A-602-04
2005 CAF 345
Daniel Normandin (appelant)
c.
Le procureur général du Canada (intimé)
Répertorié: Normandin c. Canada (C.A.F.)
Cour d'appel fédérale, juges Décary, Létourneau et Pelletier, J.C.A.--Montréal, 6 octobre; Ottawa, 26 octobre 2005.
Libération conditionnelle --Appel d'une décision de la Cour fédérale selon laquelle la Commission nationale des libérations conditionnelles avait compétence pour imposer à l'appelant une condition d'assignation à résidence pour une période de 90 jours, à l'expiration de son mandat d'incarcération à titre de délinquant à contrôler soumis à une ordonnance de surveillance de longue durée--L'appelant a soutenu que, comme le régime de la Loi encadrant la mise en liberté des délinquants à contrôler ne prévoit pas précisément la possibilité d'imposer des conditions d'assignation à résidence, contrairement au régime applicable aux délinquants en libération conditionnelle ou d'office, la Commission n'avait pas compétence pour imposer des conditions de ce genre aux délinquants à contrôler--L'argument de l'appelant fondé sur la règle expressio unius est exclusio alterius (d'exclusion implicite) a été rejeté--L'art. 134.1(2) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition confère à la Commission un pouvoir général d'assurer la protection de la société et de favoriser la réinsertion sociale d'un délinquant à contrôler en lui imposant les conditions de surveillance limitées dans le temps qu'elle juge raisonnables et nécessaires--Ce large pouvoir discrétionnaire n'est pas écarté par les dispositions plus spécifiques de la Loi--La comparaison et l'analyse des textes applicables aux régimes distincts applicables aux délinquants à contrôler et aux délinquants en libération ne vont pas non plus dans le sens de la thèse de l'appelant, qui prétend que l'art. 134.1(2) de la Loi ne permet pas à la Commission d'imposer, comme condition d'une surveillance de longue durée, une assignation à résidence--Appel rejeté.
Interprétation des lois --L'appelant a invoqué la règle expressio unius est exlusio alterius (d'exclusion implicite) afin de soutenir que, puisque le régime encadrant la mise en liberté conditionnelle et d'office des délinquants prévoit la possibilité d'imposer comme condition l'assignation à résidence, alors que le régime applicable aux délinquants à contrôler est muet à cet égard, la Commission n'avait pas le pouvoir d'imposer à ceux-ci ce genre de condition--La règle expressio unius est exclusio alterius n'est pas une règle d'application ou d'interprétation générale--Les dispositions légales qui ne sont pas mentionnées à l'art. 99.1 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (précisant les dispositions applicables aux délinquants à contrôler) sont applicables aux délinquants à contrôler lorsqu'elles indiquent clairement qu'elles doivent l'être--L'art. 134.1(2) de la Loi confère à la Commission un pouvoir général d'imposer des conditions de surveillance, qui n'est pas écarté par les dispositions plus particulières de la Loi et du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition--La règle d'exclusion implicite a aussi été écartée parce qu'elle était contraire à l'objet de la Loi--Vu le libellé de l'art. 134.1(2) de la Loi et l'objet du régime de mise en liberté des délinquants à contrôler, l'intention du législateur était claire: l'assignation à un établissement résidentiel communautaire constitue une option possible lorsqu'il y a un degré élevé de récidive et que la condition de résidence temporaire est essentielle--Cette conclusion est aussi étayée par le fait que le législateur a conféré à la Commission un large pouvoir discrétionnaire d'imposer des conditions raisonnables et nécessaires au délinquant à contrôler--Il n'est pas nécessaire que l'art. 99.1 de la Loi renvoie à l'art. 133(4.1) parce que celui-ci n'est pas applicable aux délinquants à contrôler--Le fait que l'art. 135.1(1)c) prévoit le pouvoir d'ordonner l'internement ne veut pas dire que le pouvoir d'imposer des conditions prévu par l'art. 134.1(2) exclut la possibilité d'imposer une condition de résidence--Les pouvoirs d'interner/incarcérer et d'assigner à résidence sont deux concepts différents--Le pouvoir prévu par l'art. 134.1(2) de la Loi est beaucoup plus large--L'art. 161(1) du Règlement s'applique avec les adaptations nécessaires au délinquant à contrôler, mais cela ne veut pas dire que l'assignation à résidence est exclue pour les délinquants de ce genre.
Il s'agissait d'un appel interjeté d'une décision de la Cour fédérale par laquelle elle avait conclu que la Commission nationale des libérations conditionnelles avait compétence pour imposer à l'appelant une condition spéciale d'assignation à résidence pour une période de 90 jours à l'expiration de son mandat d'incarcération à titre de délinquant à contrôler soumis à une ordonnance de surveillance de longue durée.
Les articles 133 et 134 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition établissent un régime de conditions applicables aux délinquants en libération conditionnelle ou d'office. Le régime qui encadre la mise en liberté des délinquants à contrôler est exposé aux articles 134.1 et 135.1 de la Loi. L'appelant a invoqué la règle d'interprétation des lois dite de l'exclusion implicite (expressio unius est exclusio alterius) et soutenu que, comme les articles 99.1 et 134.1 de la Loi et le paragraphe 161(1) du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition définissent expressément les pouvoirs de la Commission à l'égard d'un délinquant à contrôler de même que les conditions qu'elle peut lui imposer, sans y inclure celle d'une assignation à résidence autre que ce qui est prévu à l'article 135.1 et sans inclure le paragraphe 133(4.1) de la Loi qui permet une telle assignation, le législateur a donc exclu implicitement cette dernière possibilité et, conséquemment, privé la Commission de ce pouvoir dans le cas des délinquants à contrôler.
Arrêt: l'appel doit être rejeté.
La règle expressio unius est exclusio alterius n'est pas une règle d'application ou d'interprétation générale. Les dispositions légales qui ne sont pas mentionnées à l'article 99.1 s'appliquent aux délinquants à contrôler lorsque ces dispositions indiquent clairement qu'elles s'appliquent à eux. Le paragraphe 134.1(2) de la Loi confère à la Commission un pouvoir général d'assurer la protection de la société et de favoriser la réinsertion sociale d'un délinquant à contrôler en lui imposant les conditions de surveillance qu'elle juge raisonnables et nécessaires à cette fin. Ce pouvoir n'est pas écarté par les dispositions plus particulières des articles 99.1, 134.1, 135.1 et du paragraphe 133(4.1) de la Loi.
La règle expressio unius est exclusio alterius a été écartée parce que, si elle avait été appliquée, cela aurait voulu dire que la Commission aurait le pouvoir d'imposer une assignation à résidence aux délinquants en libération conditionnelle, mais non pas aux délinquants à contrôler qui posent un risque élevé de récidive. Cela aurait été contraire à l'objet de la Loi. Le texte même du paragraphe 134.1(2) de la Loi, qui confère à la Commission un pouvoir général de fixer, pour les délinquants à contrôler, des conditions, sans autres restrictions quant à leur teneur et leur nature qu'elles soient nécessaires, raisonnables et d'une durée limitée, révèle qu'il n'est pas dans l'intention du législateur que le délinquant à contrôler posant un risque élevé de récidive qui choisirait de purger entièrement sa peine d'emprisonnement, ne pourrait pas être assigné à un établissement résidentiel communautaire une fois libéré de prison et de retour dans la collectivité, même si sa dangerosité est élevée et s'il pose un risque accru pour la société. L'intention du législateur est aussi révélée par le fait que le régime instauré pour les délinquants à contrôler au sein de la collectivité vise à permettre une meilleure réinsertion sociale du délinquant sans que la protection de la société et des victimes ne soient compromises. Ce régime n'est pas dépourvu de contraintes, vu la nature des crimes et des risques de récidive. Vu les objectifs de la Loi, il n'est pas raisonnable de conclure que le législateur, en conférant à la Commission le vaste pouvoir discrétionnaire d'imposer des conditions raisonnables et nécessaires à un délinquant à contrôler, entendait exclure implicitement celui d'imposer une assignation à résidence, même lorsqu'elle est nécessaire pour protéger la société et favoriser la réinsertion sociale du délinquant.
La comparaison et l'analyse des dispositions applicables aux régimes distincts des délinquants à contrôler et des délinquants en libération n'allaient pas dans le sens de la thèse de l'appelant, qui prétendait que le paragraphe 134.1(2) de la Loi ne permet pas à la Commission d'imposer, comme condition d'une surveillance de longue durée, une assignation à résidence. Il n'est pas nécessaire que l'article 99.1 renvoie au paragraphe 134.1(2) et au pouvoir d'assignation à résidence que celui-ci prévoit relativement aux délinquants libérés d'office. Le paragraphe 133.(4.1) ne s'applique pas aux délinquants à contrôler qui ne sont pas en libération d'office et il n'était pas nécessaire que le législateur le leur rende applicable par le biais de l'article 99.1 parce que le régime distinct qui prévoit les conditions de surveillance des délinquants à contrôler, confère à la Commission, par le jeu du paragraphe 134.1(2), un pouvoir, moins restrictif que celui du paragraphe 133(4.1), d'imposer des conditions de liberté pendant leur période de surveillance de longue durée. Le risque de récidive étant élevé pour les délinquants à contrôler et la période de surveillance étant de longue durée, il n'était pas déraisonnable de penser que le législateur a voulu laisser intact le vaste pouvoir discrétionnaire qu'il a conféré à la Commission au paragraphe 134.1(2) de la Loi afin de lui permettre de répondre aux besoins spéciaux des délinquants à contrôler ainsi qu'à ceux de la collectivité. En qui concerne l'alinéa 135.1(1)c) de la Loi, le fait qu'il renvoie au pouvoir de la Commission d'ordonner l'internement à résidence d'un délinquant à contrôler ne veut pas dire que le pouvoir général du paragraphe 134.1(2) de fixer des conditions réfère à des conditions autres que l'assignation à résidence. Le pouvoir d'internement dans une résidence diffère du pouvoir d'assignation à un tel lieu. Le premier sanctionne le comportement du délinquant à contrôler alors que le second réfère à une condition de sa surveillance de longue durée ou, dans le cas d'un délinquant en libération d'office, à une condition de cette libération. Il y a là deux concepts différents. Le pouvoir visé par l'article 135.1 reflète l'urgence de la situation engendrée par l'inobservation des conditions énoncées dans l'ordonnance de surveillance de longue durée et le caractère temporaire des mesures prises. Il se démarque nettement du pouvoir beaucoup plus large de fixer des conditions de surveillance prévu au paragraphe 134.1(2). Enfin, selon le sous-alinéa 161(1)g)(i) du Règlement, le délinquant, dès sa mise en liberté, doit communiquer à son surveillant l'adresse de sa résidence. Cette disposition doit s'appliquer en faisant les adaptations nécessaires au délinquant à contrôler. Elle s'applique aussi au délinquant en libération, dont l'assignation à résidence est expressément prévue par les paragraphes 133(4) et (4.1) de la Loi. Il n'y avait donc aucun argument valable à tirer du sous-alinéa 161(1)g)(i) du Règlement qui permette de conclure que l'assignation à résidence n'est pas permise pour les délinquants à contrôler.
lois et règlements cités
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 7.
Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, art. 753.1 (édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 4; 2002, ch. 13, art. 76), 753.2 (édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 4), 753.3 (édicté, idem).
Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20, art. 99 (mod. par L.C. 2002, ch. 1, art. 173), 99.1 (édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 18), 100, 101, 102 (mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 27(F)), 109, 110, 111, 133 (mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 48, 71(F); 1997, ch. 17, art. 28), 134 (mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 71(F); 1997, ch. 17, art. 29), 134.1 (édicté, idem, art. 30), 134.2 (édicté, idem), 135 (mod. par L.C. 1995, ch. 22, art. 18; ch. 42, art. 50, 69(A), 70(A); 1997, ch. 17, art. 32(F), 32.1), 135.1 (édicté, idem, art. 33), 140 (mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 55, 69(A)), 141 (mod., idem, art. 56(F)), 142 (mod. par L.C. 1995, ch. 22, art. 13; ch. 42, art. 57, 71(F), 72(F)); 1997, ch. 17, art. 35), 143, 144, 145, ann. I.
Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620, art. 161.
jurisprudence citée
décision appliquée:
McMurray c. Canada (Commission nationale des libérations conditionnelles), 2004 CF 462.
décisions examinées:
Godbout c. Longueuil (Ville), [1997] 3 R.C.S. 844; Alimport (Empresa Cubana Importadora de Alimentos) c. Victoria Transport Ltd., [1977] 2 R.C.S. 858; R. v. V.M., [2003] O.T.C. 97; [2003] O.J. no 436 (QL) (C.S.J.); R. v. Johnson (2001), 159 B.C.A.C. 255; 158 C.C.C. (3d) 155; 2001 BCCA 456.
décisions citées:
Congrégation des Frères de l'Instruction Chrétienne c. Commissaires d'écoles (Grand'pré), [1977] 1 R.C.S. 429; Murray Bay Motor Co. Ltd. c. Compagnie d'Assurance Bélair, [1975] 1 R.C.S. 68; Ternette c. Solliciteur général du Canada, [1984] 2 C.F. 486 (1re inst.); Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311.
doctrine citée
Côté, P.-A. Interprétation des lois, 3e éd. Montréal: Éditions Thémis, 1999.
Sullivan, Ruth. Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes, 4th ed. Markham: Butterworths, 2002.
APPEL d'une décision de la Cour fédérale ([2005] 2 R.C.F. 373; 2004 CF 1404) confirmant la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles qui avait imposé à l'appelant une condition spéciale d'assignation à résidence pour une période de 90 jours, à l'expiration de son mandat d'incarcération à titre de délinquant à contrôler soumis à une ordonnance de surveillance de longue durée. Appel rejeté.
ont comparu:
Diane Condo pour l'appelant.
Dominique Guimond pour l'intimé.
avocats inscrits au dossier:
Condo Law Office, Ottawa, pour l'appelant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Voici les motifs du jugement rendus en français par
[1]Le juge Létourneau, J.C.A.: La Commission nationale des libérations conditionnelles (Commission) avait-elle compétence pour imposer, comme elle l'a fait par ordonnance, une condition spéciale d'assignation à résidence à l'appelant pour une période de 90 jours, à l'expiration de son mandat d'incarcération à titre de délinquant à contrôler soumis à une ordonnance de surveillance de longue durée?
[2]La question en l'espèce est devenue théorique par l'écoulement du temps comme c'est souvent le cas dans les litiges de droit carcéral. Toutefois, les parties sont convenues que le sujet du litige était, et demeurait pour le futur, d'une grande importance pratique pour les droits des délinquants à contrôler qui éventuellement seraient, comme l'appelant, assujettis à une telle condition. À l'audience, nous avons exprimé notre accord pour entendre l'appel. Nous nous sommes dits satisfaits qu'il est dans l'intérêt de l'administration de la justice de nous prononcer sur le mérite de l'appel.
[3]Afin de ne pas interrompre la séquence de l'argumentation de l'appelant et l'analyse que j'en fais, c'est en annexe que, sauf exceptions, je reproduis les nombreuses dispositions législatives pertinentes à la compréhension et à la résolution du litige.
[4]La juge Tremblay-Lamer qui était saisie de la question par voie de demande de contrôle judiciaire a répondu par l'affirmative [[2005] 2 R.C.F. 373 (C.F.)]. À mon avis, sa conclusion était justifiée légalement. Il n'est pas de mon intention de reprendre chacune des justifications qu'elle a données pour conclure que le paragraphe 134.1(2) [édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 30] de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (Loi) s'applique en l'espèce et fonde l'existence du pouvoir d'imposer une condition spéciale d'assignation à résidence ainsi que l'exercice qui fut fait de ce pouvoir.
[5]Pour bien camper les prétentions de l'appelant que j'énoncerai ci-après, il convient de rappeler que les articles 133 [mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 48, 71(F); 1997, ch. 17, art. 28] et 134 [mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 71(F); 1997, ch. 17, art. 29] de la Loi édictent un régime de conditions applicables aux délinquants en libération conditionnelle (parole) ou d'office (statutory release) ou en absence temporaire de leur lieu de détention. Par contre, le régime qui gouverne la mise en liberté des délinquants à contrôler se retrouve aux articles 134.1 [édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 30] et 135.1 [édicté, idem, art. 33] et définit les conditions qui s'appliquent à cette catégorie de délinquants.
[6]En outre, afin de faciliter la lecture du texte, j'entends utiliser le terme délinquant à contrôler pour désigner la personne qui, comme l'appelant, s'est vu imposer par la cour criminelle une ordonnance de surveillance de longue durée à être servie au sein de la collectivité après avoir purgé sa peine d'emprisonnement.
[7]La situation juridique du délinquant à contrôler se verra opposée au cours des présents motifs à celle qui régit le délinquant en libération conditionnelle (parole) ou celui en libération d'office (statutory release). J'utiliserai le terme délinquant en libération pour désigner les deux types de délinquants en libération même si, légalement, la libération conditionnelle et la libération d'office font référence à des statuts juridiques quelque peu différents. Lorsqu'il sera nécessaire de différencier l'un de l'autre ou l'un par rapport à l'autre, je parlerai alors, selon le cas, d'un délinquant en libération conditionnelle ou d'un délinquant en libération d'office.
[8]Dans le but de ne pas inutilement alourdir la lecture des motifs, je me garderai de référer aux délinquants qui bénéficient d'une absence temporaire puisque le présent débat ne les concerne pas.
Les prétentions de l'appelant
[9]En appel devant nous, l'appelant soutient que la Commission n'avait pas la compétence pour lui imposer une condition à résidence et invoque à son secours la règle de l'exclusion implicite en matière d'interprétation législative. Cette règle était jadis exprimée par la maxime latine expressio unius est exclusio alterius. À cet égard, l'argument de l'appelant prend la forme suivante.
[10]Le paragraphe 134.1(1) de la Loi énonce que les conditions qui sont prévues au paragraphe 161(1) du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620 (Règlement) s'appliquent au délinquant à contrôler. Je répète qu'il s'agit de la situation dans laquelle, conformément à l'ordonnance judiciaire prononcée contre lui, l'appelant s'est retrouvé à l'expiration de sa peine d'emprison-nement de deux ans pour des délits à connotation sexuelle.
[11]Or l'appelant fait remarquer, à juste titre, que le paragraphe 161(1) du Règlement, auquel le paragraphe 134.1(1) renvoie, prévoit une liste de conditions qui n'inclut toutefois pas une condition d'assignation à résidence comme celle imposée en l'espèce par la Commission.
[12]En outre, d'ajouter l'appelant, l'article 99.1 [édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 18] de la Loi édicte qu'une personne comme lui, soumise à une ordonnance de surveillance de longue durée, est assimilée à un délinquant pour l'application de la Partie II de la Loi et que, dans un tel cas, les articles 100, 101, 109 à 111 et 140 [mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 55, 69(A)] [art. 141 (mod., idem, art. 56(F)), 142 (mod. par L.C. 1995, ch. 22, art. 13; ch. 42, art. 57, 71(F), 72(F); 1997, ch. 17, art. 35)] à 145 de la Loi s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, à la surveillance de cette personne.
[13]Cependant, on ne retrouve pas, dans cette liste d'articles énumérés à l'article 99.1, les paragraphes 133(4) et (4.1) qui permettent, pour faciliter la réinsertion sociale d'un délinquant, d'ordonner comme condition de libération conditionnelle (parole) ou d'office (statutory release) une assignation à résidence dans un établissement résidentiel communautaire ou dans un établissement psychiatrique.
[14]Enfin, l'appelant nous réfère à l'article 135.1 de la Loi qui traite de la suspension de la surveillance de longue durée en cas d'inobservation des conditions de mise en liberté énoncées dans l'ordonnance de surveillance de longue durée. On y voit à cet article que le non-respect des conditions de mise en liberté peut déboucher sur une ordonnance d'internement du délinquant à contrôler dans un établissement résidentiel communautaire ou dans un établissement psychiatrique.
[15]Donc, toujours selon l'argument de l'appelant, comme les articles 99.1 et 134.1 de la Loi ainsi que le paragraphe 161(1) du Règlement identifient expressé-ment les pouvoirs de la Commission à l'égard d'un délinquant à contrôler de même que les conditions qu'elle peut lui imposer, sans y inclure celle d'une assignation à résidence autre que ce qui est prévu à l'article 135.1 et sans inclure le paragraphe 133(4.1) de la Loi qui permet une telle assignation, le législateur a donc exclu implicitement cette dernière possibilité et, conséquemment, nié ce pouvoir à la Commission dans le cas des délinquants à contrôler.
[16]Pour appuyer son argument fondé sur la règle d'exclusion implicite, la procureure de l'appelant a fait une exégèse des textes des articles 133, 134.1 et 135.1 de la Loi signalant leur parallélisme dans leur champ respectif d'application et prenant bien soin de préciser les différences importantes qui existent au niveau du champ d'application. Quelques exemples suffiront à illustrer et à permettre de comprendre la thèse qu'elle soutient.
[17]Elle soumet, à raison, que les articles 133 et 134 s'appliquent aux délinquants en libération. Je suis d'accord que, dans cette catégorie de délinquants soumis aux prescriptions des articles 133 et 134, entre aussi le délinquant à contrôler pour sa peine d'emprisonnement si, durant cette période, il est mis en liberté conditionnelle ou s'il devient en liberté d'office à l'expiration du délai statutaire prévu à cette fin qui, sauf exception, se situe aux deux tiers de sa peine d'emprisonnement.
[18]Selon la procureure de l'appelant, la différence entre le délinquant à contrôler et les délinquants en libération, parce qu'il est indéniable qu'il en existe une, se situe au niveau de l'expiration de la peine d'emprisonnement. Alors que les délinquants en libération cessent à ce stade d'être soumis à des conditions de libération et à la compétence de la Commission, le délinquant à contrôler, pour sa part, tombe à ce moment sous le régime de conditions de surveillance de longue durée que l'on retrouve, tel que déjà mentionné, aux articles 134.1 et 135.1 de la Loi. Les premiers, ayant purgé leur sentence, sont libres de toute contrainte; le délinquant à contrôler entre alors dans la phase seconde de sa sentence reçue du tribunal, la première étant l'emprisonnement, la seconde, une surveillance au sein de la collectivité à cause du degré élevé de risque de récidive. C'est ici qu'entre en jeu l'argument de l'appelant fondé sur l'exégèse des textes.
[19]Dans le régime de conditions de liberté régies par les articles 133 et 134, applicable à tous les délinquants en libération, y compris, je le rappelle, les délinquants à contrôler qui jouissent de ce bénéfice, on retrouve des conditions dites automatiques imposées par l'effet de la Loi à la personne ainsi mise en liberté. Or, on retrouve au paragraphe 134.1(1) une disposition analogue dans le régime des conditions de la surveillance de longue durée qui gouverne spécifiquement le délinquant à contrôler durant sa période de surveillance. Je reproduis en parallèle et en alternance, français et anglais, les deux dispositions:
Délinquant en libération
133. [. . .]
(2) Sous réserve du paragraphe (6), les conditions prévues par règlement sont réputées avoir été imposées dans tous les cas de libération conditionnelle ou d'office ou de permission de sortir sans escorte.
Délinquant à contrôler
134.1 (1) Sous réserve du paragraphe (4), les conditions prévues par le paragraphe 161(1) du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, au délinquant surveillé aux termes d'une ordonnance de surveillance de longue durée.
[20]En outre, les deux régimes permettent également d'imposer des conditions particulières ou spécifiques, raisonnables et nécessaires, que peuvent commander la protection de la société et la réinsertion sociale d'un délinquant. Ce sont respectivement les paragraphes 133(3) et 134.1(2) et (3):
Délinquant en libération
133. [. . .]
(3) L'autorité compétente peut imposer au délinquant qui bénéficie d'une libération conditionnelle ou d'office ou d'une permission de sortir sans escorte les conditions qu'elle juge raisonnables et nécessaires pour protéger la société et favoriser la réinsertion sociale du délinquant.
[pas d'équivalent]
Délinquant à contrôler
134.1 [. . .]
(2) La Commission peut imposer au délinquant les conditions de surveillance qu'elle juge raisonnables et nécessaires pour protéger la société et favoriser la réinsertion sociale du délinquant.
(3) Les conditions imposées par la Commission en vertu du paragraphe (2) sont valables pendant la période qu'elle fixe.
[21]Je note au passage que le paragraphe 134.1(3) n'a pas d'équivalent dans le régime du délinquant en libération pour la bonne et simple raison que ce régime cesse d'avoir effet et de s'appliquer lorsque la durée de la sentence d'emprisonnement arrive à sa fin. Il n'est donc pas nécessaire dans ce régime de prévoir un pouvoir de fixer une limite à la durée des conditions de liberté. La situation est différente dans le cas des délinquants à contrôler car la période de surveillance prolongée peut être de 10 ans après l'expiration de la sentence d'emprisonnement. Il peut s'avérer déraisonnable et non nécessaire d'imposer une condition d'une durée de 10 ans. De là l'opportunité sinon la nécessité du pouvoir conféré au paragraphe 134.1(3).
[22]Or, dans cette nomenclature des pouvoirs d'imposer des conditions, et c'est à ce point que l'appelant invoque la règle d'exclusion implicite et l'exégèse des textes, les paragraphes 133(4) et (4.1) confèrent le pouvoir d'assigner à résidence un délinquant en libération. Le régime de conditions de la surveillance de longue durée n'a pas d'équivalent pour le délinquant à contrôler:
Délinquant en libération
133. [. . .]
(4) Si elle estime que les circonstances le justifient, l'autorité compétente peut ordonner que le délinquant, à titre de condition de sa libération conditionnelle ou d'une permission de sortir sans escorte, demeure dans un établissement résidentiel communautaire.
(4.1) L'autorité compétente peut, pour faciliter la réinsertion sociale du délinquant, ordonner que celui-ci, à titre de condition de sa libération d'office, demeure dans un établissement résidentiel communautaire ou un établissement psychiatrique si elle est convaincue qu'à défaut de cette condition la commission par le délinquant d'une infraction visée à l'annexe I avant l'expiration légale de sa peine présentera un risque inacceptable pour la société.
Délinquant à contrôler
134.1
[pas d'équivalent]
[23]Et la procureure de l'appelant de renchérir, comme les paragraphes 133(4) et (4.1) ainsi que l'article 134.1 ont été ajoutés à la Loi en même temps en 1997, le législateur aurait inclus le pouvoir d'assignation à résidence dans l'article 134.1, ou aurait fait, dans l'article 99.1, un renvoi au paragraphe 133(4.1), s'il avait voulu qu'une telle possibilité existe pour les délinquants à contrôler en cours de période de surveillance de longue durée. (Il semblerait que le paragraphe 133(4) fait partie de la Loi depuis 1992 et que le paragraphe 133(4.1) y a été ajouté en 1995).
[24]Enfin, la procureure de l'appelant a soumis qu'en cas d'ambiguïté dans l'interprétation de la Loi, la Cour doit retenir l'interprétation qui est conforme à la Charte [Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]] et qui favorise l'accusé. Elle soumet que le droit à la liberté garanti par l'article 7 de la Charte inclut le droit de choisir son lieu de résidence et nous renvoie à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Godbout c. Longueuil (Ville), [1997] 3 R.C.S. 844.
[25]J'en arrive donc au stade de l'analyse des arguments de l'appelant. Je débuterai par ses prétentions quant à l'application de la règle d'exclusion implicite. Ensuite, j'examinerai son étude comparative des textes législatifs en cause pour, finalement, traiter de son droit de bénéficier de l'interprétation qui lui est favorable en cas d'ambiguïté et de choisir son lieu de résidence.
Analyse des arguments de l'appelant
1. L'application de la règle expressio unius est exclusio alterius ou de l'exclusion implicite
[26]L'argument de l'appelant en rapport avec la règle d'exclusion implicite est attrayant, mais il donne à la règle d'interprétation un absolutisme que les auteurs et la jurisprudence tout uniment ne lui reconnaissent pas.
[27]Premièrement, cette règle d'interprétation législative, aussi connue sous le vocable «d'argument a contrario» (voir P.-A. Côté, Interprétation des lois, 3e éd., Montréal: Éditions Thémis, 1999, à la page 423) opère de la façon suivante selon ce qu'écrit la professeure Sullivan dans Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes, 4e éd., Toronto: Butterworths, 2002, aux pages 186 et 187:
[traduction]
Un argument fondé sur l'exclusion implicite est recevable lorsqu'on a des raisons de croire que, si le législateur avait voulu inclure une chose particulière dans le cadre de sa mesure législative, il aurait mentionné cette chose expressément. En raison de cette attente, le fait que le législateur n'ait pas mentionné la chose permet de déduire que cette chose a été délibérément exclue. Bien que n'étant pas expresse, l'exclusion est implicite. La force de l'implication dépend de la force et de la légitimité de l'attente d'une mention expresse. Plus la raison de s'attendre à une mention expresse à une chose est bonne, plus le silence du législateur est significatif. [Je souligne.]
[28]Mais aussi importante et utile qu'elle puisse être, cette règle d'interprétation est bien loin d'être une règle d'application ou d'interprétation générale: voir les arrêts Congrégation des Frères de l'Instruction Chrétienne c. Commissaires d'écoles (Grand'pré), [1977] 1 R.C.S. 429, à la page 435; Murray Bay Motor Co. Ltd. c. Compagnie d'Assurance Bélair, [1975] 1 R.C.S. 68, à la page 74. De fait, dans l'affaire Alimport (Empresa Cubana Importadora de Alimentos) c. Victoria Transport Ltd., [1977] 2 R.C.S. 858, à la page 862, le juge Pigeon, traitant de la règle et s'exprimant pour la Cour, écrit:
Le principe que la mention d'un cas particulier exclut l'application des autres cas non mentionnés est bien loin d'être reconnu comme une règle générale d'interprétation. Au contraire, un texte affirmatif de portée restreinte n'a pas ordinairement pour effet d'écarter l'application d'une règle générale qui existe par ailleurs. [Je souligne.]
[29]Le paragraphe 134.1(2) de la Loi, invoqué par la Commission pour imposer une assignation à résidence, renferme un pouvoir général d'assurer la protection de la société et de favoriser la réinsertion sociale d'un délinquant à contrôler en lui imposant les conditions de surveillance qu'elle juge raisonnables et nécessaires à cette fin. Ce pouvoir général, à mon avis, n'est pas écarté par les dispositions plus spécifiques des articles 99.1, 134.1, 135.1 et du paragraphe 133(4.1) de la Loi. Je reviendrai plus tard sur le rapport que ces dispositions entretiennent entre elles. Qu'il me suffise pour l'instant de dire que je suis d'accord avec les propos du juge Russell dans l'affaire McMurray c. Canada (Commis-sion nationale des libérations conditionnelles), 2004 CF 462, repris en l'espèce par la juge Tremblay-Lamer.
[30]Dans McMurray, le juge Russell, interprétant l'article 99.1 dont se réclame l'appelant, conclut, en s'inspirant du contexte, de l'économie générale et de l'objet de la Loi ainsi que du sens ordinaire des mots, que l'article 99.1 fait référence à des dispositions particulières, dont l'application ne serait pas évidente à des délinquants à contrôler, pour exprimer qu'il est de l'intention du législateur qu'elles s'appliquent. Mais cela n'a pas pour effet d'empêcher, et j'ajouterais de restreindre, l'application à des délinquants à contrôler d'autres dispositions législatives qui ne sont pas mentionnées à l'article 99.1 lorsque ces dispositions indiquent clairement qu'elles s'appliquent à ces délinquants. Il est alors inutile de les mentionner dans l'article 99.1 puisque leur application est évidente. C'est, à mon avis, sans l'ombre d'un doute le cas de l'article 134.1 et du pouvoir général d'imposer des conditions que l'on retrouve au paragraphe 134.1(2). Je ne vois vraiment pas comment le fait de ne pas avoir inclus dans l'article 99.1 une référence au paragraphe 133(4.1) aurait pour effet d'écarter ou de restreindre la portée générale du pouvoir que contient expressément le paragraphe 134.1(2) d'imposer des conditions à un délinquant à contrôler.
[31]Deuxièmement, le recours à cette règle d'interprétation législative que l'appelant invoque doit se faire avec prudence et parcimonie: voir P.-A. Côté, Interprétation des lois, à la page 427. Sans valeur intrinsèque absolue, la règle doit être mise de côté lorsque d'autres dispositions législatives pertinentes à la question sous examen amènent à penser que son application conduirait à un résultat contraire à l'objet de la loi (voir P.-A. Côté dans son ouvrage, à la page 429; Ternette c. Solliciteur général du Canada, [1984] 2 C.F. 486 (1re inst.)), à un résultat manifestement absurde (Congrégation des Frères de l'Instruction Chrétienne, à la page 436) ou encore mènerait à des incohérences, des illogismes ou une injustice (Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311, aux pages 321-322).
[32]Bref, la règle expressio unius est exclusio alterius ne peut être utilisée pour contrecarrer l'intention législative et empêcher de lui donner effet. [traduction] «Comme tous les arguments fondés sur ces présomptions», écrit la professeure Sullivan, à la page 193 de son ouvrage, se référant à la règle, [traduction] «son poids dépend d'un éventail de facteurs contextuels et du poids des considérations concurrentes. Même si un argument relatif à l'exclusion implicite n'est pas réfuté, d'autres indicateurs de l'intention du législateur peuvent l'emporter».
[33]En l'espèce, la juge n'a pas manqué de soulever l'incohérence importante, et à mon avis incontournable pour ne pas dire fatale à la position de l'appelant, que soulèverait l'application de la règle: la Commission aurait le pouvoir d'imposer une assignation à résidence à des délinquants en libération, mais elle ne pourrait le faire à l'égard de délinquants à contrôler que la Cour a ordonné de surveiller à cause d'un risque élevé de récidive, alors que, selon l'alinéa 101a) de la Loi, la protection de la société est le critère déterminant qui doit guider la Commission dans l'exécution de son mandat, sans compter que ces délinquants peuvent bénéficier d'une telle mesure au plan de la réinsertion sociale. La juge Wilson de la Cour supérieure de l'Ontario avait fait le même constat d'incohérence dans l'affaire R. v. V.M., [2003] O.T.C. 97 (C.S.J.).
[34]La procureure de l'appelant soumet qu'il est erroné, comme la Cour supérieure de l'Ontario et la Cour fédérale l'ont fait, de se livrer à une comparaison entre les délinquants à contrôler et ceux en libération pour ensuite en tirer une conclusion d'incohérence. C'est l'équivalent, pour utiliser sa métaphore, de comparer des pommes avec des oranges.
[35]Son objection à la comparaison tient au fait qu'il s'agit de deux catégories de délinquants bien différents et, qu'à son avis, l'ensemble des dispositions de la Loi fait ressortir l'intention du législateur que les deux catégories soient soumises à des régimes différents parce que les délinquants se retrouvent dans des conditions différentes. Selon elle, le délinquant en libération cesse de relever de la Commission lorsque la durée de sa sentence d'emprisonnement est expirée car sa peine est purgée entièrement. Par contre, ce n'est pas le cas du délinquant à contrôler qui, lui, demeure sujet à des conditions, sous le contrôle de la Commission, et s'expose à de nouvelles poursuites s'il y a bris des conditions.
[36]Avec respect, je ne crois pas que la distinction, par ailleurs exacte, que fait la procureure de l'appelant, puisse justifier la conclusion qu'elle en tire que le législateur n'a pas voulu qu'un délinquant à contrôler puisse être soumis à une condition d'assignation à résidence durant sa surveillance prolongée. Tel qu'il appert ci-après, accepter cette conclusion ne ferait qu'amplifier l'incohérence de la situation.
[37]Ainsi, un délinquant à contrôler qui bénéficierait d'une libération conditionnelle (parole) ou d'office (statutory release), à l'instar de tout autre délinquant en libération, pourrait être assigné à résidence comme le législateur l'a indiqué aux paragraphes 133(4) et (4.1). Cependant, une fois sa peine d'emprisonnement purgée et sa surveillance de longue durée débutée, il ne pourrait plus être assigné à résidence même si une telle assignation serait raisonnable et nécessaire pour protéger le public ou favoriser sa réinsertion sociale ou encore les deux à la fois.
[38]Pire encore, le délinquant à contrôler qui choisirait de ne pas se prévaloir d'une libération conditionnelle ou d'office et qui purgerait entièrement sa peine d'emprisonnement, comme c'est le cas de l'appelant qui est demeuré emprisonné jusqu'à la fin à cause de son risque élevé de récidive, ne pourrait être assigné transitoirement à un établissement résidentiel communautaire une fois libéré de prison et de retour dans la collectivité. Il en serait ainsi même si le degré de récidive du délinquant et sa dangerosité sont élevés, même si l'assignation temporaire à résidence s'avérerait essentielle et même s'il en résulte un danger de préjudice accru pour la société.
[39]Il n'y a aucun doute dans mon esprit qu'il ne s'agit pas là de l'intention recherchée par le législateur. J'en trouve un premier indice dans le texte même du paragraphe 134.1(2) de la Loi qui, tel que déjà mentionné plus d'une fois, octroie à la Commission un pouvoir général de fixer, pour les délinquants à contrôler, des conditions, sans autres restrictions quant à leur teneur et leur nature que la nécessité qu'elles soient nécessaires, raisonnables et d'une durée limitée.
[40]Un second indice émerge de l'objectif même du régime de surveillance des délinquants à contrôler. Avant la mise en place de ce régime, le délinquant à connotation sexuelle s'exposait à une décision judiciaire lui conférant le statut de délinquant dangereux pour une période indéterminée ou à une longue peine d'emprisonnement. Le régime mis en place par le législateur pour les délinquants à contrôler au sein de la collectivité est un régime plus souple et plus bénéfique pour eux. Il vise à permettre une meilleure réinsertion sociale du délinquant, mais sans que la protection de la société et des victimes ne soient compromises. Malgré sa plus grande souplesse, le régime n'est pas sans contrainte, compte tenu de la nature des crimes et des risques de récidive. Dans l'affaire R. v. Johnson (2001), 159 B.C.A.C. 255, au paragraphe 98, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique résume bien le but du régime de surveillance des délinquants à contrôler. Le juge Ryan écrit:
[traduction] En résumé donc, les nouvelles dispositions qui autorisent un tribunal a déclarer qu'un délinquant est un délinquant dangereux ont pour but de faire en sorte que les délinquants qui sont véritablement dangereux et dont is est peu probable que le comportement puisse être modifié ou contrôlé seront condamnés à une peine de durée indéterminée de façon à ce qu'ils fassent l'objet d'une surveillance très étroite de la part de l'État. Le délinquant dont le comporte-ment ou la conduite n'est pas pathologiquement rebelle à tout traitement, dans le sens que le délinquant pourra au moins en arriver à une étape où, même s'il n'est pas amendable, il pourra être contrôlé de façon sécuritaire dans la collectivité et qui aurait probablement été déclaré être un délinquant dangereux aux termes des anciennes dispositions, peut maintenant faire l'objet d'une déclaration de délinquant à contrôler plutôt que de délinquant dangereux. Ce délinquant aura au moins la possiblité d'être un jour libéré de tout contrôle de la part de l'État lorsqu'il ne représentera plus de danger pour la collectivité.
[41]De toute évidence, l'application de la règle, telle que proposée et interprétée par l'appelant, sape les objectifs de la Loi que l'on retrouve à l'article 100, selon lesquels «[l]a mise en liberté sous condition vise à contribuer au maintien d'une société juste, paisible et sûre en favorisant, par la prise de décisions appropriées quant au moment et aux conditions de leur mise en liberté, la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants en tant que citoyens respectueux des lois». Il n'est certes pas exclu de l'intention du législateur que la réadaptation et la réinsertion sociale d'un délinquant à contrôler puissent au besoin, et doivent dans certains cas, passer par une assignation à résidence alors qu'il entreprend ou vit sa période de surveillance de longue durée au sein de la collectivité.
[42]En outre, l'application proposée de la règle tend à discréditer les ordonnances judiciaires de surveillance de longue durée d'un délinquant à contrôler. Elle en diminue la valeur et l'utilité et risque de compromettre la sécurité qu'elles ont pour but d'apporter à la collectivité. De même, elle a pour conséquence de freiner indûment le travail des intervenants sociaux et à en réduire l'efficacité tout en augmentant injustement et inutilement les risques de préjudice pour la société.
[43]Dans ces circonstances, conclure qu'il s'agit là de l'objectif recherché par le législateur, comme l'application, telle que proposée par l'appelant, de la règle expressio unius est exclusio alterius inexorable-ment nous y conduit, c'est faire fi des objectifs nettement contraires qu'il a pris soin d'exprimer et d'élaborer aux articles 100 et 101 de la Loi.
[44]Le pouvoir conféré à la Commission par le paragraphe 134.1(2) est un pouvoir discrétionnaire large et souple et la discrétion s'exerce à trois niveaux. Premièrement, la Commission peut imposer ou ne pas imposer des conditions de surveillance à un délinquant à contrôler. Deuxièmement, c'est aussi la Commission qui est investie du pouvoir de déterminer s'il est raisonnable et nécessaire de le faire pour assurer la protection du public et favoriser la réinsertion sociale du délinquant. Troisièmement, elle en fixe la durée.
[45]En outre, le paragraphe 134.1(4) habilite la Commission à modifier ou annuler ces conditions si elle le juge à propos ou à soustraire le délinquant à contrôler à l'application de l'une ou l'autre des conditions qu'elle a imposées.
[46]On peut donc voir de ces dispositions l'intention du législateur de s'en remettre à l'expertise et à l'expérience de la Commission pour, autant que faire se peut, protéger la société tout en favorisant la réinsertion et l'intégration sociales du délinquant. Dans ce contexte, il n'est pas raisonnable, à mon avis, de conclure que le législateur, dans la poursuite des objectifs de la Loi, en octroyant à la Commission le vaste pouvoir discrétion-naire d'imposer des conditions raisonnables et nécessai-res à un délinquant à contrôler, entendait exclure implicitement celui d'une assignation à résidence, même lorsqu'elle est nécessaire pour protéger la société et favoriser la réinsertion sociale du délinquant.
2. L'analyse de l'étude comparative des textes législatifs faite par l'appelant
[47]Par nécessité, en examinant l'argument a contrario de l'appelant fondé sur la règle d'exclusion implicite, j'ai déjà examiné en partie le mérite de l'analyse que l'appelant fait des textes législatifs, particulièrement des articles 99.1, 133, 134 et 134.1 de la Loi. Je n'ai pas l'intention de refaire l'exercice. Mais je crois qu'il y a lieu d'ajouter ceci en ce qui a trait à l'interrelation de ces dispositions.
[48]Il est vrai, comme l'affirme l'appelant, que l'article 99.1 de la Loi ne fait pas mention du paragraphe 133 (4.1) et du pouvoir d'assignation à résidence que ce paragraphe contient relativement aux délinquants en libération d'office (statutory release). Mais je suis d'accord avec le procureur de l'intimé: ce paragraphe 133(4.1) ne s'applique pas aux délinquants à contrôler qui ne sont pas en libération d'office et il n'était pas nécessaire pour le législateur de le leur rendre applicable par le biais de l'article 99.1 parce que le régime distinct, qui prévoit les conditions de surveillance des délinquants à contrôler, confère à la Commission, par le jeu du paragraphe 134.1(2), un pouvoir, moins restrictif que celui du paragraphe 133(4.1), d'imposer des conditions de liberté pendant leur période de surveillance de longue durée. Le législateur a voulu laisser à la Commission une plus grande marge de manoeuvre dans l'exercice de sa compétence à l'égard de ce genre de délinquants.
[49]Que le paragraphe 133(4.1) de la Loi a une vocation restrictive apparaît de sa lecture même et de sa comparaison avec les paragraphes 133(3) et 134.1(2). On se rappellera que les paragraphes 133(3) et 134.1(2) confèrent à la Commission des pouvoirs identiques d'imposer les conditions qu'elle juge raisonnables et nécessaires pour protéger la société et favoriser la réinsertion sociale du délinquant. Dans le cas du paragraphe 133(3), il s'agit des délinquants en libération. Le paragraphe 134.1(2), quant à lui, vise les délinquants à contrôler.
[50]Or le paragraphe 133(3), à l'instar du paragraphe 134.1(2) est, par son libellé, suffisamment large pour permettre l'assignation à résidence, de sorte que le paragraphe 133(4.1) serait inutile si ce n'est que le législateur a voulu, en matière d'assignation à résidence d'un délinquant en libération d'office (statutory release), restreindre la généralité du pouvoir octroyé à l'autorité compétente par le paragraphe 133(3).
[51]De fait, l'assignation à résidence d'un délinquant en libération d'office (statutory release) ne peut se faire que si l'autorité compétente, laquelle inclut la Commission, «est convaincue qu'à défaut de cette condition» le délinquant présentera avant l'expiration de sa peine un risque inacceptable pour la société du fait qu'il commettra une infraction prévue à l'annexe I (cet annexe réfère à des infractions à caractère sexuel ou violent). L'utilisation du pouvoir sous le paragraphe 133(4.1) est donc soumise à un test beaucoup plus exigeant que celui prévu pour l'exercice du pouvoir général de fixer des conditions sous le paragraphe 133(3). Il faut, d'une part, un risque inacceptable pour la société (par opposition à un risque élevé de récidive dans le cas d'un délinquant à contrôler) et, d'autre part, il ne suffit pas que la Commission estime qu'il faille imposer des conditions de libération d'office: il faut qu'elle en soit convaincue et qu'elle soit convaincue de la nécessité d'une assignation à résidence vu la nature du risque posé.
[52]Le législateur n'a pas voulu introduire cette limitation dans le cas des délinquants à contrôler qui, eux, débutent leur période de surveillance prolongée alors que le délinquant en libération d'office (statutory release) s'achemine vers la fin de sa sentence. Le risque de récidive étant élevé pour les délinquants à contrôler et la période de surveillance étant de longue durée, il n'est pas déraisonnable de croire que le législateur a voulu laisser intact le vaste pouvoir discrétionnaire qu'il a octroyé à la Commission au paragraphe 134.1(2) de la Loi afin de lui permettre de rencontrer les besoins spécifiques des délinquants à contrôler (et à réinsérer socialement) ainsi que ceux de la collectivité à qui on fait assumer le risque de la libération du délinquant.
[53]Pour soutenir son argument, l'appelant prend appui sur l'article 135.1 de la Loi qui, à l'alinéa 135.1(1)c), fait référence au pouvoir de la Commission d'ordonner l'internement à résidence d'un délinquant à contrôler. Comme dans cet article le législateur s'est exprimé sur l'assignation à résidence, dit l'appelant, il devient évident que le pouvoir général du paragraphe 134.1(2) de fixer des conditions réfère à des conditions autres que l'assignation à résidence. Avec respect, je crois qu'il y a sur ce point méprise de l'appelant pour les raisons suivantes.
[54]L'article 135.1 s'adresse aux cas de manquements, actuels ou anticipés, aux conditions énoncées dans une ordonnance de surveillance de longue durée ou aux situations où il est nécessaire d'intervenir pour protéger la société. L'internement à résidence (commitment to a community-based residential facility) est l'aboutissement d'un processus de suspension de la surveillance, suivi d'une arrestation du délinquant. Ce processus peut aussi résulter, selon la gravité des manquements ou de la situation, en une ordonnance d'incarcération (commitment to custody) plutôt que d'internement à résidence.
[55]Après examen du dossier, au terme du paragraphe 135.1(6), la Commission peut annuler la suspension, avec reprise de la surveillance prolongée, avec ou sans nouvelles conditions. Elle peut plutôt opter pour le dépôt d'une dénonciation contre le délinquant lui reprochant une infraction selon l'article 753.3 [édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 4] du Code criminel [L.R.C. (1985), ch. C-46] (avoir fait défaut de se conformer à une ordonnance) si elle estime qu'aucun programme de surveillance ne peut adéquatement protéger la société et que les conditions de la surveillance n'ont pas été respectées.
[56]Ce que l'article 135.1 confère, c'est un pouvoir d'internement dans une résidence et non un pouvoir d'assignation à un tel lieu. Le premier, c'est-à-dire le pouvoir d'internement, s'avère une sanction du comportement du délinquant à contrôler alors que le second, soit l'assignation à résidence, réfère à une condition de sa surveillance de longue durée ou, dans le cas d'un délinquant en libération d'office (statutory release), à une condition de cette libération (voir le paragraphe 133(4.1)). Le premier s'exprime et s'exerce par mandat, le second simplement par un énoncé ou une stipulation dans les mesures de surveillance.
[57]Le législateur a pris soin d'utiliser une terminologie différente pour bien marquer la différence entre les deux concepts. Le paragraphe 133(4.1) énonce dans le cas d'un délinquant en libération d'office (statutory release) que l'autorité compétente «peut [. . .] ordonner que celui-ci demeure.» ("may . . . require that the offender reside"). Cette terminologie contraste avec celle de l'article 135.1(1) applicable au délinquant à contrôler où la Commission «peut, par mandat [. . .] ordonner l'internement de celui-ci [. . .] ou son incarcération» ("may, by warrant . . . authorize the commitment of the offender to a community-based residential facility or . . . to custody").
[58]La terminologie de l'article 135.1 de la Loi fournit également deux autres indicateurs quant à la nature différente du pouvoir exercé sous l'autorité de cette disposition.
[59]En premier lieu, le mandat d'internement à résidence d'un délinquant à contrôler peut être émis, entre autres personnes, par un membre de la Commission ou la personne que le président de la Commission ou un commissaire désigne nommément ou par indication de son poste. Il en va différemment du pouvoir d'assignation à résidence d'un tel délinquant comme condition de surveillance sous le paragraphe 134.1(2) où l'on peut voir que ce pouvoir appartient à la Commission. La délégation de pouvoir que comporte l'article 135.1 s'explique par l'urgence de l'intervention. Elle est, à toutes fins pratiques, identique à celle que l'on retrouve à l'article 135 de la Loi et qui, de façon parallèle à ce qui existe pour un délinquant à contrôler, vise par mandat, pour un délinquant en libération, la suspension de sa libération, son arrestation et son incarcération.
[60]En second lieu, l'internement à résidence par mandat est temporaire en ce qu'il n'a cours que jusqu'à ce qu'il soit disposé du cas par l'annulation de la suspension, l'imposition de nouvelles conditions de surveillance ou la mise en accusation du délinquant. De plus, cet internement ne peut, tout comme le mandat d'incarcération, excéder 90 jours au terme du paragraphe 135.1(2). Encore là, ces dispositions de l'article 135.1 reflètent l'urgence de la situation engendrée par l'inobservation des conditions énoncées dans l'ordonnance de surveillance de longue durée et la temporalité des mesures prises, qu'il s'agisse de l'internement ou de l'incarcération.
[61]À nouveau, le pouvoir d'application restreinte de l'article 135.1 s'oppose à celui beaucoup plus large de fixer des conditions de surveillance prévu au paragraphe 134.1(2). La durée de l'assignation à résidence en vertu du paragraphe 134.1(2) est fixée par la Commission et déterminée par la nécessité et la raisonnabilité d'imposer une telle condition. Ce paragraphe, je le rappelle, ne fixe pas de limite temporelle maximale pour l'assignation à résidence comme c'est le cas pour le mandat d'internement à résidence de l'article 135.1.
[62]Enfin, l'appelant soumet que le sous-alinéa 161(1)g)(i) du Règlement démontre par sa teneur que le délinquant à contrôler ne peut être astreint à demeurer dans une résidence. Ce sous-alinéa qui, par le jeu de l'article 134.1 s'applique, avec les adaptions nécessaires, au délinquant à contrôler prévoit que le délinquant, dès sa mise en liberté, doit communiquer à son surveillant l'adresse de sa résidence et l'informer sans délai de tout changement de résidence. Une telle obligation, selon l'appelant, n'a pas de sens pour le délinquant à contrôler assigné à une résidence puisqu'il ne peut changer de résidence. Conséquemment, le législateur n'envisageait pas l'assignation à résidence pour les délinquants à contrôler.
[63]La conclusion de l'appelant, à mon avis, n'est pas supportée par sa prémisse. Tout d'abord, le paragraphe 161(1) du Règlement doit s'appliquer en faisant les adaptations nécessaires. Ensuite, le sous-alinéa 161(1)g)(i) s'applique aussi au délinquant en libération par le renvoi du paragraphe 133(2) de la Loi. Or l'assignation à résidence de ce délinquant est expressément prévue par les paragraphes 133(4) et (4.1) de la Loi. Il n'y a donc aucun argument valable à tirer du sous-alinéa 161(1)g)(i) du Règlement qui permette de conclure que l'assignation à résidence n'est pas permise pour les délinquants à contrôler.
[64]En somme, la comparaison et l'analyse des textes applicables aux régimes distincts des délinquants à contrôler et des délinquants en libération n'appuient pas la prétention de l'appelant que le paragraphe 134.1(2) de la Loi ne permet pas à la Commission d'imposer, comme condition d'une surveillance de longue durée, une assignation à résidence.
3. Le droit de l'appelant de bénéficier de l'interpré-tation qui lui est favorable en cas d'ambiguïté et de choisir son lieu de résidence
[65]Comme j'en suis venu à la conclusion qu'il n'y a pas d'ambiguïté quant à l'interprétation du paragraphe 134.1(2), il n'est pas nécessaire de discuter plus à fond la revendication de l'appelant à ce titre.
[66]Quant à son droit de choisir le lieu de sa résidence, l'appelant demeure soumis au pouvoir d'assignation à résidence et aux autres conditions que sa période de surveillance peut nécessiter. De plus, il ne faut pas perdre de vue que l'appelant est toujours sous sentence judiciaire et que le volet «surveillance de longue durée» de cette sentence le soumet à des conditions qui légalement restreignent sa liberté au nom de la protection du public. Quoiqu'il en soit, je ne crois pas que, dans ces conditions et tant que dure la période de surveillance, la Charte lui garantisse le droit absolu et incontrôlé de résider là où il le désire, particulière-ment à proximité de ses victimes.
[67]Je suis redevable aux procureurs des deux parties pour leur maîtrise des questions en litige et le traitement qu'ils en ont fait lors des plaidoiries.
[68]Pour les motifs exprimés, je rejetterais l'appel mais sans frais dans les circonstances puisqu'il vise à faire déterminer, pour le futur, une question d'importance pour les délinquants à contrôler, la Commission et les autorités pénitentiaires.
Le juge Décary, J.C.A.: Je suis d'accord.
Le juge Pelletier, J.C.A.: Je suis d'accord.
ANNEXE
DROIT APPLICABLE
Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46 [art. 753.1 (édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 4; 2002, ch. 13, art. 76), 753.2 (édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 4), 753.3 (édicté, idem)]:
753.1 (1) Sur demande faite, en vertu de la présente partie, postérieurement au dépôt du rapport d'évaluation visé au paragraphe 752.1(2), le tribunal peut déclarer que le délinquant est un délinquant à contrôler, s'il est convaincu que les conditions suivantes sont réunies:
a) il y a lieu d'imposer au délinquant une peine minimale d'emprisonnement de deux ans pour l'infraction dont il a été déclaré coupable;
b) celui-ci présente un risque élevé de récidive;
c) il existe une possibilité réelle que ce risque puisse être maîtrisé au sein de la collectivité.
(2) Le tribunal est convaincu que le délinquant présente un risque élevé de récidive si:
a) d'une part, celui-ci a été déclaré coupable d'une infraction visée aux articles 151 (contacts sexuels), 152 (incitation à des contacts sexuels) ou 153 (exploitation sexuelle), aux paragraphes 163.1(2) (production de porno-graphie juvénile), 163.1(3) (distribution de pornographie juvénile), 163.1(4) (possession de pornographie juvénile) ou 163.1(4.1) (accès à la pornographie juvénile), à l'article 172.1 (leurre), au paragraphe 173(2) (exhibitionnisme) ou aux articles 271 (agression sexuelle), 272 (agression sexuelle armée) ou 273 (agression sexuelle grave), ou a commis un acte grave de nature sexuelle lors de la perpétration d'une autre infraction dont il a été déclaré coupable;
b) d'autre part:
(i) soit le délinquant a accompli des actes répétitifs, notamment celui qui est à l'origine de l'infraction dont il a été déclaré coupable, qui permettent de croire qu'il causera vraisemblablement la mort de quelque autre personne ou causera des sévices ou des dommages psychologiques graves à d'autres personnes,
(ii) soit sa conduite antérieure dans le domaine sexuel, y compris lors de la perpétration de l'infraction dont il a été déclaré coupable, laisse prévoir que vraisemblable-ment il causera à l'avenir de ce fait des sévices ou autres maux à d'autres personnes.
(3) Sous réserve des paragraphes (3.1), (4) et (5), s'il déclare que le délinquant est un délinquant à contrôler, le tribunal lui impose une peine minimale d'emprisonnement de deux ans pour l'infraction dont il a été déclaré coupable, et ordonne qu'il soit soumis, pour une période maximale de dix ans, à une surveillance au sein de la collectivité en conformité avec l'article 753.2 et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
(3.1) Le tribunal ne peut toutefois imposer la peine visée au paragraphe (3), au délinquant qu'il déclare délinquant à contrôler--et la peine qui a été imposée à celui-ci pour l'infraction dont il a été déclaré coupable demeure--si la demande a été:
a) d'une part, présentée après que le délinquant a commencé à purger sa peine dans les cas où les conditions visées aux alinéas 753(2)a) et b) sont réunies;
b) d'autre part, considérée comme une demande présentée en vertu du présent article à la suite de la décision du tribunal de la considérer comme telle au titre de l'alinéa 753(5)a).
(4) Le tribunal ne rend pas l'ordonnance de surveillance prévue au paragraphe (3) si le délinquant est condamné à l'emprisonnement à perpétuité.
(5) Si le délinquant commet une autre infraction alors qu'il est soumis à une ordonnance de surveillance aux termes du paragraphe (3) et, de ce fait, est de nouveau déclaré délinquant à contrôler, la durée maximale de la surveillance à laquelle il est soumis à tout moment en vertu de différentes ordonnances est de dix ans.
(6) S'il ne déclare pas que le délinquant est un délinquant à contrôler, le tribunal lui impose une peine pour l'infraction dont il a été déclaré coupable.
753.2 (1) Sous réserve du paragraphe (2), le délinquant soumis à une ordonnance de surveillance aux termes du paragraphe 753.1(3) est surveillé au sein de la collectivité en conformité avec la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition lorsqu'il a terminé de purger:
a) d'une part, la peine imposée pour l'infraction dont il a été déclaré coupable;
b) d'autre part, toutes autres peines d'emprisonnement imposées pour des infractions dont il est déclaré coupable avant ou après la déclaration de culpabilité pour l'infraction visée à l'alinéa a).
(2) Toute peine--autre que carcérale--imposée au délinquant visé au paragraphe (1) est purgée concurremment avec la surveillance ordonnée en vertu du paragraphe 753.1(3).
(3) Le délinquant soumis à une ordonnance de surveillance peut--tout comme un membre de la Commission nationale des libérations conditionnelles ou, avec l'approbation de celle-ci, son surveillant de liberté conditionnelle au sens du paragraphe 134.2(2) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition--demander à la cour supérieure de juridiction criminelle de réduire la période de surveillance ou d'y mettre fin pour le motif qu'il ne présente plus un risque élevé de récidive et, de ce fait, n'est plus une menace pour la collectivité, le fardeau de la preuve incombant au demandeur.
(4) La personne qui fait la demande au titre du paragraphe (3) en avise le procureur général lors de sa présentation.
753.3 (1) Le délinquant qui, sans excuse raisonnable, omet ou refuse de se conformer à l'ordonnance de surveillance à laquelle il est soumis aux termes du paragraphe 753.1(3) est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de dix ans.
(2) Un accusé qui est inculpé d'une infraction aux termes du paragraphe (1) peut être jugé et condamné par tout tribunal ayant juridiction pour juger cette infraction au lieu où l'infraction est présumée avoir été commise, ou au lieu où l'accusé est trouvé, est arrêté ou est sous garde, mais si le lieu où l'accusé est trouvé, est arrêté ou est sous garde est à l'extérieur de la province où l'infraction est présumée avoir été commise, aucune poursuite concernant cette infraction ne devra être engagée en ce lieu sans le consentement du procureur général de cette province.
Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 [art. 99 (mod. par L.C. 2002, ch. 1, art. 173), 102 (mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 27(F)), 134.2 (édicté par L.C. 1997, ch. 17, art. 30), 135 (mod. par L.C. 1995, ch. 22, art. 18; ch. 42, art. 50, 69(A), 70(A); 1997, ch. 17, art. 32(F), 32.1)]:
PARTIE II
MISE EN LIBERTÉ SOUS CONDITION, MAINTIEN EN INCARCÉRATION ET SURVEILLANCE DE LONGUE DURÉE
Définitions
99. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie.
[. . .]
«délinquant»
a) Individu condamné--autre qu'un adolescent au sens de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents --, avant ou après l'entrée en vigueur du présent article, à une peine d'emprisonnement:
(i) soit en application d'une loi fédérale ou d'une loi provinciale dans la mesure applicable aux termes de la présente partie,
(ii) soit à titre de sanction d'un outrage au tribunal en matière civile ou pénale lorsque le délinquant n'est pas requis par une condition de sa sentence de retourner devant ce tribunal;
b) adolescent, au sens de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, qui a fait l'objet d'une ordonnance, d'une détention ou d'un ordre visés aux articles 76, 89, 92 ou 93 de cette loi.
La présente définition ne vise toutefois pas la personne qui, en application de l'article 732 du Code criminel, purge une peine de façon discontinue
[. . .]
99.1 La personne soumise à une ordonnance de surveillance de longue durée est assimilée à un délinquant pour l'application de la présente partie; les articles 100, 101, 109 à 111 et 140 à 145 s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, à cette personne et à la surveillance de celle-ci.
[. . .]
Objet et principes
100. La mise en liberté sous condition vise à contribuer au maintien d'une société juste, paisible et sûre en favorisant, par la prise de décisions appropriées quant au moment et aux conditions de leur mise en liberté, la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants en tant que citoyens respectueux des lois.
101. La Commission et les commissions provinciales sont guidées dans l'exécution de leur mandat par les principes qui suivent:
a) la protection de la société est le critère déterminant dans tous les cas;
b) elles doivent tenir compte de toute l'information pertinente disponible, notamment les motifs et les recommandations du juge qui a infligé la peine, les renseignements disponibles lors du procès ou de la détermination de la peine, ceux qui ont été obtenus des victimes et des délinquants, ainsi que les renseignements et évaluations fournis par les autorités correctionnelles;
c) elles accroissent leur efficacité et leur transparence par l'échange de renseignements utiles au moment opportun avec les autres éléments du système de justice pénale d'une part, et par la communication de leurs directives d'orientation générale et programmes tant aux délinquants et aux victimes qu'au public, d'autre part;
d) le règlement des cas doit, compte tenu de la protection de la société, être le moins restrictif possible;
e) elles s'inspirent des directives d'orientation générale qui leur sont remises et leurs membres doivent recevoir la formation nécessaire à la mise en oeuvre de ces directives;
f) de manière à assurer l'équité et la clarté du processus, les autorités doivent donner aux délinquants les motifs des décisions, ainsi que tous autres renseignements pertinents, et la possibilité de les faire réviser.
102. La Commission et les commissions provinciales peuvent autoriser la libération conditionnelle si elles sont d'avis qu'une récidive du délinquant avant l'expiration légale de la peine qu'il purge ne présentera pas un risque inacceptable pour la société et que cette libération contribuera à la protection de celle-ci en favorisant sa réinsertion sociale en tant que citoyen respectueux des lois.
[. . .]
Conditions de la mise en liberté
133. (1) Au présent article, «autorité compétente» s'entend:
a) de la Commission à l'égard de la libération conditionnelle ou d'office ou d'une permission de sortir sans escorte visée au paragraphe 116(1);
b) du commissaire à l'égard d'une permission de sortir sans escorte visée au paragraphe 116(2);
c) du directeur du pénitencier à l'égard d'une permission de sortir sans escorte visée au paragraphe 116(2).
(2) Sous réserve du paragraphe (6), les conditions prévues par règlement sont réputées avoir été imposées dans tous les cas de libération conditionnelle ou d'office ou de permission de sortir sans escorte.
(3) L'autorité compétente peut imposer au délinquant qui bénéficie d'une libération conditionnelle ou d'office ou d'une permission de sortir sans escorte les conditions qu'elle juge raisonnables et nécessaires pour protéger la société et favoriser la réinsertion sociale du délinquant.
(4) Si elle estime que les circonstances le justifient, l'autorité compétente peut ordonner que le délinquant, à titre de condition de sa libération conditionnelle ou d'une permission de sortir sans escorte, demeure dans un établissement résidentiel communautaire.
(4.1) L'autorité compétente peut, pour faciliter la réinsertion sociale du délinquant, ordonner que celui-ci, à titre de condition de sa libération d'office, demeure dans un établissement résidentiel communautaire ou un établissement psychiatrique si elle est convaincue qu'à défaut de cette condition la commission par le délinquant d'une infraction visée à l'annexe I avant l'expiration légale de sa peine présentera un risque inacceptable pour la société.
(4.2) Pour l'application du paragraphe (4.1), un établissement résidentiel communautaire s'entend notamment d'un centre correctionnel communautaire, à l'exception cependant de tout autre pénitencier.
(4.3) Il n'est pas nécessaire, pour l'application du paragraphe (4.1), que l'autorité compétente précise laquelle des infractions visées à l'annexe I commettra vraisemblablement le délinquant.
(4.4) Toute assignation à résidence dans un centre correctionnel communautaire ordonnée par l'autorité compétente est subordonnée, pour devenir opérante, au consentement écrit du commissaire ou de la personne qu'il désigne nommément ou par indication de son poste.
(5) Les conditions particulières imposées par l'autorité compétente sont valables pendant la période qu'elle fixe.
(6) L'autorité compétente peut, conformément aux règlements, soustraire le délinquant, avant ou après sa mise en liberté, à l'application de l'une ou l'autre des conditions du présent article, modifier ou annuler l'une de celles-ci.
134. (1) Le délinquant qui bénéficie d'une libération conditionnelle ou d'office ou d'une permission de sortir sans escorte doit observer les consignes que lui donne son surveillant de liberté conditionnelle, un membre de la Commission, le directeur du pénitencier ou la personne que le président ou le commissaire désigne nommément ou par indication de son poste en vue de prévenir la violation des conditions imposées ou de protéger la société.
(2) Au présent article, «surveillant de liberté conditionnelle» s'entend d'un agent au sens du paragraphe 2(1) ou d'une personne chargée par le Service d'orienter et de surveiller le délinquant qui bénéficie d'une libération conditionnelle ou d'office ou d'une permission de sortir sans escorte.
Conditions de la surveillance de longue durée
134.1 (1) Sous réserve du paragraphe (4), les conditions prévues par le paragraphe 161(1) du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, au délinquant surveillé aux termes d'une ordonnance de surveillance de longue durée.
(2) La Commission peut imposer au délinquant les conditions de surveillance qu'elle juge raisonnables et nécessaires pour protéger la société et favoriser la réinsertion sociale du délinquant.
(3) Les conditions imposées par la Commission en vertu du paragraphe (2) sont valables pendant la période qu'elle fixe.
(4) La Commission peut, conformément aux règlements, soustraire le délinquant, au cours de la période de surveillance, à l'application de l'une ou l'autre des conditions visées au paragraphe (1), ou modifier ou annuler l'une de celles visées au paragraphe (2).
134.2 (1) Le délinquant qui est surveillé aux termes d'une ordonnance de surveillance de longue durée doit observer les consignes que lui donne son surveillant de liberté conditionnelle, un membre de la Commission ou la personne que le président ou le commissaire désigne nommément ou par indication de son poste en vue de prévenir la violation des conditions imposées ou de protéger la société.
(2) Au présent article, «surveillant de liberté conditionnelle» s'entend d'un agent au sens du paragraphe 2(1) ou d'une personne chargée par le Service d'orienter et de surveiller le délinquant soumis à une ordonnance de surveillance de longue durée.
Suspension, cessation, révocation et ineffectivité de la libération conditionnelle ou d'office ou de la surveillance de longue durée
135. (1) En cas d'inobservation des conditions de la libération conditionnelle ou d'office ou lorsqu'il est convaincu qu'il est raisonnable et nécessaire de prendre cette mesure pour empêcher la violation de ces conditions ou pour protéger la société, un membre de la Commission ou la personne que le président ou le commissaire désigne nommément ou par indication de son poste peut, par mandat:
a) suspendre la libération conditionnelle ou d'office;
b) autoriser l'arrestation du délinquant;
c) ordonner la réincarcération du délinquant jusqu'à ce que la suspension soit annulée ou que la libération soit révoquée ou qu'il y soit mis fin, ou encore jusqu'à l'expiration légale de la peine.
(2) La personne désignée en vertu du paragraphe (1) peut, par mandat, ordonner le transfèrement dans un pénitencier du délinquant réincarcéré, aux termes de l'alinéa (1)c), ailleurs que dans un pénitencier.
(3) La personne qui a signé le mandat visé au paragraphe (1), ou toute autre personne désignée en vertu de ce paragraphe, doit, dès que le délinquant mentionné dans le mandat est réincarcéré, examiner son cas et:
a) dans le cas d'un délinquant qui purge une peine d'emprisonnement de moins de deux ans, dans les quatorze jours qui suivent si la Commission ne décide pas d'un délai plus court, annuler la suspension ou renvoyer le dossier devant la Commission, le renvoi étant accompagné d'une évaluation du cas;
b) dans les autres cas, dans les trente jours qui suivent, si la Commission ne décide pas d'un délai plus court, annuler la suspension ou renvoyer le dossier devant la Commission, le renvoi étant accompagné d'une évaluation du cas et, s'il y a lieu, d'une liste des conditions qui, à son avis, permettraient au délinquant de bénéficier de nouveau de la libération conditionnelle ou d'office.
(4) Une fois saisie du dossier d'un délinquant qui purge une peine de moins de deux ans, la Commission examine le cas et, dans le délai réglementaire, soit annule la suspension, soit révoque la libération ou y met fin.
(5) Une fois saisie du dossier d'un délinquant qui purge une peine de deux ans ou plus, la Commission examine le cas et, dans le délai réglementaire, à moins d'accorder un ajournement à la demande du délinquant:
a) soit annule la suspension si elle est d'avis, compte tenu de la conduite du délinquant depuis sa libération conditionnelle ou d'office, qu'une récidive du délinquant avant l'expiration légale de la peine qu'il purge ne présentera pas un risque inacceptable pour la société;
b) soit, si elle n'a pas cette conviction, met fin à la libération si celle-ci a été suspendue pour des raisons qui ne sont pas imputables au délinquant ou la révoque, dans le cas contraire;
c) soit révoque la libération ou y met fin si le délinquant n'y est plus admissible ou n'y a plus droit.
(6) Dans le cas où elle annule une suspension, la Commission peut, si elle l'estime nécessaire et raisonnable afin de protéger la société ou de favoriser la réinsertion sociale du délinquant:
a) l'avertir qu'elle n'est pas satisfaite de son comportement depuis sa libération;
b) modifier les conditions de la libération;
c) ordonner que l'annulation n'entre en vigueur qu'à l'expiration du délai maximal de trente jours qu'elle fixe à compter de la date de la décision, si la violation des conditions de la libération qui a donné lieu à la suspension constituait au moins la seconde violation entraînant une suspension au cours de la peine que purge le délinquant.
(6.1) La personne visée au paragraphe (3) ou la Commission, selon le cas, notifie l'annulation de la suspension, ou transmet électroniquement une copie de la notification, au responsable du lieu où le délinquant est sous garde.
(7) En outre, la Commission peut, à tout moment lorsqu'elle est convaincue qu'une récidive--avant l'expiration légale de la peine--durant la libération conditionnelle ou d'office du délinquant présentera un risque inacceptable pour la société:
a) révoquer ou mettre fin à cette libération si le délinquant n'y est plus admissible ou n'y a plus droit;
b) s'il y est admissible ou y a droit, mettre fin à la libération lorsque le risque pour la société dépend de facteurs qui ne sont pas imputables au délinquant ou la révoquer, dans le cas contraire.
(8) La Commission dispose des pouvoirs que lui confère le paragraphe (7) même si le délinquant bénéficie d'une libération conditionnelle ou d'office et est condamné à une autre peine d'emprisonnement pour une infraction commise avant ou après cette mise en liberté.
(9) En cas de révision d'une décision rendue en vertu du paragraphe (7), la Commission doit, au cours de la période prévue par règlement, confirmer ou annuler celle-ci.
(9.1) Lorsque la libération conditionnelle ou d'office d'un délinquant n'a pas été révoquée ou qu'il n'y a pas été mis fin et que celui-ci est réincarcéré pour une peine d'emprisonnement supplémentaire pour une infraction à une loi fédérale, sa libération conditionnelle ou d'office est révoquée à la date de cette nouvelle incarcération.
(9.2) Le paragraphe (9.1) ne s'applique pas si la peine supplémentaire n'est pas à purger à la suite de la peine en cours et se rapporte à une infraction commise avant le début de l'exécution de cette dernière.
(9.3) Lorsqu'un délinquant en liberté conditionnelle est condamné au type de peine supplémentaire visé au paragraphe (9.2) et que la date d'admissibilité à la libération conditionnelle déterminée conformément aux articles 119, 120 ou 120.2 est postérieure à celle de la condamnation à la peine supplémentaire, la libération conditionnelle devient ineffective et le délinquant est réincarcéré.
(9.4) Sauf déclaration contraire, au titre du paragraphe 113(1), du lieutenant-gouverneur en conseil d'une province où a été instituée une commission provinciale, le paragraphe (9.1) ne s'applique pas aux délinquants qui relèvent de cette dernière, à l'exception de ceux qui:
a) soit purgent une peine d'emprisonnement dans un établissement correctionnel de la province en vertu d'un accord visé au paragraphe 16(1);
b) soit, en raison de leur condamnation à une peine supplémentaire du type visé au paragraphe (9.1), sont tenus, aux termes de l'article 743.1 du Code criminel, de purger leur peine dans un pénitencier.
(9.5) Lorsque la libération conditionnelle d'un délinquant auquel le paragraphe (9.1) ne s'applique pas n'a pas été révoquée ou qu'il n'y a pas été mis fin et que le délinquant est condamné à une peine d'emprisonnement--à purger à la suite de la peine en cours--pour une infraction à une loi fédérale, la libération conditionnelle devient ineffective et le délinquant est réincarcéré pour une période, déterminée à compter de la date de la condamnation, égale au temps d'épreuve sur la peine supplémentaire. Le délinquant, à l'expiration de cette période et sous réserve de la présente loi, est remis en liberté conditionnelle, à moins que celle-ci ait été révoquée ou qu'il y ait été mis fin.
(10) Pour l'application de la présente partie, le délinquant qui est réincarcéré est réputé purger sa peine.
(11) En cas d'annulation de la suspension de la libération conditionnelle ou d'office, le délinquant est réputé, pour l'application de la présente loi, avoir purgé sa peine pendant la période commençant à la date de la suspension et se terminant à la date de l'annulation.
135.1 (1) En cas d'inobservation soit des conditions énoncées dans l'ordonnance de surveillance de longue durée, soit des conditions visées à l'article 134.1, ou lorsqu'il est convaincu qu'il est raisonnable et nécessaire de prendre cette mesure pour empêcher la violation de ces conditions ou pour protéger la société, un membre de la Commission ou la personne que le président ou le commissaire désigne nommément ou par indication de son poste peut, par mandat:
a) suspendre la surveillance;
b) autoriser l'arrestation du délinquant;
c) ordonner l'internement de celui-ci dans un établissement résidentiel communautaire ou un établissement psychiatrique, ou son incarcération si elle est jugée nécessaire, jusqu'à ce que la suspension soit annulée, que de nouvelles conditions pour la surveillance soient fixées ou que le délinquant soit accusé de l'infraction visée à l'article 753.3 du Code criminel.
(2) La période maximale de l'internement ou de l'incarcération visés à l'alinéa (1)c) est de quatre-vingt-dix jours.
(3) Si un délinquant fait l'objet d'un internement ou d'une incarcération aux termes de l'alinéa (1)c), la période d'internement ou d'incarcération est comprise dans la période de surveillance prévue dans l'ordonnance de surveillance de longue durée à l'exclusion, le cas échéant, du délai écoulé entre la délivrance du mandat et l'incarcération ou l'internement.
(4) La personne désignée en vertu du paragraphe (1) peut, par mandat, ordonner le transfèrement dans un pénitencier du délinquant qui fait l'objet d'un internement aux termes de l'alinéa (1)c).
(5) La personne qui a signé le mandat visé au paragraphe (1), ou toute autre personne désignée en vertu de ce paragraphe doit, dès l'internement ou l'incarcération du délinquant mentionné dans le mandat, examiner son cas et, dans les meilleurs délais mais au plus tard dans les trente jours qui suivent, annuler la suspension ou renvoyer le dossier devant la Commission, le renvoi étant accompagné d'une évaluation du cas.
(6) Une fois saisie du dossier, la Commission examine le cas et, dans les soixante jours suivant la date du renvoi:
a) soit annule la suspension si elle est d'avis, compte tenu de la conduite du délinquant durant la période de surveillance, que le risque de récidive avant l'expiration de cette période--s'il est soumis aux mêmes conditions de surveillance--n'est pas élevé;
b) soit, si elle n'a pas cette conviction, met fin à la suspension et ordonne la reprise de la surveillance aux conditions que la Commission juge nécessaires pour protéger la société;
c) soit, si elle est d'avis qu'aucun programme de surveillance ne peut adéquatement protéger la société contre le risque de récidive et que, selon toute apparence, les conditions de la surveillance n'ont pas été observées, recommande le dépôt d'une dénonciation imputant au délinquant l'infraction visée à l'article 753.3 du Code criminel.
(7) Si la Commission recommande le dépôt d'une dénonciation, le Service recommande au procureur général du lieu où l'inobservation des conditions de surveillance a été constatée le dépôt d'une dénonciation imputant au délinquant l'infraction visée à l'article 753.3 du Code criminel.
(8) Dans le cas où elle annule la suspension d'une ordonnance de surveillance, la Commission peut, si elle l'estime nécessaire et raisonnable afin de protéger la société ou de favoriser la réinsertion sociale du délinquant:
a) avertir celui-ci qu'elle n'est pas satisfaite de son comportement pendant la période de surveillance;
b) modifier les conditions de la surveillance;
c) ordonner que l'annulation n'entre en vigueur qu'à l'expiration d'un délai qui se termine au plus tard à la fin des quatre-vingt-dix jours visés au paragraphe (2), pour permettre au délinquant de participer à un programme visant à assurer une meilleure protection de la société contre le risque de récidive du délinquant.
(9) La personne visée au paragraphe (4) ou la Commission, selon le cas, notifie l'annulation de la suspension, ou transmet électroniquement une copie de la notification, au responsable du lieu où le délinquant est sous garde. [Je souligne.]
Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620
PARTIE II
MISE EN LIBERTÉ SOUS CONDITION
[. . .]
Conditions de mise en liberté
161. (1) Pour l'application du paragraphe 133(2) de la Loi, les conditions de mise en liberté qui sont réputées avoir été imposées au délinquant dans tous les cas de libération conditionnelle ou d'office sont les suivantes:
a) dès sa mise en liberté, le délinquant doit se rendre directement à sa résidence, dont l'adresse est indiquée sur son certificat de mise en liberté, se présenter immédiatement à son surveillant de liberté conditionnelle et se présenter ensuite à lui selon les directives de celui-ci;
b) il doit rester à tout moment au Canada, dans les limites territoriales spécifiées par son surveillant;
c) il doit respecter la loi et ne pas troubler l'ordre public;
d) il doit informer immédiatement son surveillant en cas d'arrestation ou d'interrogatoire par la police;
e) il doit porter sur lui à tout moment le certificat de mise en liberté et la carte d'identité que lui a remis l'autorité compétente et les présenter à tout agent de la paix ou surveillant de liberté conditionnelle qui lui en fait la demande à des fins d'identification;
f) le cas échéant, il doit se présenter à la police, à la demande de son surveillant et selon ses directives;
g) dès sa mise en liberté, il doit communiquer à son surveillant l'adresse de sa résidence, de même que l'informer sans délai de:
(i) tout changement de résidence,
(ii) tout changement d'occupation habituelle, notamment un changement d'emploi rémunéré ou bénévole ou un changement de cours de formation,
(iii) tout changement dans sa situation domestique ou financière et, sur demande de son surveillant, tout changement dont il est au courant concernant sa famille,
(iv) tout changement qui, selon ce qui peut être raisonnablement prévu, pourrait affecter sa capacité de respecter les conditions de sa libération conditionnelle ou d'office;
h) il ne doit pas être en possession d'arme, au sens de l'article 2 du Code criminel, ni en avoir le contrôle ou la propriété, sauf avec l'autorisation de son surveillant;
i) s'il est en semi-liberté, il doit, dès la fin de sa période de semi-liberté, réintégrer le pénitencier d'où il a été mis en liberté à l'heure et à la date inscrites à son certificat de mise en liberté.
(2) Pour l'application du paragraphe 133(2) de la Loi, les conditions de mise en liberté qui sont réputées avoir été imposées au délinquant dans tous les cas de permission de sortir sans surveillance sont les suivantes:
a) dès sa mise en liberté, le délinquant doit se rendre directement au lieu indiqué sur son permis de sortie, se présenter à son surveillant de liberté conditionnelle selon les directives de l'autorité compétente et suivre le plan de sortie approuvé par elle;
b) il doit rester au Canada, dans les limites territoriales spécifiées par son surveillant pendant toute la durée de la sortie;
c) il doit respecter la loi et ne pas troubler l'ordre public;
d) il doit informer immédiatement son surveillant en cas d'arrestation ou d'interrogatoire par la police;
e) il doit porter sur lui à tout moment le permis de sortie et la carte d'identité que lui a remis l'autorité compétente et les présenter à tout agent de la paix ou surveillant de liberté conditionnelle qui lui en fait la demande à des fins d'identification;
f) le cas échéant, il doit se présenter à la police, à la demande de l'autorité compétente et selon ses directives;
g) il doit réintégrer le pénitencier d'où il a été mis en liberté à l'heure et à la date inscrites à ce permis;
h) il ne doit pas être en possession d'arme, au sens de l'article 2 du Code criminel, ni en avoir le contrôle ou la propriété, sauf avec l'autorisation de son surveillant. [Je souligne.]