T-1730-03
2004 CF 679
Carmel Raîche, Ian Oliver, l'Association des municipalités du Nouveau-Brunswick Inc., la Commission régionale de l'aéroport de Bathurst Inc., la Chambre de commerce du grand Bathurst et la Ville de Bathurst (demandeurs)
c.
Procureur général du Canada (défendeur)
et
Commissaire aux langues officielles du Canada (intervenante)
Répertorié: Raîche c. Canada (Procureur général) (C.F.)
Cour fédérale, juge Shore--Fredericton, 3 et 4 mai; Ottawa, 11 mai 2004.
Droit constitutionnel -- Charte des droits -- Droits démocratiques -- Contrôle judiciaire d'une proclamation royale transférant certaines paroisses du Nouveau-Brunswick à différentes circonscriptions électorales -- La Proclamation portait-elle atteinte à l'art. 3 de la Charte, et, dans l'affirmative, était-elle sauvegardée par l'article premier de la Charte? -- Le droit de vote vise une représentation effective, pas seulement la parité du pouvoir électoral -- Facteurs dont on doit tenir compte -- Il n'y a violation de la Charte que dans les cas où des personnes raisonnables, appliquant les principes appropriés, n'auraient pas pu tracer les limites existantes des circonscriptions -- Examen d'affidavits de citoyens, d'affidavits contradictoires de professeurs de sciences politiques -- Importance de la capacité du député à communiquer en français -- Le rapport de l'expert du procureur général a été critiqué parce qu'il ne tenait pas compte des principes juridiques de l'art. 3 de la Charte -- Les craintes d'une minorité de ne pas être adéquatement représentée n'étaient pas sans fondement -- La région est unique car elle possède la plus grande concentration d'Acadiens au Canada -- Le critère primordial étant l'égalité des suffrages, l'art. 3 n'a pas été enfreint -- Mais, s'il a été enfreint, la violation n'est pas sauvegardée par l'article premier.
Élections -- Contrôle judiciaire d'une proclamation royale transférant certaines paroisses du Nouveau-Brunswick à différentes circonscriptions électorales -- Explication de l'administration de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales -- Motif du transfert contesté: corriger l'inégalité de quotient électoral entre circonscrip-tions voisines -- Le transfert nuirait au développement social et économique de la région -- Concepts de communauté d'intérêts, de spécificité -- Plaintes adressées à la commissaire aux langues officielles -- La Proclamation portait-t-elle atteinte à l'art. 15 de la Loi sur la révision? -- Norme de contrôle des décisions de la Commission -- La Loi permet à la Commission de déroger au principe de la parité électorale quand les circonstances le justifient -- La Commission a mal interprété la Loi en ne se demandant pas si la communauté d'intérêts justifiait une dérogation au principe que l'écart ne doit pas dépasser 10 p. 100 -- L'écart peut dépasser 25 p. 100 dans des circonstances extraordinaires -- La Commission n'a pas tenu compte de la preuve que la minorité acadienne à Miramichi n'avait pas de représentation -- La Cour ne croyait pas que le pouvoir politique d'une collectivité ne dépend seulement que de l'atteinte d'une masse critique -- La Cour a rejeté l'argument que la Loi sur la révision, qui est d'application spécifique, a préséance sur la Loi sur les langues officielles -- La Cour était habilitée à annuler la décision de la Commission mais non à rétablir la circonscription électorale Acadie-Bathurst telle qu'elle était avant car elle se trouverait à usurper le rôle du Parlement.
Langues officielles -- Contrôle judiciaire d'une proclamation concernant le transfert de certaines paroisses du Nouveau-Brunswick de la circonscription électorale d'Acadie-Bathurst à Miramichi -- La partie VII de la LLO a-t-elle été violée? -- L'article 41 de la LLO est-il applicable au rapport final de la Commission sur la révision? -- La Cour a rejeté la prétention que la Loi sur la révision, qui est d'application spécifique, a préséance sur la LLO qui est une loi d'application générale -- La partie VII de la LLO est déclaratoire plutôt qu'exécutoire et ni le gouvernement fédéral ni les institutions fédérales ne sont obligés de toujours y donner suite -- L'art. 42 n'est pas exécutoire.
Compétence de la Cour fédérale -- Contrôle judiciaire d'une proclamation transférant certaines paroisses du Nouveau-Brunswick à une circonscription électorale différente -- La Cour avait-elle compétence pour intervenir dans les décisions rendues sous le régime de la partie VII de la Loi sur les langues officielles? -- Examen de la jurisprudence contradictoire de la C.A.F. -- En vertu d'un principe fondamental de droit, la Cour peut faire respecter un droit qui existe -- La C.F. a compétence pour annuler la décision de la Commission mais non pour rétablir la circonscription électorale telle qu'elle était -- Agir ainsi équivaudrait à usurper le rôle du Parlement.
Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une proclamation royale par laquelle la paroisse d'Allardville et une partie des paroisses de Saumarez et de Bathurst au Nouveau-Brunswick ont été transférées de la circonscription électorale fédérale d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi.
Le nombre de circonscriptions électorales de chaque province, qui détermine la représentation de chacune à la Chambre des communes, et les limites des circonscriptions sont révisés après chaque recensement décennal dans le but de refléter les mouvements de la population conformément à la Loi constitutionnelle de 1867 et à la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales. Une commission non partisane et indépendante est établie pour étudier les limites actuelles des circonscriptions et y apporter les changements nécessaires. Elle propose un plan, accompagné de cartes géographiques, qui est publié dans les journaux. Après consultation des membres de la collectivité, un plan final de redécoupage est proposé. Le directeur général des élections présente ensuite le rapport de la Commission au président de la Chambre des communes et il prépare un projet de décret de représentation électorale. Une fois promulgué, le projet de décret entre en vigueur à la première dissolution du Parlement au moins un an après sa proclamation.
Le raisonnement qui sous-tend les transferts contestés était que si ces circonscriptions n'étaient pas redécoupées, la circonscription d'Acadie-Bathurst aurait un écart de presque +14 p. 100 par rapport au quotient électoral, alors que la circonscription voisine de Miramichi aurait un écart de -21 p. 100. Cependant, un certain nombre de personnes, qui se sont exprimées lors des audiences publiques, ont favorisé le maintien du statu quo en invoquant les notions de communauté d'intérêts et de spécificité. Elles ont soutenu qu'il est difficile d'imaginer une région qui soit plus linguistiquement homogène et culturellement distincte que celle d'Acadie- Bathurst. On a plaidé que les changements proposés nuiraient à la poursuite du développement social et économique du nord-est du Nouveau-Brunswick. Une pétition signée par 2 656 personnes a été présentée en faveur du statu quo.
Ce point de vue n'a pas été exprimé dans le rapport de la Commission qui a été présenté au comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et la commissaire aux langues officielles a reçu trois plaintes contre la Commission. La commissaire a jugé les plaintes recevables. L'enquête avait pour objectif d'évaluer dans quelle mesure la Commission avait tenu compte de l'article 41 de la Loi sur les Langues Officielles (LLO). L'engagement prévu à la partie VII de la LLO obligeait la Commission à évaluer les inconvénients et conséquences néfastes que la communauté minoritaire de langue officielle percevait, compte tenu des conséquences des changements apportés à la circonscription sur le développement et l'épanouissement de la communauté francophone. La commissaire n'a pas été convaincue que la Commission a satisfait aux responsabilités qui lui incombent en vertu de l'article 41 de la LLO. Le Comité permanent a affirmé que laisser les limites actuelles telles quelles et accepter un écart d'environ +14 p. 100 est à la fois permis et préférable, mais la Commission a finalement décidé «de réintégrer la paroisse de Saumarez et une partie de la paroisse d'Allardville, incluant Saint-Sauveur, à la circonscription d'Acadie-Bathurst. La paroisse de Bathurst et une partie de la paroisse d'Allardville resteront dans la circonscription de Miramichi».
Les questions en litige étaient les suivantes: 1) la Proclamation porte-t-elle atteinte à l'article 3 de la Charte? 2) s'il y a violation de la Charte, était-elle sauvegardée par l'article premier? 3) quelle est la norme de contrôle de la décision de la Commission? 4) la Proclamation contrevient-elle à l'article 15 de la Loi sur la révision? 5) la Proclamation contrevient-elle à la partie VII de la LLO? 6) quels sont les recours disponibles eu égard à la compétence de cette Cour?
Jugement: la Cour accueille la demande mais suspend la déclaration d'invalidité pour une période d'un an, pour permettre à l'autorité en question de donner effet au redressement accordé.
1) La Cour suprême du Canada a statué que l'objet du droit de vote garanti par l'article 3 de la Charte est d'assurer une représentation effective, et non seulement la parité du pouvoir électoral. La Cour a souligné que même à l'aide de recensements fréquents, il n'est pas possible de garantir exactement le même nombre d'électeurs dans chaque district. Des facteurs tels les caractéristiques géographiques, l'histoire et les intérêts de la collectivité et la représentation des groupes minoritaires doivent être pris en considération si l'on veut que les assemblées législatives représentent efficacement la diversité de la mosaïque sociale canadienne. Ne devraient être permis que des écarts qui se justifient parce qu'ils permettent de mieux gouverner l'ensemble de la population. La Cour suprême du Canada a aussi établi que l'on ne devrait conclure à une violation de l'article 3 de la Charte que dans les cas où «des personnes raisonnables, appliquant les principes appropriés, n'auraient pas pu tracer les limites existantes des circonscriptions». Alors que le principe de la parité du pouvoir électoral donne une importance particulière à l'individu, le principe de la communauté d'intérêts donne une importance au groupe. Comme trouver un équilibre entre les deux n'est pas une science exacte, les tribunaux devraient respecter les choix des commissions si leurs décisions sont défendables.
Les demandeurs ont déposé une preuve par affidavit de sept résidents de l'ancienne circonscription d'Acadie-Bathurst attestant qu'il y a de forts liens linguistiques, historiques, sociaux et administratifs dans cette circonscription et très peu de liens avec Miramichi. Ils ont aussi déposé l'affidavit d'un professeur en sciences politiques. Ce témoin expert a conclu dans son rapport que les paroisses d'Allardville et de Bathurst font partie d'une même communauté d'intérêts avec d'autres paroisses de l'ancienne circonscription d'Acadie-Bathurst. Le procureur général a déposé en preuve le témoignage d'un professeur en sciences politiques selon lequel les craintes des résidents en Acadie-Bathurst étaient sans fondement. Ils pourront toujours recevoir des services en français parce que le Canada et le Nouveau-Brunswick sont tous deux bilingues. Quelle importance que leur député ne sache pas parler français? La Cour a préféré la preuve des demandeurs. L'expert du défendeur n'a pas exprimé de désaccord avec les conclusions empiriques du témoin des demandeurs et le rapport de ce dernier peut être critiqué pour ne pas avoir tenu compte des principes juridiques de l'article 3 de la Charte. La Cour suprême a reconnu que les craintes d'une minorité de ne pas être adéquatement représentée par son député n'étaient pas sans fondement, puisque la réalité d'une démocratie est qu'un député, partagé entre les besoins de la majorité et ceux d'une minorité, choisira souvent de défendre les intérêts de la majorité. De même, le rapport de l'expert du procureur général était sujet à critiques, car il contenait beaucoup d'hypothèses et reposait en grande partie sur la spéculation. Enfin, ce témoin avait tendance à exagérer certains points tout en négligeant les faits qui vont à l'encontre de son hypothèse--particulièrement lorsqu'il parle de la communauté d'intérêts économiques.
Pendant les audiences de la Commission les gens ont expliqué que la région est unique parce qu'elle a la plus grande concentration d'Acadiens au Canada et ils ont rappelé aux membres de la Commission les torts historiques causés aux Acadiens. Bien que la Commission ait accepté qu'il y avait une communauté d'intérêts en Acadie-Bathurst, elle a décidé qu'un écart de -21 p. 100 était tout simplement trop grand. Le critère primordial pour décider si une population jouit d'une représentation effective étant l'égalité des suffrages, l'article 3 de la Charte n'a pas été violé.
2) Dans l'éventualité où cette conclusion serait erronée, la Cour a examiné si une violation pouvait être justifiée par l'article premier de la Charte. En vertu du critère de l'arrêt Oakes, la Cour doit pondérer les droits de l'individu et les besoins de la société. En l'espèce c'est le défendeur qui avait le fardeau de la preuve, mais le procureur général n'a rien avancé à ce sujet, et il n'a donc pas démontré que la violation était justifiée. Par conséquent, si la Charte a été violée, il n'y avait aucune justification en vertu de l'article premier de la Charte.
3) La question suivante était la norme de contrôle des décisions de la Commission quant à savoir si la Proclamation contrevenaient à l'article 15 de la Loi sur la révision. Cette Loi ne définit pas «communauté d'intérêts» mais elle accorde à la Commission le pouvoir discrétionnaire de déroger au principe de la parité électorale dans certaines circonstances. La position du procureur général exagérait le degré de discrétion accordé à la Commission. Bien que cette question soit une question mixte de fait et de droit, elle était plus de nature juridique parce qu'elle impliquait l'interprétation de l'article 15, ce qui réduisait la déférence que devait manifester la Cour. La norme de contrôle applicable en l'espèce était celle de la décision raisonnable.
4) Pour parvenir à cette décision, la Commission a cru important de maintenir un écart de moins de 10 p. 100. Elle a pensé soit qu'il y avait déjà une minorité acadienne suffisamment forte à Miramichi pour pouvoir donner une voix aux paroisses qui seront transférés d'Acadie-Bathurst, soit qu'en ajoutant des communautés acadiennes à Miramichi il y aura une minorité assez forte pour qu'elle puisse exiger du député qu'il représente ses intérêts. La Commission n'a pas interprété la Loi selon son esprit car elle n'a pas examiné s'il y avait des circonscriptions où, vu la communauté d'intérêts ou la géographie de la région, il serait souhaitable de déroger au principe général que l'écart ne devrait pas dépasser 10 p. 100. En vertu des alinéas 15(1)a) et b) de la Loi, les commissions sont obligées d'envisager une dérogation raisonnable du quotient électoral pour respecter une communauté d'intérêts, la spécificité d'une circonscription électorale d'une province, son évolution historique ou pour faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province ne soit pas trop vaste. Mais un écart de plus de 25 p. 100 peut être accepté dans des circonstances extraordinaires. La Commission a refusé de considérer si le paragraphe 15(2) (lequel ne permet un écart de plus de 25 p. 100 que dans des circonstances extraordinaires) était applicable à la circonscription d'Acadie-Bathurst. Les chiffres étaient la seule et unique raison pour ajouter des paroisses à Miramichi.
La Commission n'a pas non plus tenu compte des éléments dont elle disposait quand elle a décidé que les paroisses d'Allardville, de Saumarez et de Bathurst auraient une représentation effective lorsqu'elles feraient partie de la circonscription de Miramichi. La preuve démontrait que la minorité acadienne à Miramichi n'avait pas de représentation effective. Le député d'Acadie-Bathurst a témoigné que des francophones de Miramichi venaient le voir pour obtenir de l'aide, leur député étant un anglophone unilingue.
La conclusion que l'ajout de collectivités francophones à la communauté acadienne de Miramichi donnerait plus de poids à celle-ci est tout aussi problématique. En fait, après le transfert des paroisses, le pourcentage des francophones est passé de 34 p. 100 à 33 p. 100. La Cour ne croyait pas que le pouvoir politique d'une collectivité dépende de l'atteinte d'une masse critique. La Commission a commis une erreur en concluant qu'il y avait, ou pourrait y avoir, une communauté d'intérêts à Miramichi, et sa décision doit donc être annulée.
5) Le procureur général a soutenu que l'article 41 de la LLO n'était pas applicable au rapport final de la Commission parce que l'engagement énoncé à la partie VII visait uniquement le gouvernement fédéral et les commissions de délimitation des circonscriptions électorales ne font pas partie du gouvernement du Canada. La Cour était d'accord avec la commissaire aux langues officielles que la LLO vise expressément les institutions gouvernementales ainsi que le gouvernement fédéral. La Cour n'acceptait pas la prétention du défendeur que la Loi sur la révision, qui est d'application spécifique, a préséance sur la LLO, qui est une loi d'application générale. Il n'y avait pas d'incompatibilité entre les obligations imposées par les deux lois. La Cour a toutefois accepté la prétention du défendeur que la partie VII de la LLO est déclaratoire plutôt qu'exécutoire et que ni le gouvernement fédéral ni les institutions fédérales sont obligés de toujours y donner suite. Le fait que l'article 42 utilise le mot «shall» en parlant des obligations du gouvernement, mais n'utilise pas ce mot en décrivant le rôle des institutions gouvernementales alors que d'autres parties de la LLO utilisent des mots impératifs en décrivant le rôle des institutions gouvernemen-tales laisse entendre que l'article 42 est déclaratoire, et non pas exécutoire.
Une autre question était de savoir si la Cour a compétence pour contrôler les décisions rendues sous le régime de la partie VII de la LLO. Bien que la jurisprudence de la Cour d'appel fédérale soit contradictoire à ce sujet, l'arrêt Devinat c. Canada (Commission de l'immigration et du statut de réfugié) s'appliquait. Dans cet arrêt, la Cour d'appel a cité avec approbation le commentaire suivant tiré d'un jugement du Comité judiciaire du Conseil privé: «Si le droit existe, il faut présumer qu'il existe un tribunal qui peut le faire respecter». Puisqu'il s'agit d'un principe de droit fondamental, la Cour ne doit pas interpréter la loi de manière à conférer un droit mais à rejeter un recours, à moins que la loi exclue ce recours expressément. La LLO n'exclut pas expressément un recours et la Cour a compétence en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales.
Étant donné que la partie VII est déclaratoire, la Cour doit démontrer beaucoup de déférence envers la Commission. Mais, bien que la Commission ait essayé d'appliquer la partie VII de la LLO selon l'intention du législateur, elle n'a pas réussi à le faire parce que ses conclusions de fait étaient erronées.
6) La Cour n'avait pas la compétence nécessaire pour rétablir la circonscription d'Acadie-Bathurst telle qu'elle existait: elle peut annuler la décision de la Commission, mais ne peut pas la remplacer par sa propre décision. Il serait tout à fait inapproprié pour une cour d'usurper le rôle du Parlement en dictant les limites électorales d'une province. Bien qu'elle ait accueilli la demande de contrôle judiciaire, la Cour a laissé le soin à l'instance décisionnelle en question de décider par quel moyen elle doit donner effet au redressement accordé par la Cour. La déclaration d'invalidité a été suspendue pour une période d'un an afin que l'instance décisionnelle en question puisse trouver une façon de donner effet au redressement.
lois et règlements
Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 1, 3.
Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., ch. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5]. |
Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, L.R.C. (1985), ch. E-3, art. 15 (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 6, art. 2; L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 1, art. 45, ann. III, item 9(1); L.C. 1998, ch. 15, art. 25). |
Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14), 18.1 (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27). |
Loi sur les langues officielles, L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 31, art. 41, 42 (mod. par L.C. 1995, ch. 11, art. 27). |
Proclamation donnant force de loi au décret de représentation électorale à compter de la première dissolution du Parlement postérieure au 25 août 2004, TR/2003-154. |
jurisprudence
décision non suivie:
Ayangma c. Canada (2002), 221 F.T.R. 81 (C.F. 1re inst.); conf. par (2003), 303 N.R. 92 (C.A.F.); autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée [2003] C.S.C.R. no 146 (QL).
décisions appliquées:
Renvoi: Circ. électorales provinciales (Sask.), [1991] 2 R.C.S. 158; (1991), 81 D.L.R. (4th) 16; [1991] 5 W.W.R. 1; 127 N.R. 1; Figueroa c. Canada (Procureur général), [2003] 1 R.C.S. 912; (2003), 227 D.L.R. (4th) 1; 108 C.R.R. (2d) 66; 306 N.R. 70; 176 O.A.C. 89; La Reine c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103; (1986), 26 D.L.R. (4th) 200; 24 C.C.C. (3d) 321; 50 C.R. (3d) 1; 19 C.R.R. 308; 65 N.R. 87; 14 O.A.C. 335; Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226; (2003), 223 D.L.R. (4th) 599; [2003] 5 W.W.R. 1; 11 B.C.L.R. (4th) 1; 48 Admin. L.R. (3d) 1; 179 B.C.A.C. 170; 302 N.R. 34; Devinat c. Canada (Commission de l'immigration et du statut de réfugié), [2000] 2 C.F. 212; (1999), 181 D.L.R. (4th) 441; 18 Admin. L.R. (3d) 243; 31 Admin. L.R. (3d) 174; 3 Imm. L.R. (3d) 1; 250 N.R. 326 (C.A.).
décisions citées:
Lalonde c. Ontario (Commission de restructuration des services de santé) (2001), 56 O.R. (3d) 505 (angl.); 56 O.R. (3d) 577 (fr.); 208 D.L.R. (4th) 577; 38 Admin. L.R. (3d) 1; 89 C.R.R. (2d) 1; 153 O.A.C. 1 (C.A.); Canada (Commissaire aux langues officielles) c. Canada (Ministère de la Justice) (2001), 35 Admin. L.R. (3d) 46; 194 F.T.R. 181 (C.F. 1re inst.); Forum des maires de la Péninsule acadienne c. Canada (Agence d'inspection des aliments), [2004] 1 R.C.F. 136; (2003), 239 F.T.R. 178 (1re inst.).
Demande de contrôle judiciaire d'une proclamation royale concernant une révision des limites de circonscriptions électorales dans la province du Nouveau-Brunswick. Demande accueillie, déclaration d'invalidité suspendue pour un an.
ont comparu:
Michel Doucet pour les demandeurs.
Rosemarie Millar pour le défendeur.
Pascale Giguère pour l'intervenante.
avocats inscrits au dossier:
Patterson Palmer, Moncton, pour les demandeurs.
Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.
Commissariat aux langues officielles pour l'intervenante.
Voici les motifs de l'ordonnance et ordonnance rendus en français par
Le juge Shore:
INTRODUCTION
[1]La question à considérer est la suivante, d'où découle tous les autres propos de la matière: est-ce que la communauté d'intérêts, la spécificité d'une circonscription électorale d'une province, l'évolution historique, ainsi que les aspects géographiques ont été considérés en plus des chiffres selon les critères de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales1.
L'HISTORIQUE DE LA MATIÈRE
[2]Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une proclamation de Sa Majesté la Reine intitulée Proclamation donnant force de loi au décret de représentation électorale à compter de la première dissolution du Parlement postérieure au 25 août 2004 [TR/2003-154] où la paroisse d'Allardville et une partie des paroisses de Saumarez et de Bathurst ont été transférées de la circonscription électorale fédérale d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi.
[3]Les demandeurs demandent:
a) Qu'un bref de certiorari soit décerné annulant et infirmant la Proclamation en ce qui concerne le transfert des régions suivantes de la circonscription électorale fédérale d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi, au Nouveau-Brunswick:
La partie du comté de Gloucester constituée:
i) de la partie de la paroisse d'Allardville situé à l'ouest d'une ligne décrite comme suit: commençant à l'angle le plus au nord-ouest de la paroisse de Saumarez; de là vers le nord-ouest en ligne droite jusqu'à l'angle le plus au sud-ouest de la paroisse de New Bandon;
ii) de la partie de la paroisse de Bathurst située à l'ouest d'une ligne décrite comme suit: commençant à l'intersection de la limite nord de la paroisse d'Allardville avec la route No. 8; de là vers le nord suivant ladite route jusqu'à la limite sud de la cité de Bathurst;
À l'audition-même, les demandeurs ont demandé que le propos suivant concernant le bref de prohibition soit écarté: ((b) Qu'un bref de prohibition soit décerné à l'égard de la défenderesse afin qu'elle respecte la délimitation de la circonscription électorale d'Acadie-Bathurst telle qu'elle existait avant que la Commission ait été établie2.)
c) Les coûts et les déboursés; et
d) Toute autre ordonnance que cette honorable Cour estime juste.
FAITS
[4]Le nombre de circonscriptions fédérales de chaque province, qui détermine la représentation de chacune à la Chambre des communes, et les limites des circonscriptions sont révisés après chaque recensement décennal dans le but de refléter les changements et les mouvements de la population, en vertu de la Loi constitutionnelle de 18673 et de la Loi sur la révision.
[5]À cette fin, une commission non partisane et indépendante est établie pour étudier les limites actuelles des circonscriptions et y apporter les changements nécessaires. La Commission propose un plan de redécoupage des circonscriptions fédérales. Ce plan est publié dans des annonces de journaux accompagnées de cartes géographiques des délimitations proposées. Après la publication des propositions, la Commission consulte les collectivités touchées par les changements dans les circonscriptions. Après avoir consulté la collectivité, la Commission, prenant en considération les recommandations et craintes de la collectivité, propose un plan final de redécoupage des circonscriptions fédérales.
[6]Le directeur général des élections présente ensuite le rapport de la Commission au président de la Chambre des communes et établit un projet de décret de représentation électorale.
[7]Une fois complété, le projet de décret est promulgué, et entre en vigueur à la première dissolution du Parlement au moins un an après sa proclamation.
[8]Une Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales a été établie pour la province du Nouveau-Brunswick (la Commission) le 16 avril 2002, afin de proposer un plan de redécoupage des circonscriptions électorales fédérales.
[9]Le 9 mai 2002, la Commission a rédigé un premier rapport faisant état de ses propositions pour une nouvelle délimitation des circonscriptions électorales au Nouveau-Brunswick.
[10]Le 29 juin 2002, la Commission a publié ses propositions. Entre autres choses, elle a recommandé le transfert de la paroisse d'Allardville et d'une partie des paroisses de Saumarez et de Bathurst de la circonscription électorale fédérale d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi. Elle a fait cette recommandation parce que si ces circonscriptions n'étaient pas redécoupées, la circonscription d'Acadie-Bathurst aurait un écart de presque +14 % par rapport au quotient électoral, alors que la circonscription voisine de Miramichi aurait un écart de -21 %.
[11]Du 3 septembre au 17 octobre, la Commission a tenu neuf audiences publiques et a reçu des observations et commentaires des collectivités sur les changements proposés.
[12]Lors de l'audience publique pour la circonscription de Miramichi, tenue le 4 septembre 2002 à Miramichi, la Commission a reçu deux présentations sur six qui traitaient spécifiquement des changements susmentionnés. Une présentation appuyait les recommandations de la Commission, tandis que l'autre était contre.
[13]Lors de l'audience publique pour la circonscription d'Acadie-Bathurst, tenue le 5 septembre 2002 à Caraquet, les membres de la Commission ont reçu 18 présentations des membres du public, dont 14 traitaient spécifiquement des changements susmention-nés. On revendiquait le maintien des paroisses d'Allardville, de Saumarez et de celle de Bathurst dans la circonscription d'Acadie-Bathurst.
[14]Les intervenants ont favorisé le maintien du statu quo en invoquant les notions de communauté d'intérêts et de spécificité. Plusieurs ont élaboré sur ces notions, en soutenant qu'il est difficile d'imaginer une région qui soit plus linguistiquement homogène et culturellement distincte, avec autant d'histoire, que celle d'Acadie-Bathurst. Selon ces personnes, on a consacré beaucoup d'efforts dans le passé pour développer la région du nord-est du Nouveau-Brunswick; les changements proposés à la circonscription détruiraient ce qui est en place et nuiraient à la poursuite de ce développement, tant sur le plan social qu'économique.
[15]Une pétition signée par 2 656 personnes en faveur du statu quo a également été remise aux membres de la Commission.
DÉCISION DE LA COMMISSION
[16]Dans son rapport qui a été présenté au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, la Commission a maintenu sa recommandation que la paroisse d'Allardville et une partie des paroisses de Saumarez et de Bathurst soient transférées de la circonscription électorale fédérale d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi4.
[17]En février 2003, après l'émission du rapport de la Commission, la commissaire aux langues officielles (la commissaire) a reçu trois plaintes contre la Commission. Les plaignants contestaient les changements de délimitation des circonscriptions électorales proposés par la Commission à l'égard de la circonscription Acadie-Bathurst.
[18]La commissaire a jugé les plaintes recevables. L'enquête avait pour objectif d'évaluer dans quelle mesure la Commission avait tenu compte de l'article 41 de la Loi sur les langues officielles5, lorsqu'elle a décidé de redéfinir les nouvelles limites de la circonscription électorale d'Acadie-Bathurst.
[19]La commissaire a conclu que l `engagement prévu à la partie VII de la LLO obligeait la Commission à évaluer les inconvénients et conséquences néfastes que la communauté minoritaire de langue officielle percevait, compte tenu des conséquences des changements apportés à la circonscription sur le développement et l'épanouissement de la communauté francophone6. La commissaire a conclu:
Le rapport de la Commission ne m'a pas convaincue qu'elle a pleinement examiné l'impact de ses recommandations sur le développement et l'épanouissement de la communauté minoritaire de langue officielle de la circonscription d'Acadie-Bathurst, et ne me permet pas de conclure que la Commission a satisfait aux responsabilités qui lui incombent à cet égard en vertu de l'article 41 de la Loi sur les langues officielles7 [. . .]
[20]Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, en révisant le rapport de la Commission a également indiqué:
Le Comité est donc d'accord avec l'affirmation de M. Godin voulant que dans ce cas-ci, laisser les limites actuelles telles quelles et accepter un écart d'environ +14 p. 100 est à la fois permis et préférable.
Le Comité prie la Commission de délimitation et les autres intervenants de prendre connaissance des observations générales qu'il formule ci-dessous et dans lesquelles on examine une approche plus pratique afin de tenter de trouver une solution à long terme à un problème qui devrait selon nous se présenter de nouveau8.
[21]Après avoir étudié les oppositions déposées par le Comité, la Commission a décidé: «de réintégrer la paroisse de Saumarez et une partie de la paroisse d'Allardville, incluant Saint-Sauveur, à la circonscription d'Acadie-Bathurst. La paroisse de Bathurst et une partie de la paroisse d'Allardville resteront dans la circonscription de Miramichi9.»
QUESTIONS EN LITIGE
L'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés [qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]] (la Charte)
[22]La Proclamation porte-t-elle atteinte à la Charte?
[23]S'il y a une violation de la Charte, est-elle sauvée aux termes de l'article 1 de la Charte?
Contrôle judiciaire
[24]Quelle est la norme de contrôle de la décision de la Commission?
[25]La Proclamation contrevient-elle à l'article 15 [mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 6, art. 2; L.R.C. (1985) (4e suppl.) ch. 1, art. 45, ann. III, item 9(1); L.C. 1998, ch. 15, art. 25] de la Loi sur la révision?
Partie VII de la LLO
[26]La Proclamation contrevient-elle à la partie VII de la LLO?
Recours
[27]Quels sont les recours disponibles en égard à la compétence de cette Cour?
ANALYSE
L'article 3 de la Charte
La Proclamation porte-t-elle atteinte à la Charte?
[28]Dans l'arrêt Renvoi: Circ. électorales provinciales (Sask.)10 la Cour suprême du Canada à examiné les principes de l'article 3 de la Charte11. Le juge McLachlin (telle qu'elle était à l'époque), écrivant pour la majorité, a conclu que l'objet du droit de vote garanti à l'article 3 de la Charte est le droit à une représentation effective, et non seulement la parité du pouvoir électoral12.
[29]Selon le juge McLachlin, les conditions de la représentation effective sont les suivantes:
La parité du pouvoir électoral est d'importance primordiale mais elle n'est pas le seul facteur à prendre en compte pour assurer une représentation effective.
[. . .]
Nonobstant le fait que la valeur du vote d'un citoyen ne devrait pas être indûment affaiblie, c'est une réalité pratique que souvent la représentation effective ne peut être atteinte sans que l'on tienne compte de facteurs inverses.
Tout d'abord, la parité absolue est impossible. En effet, il n'est pas possible de fixer les limites des circonscriptions de façon à garantir exactement le même nombre d'électeurs dans chaque district. Des électeurs meurent, d'autres déménagent. Même à l'aide de recensements fréquents, la parité électorale est impossible.
Deuxièmement, la parité relative qu'il est possible d'atteindre peut ne pas être souhaitable si elle a pour effet de détourner du but principal, qui est la représentation effective. Des facteurs tels les caractéristiques géographiques, l'histoire et les intérêts de la collectivité et la représentation des groupes minoritaires peuvent devoir être pris en considération si l'on veut que nos assemblées législatives représentent effectivement la diversité de notre mosaïque sociale. Ce ne sont là que des exemples de considérations qui peuvent justifier une dérogation à l'égalité absolue des votes dans la poursuite d'une représentation plus effective; la liste n'est pas exhaustive.
Il se fait donc que des dérogations à la parité électorale absolue peuvent se justifier en présence d'une impossibilité matérielle ou pour assurer une représentation plus effective. À part cela, l'affaiblissement du vote d'un citoyen comparativement à celui d'un autre ne devrait pas être toléré. Je souscris à l'extrait suivant de l'arrêt Dixon [. . .] «ne devraient être permis que des écarts qui se justifient parce qu'ils permettent de mieux gouverner l'ensemble de la population, en donnant aux questions régionales et aux facteurs géographiques le poids qu'ils méritent13.»
[30]Donc, la parité relative du pouvoir électoral est la condition première pour assurer une représentation effective, mais, d'autres facteurs, par exemple les caractéristiques géographiques, l'histoire, les intérêts de la collectivité et la représentation des groupes minoritaires, devaient être considérés et ils pourraient justifier une dérogation à l'égalité absolue des votes.
[31]Dans l'arrêt Carter, la Cour suprême du Canada a aussi établi que pour déterminer si les législateurs ont respecté l'article 3 de la Charte en créant les circonscriptions électorales, les tribunaux ne devraient conclure à une violation que dans les cas où: «des personnes raisonnables, appliquant les principes appropriés, n'auraient pas pu tracer les limites existantes des circonscriptions14».
[32]La Cour estime que la raison de cette réticence tient à la nature délicate du découpage des circonscriptions électorales. On demande aux commissions de concilier deux principes opposés: d'un côté, le principe de la parité du pouvoir électoral, qui donne une importance particulière à l'individu; de l'autre, le principe de la communauté d'intérêts, qui donne une importance au groupe. Trouver un équilibre entre les deux n'est pas une science exacte, et les tribunaux respectent donc les choix des commissions si leurs décisions sont défendables.
[33]En l'espèce, les demandeurs ont déposé de la preuve pour montrer qu'il existe une communauté d'intérêts en Acadie-Bathurst. Ils ont déposé sept affidavits des résidents de l'ancienne circonscription d'Acadie-Bathurst. Tous les sept attestent qu'il y a de forts liens linguistiques, historiques, sociaux et administratifs en Acadie-Bathurst, et très peu de liens entre les collectivités de l'ancienne circonscription Acadie-Bathurst et celles de Miramichi. Ainsi, à titre d'exemple, Carmel Raîche, une résidente d'Allardville et Ian Oliver, un résident de South Tetagouche, notent dans leurs affidavits qu'eux-mêmes, comme la population d'Allardville et South Tetagouche, étudient, font des achats, utilisent l'hôpital et fréquentent les centres de récréation dans la région de Bathurst et non pas à Miramichi15.
[34]Les demandeurs ont aussi déposé un affidavit d'un témoin expert, Denis Duval. Professeur Duval est professeur en sciences politiques. Il a réalisé une étude intitulée «Rapport d'étude des limites des circonscriptions proposées par la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Nouveau-Brunswick» et l'a présenté à la Commission. Professeur Duval a conclu dans son rapport que les paroisses d'Allardville et de Bathurst font partie d'une même communauté d'intérêts avec d'autres paroisses de l'ancienne circonscription d'Acadie- Bathurst.
[35]Le défendeur a aussi déposé de la preuve, pour montrer qu'il n'y a pas de communauté d'intérêts en Acadie-Bathurst. Elle a déposé deux affidavits de témoins experts, David Johnson et Pierre-Marcel Desjardins.
[36]David Johnson, professeur en sciences politiques, critique le rapport du professeur Duval, disant: Toutefois la faiblesse inhérente de l'évaluation faite par M. Duval de la communauté d'intérêts est qu'il s'agit d'une évaluation statique, qui est essentiellement tournée vers le passé et qui ne tient pas compte de ce qui pourrait se produire dans le futur16.»
[37]M. Johnson atteste que la façon de redécouper les circonscriptions électorales est juste. Il explique que, même s'il y a une communauté d'interêts en Acadie-Bathurst, avec le changement aux circonscrip-tions électorales, de nouvelles communautés d' intérêts peuvent se développer au sein de la collectivité dans la circonscription électorale de Miramichi17. Il explique aussi que les craintes des résidents en Acadie-Bathurst sont sans fondement. Il affirme que les résidents qui deviennent des membres de la circonscription de Miramichi pourront recevoir des services en français parce que le Canada et le Nouveau-Brunswick sont tous deux bilingues, et il ajoute qu'il importe peu que leur député sache parler français car, selon lui, [traduction] «[l]es représentants élus doivent représenter les intérêts de tous leur électeurs, indépendamment de leur race, de leur origine nationale ou ethnique, de leur couleur, de leur religion, de leur sexe, de leur âge, de leurs déficiences mentales ou physiques ou de toute autre caractéristique sociale, y compris la langue»18.
[38]M. Desjardins critique également le rapport du professeur Duval, mais pour d'autres raisons. Principalement, il note que M. Duval a analysé l'ensemble du découpage des circonscriptions électorales de la province du Nouveau-Brunswick, tandis que M. Desjardins a analysé les collectivités touchées par le redécoupage des circonscriptions électorales19.
[39]Après avoir analysé différents critères, le professeur Desjardins a conclu:
[. . .] en regard de plusieurs caractéristiques socio- économiques, il existe peu de différence entre la situation prévalant dans les circonscriptions d'Acadie-Bathurst et de Miramichi car ces communautés partagent de multiples caractéristiques;
Également, je peux conclure qu'il n'existe pas, pour les sous-régions, de tendances concluantes20;
[40]La Cour préfère la preuve des demandeurs à celle du défendeur. Premièrement, M. Johnson, témoin pour le défendeur, appuie les résultats du professeur Duval. Dans son affidavit il dit: [traduction] «Cela ne doit d'aucune façon être interprété comme un critique des conclusions empiriques de M. Duval relativement à l'existence d'une communauté d'intérêts francophone en Acadie-Bathurst»21.
[41]Deuxièmement, le rapport de M. Johnson est problématique. Il ne tient pas compte des principes juridiques de l'article 3 de la Charte. Il critique l'argument des demandeurs dans lequel ils prétendent que la redivision des circonscriptions diluerait la voix des francophones dans les circonscriptions et créerait la forte possibilité que le député pourrait ne pas représenter les interêts des francophones, en disant: [traduction] «L'idée maîtresse ici [. . .] c'est que toute personne est capable de faire preuve de compréhension envers d'autres personnes. Toute personne est capable d'être attentive et de répondre aux besoins d'autres personnes dans cette société»22. Le professeur Johnson considère que les craintes des demandeurs sont «illogiques.» (À l'audience, le défendeur s'excusait devant la Cour et face aux demandeurs concernant le terme «illogiques» utilisé par M. Johnson plutôt qu'un autre mot, mais néanmoins, ces craintes sont mises de côté par M. Johnson.)23
[42]Pourtant, la Cour suprême de Canada a rejeté cette façon d'envisager les choses. Dans Carter, la Cour a dit: «en insistant sur la parité des nombres, on pourrait priver des citoyens, ayant des intérêts distincts, d'une voix effective au sein du processus législatif aussi bien que d'une aide réelle de la part de leurs représentants dans leur rôle d'"ombudsman"»24. La Cour a reconnu que les craintes d'une minorité de ne pas être adéquatement représentée par son député n'étaient pas sans fondement, bien au contraire, puisque la réalité d'une démocratie est qu'un député, partagé entre les besoins de la majorité et ceux d'une minorité, choisira souvent de défendre les intérêts de la majorité.
[43]Un autre problème c'est que le rapport de M. Johnson contient beaucoup d'hypothèses. Par exemple, il écrit que même s'il y a une communauté d'intérêts dans l'ancienne circonscription électorale d'Acadie- Bathurst, une communauté d'intérêts se développera dans la nouvelle circonscription de Miramichi, sans expliquer ni quand ni comment cela se fera25. Sa conclusion relève de la spéculation.
[44]Le problème final que la Cour voit dans le rapport du professeur Johnson est sa tendance à exagérer certains points tout en négligeant les faits qui vont à l'encontre de son hypothèse. Cela est particulièrement évident lorsqu'il parle de la communauté d'intérêts économiques. Il conclut qu'il existe une communauté d'intérêts entre les régions d'Acadie-Bathurst et de Miramichi. Il tire cette conclusion d'un témoignage donné qu'à une des audiences de la Commission26. Par contre, il ne considère pas que tous les autres intervenants, tant des particuliers que des maires ou des représentants d'organismes, ont témoigné qu'il existe une communauté d'intérêts dans l'ancienne circonscription Acadie-Bathurst, mais non entre Acadie-Bathurst et Miramichi. Ce parti pris rend son rapport moins convaincant.
[45]Le rapport du professeur Desjardins ne comporte pas ces défauts. Néanmoins, la Cour préfère le rapport du professeur Duval à celui du professeur Desjardins. Les indicateurs de M. Duval pour déterminer les communautés d'interêts sont très détaillés27. M. Desjardins, quant à lui, utilise moins d'indicateurs et ils sont moins variés28. La Cour estime que le rapport du professeur Duval est plus approfondi que celui du professeur Desjardins, et la Cour accepte donc les résultats du professeur Duval.
[46]Finalement, la Cour estime que le témoignage des témoins des demandeurs est très important. La région a parlé d'une voix unie. Des représentants des associations, des maires des différentes villes, et le député d'Acadie-Bathurst ont déposé des affidavits et on fait des représentations devant la Commission. Une pétition, signée par plus de 2 000 personnes a été présentée à la Commission.
[47]Les gens expliquent que la région est unique. Elle a, d'après un intervenant, la plus grande concentration d'Acadiens au Canada29. Pendant les audiences, plusieurs intervenants ont parlé de l'importance d'avoir une voix acadienne forte, et ont rappelé aux membres de la Commission les torts historiques causés aux Acadiens30. La Cour estime, tenant compte de la preuve dans son ensemble, qu'il y a une communauté d'intérêts en Acadie-Bathurst.
[48]La Commission en est d'ailleurs arrivée à la même conclusion. Elle a accepté qu'il y avait une communauté d'intérêts en Acadie-Bathurst, et elle était aussi consciente que la parité du pouvoir électoral n'est pas le seul critère à évaluer en redécoupant des circonscriptions électorales. Toutefois, et elle a décidé qu'un écart de -21 % était tout simplement trop grand, et malgré l'existence d'une communauté d'intérêts en Acadie-Bathurst, il était nécessaire de réduire l'écart de Miramichi par rapport au quotient électoral. Par conséquent, elle a transféré la paroisse d'Allardville et une partie des paroisses de Saumarez et de Bathurst à la circonscription de Miramichi31.
[49]Vu que le critère primordial pour déterminer si une population jouit d'une représentation effective est l'égalité des suffrages, et vu qu'une commission n'enfreint l'article 3 de la Charte que si «des personnes raisonnables, appliquant les principes appropriés, n'auraient pas pu tracer les limites existantes des circonscriptions» la Cour conclut que la Commission n'a pas enfreint l'article 3 de la Charte quand elle a décidé de transférer des paroisses d'Acadie-Bathurst à Miramichi.
[50]Cette décision est raisonnable, et par conséquent, la Commission n'a pas enfreint l'article 3 de la Charte.
L'article 1 de la Charte
[51]Pourtant, si la Cour n'a pas raison, et que la Commission a violé l'article 3 de la Charte, la Cour n'estime pas que la violation puisse être sauvegardée par l'article 1 de la Charte.
[52]La Cour suprême du Canada a énoncé le critère pour déterminer si une violation de la Charte est sauvée par l'article 1 dans les termes suivants:
Tout d'abord, ce dernier doit prouver que la disposition contestée vise un objectif suffisamment urgent et réel pour justifier la violation d'un droit constitutionnel. Il ne doit pas s'agir d'un objectif «peu importan[t]» ni «contrair[e] aux principes qui constituent l'essence même d'une société libre et démocratique»: Oakes, précité, p. 138. Une fois cette preuve faite, le gouvernement doit établir que l'atteinte est proportionnée, savoir qu'il existe un lien rationnel entre la disposition législative et l'objectif visé, que la disposition porte le moins possible atteinte au droit constitutionnel en cause et que ses effets bénéfiques l'emportent sur ses effets préjudiciables32.
[53]En vertu du critère de l'arrêt Oakes33, la Cour doit pondérer les droits de l'individu et les besoins de la société. Il est donc nécessaire d'avoir des éléments de preuve quant aux besoins de la société. Le défendeur, qui a le fardeau de la preuve34, n'a rien avancé à ce sujet. Par conséquent, il s'avère impossible de faire une analyse solide de l'article 1, et le défendeur n'a pas démontré que la violation était justifiée.
La Proclamation contrevient-elle à l'article 15 de la Loi sur la révision?
Norme de contrôle
[54]Le défendeur prétend que la norme de contrôle est celle de la décision manifestement déraisonnable.
Mécanisme de contrôle
[55]Le défendeur prétend qu'aucun mécanisme de contrôle n'est prévu dans la Loi sur la révision. (Représentations supplémentaires au sujet des réparations demandées, document du Procureur général du Canada déposé le 3 mai 2004, pages 1 à 16. Dans ce document, le défendeur tient compte de plus qu'un scénario si la Cour décide autrement pour atténuer les effets d'une décision à l'encontre de ses propos.)
Expertise relative des décideurs
[56]Par ailleurs, le défendeur note qu'un juge et un avocat étaient membres de la Commission, et que tous les membres de la Commission habitent au Nouveau-Brunswick. Par conséquent, la Commission avait une certaine expertise en raison de sa connaissance des spécificités et des communautés d'intérêts de sa province, et elle avait la capacité de trancher des questions relevant des intérêts et de la profession de ses membres. L'expertise relative des décideurs pourrait inciter notre Cour à faire montre de plus de déférence.
Objet de la Loi sur la révision
[57]Le défendeur soutient qu'un objet de la Loi sur la révision est de donner aux commissions, et à eux seules, le pouvoir de réviser la délimitation des circonscriptions électorales. Pour déterminer la délimitation des circonscriptions électorales, la Commission doit considérer parmi les plusieurs éléments cités pour s'assurer que les objets de la Loi sur la révision sont remplis. Donc, en vertu de la Loi sur la révision, la Commission doit également pondérer les intérêts de groupes différents. Finalement, le législateur a accordé à la Commission un très large pouvoir discrétionnaire, ce qui semblerait indiquer que notre Cour doit faire montre de beaucoup de déférence.
Nature du problème
[58]Le défendeur soutient également que la question que la Commission était appelée à résoudre était essentiellement factuelle, une autre raison pour laquelle la Cour devrait faire preuve de retenue.
[59]En raison de cette analyse, le défendeur soutient que la norme de contrôle applicable au rapport final de la Commission est celle de la décision manifestement déraisonnable.
[60]La spécialisation des membre des commissions comme-telle n'est pas mise en doute. Plutôt c'est leur interprétation de la situation envisagée en appliquant la Loi sur la révision.
L'anatomie de la Loi sur la révision
[61]La Loi sur la révision a accordé à la Commission un large pouvoir discrétionnaire. L'article 15 indique l'importance de la parité du vote mais il enjoint les commissions à prendre en considération les autres facteurs sans les diminuer et donne aux commissions des principes directeurs servant à déterminer en quoi consiste un écart raisonnable.
[62]La Commission a un pouvoir discrétionnaire. La Loi sur la révision ne définit pas «communauté d'intérêts» et utilise un libellé assez large. La Commission peut donc déroger au principe de la parité électorale si certains facteurs sont en jeu. La Cour estime que le défendeur n'a pas tort de prétendre qu'un certain pouvoir discrétionnaire a été accordé à la Commission, mais elle exagère le degré de discrétion accordé à la Commission. Cela diminue également le degré de retenue dont la Cour doit faire montre.
La nature de la question en litige
[63]La question en litige est une question mixte de fait et de droit puisqu'il s'agit de l'application de l'article 15 de la Loi sur la révision à une situation factuelle. Pour déterminer le degré de déférence dû au décideur, la Cour suprême du Canada a énoncé ce qui suit: «sur les questions mixtes de fait et de droit, ce facteur appelle une déférence plus grande si la question est principalement factuelle, et moins grande si elle est principalement de droit»35.
[64]En l'espèce, la question est plutôt de nature juridique, parce qu'elle implique l'interprétation de l'article 15 de la Loi sur la révision, ce qui réduit la déférence que doit manifester la Cour.
[65]La Cour estime que la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable.
La Proclamation contrevient-elle à l'article 15 de la Loi sur la révision?
[66]Dans son rapport, la Commission a démontré qu'elle connaissait le but de la Loi sur la révision mais cela ne démontre pas qu'elle l'ait appliquée correctement en redécoupant les circonscriptions électorales d'Acadie-Bathurst et Miramichi.
[67]La Commission a expliqué au cours d'une audience pourquoi elle proposait de transférer des paroisses de la circonscription électorale d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi. Elle a dit:
La première raison [pour transférer les paroisses à la circonscription de Miramichi] c'est que l'écart est déjà grand. L'écart du quotient provincial est déjà assez important ici dans Acadie-Bathurst. Un membre du parlement au Nouveau- Brunswick, chaque membre du parlement au Nouveau- Brunswick idéalement devrait représenter 73,000 personnes en chiffres ronds, 72,950 mais on va parler en chiffres ronds, 73,000 personnes, alors que le membre de parlement ici dans Acadie-Bathurst en représente 83,000. Alors, il y a un écart important ici, un écart de 14%, qui est un écart important. On sait qu'on peut aller jusqu'à 25 [pour cent], on sait ça mais idéalement, on ne devrait pas passer 10 et même, on essayait de découper la carte pour ne pas dépasser 5 parce que dans la province de Québec, par exemple, la province avoisinante, ils ont réussi eux autres à maintenir des écarts à 3% et moins, alors, pour respecter, le premier et le plus grand des principes de redistribution de carte électorale à travers le Canada. Alors, on se sentait un petit peu gêné de voir deux circonscriptions avoisinantes avec une différence de 35, 000, avec une qui a un excédent de 10, 000 qui vraiment pourrait facilement être transféré dans celle qui en a seulement 57, 000, tout en respectant les communautés d'intérêts en ce qui concerne la langue et en ce qui concerne l'occupation. Parce que Miramichi est une circonscription bilingue, je viens de vous le dire, elle est d'environ 30% francophone, environ 70% anglophone. Et là, je vous transmets notre pensée, je vous transmets notre discussion et notre pensée pour essayer d'avoir votre réaction ni plus ni moins mais, on se disait lorsqu'on a une circonscription bilingue et on en a trois au Nouveau-Brunswick, on a juste trois. On a cinq à majorité écrasante anglaise et on a deux à majorité écrasante francophone et on a trois qui sont vraiment bilingues. Dans une circonscription bilingue, pensez-vous pas qu'il est important que la minorité soit la plus nombreuse possible pour être le plus confortable possible? Par exemple, si vous avez une minorité de deux ou trois pour cent à l'intérieur d'une circonscription électorale, c'est un petit peu gênant pour cette minorité-là, ils n'ont pas beaucoup de pouvoir. Mais si vous avez dans une circonscription bilingue une minorité de 30% ou de 35% et qu'on peut l'augmenter d'un autre deux ou trois pour cent, cette minorité-là se sent de plus en plus confortable, de mieux en mieux et acquiert de plus en plus de pouvoir et éventuellement, si Miramichi continue d'être de plus en plus bilingue, il s'ensuivra nécessairement que la population voudra élire un représentant bilingue36 [. . .]
[68]Il y a deux points intéressants à faire ressortir de cet extrait. On voit que la Commission s'est engagée à maintenir un écart de moins de 10 % pour les circonscriptions. Aussi, la Commission pense soit qu'il y a déjà une minorité acadienne suffisamment forte à Miramichi pour pouvoir donner une voix aux paroisses qui seront transférés d'Acadie-Bathurst à Miramichi, soit qu'en ajoutant des communautés acadiennes à Miramichi, il y aura une minorité assez forte pour qu'elle puisse exiger du député qu'il représente ses intérêts.
[69]La Cour estime que la Commission n'interprète pas la Loi sur la révision selon l'esprit de la loi. Premièrement, si la Commission avait le droit de décider que, comme principe général, l'écart des circonscriptions ne devrait pas dépasser 10 %, elle n'a pas examiné s'il y avait des circonscriptions où, vu la communauté d'intérêts ou la géographie de la région, il serait souhaitable de déroger au principe général que l'écart ne devrait pas dépasser 10 %.
[70]L'article 15 de la Loi sur la révision se lit ainsi:
15. (1) Pour leur rapport, les commissions suivent les principes suivants:
a) le partage de la province en circonscriptions électorales se fait de telle manière que le chiffre de la population de chacune des circonscriptions corresponde dans la mesure du possible au quotient résultant de la division du chiffre de la population de la province que donne le recensement par le nombre de sièges de député à pourvoir pour cette dernière d'après le calcul visé au paragraphe 14(1);
b) sont à prendre en considération les éléments suivants dans la détermination de limites satisfaisantes pour les circonscriptions électorales:
(i) la communauté d'intérêts ou la spécificité d'une circonscription électorale d'une province ou son évolution historique,
(ii) le souci de faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province ne soit pas trop vaste.
(2) Les commissions peuvent déroger au principe énoncé par l'alinéa (1)a) chaque fois que cela leur paraît souhaitable pour l'application des sous-alinéas (1)b)(i) et (ii). Le cas échéant, elles doivent toutefois veiller à ce que, sauf dans les circonstances qu'elles considèrent comme extraordinaires, l'écart entre la population de la circonscription électorale et le quotient mentionné à l'alinéa (1)a) n'excède pas vingt-cinq pour cent.
[71]Comme la Commission l'a constaté, la Loi sur la révision vise la parité électorale, mais, elle n'oblige pas à la parité électorale absolue. En vertu des alinéas 15(1)a) et b) de la Loi sur la révision, les commissions sont obligées d'envisager une dérogation raisonnable du quotient électoral pour respecter une communauté d'intérêts, la spécificité d'une circonscription électorale d'une province, son évolution historique ou pour faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province ne soit pas trop vaste.
[72]Par ailleurs, le paragraphe 15(2) de la Loi sur la révision indique qu'une commission peut envisager une dérogation encore plus importante si une communauté d'intérêts ou des particularités géographiques le justifient. La Loi sur la révision ne permet pas d'écart de plus de 25 %, hormis des circonstances extraordinaires, mais elle est claire qu'un écart de jusqu'à 25 % est acceptable dans des cas individuels.
[73]En l'espèce, la Commission a appliqué le paragraphe 15(1) quand elle a reconnu qu'au Nouveau-Brunswick, il y a beaucoup de zones rurales, et qu'un écart de 10 % par rapport au quotient électoral était donc raisonnable.
[74]Cependant, la preuve démontre qu'elle a refusé de considérer si le paragraphe 15(2) était applicable à la circonscription d'Acadie-Bathurst. Outre, les remarques faites lors des audiences, le rapport remis au comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, laisse entendre que la Commission en aucun cas n'aurait laissé une circonscription avoir un écart de 25 %. Les deux raisons données pour transférer les paroisses de Saumarez, Allardville et Bathurst à la circonscription de Miramichi sont d'une part que l'écart entre Acadie- Bathurst et Miramichi était trop grand et d'autre part l'écart entre Acadie-Bathurst et Miramichi était trop grand par rapport au quotient électoral. Les chiffres étaient la seule et unique raison pour ajouter des paroisses à Miramichi.
[75]La preuve n'est pas irréfutable. La citation présentée plus haut peut être lue comme indiquant que la Commission était prête à dépasser un écart de 10 % si cela s'avérait nécessaire. Finalement, six circonscriptions sur dix ont un écart de plus de 10 %.
[76]Une affirmation faite par la Commission nous éclaire sur sa position. Lors d'une audience, un membre de la Commission a dit: [traduction] «Nous essayons de nous en tenir à une marge de 10 % pour répondre aux exigences. Rien n'est écrit dans la pierre, mias c'est le chiffre qu'on s'est donné. C'est sûr que nous ne croyons pas que 25 % est approprié pour le Nouveau-Brunswick compte tenu de la population totale»37. Dans des cas extrêmes, la Commission était prête à permettre un écart de 14 %, mais elle ne pensait pas qu'il pourrait être raisonnable de permettre un écart de 25 %, même où il y avait des communautés d'intérêts.
[77]Deuxièmement, la Commission n'a pas tenu compte des éléments dont elle disposait quand elle a décidé que les paroisses d'Allardville, de Saumarez et de Bathurst auraient une représentation effective lorsqu'elles feraient partie de la circonscription de Miramichi.
[78]La Commission n'explique pas très clairement comment elle en arrive à la conclusion qu'il y a communauté d'intérêts entre les paroisses d'Acadie-Bathurst et Miramichi. Dans la déclaration citée plus haut, la Commission indique que soit la minorité acadienne à Miramichi a déjà une représentation effective, soit l'ajout des collectivité acadiennes à Miramichi donnera lieu à une représentation effective de la minorité. Ces constatations sont toutes deux problématiques.
[79]La preuve devant la Commission démontrait que la minorité acadienne à Miramichi n'avait pas de représentation. Le député d'Acadie-Bathurst a témoigné que des francophones de Miramichi venait le voir pour obtenir de l'aide parce qu'ils avaient de la difficulté à communiquer avec leur député, un unilingue anglophone38. Une autre intervenante qui habitait en Acadie-Bathurst a témoigné qu'on offrait fort peu de services en français à Miramichi39. Finalement, des résidents de villages acadiens transférés il y a dix ans de Beauséjour, une circonscription francophone, à Miramichi ont témoigné qu'ils souhaitaient être réintégrés à Beauséjour parce qu'ils n'avaient rien en commun avec la collectivité de Miramichi40. Cette preuve est un indice de ce que la Commission disposait quant à l'existence des services et la représentation en français à Miramichi. Vu cette preuve, la Cour ne voit pas comment la Commission a pu conclure que la collectivité acadienne à Miramichi jouissait d'une représentation effective.
[80]La conclusion que l'ajout de collectivités francophones à la communauté acadienne de Miramichi donnerait plus de poids à celle-ci est tout aussi problématique. Le problème apparaît lorsqu'on compare les pourcentages des francophones et des anglophones avant et après le transfert des paroisses de Saumarez, Allardville et Bathurst. En 2001, avant que les paroisses soient transférées, le pourcentage des anglophones était de 63 % et le pourcentage des francophones de 34 %41. Après le transfert, il était prévu que le pourcentage des anglophones passerait à 64 % tandis que le pourcentage des francophones se situerait à 33 %.42 Le pourcentage d'Acadiens n'a pas changé avec l'ajout des paroisses et leur pouvoir non plus.
[81]Finalement, réalisant jusqu'à quel point la tâche de la Commission est difficile, la Cour estime que la formation des communautés d'intérêts et l'augmentation de pouvoir politique d'une collectivité dépendent d'un grand nombre de facteurs et ne se produisent pas simplement parce qu'une collectivité atteint une masse critique. Le fait d'ajouter d'autres membres de la collectivité à la circonscription en espérant qu'une représentation effective s'ensuivra tient du jeu de hasard. Cette position n'est pas en accord avec l'esprit de la Loi sur la révision.
[82]Par conséquent, la Commission n'a pas respecté l'article 15 de la Loi sur la révision. Elle a observé l'alinéa 15(1)a) et b) quand elle a trouvé qu'un écart de 10 % par rapport au quotient électoral était raisonnable au Nouveau-Brunswick, mais elle n'est pas passée à la deuxième étape, aussi significative, c'est-à-dire, qu'elle n'a pas examiné s'il était souhaitable de permettre un écart envisagé par la loi pour maintenir une communauté d'intérêts dans une circonscription. La Commission a commis une erreur d'extrapolation en concluant qu'il y avait une communauté d'intérêts ou qu'il pourrait y avoir une communauté d'intérêts à Miramichi. Pour ces raisons, la décision est mise de côté.
La Proclamation contrevient-elle à l'article 41 de la LLO?
[83]Le défendeur soutient que l'article 41 n'est pas applicable au rapport final de la Commission parce que l'engagement énoncé à la partie VII de la LLO vise uniquement le «gouvernement fédéral». Comme les commissions de délimitation des circonscriptions électorales ne font pas partie du gouvernement du Canada, elles ne peuvent pas être assujetties à l'engagement gouvernemental énoncé à la partie VII de la LLO.
[84]Par contre, la commissaire soumet que l'article 42 [mod. par L.C. 1995, ch. 11, art. 27] de la LLO engage clairement et expressément les institutions fédérales à la mise en oeuvre de l'engagement du gouvernement fédéral énoncé à l'article 41.
[85]La Cour est d'accord avec la commissaire. Tel que la commissaire l'indique, le rôle du ministre du Patrimoine est de «susciter» et d'«encourager» une coordination avec les autres ministres et les institutions afin de développer et de promouvoir l'usage du français et de l'anglais. Cependant, ce sont les institutions fédérales qui doivent mettre en oeuvre l'engagement puisque la LLO vise expressément les institutions gouvernementales ainsi que le gouvernement fédéral.
[86]Le défendeur prétend aussi que c'est la Loi sur la révision qui est d'application spécifique, qui s'applique au processus de la délimitation des circonscriptions électorales, et non pas la LLO, qui est une loi d'application générale.
[87]La commissaire prétend qu'il ne s'agit pas d'une question de préséance entre deux lois puisque il n'existe pas d'incompatibilité entre les obligations imposées par la Loi sur la révision et celles imposées par la LLO. La commissaire souligne que le défendeur lui-même soumet ce point dans son mémoire.
[88]La Cour est également d'accord avec cette prétention. La Loi sur la révision impose à la Commission l'obligation de tenir compte de la communauté d'intérêts, incluant une communauté d'intérêts définie par la langue française, et la LLO requiert que des institutions gouvernementales favorisent «l'épanouissement des minorités francophones [. . .] du Canada.» En effet, les deux lois ont des buts semblables43.
[89]Le défendeur soutient que la partie VII de la LLO est déclaratoire plutôt qu'exécutoire et que ni le gouvernement fédéral ni les institutions fédérales sont obligés de toujours donner suite à la partie VII de la LLO.
[90]Sur ce point la Cour est d'accord avec le défendeur. La Cour ne croit pas que la terminologie employée à l'article 41 est ambiguë. Il est clair, tel que le soumet la Commissaire, que le ministre du Patrimoine canadien doit encourager les institutions gouvernementales à appuyer le développement des minorités francophones. Mais, selon la Cour, l'interprétation de la LLO est telle que la législation n'oblige pas les institutions gouvernementales à faire ceci. Faisant référence à la version anglaise, l'article 42 utilise le mot «shall» en parlant des obligations du gouvernement, mais n'utilise pas ce mot en décrivant le rôle des institutions gouvernementales.
[91]Quelques autres parties de la LLO utilisent des mots impératifs en décrivant le rôle des institutions gouvernementales. La différence entre la terminologie utilisée dans la partie VII et celle que l'on retrouve dans les autres parties suggère que l'article 42 est déclaratoire, et non pas exécutoire.
[92]Finalement, le défendeur prétend que la partie X de la LLO, qui décrit les recours judiciaires disponibles, ne donne pas droit à un recours sous le régime de la partie VII parce que la partie X ne donne pas le droit au requérant de demander le contrôle judiciaire d'une décision prise en vertu de la partie VII.
[93]Cependant, la commissaire soumet que la Cour a le pouvoir d'intervenir dans les décisions rendues sous la partie VII de la LLO.
[94]Les deux parties invoquent de la jurisprudence différente pour soutenir leurs arguments44. En fait, la Cour d'appel a tiré deux constatations opposées à ce sujet. Comme la commissaire le prétend, dans la décision Devinat, la Cour a conclu qu'elle a le pouvoir de réviser une décision impliquant des parties de la LLO qui ne tombent pas sous la partie X, conformément à la juridiction générale accordée à la Cour de réviser des décisions des tribunaux45.
[95]Par ailleurs, la Cour d'appel a aussi conclu dans la décision Ayangma que la partie X de la LLO interdit au requérant d'avoir un contrôle judiciaire en ce qui concerne les questions impliquant les parties de la LLO qui ne sont pas nommées sous la partie X46.
[96]La Cour estime que la décision de la Cour d'appel dans Devinat s'applique. Dans Devinat la Cour a invoqué le Comité judiciaire du conseil privé quand il a dit [Board v. Board, [1919] A.C. 956, à la page 962]:
[traductio n] Si le droit existe, il faut présumer qu'il existe un tribunal qui peut le faire respecter, car si aucun autre mode d'exercice n'est prescrit, ce fait à lui seul suffit pour conférer compétence aux cours de justice du Roi. Pour les priver de leur compétence, il est nécessaire, en l'absence de loi spéciale excluant cette compétence, de plaider que celle-ci a été conférée à quelque autre tribunal47.
[97]Puisque ce principe est si fondamental à la loi, la Cour n'interprétera pas la loi de manière à ce que la loi cède un droit mais exclut un recours, à moins que la loi exclu ce recours expressément.
[98]Dans le cas de la LLO, la loi n'a pas expressément exclu un recours. Ainsi, en vertu de l'article 18.1 [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27] de la Loi sur les Cours fédérales48, la Cour a la compétence d'entendre le contrôle judiciaire.
Norme de contrôle
[99]Le norme de contrôle de la décision de la Commission rendue en vertu de la partie VII de la LLO est semblable à la norme de contrôle applicable aux décisions de la Commission rendues en vertu de la Loi sur la révision. Il y a, quand même, quelques différences importantes.
[100]Par contre, la Commission a la discrétion de décider s'il est approprié d'invoquer la partie VII de la LLO.
[101]Étant donné que la partie VII est déclaratoire, la Cour doit démontrer beaucoup de déférence à la Commission.
[102]La question en litige en l'espèce est une question de fait. Eu égard aux facteurs, la norme de contrôle est la norme manifestement déraisonnable.
[103]La constatation de la Cour que la Commission a enfreint la Loi sur la révision est aussi applicable ici. La Commission a décidé qu'en transférant des paroisses de la circonscription d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi, elle respectait la communauté d'intérêts des paroisses. Cette décision, pourtant, est erronée parce qu'elle n'a pas tenu compte de la preuve devant elle. De plus, en disant que l'ajout des acadiens à la circonscription de Miramichi allait augmenter le pourcentage des acadiens et ensuite allait augmenter le pouvoir politique de la collectivité acadienne est manifestement déraisonnable, car le pourcentage des francophones n'augmentait pas avec l'addition des paroisses de Saumarez, Allardville et Bathurst à la circonscription de Miramichi.
[104]La Cour estime que la Commission a essayé d'appliquer la partie VII de la LLO, selon l'intention du législateur, mais elle n'a pas réussi à le faire parce que sa constatation des questions de fait était erronée. La Cour annule donc la décision de la Commission.
Recours
Quels sont les recours disponibles eux égard à la compétence de cette Cour?
[105]Les demandeurs demandent que la Cour ordonne:
a) Qu'un bref de certiorari soit décerné annulant et infirmant la Proclamation en ce qui concerne le transfert des régions suivantes de la circonscription électorale fédérale d'Acadie-Bathurst à celle de Miramichi, au Nouveau-Brunswick:
La partie du comté de Gloucester constituée:
i) de la partie de la paroisse d'Allardville situé à l'ouest d'une ligne décrite comme suit: commençant à l'angle le plus au nord-ouest de la paroisse de Saumarez; de là vers le nord-ouest en ligne droite jusqu'à l'angle le plus au sud-ouest de la paroisse de New Bandon;
ii) de la partie de la paroisse de Bathurst située à l'ouest d'une ligne décrite comme suit: commençant à l'intersection de la limite nord de la paroisse d'Allardville avec la route no 8; de là vers le nord suivant ladite route jusqu'à la limite sud de la cité de Bathurst.
[106]La Cour accepte l'argument du défendeur à l'effet que la Cour n'a pas la compétence nécessaire afin de rétablir la circonscription d'Acadie-Bathurst telle qu'elle existait avant que la Commission ait été établie. La Cour peut cependant annuler la décision de la Commission, mais ne peut pas la remplacer par sa propre décision.
[107]Le défendeur soumet également que la Cour ne peut pas annuler une seule partie de la Proclamation soit celle qui concerne la circonscription d'Acadie-Bathurst. La Cour est d'accord avec cet argument. La Cour a la compétence d'annuler juste les parties qui sont invalidées, du moment qu'elle suit le principe juridique que «la partie valide que l'on cherche à maintenir puisse être complètement séparée de l'invalide et que sa validit[ité] soit incontestable».
[108]La Cour accepte l'argument du défendeur selon lequel annuler la Proclamation ne permettrait pas de remettre en vigueur le décret précédent. S'il n'est pas approprié pour la Cour de rétablir une circonscription telle qu'elle était avant que la Commission ait été établie, il est encore moins approprié pour la Cour d'usurper le rôle de Parlement en dictant les limites de toutes les circonscriptions d'une province.
[109]Finalement, les demandeurs demandent que la Proclamation soit annulée mais ils n'attaquent pas la décision du gouverneur en conseil d'adopter la Proclamation, ils attaquent plutôt la décision de la Commission qui les intéressent comme parties. En effet, suivant tout le raisonnement précédent, la Cour annule la décision de la Commission.
CONCLUSION
[110]La Loi sur la révision tient compte d'autres facteurs notamment, la communauté d'intérêts, la spécificité d'une circonscription électorale d'une province, l'évolution historique, ainsi que les aspects géographiques. Tout ceci est essentiel pour s'assurer que l'esprit de la loi soit reflété dans l'ensemble de son application pour que l'esprit découle de cette loi, l'interprétation se concrétise à un niveau qui prend en considération plus que des chiffres; c'est-à-dire qu'également l'âme de la composition de la population soit comprise pour son avenir basé sur son passé.
[111]Pour toutes ces raisons, la Cour accueille uniquement la demande de contrôle judiciaire et par déférence à l'autorité en question, c'est à elle de décider par quel moyen donner effet à cette conclusion de la Cour.
[112]Compte tenu de la situation, la Cour suspend temporairement, pour une période maximum d'un an, cette déclaration d'invalidité pour donner l'occasion à l'autorité en question d'agir de sa façon pour donner effet à cette conclusion de la Cour49.
ORDONNANCE
La Cour ordonne que:
1. La conclusion de la Cour soit mise en application à l'intérieur d'une période maximum d'un an;
2. Compte tenu de toutes les circonstances particulières, incluant l'importance du litige ainsi que l'approfondissement de la matière par chaque partie, aucuns dépens ne soient adjugés.
1 L.R.C. (1985), ch. E-3 (la Loi sur la révision).
2 La demande en parenthèse a été mise de côté par les demandeurs mais le texte original est produit pour s'assurer que le propos original soit néanmoins connu malgré qu'il a été écarté.
3 30 & 31 Vict., ch. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.)), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985) appendice II, no 5].
4 Dossier des demandeurs, Rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Nouveau-Brunswick 2003, Vol. 1, Onglet 5, p. 67 aux p. 84-85.
5 L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 31 (la LLO).
6 Dossier des demandeurs, Commissariat aux langues officielles, Rapport final d'enquête sur des plaintes ayant trait au remaniement de la circonscription fédérale d'Acadie- Bathurst proposé par la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour la Province du Nouveau-Brunswick, Vol. II, Onglet 10 à la p. 350.
7 Idem, à la p. 355.
8 Dossier des demandeurs, Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, Trentième Rapport, Vol. I, Onglet 5, p. 138 à 144, aux par. 36 à 37.
9 Dossier des demandeurs, Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Nouveau-Brunswick, Décisions de la commission à l'égard des oppositions des députés, Vol. I, Onglet 5 aux p. 148 à 156.
10 [1991] 2 R.C.S. 158 (Carter).
11 Entrée en vigueur le 17 avril 1982.
12 Carter, précité, note 10 à la p. 183.
13 Carter, précité, note 10 aux p. 184 et 185.
14 Carter, précité, note 10 à la p. 189.
15 Dossier des demandeurs, affidavit de Carmel Raîche, vol. I, onglet 3, p. 7, aux p. 8 à 10, aux par. 4 à 10; Dossier des demandeurs, affidavit de Ian Oliver, vol. I, onglet 4, p. 22, aux p. 23 à 24, par. 4 à 6.
16 Dossier du défendeur, affidavit de David Johnson, vol. 8, onglet C, p. 2374, à la p. 2409, au par. 222.
17 Idem, à la p. 2411, aux par. 232 à 235.
18 Idem, aux p. 2421et 2422, par. 305.
19 Dossier du défendeur, affidavit de Pierre-Marcel Desjardins, vol. 8, onglet D, p. 2449, à la p. 2452, par. 21.
20 Idem, à la p. 2470 aux par. 110 et 111.
21 Dossier du défendeur, affidavit de David Johnson, vol. 8, onglet C, p. 2374, à la p. 2409, par. 223.
22 Idem, à la p. 2420, par. 294.
23 Idem, à la p. 2418, par. 285.
24 Carter, précité, note 10 à la p. 188.
25 Dossier du défendeur, affidavit de David Johnson, vol. 8, onglet C, à la p. 2411, par. 232 à 235.
26 Idem, à la p. 2410, par. 226 et 227.
27 Dossier des demandeurs, affidavit de Denis Duval, vol. II, onglet 9, p. 201, aux pp. 241 et 242.
28 Dossier du défendeur, affidavit de Pierre-Marcel Desjardins, vol. 8, onglet D, aux p. 2457 et 2458, par. 56.
29 Dossier du défendeur, Fernand Losier et al., «Circonscription électorale d'Acadie-Bathurst», présenté à la Commission, vol. 5, onglet 40, p. 1592, à la p. 1593.
30 Dossier du défendeur, document présenté par Carmel Raîche et Martin Doiron, vol. 5, onglet 37, p. 1572, à la p. 1574; Dossier du défendeur, Fernand Losier et al., «Circonscription électorale d'Acadie-Bathurst» présenté à la Commission, vol. 5, onglet 40, p. 1592, à la p. 1594.
31 Dossier des demandeurs, Rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Nouveau-Brunswick 2003, vol. 1, onglet 5, p. 67, aux p. 84 et 85.
32 Figueroa c. Canada (Procureur Général), [2003] 1 R.C.S. 912, au par. 59.
33 La Reine c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103.
34 Figueroa, précité, note 32.
35 Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226, au par. 34.
36 Dossier du défendeur, transcription de l'audience publique (Acadie-Bathurst) de la Commission à Caraquet, 5 septembre 2002, vol. 1, onglet 3, p. 259, aux p. 401à 403.
37 Dossier du défendeur , transcription de l'audience publique (Madawaska-Restigouche) de la Commission à Saint- Quentin, 3 septembre 2002, vol. 1, onglet 1, p. 67, à la p. 68.
38 Dossier du défendeur, transcription de l'audience publique (Acadie-Bathurst) de la Commission à Caraquet, 5 septembre 2002, vol. 1, onglet 3, p. 259, aux p. 309 et 310.
39 Idem, à la p. 322.
40 Dossier du défendeur, transcription de l'audience publique (Beausejour) de la Commission à Shediac, 17 octobre 2002, vol. 3, onglet 9, p. 1034, aux p. 1045, 1051 et 1095.
41 Dossier des demandeurs, rapport de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour le Nouveau-Brunswick 2003, vol. 1, onglet 5, p. 67, à la p. 118.
42 Idem, à la p. 119.
43 Selon l'intervenante, c'est l'arrêt suivant qui devrait s'appliquer parmi d'autres éléments logiques découlant de cette interprétation, Lalonde c. Ontario (Commission de restructuration des services de santé), (2001), 56 O.R. (3d) 577 (C.A.), et voir mémoires de faits et de droits de l'intervenante, commissaire aux langues officielles, aux par. 53 à 58.
44 Ayangma c. Canada (2002), 221 F.T.R. 81 (C.F. 1re inst.), au par. 65; confirmé par (2003), 303 N.R. 92 (C.A.F.), permission d'appeler à la Cour suprême du Canada refusée, [2003] S.C.C.A. no 146 (QL) (Ayangma); Canada (Commissaire aux langues officielles) c. Canada (Ministère de la Justice) (2001), 35 Admin. L.R. (3d) 46 (C.F. 1re inst.), aux par. 90 et 91; Devinat c. Canada (Commission de l'immigration et du statut de réfugié), [2000] 2 C.F. 212 (C.A.) (Devinat); Forum des maires de la Péninsule acadienne c. Canada (Agence d'inspection des aliments), [2004] 1 F.C.R. 136 (T.D.).
45 Devinat, précité, note 44 aux par. 26 à 28.
46 Ayangma (C.A.), précité, note 44 au par. 31.
47 Devinat, précité, note 44 au par. 30.
48 L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14)
49 Voir l'annexe du procureur général, représentations supplémentaires au sujet des réparations demandées déposée le 3 mai 2004 par le procureur du défendeur (para. 10 à 13 inclusivement, aux p. 2 à 6 inclusivement).