[1994] 1 C.F. 524
T-1709-90
Seaspan International Ltd. (demanderesse)
c.
Sa Majesté la Reine (défenderesse)
Répertorié : Seaspan International Ltd. c. Canada (1re inst.)
Section de première instance, juge Joyal—Vancouver, 10 mai; Ottawa, 2 septembre 1993.
Douanes et accise — Loi sur la taxe d’accise — Les art. 3, Partie VI, annexe III, et 23(8)c) de la Loi exemptent respectivement des taxes de vente et d’accise le mazout et le carburant diesel servant à la production d’électricité, sauf le cas où l’électricité produite est principalement utilisée pour faire fonctionner un véhicule — Décisison sur un point de droit, savoir si « véhicule » s’entend également des remorqueurs et des transbordeurs — Principes d’interprétation des lois applicables aux lois fiscales — Citation des débats parlementaires, de l’interprétation faite par le Ministère, des définitions des dictionnaires, de la jurisprudence — « Véhicule » s’entend également des remorqueurs et des transbordeurs.
Interprétation des lois — Art. 3, Partie VI, annexe III, et art. 23(8)c) de la Loi — La règle du sens ordinaire s’applique maintenant à l’interprétation des lois fiscales, en remplacement de la doctrine de l’interprétation stricte qui voulait que toute ambiguïté fût tranchée en faveur du contribuable — La Loi doit être envisagée dans son ensemble pour dégager la volonté du législateur — Elle a pour objet de réaliser des recettes par l’application d’une taxe au carburant diesel quelle qu’en soit la destination, à l’exception du carburant diesel qui sert à la production de l’électricité — L’exemption n’est pas applicable si l’électricité produite sert au fonctionnement d’un véhicule — Sens du mot « véhicule » — Ce terme n’est pas défini dans la Loi — Une analyse plus téléologique ou fonctionnelle permet de s’appuyer sur les débats parlementaires, l’interprétation donnée par le Ministère, la jurisprudence et les définitions des dictionnaires — « Véhicule » peut s’interpréter raisonnablement comme s’entendant aussi des remorqueurs et des transbordeurs — Interprétation conforme à la teneur de la Loi et à la volonté du législateur.
Les deux parties sont convenues du jugement du litige par décision sur un point de droit. Durant la période allant d’avril à juin 1988, la demanderesse a payé, conformément à la Loi sur la taxe d’accise, la taxe sur le mazout qu’elle achetait pour la production de l’électricité destinée au fonctionnement de ses remorqueurs et transbordeurs. Les premiers servent au remorquage des chalands qui transportent des marchandises vers des destinations le long des côtes de la Colombie-Britannique, aux manœuvres d’accostage et au remorquage des navires et des trains de bois. Les transbordeurs transportent des wagons des terres basses de Vancouver à l’île de Vancouver. L’alinéa 23(8)c) de la Loi sur la taxe d’accise exonère de la taxe d’accise le carburant diesel devant servir à la production d’électricité, sauf le cas où l’électricité produite est principalement utilisée pour faire fonctionner un véhicule, et le paragraphe 51(1), avec l’article 3 de la partie VI de l’annexe III de la même Loi, exonère expressément de la taxe de vente le mazout servant à la production de l’électricité, sauf le cas où l’électricité produite sert principalement au fonctionnement d’un véhicule. La demande de remboursement de la demanderesse a été rejetée par ce motif que les navires, y compris les remorqueurs et transbordeurs, sont des véhicules. Le terme « véhicule » n’est pas défini dans la Loi sur la taxe d’accise. Il échet d’examiner si les remorqueurs et les transbordeurs sont des véhicules au regard de la Loi sur la taxe d’accise.
Jugement : le point de droit soulevé doit être tranché en faveur de la défenderesse.
La doctrine de l’interprétation stricte des lois fiscales, voulant que toute ambiguïté des dispositions d’imposition fût tranchée en faveur du contribuable, n’a plus cours. Aujourd’hui, les tribunaux appliquent la règle du sens ordinaire, mais en tenant compte du fond, de sorte que si l’activité du contribuable relève de l’esprit de la disposition fiscale, il sera assujetti à l’impôt. La Loi doit être envisagée dans son ensemble pour dégager la volonté du législateur, son objectif et son économie. Elle a pour objet de réaliser des recettes en prévoyant une taxe sur le carburant diesel quelle qu’en soit la destination, à l’exception du carburant diesel qui sert à la production de l’électricité. Si l’électricité produite sert principalement au fonctionnement d’un véhicule, l’exemption ne s’applique pas et le carburant diesel utilisé à cette fin est soumis à la taxe. La règle générale est donc que le carburant diesel pour véhicules est soumis à la taxe et que toute exemption appelle une interprétation restrictive, alors que « véhicule » appelle une interprétation plus générique ou plus large. On pourrait dire que plus les mots « utilisé dans la production de l’électricité » doivent être interprétés de façon restrictive, plus large doit être l’interprétation à appliquer au libellé de la disposition portant taxation d’un produit générique, y compris le carburant diesel, peu importe le but dans lequel il pourrait être utilisé. À ce propos, il ne faut pas se préoccuper outre mesure de la double exception dans la structure de la Loi : le carburant diesel est soumis à la taxe quand il est utilisé pour les véhicules; l’exemption s’applique seulement à la production de l’électricité. Pour ce qui est de la volonté du législateur, vis-à-vis en particulier des véhicules dont le fonctionnement nécessite l’électricité produite avec du carburant diesel, pareille force propulsive ou motrice n’est pas l’attribut seul des véhicules à moteur ou autres moyens de transport terrestres. On la trouve probablement davantage dans les navires.
Il faut tenir compte des Débats de la Chambre des communes où a été consignée la déclaration du ministre qui exprimait la volonté d’éliminer l’exemption du fuel oil pour moteur diesel utilisé pour les transports, et que « véhicule » s’entendait également des navires et des aéronefs. Par ailleurs, Revenu Canada a interprété « véhicule » comme s’entendant des voitures et moyens de transport de tout genre servant à transporter ou déplacer des personnes ou des marchandises, par exemple navires, camions, remorques, locomotives et matériel roulant ferroviaire. Certes l’interprétation faite par ce Ministère d’un texte de loi n’engage pas la Cour, mais elle est au moins conforme à l’interprétation donnée à l’origine au Parlement. Des précédents sont également cités qui interprétaient « véhicule » comme s’entendant également des navires et des transbordeurs. Les définitions proposées par les dictionnaires sont quelque peu ambiguës. Certaines embrassent tous les moyens de transport terrestres, maritimes ou aériens. D’autres donnent à ce mot un sens plus restrictif. Aucune d’elles n’exclut explicitement les navires ou bateaux, alors que certaines autres les embrassent expressément. Ces diverses sources pourraient servir à titre indicatif, mais elles ne sont nullement déterminantes. La définition contenue dans la Loi sur l’immigration, selon laquelle « véhicule » s’entend également de tout moyen de voyage par mer, n’a aucun rapport avec l’affaire en instance. L’inclusion dans la définition du mot « véhicule » des moyens de transport comme ceux qui nous intéressent en l’espèce, constitue une interprétation à laquelle ce mot se prête raisonnablement et qui est plus conforme à la teneur générale de la Loi et à la volonté du législateur.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Highway Travel Act (The), R.S.O. 1914, ch. 206.
Loi de l’impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, ch. 148, art. 11(7).
Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, art. 12.
Loi sur la taxe d’accise, S.R.C. 1970, ch. E-13, art. 21(3.1)c) (mod. par S.C. 1986, ch. 9, art. 11).
Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), ch. E-15, art. 2, 23(8)c) (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 7, art. 10), 50(7) (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 1, art. 190; ch. 7, art. 16; (4e suppl.), ch. 12, art. 16), 51(1), annexe III, Partie VI, art. 3.
Loi sur les douanes, S.R.C. 1970, ch. C-40, art. 2(1).
Loi sur les véhicules automobiles, S.R.C. 1914, ch. 207.
Loi sur l’immigration, S.C. 1952, ch. 42.
Ontario Temperance Act (The), S.O. 1916, ch. 50, art. 70(2).
Règles de la Cour fédérale, C.R.C., ch. 663, Règle 474 (mod. par DORS/79-57, art. 14).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES :
Stubart Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536; [1984] CTC 294; (1984), 84 DTC 6305; 53 N.R. 241; Lor-Wes Contracting Ltd. c. La Reine, [1986] 1 C.F. 346; [1985] CTC 79; (1985), 85 DTC 5310; 60 N.R. 321 (C.A.); McLean, S.G. v. Minister of National Revenue (1956), 56 DTC 119 (C.A.I.); R. c. Sullivan, [1991] 1 R.C.S. 489; (1991), 55 B.C.L.R. (2d) 1; 63 C.C.C. (3d) 97; 3 C.R. (4th) 277; 112 N.R. 166; R. c. Mailloux, [1988] 2 R.C.S. 1029; (1988), 44 C.C.C. (3d) 193; 67 C.R. (3d) 75; 89 N.R. 222; 30 O.A.C. 358; International Forest Products Ltd. c. Canada, [1991] 2 C.T.C. 246; (1991), 46 F.T.R. 237 (C.F. 1re inst.); Calgary School District No 19 c. R. (1990), 43 C.L.R. 194; 38 F.T.R. 222 (C.F. 1re inst.); Morguard Properties Ltd. et autres c. Ville de Winnipeg, [1983] 2 R.C.S. 493; (1983), 3 D.L.R. (4th) 1; [1984] 2 W.W.R. 97; 25 Man. R. 302; 6 Admin. L.R. 206; 24 M.P.L.R. 219; 50 N.R. 264.
DISTINCTION FAITE AVEC :
Fleming v. Spracklin (1921), 50 O.L.R. 289; 64 D.L.R. 382; 38 C.C.C. 99 (Div. App.).
DÉCISIONS EXAMINÉES :
In re Sault Ste Marie Provincial Election, 1903, Galvin and Coyne Cases (1905), 10 O.L.R. 356 (H.C.); General Supply Co. of Canada Ltd. v. Deputy Minister of National Revenue et al., [1954] R.C.É. 340; Westar Mining Ltd. c. Ministre du Revenu national (1990), 38 F.T.R. 137; 3 TCT 5325 (C.F. 1re inst.); conf. par Westar Mining Ltd. c. La Reine (1991), 4 TCT 6197 (C.A.F.); Magnatrim Equipment Ltd. et Sous-ministre M.R.N. (Douanes et Accise) (1988), 18 C.E.R. 13 (Comm. Imp.); The Gas Float Whitton No. 2, [1896] P. 42 (C.A.).
DÉCISIONS CITÉES :
La Reine c. Nova, An Alberta Corporation, [1988] 2 C.T.C. 167; (1988), 88 DTC 6386; 87 N.R. 101 (C.A.F.); British Columbia Telephone Company Ltd. c. La Reine (1992), 92 DTC 6129 (C.A.F.); Conder v. Griffith, 111 N.E. 816 (Ind. App. 1916); Partington v. The Attorney-General (1869), L.R. 4 H.L. 100; Vaillancourt c. Sous-ministre M.R.N., [1991] 3 C.F. 663; [1991] 2 C.T.C. 42; (1991), 91 DTC 5408 (angl.); (1991), 91 DTC 5352 (fr.) (C.A.).
DOCTRINE
Ballentine’s Law Dictionary, 3rd ed. Rochester, N.Y. : Lawyers Co-operative Pub. Co., 1969.
Black’s Law Dictionary, 5th ed. St. Paul, Minn. : West Publishing Co., 1979.
Bouvier’s Law Dictionary and Concise Encyclopedia, 3rd revision. Buffalo : William S. Hein Co., 1984.
Canada. Débats de la Chambre des communes, vol. VII, 1re sess., 27e législature, 23 juin 1966.
Dictionary of Canadian Law. Toronto : Carswell, 1991.
Driedger, Elmer A. Construction of Statutes, 2nd ed. Toronto : Butterworths, 1983.
Drieger, Elmer A. The Construction of Statutes, Toronto : Butterworths, 1974.
Funk & Wagnalls Canadian College Dictionary, Toronto : Fitzhenry& Whiteside Limited, 1986.
Grand Larousse de la langue française, tome 7 Paris : Librairie Larousse, 1978.
Le Petit Robert I, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris : Le Robert, 1990.
Oxford English Dictionary, 2nd ed. Oxford : Clarendon Press, 1989.
Shorter Oxford English Dictionary on Historical Principles, 3rd ed. Oxford : Clarendon Press, 1978.
Webster’s New World Dictionary of the American Language, Second College Edition. New York : Simon and Schuster, 1980.
DÉCISION sur une question de droit : remorqueurs et transbordeurs sont des véhicules au sens de la Loi sur la taxe d’accise.
AVOCATS :
A. N. Robertson pour la demanderesse.
Max Weder pour la défenderesse.
PROCUREURS :
Bull, Housser & Tupper, Vancouver, pour la demanderesse.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
Le juge Joyal : Il échet uniquement d’examiner en l’espèce si les remorqueurs et les transbordeurs sont des véhicules au regard de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), ch. E-15.
LES FAITS DE LA CAUSE
La demanderesse, société constituée sous le régime des lois de la province de la Colombie-Britannique avec siège social à North Vancouver (C.-B.), est une entreprise de remorquage et de transbordement dans les eaux canadiennes et internationales, le long des côtes de la province.
Elle possède et exploite 42 remorqueurs et deux transbordeurs, ainsi que de nombreuses maries-salopes remorquées. Les remorqueurs ont une longueur variant de 39 à 142 pieds, une puissance de 440 à 5 570 horse-power et un équipage de deux à neuf membres.
Ils servent entre autres à remorquer les chalands de la flottille de la demanderesse qui transportent toutes sortes de marchandises vers des destinations le long des côtes de la Colombie-Britannique. Ils servent encore aux manœuvres d’accostage et au remorquage des navires et des trains de bois. Les transbordeurs transportent des wagons des terres basses de Vancouver à l’île de Vancouver.
La défenderesse est Sa Majesté la Reine du chef du Canada.
Durant la période allant d’avril à juin 1988 inclusivement, la demanderesse a payé, conformément à la Loi sur la taxe d’accise, la taxe sur le mazout qu’elle achetait pour la production de l’électricité destinée au fonctionnement de ses navires, c’est-à-dire de ses remorqueurs et transbordeurs. Le 27 septembre 1989, elle demande un remboursement de 20 924,40 $ au titre de la taxe d’accise, et de 13 862,43 $ au titre de la taxe de vente, payées à l’achat du mazout, par ce motif que ce carburant est exempté par l’alinéa 23(8)c) [mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 7, art. 10], qui exonère expressément de la taxe d’accise le carburant diesel devant servir à la production d’électricité (sauf le cas où l’électricité produite est principalement utilisée pour faire fonctionner un véhicule), et par le paragraphe 51(1) de la Loi, qui, avec l’article 3 de la partie VI de l’annexe III de cette dernière, exonère expressément de la taxe de vente le mazout servant à la production de l’électricité (sauf le cas où l’électricité produite sert principalement au fonctionnement d’un véhicule).
Le ministre du Revenu national, agissant pour le compte de la défenderesse, informe la demanderesse que sa demande de remboursement est rejetée du fait que les navires, y compris les remorqueurs et transbordeurs, sont des véhicules.
La demanderesse conteste la décision du ministre du Revenu national par voie d’avis d’opposition en date du 20 décembre 1989.
Par avis de ratification en date du 16 mars 1990, la défenderesse confirme cette décision par ce motif que les remorqueurs sont des véhicules au regard de l’article 3 de la partie VI de l’annexe III et de l’alinéa 23(8)c), à titre de navires servant au transport de marchandises d’un point à un autre. La demanderesse interjette maintenant appel devant la Cour en vue d’une décision plus favorable. Dans cette procédure, les deux parties sont convenues de la possibilité d’un jugement du litige selon la procédure prévue à la Règle 474 [Règles de la Cour fédérale, C.R.C., ch. 663 (mod. par DORS/79-57, art. 14)], par décision sur un point de droit à la lumière de l’exposé conjoint des faits.
L’ARGUMENTATION DE LA DEMANDERESSE
La demanderesse soutient que, saisi dans son sens grammatical ordinaire et à la lumière de la volonté du législateur telle qu’elle se dégage de l’ensemble de la Loi, de son objectif et de son économie, le terme « véhicule » figurant dans les dispositions applicables de la Loi n’embrasse ni les navires ni aucun autre type d’embarcation de mer. (Voir l’article 12 de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21; Stubart Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536; La Reine c. Nova, An Alberta Corporation, [1988] 2 C.T.C. 167 (C.A.F.); British Columbia Telephone Company Ltd. c. La Reine (1992), 92 DTC 6129 (C.A.F.); E. A. Driedger, The Construction of Statutes (Toronto : Butterworths, 1974), aux pages 6, 7 et 81.)
Elle invoque au premier chef la décision Fleming v. Spracklin (1921), 50 O.L.R. 289, par laquelle, dit-elle, la majorité de la Cour d’appel de l’Ontario a conclu que le mot « véhicule », entendu dans son sens ordinaire, s’appliquait rarement aux embarcations, et qu’il ne s’appliquait donc pas aux transbordeurs. (Voir aussi Conder v. Griffith, 111 N.E. 816 (Ind. App. 1916).)
De même, la Haute Cour de l’Ontario a jugé qu’un bateau à vapeur n’était même pas un moyen de transport dans In re Sault Ste. Marie Provincial Election, 1903, Galvin and Coyne Cases (1905), 10 O.L.R. 356.
Contestant la décision McLean S.G. v. Minister of National Revenue (1956), 56 DTC 119, par laquelle la Commission d’appel de l’impôt a conclu que « véhicule » s’entendait également des navires, la demanderesse souligne que cette conclusion était fondée sur une phrase prononcée par un juge au siècle dernier, selon lequel [à la page 120] [traduction] « les trains de bois à l’ancre dans un cours d’eau … ne sont pas des véhicules destinés à la navigation en mer » (non souligné dans le texte). Elle tient que cette phrase ne justifie nullement de conclure que le mot « véhicule », tel qu’il est employé dans son sens ordinaire et populaire dans la Loi dont s’agit, s’entend également des navires ou de quelque autre type d’embarcation de mer que ce soit.
La demanderesse cite encore des définitions de « véhicule » données par les dictionnaires pour soutenir que ce mot n’embrasse pas les navires ou autres embarcations de mer comme ses remorqueurs et transbordeurs, puisqu’il ne signifie que les moyens de transport munis de roues ou de patins, ou les moyens de transport sur terre. (Voir W. L. Little, H. W. Fowler & J. Coulson, The Shorter Oxford English Dictionary on Historical Principles, vol. 2, 3e éd. (Oxford : Clarendon Press, 1978), à la page 2457; Funk & Wagnalls Canadian College Dictionary (Toronto : Fitzhenry & Whiteside, 1986), à la page 1484; A. Rey & J. Rey-Debove, Le Petit Robert I, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (Paris : Le Robert, 1990), à la page 2069; Grand Larousse de la langue française, tome 7 (Paris : Librairie Larousse, 1978), page 6394; J. Bouvier, Bouvier’s Law Dictionary and Concise Encyclopedia, vol. 3, 3e révision (Buffalo : William S. Hein Company, 1984), page 3389; et J. A. Ballentine, Ballentine’s Law Dictionary, 3e éd. (Rochester : The Lawyers Co-Operative Publishing Company, 1969, à la page 1334.)
La demanderesse soutient que si on considère la Loi dans son ensemble, la mention expresse de « navire ou autre vaisseau » au paragraphe 50(7) [mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 1, art. 190; ch. 7, art. 16; (4e suppl.), ch. 12, art. 16] traduit la volonté du législateur d’exclure les navires de la définition de « véhicule ».
Elle cite enfin la Loi sur l’immigration [S.C. 1952, ch. 42] de 1952 et ses modifications subséquentes, où « véhicule » est expressément défini comme s’entendant également de tout moyen de voyage par mer : si le mot « véhicule » avait le sens que lui prêtait cette Loi, il n’aurait pas été nécessaire d’y inclure cette définition. Le fait que cette dernière y a été incluse signifie que dans l’esprit du législateur, le sens à attribuer à ce mot en vue de l’application des dispositions pertinentes de la Loi sur l’immigration n’était pas son sens ordinaire ou populaire.
La demanderesse soutient que, si pour l’application de la Loi qui nous intéresse en l’espèce, le législateur avait voulu étendre le sens de « véhicule » aux navires ou autres embarcations de mer, il y aurait prévu une définition de ce mot, semblable à la définition contenue dans la Loi sur l’immigration et ses multiples modifications. Il s’ensuit que le législateur ne voulait pas donner au mot « véhicule » employé dans la Loi le sens élargi que lui attribue expressément la Loi sur l’immigration, mais quelque chose de différent, c’est-à-dire son sens ordinaire.
La demanderesse conclut que, entendu dans son sens grammatical ordinaire, en conformité avec la volonté du législateur et à la lumière des magistères cités, le terme « véhicule » ne s’étend pas à ses remorqueurs ou transbordeurs.
L’ARGUMENTATION DE LA DÉFENDERESSE
La défenderesse soutient que le mot « véhicule » n’étant pas défini dans la Loi, il doit être interprété conformément au principe moderne d’interprétation des lois, savoir que les termes de la Loi doivent être entendus dans leur sens grammatical ordinaire, compte tenu de l’économie et de l’objectif de la Loi ainsi que de la volonté du législateur. (Voir Driedger, Construction of Statutes (2e éd., 1983), cité dans Westar Mining Ltd. c. Ministre du Revenue national (1990), 38 F.T.R. 137 (C.F. 1re inst.) en page 142, confirmé par (1991), 4 TCT 6197 (C.A.F.)).
La défenderesse conclut de la définition de « véhicule » dans divers dictionnaires que le sens ordinaire de ce mot est assez large pour embrasser tout moyen de transport terrestre, maritime ou aérien. Un véhicule sert à transporter des passagers ou des marchandises; pareille définition embrasse les remorqueurs et les transbordeurs (Voir A. Rey& Rey-Debove, Le Petit Robert I, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (supra); D. A. Dukelow& B. Nuse, The Dictionary of Canadian Law (Toronto : Carswell, 1991), à la page 1133; H. C. Black, Black’s Law Dictionary, 5e éd. (St. Paul, Minn. : West Publishing Co., 1979), à la page 1393; D. B. Guralnik, Webster’s New World Dictionary of the American Language, 2e éd. College (Simon et Schuster), à la page 1574; et W. L. Little, H. W. Fowler et J. Coulson, The Shorter Oxford English Dictionary on Historical Principles (supra).)
Le sens du mot « véhicule », entendu dans le contexte de la Loi sur la taxe d’accise [S.R.C. 1970, ch. E-13], a été examiné dans Westar Mining Ltd. c. Ministre du Revenu national (supra). En première instance, le juge McNair était appelé à décider si les transporteurs de minerai étaient des véhicules. En répondant à cette question par l’affirmative, Sa Seigneurie a approuvé la décision no 7120/28 [en page 144] de la Commission du tarif, aux termes de laquelle véhicule s’entend également des bateaux ou des navires, du fait que ces derniers servent « à transporter des personnes ou des objets ». La Cour d’appel fédérale a confirmé la conclusion du juge McNair ainsi que sa conception de l’interprétation des lois en la matière.
La défenderesse cite aussi une décision de la Commission d’appel de l’impôt, par laquelle M. Fordham a jugé qu’un navire était un véhicule au regard de la Loi de l’impôt sur le revenu [S.R.C. 1952, ch. 148]. (Voir McLean, S.G. v. Minister of National Revenue (1956), 56 DTC 119, à la page 121).
Dans Fleming v. Spracklin (1921), 50 O.L.R. 289, la Division d’appel de la Cour suprême de l’Ontario était appelée à décider si un yacht naviguant dans les eaux internationales était [traduction] « un véhicule sur la voie publique ou ailleurs » au sens de l’article 70 de la loi dite The Ontario Temperance Act [S.O. 1916, ch. 50]. La majorité de la Cour a conclu qu’un yacht n’était pas un véhicule. La défenderesse estime cependant que ce raisonnement de la Cour d’appel tenait à sa conclusion que la loi The Ontario Temperance Act ne s’appliquait pas au commerce de boissons alcooliques dans les eaux internationales entre des Ontariens et des citoyens de pays étrangers, et que dans ce contexte, un yacht ne saurait être un véhicule.
Elle soutient encore que la volonté du législateur se dégage aussi des Débats de la Chambre des communes. La déclaration faite dans ce contexte par le ministre des Finances indique que les navires étaient compris dans la définition de véhicule. (Voir Projet de loi C-198, 1re session, 27e législature, Débats de la Chambre des communes, 23 juin 1966, à la page 6812; et Vaillancourt c. Sous-ministre M.R.N., [1991] 3 C.F. 663 (C.A.).)
Sur le plan administratif, le ministre du Revenu national a toujours vu dans les navires des véhicules au regard de la Loi sur la taxe d’accise. Dans le Communiqué de l’accise 191/TI (décembre 1989), il pose pour principe que la définition de véhicule est large et embrasse les navires.
La défenderesse soutient qu’il n’y aucune raison d’interpréter la Loi de façon à exclure les navires de la définition de « véhicule ». La thèse de la demanderesse signifierait que le législateur préfère un mode de transport (maritime) à un autre, et ce sans justification aucune. L’exemption prévue à la disposition pertinente de la Loi sur la taxe d’accise s’applique au mazout servant à la production de l’électricité, sauf le cas où l’électricité produite sert au fonctionnement d’un véhicule. Sous l’angle de l’analyse fonctionnelle, exclure les navires de la définition reviendrait à créer une distinction sans qu’il y ait différence.
La défenderesse conclut que si on entend « véhicule » dans son sens ordinaire, compte tenu de l’objectif de la Loi et de la volonté du législateur, les remorqueurs et les transbordeurs de la demanderesse sont des véhicules au sens de la Loi sur la taxe d’accise.
ANALYSE
Le terme « véhicule » n’est pas défini dans la Loi sur la taxe d’accise. C’est le sens de ce mot, tel qu’il figure à l’alinéa 23(8)c) de la Loi et à l’article 3 de la partie VI de son annexe III, qui fait l’objet de cette demande.
L’article 3 de la partie VI de l’annexe III de la Loi sur la taxe d’accise exonère de la taxe de vente le produit suivant :
3. Mazout servant à la production de l’électricité, sauf lorsque l’électricité ainsi produite sert principalement au fonctionnement d’un véhicule.
En outre, l’alinéa 23(8)c) de la Loi prévoit que la taxe de vente n’est pas exigible :
23. (8) …
c) dans le cas de combustible diesel devant servir à la production d’électricité, sauf lorsque l’électricité ainsi produite est principalement utilisée pour faire fonctionner un véhicule.
1. Les principes d’interprétation des lois
Afin de déterminer le sens exact du mot « véhicule », il y a lieu de revoir les principes d’interprétation des lois que nos tribunaux ont définis.
Dans International Forest Products Ltd. v. Canada, [1991] 2 C.T.C. 246 (C.F. 1re inst.), Madame le juge Reed a donné un résumé des règles juridiques d’interprétation. La Cour était appelée à décider si le carburéacteur était assimilable au carburant diesel au sens de l’article 2 de la Loi sur la taxe d’accise. En passant en revue les principes d’interprétation des lois, Madame le juge Reed a fait cette observation à la note de bas de page no 3, en pages 247 et 248 :
À un moment donné, on requérait généralement que les lois fiscales soient interprétées de façon très stricte. On tranchait en faveur du contribuable tout doute ou ambiguïté que pouvait soulever la lecture littérale des mots …
Dernièrement, cependant, les tribunaux ont renoncé aux interprétations trop restrictives des lois fiscales pour adopter plutôt les mêmes règles d’interprétation applicables à toutes les lois. Ainsi, dans Stubart Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536; [1984] C.T.C. 294, après avoir examiné la progression de l’évolution de l’interprétation des lois fiscales, le juge Estey énonce la méthode comme suit :
Aujourd’hui, les tribunaux appliquent à cette loi [la Loi de l’impôt sur le revenu] la règle du sens ordinaire, mais en tenant compte du fond, de sorte que si l’activité du contribuable relève de l’esprit de la disposition fiscale, il sera assujetti à l’impôt.
…
Bien que les remarques de E. A. Driedger dans son ouvrage Construction of Statutes (2e éd. 1983), à la p. 87, ne visent pas uniquement les lois fiscales, il y énonce la règle moderne de façon brève :
Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution : il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.
Dans Lor-Wes Contracting Ltd. c. La Reine, [1986] 1 C.F. 346; (1985) 2 C.T.C. 79; 85 D.T.C. 5310, une affaire d’impôt sur le revenu, M. le juge MacGuigan a suivi la façon de procéder établie dans Stubart. Il énonce les principes appropriés d’interprétation comme suit :
Il ressort, semble-t-il, clairement de ces arrêts qu’il ne faut dorénavant jamais plus se fier inconditionnellement à ces anciens précédents. Le seul principe d’interprétation reconnu aujourd’hui consiste à examiner les termes dans leur contexte global en vue de découvrir l’objet et l’esprit des dispositions fiscales.
Cette même façon de procéder s’applique aussi bien à l’interprétation de la Loi sur la taxe d’accise qu’à l’interprétation de la Loi de l’impôt sur le revenu. L’approche du juge MacGuigan, soit l’interprétation des termes dans leur contexte global, a été suivie dans l’arrêt Westar Mining Ltd. c. Canada, [1990] 2 C.T.C. 547; 3 T.C.T. 5325 (C.F. 1re inst.), lorsqu’il fallut interpréter la définition du mot « véhicules » dans la Loi sur la taxe d’accise.
La méthode adoptée par le juge MacGuigan, J.C.A., dans Lor-Wes Contracting Ltd. c. La Reine (supra) a été reprise dans Calgary School District No. 19 c. R. (1990), 43 C.L.R. 194 (C.F. 1re inst.) où, en page 202, le juge en chef adjoint Jerome s’est prononcé en ces termes :
Il s’ensuit donc que le principe d’interprétation législative qui consiste à examiner les termes dans leur contexte global doit être appliqué en l’espèce pour interpréter l’expression « destinés exclusivement à la construction d’un bâtiment pour cette institution » qui figure à l’article 44.27 de la Loi sur la taxe d’accise. Je note également que l’article 11 de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, m’oblige à interpréter cette disposition de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet. En conséquence, je dois tenter d’interpréter les mots choisis par le législateur d’une manière qui soit compatible avec les objectifs apparents de la disposition en question.
On peut citer d’autres vues sur cette question. Dans l’arrêt Morguard Properties Ltd. et autres c. Ville de Winnipeg, [1983] 2 R.C.S. 493, de la Cour suprême du Canada, le juge Estey a fait en page 509 cette observation sur l’interprétation des lois fiscales :
En langage plus moderne, pour porter atteinte aux droits d’un administré, que ce soit à titre de contribuable ou à un autre titre, les tribunaux exigent que le législateur le fasse de façon expresse. La diminution de ces droits peut ne pas avoir été législativement voulue ou même être accidentelle, mais les cours doivent trouver dans la loi des termes exprès pour conclure que ces droits ont été diminués. Ce principe d’interprétation s’impose et s’applique d’autant plus aujourd’hui que les législatures profitent de l’aide et des directives d’un conseil exécutif bien pourvu de personnel et ordinairement très averti. Les moyens disponibles pour rédiger et promulguer les lois sont tels qu’une cour doit être réticente à présumer l’oubli ou des intentions inarticulées lorsque les droits des administrés sont en cause. La législature a la maîtrise complète du processus législatif et si elle ne s’est pas exprimée clairement pour un motif quelconque, elle possède tous les moyens de corriger cette déficience d’expression. Cela est encore plus vrai aujourd’hui qu’à toute autre époque de l’histoire de notre régime parlementaire.
Dans son ouvrage The Construction of Statutes, E. A. Driedger donne un exposé plus détaillé de la doctrine régissant l’interprétation des lois en général. Voici ce qu’il écrit en page 81 :
[traduction] Il ressort des décisions supra que les dispositions applicables à un cas d’espèce doivent être interprétées de la façon suivante :
1. Le texte tout entier doit être envisagé dans son ensemble pour dégager la volonté du législateur (la loi telle qu’elle s’exprime, expressément ou implicitement, par les mots employés), l’objectif de cette loi (les fins poursuivies) et son économie (les rapports entre ses diverses dispositions).
2. Il faut ensuite entendre les mots employés dans les dispositions applicables au cas d’espèce, dans leur sens grammatical ordinaire à la lumière de la volonté du législateur, telle qu’elle s’incarne dans la loi prise dans son ensemble, ainsi que de l’objectif et de l’économie de cette dernière, et on n’ira pas plus loin s’ils sont clairs, s’ils ne sont pas ambigus et s’harmonisent avec cette volonté, cet objectif et cette économie, de même qu’avec le corps de droit existant.
3. Si ces mots paraissent obscurs ou ambigus, il faut leur attribuer un sens qui s’accorde le mieux avec la volonté du législateur, et avec l’objectif et l’économie de la loi, un sens que ces mots puissent raisonnablement avoir.
4. Si, les mots étant clairs et non ambigus quand on les entend dans leur sens grammatical ordinaire, il y a un manque d’harmonie à l’intérieur de la loi en question ou entre les lois en la matière, il faut attribuer à ces mots un sens moins grammatical ou moins ordinaire mais qui assure l’harmonie, un sens qu’ils puissent raisonnablement avoir.
2. L’interprétation du mot « véhicule » par les tribunaux
Dans Westar Mining Ltd. c. Ministre du Revenu national (supra), la demanderesse contestait le rejet fait par le ministre du Revenu national de sa demande de remboursement de la taxe de vente fédérale et de la taxe d’accise au titre du carburant diesel acheté et utilisé dans la production de l’électricité nécessaire au fonctionnement de ses transporteurs de minerai. Il s’agissait de savoir si ces derniers étaient des « véhicules » au sens des dispositions applicables de la Loi sur la taxe d’accise. La Cour l’a déboutée de sa demande, concluant que les transporteurs de minerai étaient principalement utilisés comme « véhicules » au sens ordinaire de ce mot, tel que le lui reconnaissent la jurisprudence et les dictionnaires reconnus. En conséquence, le carburant diesel servant à produire l’électricité nécessaire à leur fonctionnement était expressément exclu de l’exemption prévue à l’alinéa 21(3.1)c ) [mod. par S.C. 1986, ch. 9, art. 11] de la Loi sur la taxe d’accise. En page 145, le juge McNair a conclu en ces termes :
En résumé, je suis d’avis que les transporteurs de minerai ont été utilisés principalement comme véhicules au sens ordinaire du terme pour transporter des mort-terrains ou du minerai brut d’un endroit à un autre, et que le libellé de la loi ne permet pas de limiter les déplacements à ceux qui sont effectués sur la route ou sur des rails, ou encore au transport du charbon uniquement comme produit fini et commercialisable. Selon moi, toute autre interprétation du libellé de la Loi ne servirait qu’à contourner l’objet et l’esprit de cette loi et à déjouer l’intention exprimée par le législateur. En conséquence, la partie demanderesse ne peut être admissible à une exemption et donc au remboursement.
L’affaire ayant été portée devant la Cour d’appel fédérale, le juge Hugessen, J.C.A., y a rendu la décision suivante, à la page 6197 (supra) :
… nous ne trouvons rien à redire aux motifs de jugement très détaillés du juge McNair, qui a conclu que les « transporteurs de minerai » de l’appelante sont des « véhicules » au sens de l’alinéa 21(3.1)c) (devenu depuis l’alinéa 23(8)c)) et de l’annexe III de la Loi sur la taxe d’accise, telles que ces dispositions sont envisagées dans leur contexte et conformément à l’esprit de la loi et à leur sens grammatical.
Dans McLean S.G. v. Minister of National Revenue (supra), la seule question à trancher était de savoir si « véhicule » s’entendait également des navires. L’appelant, qui était mécanicien à bord d’un transbordeur côtier, avait dépensé en 1954 une certaine somme d’argent en frais de séjour au cours de déplacements loin de son port d’attache. Dans sa déclaration d’impôt pour la même année, il a déduit cette somme en application du paragraphe 11(7) de la Loi qui prévoyait la déduction des frais de ce genre pour l’employé qui voyageait hors du lieu de l’établissement de son employeur, dans un « véhicule » de celui-ci. Le ministre a rejeté la déduction par ce motif qu’un navire n’était pas un « véhicule » au sens du paragraphe 11(7). L’appel a été jugé fondé par la Commission d’appel de l’impôt, qui a conclu en ces termes, en pages 120 et 121 :
[traduction] … J’ai trouvé un précédent qui, me semble-t-il, apporte la réponse à la question. Il s’agit de Polpen Shipping Co. v. Commercial Union Assce. Co., (1943) 1 K.B. 161. Le juge Atkinson y a conclu qu’un hydravion n’était pas un « navire ou vaisseau » au sens d’un certain contrat d’assurance. Dans ses motifs, il a fait la revue plutôt exhaustive du sens du mot « véhicule », citant en page 165 un jugement de lord Esher, M.R., qui, dans The Gas Float Whitton No. 2 , (1896) Probate, 42, a évoqué la conclusion suivante au sujet de radeaux à l’ancre dans un cours d’eau :
Il ne sont pas des véhicules destinés à la navigation en mer ou dans les bras de mer; ils ne sont pas reconnus comme moyens de navigation par une loi du Congrès. Ce n’est rien que des tas de billes de bois attachées les unes aux autres et mises à l’eau en attendant que des véhicules idoines soient prêts à les prendre à bord et à les transporter à leur port de destination.
Le passage ci-dessus, que lord Esher citait avec approbation, était tiré d’une décision américaine, Nicholson v. Chapman, rendue dès 1793. Il montre, à mon avis, que depuis des années, les tribunaux ont considéré les navires comme des véhicules destinés à la navigation en mer. À la lumière de ce précédent et d’autres magistères cités par le juge Atkinson, je conclus que ce serait restreindre abusivement le sens du mot véhicule que de le limiter aux moyens de transport munis de roues ou de patins, et destinés au transport de personnes ou de marchandises sur terre. Un navire remplit la même fonction sur l’eau qu’un véhicule à roues sur terre, et je pense que réserver aux navires l’interprétation qu’en a donnée l’avis de cotisation attaqué reviendrait à créer une distinction en l’absence de toute différence, dans l’application du paragraphe 11(7). [Non souligné dans le texte.]
Dans Magnatrim Equipment Ltd. et Sous-ministre M.R.N. (Douanes et Accise) (1988), 18 C.E.R. 13, la Commission du tarif conclut que les planches à roulettes en cause tombent dans le champ d’application de la définition de « véhicule » qui figure au paragraphe 2(1) de l’ancienne Loi sur les douanes [S.R.C. 1970, ch. C-40], comme suit : « toute charrette, char, chariot, voiture, brouette, traîneau, aéronef ou autre moyen de transport de toute nature que ce soit, actionné par la vapeur, tiré ou poussé par des animaux … ainsi que les garnitures, équipements et accessoires du véhicule » (non souligné dans le texte). À l’appui de sa conclusion, la Commission cite la décision General Supply Co. of Canada Ltd. v. Deputy Minister of National Revenue et al., [1954] R.C.É. 340, où le juge Cameron s’est prononcé en ces termes en page 352 :
[traduction] Dans ce contexte, je pense que « moyen de transport » s’entend en l’espèce du véhicule qui non seulement est capable de se déplacer tout entier d’un point à un autre, mais est conçu à cet effet et a pour fonction, pendant ce déplacement, de transporter des marchandises ou des passagers. « Transporter » signifie davantage que la capacité de se déplacer d’un point à un autre; il signifie le transport de personnes ou d’objets autres que les propres éléments du moyen de transport.
La Commission conclut que les planches à roulettes réunissent les trois conditions définies dans la décision General Supply ci-dessus.
J’ai mentionné l’arrêt Fleming v. Spracklin par lequel la Cour d’appel de l’Ontario a conclu qu’un yacht naviguant dans les eaux internationales n’était pas un [traduction] « véhicule sur la voie publique ou ailleurs » au sens du paragraphe 70(2) de la loi dite The Ontario Temperance Act de la province. Comme l’a fait remarquer la Commission d’appel de l’impôt, en page 121 de sa décision McLean (supra), l’utilité de cet arrêt est diminuée du fait que la Cour n’y examinait le sens du mot « véhicule » qu’au regard des termes mêmes de la Loi citée, savoir « véhicule sur la voie publique ». La Cour d’appel citait encore à l’appui d’autres textes, comme The Highway Travel Act [R.S.O. 1914, ch. 206], The Motor Vehicles Act [R.S.O. 1914, ch. 207] et The Snow Roads Act [R.S.O. 1914, ch. 208], lesquelles précisaient tous que le mot « véhicule » désignait les moyens de transport munis de roues ou de patins, tels qu’on en trouve sur les routes. Cette définition de « véhicule » est limitée à ces Lois et n’est d’aucun secours pour le jugement du point litigieux en l’espèce. Il est évident que ces lois portent sur un autre sujet.
3. La définition de « véhicule » dans les dictionnaires
L’une et l’autre parties produisent une quantité appréciable de définitions du mot « véhicule » (« vehicle » en anglais) tirées de divers dictionnaires. Je n’en citerai que quelques-unes, attendu qu’à mon avis, la volonté du législateur se dégage clairement de l’analyse de la Loi dans son ensemble, des magistères susmentionnés ainsi que des rapports, tels notamment les débats parlementaires, consacrés à cette même Loi. Voici les définitions qui ont été soumises entre autres par les parties :
« véhicule » : [traduction] Moyen de transport muni de roues ou de patins, pour le transport de personnes ou de marchandises; voiture, charrette, wagon, traîneau, etc. (Shorter Oxford English Dictionary on Historical Principles, supra.)
« véhicule » : [traduction] Moyen de transport de marchandises ou de personnes. Ce terme a un sens plus général que véhicule à moteur … Toute voiture ou appareil servant ou destiné au transport sur terre … Le terme s’entend communément de quelque chose qui se déplace au sol sur roues ou sur patins, mais non de quelque chose qui vole dans les airs, bien que son sens étymologique puisse être considéré comme suffisamment général pour embrasser les moyens de transport aérien. (Ballentine’s Law Dictionary, supra.)
« véhicule » : [traduction] Ce terme s’entend de toute voiture ou autre moyen artificiel servant ou destiné au transport sur terre … une arroseuse municipale est un véhicule … mais non pas un tramway ou un transbordeur. (Bouvier’s Law Dictionary and Concise Encyclopedia, supra.)
« véhicule » : [traduction] Tout moyen de transport … véhicules servant au transport de personnes, y compris navires et aéronefs. (The Oxford English Dictionary, 2nd ed., 1989.)
« véhicule » : [traduction] Moyen servant au transport de personnes, de marchandises, etc., d’un lieu à un autre, en particulier par voie de terre … Ce terme s’entend de tout moyen servant au transport de personnes ou de marchandises sur les voies publiques. (Black’s Law Dictionary, supra.)
« véhicule » : [traduction] Tout moyen de transport de personnes ou de marchandises, y compris moyens de transport terrestres, navires, aéronefs et vaisseaux spatiaux : dans certains contextes, ce terme désigne uniquement les moyens de transport terrestres munis de roues, de patins, de chenilles, etc. (Webster’s New World Dictionary of the American Language, supra.)
« véhicule » : [traduction] 1. Tout moyen de transport maritime, terrestre ou aérien. 2. Tout camion, automobile ou autre véhicule de transport terrestre, à l’exception des véhicules sur rails et soumis à l’application de la Loi sur les chemins de fer. 3. S’entend également des tramways. 4. Véhicule automobile, aéronef ou autre moyen de transport destiné à être propulsé ou tiré par une force quelconque, y compris la force musculaire, et tout élément d’icelui; ce terme s’entend également de tout équipement nécessaire au fonctionnement utile du véhicule ainsi que des accessoires de ce dernier. (The Dictionary of Canadian Law, supra.)
« moyen de transport » :[traduction] 3. Ce terme s’entend des navires, vaisseaux, aéronefs, trains, véhicules à moteur et autres. (The Dictionary of Canadian Law, supra.)
« véhicule » : Engin, à roue(s) ou à moyen de propulsion, servant à transporter des personnes ou des marchandises. V. Autobus … bateau …—Cour. Moyen de transport routier. (Le Petit Robert I, supra.)
Comme on peut le voir, les définitions proposées par les divers dictionnaires sont quelque peu ambiguës. Certaines embrassent tous les moyens de transport terrestres, maritimes ou aériens. D’autres donnent un sens un peu plus restrictif. Ces diverses sources pourraient servir à titre indicatif, mais elles ne sont nullement déterminantes. Qui plus est, elles soulèvent dans une certaine mesure la question de savoir si, dans le contexte de la Loi sur la taxe d’accise, « véhicule » s’entend également des embarcations automotrices.
CONCLUSION
Conformément à la méthode préconisée par Driedger pour l’interprétation des lois, il y a lieu de commencer par l’examen de l’objectif de la Loi, qui est indubitablement la réalisation de recettes. Parmi les articles soumis à une taxe, il y a le carburant diesel quelle qu’en soit la destination, à l’exception seule du carburant diesel qui sert à la production de l’électricité. Même cette dernière exemption est limitée. Si l’électricité produite sert principalement au fonctionnement d’un véhicule, l’exemption ne s’applique pas et le carburant diesel utilisé à cette fin est soumis à la taxe.
Étant donné que ni l’une ni l’autre partie n’a soulevé la question de l’effet des mots « principalement » et « fonctionnement », le litige est donc circonscrit au sens du mot « véhicule ».
Je note aussi que si le mot « véhicule » sert généralement à désigner les moyens de transport terrestres, il est souvent employé comme abréviation de véhicule à moteur. « Véhicule », employé sans complément déterminatif dans une loi, pourrait se limiter aux moyens de transport terrestres.
Dans la Loi qui nous intéresse en l’espèce, la disposition portant taxation, selon l’interprétation correcte qu’on doit en donner, prévoit une taxe sur le carburant diesel, y compris, bien entendu, celui qui sert principalement au fonctionnement d’un véhicule. Seul le carburant diesel servant à la production de l’électricité en est exempté. La règle générale est donc que le carburant diesel pour véhicules est soumis à la taxe et que toute exemption appelle une interprétation restrictive. Il s’ensuit a contrario que « véhicule » appelle une interprétation plus générique ou plus large. On pourrait dire que plus les mots « utilisé dans la production de l’électricité » doivent être interprétés de façon restrictive, plus large doit être l’interprétation à appliquer au libellé de la disposition portant taxation d’un produit générique, y compris bien entendu le carburant diesel, peu importe le but dans lequel il pourrait être utilisé.
À ce propos, il ne faut pas se préoccuper outre mesure de la double exception dans la structure de la Loi. Je le répète, le carburant diesel est soumis à la taxe quand il est utilisé pour les véhicules. L’exemption s’applique seulement à la production de l’électricité.
On peut ensuite se demander quelle est la volonté du législateur, en ce qui concerne en particulier les véhicules dont le fonctionnement nécessite l’électricité produite avec du carburant diesel. Pareille force propulsive ou motrice n’est pas l’attribut seul des véhicules à moteur ou autres moyens de transport terrestres. On la trouve probablement davantage dans les navires. Par conséquent, il serait anormal de prétendre que le législateur, par l’emploi du terme « véhicule », entendait en restreindre le sens aux véhicules terrestres et étendre l’exemption à tous les autres moyens de transport de personnes et de biens. En effet, cela signifierait qu’il y avait de bonnes ou solides raisons économiques ou politiques de favoriser les embarcations. À ce propos, la déclaration suivante, faite par le ministre responsable de l’époque, M. Sharp, lors des débats du Parlement sur la Loi sur la taxe d’accise, en page 6812 du Hansard du 23 juin 1966, a été versée dans le dossier :
Le point essentiel c’est qu’on exemptait le fuel oil pour moteur diesel servant à la production d’électricité pour des fins commerciales, industrielles et autres. Nous n’avions pas l’intention d’abolir l’impôt sur le fuel oil pour moteur diesel utilisé pour les transports. [Non souligné dans le texte.]
Prié de dire à cette occasion si le terme « véhicule » s’entendait également des navires, le ministre a été catégorique : « Oui, il comprend un navire et un avion ».
On peut trouver dans le communiqué de l’Accise 191/TI, rendu public en juillet 1989 par Revenu Canada, une autre preuve qu’aux yeux de ce Ministère, le mot « véhicule » a un sens large et s’entend des voitures et moyens de transport de tout genre servant à transporter ou déplacer des personnes ou des marchandises, par exemple navires, camions, remorques, locomotives et matériel roulant ferroviaire. Certes l’interprétation faite par ce Ministère d’un texte de loi n’engage pas la Cour, mais elle est au moins conforme à l’interprétation donnée à l’origine au Parlement il y a des années.
Sur le plan jurisprudentiel, la Cour suprême du Canada a fait, dans Stubart Investments Ltd. c. La Reine, [1984] 1 R.C.S. 536, une analyse détaillée de l’évolution de l’interprétation judiciaire des lois fiscales. En pages 575 et suivantes, le juge Estey rappelle que par le passé, la doctrine de l’interprétation stricte voulait que toute ambiguïté des dispositions d’imposition fût tranchée en faveur du contribuable, les lois fiscales étant assimilées à des lois pénales. Il n’en est plus de même de nos jours, fait observer le juge Estey [à la page 578] qui, faisant siens les commentaires du professeur John Willis à ce sujet, conclut qu’« [a]ujourd’hui, les tribunaux appliquent à cette loi la règle du sens ordinaire, mais en tenant compte du fond, de sorte que si l’activité du contribuable relève de l’esprit de la disposition fiscale, il sera assujetti à l’impôt ».
Dans Lor-Wes Contracting Ltd. c. La Reine, [1986] 1 C.F. 346, le juge MacGuigan, J.C.A., a tiré cette conclusion, en page 352 :
Il ressort, semble-t-il, clairement de ces arrêts qu’il ne faut dorénavant jamais plus se fier inconditionnellement à ces anciens précédents. Le seul principe d’interprétation reconnu aujourd’hui consiste à examiner les termes dans leur contexte global en vue de découvrir l’objet et l’esprit des dispositions fiscales.
On peut trouver une autre interprétation pertinente du mot « véhicule » dans la décision no 7120/28 de la Commission du tarif, qui prononçait sur le carburant destiné aux génératrices diesel à bord de navires de forage. La Commission a conclu que l’exemption de taxe s’appliquait au carburant destiné au chauffage, à l’éclairage et au fonctionnement du matériel de forage, mais non à celui servant à la propulsion du navire ou à son maintien en place durant les opérations de forage. La Commission n’avait visiblement aucun mal à conclure que véhicule s’entendait également de navires, en ces termes :
[traduction] Véhicule signifie moyen de transport de personnes ou d’objets. Un bateau ou un navire sert à transporter des personnes ou des objets, il peut donc être considéré comme un véhicule au regard de cet article de la Loi.
De même, dans McLean S.G. v. Minister of National Revenue (1956), 56 DTC 119, la Commission d’appel de l’impôt n’a aucun mal à décider que le mot « véhicule » figurant au paragraphe 11(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu relatif à la déductibilité des frais de déplacement d’un employé voyageant à bord d’un « véhicule » de son employeur, s’entend également des transbordeurs. La Commission [à la page 125] constate que [traduction] « depuis des années, les tribunaux ont considéré les navires comme des véhicules de navigation en mer », citant à ce sujet la décision The Gas Float Whitton No. 2 , [1896] P. 42 (C.A.), où lord Esher, M.R., a fait cette observation au sujet de certains radeaux à l’ancre dans un cours d’eau [à la page 60] :
Ils ne sont pas des véhicules destinés à la navigation en mer. [Non souligné dans le texte.]
Il y a lieu de noter que l’argument proposé par la Couronne dans l’affaire McLean au sujet de l’interprétation du mot « véhicule » figurant dans une loi fiscale est diamétralement opposé à celui qu’elle fait valoir en l’espèce au sujet d’une autre loi fiscale. Ayant perdu dans la première cause, il est évident qu’elle cherche maintenant à harmoniser les deux.
Nul doute que l’avocat de la demanderesse, par les définitions de dictionnaire, par la jurisprudence et par les divers canons d’interprétation des lois qu’il cite, a soulevé des points d’argumentation intelligente. Je dois cependant faire observer que les dictionnaires ne donnent pas de réponses nettes. Aucun d’eux n’exclut explicitement de la définition les navires ou bateaux, alors que certains d’entre eux les y incluent expressément.
Son argument tiré de la définition contenue dans la Loi sur l’immigration pourrait faire sourire, mais je ne pense pas que cette définition ait un rapport quelconque avec une affaire portant sur la Loi sur la taxe d’accise.
Il en est de même des magistères qu’il cite en matière d’interprétation des lois fiscales. Je souscris plutôt à la doctrine récente, telle qu’elle est exprimée dans Stubart (supra) ou dans Lor-Wes Contracting (supra), qu’aux conclusions tirées par lord Cairns en 1869 dans Partington v. The Attorney-General (1869), L.R. 4 H.L. 100.
Pour ce qui est des enseignements qu’on peut tirer de la jurisprudence relative aux litiges du même genre, je penche plutôt pour la solution de la Commission d’appel de l’impôt dans l’affaire McLean (supra) ou de la Commission du tarif dans sa décision no 7120/28.
En ce qui concerne les débats parlementaires, j’estime que cette source a une certaine valeur. L’approche interprétative ou formaliste d’antan a progressivement évolué pour permettre maintenant une analyse plus téléologique ou fonctionnelle des textes de loi ambigus. Les renvois aux débats parlementaires en sont un exemple, et il me suffit de citer à ce propos les deux arrêts R. c. Sullivan, [1991] 1 R.C.S. 489, et R. c. Mailloux, [1988] 2 R.C.S. 1029, par lesquels la Cour suprême du Canada a admis ce genre de preuves extrinsèques.
Enfin, en dépit d’une certaine école de pensée selon laquelle la volonté du législateur se dégage de ce qu’il dit vraiment et non pas de ce qu’il a l’intention de dire, je conclus que l’inclusion dans la définition du mot « véhicule » des moyens de transport comme ceux qui nous intéressent en l’espèce, constitue une interprétation à laquelle ce mot se prête raisonnablement et qui est plus conforme à la teneur générale de la loi et à la volonté du législateur.
Par ces motifs, je conclus que le point de droit soulevé par les parties doit être tranché en faveur de la défenderesse, le tout sans dépens.
Il y a lieu de féliciter les parties d’avoir eu recours à cette procédure expéditive et relativement économique pour résoudre au fond le litige qui les oppose. Le dispositif du jugement sera rendu en conséquence.