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[2002] 2 C.F. 346

2001 CAF 338

A-701-98

Bertha L’Hirondelle en son nom et au nom de tous les autres membres de la bande indienne de Sawridge, Wayne Roan en son nom et au nom de tous les autres membres de la bande indienne d’Ermineskin et Bruce Starlight en son nom et au nom de tous les autres membres de la bande indienne de Sarcee (demandeurs/appelants)

c.

Sa Majesté la Reine (défenderesse/intimée)

et

Le Conseil national des autochtones du Canada, le Conseil national des autochtones du Canada (Alberta) et la Non-Status Indian Association of Alberta (intervenants)

A-793-00

Bruce Starlight en son nom et au nom de tous les autres membres de la première nation Tsuu T’ina (autrefois bande indienne de Sarcee) (demandeurs/ appelants)

c.

Sa Majesté la Reine (défenderesse/intimée)

et

Le Conseil national des autochtones du Canada, le Conseil national des autochtones du Canada (Alberta), la Non-Status Indian Association of Alberta et la Native Women’s Association of Canada (intervenants)

A-794-00

Bertha L’Hirondelle en son nom et au nom de tous les autres membres de la bande indienne de Sawridge (demandeurs/appelants)

c.

Sa Majesté la Reine (défenderesse/intimée)

et

Le Conseil national des autochtones du Canada, le Conseil national des autochtones du Canada (Alberta), la Non-Status Indian Association of Alberta et la Native Women’s Association of Canada (intervenants)

Répertorié : Bande de Sawridgec. Canada (C.A.)

Cour d’appel, juges Linden, Rothstein et Malone J.C.A. Ottawa, 6 et 7 novembre 2001.

Preuve — Appels d’ordonnances prévoyant que, dans la mesure du possible, la transcription de la preuve recueillie lors du procès initial devrait être utilisée dans le nouveau procès — Le jugement initial avait été annulé pour le motif qu’il existait une crainte raisonnable de partialité — La remarque qui a été faite dans Newfoundland Telephone Co. c. Terre-Neuve (Board of Commissioners of Public Utilities) selon laquelle l’audience est nulle s’il existe une crainte raisonnable de partialité veut dire que la décision finale, même si elle est correcte, ne peut pas être maintenue à cause d’une injustice intrinsèque dans la conduite de l’audience — La nullité de l’audience emporte la nullité de l’ordonnance — Cependant, la preuve qui a été recueillie sous serment et en public lors de ce procès-là et qui a fait l’objet d’un contre-interrogatoire et a été transcrite, subsiste et, dans les cas appropriés, la transcription de pareille preuve peut être utilisée dans un procès subséquent.

Pratique — Gestion des instances — La C.A.F. a énoncé sa position dans les cas où une ordonnance rendue par le juge responsable de la gestion d’une instance a été portée en appel — Le juge doit avoir une certaine latitude lorsqu’il s’agit de gérer l’instance, de régler des questions interlocutoires interminables et de faire avancer l’affaire jusqu’à l’étape du procès — La C.A.F. n’intervient que dans les cas où un pouvoir discrétionnaire judiciaire a manifestement été mal exercé.

Un jugement prononcé par la Section de première instance ayant été annulé par la Cour d’appel fédérale pour le motif qu’il existait une crainte raisonnable de partialité, ces appels ont été interjetés contre des ordonnances rendues par le juge responsable de la gestion de l’instance, lesquelles prévoyaient que, dans la mesure du possible, la transcription de la preuve recueillie lors du procès initial devrait être utilisée dans le nouveau procès de façon à éviter de gaspiller du temps et de l’argent en citant des personnes qui avaient déjà témoigné pour qu’elles présentent encore une fois la même preuve. Les appelants ont affirmé qu’il était erroné en droit d’utiliser, dans le deuxième procès, une preuve qui avait été fournie dans un procès à l’égard duquel il avait été conclu à l’existence d’une crainte raisonnable de partialité. Ils se fondaient sur l’arrêt Newfoundland Telephone Company c. Terre-Neuve (Board of Commissioners of Public Utilities), où il avait été statué qu’une audience à l’égard de laquelle il existe une crainte de partialité est nulle.

Arrêt : les appels sont rejetés.

S’il est conclu qu’une audience est nulle, la décision finale, même si elle est correcte, ne peut pas être maintenue, et ce, à cause d’une injustice intrinsèque dans la conduite de l’audience. La nullité de l’audience emporte la nullité de l’ordonnance. Cependant, la preuve qui a été recueillie sous serment et en public lors de ce procès-là et qui a fait l’objet d’un contre-interrogatoire et a été transcrite subsiste et, dans les cas appropriés, la transcription de pareille preuve peut être utilisée dans un procès subséquent, notamment aux fins d’un contre-interrogatoire. Toutefois, il est loisible aux parties et aux intervenants de s’opposer à l’utilisation de la preuve s’ils sont d’avis que certaines remarques ou autres actions du juge qui a présidé le procès initial influent sur la preuve ou qu’il en résulte par ailleurs une injustice.

Quant à l’argument selon lequel le juge qui préside le deuxième procès doit être en mesure de voir et d’apprécier le comportement des témoins et la preuve orale que ceux-ci présentent afin d’arriver à des conclusions valables au sujet de la crédibilité, la deuxième ordonnance permettait au juge du procès de déterminer s’il convenait d’utiliser un élément de preuve précis.

Aucune injustice n’est commise si, en déterminant si la preuve obtenue lors du premier procès est pertinente ou s’il est par ailleurs possible de s’y opposer, le juge du procès prend connaissance de cette preuve. Le juge n’utilise pas un élément de preuve qu’il juge non pertinent ou par ailleurs inadmissible lorsqu’il s’agit de tirer des conclusions de fait.

Les appelants n’ont pas subi de préjudice lorsqu’ils se sont vus obligés de soumettre des arguments au sujet de l’admissibilité de la preuve recueillie lors du premier procès parce que, lorsque les arguments ont été soumis, les actes de procédure avaient tous déjà été déposés. Les appelants étaient au courant des positions prises par l’intimée et par les intervenants et ils avaient la possibilité de soumettre des arguments sur ce point.

Il s’agissait d’une bonne occasion pour la Cour d’appel d’énoncer sa position dans les cas où une ordonnance rendue par le juge responsable de la gestion d’une instance a été portée en appel. Il faut donner au juge responsable une certaine latitude aux fins de la gestion de l’instance. La Cour n’intervient que dans les cas où un pouvoir discrétionnaire judiciaire a manifestement été mal exercé. Il faut donner une certaine « marge de manœuvre » au juge responsable de la gestion de l’instance dans une affaire complexe lorsqu’il s’agit de régler des questions interlocutoires interminables et de faire avancer l’affaire jusqu’à l’étape du procès.

JURISPRUDENCE

Décision appliquée  :

Korte v. Deloitte, Haskins and Sells (1995), 36 Alta. L.R. (3d) 56 (C.A.).

Décisions examinées  :

Newfoundland Telephone Co. c. Terre-Neuve (Board of Commissioners of Public Utilities), [1992] 1 R.C.S. 623; (1992), 95 Nfld. & P.E.I.R. 271; 89 D.L.R. (4th) 289; 4 Admin. L.R. (2d) 121; 134 N.R. 241; R. c. S. (R.D.), [1997] 3 R.C.S. 484; (1997), 161 N.S.R. (2d) 241; 151 D.L.R. (4th) 193; 1 Admin. L.R. (3d) 74; 118 C.C.C. (3d) 353; 10 C.R. (5th) 1; 218 N.R. 1.

Décision citée  :

Bande de Sawridge c. Canada (1998), 157 F.T.R. 236 (C.F. 1re inst.); inf. par Bande de Sawridge c. Canada, [1997] 3 C.F. 580 (1997), 3 Admin. L.R. (3d) 69; 215 N.R. 133 (C.A.).

APPELS d’ordonnances prévoyant que la transcription de la preuve recueillie lors du procès initial, qui avait été annulé pour le motif qu’il existait une crainte raisonnable de partialité, devrait dans la mesure du possible être utilisée dans le nouveau procès (Bande de Sawridge c. Canada (1998), 157 F.T.R. 236 (C.F. 1re inst.)). Appels rejetés.

ONT COMPARU :

Philip P. Healey, Martin J. Henderson, et Catherine M. Twinn pour l’appelante.

Kathleen Kohlman pour l’intimée.

Kenneth S. Purchase et Edward A. Pundyk pour l’intervenant, le Conseil national des autochtones du Canada.

Jonathan P. Faulds pour l’intervenant, le Conseil national des autochtones du Canada (Alberta).

Michael J. Donaldson pour l’intervenante, la Non-Status Indian Association of Alberta.

Mary Eberts pour l’intervenante, la Native Women’s Association of Canada.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Aird & Berlis, Toronto, et Catherine M. Twinn, Slave Lake (Alberta) pour l’appelante.

Le sous-procureur général du Canada pour l’intimée.

Lang Michener, Ottawa, pour l’intervenant, le Conseil national des autochtones du Canada.

Field Atkinson Perraton, Edmonton, pour l’intervenant, le Conseil national des autochtones du Canada (Alberta).

Burnet, Duckworth & Palmer LLP, Calgary, pour l’intervenante, la Non-Status Indian Association of Alberta.

Eberts Symes Street & Corbett, Toronto, pour l’intervenante, la Native Women’s Association of Canada.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés à l’audience par

[1]        Le juge Rothstein, J.C.A. : Il s’agit d’appels interjetés contre des ordonnances rendues par le juge Hugessen à titre de juge responsable de la gestion de l’instance dans un litige complexe. Un jugement initialement prononcé par la Section de première instance dans l’affaire Bande de Sawridge c. Canada , [1996] 1 C.F. 3 (1re inst.), a été annulé par la présente Cour [1997] 3 C.F. 580 pour le motif qu’il existait une crainte raisonnable de partialité de la part du juge de première instance. La Cour a ordonné un nouveau procès. À titre de juge responsable de la gestion de l’instance, le juge Hugessen devait veiller à ce que le nouveau procès soit tenu aussi rapidement que possible et de la manière la plus efficiente et économique possible.

[2]        Les présents appels résultent d’ordonnances du juge Hugessen prévoyant que, dans la mesure du possible, la transcription de la preuve recueillie lors du procès initial devait être utilisée dans le nouveau procès, de façon à éviter de gaspiller du temps et de l’argent en citant des personnes qui avaient déjà témoigné pour qu’elles présentent encore une fois la même preuve.

[3]        La première ordonnance ici en cause a été rendue par le juge Hugessen le 23 septembre 1998 [Bande de Sawridge c. Canada (1998), 157 F.T.R. 236 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 7]. La partie de l’ordonnance qui nous intéresse est ainsi libellée :

1)    Les avocats des demandeurs devront, au plus tard le 15 novembre 1998, soumettre par écrit aux avocats de la défenderesse et de chaque intervenant une liste détaillée de toutes les parties de la transcription des témoignages offerts lors du premier procès, y compris de toute intervention du juge de première instance, dont on ne veut pas qu’elles soient présentées en preuve au nouveau procès, ainsi que les motifs de ces objections. Les avocats de la défenderesse et ceux des intervenants devront y répondre par écrit au plus tard le 30 décembre 1998, après quoi chaque partie ou intervenant pourra demander à soumettre tout litige relatif à l’admissibilité de la preuve au juge responsable de la gestion de l’instance.

Après que cette ordonnance eut été rendue, les appelants ont soumis au juge Hugessen des arguments :

1. en vue de s’opposer d’une façon générale à l’utilisation, dans le deuxième procès, de toute preuve recueillie lors du procès initial; et

2. en vue de s’opposer expressément à l’utilisation, dans le deuxième procès, de la preuve des intervenants et de la preuve d’expert recueillies lors du procès initial.

L’intimée et les intervenants ont ensuite présenté leurs arguments; les actes de procédure modifiés des parties et des intervenants ont été clos et le juge Hugessen a ensuite tenu l’audience. Le 8 décembre 2000, le juge a rendu la deuxième ordonnance visée par l’appel, dont la partie pertinente est ainsi libellée :

[traduction] Sauf ordonnance contraire de la Cour :

1.    La transcription de toute la preuve déposée au premier procès (sauf les arguments, commentaires et interventions du juge du procès) peut, sous réserve de toute décision du juge du procès quant à sa pertinence et du droit d’une personne de présenter des témoignages d’opinion, lorsque c’est le cas, être déposée en preuve au nouveau procès. Les témoins dont les témoignages sont ainsi déposés en preuve ne seront pas interrogés ou contre-interrogés au nouveau procès, sauf autorisation du juge du procès.

2.    Les personnes qui ont témoigné au premier procès ne seront pas convoquées à témoigner au nouveau procès, sauf si la partie qui veut les convoquer arrive à convaincre le juge du procès que les personnes en cause sont susceptibles de présenter une preuve qu’elles n’avaient pas présentée lors du premier procès.

[4]        Les appelants affirment qu’il est erroné en droit d’utiliser, dans le deuxième procès, une preuve qui a été fournie dans un procès à l’égard duquel il a été conclu à l’existence d’une crainte raisonnable de partialité. Les appelants se fondent principalement sur la décision que la Cour suprême du Canada a rendue dans l’affaire Newfoundland Telephone Co. c. Terre-Neuve (Board of Commissioners of Public Utilities), [1992] 1 R.C.S. 623, où le juge Cory a dit ce qui suit à la page 645 :

Le préjudice résultant d’une crainte de partialité est irrémédiable. L’audience, ainsi que toute ordonnance à laquelle elle aboutit, est nulle.

Les appelants affirment que les mots « [l]’audience […] est nulle » veulent dire que la transcription de la preuve est nulle et ne peut pas être utilisée dans le cadre du procès subséquent. Ils invoquent également à l’appui l’arrêt R. c. S. (R.D.), [1997] 3 R.C.S. 484, au paragraphe 100.

[5]        Contrairement aux prétentions des appelants, nous sommes d’avis que l’arrêt Newfoundland Telephone n’étaye pas la thèse selon laquelle la preuve recueillie lors d’un procès qui est entachée d’une crainte raisonnable de partialité ne peut jamais être utilisée dans le cadre d’un procès subséquent. À notre avis, s’il est conclu que l’audience est nulle, la décision finale, même si elle est correcte, ne peut pas être maintenue, et ce, à cause d’une injustice intrinsèque dans la conduite de l’audience. La nullité de l’audience emporte la nullité de l’ordonnance.

[6]        Cependant, la preuve qui a été recueillie sous serment et en public lors de ce procès-là et qui a fait l’objet d’un contre-interrogatoire et a été transcrite n’est pas annulée. Elle subsiste et nous ne voyons pas pourquoi, dans les cas appropriés, la transcription de pareille preuve ne peut pas être utilisée dans un procès subséquent, notamment aux fins d’un contre-interrogatoire. Bien sûr, il est loisible aux parties et aux intervenants de s’opposer à l’utilisation de la preuve s’ils sont d’avis que certaines remarques ou autres actions du juge qui a présidé le procès initial influent sur la preuve ou qu’il en résulte par ailleurs une injustice. C’est au juge présidant le procès qu’il incombe de trancher la question.

[7]        Les appelants invoquent un certain nombre d’autres motifs à l’appui de la thèse selon laquelle la preuve recueillie lors du procès initial ne peut pas être utilisée dans le deuxième procès. Ils soutiennent fondamentalement que des conclusions doivent être tirées au sujet de la crédibilité et que le juge qui préside le deuxième procès doit être en mesure de voir et d’apprécier le comportement des témoins et la preuve orale que ceux-ci présentent afin d’arriver à des conclusions valables au sujet de la crédibilité.

[8]        Il ressort d’une façon passablement claire de l’ordonnance du 8 décembre 2000 que le juge Hugessen tentait, dans la mesure du possible, d’encourager fortement l’utilisation de la preuve recueil lie lors du premier procès de façon à épargner du temps et de l’argent. Cependant, l’ordonnance permet au juge du procès de déterminer s’il convient d’utiliser un élément de preuve précis. Le début de l’ordonnance : [traduction] « Sauf ordonnance contraire de la Cour » indique que le juge du procès a pleinement le pouvoir discrétionnaire de déterminer les éléments de preuve obtenus lors du procès initial qui doivent être admis et les circonstances dans lesquelles les parties ou les intervenants peuvent présenter leur preuve au moyen d’un témoignage oral plutôt qu’en déposant la transcription de la preuve obtenue lors du procès initial. Cela répond effectivement à l’objection principale que les appelants ont soulevée au sujet de l’utilisation de cette preuve. Les ordonnances rendues par le juge Hugessen ne visent pas à limiter le pouvoir discrétionnaire conféré au juge du procès; de plus, elles donnent aux parties ou aux intervenants la possibilité, lorsque les circonstances justifient la chose, de convaincre le juge du procès qu’en bonne justice, une preuve orale doit être présentée plutôt que la transcription effectuée lors du premier procès.

[9]        Les appelants se préoccupent également de ce que, en déterminant si la preuve obtenue lors du premier procès est pertinente ou s’il est par ailleurs possible de s’y opposer, le juge du procès prenne connaissance de cette preuve. Cependant, nous ne sommes pas convaincus qu’une injustice soit commise en pareil cas. La preuve est souvent admise, sous réserve de toute objection qui peut être soulevée. Bien sûr, lorsqu’il s’agit de tirer des conclusions de fait, le juge n’utilise pas un élément de preuve qu’il juge, à la suite d’un examen, non pertinent ou par ailleurs inadmissible.

[10]      Les appelants affirment qu’ils se sont vus obligés de soumettre au juge Hugessen des arguments au sujet de l’admissibilité de la preuve recueillie lors du premier procès avant même que l’intimée et les intervenants aient déposé leurs actes de procédure et qu’ils ont ainsi subi un préjudice. Toutefois, lorsque les arguments qui ont entraîné la délivrance de l’ordonnance du 8 décembre 2000 ont été soumis, les actes de procédure avaient tous déjà été déposés. Les appelants étaient au courant des positions prises par l’intimée et par les intervenants et ils avaient la possibilité, s’ils le jugeaient nécessaire, de soumettre des arguments sur ce point. Ils n’ont pas subi de préjudice à cet égard.

[11]      Nous tenons à profiter de l’occasion pour énoncer la position prise par la Cour dans les cas où une ordonnance rendue par le juge responsable de la gestion d’une instance a été portée en appel. Il faut donner au juge responsable une certaine latitude aux fins de la gestion de l’instance. La Cour n’intervient que dans les cas où un pouvoir discrétionnaire judiciaire a manifestement été mal exercé. Cette approche a été énoncée d’une façon juste par la Cour d’appel de l’Alberta dans l’arrêt Korte c. Deloitte, Haskins and Sells (1995), 36 Alta. L.R. (3d) 56, au paragraphe 3; elle s’applique en l’espèce. Nous adoptons les remarques ci-après énoncées :

[traduction] Il s’agit d’un litige fort compliqué. L’instance est gérée, et ce, depuis 1993. Les ordonnances qui ont ici été rendues sont discrétionnaires. Nous avons déjà dit et nous tenons à répéter qu’il faut donner une certaine « marge de manœuvre » au juge responsable de la gestion de l’instance dans une affaire complexe lorsqu’il s’agit de régler des questions interlocutoires interminables et de faire avancer l’affaire jusqu’à l’étape du procès. Dans certains cas, le juge responsable de la gestion de l’instance doit faire preuve d’ingéniosité de façon à éviter que l’on s’embourbe dans un tas de questions procédurales. La Cour n’intervient que dans les cas où un pouvoir discrétionnaire judiciaire a manifestement été mal exercé. Les ordonnances minutieusement libellées que le juge responsable de la gestion de l’instance a rendues en l’espèce démontrent une bonne connaissance des règles et de la jurisprudence pertinente. En particulier, l’ordonnance dispose que les parties peuvent à leur gré demander au juge responsable de la gestion de l’instance d’être libérées d’une obligation trop lourde imposée par l’ordonnance. Il n’a pas été démontré qu’une erreur ait clairement été commise; nous refusons d’intervenir. La chose cause peut-être un inconvénient à certaines parties, mais cela ne veut pas pour autant dire qu’une erreur susceptible de révision a été commise. Il n’incombe pas à la Cour de fignoler les ordonnances rendues dans des procédures interlocutoires, en particulier dans un cas comme celui-ci.

[12]      L’appel sera rejeté, un seul mémoire de dépens étant accordé tant à l’intimée qu’aux intervenants dans les dossiers du greffe A-701-98, A-793-00 et A-794-00, et ce, quelle que soit l’issue de la cause, et les dépens étant payables sans délai.

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