette mesure était prise et ce but pouvait influer sur sa bonne foi. Si, selon la prépondérance des probabilités, l’arbitre conclut que le but visé par l’employeur est lié au fait que le fonctionnaire s’est absenté sans autorisation, dans des circonstances que l’employeur peut raisonnablement considérer comme n’étant pas indépendantes de sa volonté, l’arbitre doit reconnaître que la déclaration d’abandon ne relève pas de sa compétence en vertu du paragraphe 92(1) de la LRTFP. D’autre part, s’il est conclu que le but visé est de discipliner le fonctionnaire, l’arbitre est tenu d’examiner le grief au fond, comme il l’a fait en l’espèce. L’arbitre a conclu que la mesure prise par l’employeur n’était pas fondée sur l’absence de la fonctionnaire, mais sur le fait qu’elle appuyait l’équipe de négociation mohawk. En outre, rien ne permettait de conclure que l’intimée avait l’intention d’abandonner son poste. Les arrêts cités par le requérant n’établissaient pas que l’arbitre était tenu de conclure que l’opinion de l’employeur était fondée sur des motifs futiles ou que ce dernier n’avait pas agi de bonne foi. Il n’existe aucune exigence expresse établie en droit, lorsqu’il s’agit pour l’arbitre de conclure à l’existence de faits particuliers, s’il faut faire preuve de retenue à l’égard de la décision que celui-ci a rendue dans un domaine relevant de son expertise reconnue. L’arbitre n’a pas commis d’erreur dans l’application du paragraphe 92(1) de la LRTFP ou en concluant que la déclaration d’abandon constituait une mesure disciplinaire relevant de sa compétence. Deuxièmement, l’arbitre n’a pas expressément conclu que l’employeur avait agi pour des motifs fondés sur autre chose que la bonne foi, mais la conclusion que l’arbitre a tirée montrait que c’était ce qu’il avait fait tout aussi clairement que s’il l’avait expressément dit. Il existait dans le dossier de nombreux éléments de preuve justifiant la conclusion de l’arbitre, à savoir que la déclaration d’abandon constituait en réalité une « mesure disciplinaire entraînant le congédiement » au sens du paragraphe 92(1) de la LRTFP. Troisièmement, à supposer que la Cour doive examiner le « bien-fondé » de la décision de l’arbitre, il faut conclure que ce dernier avait raison, dans les circonstances de l’affaire. La mesure prise par l’employeur exigeait que ce dernier croie que l’intimée avait abandonné son poste, en se fondant sur une évaluation raisonnable de tous les éléments de preuve dont il disposait. L’employeur pouvait difficilement en arriver raisonnablement à cette conclusion sans tenir compte d’un certain nombre de faits qu’il ne semble pas avoir pris en considération. Compte tenu de la preuve, la seule conclusion raisonnable était que l’employeur se préoccupait principalement des activités de l’intimée à Kanesatake et non du fait qu’elle s’était absentée sans autorisation.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18.1(4)c) (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5), d) (édicté idem).
Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-33, art. 27, 28.
Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35, art. 92(1), 93, 99, 101(1),(2).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES :
Canada (Procureur général) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1993] 1 R.C.S. 941; (1993), 101 D.L.R. (4th) 673; 150 N.R. 161; Canada (Procureur général) c. Michaud, A-31-97, juge Hugessen, J.C.A., jugement en date du 8-6-87, C.A.F., inédit.
DISTINCTION FAITE AVEC :
Jacmain c. Procureur général (Can.) et autre, [1978] 2 R.C.S. 15; (1977), 81 D.L.R. (3d) 1; 78 CLLC 14,117; 18 N.R. 361; Canada (Procureur général) c. Penner, [1989] 3 C.F. 429; (1989), 99 N.R. 213 (C.A.); Morin c. R., [1981] 1 C.F. 3; (1980), 36 N.R. 387 (C.A.); infirmant, [1979] 2 C.F. 642 (1re inst.); Procureur général du Canada c. Cantin, T-1070-82, juge Addy, ordonnance en date du 12-3-82, C.F. 1re inst., inédit.
DÉCISIONS CITÉES :
Richard c. La Commission des relations de travail dans la Fonction publique, [1978] 2 C.F. 344; (1977), 20 N.R. 81 (C.A.); U.E.S., Local 298 c. Bibeault, [1988] 2 R.C.S. 1048; (1988), 35 Admin. L.R. 153; 95 N.R. 161; Canada (Procureur général) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1991] 1 R.C.S. 614; (1991), 80 D.L.R. (4th) 520; 48 Admin. L.R. 161; 91 CLLC 14,017; 123 N.R. 161.
DEMANDE de contrôle judiciaire visant à l’annulation de la décision de l’arbitre ([1992] C.P.S.S.R.B. No 159 (Q.L.)) faisant droit en partie au grief de l’intimée et ordonnant que celle-ci soit réintégrée sans rémunération. Demande rejetée.
AVOCATS :
Duff Friesen, c.r. et Harvey A. Newman pour le requérant.
Andrew J. Raven et David Yazbeck pour l’intimée.
PROCUREURS :
Le sous-procureur général du Canada pour le requérant.
Raven, Jewitt & Allen, Ottawa, pour l’intimée.
Ce qui suit est la version française des motifs de l’ordonnance rendus par
Le juge MacKay : Dans cette demande de contrôle judiciaire, le procureur général du Canada cherche à obtenir une ordonnance infirmant la décision rendue le 13 novembre 1992 par le président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, Ian Deans, siégeant en sa qualité d’arbitre désigné par la Commission [[1992] C.P.S.S.R.B. no 159 (Q.L.)]. Par sa décision, l’arbitre a en partie fait droit au grief de l’intimée et a ordonné que celle-ci soit réintégrée sans rémunération, à la suite d’une déclaration que l’employeur, Affaires indiennes et du Nord Canada, avait faite le 13 septembre 1990, à savoir que l’intimée avait abandonné son poste. Cette déclaration était fondée sur l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-33 (LEFP).
En l’espèce, il s’agit uniquement de savoir si l’arbitre avait compétence pour décider que le grief de l’intimée concernait un congédiement disciplinaire, conformément au paragraphe 92(1) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (LRTFP).
La question de la compétence a fait l’objet d’une objection préliminaire avant et pendant l’audience tenue par l’arbitre. Dans sa décision, l’arbitre a déterminé que la mesure prise par l’employeur constituait un congédiement disciplinaire et relevait donc de sa compétence.
Historique et décision de l’arbitre
L’intimée, qui travaillait au Ministère depuis 1972, occupait récemment le poste de consultante, Bien-être de l’enfance, au niveau PM-5. En septembre 1988, elle a pris un congé d’études payé pour suivre un programme de maîtrise à l’université Carleton; la durée de ce congé, qui était initialement d’un an, a été prolongée pour l’année 1989-1990. Pendant l’été 1990, l’intimée a effectué du travail sur place dans les communautés mohawks de Kahnawake, d’Akwasasne et de Kanesatake, relativement à un projet de thèse approuvé par l’université. Elle devait retourner travailler le 4 septembre 1990, mais à ce moment-là elle était dans la zone encerclée par un barbelé fait de fil plat tranchant que les Forces armées canadiennes venaient d’installer à Kanesatake. Elle n’est pas retournée travailler le 4 septembre. Elle a communiqué avec l’employeur par l’entremise d’un mandataire et de son avocat, ainsi que par téléphone, pour lui demander de prolonger son congé et l’informer qu’elle n’avait pas l’intention d’abandonner son poste au Ministère. Elle a demandé que son chèque de paye continue à être déposé dans son compte bancaire, et elle a fait savoir qu’elle voulait que ses crédits de congé non utilisés soient appliqués à son absence. Elle a également fait savoir qu’elle ne croyait pas pouvoir partir en toute sécurité. On n’a pas répondu à sa demande de congé, mais apparemment, à la suite d’un examen, la demande n’a pas été agréée ou a été rejetée.
L’intimée n’étant pas retournée travailler le 12 septembre, les agents supérieurs du personnel du Ministère ont consulté l’avocat principal du Conseil du Trésor. Le lendemain, après une autre consultation des membres de la haute direction, le sous-ministre adjoint responsable, croyant apparemment que le fait que l’intimée n’était toujours pas retournée travailler ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, sans lui donner quelque avertissement que ce soit, a informé celle-ci par écrit qu’il avait été décidé de déclarer que son poste avait été abandonné, ce qui mettait fin à son emploi. Cette lettre a été envoyée à l’adresse de l’intimée, à Ottawa, bien qu’on sût qu’elle était encore à Kanesatake, et une copie a été envoyée à son avocat, à Toronto; l’intimée n’a reçu la lettre que le 1er octobre lorsqu’une copie lui a été remise par son représentant syndical. Ce jour-là, l’intimée a déposé un grief dans lequel elle alléguait que la déclaration d’abandon constituait de fait un congédiement déguisé, implicitement pour des raisons d’ordre disciplinaire. Ce grief était ainsi libellé :
[traduction] Je conteste par la présente le contenu de la lettre du 13 septembre 1990 m’informant que j’étais renvoyée du poste de consultante, Bien-être de l’enfance (poste no IAN-21066 classé PM-5), que j’occupais au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour le motif que j’avais « abandonné [mon] poste ». Je soutiens qu’il s’agit là en réalité d’un congédiement déguisé et que le renvoi pour abandon de poste n’est pas un mécanisme de renvoi véritable et valide.
REDRESSEMENT
Que la lettre datée du 13 septembre 1990 soit retirée de mon dossier et que je sois réintégrée, sans perte de traitement ni d’avantages, à mon poste de consultante, Bien-être de l’enfance (poste no IAN-21066 classé PM-5) au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, et ce, avec effet au 13 septembre 1990. Je veux que mon grief soit entendu au dernier palier de la procédure de règlement des griefs seulement.
Le Ministère n’a pas fait droit au grief et l’intimée a ensuite renvoyé l’affaire à l’arbitrage conformément au paragraphe 92(1) de la LRTFP.
La lettre informant l’intimée qu’elle était réputée avoir abandonné son poste est datée du 13 septembre 1990 et est signée par W. Van Iterson, sous-ministre adjoint intérimaire, Services aux Indiens. Elle est formulée comme suit :
[traduction] Madame,
Par la présente je vous avise que, en vertu de l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique et du pouvoir que m’a délégué le sous-ministre, vous êtes réputée avoir abandonné votre poste de consultante, Bien-être social de l’enfance (poste no IAN-21066, classé PM-5) au ministère des Affaires indiennes et du Nord.
Cette décision, qui prend effet aujourd’hui, résulte de votre absence sans autorisation depuis le 4 septembre 1990, date à laquelle vous deviez retourner au travail à la suite de votre congé d’études. Je suis d’avis que votre absence de plus d’une semaine tient à des raisons qui ne sont pas indépendantes de votre volonté; par conséquent, l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique s’applique.
Vos activités ont été décrites largement dans les médias et confirmées dans la correspondance reçue de votre avocat, ainsi que dans les conversations téléphoniques que vous avez eues avec des fonctionnaires du Ministère. Le fait que vous avez communiqué avec le Ministère n’atténue aucunement votre absence non autorisée. Au contraire, cette communication me confirme que vous avez volontairement décidé de demeurer à Kanesatake pour appuyer les Warriors. Ces activités contreviennent au Code d’éthique du Ministère ainsi qu’au Code régissant les conflits d’intérêts et l’après-mandat s’appliquant à la fonction publique. J’aurais pu, pour ces infractions, vous imposer des mesures disciplinaires très sévères; j’ai toutefois choisi de recourir à la déclaration d’abandon de poste.
Vous devriez communiquer avec Mme Diane Dinelle, à l’Administration de la paye (819-997-9883), pour vous renseigner sur les avantages auxquels vous pourriez avoir droit.
Si vous estimez que cette mesure est injustifiée, vous avez le droit de présenter un grief dans les vingt-cinq jours suivant la réception de la présente lettre, conformément à l’article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.
L’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique dit ce qui suit :
27. L’administrateur général peut conclure à l’abandon de poste par un fonctionnaire lorsque celui-ci s’absente pendant au moins une semaine sans pouvoir lui faire valoir des raisons indépendantes de sa volonté ou sans qu’il s’agisse d’un cas autorisé ou prévu par une loi fédérale ou sous son régime. Il notifie l’abandon de poste à la Commission et le fonctionnaire perd dès lors sa qualité de fonctionnaire.
Voici les dispositions pertinentes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique :
92. (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, un fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief portant sur :
a) l’interprétation ou l’application, à son endroit, d’une disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;
b) une mesure disciplinaire entraînant le congédiement, la suspension ou une sanction pécuniaire.
…
101. (1) Sauf exception dans la présente loi, toute ordonnance, décision arbitrale ou autre, instruction ou déclaration de la Commission, d’un arbitre nommé en vertu de l’article 63 ou d’un arbitre de griefs est définitive et non susceptible de recours judiciaires.
(2) Il n’est admis aucun recours ou décision judiciaire—notamment par voie d’injonction, de certiorari, de prohibition ou de quo warranto—visant à contester, réviser, empêcher ou limiter l’action de la Commission, d’un arbitre nommé en vertu de l’article 63 ou d’un arbitre de griefs.
À cause de la nature de la contestation de la décision de l’arbitre par le requérant, je reproduis des passages importants de l’examen de la preuve et de la décision que l’arbitre a rendue au sujet de la question de la compétence.
En examinant la preuve présentée, l’arbitre a notamment déclaré ceci :
En septembre 1988, Mme Horn a commencé un congé de deux ans entièrement payé pour suivre un programme de maîtrise à l’université Carleton. Pendant ce congé, elle étudiait à plein temps sous la supervision du professeur Victor F. Valentine. Elle devait notamment retracer les origines des idéologies politiques concurrentes qui existent au sein des trois communautés mohawks de Kahnawake, d’Akwasasne et de Kanesatake, et en présenter les conséquences. Pour ce, il lui fallait étudier les documents historiques et faire du travail sur place, notamment interviewer, dans ces communautés, les membres des diverses factions.
Vers le mois de juin 1990, un litige entre les Mohawks de Kanesatake et le conseil municipal de la ville d’Oka est entré dans une phase critique. Il s’en est suivi un affrontement …
Selon le témoignage de toutes les personnes directement concernées, la situation était très tendue. Les témoins de la fonctionnaire ont déclaré qu’il était difficile de pénétrer dans la zone externe d’accès restreint à cause des tactiques d’intimidation employées par la Sûreté du Québec; ils ont notamment décrit comment on les retardait et menaçait lorsqu’ils tentaient d’aller livrer des denrées alimentaires approuvées. Ils avaient très peu confiance en la police et ne savaient pas à quoi s’en tenir à propos du rôle joué par les Forces armées.
Pendant la fin de semaine de la Fête du travail, le cordon encerclant la cinquantaine de protestataires a été resserré davantage, au point où ils ne pouvaient plus dépasser les abords du centre de traitement. Un fil plat tranchant a été placé autour de ce secteur. Peu de temps après, les communications normales par téléphone et par télécopieur ont été rompues et une seule ligne d’urgence, semblable à celles qu’on met en place lors de prises d’otages, a été établie. Toutes les communications à destination ou en provenance de ce secteur s’effectuaient par cette ligne, qui était étroitement surveillée et réservée aux personnes approuvées par les Forces armées. Mme Horn était l’une des personnes qui se trouvaient dans la zone ainsi délimitée …
Avant cette absence du travail sans autorisation, l’employeur avait déjà commencé à se demander quelle peine la fonctionnaire méritait pour sa conduite durant la crise. En fait, c’est à la suite d’un article paru le 28 août dans la Montreal Gazette qu’il a commencé à songer aux sanctions qu’il pourrait prendre à l’endroit de Mme Horn en raison de ses infractions graves au Code d’éthique et au Code régissant les conflits d’intérêts (pièces E-10 et E-11). M. Van Iterson, dans son témoignage, a déclaré que l’article de la Gazette mentionnait le nom de la fonctionnaire comme l’une des dirigeantes des Mohawks. Dans une note au dossier datée du 14 septembre 1990 (Pièce G-20), M. R.E. Smart, chef des Relations de travail et de la rémunération, a expliqué clairement les efforts déployés par la fonctionnaire et l’attitude adoptée par la direction pendant la période qui a précédé le recours à l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. En voici la teneur.
[traduction] NOTE AU DOSSIER SUJET : KAHN-TINETTA [sic] HORN
Voici une brève chronologie des événements qui ont amené Mme Kahn-Tinetta [sic] Horn à abandonner son poste.
…
Chronologie
Le 4 septembre 1990 : M. George Miller, un ex-conjoint de Mme Horn, téléphone au bureau du sous-ministre pour informer le Ministère que celle-ci ne rentrera pas au travail à cause de ses activités à Oka.
Le 5 septembre 1990 : M. Robert Allen, un fonctionnaire du Ministère et un ami de Mme Horn, présente au nom de cette dernière une formule « Demande de congé et rapport d’absence »—qu’il a également signée au nom de celle-ci—demandant un « autre congé payé » qui entrerait en vigueur le 4 septembre. M. Allen précise sur la formule que la fonctionnaire retournera au ministère dès qu’elle le pourra, mais que pour le moment elle est prise derrière le barbelé à Oka.
Le 6 septembre 1990 : Mme Horn téléphone au bureau du sous-ministre depuis le centre de traitement à Oka. M. Swain n’est pas en mesure de lui parler, mais son chef de cabinet, Mme Roberta Sante, la rappelle en son nom. Mme Horn lui explique qu’elle n’a pas l’intention d’abandonner son poste et qu’elle veut que ses crédits de congé non utilisés soient appliqués à son absence. Elle demande en outre que l’on continue de déposer son chèque de paie directement dans son compte de banque. Mme Sante lui demande de formuler sa demande par écrit.
Le 7 septembre 1990 : le sous-ministre reçoit de Mme Horn une télécopie, datée de la veille, dans laquelle elle affirme que le bureau de poste de Kahnawake est fermé depuis deux semaines; par conséquent, la lettre (mise à la poste le 24 août 1990), dans laquelle elle demande un congé spécial ne sera livrée au Ministère qu’une fois le service postal rétabli. Dans la télécopie, elle demande que l’on continue de déposer automatiquement sa paie dans son compte. Elle donne un numéro de téléphone où on peut la joindre en tout temps à Kanesatake.
Aussi, le 7 septembre, le bureau du sous-ministre reçoit un appel téléphonique du professeur de Mme Horn à l’université Carleton. Le professeur Vallantyne [sic] informe le Ministère que Mme Horn est prise derrière le barbelé à Oka et qu’elle n’est pas en mesure de se présenter au travail.
Le 11 septembre 1990 (17 h 26) : l’avocat de Mme Horn, Me Clayton Ruby, envoie par télécopieur au cabinet du ministre une lettre informant le Ministère qu’il représente Mme Horn. Il dit s’inquiéter du fait que la Montreal Gazette a laissé entendre que le Ministère songeait à congédier Mme Horn. Il exprime dans les termes suivants la position de celle-ci : [traduction] « [ … ] elle est derrière les barricades de barbelé à Oka et elle fait de son mieux pour maintenir la paix entre les deux côtés, un rôle important dans les circonstances. Il est dans l’intérêt public qu’elle agisse comme elle l’a fait jusqu’à maintenant. » Me Ruby précise en outre que l’armée ne veut pas la laisser sortir et qu’il est dangereux pour elle de partir.
Le 13 septembre 1990 : le Ministère informe Mme Horn qu’elle est réputée, aux termes de l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, avoir abandonné son poste. Il notifie Me Clayton Ruby de la décision en même temps.
Considérations
Les médias ont fait beaucoup de cas des activités de Mme Horn derrière les barricades à Oka, ce qui a fait du tort à la direction du Ministère. Ses propos ont été cités dans la presse et elle a accordé des interviews, tant à la radio qu’à la télévision, dans lesquelles elle a ouvertement défendu ses actions.
La direction n’a jamais autorisé Mme Horn à s’absenter du travail et il est clair que celle-ci est consciente des implications de cette absence non autorisée. Par ses actions, la fonctionnaire a contrevenu au Code d’éthique du Ministère ainsi qu’au Code régissant les conflits d’intérêts et l’après-mandat s’appliquant à la fonction publique. Cette conduite répréhensible mérite de sévères sanctions disciplinaires.
…
Le 5 septembre 1990, le chef des Relations de travail pour le Ministère, M. Robert Smart, s’est adressé à des fonctionnaires du Conseil du Trésor pour discuter de la possibilité que Mme Horn ait violé le Code régissant les conflits d’intérêts et le Code d’éthique du Ministère. Les deux parties ont convenu que, vu l’absence non autorisée de Mme Horn et sa participation à Oka, laquelle attirait beaucoup l’attention des médias, l’imposition de mesures disciplinaires pouvait être envisagée; il importait, cependant, de ne pas négliger la nature délicate de la situation. Il serait judicieux pour le Ministère de faire savoir à Mme Horn qu’il était bien au courant de ses actions.
Le 12 septembre 1990, le sous-ministre associé, M. Fred Drummie parle au chef de l’état-major de la Défense, le général John de Chastelain, qui lui confirme que Mme Horn est libre de quitter Oka n’importe quand et en toute sécurité. Celui-ci acquiesce à la demande de M. Drummie de faire relayer cette information par un membre des Forces armées en poste à Oka au chef Bob Antone, pour que ce dernier en fasse part à Mme Horn.
Les articles parus dans la presse au sujet de ce que faisait Mme Horn derrière les barricades pendant qu’elle était toujours fonctionnaire au ministère des Affaires indiennes et du Nord faisaient remarquer que le public n’approuvait pas sa conduite.
…
Le 12 septembre 1990, l’affaire a été discutée en profondeur par le directeur général des Ressources humaines pour les Affaires indiennes, M. Jim Dalzell, M. Smart et l’avocat-conseil principal au Conseil du Trésor, Me Harvey Newman.
…
Conclusion
Les faits entourant l’absence non autorisée de Mme Horn depuis le 4 septembre 1990 ont été discutés en détail par M. Dalzell, M. Drummie et M. Willem Van Iterson, sous-ministre adjoint intérimaire, Services aux Indiens. La haute direction, convaincue que Mme Horn avait été absente sans autorisation pendant plus d’une semaine et qu’elle était en mesure de mettre fin à son absence, a jugé que les conditions étaient réunies pour conclure à l’abandon de poste. M. Van Iterson, à qui ce pouvoir avait été dûment délégué, a donc conclu que Mme Horn avait abandonné son poste et il lui a écrit pour lui en faire part. Mme Horn a cessé d’être une fonctionnaire du ministère des Affaires indiennes le 13 septembre 1990.
Tel qu’il est signalé plus haut, vers le 28 août 1990, le sous-ministre et d’autres hauts fonctionnaires du Ministère ont pris connaissance de l’article de la Gazette désignant la fonctionnaire comme l’une des dirigeantes des Mohawks. Des discussions ont eu lieu sur l’imposition d’éventuelles mesures disciplinaires. Il a été décidé de ne prendre aucune décision avant d’avoir abordé le sujet de front avec Mme Horn à son retour au travail. Pendant la fin de semaine du 1er septembre, l’armée a encerclé le centre de traitement, à Oka, en installant tout autour un barbelé fait de fil plat tranchant. La fonctionnaire se trouvait dans la zone encerclée. Le mardi 4 septembre, la fonctionnaire, dont le congé d’études venait de prendre fin, ne s’est pas présentée au travail. Le mercredi, un collègue de travail, M. R. Allen, a présenté une demande pour que la fonctionnaire, à cause de sa situation, puisse obtenir un autre congé payé pour d’autres raisons. Dans les jours subséquents, le sous-ministre adjoint, M. Van Iterson, a conclu que, compte tenu du rôle non autorisé que jouait Mme Horn à Oka, sa demande était ridicule et serait refusée. La fonctionnaire n’a toutefois jamais été informée de cette décision.
Plus tard dans la semaine, la fonctionnaire a tenté de joindre le sous-ministre, M. Swain; il n’était pas libre et c’est son chef de cabinet, Mme Sante, qui a rappelé Mme Horn. Celle-ci a demandé que ses chèques soient déposés à son compte comme d’habitude et que ses crédits de congé annuel non utilisés soient appliqués à son absence du travail. Mme Sante lui a dit de présenter sa demande par écrit et elle a fait part de la conversation à M. Swain. La fonctionnaire n’a pas présenté sa demande par écrit. Cependant, dans une lettre du 6 septembre adressée à M. Swain, elle a fait savoir que, le 24 août 1990, elle avait envoyé une demande de congé spécial qui avait été postée au bureau de poste de Kahnawake. Comme elle avait récemment appris que ce dernier avait été fermé, elle voulait l’informer qu’il devrait recevoir cette lettre « une fois le service postal rétabli ». En fait, l’employeur n’a jamais reçu la lettre. La demande de congé de la fonctionnaire a subséquemment été soulevée à une réunion de gestion, mais aucune décision n’a été prise. Le résultat de la réunion n’a jamais été communiqué à la fonctionnaire. Mme Horn a téléphoné à M. Gordon Williams, directeur de l’Emploi des autochtones, qui l’a informée que « si tout allait bien à son retour, elle serait affectée temporairement à sa section ». Elle l’a rappelé deux autres fois par la suite; la seconde fois, M. Williams avait reçu instruction de ne pas prendre l’appel, mais de diriger toute communication ultérieure provenant de Mme Horn à M. Dalzell, aux Ressources humaines. Pendant ces appels, on n’a jamais fait part à la fonctionnaire des préoccupations ou des intentions que l’employeur avait à son endroit.
Le groupe de gestion s’est réuni entre le 4 et le 12 septembre et, le 5 septembre … a reçu instruction de mettre la fonctionnaire au courant des inquiétudes que la direction avait à son égard. Cela n’a jamais été fait. C’est par la presse, vers le 11 septembre, que la décision de l’employeur de mettre fin à l’emploi de la fonctionnaire a été connue. L’avocat de celle-ci a communiqué avec le Ministère en son nom et, le 13 septembre, il a reçu une réponse l’informant que l’employeur avait conclu, en vertu de l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, qu’elle avait abandonné son poste. L’employeur a envoyé la notification d’abandon de poste à l’adresse de la fonctionnaire à Ottawa, bien qu’il sût qu’elle était toujours à l’intérieur des barricades, à Oka. Dans la lettre de Me Ruby, l’employeur dit ce qui suit : [traduction] « Puisque nous ne pouvons livrer la lettre de M. Van Iterson directement à votre cliente à Oka, il se peut qu’elle en ignore le contenu … »
L’arbitre a ensuite résumé les arguments invoqués. Compte tenu de l’arrêt Richard c. La Commission des relations de travail dans la Fonction publique, [1978] 2 C.F. 344 (C.A.), il a conclu qu’il avait le pouvoir et l’obligation de déterminer si la déclaration d’abandon que l’employeur avait faite constituait en réalité un congédiement disciplinaire. En tranchant cette question, l’arbitre a notamment dit ceci :
Je suis d’avis, après avoir examiné l’ensemble de la preuve, que l’employeur a décidé d’imposer à la fonctionnaire des mesures disciplinaires à la suite de ses activités à l’appui de l’équipe de négociation des Mohawks, décision qui a clairement été prise avant que celle-ci ne se présente pas au travail le 4 septembre et qu’elle ne demeure absente jusqu’à la date de la cessation d’emploi. Tout ce qui restait à décider, c’était la sanction à lui infliger. J’estime par ailleurs que si l’employeur a eu recours à l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, c’était à cause des activités de la fonctionnaire plutôt qu’à cause de son absence. D’autre part, les dispositions pertinentes de la convention collective permettent clairement à une fonctionnaire de demander un congé spécial et un congé annuel et, bien qu’il soit tout aussi clair que la demande n’est pas automatiquement approuvée, l’employeur est tenu d’y répondre. Le fait qu’il n’a pas répondu aux demandes de congé de la fonctionnaire et qu’il n’a pas prévenu celle-ci qu’il envisageait de mettre fin à son emploi confirme à mes yeux que les mesures qu’il a prises étaient de nature disciplinaire. Après avoir étudié attentivement toutes les circonstances de l’affaire, je dois conclure que l’employeur, en recourant à l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, a voulu camoufler la mesure disciplinaire qu’il avait décidé d’imposer à Mme Horn.
L’arbitre a ensuite fait une distinction entre la situation en l’espèce et celle qui existait dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Michaud, ci-dessous cité, puis il a continué.
La preuve me convainc que l’employeur n’a pas décidé de mettre fin à l’emploi de la fonctionnaire parce que celle-ci aurait été absente de son poste à partir du 4 septembre 1990, date à laquelle elle devait retourner au travail après avoir été pendant deux ans en congé d’études payé. La décision de l’employeur a plutôt été motivée par ce que la fonctionnaire a fait pour appuyer l’équipe de négociation des Mohawks; or cet appui de Mme Horn a commencé avant le 4 septembre 1990 et s’est poursuivi au-delà du 13 septembre. C’est ce qui m’amène à conclure que Mme Horn a été congédiée pour des motifs disciplinaires.
Les arguments des parties
Au nom du requérant, il est soutenu que l’arbitre a commis une erreur de droit en concluant que la mesure prise par l’employeur constituait en réalité un congédiement disciplinaire. Il n’est pas contesté que Mme Horn s’était absentée de son travail sans autorisation pendant plus d’une semaine lorsque la déclaration d’abandon a été faite. Compte tenu des exigences légales de l’article 27 de la LEFP, il est soutenu que pour que l’arbitre tire la conclusion qu’il a tirée, il devait conclure que l’opinion de M. Van Iterson, agissant au nom de l’employeur, à savoir que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, était fondée sur des motifs futiles ou que celui-ci avait agi de mauvaise foi. Aucune conclusion de ce genre n’a expressément été tirée. En outre, dans sa décision, l’arbitre a conclu que la note au dossier du 14 septembre 1990, qu’il a citée au complet, « expliqu[ait] clairement les efforts déployés par la fonctionnaire et l’attitude adoptée par la direction pendant la période » qui a précédé l’imposition de la mesure en vertu de l’article 27 de la LEFP. On dit que, ce faisant, l’arbitre a considéré comme véridiques les déclarations faites dans cette note, et notamment que
La haute direction, convaincue que Mme Horn avait été absente sans autorisation pendant plus d’une semaine et qu’elle était en mesure de mettre fin à son absence, a jugé que les conditions étaient réunies pour conclure à l’abandon de poste. M. Van Iterson, à qui ce pouvoir avait été dûment délégué, a donc conclu que Mme Horn avait abandonné son poste et il lui a écrit pour lui en faire part.
À l’audience, M. Van Iterson a confirmé son opinion en témoignant qu’après avoir examiné les renseignements mis à sa disposition le 13 septembre, il a conclu que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté.
Le requérant reconnaît que les circonstances de l’espèce auraient pu justifier l’imposition d’une mesure disciplinaire, mais elles satisfaisaient également aux exigences de l’article 27 de la LEFP. Dans ces conditions, il est soutenu qu’il était loisible à l’employeur de décider de la mesure à prendre et qu’une fois que les circonstances justifiant une déclaration d’abandon étaient établies, l’arbitre n’était pas autorisé à mener une enquête plus approfondie. L’arbitre ne pouvait pas alors décider que la mesure prise était autre chose que ce qu’elle était réputée être, à savoir une déclaration d’abandon, et cette déclaration ne pouvait pas faire l’objet d’un grief ou d’un renvoi à l’arbitrage en vertu du paragraphe 92(1) de la LRTFP.
Au nom de l’intimée, il est soutenu que l’arbitre n’a pas commis d’erreur de droit et qu’en décidant que la cessation d’emploi constituait en réalité un congédiement disciplinaire, il a tiré une conclusion de fait qui relevait de sa compétence. Cette décision n’est pas ici contestée, conformément à l’alinéa 18.1(4)d) [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5] de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, parce qu’elle a été « tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments » dont l’arbitre disposait. En outre, le législateur soustrait pareille décision au contrôle judiciaire au moyen de la clause privative figurant au paragraphe 101(1) de la LRTFP, et la Cour devrait intervenir uniquement si elle conclut que la décision est manifestement déraisonnable, ce qui, est-il soutenu, n’est pas le cas.
Subsidiairement, si la Cour conclut que la décision de l’arbitre ne peut être maintenue que si ce dernier a conclu que l’employeur était de mauvaise foi en prenant sa décision, les conclusions tirées par l’arbitre montrent clairement, sinon expressément, que c’est ce qu’il a fait et la preuve mise à sa disposition justifiait clairement pareille conclusion.
La norme de contrôle
Les arguments des parties sont fondés sur des idées différentes au sujet de la question que l’arbitre devait trancher et, par conséquent, de la norme de contrôle judiciaire appropriée. De l’avis du requérant, la question de savoir si le grief concerne un congédiement disciplinaire suppose que l’arbitre tranche correctement une question juridictionnelle; autrement, une erreur de droit est commise et la Cour devrait intervenir.
De l’avis de l’intimée, le paragraphe 92(1) de la LRTFP n’est pas une disposition conférant la compétence. Ainsi, la question de savoir si le grief concernait un congédiement disciplinaire relève de la compétence de l’arbitre, et la Cour ne devrait intervenir que s’il est conclu que la décision de ce dernier était manifestement déraisonnable.
Il est établi que lorsque le législateur limite le contrôle des décisions d’un organisme administratif au moyen d’une clause privative, le tribunal n’interviendra que s’il conclut que l’organisme a excédé sa compétence en rendant une décision erronée sur une question de droit relative à sa compétence pour examiner l’affaire dont il est saisi ou, si la question en litige relève de la compétence de l’organisme, en commettant une erreur manifestement déraisonnable. Voir Canada (Procureur général) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1993] 1 R.C.S. 941, juge Cory, aux pages 956 et 957 (l’affaire de l’AFPC de 1993). Cet arrêt montre jusqu’à quel point il est difficile de définir la question initiale en l’espèce, en ce qui concerne la compétence que l’arbitre avait pour examiner le grief au fond : une simple erreur de la part de l’arbitre entraîne-t-elle un excès de compétence, comme le juge Cory l’a conclu dans l’avis qu’il a exprimé au nom de la majorité de la Cour, ou faut-il que la décision de l’arbitre soit manifestement déraisonnable pour qu’il excède sa compétence, comme le juge L’Heureux-Dubé l’a conclu dans l’avis qu’elle a exprimé au nom de la minorité?
À mon avis, compte tenu de la décision que le juge Cory a rendue au nom de la majorité dans l’affaire de l’AFPC de 1993, l’arbitre, en décidant si le grief que Mme Horn avait présenté en vertu du paragraphe 92(1) de la LRTFP se rapportait à une « mesure disciplinaire entraînant le congédiement », examinait une question de compétence, de sorte qu’une simple erreur justifie l’intervention de la Cour pour voie de contrôle judiciaire. (Voir l’affaire de l’AFPC de 1993, juge Cory, aux pages 964 à 968). Si la détermination de la compétence en vertu de l’article 99 de la LRTFP par la Commission des relations de travail dans la fonction publique constitue une question telle que celle qui a été définie par le juge Cory, il doit, à mon avis, en être de même pour la détermination de la compétence par l’arbitre qui examine un grief fondé sur l’alinéa 92(1)b) de ladite Loi. L’analyse fonctionnelle visant à définir la question, énoncée par le juge Beetz dans l’arrêt U.E.S., Local 298 c. Bibeault, [1988] 2 R.C.S. 1048, aux pages 1088 à 1090, et appliquée par le juge Cory dans l’affaire de l’AFPC de 1993, entraîne, en l’espèce, une définition de la question dont l’arbitre était saisi semblable à celle donnée par le juge Cory dans cet arrêt-là. Si tel est le cas, une simple erreur dans l’application de la Loi, c.-à-d. du paragraphe 92(1) de la LRTFP, suffit pour qu’on puisse conclure que l’arbitre a excédé la compétence que la loi lui conférait; ou encore, comme on le dit parfois, l’arbitre doit « avoir raison » dans son interprétation.
En tranchant la question de savoir si le grief de l’intimée était visé par le paragraphe 92(1) parce qu’il concernait une « mesure disciplinaire entraînant le congédiement », l’arbitre était tenu d’évaluer la mesure prise par l’employeur, qui était réputé agir en vertu de l’article 27 de la LEFP. La décision de l’arbitre, à savoir que la mesure avait été prise pour des raisons disciplinaires et que cela constituait donc un congédiement relevant de sa compétence en vertu de l’alinéa 92(1)b ) de la LRTFP, était une décision de fait, laquelle est parfois décrite comme se rapportant à un fait juridictionnel étant donné que le pouvoir de l’arbitre d’examiner le grief au fond dépendait de la détermination de ce fait. Sa décision n’est pas contestée parce qu’elle était abusive ou arbitraire, ou qu’il n’a pas tenu compte des éléments dont il disposait, comme l’exige l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale dans le cas d’une demande de contrôle judiciaire se rapportant à des conclusions de fait. Elle est plutôt contestée pour le motif que l’arbitre devait, en droit, tirer d’autres conclusions de fait pour justifier sa conclusion relative à la compétence; or, il est soutenu que l’arbitre a commis une erreur de droit puisqu’il n’a pas expressément énoncé ces conclusions dans sa décision. Il s’agit d’un motif justifiant le contrôle judiciaire en vertu de l’alinéa 18.1(4)c) [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5] de la Loi sur la Cour fédérale.
En réglant cette affaire et en tranchant la question de savoir si l’arbitre a commis une erreur de droit, c’est-à-dire s’il a commis une erreur en tranchant la question juridictionnelle, il faut, à mon avis, tenir compte de deux considérations générales. En premier lieu, il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire et, comme c’est le cas dans toute demande de ce genre, il incombe au requérant de démontrer que l’arbitre a commis une erreur justifiant l’intervention de la Cour. En d’autres termes, le requérant doit en fin de compte convaincre la Cour que la décision de l’arbitre était erronée. L’intimée n’a pas à établir que l’arbitre avait raison, du moins au point de vue de la charge finale imposée aux parties. Habituellement, dans les procédures de contrôle judiciaire, on fait donc preuve d’une retenue importante à l’égard de la décision de l’arbitre ou de l’administrateur auquel le législateur a attribué une responsabilité légale. En second lieu, dans ce cas-ci, la retenue est justifiée, sinon accrue, par les fonctions spéciales que le législateur a confiées à la Commission des relations de travail dans la fonction publique et aux arbitres désignés par cette dernière, fonctions sur lesquelles l’article 101 met particulièrement l’accent, celui-ci étant une clause privative libellée en termes généraux qui prévoit que les décisions de la Commission ou des arbitres ne peuvent pas faire l’objet d’un appel ou d’un contrôle judiciaire.
Ces fonctions spéciales, ainsi que l’expertise des personnes chargées, en vertu de la LRTFP, de régler les différends survenant en matière de relations du travail dans le secteur public sont maintenant établies. (Voir l’affaire de l’AFPC de 1993, juge Cory, aux pages 967 et 968, et juge L’Heureux-Dubé, à la page 978, et Canada (Procureur général) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, [1991] 1 R.C.S. 614, juge Cory, aux pages 659 à 663, à l’avis duquel le juge Sopinka, parlant au nom de la majorité de la Cour, souscrivait en principe, à la page 628). Dans cette dernière affaire, (l’affaire « Econosult »), il s’agissait de trancher une question juridictionnelle définie en partie par l’inclusion par le législateur de la définition de l’expression « fonctionnaire » dans la LRTFP. Or, dans l’affaire de l’AFPC de 1993, la question de la compétence ne faisait pas entrer en ligne de compte une définition légale, de la même façon qu’il n’existe pas de définition législative de ce qui constitue une « mesure disciplinaire » au sens où cette expression est employée au paragraphe 92(1) de la LRTFP.
À mon avis, l’intention du législateur était que la détermination de ce qui constitue une « mesure disciplinaire », dans un cas donné, relève des personnes désignées à titre d’arbitres par la Commission des relations de travail dans la fonction publique, conformément à l’article 93 de la LRTFP. Il s’agit pour l’arbitre de savoir si la mesure prise par l’employeur constitue une « mesure disciplinaire entraînant le congédiement » au sens du paragraphe 92(1). C’est le genre de question qui constitue le coeur des préoccupations de la Commission en matière de relations du travail dans la fonction publique, question qui relève de l’expertise et de l’expérience reconnues des personnes désignées à titre d’arbitres par la Commission. En adoptant le libellé général de l’article 101 de la Loi, le législateur a décidé que les décisions de la Commission ou des arbitres désignés par cette dernière ne seraient habituellement pas assujetties au contrôle, et ce, afin d’assurer le règlement rapide et définitif des litiges entre l’employeur et les fonctionnaires en vertu de la LRTFP.
Compte tenu de ces considérations générales concernant la retenue dont il convient de faire preuve à l’égard des décisions des arbitres, je conclus qu’en l’espèce, il incombe en fin de compte au requérant de convaincre la Cour que l’arbitre a commis une erreur en concluant que l’intimée avait été congédiée pour des raisons disciplinaires.
Analyse
Je ne suis pas convaincu que l’arbitre ait commis une erreur en l’espèce, et ce, pour deux raisons. En premier lieu, je ne suis pas convaincu qu’afin de justifier sa conclusion, à savoir que la mesure prise par l’employeur constituait une mesure disciplinaire entraînant le congédiement au sens du paragraphe 92(1), l’arbitre était tenu, en droit, de conclure d’abord que l’opinion de M. Van Iterson, soit que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, était fondée sur des motifs futiles ou que ce dernier n’avait pas agi de bonne foi. En second lieu, si j’ai tort d’interpréter la loi de cette façon, la décision de l’arbitre dans son ensemble montre, à mon avis, que celui-ci a conclu, bien qu’il ne l’ait pas expressément déclaré, que M. Van Iterson n’avait pas agi de bonne foi, et certains éléments de preuve justifient pareille conclusion. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que l’arbitre se soit trompé et qu’il ait commis une erreur de droit. Enfin, s’il faut que cette Cour conclue, non seulement que l’arbitre n’avait pas tort, mais qu’il a eu raison d’appliquer comme il l’a fait le paragraphe 92(1), je conclus que, compte tenu de la preuve dont il disposait, il a eu raison d’appliquer ainsi la loi. J’examinerai chacune de ces conclusions l’une à la suite de l’autre.
Premièrement, je ne souscris pas à l’avis du requérant, à savoir que, en droit, afin de justifier sa conclusion, l’arbitre devait d’abord conclure que la conviction de M. Van Iterson, soit que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, était fondée sur des motifs futiles ou que ce dernier n’avait pas agi de bonne foi. Cet argument est essentiellement fondé sur la décision que le juge de Grandpré a rendue dans Jacmain c. Procureur général (Can.) et autre, [1978] 2 R.C.S. 15, aux pages 36 et 37, ainsi que sur le jugement prononcé par la Cour d’appel dans Canada (Procureur général) c. Penner, [1989] 3 C.F. 429 (C.A.).
Dans les arrêts Jacmain et Penner, des stagiaires avaient été renvoyés en vertu du paragraphe 28(3) de la LEFP et l’arbitre avait fait droit à un grief fondé sur ce qui est maintenant le paragraphe 92(1) de la LRTFP, dans lequel il était allégué que la cessation d’emploi était fondée sur des raisons disciplinaires. Les deux arrêts étayent la proposition selon laquelle lorsque les circonstances justifient l’imposition d’une mesure disciplinaire ou le renvoi du stagiaire en vertu de l’article 28 de la LEFP, l’employeur est libre de choisir cette dernière mesure. Le requérant soutient que le même principe s’applique lorsque la mesure qui est prise est fondée sur l’article 27 de la Loi.
Je ne suis pas prêt à retenir cet argument. À mon avis, les arrêts Jacmain et Penner devraient tous les deux être considérés comme se rapportant au renvoi d’un stagiaire en vertu de l’article 28, faits sur lesquels portait chaque arrêt. À mon avis, bien qu’il soit à première vue semblable au problème qui se pose en l’espèce, le renvoi, en vertu de l’article 28, d’un stagiaire pour un motif déterminé, soit son inaptitude en général, soulève des questions d’une nature différente de celles que suscite la déclaration, fondée sur l’article 27, qu’une fonctionnaire de longue date a abandonné son poste, et met implicitement en cause un pouvoir discrétionnaire plus étendu de la part de l’employeur. Je remarque qu’en l’espèce, il n’existe aucune preuve et aucune mention du fait que l’employeur n’était pas satisfait du travail de l’intimée et, de fait, on a dit qu’il avait encouragé l’intimée à entreprendre ses études et que cette dernière avait obtenu à cet égard un congé entièrement payé qui devait initialement durer un an, mais qui a été prolongé pour une seconde année. Il n’existe aucune preuve d’absences passées qui auraient suscité de l’inquiétude. On ne pourrait de toute évidence pas s’attendre à ce que pareille fonctionnaire abandonne son poste.
En outre, un fonctionnaire de longue date, dont les services ont été retenus bien après le stage, a le droit de présenter un grief et de demander le renvoi à l’arbitrage en vertu du paragraphe 92(1) de la LRTFP si la cessation d’emploi constitue une « mesure disciplinaire », c’est-à-dire une mesure prise pour des raisons disciplinaires. Le congédiement disciplinaire est possible, mais la mesure prise par l’employeur pour des raisons disciplinaires est assujettie aux procédures de règlement des griefs et de renvoi à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 92(1)b). Lorsque l’arbitre est saisi d’un grief dans lequel il est allégué que la cessation d’emploi constitue en réalité un congédiement disciplinaire, il doit déterminer si cette allégation correspond à la réalité ou si la cessation d’emploi, qui résulte en l’espèce de la déclaration que la fonctionnaire a abandonné son poste, est fondée sur d’autres motifs que ceux qui sont prescrits par la loi. Dans un cas comme celui-ci, il ne suffit pas que l’arbitre se demande si les conditions légales d’une déclaration d’abandon semblent avoir été remplies et, si c’est le cas, s’abstienne de mener toute autre enquête. Il doit se demander si cette apparence correspond à la réalité en évaluant ce sur quoi la mesure est fondée, compte tenu de la preuve présentée. (Voir Richard c. La Commission des relations de travail dans la Fonction publique, précité.)
Le fondement de la mesure prise par l’employeur dépend de toute évidence du but dans lequel la mesure a été prise et ce but peut influer sur la bonne foi de l’employeur. À mon avis, la conclusion tirée par l’employeur, en vertu de l’article 27 de la LEFP, comporte deux éléments, à savoir l’opinion selon laquelle l’absence de la fonctionnaire ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté et, ce qui est tout aussi important, bien que cela soit implicite compte tenu du but évident de cette disposition, que la fonctionnaire a abandonné son poste. À mon avis, cette opinion implicite est essentielle, compte tenu du but de la disposition, lequel est selon moi évident en soi, à savoir conférer à l’employeur le pouvoir de remédier à la situation lorsqu’un fonctionnaire permanent abandonne son poste, et les exigences énoncées dans la disposition concernent les circonstances, la preuve qui justifie cette opinion. Si, selon la prépondérance des probabilités, l’arbitre conclut que le but de l’employeur est lié au fait que le fonctionnaire s’est absenté de son travail sans autorisation dans des circonstances que l’employeur peut raisonnablement considérer comme n’étant pas indépendantes de sa volonté, de sorte qu’il est raisonnable de croire que le fonctionnaire a abandonné son poste compte tenu des circonstances dont l’employeur a connaissance, l’arbitre doit reconnaître la déclaration d’abandon et conclure qu’il n’a pas compétence en vertu du paragraphe 92(1) de la LRTFP. D’autre part, s’il est conclu que le but visé est de discipliner le fonctionnaire, l’arbitre est tenu d’examiner le grief au fond, comme il l’a fait en l’espèce.
Cette opinion est implicitement étayée par l’arrêt Canada (Procureur général) c. Michaud, inédit, dossier du greffe A-31-87, 8 juin 1987 (C.A.F.), dans lequel le juge Hugessen, J.C.A. a dit ceci au nom de la Cour :
Nous sommes d’avis que l’arbitre s’est arrogé une compétence qu’elle n’avait pas. L’intimé ayant fait l’objet d’une déclaration d’abandon de poste en vertu de l’article 27 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique … l’arbitre, qui agissait en vertu du paragraphe 91(1) [maintenant par. 92(1)] de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique … n’avait juridiction pour réviser cette déclaration que s’il s’agissait réellement d’une mesure disciplinaire déguisée. Or le dossier ne révèle aucun élément de preuve permettant une telle conclusion. Bien au contraire. Il est constant que l’intimé avait un dossier disciplinaire vierge au moment où il s’est absenté de son travail sans avis pour une période de plusieurs mois. Pour justifier sa conclusion qu’il s’agissait d’une mesure disciplinaire, l’arbitre s’est fondée sur un seul geste de l’employé, soit l’absence non autorisée de ce dernier de son travail, le même geste que celui invoqué par l’employeur pour justifier la déclaration faite en vertu de l’article 27. À notre avis, dès que l’arbitre a constaté que la déclaration d’abandon de poste était fondée sur l’absence de l’employé, elle ne pouvait pas aller au-delà de la déclaration et trouver que cette même absence était à elle seule la source d’une prétendue mesure disciplinaire déguisée.
En l’espèce, l’arbitre a conclu que la mesure prise par l’employeur n’était pas fondée sur l’absence de la fonctionnaire, mais sur les actions de celle-ci lorsqu’il s’était agi d’appuyer l’équipe de négociation des Mohawks. En outre, rien ne permettait de conclure que l’intimée avait l’intention d’abandonner son poste; de fait, la preuve contredit pareille conclusion.
Deux autres arrêts sont cités par le requérant. Dans Morin c. R., [1981] 1 C.F. 3 (C.A.), la Cour d’appel a infirmé la décision par laquelle le juge des requêtes [[1979] 2 C.F. 642] avait accueilli l’action visant à l’obtention d’un jugement déclaratoire selon lequel la déclaration d’abandon faite par un sous-ministre en vertu de l’article 27 de la LEFP était invalide parce que celui-ci n’avait pas exercé son pouvoir discrétionnaire d’une façon équitable puisque, au moment où il avait pris sa décision, il ne connaissait pas tous les motifs de l’absence du fonctionnaire. Étant donné qu’à mon avis, l’employeur n’a pas à connaître tous les motifs de l’absence du fonctionnaire, je ferais une distinction eu égard aux faits de l’arrêt Morin, car dans cette affaire-là le fonctionnaire s’était absenté de son travail à plusieurs reprises à la suite d’une mutation à Ottawa. On avait communiqué par écrit avec le fonctionnaire au moins trois fois pour lui demander des explications et lui ordonner de retourner travailler et on l’avait en fin de compte averti qu’une déclaration d’abandon de poste serait peut-être faite, mais le fonctionnaire n’avait jamais répondu et avait en fin de compte continué à s’absenter. En l’espèce, aucune communication de ce genre n’a été faite à Mme Horn.
Dans l’arrêt Procureur général du Canada c. Cantin, inédit, dossier du greffe T-1070-82, 12 mars 1982 (1re inst.), le juge Addy a accordé un bref de prohibition visant à empêcher l’arbitre d’examiner un grief fondé sur ce qui est maintenant le paragraphe 92(1) de la LRTFP dans une affaire où l’employeur avait déclaré qu’un poste avait été abandonné en vertu de l’article 27 de la LEFP, le fonctionnaire ayant été « absent pour onze jours sans permission et sans donner signe de vie », ce qui constituait apparemment la dernière et la plus récente d’une série d’absences, les absences antérieures étant attribuables à la consommation excessive d’alcool. Dans cette affaire-là, il a été conclu que l’arbitre, qui avait examiné la question de sa compétence à titre préliminaire, avait commis une erreur en fondant sa conclusion que la déclaration d’abandon était invalide sur le motif que la raison de l’absence n’était pas suffisamment claire. En outre, le juge Addy a conclu, en se fondant sur la preuve, que rien ne permettait de remettre en question l’opinion de l’employeur, à savoir que l’absence ne tenait pas à des raisons indépendantes de la volonté du fonctionnaire. Ici encore, il est, à mon avis, possible de faire une distinction entre cette affaire et la présente espèce. Dans ce cas-ci, Mme Horn a communiqué avec l’employeur à plusieurs reprises, tant personnellement, par téléphone et par télécopieur, que par l’entremise de mandataires et de son avocat, et elle avait demandé un congé, sans que l’employeur ne lui réponde; de plus, elle avait fait savoir qu’elle s’estimait prise et incapable de quitter en toute sécurité la zone encerclée par le barbelé, à Kanesatake, ce que l’employeur savait, compte tenu des communications que la fonctionnaire lui avait faites personnellement ou par l’entremise de son avocat pendant la période allant du 5 au 11 septembre.
À mon avis, les circonstances de l’affaire Cantin ainsi que celles de l’affaire Morin sont si différentes des faits de l’espèce que ces arrêts ne peuvent pas être considérés comme déterminants en l’espèce. Dans ces deux arrêts, il a été reconnu que la mesure prise par l’employeur était fondée sur l’absence non autorisée du fonctionnaire.
Par conséquent, je ne suis pas convaincu que les arrêts cités par le requérant établissent que l’arbitre était tenu de conclure que l’opinion de M. Van Iterson, à savoir que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, était fondée sur des motifs futiles ou que ce dernier n’avait pas agi de bonne foi. En examinant un grief dans lequel il est allégué que la déclaration selon laquelle une fonctionnaire de longue date a abandonné son poste constitue en réalité un congédiement disciplinaire, l’arbitre a le droit, à mon avis, de tenir compte de la preuve et d’évaluer l’opinion du décideur, qui est essentielle à la mesure prise en vertu de l’article 27 de la LEFP, à savoir que la fonctionnaire a abandonné son poste, ainsi que d’évaluer le fondement de la mesure ou le but de l’employeur. Si l’on peut dire que l’employeur se préoccupait de l’absence non autorisée et qu’il a agi pour ce motif, croyant que l’absence de la fonctionnaire ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, et que la fonctionnaire pouvait donc raisonnablement être considérée comme ayant abandonné son poste, la déclaration d’abandon est étayée et l’arbitre qui examine un grief fondé sur le paragraphe 92(1) n’a pas compétence pour examiner cette mesure. Si la mesure prise par l’employeur vise des activités autres que l’absence non autorisée de la fonctionnaire, dans des circonstances où l’employeur ne peut pas raisonnablement croire que cette dernière a abandonné son poste, l’arbitre peut conclure que la déclaration d’abandon constitue de fait une mesure disciplinaire et un congédiement déguisé. À mon avis, il n’existe aucune exigence expresse établie en droit, lorsqu’il s’agit pour l’arbitre de conclure à l’existence de faits particuliers s’il faut faire preuve de retenue à l’égard de la décision que celui-ci a rendue dans un domaine relevant de son expertise reconnue. Je ne suis pas convaincu que l’arbitre ait commis une erreur dans l’application du paragraphe 92(1) de la LRTFP ou en concluant que la déclaration d’abandon, dans les circonstances, constituait une mesure disciplinaire relevant de sa compétence.
Si je me trompe en concluant qu’il n’existe aucune exigence expresse établie en droit à l’égard des faits devant être déterminés par l’arbitre et que ce dernier devait conclure que l’employeur était arrivé à son opinion « pour des motifs fondés sur autre chose que la bonne foi », comme l’a dit le juge de Grandpré dans l’arrêt Jacmain , précité, à la page 36, j’estime que l’arbitre a tiré pareille conclusion en l’espèce. Je ne souscris pas à l’avis qu’en citant la note ministérielle, l’arbitre a considéré comme étant établis tous les faits décrits dans cette note. En particulier, en concluant que la mesure prise par l’employeur visait à discipliner l’intimée, l’arbitre a remis en question la bonne foi de l’auteur de la note, à savoir que l’absence de Mme Horn ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, et que la fonctionnaire avait abandonné son poste.
Il est vrai que l’arbitre n’a pas expressément conclu que l’employeur avait agi pour des motifs fondés sur autre chose que la bonne foi, ou que l’opinion de M. Van Iterson, que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, découlait de motifs fondés sur autre chose que la bonne foi. Pourtant, la conclusion tirée par l’arbitre en l’espèce montre que c’est ce qu’il a fait tout aussi clairement que s’il l’avait expressément dit. L’arbitre a conclu que la mesure prise par l’employeur n’était pas fondée sur le fait que celui-ci se préoccupait de l’absence non autorisée de Mme Horn, mais qu’elle était plutôt fondée sur des motifs liés aux activités constatées de Mme Horn à Kanesatake. Il a également conclu que l’employeur avait envisagé l’imposition possible d’une mesure disciplinaire relativement à ces activités à compter du 28 août, date à laquelle la fonctionnaire était encore en congé, et ce, jusqu’au moment où il a déclaré que cette dernière avait abandonné son poste. Tirer pareille conclusion est de toute évidence conclure qu’en déclarant que l’intimée avait abandonné son poste, l’employeur avait agi pour des motifs fondés sur autre chose que la bonne foi. Compte tenu du but intrinsèque de l’article 27 de la LEFP, l’employeur qui agit de bonne foi doit s’inquiéter de ce que la fonctionnaire s’est absentée sans autorisation dans des circonstances lui permettant de croire que cette dernière a abandonné son poste. À mon avis, il existait dans le dossier de nombreux éléments de preuve justifiant la conclusion de l’arbitre et je ne suis pas convaincu que celui-ci ait commis une erreur de droit en concluant, compte tenu des circonstances de l’affaire, que la cessation d’emploi à laquelle avait donné lieu la déclaration selon laquelle l’intimée avait abandonné son poste constituait en réalité une mesure disciplinaire entraînant le congédiement de celle-ci et qu’il avait donc compétence en vertu du paragraphe 92(1) de la LRTFP.
Enfin, si j’ai commis une erreur en abordant ainsi la question de la compétence et s’il faut que cette Cour examine le « bien-fondé » de la décision de l’arbitre, ce dernier avait raison, à mon avis, compte tenu des circonstances de l’affaire. Je tire cette conclusion avec réticence, mais uniquement parce que, à mon avis, cela tend à imposer la charge ultime à l’intimée en ce qui concerne la question de la compétence, et que cela ne fait pas entrer en ligne de compte la retenue dont il convient de faire preuve à l’égard de la décision de l’arbitre, cette dernière étant, à mon avis, amplement étayée par la preuve présentée. Néanmoins, malgré la réticence que j’éprouve à examiner la décision au point de vue de son « bien-fondé », je conclus que l’arbitre avait raison, et ce, en me fondant sur les éléments de preuve suivants.
Dans l’affidavit qu’il a déposé à l’appui de la requête introductive d’instance en contrôle judiciaire présentée par le requérant, Robert E. Smart, conseiller principal en relations du travail au Ministère, déclare ceci :
[traduction] 11. À l’audience d’arbitrage, M. W. Van Iterson a fait la déposition suivante. Le 13 septembre 1990, il a examiné les circonstances dans lesquelles l’intimée s’était absentée de son travail. Il a constaté que celle-ci s’était absentée pendant plus d’une semaine. Il a examiné les renseignements dont il disposait à ce moment-là et il a conclu que l’absence de l’intimée n’était pas autorisée ou prévue par une loi fédérale, et qu’elle ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté. Il croyait que l’intimée était volontairement demeurée derrière les barricades, à Oka, une fois son congé expiré, pour aider les Warriors, et non parce qu’elle ne pouvait pas partir en toute sécurité; en outre, même si elle était « prise », elle savait ou aurait dû savoir qu’en allant derrière les barricades au moment où elle l’a fait, elle risquait de ne pas pouvoir se présenter au travail comme elle devait le faire. M. Van Iterson a fondé sa conclusion, à savoir que l’intimée s’était volontairement absentée, sur un certain nombre d’éléments, et notamment sur le fait qu’il savait pertinemment que, par le passé, l’intimée avait activement appuyé les causes mohawks, ainsi que sur des renseignements obtenus de hauts fonctionnaires du Ministère qui avaient directement communiqué avec l’armée canadienne, celle-ci ayant confirmé qu’on avait assuré à l’intimée qu’elle pouvait quitter Oka en toute sécurité. Il a également tenu compte du fait que l’intimée avait régulièrement communiqué avec le Ministère, mais qu’elle n’avait jamais demandé qu’on l’aide à partir. Il croyait également que l’intimée désirait tellement demeurer derrière les barricades qu’il aurait été inutile de l’informer que le congé demandé ne lui serait pas accordé. Il croyait en outre que l’intimée avait commis des actes d’inconduite pendant son absence non autorisée. Toutefois, après avoir demandé et reçu des conseils, M. Van Iterson a cru qu’il avait le droit d’imposer des mesures disciplinaires à l’intimée ou de déclarer que celle-ci avait abandonné son poste. Il a décidé d’exercer le pouvoir que lui conférait la loi de déclarer que l’intimée avait abandonné son poste. Sa déposition sur ces points n’a pas été contestée.
Cette preuve est atténuée en partie par l’affidavit de Jacques Dupont, qui représentait l’intimée à l’audience devant l’arbitre, lequel apporte certaines réserves à la déposition qui aurait apparemment été faite par M. Van Iterson, compte tenu d’autres éléments de preuve présentés à l’audience.
À mon avis, étant donné ce qui est, à mon avis, le but de l’article 27 de la LEFP, la mesure prise par M. Van Iterson exigeait que celui-ci croie que l’intimée avait abandonné son poste, en se fondant sur une évaluation raisonnable de tous les éléments de preuve dont il disposait. M. Van Iterson pouvait difficilement en arriver raisonnablement à cette conclusion sans tenir compte des faits suivants, qu’il ne semble pas avoir pris en considération :
1) dans l’une de ses communications au Ministère, l’intimée a nié abandonner son poste et a demandé à plusieurs reprises que son chèque de paie continue à être déposé dans son compte bancaire;
2) les demandes de congé de l’intimée n’ont donné lieu à aucune réponse, et ce, qu’il s’agisse de sa demande de congé spécial ou de la demande qu’elle avait faite pour que les crédits de congé annuel inutilisés soient appliqués à son absence, à compter du 4 septembre;
3) les fonctionnaires concernés du Ministère n’ont pas donné de conseils à l’intimée au sujet de sa conduite ou de son absence, et ne lui ont pas fait savoir qu’ils se préoccupaient, ou qu’elle devait retourner travailler, ou encore qu’on envisageait de prendre des mesures en vertu de l’article 27, si elle ne retournait pas travailler. Pareil avis, si l’imposition de cette mesure est envisagée, doit être donné avant qu’une déclaration d’abandon ne soit faite, selon le manuel de gestion du personnel pertinent; or, en l’espèce, on n’a pas tenté d’aviser l’intimée de la chose. Le manuel n’a pas l’effet d’une loi, mais il montre ce à quoi on s’attend normalement de l’employeur et qui est équitable pour le fonctionnaire;
4) M. Van Iterson a tiré sa conclusion, à savoir que l’absence de Mme Horn ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, dans la mesure où il se fondait sur le fait qu’il savait pertinemment que, par le passé, celle-ci avait appuyé des causes mohawks, sans donner à l’intimée la possibilité de faire des observations au sujet des circonstances existantes. Dans la mesure où l’opinion de M. Van Iterson était fondée sur le fait qu’il croyait que l’intimée savait ou aurait dû savoir qu’en allant derrière les barricades, au moment où elle l’avait fait, elle risquait de ne pas pouvoir se présenter au travail comme elle devait le faire, cette opinion ne tient pas compte du fait qu’on ne pouvait pas s’attendre à ce que l’intimée prévoie l’installation du barbelé fait d’un fil plat tranchant quelques jours seulement avant son retour prévu au travail; en outre, M. Iterson reconnaît ainsi implicitement qu’au moment où l’intimée devait retourner travailler, elle ne pouvait pas le faire, et ce, pour des raisons indépendantes de sa volonté;
5) un haut fonctionnaire du Ministère a demandé aux Forces armées de garantir que l’intimée pouvait quitter en toute sécurité la zone encerclée à Kanesatake et d’informer celle-ci de la chose le 12 septembre seulement, soit le jour où les hauts fonctionnaires ont rencontré les représentants du Conseil du Trésor pour décider des mesures à prendre, et le jour avant que la déclaration d’abandon ne soit faite;
6) l’employeur avait uniquement attribué des responsabilités temporaires à l’intimée avant son retour au travail et le 29 août seulement, une affectation temporaire, en attendant un autre examen, avait été prévue étant donné que l’intimée devait retourner travailler le 4 septembre, mais l’attribution de responsabilités particulières au sein du Ministère ne constituait apparemment pas une préoccupation majeure, que ce soit avant ou après le 4 septembre;
7) l’employeur a continué, à compter du 28 août du moins, et ce, jusqu’au 13 septembre, à s’inquiéter vivement des activités constatées de l’intimée à Kanesatake, en se fondant essentiellement sur les comptes rendus des médias, sans aucunement tenter d’obtenir des renseignements de l’intimée elle-même, cette inquiétude étant évidente dans la lettre où il était déclaré que l’intimée avait abandonné son poste.
À mon avis, compte tenu de la preuve, la seule conclusion raisonnable est que l’employeur se préoccupait principalement des activités de l’intimée à Kanesatake, et non du fait qu’elle s’était absentée sans autorisation. Il n’était pas raisonnablement possible de croire que l’intimée avait l’intention d’abandonner son poste. On ne pouvait pas dire que M. Van Iterson avait agi de bonne foi en concluant que l’absence de l’intimée ne tenait pas à des raisons indépendantes de sa volonté, étant donné qu’il savait que celle-ci s’estimait prise et croyait ne pas pouvoir partir en toute sécurité, élément noté pour le compte de l’intimée le deuxième jour de son absence, qu’elle avait de nouveau signalé dans des communications subséquentes et, encore une fois, le 11 septembre par une lettre de son avocat. Ce n’est qu’après l’envoi de cette lettre, le lendemain, qu’un haut fonctionnaire du Ministère a communiqué avec le chef d’état-major général des Forces armées canadiennes pour s’assurer que Mme Horn pouvait partir en toute sécurité et pour demander qu’on informe celle-ci de la chose.
De nombreux éléments de preuve justifiaient la conclusion tirée par l’arbitre, à savoir que la mesure prise par l’employeur était une « mesure disciplinaire entraînant le congédiement » au sens du paragraphe 92(1) de la LRTFP. À mon avis, s’il faut énoncer une conclusion à cet égard, je conclus que l’arbitre avait raison.
Conclusion
Étant donné que je ne suis pas convaincu que l’arbitre ait commis une erreur de droit en concluant qu’il avait compétence pour examiner le grief au fond, cette demande de contrôle judiciaire est rejetée.