T-1822-97
2004 CF 1672
Johnson & Johnson Inc., Expandable Grafts Partnership et Cordis Corporation (demanderesses)
c.
Boston Scientific Ltd./Boston Scientifique Ltée (défenderesse)
Répertorié: Johnson & Johnson Inc. c. Boston Scientifique Ltée (C.F.)
Cour fédérale, juge Martineau--Toronto, 24 juin 2003; Ottawa, 30 novembre 2004.
Brevets -- Contrefaçon -- Requête pour jugement sommaire rejetant l'action en contrefaçon intentée contre la défenderesse et déclarant invalides les brevets présumés contrefaits (brevets en cause) -- Les demandeurs des brevets en cause (demanderesses) ont payé la taxe de dépôt des petites entités alors que c'est celle des grandes entités qui était exigible -- Les demandes ont ensuite été corrigées par le paiement de la différence entre les deux taxes -- Le commissaire aux brevets a accepté le paiement et a permis que les demandes suivent leur cours jusqu'à la délivrance des brevets -- L'omission de la défenderesse d'invoquer expressément les art. 59 et 60 de la Loi sur les brevets dans ses actes de procédure n'est pas fatale car seuls les faits substantiels doivent être allégués et les demanderesses étaient au courant de la substance des allégations de la défenderesse se rapportant aux art. 59, 60 -- Les demanderesses ne satisfaisaient pas à la définition de petite entité à la date du dépôt des demandes -- La Cour a quand même examiné Dutch Industries Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets) concernant la date devant servir à la détermination du statut de petite entité -- Le commissaire aux brevets n'avait pas compétence pour accepter des paiements complémentaires, le statut de l'entité est établi une fois pour toute lorsque le régime des brevets entre en jeu pour la première fois au Canada, non à la date du dépôt d'une demande de brevet dans un autre pays -- Les demanderesses ont incorrectement acquitté la taxe de petite entité -- Aucune des demandes de brevet n'était validement déposée -- Les taxes de dépôt et de complètement n'ayant pas été payées et aucune demande de rétablissement n'ayant été soumise dans le délai prescrit, les demandes sont devenues abandonnées de façon permanente -- Le commissaire n'a pas le pouvoir de renoncer à une partie de la taxe de dépôt -- Seul le gouverneur en conseil peut prendre des règles ou règlements régissant le paiement de taxes et les délais ou modalités de paiement de ces taxes -- L'art. 77 de la Loi sur les brevets ne corrige pas les vices d'une demande de brevet, il ne fait que créer une présomption réfutable de validité -- Les demanderesses ne se sont pas conformées à l'exigence de l'art. 77 que toutes les conditions de la délivrance d'un brevet valide aient été remplies -- L'art. 3.1 des Règles sur les brevets (entré en vigueur le 1er janvier 2004), n'est pas applicable puisque les brevets en cause sont régis par les dispositions de la Loi et des Règles telles qu'elles étaient libellées avant le 1er octobre 1989 -- Quoi qu'il en soit, l'art. 3.1 ne permet pas d'éviter les conséquences juridiques résultant d'une erreur dans le paiement de la taxe puisqu'il est subordonné à la Loi sur les brevets, laquelle n'est pas touchée par la modification des Règles -- Requête accueillie.
Pratique -- Parties -- Qualité pour agir -- La défenderesse n'a pas à recourir au contrôle judiciaire car elle conteste la délivrance des brevets aux demanderesses, contestation prévue aux art. 59 et 60 de la Loi sur les brevets -- La défenderesse n'étant pas directement touchée par la question, elle n'a pas qualité pour contester une décision administrative concernant des rivales.
Pratique -- Jugement sommaire -- Bien que les tribunaux répugnent généralement à trancher des questions de brevets dans le cadre de requêtes en jugement sommaire, la décision en l'espèce ne repose pas sur des témoignages d'experts -- Les faits sont principalement de nature documentaire et ils ne sont pas contestés -- Les questions portent strictement sur la détermination des dates de dépôt et sur les conséquences juridiques du défaut d'acquitter les taxes réglementaires -- La preuve est suffisante pour déterminer si la non-observation de la Loi invalide les brevets -- L'instruction ne permettrait pas d'ajouter des éléments de preuve importants concernant les questions de fait et de droit en cause -- L'affaire se prête au jugement sommaire.
La défenderesse a présenté une requête pour jugement sommaire rejetant toutes les prétentions des demanderesses dans l'action en contrefaçon intentée contre elle et déclarant nuls et de nul effet les brevets que ces dernières prétendent contrefaits (les brevets en cause). La défenderesse fait valoir que les demanderesses n'ont pas acquitté la taxe de dépôt et la taxe de complètement réglementaires et que les demandes de brevet n'ont donc jamais été validement déposées ou doivent être tenues pour abandonnées.
Les demandes de brevet ont été déposées avant le 1er octobre 1989, et les demanderesses ont acquitté la taxe de dépôt exigible d'une petite entité, bien qu'elles aient été une grande entité. Ce n'est que plus tard (hors du délai de 12 mois prévu par la Loi pour le rétablissement d'une demande abandonnée) qu'elles ont décidé d'effectuer un versement correctif équivalant à la différence entre les montants de taxe applicables aux petites et aux grandes entités. Le commissaire paraît avoir accepté que ce paiement additionnel, non accompagné de la taxe de complètement, corrige le versement de taxe insuffisant et a permis que les demandes suivent leur cours jusqu'à la délivrance des brevets. C'était avant que la Section de première instance de la Cour fédérale et la Cour d'appel fédérale rendent leur décision dans Dutch Industries Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets) et statuent que ledit commissaire n'a pas compétence pour accepter des paiements complémentaires après l'expiration des délais prescrits par la Loi sur les brevets. Par suite de ces décisions, le gouvernement du Canada a annoncé son intention de modifier la Loi sur les brevets pour établir un mécanisme permettant de corriger rétroactivement des paiements de taxes. Toutefois, il n'avait adopté aucune modification à la date de la présente décision, et la Cour a donc statué en fonction du droit actuellement applicable (c.-à-d. conformément aux dispositions de la Loi sur les brevets, autres que l'article 46, telles qu'elles étaient libellées juste avant le 1er octobre 1989).
Il s'agissait de déterminer si les demandeurs des brevets en cause pouvaient prétendre au statut de petite entité à la date du dépôt des demandes et, s'ils ne le pouvaient pas, quelles étaient les conséquences juridiques du défaut des demanderesses d'acquitter la taxe de dépôt et la taxe de complètement réglementaires dans le délai prévu.
Jugement: la requête doit être accueillie.
L'argument des demanderesses selon lequel la défenderesse aurait dû présenter une demande de contrôle judiciaire n'est pas bien fondé. Bien que la délivrance d'un brevet soit une décision finale, la défenderesse ne cherchait pas le contrôle judiciaire de la décision du commissaire au sujet de ses propres demandes de brevet, elle contestait plutôt la délivrance des brevets en cause aux demanderesses. Les articles 59 et 60 de la Loi sur les brevets permettent ce type de contestation, notamment pour excès de compétence. De plus, la défenderesse n'était pas directement touchée par l'objet de la demande ainsi que l'exige l'article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales et n'avait donc pas qualité pour contester des décisions administratives concernant un rival, faisant en sorte que le contrôle judiciaire n'était pas la procédure appropriée en l'espèce.
L'omission de la défenderesse de mentionner expressément les articles 59 (jugement inter partes) et 60 (jugement in rem) dans ses actes de procédure n'était pas fatale. Seuls les faits substantiels devaient être allégués, non les conséquences juridiques en découlant. Les actes de procédure déposés par la défenderesse indiquaient, dans leur essence, les fins recherchées par la partie ainsi que les faits particuliers et les dispositions de la Loi sur les brevets sur lesquels elle s'appuyait pour faire valoir que les brevets en cause étaient nuls et invalides. Les demanderesses étaient au courant de la substance des arguments de la défenderesse relativement aux articles 59 et 60, et cette dernière pouvait donc invoquer ces dispositions.
La présente espèce se prêtait au jugement sommaire. Il n'était pas nécessaire que la décision repose sur des témoignages d'experts. Les faits se rapportant au dépôt des demandes de brevet et à l'admissibilité des demandeurs de brevet à se réclamer du statut de petite entité étaient principalement d'ordre documentaire, et ils n'étaient pas contestés. Il s'agissait strictement de déterminer quelle était la date de dépôt de chacune des demandes de brevet et quelles conséquences juridiques découlaient du défaut d'avoir acquitté la taxe de dépôt et la taxe de complètement prescrites, le cas échéant, dans le délai prévu par la loi. Il existait suffisamment d'éléments de preuve pour permettre à la Cour de déterminer si les brevets des demanderesses étaient invalides ou nuls du fait du non-respect des dispositions de la Loi sur les brevets concernant la taille de l'entité et les modalités de parachèvement des demandes de brevet, et une instruction n'aurait pas ajouté d'éléments de preuve importants relativement aux questions de fait et de droit en cause.
Les demanderesses ne satisfaisaient pas à la définition de «petite entité» aux dates de dépôt des demandes de brevet, même pour ce qui est des demandes présentées aux États-Unis, puisqu'elles avaient conclu des accords de licence leur procurant un revenu brut annuel de plus de deux millions de dollars.
La Cour a quand même examiné les décisions de la Section de première instance de la Cour fédérale et de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Dutch Industries Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets), portant sur la question de la date devant servir à la détermination du statut de petite entité. La Cour d'appel fédérale a confirmé que la Loi ne permettait pas au commissaire d'accepter des paiements complémentaires. Elle a statué que le statut de l'entité est établi une fois pour toute à la date où le régime des brevets entre en jeu pour la première fois et que le demandeur de brevet conserve ce statut à l'égard de la demande de brevet et pendant la durée de tout brevet pouvant en découler.
Contrairement aux prétentions des demanderesses, rien dans la Loi ou dans les Règles sur les brevets n'indique que le statut de petite entité doit être déterminé en fonction de la date du dépôt d'une demande de brevet dans un autre pays. Les obligations du Canada découlant de traités internationaux n'exigent pas une telle interprétation. La taxe de dépôt exigible des petites entités demandant un brevet canadien est établie à la date où le régime canadien des brevets entre en jeu, c.-à-d. lors du dépôt de la demande.
Les demanderesses ont erronément payé la taxe de dépôt comme petite entité pour chacune de leur demande de brevet canadien, et aucune de leur demande n'était valablement déposée (Règles sur les brevets, articles 32, 34). Puisque la taxe de dépôt et la taxe de complètement (exigible lorsque la taxe de dépôt n'est pas entièrement acquittée lors du dépôt) n'ont pas été versées en totalité dans les 12 mois suivant le dépôt, les demandes ont été tenues pour abandonnées (Loi sur les brevets, paragraphe 30(1)). L'abandon est devenu permanent lorsque les demanderesses ont omis de demander le rétablissement des demandes dans les 12 mois suivant la date où elles ont été tenues pour abandonnées (Loi sur les brevets, paragraphe 30(2)).
Ni la Loi ni les Règles sur les brevets ne donnent au commissaire le pouvoir discrétionnaire de renoncer à une partie de la taxe de dépôt. L'article 26 des Règles sur les brevets actuelles permet certes au commissaire de proroger des délais, mais le demandeur de brevet doit solliciter la prorogation et verser les droits exigés dans le délai imparti, ce qui n'a pas été fait en l'espèce. Quoi qu'il en soit, c'est au seul gouverneur en conseil qu'il appartient, aux termes de l'article 12 de la Loi sur les brevets, de prendre des règles ou règlements régissant le paiement de taxes et, notamment, les délais ou les modalités de paiement de ces taxes. Le commissaire ne jouit donc pas du pouvoir de renoncer à une partie de la taxe de dépôt ou à la totalité des taxes de complètement ou de rétablissement.
L'article 77 de la Loi sur les brevets (maintenant abrogé) n'a pas pour effet de corriger les vices d'une demande de brevet, il ne fait que créer une présomption réfutable de validité. Comme les demandes de brevet n'avaient pas été complétées conformément aux Règles, elles ne satisfaisaient pas à l'exigence de l'article 77 que «toutes les conditions de la délivrance d'un brevet valide [. . .] [aie]nt été remplies».
L'entrée en vigueur le 1er janvier 2004 de l'article 3.1 des Règles sur les brevets n'a pas eu d'effet sur l'issue de la requête puisque la validité des brevets devait être déterminée suivant les dispositions de la Loi sur les brevets qui étaient en vigueur immédiatement avant le 1er octobre 1989. De toute manière, l'article 3.1 ne permet pas aux demanderesses d'éviter les conséquences juridiques résultant d'une erreur dans le paiement de la taxe. Le délai de 12 mois prévu pour compléter les demandes de brevet est établi par la Loi sur les brevets. L'article 3.1 étant une disposition réglementaire, il est subordonné à la loi habilitante, c'est-à-dire à la Loi sur les brevets, laquelle n'est pas touchée par des modifications apportées aux Règles. Par ailleurs, l'article 3.1 n'a pas pour effet de ressusciter rétroactivement des demandes de brevet déjà tenues pour abandonnées. De plus, les demanderesses n'ont jamais fait de «tentative manifeste mais infructueuse» pour verser la taxe, comme l'exige l'article 3.1.
lois et règlements cités
Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4, art. 4, 12 (mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 3), 27 (mod., idem, art. 8), 27.1 (édicté, idem, art. 9), 28 (mod., idem, art. 10; L.C. 1993, ch. 15, art. 33), 30, 40, 41 (mod., idem, art. 16), 42, 46 (mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 16; L.C. 1993, ch. 15, art. 43), 53, 59, 60, 73 (mod. par L.C. 1993, ch. 15, art. 52), 77 (abr. par L.C. 1993, ch. 15, art. 54), 78.1 (édicté, idem, art. 55; 2001, ch. 10, art. 3), 78.2 (édicté par L.C. 1993, ch. 10, art. 55; L.C. 2001, ch. 10, art. 3).
Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14), 18(3) (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4), 18.1 (édicté, idem, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27), 50(1)b) (mod., idem, art. 46). |
Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, règles 1 (mod. par DORS/2004-283, art. 2), 174, 213, 214, 215, 216, 217, 218, 219. |
Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133. |
Règles modifiant les Règles sur les brevets, DORS/2003-208. |
Règles sur les brevets, C.R.C., ch. 1250, art. 2 «inventeur indépendant» (mod. par DORS/85-383, art. 1), «petite entité» (mod., idem), «petite entreprise» (mod., idem), 11, 32, 34, 61, 137, ann. II (mod. par DORS/85-383, art. 6; 89-452, art. 17, 21). |
Règles sur les brevets, DORS/96-423, art. 3.1 (édicté par DORS/2003-208, art. 2), 26, 157. |
jurisprudence citée
décisions appliquées:
Dutch Industries Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets), [2002] 1 C.F. 325; (2001), 14 C.P.R. (4th) 499; 209 F.T.R. 260; 2001 CFPI 879; Dutch Industries Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets), [2003] 4 C.F. 67; (2003), 24 C.P.R. (4th) 157; 301 N.R. 152; 2003 CAF 121; autorisation d'appel devant la C.S.C. refusée, [2003] 3 R.C.S. vi; Granville Shipping Co. c. Pegasus Lines Ltd., [1996] 2 C.F. 853; (1996), 111 F.T.R. 189; 7 W.D.C.P. (3d) 217 (1re inst.); Apotex Inc. c. Merck & Co., [2003] 1 C.F. 242; (2002), 214 D.L.R. (4th) 429; 19 C.P.R. (4th) 163; 291 N.R. 96; 2002 CAF 210 autorisationd e pourvoi à la C.S.C. refusée, [2003] 1 R.C.S. v.
décisions examinées:
Johnson & Johnson Inc. c. Arterial Vascular Engineering Canada, Inc., 2004 CF 1673; [2004] A.C.F. no 2041 (QL); Johnson & Johnson Inc. c. Boston Scientifique Ltée (2004), 328 N.R. 82; 2004 CAF 354; Monsanto Co. c. Canada (Commissaire aux brevets) (1999), 1 C.P.R. (4th) 500; 172 F.T.R. 210 (C.F. 1re inst.); DuPont Canada Inc. c. Glopak Inc. (1998), 81 C.P.R. (3d) 44; 146 F.T.R. 301 (C.F. 1re inst.); Cangene Corp. c. Eli Lilly and Co. (1995), 63 C.P.R. (3d) 377; 101 F.T.R. 238, [1995] A.C.F. no 1241 (QL) (C.F. 1re inst.); Pharmascience Inc. c. Canada (Commissaire aux brevets) (1998), 85 C.P.R. (3d) 59; 161 F.T.R. 65 (C.F. 1re inst.); Dableh c. Ontario Hydro (1993), 50 C.P.R. (3d) 290; 67 F.T.R. 241, [1993] A.C.F. no 924 (QL) (C.F. 1re inst.); Re Vandervell's Trust (No. 2), [1974] 3 All E.R. 205 (C.A.); Pallmann Maschinenfabrik G.m.b.H. Co. KG c. CAE Machinery Ltd. (1995), 62 C.P.R. (3d) 26; 98 F.T.R. 125, [1995] A.C.F. no 898 (QL) (C.F. 1re inst.); Hudson Luggage Supplies Inc. c. Tormont Publications Inc. (1995), 65 C.P.R. (3d) 216; 109 F.T.R. 18, [1995] A.C.F. no 1748 (QL) (C.F. 1re inst.); Pfizer Canada Inc. c. Canada (Procureur général), [2003] 4 C.F. 95; (2003), 224 D.L.R. (4th) 178; 24 C.P.R. (4th) 1; 301 N.R. 376; 2003 CAF 138; confirmant [2003] 1 C.F. 423; (2002), 20 C.P.R. (4th) 193; 221 F.T.R. 130; 2002 CFPI 706.
décisions citées:
Procureur général du Canada (Le) c. Cylien, [1973] C.F. 1166; (1973), 43 D.L.R. (3d) 590 (C.A.); Singh c. Canada (Secrétaire d'État) (1994), 82 F.T.R. 68; 27 Imm. L.R. (2d) 176 (C.F. 1re inst.); Cynamid Agricultural de Puerto Rico, Inc. c. Commissaire des brevets et autre (1983), 74 C.P.R. (2d) 133 (C.F. 1re inst.); Glaxo Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1990), 68 D.L.R. (4th) 761; 31 C.P.R. (3d) 29; 107 N.R. 195 (C.A.F.); confirmant [1988] 1 C.F. 422; (1987), 43 D.L.R. (4th) 273; 16 C.I.P.R. 55; 18 C.P.R. (3d) 206; 16 F.T.R. 81 (1re inst.); Pfizer Canada Inc. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et al. (1986), 12 C.P.R. (3d) 438 (C.A.F.); Apotex Inc. c. Canada (Procureur général), [1986] 2 C.F. 233; (1986), 1 C.I.P.R. 53; 9 C.P.R. (3d) 193; 1 F.T.R. 310 (1re inst.); Apotex Inc. c. Canada (Procureur général) (1993), 48 C.P.R. (3d) 296; 63 F.T.R. 197 (C.F. 1re inst.); Sno Jet Ltd. c. Bombardier Limitée (1975), 22 C.P.R. (2d) 224 (C.F. 1re inst.); Inline Fiberglass Ltd. c. Omniglass Ltd. (1993), 48 C.P.R. (3d) 214 (C.F. 1re inst.); Maple Creek Manufacturing & Marketing Inc. v. Hanson Marketing Inc. (1997), 72 C.P.R. (3d) 417; 35 O.T.C. 389 (Div. gén. Ont.); In re Robinson's Settlement, Gant v. Hobbs, [1912] 1 Ch. 717 (C.A.); Esso Petroleum Co. Ltd. v. Southport Corporation, [1956] A.C. 218 (H.L.); Glisic c. Canada, [1988] 1 C.F. 731; (1987), 80 N.R. 39 (C.A.); TWR Inc. c. Walbar of Canada Inc. (1991), 132 N.R. 161 (C.A.F.); Prêt-à-Porter Orly Ltd. c. Canada (1994), 176 N.R. 149 (C.A.F.); Kirin-Amgen Inc. c. Hoffmann-LaRoche Ltd. (2000), 11 C.P.R. (4th) 78; 267 N.R. 150 (C.A.F.); 384238 Ontario Limited c. La Reine du chef du Canada, [1984] 1 C.F. 661; (1983), 8 D.L.R. (4th) 676; [1984] C.T.C. 523; 84 DTC 6101; 52 N.R. 206 (C.A.); R. c. Imperial General Properties Limited, [1985] 1 C.F. 344; (1985), 16 D.L.R. (4th) 615; [1985] 1 CTC 40; 85 DTC 5045; 56 N.R. 358 (C.A.); Conohan c. Cooperators (The), [2002] 3 C.F. 421; (2002) 40 C.C.L.I. (3d) 171; 219 F.T.R. 317; 286 N.R. 364; 2002 CAF 60; Entreprises A & B Cormier Ltée c. Canada (Ministre du Revenu national -- M.R.N.), [1992] A.C.I. no 574 (QL); Inhesion Industrial Co. c. Anglo Canadian Mercantile Co. (2000), 6 C.P.R. (4th) 362 (C.F. 1re inst.); Feoso Oil Ltd. c. Sarla (Le), [1995] 3 C.F. 68; (1995), 184 N.R. 307 (C.A.); F. Von Langsdorff Licensing Ltd. c. S.F. Concrete Technology Inc. (1999), 1 C.P.R. (4th) 88; 165 F.T.R. 74 (C.F. 1re inst.); Hayden Manufacturing Co. c. Canplas Industries Ltd. (1996), 68 C.P.R. (3d) 186; 115 F.T.R. 20 (C.F. 1re inst.); American Cyanamid Co. c. Bio Agri Mix Ltd. (1997), 73 C.P.R. (3d) 277; 127 F.T.R. 274 (C.F. 1re inst.); Bayer AG c. Apotex Inc. (1998), 84 C.P.R. (3d) 23; 156 F.T.R. 303 (C.F. 1re inst.); Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27; (1998), 36 O.R. (3d) 418; 154 D.L.R. (4th) 193; 50 C.B.R. (3d) 163; 33 C.C.E.L. (2d) 173; 221 N.R. 241; 106 O.A.C. 1; Bell ExpressVu Limited Partnership c. Rex, [2002] 2 R.C.S. 559; (2002), 212 D.L.R. (4th) 1; [2002] 5 W.W.R. 1; 166 B.C.A.C. 1; 100 B.C.L.R. (3d) 1; 18 C.P.R. (4th) 289; 93 C.R.R. (2d) 189; 287 N.R. 248; 2002 CSC 42; Rooke c. Canada, [2003] 1 C.T.C. 208; 2002 DTC 7442; 295 N.R. 125; 2002 CAF 393; Qu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 3 C.F. 3; (2001), 18 Imm. L.R. (3d) 288; 284 N.R. 201; 2001 CAF 399; Giffin c. Canstar Sports Group Inc. (1990), 30 C.P.R. (3d) 238 (C.F. 1re inst.); Hoffmann-La Roche c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1998), 85 C.P.R. (3d) 67 (C.F. 1re inst.); conf. par (2000), 9 C.P.R. (4th) 90; 259 N.R. 392 (C.A.F.); Gustavson Drilling (1964) Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1977] 1 R.C.S. 271; (1975), 66 D.L.R. (3d) 449; [1976] CTC 1; 75 DTC 5451; 7 N.R. 401; Baker Petrolite Corp. c. Canwell Enviro-Industries Ltd., [2003] 1 C.F. 49; (2002), 211 D.L.R. (4th) 696; 17 C.P.R. (4th) 478; 288 N.R. 201; 2002 CAF 158.
doctrine citée
Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, Gaz. C. 2003.II.1659.Sullivan, Ruth.
Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes, 4th ed. Toronto: Butterworths, 2002.
REQUÊTE en jugement sommaire pour rejet de l'action en contrefaçon de brevet intentée contre la défenderesse et pour faire déclarer invalides, nuls et de nul effet les brevets présumés contrefaits. Requête accueillie.
ont comparu:
Donald M. Cameron, R. Scott MacKendrick et Allyson Whyte Nowak pour les demanderesses.
Ronald E. Dimock, David M. Reive and Michael D. Crinson pour la défenderesse.
avocats inscrits au dossier:
Ogilvy Renault, Toronto, pour les demanderesses.
Dimock Stratton LLP, Toronto, pour la défenderesse.
Voici la version française des motifs de l'ordonnance et ordonnance rendus par
[1]Le juge Martineau: La présente requête s'inscrit dans une action en contrefaçon dans laquelle les demanderesses allèguent que la défenderesse a contrefait les brevets canadiens no 1281505 (le brevet 505), 1338303 (le brevet 303) et 1330186 (le brevet 186) (collectivement appelés les brevets en cause).
[2]La défenderesse demande à la Cour de rendre un jugement sommaire rejetant toutes les prétentions des demanderesses et déclarant les brevets en cause nuls et de nul effet. Elle requiert également l'invalidation des brevets ainsi que les dépens de la présente requête et de l'action.
[3]La défenderesse fait notamment valoir dans ses actes de procédure que les demandeurs des brevets en cause n'ont pas acquitté la taxe de dépôt et la taxe de complètement réglementaires. Elle soutient que ni la Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4 (la Loi) (telle que modifiée) ni les Règles sur les brevets, C.R.C. 1978, ch. 1250 (telles que modifiées), ne confèrent au commissaire aux brevets (le commissaire) le pouvoir discrétionnaire d'attribuer une date de dépôt à une demande pour laquelle les taxes prescrites n'ont pas été acquittées ou d'exempter un demandeur de toute partie desdites taxes et que, par conséquent, les demandes de brevet n'ont jamais été validement déposées ou doivent être tenues pour abandonnées puisque leurs auteurs n'ont pas pris les mesures correctives nécessaires dans le délai imparti.
[4]Les demanderesses contestent la requête, et j'examinerai les motifs qu'elles invoquent après avoir donné un aperçu général du cadre législatif applicable, lequel sera suivi d'un bref résumé des faits pertinents, lesquels ne sont pas contestés.
CADRE LÉGISLATIF
[5]Le droit canadien en matière de brevets est un droit d'origine entièrement législative. Le droit d'obtenir un brevet et les exigences auxquelles un demandeur de brevet doit satisfaire sont régis exclusivement par la Loi sur les brevets et par son règlement d'application, les Règles sur les brevets. Au Canada, le commissaire accorde un brevet lorsque toutes les conditions prévues ont été remplies. Les dispositions applicables de la Loi et des Règles sur les brevets sont reproduites à l'annexe A. Les brevets en cause ont été délivrés après le 1er octobre 1989, mais toutes les demandes de brevets, principalement la demande visant le brevet 186, ayant été déposées avant cette date, toutes les dispositions de la Loi sur les brevets applicables sont celles qui étaient en vigueur immédiatement avant le 1er octobre 1989 (paragraphe 78.2(2) [édicté par L.C. 1993, ch. 15, art. 55; 2001, ch. 10, art. 3] de la Loi sur les brevets actuelle), exception faite de l'article 46 [mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 16; L.C. 1993, ch. 15, art. 43] (relatif à la durée du brevet).
[6]La Loi et les Règles sur les brevets énoncent toutes les modalités du processus de demande de brevet ainsi que les attributions du commissaire en matière de réception et de traitement des demandes et de délivrance des brevets. Pour obtenir un brevet, les inventeurs, ou leurs représentants légaux, doivent soumettre une pétition au commissaire et satisfaire aux autres exigences de la Loi sur les brevets (article 27 de la Loi), dont l'une est que la demande soit «complétée» dans les 12 mois suivant son dépôt (paragraphe 30(1) de la Loi). Les Règles sur les brevets établissent à quel moment une demande est «censée complète», soit lorsque le demandeur fournit certains documents et acquitte les «taxes prescrites» (articles 32 et 34 des Règles).
[7]Les taxes applicables au dépôt de demandes de brevet ou à toute autre formalité prévue par la Loi sur les brevets ou par un de ses règlements d'application ainsi que le paiement de ces taxes et, notamment, la date et les modalités de leur acquittement sont régis par des règles et des règlements pris par le gouverneur en conseil (paragraphe 12(1) [mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 3] de la Loi). Celui qui «dépose» une demande de brevet doit acquitter la taxe de dépôt prescrite. Le montant exact de la taxe à payer pour déposer et compléter une demande est indiqué à l'annexe II des Règles sur les brevets (article 11 des Règles); il varie selon que l'auteur de la demande a ou non qualité de «petite entité». Une petite entité s'entend d'un «inventeur indépendant» ou d'une «petite entreprise», expressions qui sont à leur tour définies à l'article 2 [mod. par DORS/85-383, art. 1] des Règles sur les brevets. Il ressort de ces définitions qu'une petite entité exclut les personnes physiques qui ont cédé un droit sur l'invention à une entité qui a à son tour concédé une licence à son égard à une personne morale comptant plus de 100 employés ou ayant des recettes annuelles brutes de plus de deux millions de dollars. En outre, le no 8 de l'annexe II des Règles sur les brevets prévoit également une taxe supplémentaire qui doit être acquittée pour le «[c]omplètement d'une demande non complète à la date de son dépôt». Cette taxe de complètement s'ajoute à la taxe de dépôt lorsque le demandeur n'accomplit pas toutes les formalités prévues aux articles 32 et 34 des Règles sur les brevets au moment du dépôt de la demande.
[8]Le paragraphe 30(1) de la Loi sur les brevets prévoit également que si la demande n'est pas complétée dans les 12 mois suivant son dépôt, elle est «tenue pour avoir été abandonnée». Aux termes du paragraphe 30(2) de la Loi, une demande abandonnée peut être rétablie sur présentation d'une pétition au commissaire dans les 12 mois suivant la date de l'abandon réputé et sur paiement de la taxe prescrite, s'il est démontré à la satisfaction du commissaire que le défaut de compléter ou de poursuivre la demande dans le délai prévu n'était pas raisonnablement évitable. L'article 61 des Règles sur les brevets exige que la pétition soit attestée d'un affidavit. En outre, le paragraphe 30(3) de la Loi sur les brevets énonce qu'une «demande [. . .] rétablie garde la date de son dépôt original».
[9]Le 1er octobre 1989, sont entrées en vigueur des modifications apportées à la Loi sur les brevets, lesquelles exigeaient notamment le paiement d'une taxe périodique. Cette nouvelle exigence était prévue aux articles 27.1 [édicté par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 9] et 46 [mod., idem, art. 16] de la Loi sur les brevets modifiée. Le paragraphe 27.1(1) énonce que le demandeur d'un brevet est tenu de payer au commissaire, afin de maintenir sa demande en état, les taxes réglementaires pour chaque période réglementaire, et le paragraphe 27.1(2), que la demande de brevet est réputée abandonnée si les taxes applicables n'ont pas été acquittées avant l'expiration de la période. Le paragraphe 27.1(3) ajoute que la présomption d'abandon est annulée sur dépôt d'une requête au commissaire dans le délai prescrit et sur paiement des taxes réglementaires et que la demande ainsi rétablie conserve sa date de dépôt initiale et sa date de priorité, le cas échéant.
[10]Comme il en sera question en détail plus loin, la défenderesse soutient qu'à la date du dépôt des demandes de brevet, les auteurs de la demande n'ont acquitté que la taxe exigible d'une petite entité. Plus tard, hors du délai de 12 mois prévu au paragraphe 30(2) de la Loi sur les brevets pour le rétablissement d'une demande abandonnée, ils ont voulu acquitter la taxe exigible d'une grande entité en ajoutant à la taxe de dépôt des petites entités, déjà payée, un versement correctif équivalant à la différence entre les deux montants. Le commissaire paraît avoir accepté que ce paiement additionnel, non accompagné de la taxe de complètement, corrige le versement de taxe insuffisant et a permis que les demandes suivent leur cours jusqu'à la délivrance des brevets. Avant les décisions rendues par notre Cour [alors la Cour fédérale, Section de première instance] et par la Cour d'appel [fédérale] dans l'affaire Dutch Industries Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets), [2002] 1 C.F. 325 (1re inst.) et [2003] 4 C.F. 67 (C.A.), il était d'usage pour le commissaire de recevoir des paiements complémentaires corrigeant des versements de taxe insuffisants. Il semble que la date de tels paiements ait été sans conséquence; ils étaient reçus même après l'expiration des délais prescrits pour acquitter la taxe ou pour accomplir les mesures correctives prévues par la Loi sur les brevets.
[11]Toutefois, notre Cour et la Cour d'appel fédérale ont toutes deux statué, dans l'affaire Dutch Industries Ltd., que le commissaire n'avait pas compétence pour accepter les paiements complémentaires reçus après l'expiration du délai prévu par la Loi sur les brevets. En raison de l'interprétation stricte donnée à la Loi et du pouvoir limité du commissaire d'accepter des paiements complémentaires tardifs, les demandeurs et les titulaires de brevet qui n'ont pas acquitté un montant de taxe suffisant peuvent donc se trouver dans l'incapacité de corriger leur erreur.
[12]Il est évident que notre Cour et la Cour d'appel fédérale étaient conscientes des dures conséquences que leur décision aurait pour les demandeurs et les titulaires de brevet qui n'avaient pas acquitté les taxes prescrites. Comme la juge Sharlow de la Cour d'appel l'a écrit dans l'arrêt Dutch Industries Ltd. (au paragraphe 4), «[d]ans le contexte de l'administration du Bureau des brevets, les conséquences probables [. . .] sont qu'aucun demandeur ou titulaire de brevet n'osera payer de taxes en fonction du barème des "petites entités" parce que toute erreur sur la qualification de "petite entité" risquera de lui faire perdre tous les droits que pourrait lui conférer la demande de brevet et tout brevet pouvant en résulter, à moins que l'erreur ne soit découverte et rectifiée dans le délai prescrit par la loi pour le paiement tardif de la taxe». (Non souligné dans l'original.)
[13]Le 8 août 2003, le gouvernement du Canada a annoncé son intention de modifier la Loi sur les brevets par suite des décisions rendues par notre Cour et par la Cour d'appel fédérale dans Dutch Industries Ltd. Dans le communiqué rendu public à cette date, il a indiqué que «[l]es modifications proposées à la Loi sur les brevets visent à établir un mécanisme permettant de corriger, de façon rétroactive, les taxes versées au tarif applicable à une petite entité plutôt qu'à celui d'une grande entité».
[14]Toutefois, le Parlement n'a encore adopté aucune modification en ce sens. À l'heure actuelle, la forme que pourraient prendre de telles modifications, dont l'effet pourrait être rétroactif, est d'ordre purement hypothétique et non juridique. La défenderesse en l'espèce a droit à ce que la Cour se prononce sur la présente affaire en fonction du droit actuellement applicable. Ce qui m'amène au résumé des faits pertinents pour statuer sur la présente requête en jugement sommaire.
LES FAITS
[15]Les brevets en cause concernent, de façon générale, des «endoprothèses» ou «endoprothèses articulées» gonflables par ballonnets, c'est-à-dire des dispositifs employés pour élargir et renforcer les vaisseaux sanguins. Les endoprothèses jouent en quelque sorte le rôle d'un échafaudage étayant les parois d'un vaisseau afin de garder le passage ouvert.
[16]La demanderesse Expandable Grafts Partnership (EGP) a été propriétaire des brevets en cause de la date de leur délivrance ou redélivrance jusqu'au 26 février 1999, date à laquelle la demanderesse Cordis Corporation (Cordis) en est devenue propriétaire. Cette dernière a cédé la totalité de ses droits dans le brevet, pour le Canada, à la demanderesse Johnson & Johnson (J&J) le 13 juillet 1999.
[17]EGP est une société de personnes qui a été constituée le 30 décembre 1985 par Julio C. Palmaz (Palmaz), Richard Schatz (Schatz) et Philip J. Romano et dont le but principal était de développer et mettre en marché l'endoprothèse vasculaire auto expansible endoluminale (l'invention) visée par les brevets en cause. L'apport de Palmaz à la société consistait en la cession de tous les droits afférents à l'invention pour les États-Unis et les pays étrangers. Plus particulièrement, Palmaz cédait à EGP la demande de brevet américain no 796009, déposée le 7 novembre 1985 (la demande américaine 009) ainsi que toutes les demandes analogues déposées dans d'autres pays.
[18]Le 27 août 1986, au su de Palmaz et Schatz, EGP a conclu un accord de licence avec Ethicon Inc. (Ethicon), une société comptant plus de 100 employés et possédant des réserves supérieures à deux millions de dollars, qui fabrique et vend des dispositifs médicaux et chirurgicaux comme du matériel de suture et des ligatures. L'accord conférait à Ethicon (une filiale en propriété exclusive de Johnson & Johnson) une licence mondiale exclusive à l'égard de «droits de brevets» définis comprenant les équivalents étrangers de la demande américaine 009. Le 15 mars 1989, EGP a modifié la licence concédée à Ethicon, pour y inclure tous les brevets dans le monde portant sur toute endoprothèse vasculaire auto expansible endoluminale et nommant Palmaz ou Schatz comme inventeur. L'alinéa 4.01(a) de l'accord de licence stipulait l'obligation d'Ethicon de verser 3 600 000 $ à EGP à la signature de l'accord; la signature a eu lieu au mois d'août 1986, à la suite de quoi la somme de 3 600 00 $ a été versée dans un compte de banque au nom d'Expandable Grafts Partnership/Ethicon le 2 septembre 1986. Le compte a été fermé le 7 octobre suivant, et le solde de 3 624 320 $ a été déposé dans un compte ouvert au nom d'Expandable Grafts Partnership uniquement. Des chèques payables aux associés d'EGP ont alors été tirés sur ce compte.
[19]Le 6 novembre 1986, Palmaz a soumis au commissaire, par l'intermédiaire de ses agents de brevet, deux demandes de brevet relatives à l'invention, lesquelles ont reçu les numéros 522324 (la demande 324) et 522325 (la demande 325) (collectivement, les demandes de 1986). Ces demandes revendiquaient une date de priorité sur le fondement de la première demande américaine 009, déposée le 7 novembre 1985. La demande 325 revendiquait également une date de priorité se rapportant à une deuxième demande américaine, déposée le 3 novembre 1986. La demande 324 a donné lieu à la délivrance du brevet canadien no 1281504, qui a lui-même été redélivré sous le no 1338303 (le brevet 303). La demande 325 a donné lieu à la délivrance du brevet canadien no 1281505 (le brevet 505). Les deux brevets ont été délivrés à Palmaz.
[20]Dans les deux pétitions et les deux lettres d'accompagnement soumises au commissaire le 6 novembre 1986 relativement aux demandes de 1986, les agents de brevet de Palmaz ont déclaré que ce dernier était une petite entité. La taxe versée à l'égard des demandes de 1986 a été calculée en considérant que Palmaz était une petite entité. Par la suite, les agents de Palmaz ont reconnu que le montant de taxe versé n'était pas suffisant parce que, le 6 novembre 1986, Palmaz n'était pas une petite entité, mais aucune mesure visant à combler le déficit dans le paiement de la taxe n'a été prise dans les délais prévus à l'article 30 de la Loi sur les brevets.
[21]C'est le 30 juin 1989 que les agents de brevet de Palmaz ont fait parvenir au commissaire deux lettres informant ce dernier que Palmaz ne pouvait prétendre au statut de petite entité relativement aux demandes de 1986. Palmaz a donc versé à l'Office de la propriété intellectuelle la somme de 150 $ pour chacune des demandes, soit la différence entre les taxes de dépôt payables par une grande et par une petite entité. Aucune autre taxe, comme la taxe de complètement, n'a été versée. Le commissaire semble avoir accepté ce montant supplémentaire, sans taxe de complètement, pour combler le déficit dans le paiement de la taxe de dépôt, et il a permis que les demandes suivent leur cours jusqu'à la délivrance des brevets.
[22]Le 23 mars 1989, Palmaz et Schatz ont, par l'intermédiaire de leurs agents, déposé une autre demande de brevet relativement à l'invention. Le commissaire a attribué à cette demande le numéro 594694 (la demande de 1989). Cette demande a par la suite donné lieu à la délivrance du brevet canadien no 1330186 (le brevet 186). Comme ils l'avaient fait pour les demandes de 1986, Palmaz et Schatz avaient déclaré qu'ils étaient une petite entité dans la pétition et la lettre d'accompagnement transmises au commissaire. Ils ont plus tard reconnu, par l'intermédiaire de leurs agents, qu'ils avaient acquitté un montant de taxe insuffisant car ils n'avaient pas le statut de petite entité le 23 mars 1989.
[23]En effet, le 10 novembre 1989, les agents de Palmaz et Schatz ont informé le commissaire que leurs clients n'étaient pas une petite entité le 23 mars 1989 et qu'ils n'étaient donc pas admis à payer la taxe prévue pour les petites entités, et ils ont versé un montant supplémentaire pour «corriger» rétroactivement le paiement original insuffisant. Toutefois, ils n'ont versé aucune taxe additionnelle, telle la taxe de complètement. Le commissaire semble avoir accepté ce montant supplémentaire pour combler le déficit dans le paiement de la taxe de dépôt et a permis que la demande de 1989 suive son cours jusqu'à la délivrance du brevet.
[24]Relativement à la demande de 1989, la taxe périodique, exigée par les articles 27.1 ou 46 de la Loi sur les brevets modifiée, n'a jamais été payée.
[25]Pendant ce temps, le brevet américain no 4733665 (le brevet américain 665) a été délivré le 29 mars 1988. Ce brevet vise la même invention que le brevet 303. Le 26 avril 1988, le brevet américain no 4739762 (le brevet américain 762), visant la même invention que le brevet 505, a été délivré. Le brevet américain 762 et le brevet 505 revendiquent la date de priorité du 7 novembre 1985, sur la base de la demande américaine 009 déposée à cette date. Le brevet américain 665 et le brevet 303 revendiquent également une priorité fondée sur la demande américaine 009.
LA PRÉSENTE INSTANCE
[26]La Cour a entendu la requête en jugement sommaire de la défenderesse le 24 juin 2003, en même temps qu'une requête semblable présentée par Arterial Vascular Engineering Canada Inc., Medtronic Ave, Inc. et Medtronic of Canada Ltd. (les autres défenderesses), qui sont également poursuivies par les demanderesses dans une autre action en contrefaçon des brevets en cause et d'un quatrième brevet non visé en l'espèce (dossier T-808-98). Les motifs de l'ordonnance qui ont été rendus concurremment dans le dossier T-808-98 [Johnson & Johnson Inc. c. Arterial Vascular Engineering Canada, Inc., 2004 CF 1673] relativement à cette requête analogue incluent par renvoi les présents motifs.
[27]Quelques jours avant l'audition de ces deux requêtes, les demanderesses ont sollicité un ajournement jusqu'à l'entrée en vigueur des Règles modifiant les Règles sur les brevets, DORS/2003-208, qui avaient été publiées dans la partie II de la Gazette du Canada, le 18 juin 2003. J'ai rejeté leur demande, et j'ai donc entendu l'argumentation des parties sur le fond des requêtes en jugement sommaire. J'ai toutefois autorisé les parties à déposer des observations écrites supplémentaires sur les incidences, si incidences il y a, des modifications réglementaires susmentionnées, lesquelles sont entrées en vigueur le 1er janvier 2004.
[28]En outre, alors que l'affaire était en délibéré, le gouvernement du Canada a annoncé le 8 août 2003 son intention de présenter au Parlement des propositions de modification rétroactive de la Loi sur les brevets en réponse à la décision de notre Cour et de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Dutch Industries Ltd.
[29]Le 2 novembre 2003, saisi d'une requête des demanderesses fondée sur l'alinéa 50(1)b) [mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 46] de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 [art. 1 (mod., idem, art. 14)], j'ai ordonné une suspension d'instance d'une période d'un an pour deux motifs: 1) les modifications législatives attendues (rétroactives); 2) la demande d'autorisation de pourvoi relative à la décision Dutch Industries Ltd., pendante devant la Cour suprême du Canada. Cette ordonnance a été portée devant la Cour d'appel fédérale, laquelle a rejeté l'appel (Johnson & Johnson Inc. c. Boston Scientifique Ltée (2004), 328 N.R. 352). Le juge Sexton, J.C.A., qui a rendu le jugement pour la Cour d'appel, a écrit [2004 CAF 354, au paragraph 3]: «le juge des requêtes pouvait à bon escient accorder un sursis en se fondant sur la demande d'autorisation pendante dans l'affaire Dutch Industries». Relativement à l'autre motif fondant l'ordonnance de suspension, le juge Sexton, J.C.A., sans examiner la question, a néanmoins indiqué: «qu'il s'agit d'un rare cas où la Cour refusera de procéder en raison de modifications législatives prévues».
[30]Un an s'est écoulé depuis l'octroi de la suspension. La Cour suprême du Canada a refusé la demande d'autorisation de pourvoi dans l'affaire Dutch Industries Ltd., au cours de cette période, et les modifications législatives rétroactives qui étaient attendues n'ont pas été adoptées. Compte tenu des circonstances particulières de l'espèce et de la jurisprudence applicable, j'ai refusé la prolongation de la suspension que sollicitaient les demanderesses. Il me faut donc statuer sur la présente requête en jugement sommaire en appliquant le droit dans son état actuel.
LES QUESTIONS EN LITIGE ET LA POSITION DES PARTIES
[31]Les questions à trancher en l'espèce sont relativement simples. Il faut déterminer si les actes de procédure révèlent une question sérieuse concernant la validité des brevets en cause. Les faits pertinents n'étant pas contestés, la Cour doit essentiellement déterminer si les demandeurs des brevets en cause, Palmaz et Schatz, pouvaient prétendre au statut de petite entité à la date du dépôt des demandes et, s'ils ne le pouvaient pas, quelles sont les conséquences juridiques de leur défaut d'acquitter la taxe de dépôt réglementaire (ainsi que la taxe de complètement) dans le délai de 12 mois prévu au paragraphe 30(1) de la Loi sur les brevets. Elle doit également trancher la question de savoir si les demandes relatives aux brevets en cause sont réputées avoir été abandonnées de façon permanente étant donné qu'aucune pétition visant leur rétablissement n'a été présentée au commissaire.
[32]La défenderesse avance qu'il n'existe aucune question sérieuse à instruire. Elle soutient, plus particulièrement, que les brevets en cause sont invalides, nuls et de nul effet. EGP ayant reçu une somme d'argent substantielle par suite de l'accord de licence conclu le 27 août 1986 avec Ethicon, Palmaz et Schatz ne pouvaient prétendre au statut de petite entité. Pour corriger les demandes de brevet déposées, ils ont versé au commissaire, le 30 juin 1989, une somme équivalente à la différence entre les taxes de dépôt payables par une petite et par une grande entité. Subsidiairement, la défenderesse fait valoir que, si la Cour détermine que la date de dépôt des demandes de 1986 est le 6 novembre 1986, elles devaient être tenues pour abandonnées le 6 novembre 1987, par application du paragraphe 30(1) de la Loi sur les brevets, parce qu'elles n'ont pas été complétées par le paiement de la taxe exigible d'une grande entité et de la taxe de complètement. Comme aucune pétition visant le rétablissement des demandes de 1986 n'a été faite avant le 6 novembre 1988, l'abandon de ces demandes est devenu permanent, selon la défenderesse. Subsidiairement encore, la défenderesse soutient que, si la Cour détermine que la date de dépôt des demandes de 1986 est le 30 juin 1989--date à laquelle la taxe exigible d'une grande entité a été acquittée au complet--les brevets 505 et 303 sont invalides en raison de la délivrance antérieure des brevets américains 762 et 665, par application de l'alinéa 27(2)b) de la Loi sur les brevets applicable à cette date (postérieurement au 1er octobre 1989).
[33]Quant au brevet 186, la défenderesse affirme qu'il a toujours été invalide, nul et de nul effet, car la taxe exigible d'une grande entité n'avait pas été acquittée à la date du dépôt de la demande. Elle soutient que s'il est déterminé que la date du dépôt de la demande de 1989 est le 23 mars 1989, date à laquelle la demande a été soumise au Canada, la demande devait être tenue pour abandonnée le 23 mars 1991, par application du paragraphe 30(1) de la Loi sur les brevets, parce qu'elle n'avait pas été complétée par le paiement de la taxe exigible d'une grande entité et de la taxe de complètement. La défenderesse ajoute que puisque qu'aucune pétition visant le rétablissement de la demande de 1989 n'a été soumise avant le 23 mars 1991, l'abandon de la demande est devenu permanent à cette date. La défenderesse avance subsidiairement que si la Cour conclut que la date du dépôt de la demande de 1989 est le 10 novembre 1989, date à laquelle la totalité de la taxe de dépôt exigible a été acquittée, cette demande devait être tenue pour abandonnée le 10 novembre 1991, par application de l'article 73 [mod. par L.C. 1993, ch. 15, art. 52] de la Loi sur les brevets alors applicable (postérieurement au 1er octobre 1989), parce que la taxe périodique exigée par le paragraphe 27.1(1) de la Loi sur les brevets alors applicable n'avait pas été acquittée. Elle signale également que puisqu'aucune pétition visant le rétablissement de la demande de 1989 n'a été soumise avant le 10 novembre 1992, l'abandon est devenu permanent à cette date.
[34]Les demanderesses, quant à elles, soutiennent qu'il n'y a pas lieu de procéder par voie de jugement sommaire en l'instance. Elles font valoir, premièrement, que la défenderesse aurait dû présenter une demande de contrôle judiciaire puisqu'elle conteste la décision du commissaire. Deuxièmement, signalant que l'article 59 de la Loi sur les brevets prévoit que le défendeur «peut invoquer comme moyen de défense tout fait ou manquement qui, d'après la présente loi ou en droit, entraîne la nullité du brevet», elles avancent que la défenderesse n'a pas explicitement invoqué l'article 59 et que, l'eût-elle fait, cette disposition ne concernant que des «moyens de défense», elle ne peut servir de fondement au recours recherché dans la requête (c'est-à-dire un jugement déclaratoire d'invalidité, vu la demande reconventionnelle de la défenderesse et l'article 60 de la Loi sur les brevets). Il est à noter que dans le dossier T-808-98, les autres défenderesses invoquent expressément l'article 59 et l'article 60 de la Loi sur les brevets.
[35]Les demanderesses soutiennent en outre que les brevets en cause ont été régulièrement délivrés puisque la taxe exigible a été payée. Selon elles, la date qui sert à déterminer si les demandeurs des brevets sont une petite entité est, en vertu du paragraphe 28(1) de la Loi sur les brevets, la date du dépôt des premières demandes américaines, date à laquelle le régime des brevets est entré en jeu, c'est-à-dire le 7 novembre 1985 (la «date de priorité»). Par conséquent, les demandeurs des brevets pouvaient se réclamer du statut de petite entité.
[36]Les demanderesses ajoutent que l'article 77 de la Loi sur les brevets crée une [traduction] «fiction juridique», suivant laquelle toutes les conditions applicables à la délivrance des brevets ont été remplies à l'égard des brevets en cause et que, par conséquent, lesdits brevets sont réputés avoir été régulièrement délivrés.
[37]Elles invoquent également le paragraphe 4(1) de la Loi sur les brevets et les articles 32, 34 et 137 des Règles sur les brevets, des dispositions relatives aux pouvoirs du commissaire. Il en résulte, selon elles, qu'en 1985 le commissaire a établi la procédure d'acceptation des taxes supplémentaires ou, autrement dit, des versements correctifs de taxe, dans les cas où le statut de petite entité avait été revendiqué à tort. La procédure a été publiée dans un bulletin à diffusion publique. Elle disposait qu'un demandeur de brevet qui s'était réclamé à tort du statut de petite entité devait signaler l'erreur au Bureau des brevets et verser le montant manquant de la taxe de dépôt. Les demanderesses affirment donc que la procédure a été suivie et que les montants de taxe supplémentaires ont été versés et acceptés. Elles estiment donc que le commissaire, en acceptant les frais supplémentaires, a choisi de ne pas modifier les dates de dépôt attribuées aux demandes de brevet. Elles ajoutent que le commissaire n'a pas traité ces demandes comme incomplètes ou abandonnées, pas plus qu'il ne les a déclarées telles.
DÉCISION
[38]Je suis parvenu à la conclusion qu'il y a lieu d'accueillir la présente requête ainsi que la requête analogue présentée par les autres défenderesses dans le dossier T-808-98. Il n'existe pas de question sérieuse à instruire. J'accepte sans réserve les arguments respectivement invoqués à cet égard par la défenderesse en l'espèce et par les défenderesses au dossier T-808-98, arguments qu'il n'est pas nécessaire de reproduire ici. Je rejette l'argumentation des demanderesses. J'ai déjà indiqué quel était le cadre législatif applicable et résumé les faits pertinents, lesquels ne sont pas contestés. Je compléterai les présents motifs en examinant des questions précises, ce que je ferai en suivant l'ordre dans lequel j'ai présenté les arguments des demanderesses.
LA DÉFENDERESSE AURAIT-ELLE DÛ PRÉSENTER UNE DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE?
[39]Selon les demanderesses, la défenderesse conteste les pouvoirs du commissaire. La défenderesse allègue, plus précisément, que le commissaire a erronément délivré les brevets. Vu leur prétention, les demanderesses soutiennent que le recours recherché par la défenderesse annule l'exercice des pouvoirs légaux du commissaire et elles concluent que la défenderesse aurait dû procéder par voie de demande de contrôle judiciaire. Elles prétendent, en s'appuyant sur le paragraphe 18(3) [mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4] de la Loi sur les Cours fédérales, que le recours demandé par la défenderesse ne peut s'exercer que par la présentation d'une demande de contrôle judiciaire, comme ce fut le cas dans l'affaire Dutch Industries Ltd.
[40]Il est bien établi en droit que les actes administratifs ne sont pas tous des «décisions» au sens de l'article 18.1 [édicté idem, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27] de la Loi sur les Cours fédérales. Il doit s'agir d'une «décision» rendue dans l'exercice de pouvoirs conférés par une loi fédérale (Monsanto Co. c. Canada (Commissaire aux brevets) (1999), 1 C.P.R. (4th) 500 (C.F. 1re inst.)). Il doit également s'agir d'une «décision» qui a pour effet juridique de régler l'affaire ou qui vise un tel effet (Procureur général du Canada (Le) c. Cylien, [1973] C.F. 1166 (C.A.); Singh c. Canada (Secrétaire d'État) (1994), 82 F.T.R. 68 (C.F. 1re inst.); Cynamid Agricultural de Puerto Rico, Inc. c. Commissaire des brevets et autre (1983), 74 C.P.R. (2d) 133 (C.F. 1re inst.)). Une fois que le tribunal a exercé sa compétence--en l'espèce, lorsque le commissaire a délivré le brevet--la décision a été rendue. Dans Monsanto, la Cour a statué que la délivrance d'un brevet constitue une décision finale. En l'espèce, toutefois, la défenderesse ne cherche pas à obtenir le contrôle judiciaire d'une décision du commissaire au sujet de ses propres demandes de brevet, elle conteste la délivrance des brevets en cause.
[41]Dans la décision Cangene Corp. c. Eli Lilly and Co. (1995), 63 C.P.R. (3d) 377 (C.F. 1re inst.), le juge en chef adjoint Jerome était saisi d'une demande de prorogation du délai imparti pour présenter une demande de contrôle judiciaire visant une décision du commissaire aux brevets. Bien que la présente situation diffère de cette affaire, les propos que le juge a tenus sont pertinents ([[1995] A.C.F. no 1241] au paragraphe 3):
La Cour n'est pas disposée à accueillir la demande. Il ressort des dispositions de la Loi sur les brevets que le législateur a prévu un ensemble complet de mécanismes qui permettent de contester une décision du commissaire aux brevets. La procédure énoncée dans la Loi et ses règles d'application ne prévoit pas le genre de contrôle judiciaire que la requérante cherche à obtenir en l'espèce.
[42]Plus loin, le juge en chef adjoint Jerome cite l'article 42, qui correspond à l'article 41 [mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 16] actuel de la Loi sur les brevets, et poursuit ainsi [au paragraphe 5]:
Le droit d'appel n'est accordé qu'à la personne qui n'a pas réussi à obtenir un brevet en raison du refus ou de l'opposition du commissaire, c'est-à-dire, en l'occurrence, l'intimée Eli Lilly. Cangene, qui est un tiers, n'a pas un tel droit.
[43]Je conviens que la procédure établie aux articles 59 et 60 de la Loi sur les brevets, dont peut se prévaloir une personne poursuivie pour contrefaçon de brevet ou toute autre personne intéressée, prévoit un ensemble complet de mécanismes permettant de contester une décision du commissaire menant à la délivrance d'un brevet, y compris pour tout motif d'invalidité fondé sur l'excès de compétence.
[44]Cela dit, la défenderesse, en l'espèce, a un intérêt commercial à titre de concurrente et, de ce fait, elle n'est pas «directement touché[e] par l'objet de la demande» au sens de l'article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales. Un nombre substantiel de décisions ont affirmé le principe voulant qu'un tel intérêt ne puisse conférer la qualité nécessaire pour contester des décisions administratives touchant un rival (Glaxo Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1990), 68 D.L.R. (4th) 761 (C.A.F.); confirmant [1988] 1 C.F. 422 (1re inst.); Pfizer Canada Inc. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et al. (1986), 12 C.P.R. (3d) 438 (C.A.F.); Apotex Inc. c. Canada (Procureur général), [1986] 2 C.F. 233 (1re inst.) et Apotex Inc. c. Canada (Procureur général) (1993), 48 C.P.R. (3d) 296 (C.F. 1re inst.)).
[45]Ainsi, dans la décision Pharmascience Inc. c. Canada (Commissaire aux brevets) (1998), 85 C.P.R. (3rd) 59 (C.F. 1re inst.), le juge Pinard, saisi d'une demande de contrôle judiciaire soumise par Pharmascience visant la décision du commissaire d'accepter l'inscription tardive de la défenderesse G.D. Searle & Co. à la phase nationale de demande, a rejeté la demande parce que Pharmascience n'avait pas expliqué de façon satisfaisante le retard d'un an qu'elle avait mis à présenter cette demande, et il a statué également que Pharmascience n'avait pas qualité pour agir car elle n'était pas directement touchée par la décision. Voici ce qu'a dit le juge Pinard, au paragraphe 9 de ses motifs [[1998] A.C.F. no 1735 (QL)]:
Pharmascience n'a pas la qualité pour agir. Aux termes du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur la Cour fédérale, une demande de contrôle judiciaire ne peut être présentée que par «quiconque est directement touché par l'objet de la demande». À mon avis, la seule personne qui est «directement touchée» par les décisions qui sont prises au cours de l'examen d'une demande de brevet par le Bureau canadien des brevets est, en règle générale, le «demandeur» de brevet, au sens de l'article 2 de la Loi sur les brevets. [Non souligné dans l'original.]
[46]De plus, il est évident que la défenderesse n'aurait jamais cherché à faire déclarer les brevets en cause invalides si les demanderesses ne l'avaient pas poursuivie pour contrefaçon. En outre, lorsque le commissaire a pris les décisions d'accepter les paiements tardifs des demandeurs des brevets, décisions qui ont mené à la délivrance des brevets en cause, lesdits demandeurs étaient seuls au courant de ces décisions. Compte tenu des motifs exposés précédemment, il est clair que la demande de contrôle judiciaire ne serait pas la procédure appropriée en l'espèce.
LA DÉFENDERESSE PEUT-ELLE OBTENIR UN JUGEMENT DÉCLARATOIRE PORTANT QUE LES BREVETS EN CAUSE ET LEURS REVENDICA-TIONS SONT INVALIDES ET NULS?
[47]Vu ce qui précède, il faut se demander comment un défendeur peut faire déclarer un brevet invalide et nul sous le régime de la Loi sur les brevets dans le cadre d'une action en contrefaçon intentée contre lui. En vertu du paragraphe 53(1) de cette Loi, le défendeur peut invoquer en défense la nullité du brevet en cause si une allégation importante de la pétition n'est pas conforme à la vérité ou si le mémoire descriptif et les dessins contiennent plus ou moins qu'il n'est nécessaire pour démontrer ce qu'ils sont censés démontrer, et si l'omission ou l'addition est faite volontairement dans le but d'induire en erreur. Un défendeur peut également intenter une action (ou, en l'espèce présenter une demande reconventionnelle) fondée sur l'article 60 de la Loi sur les brevets pour faire déclarer le brevet invalide ou nul, même s'il a été délivré (Monsanto). Un défendeur peut également se prévaloir de l'article 59 de la Loi sur les brevets, lequel énonce que dans toute action en contrefaçon de brevet, le défendeur peut invoquer comme moyen de défense tout fait ou manquement qui entraîne la nullité du brevet.
[48]La défenderesse s'appuie sur les articles 59 et 60 de la Loi sur les brevets. Elle s'appuyait également, au début, sur les dispositions relatives à la nullité des brevets énoncées à l'article 53 de la Loi et affirmait, dans sa défense et demande reconventionnelle que: [traduction] «le brevet est nul si la pétition [. . .] contient quelque allégation importante qui n'est pas conforme à la vérité». Toutefois, la défenderesse a abandonné son argument fondé sur l'article 53 lors de l'audition de la présente requête en jugement sommaire, et elle a modifié l'exposé des faits et du droit qu'elle avait déposé à l'appui de son avis de requête pour en retirer tout ce qui avait trait aux «allégations importantes». Il s'ensuit donc que pour les fins de la présente requête elle demande uniquement à la Cour de se prononcer sur la question de l'invalidité des brevets en cause par suite du défaut des demanderesses d'acquitter correctement la taxe de dépôt et de leur défaut subséquent de compléter les demandes de brevet dans le délai imparti à l'article 30 de la Loi sur les brevets.
[49]À strictement parler, l'article 59 de la Loi sur les brevets ne donne pas droit à un jugement in rem déclarant le brevet invalide. Le rejet d'une action en contrefaçon pour invalidité du brevet par l'opération de l'article 59 constitue un jugement inter partes et non un jugement in rem (Sno Jet Ltd. c. Bombardier Limitée (1975), 22 C.P.R. (2d) 224 (C.F. 1re inst.); Inline Fiberglass Ltd. c. Omniglass Ltd. (1993), 48 C.P.R. (3d) 214 (C.F. 1re inst.)). Par conséquent, alors que l'action en invalidation fondée sur l'article 60 de la Loi sur les brevets est déterminante quant à la validité du brevet dans tout le Canada, le rejet d'une action en contrefaçon par l'opération de l'article 59 de cette Loi n'a valeur de chose jugée qu'entre les parties quant à la validité du brevet (Maple Creek Manufacturing & Marketing Inc. v. Hanson Marketing Inc. (1997), 72 C.P.R. (3d) 417 (Div. gén. Ont.)). Il s'ensuit qu'un défendeur peut se prévaloir de l'article 59 en défense dans une action en contrefaçon et il peut également obtenir un jugement déclaratoire entre les parties portant que le brevet est invalide, ou, sous le régime de l'article 60, il peut obtenir un jugement in rem déclarant le brevet invalide ou nul. Toutefois, l'article 60 doit être invoqué dans une action originale ou dans une demande reconventionnelle (Dableh c. Ontario Hydro (1993), 50 C.P.R. (3d) 290 (C.F. 1re inst.), porté en appel sur d'autres points). À l'inverse, l'article 59 n'a pas à être invoqué dans une demande reconventionnelle puisqu'il s'agit d'un moyen de défense prévu par la loi (Dableh), il peut l'être dans une défense.
[50]Je dois à présent déterminer quelles sont les conséquences du défaut de la défenderesse d'alléguer explicitement les articles 59 et 60 de la Loi sur les brevets dans sa «défense et demande reconventionnelle» modifiée, datée du 11 février 2002 (la défense modifiée).
[51]Les demanderesses font valoir que le défaut d'alléguer adéquatement un élément essentiel d'une prétention ou d'une action est un motif suffisant de rejet, citant à l'appui de leur argument la décision DuPont Canada Inc. c. Glopak Inc. (1998), 81 C.P.R. (3d) 44 (C.F. 1re inst.), aux pages 58 et 59 où la Cour a statué qu'une requête en jugement sommaire pouvait être rejetée pour ce motif. Dans cette décision, la Cour a jugé que le défaut d'alléguer le sujet de la requête (c.-à-d. le produit prétendu contrefaisant) dans la défense et demande reconventionnelle faisait en sorte que ce produit n'avait jamais été en cause et que, par conséquent, DuPont ne pouvait prétendre qu'il contrefaisait son brevet. L'omission a été jugée déterminante pour ce qui était de l'établissement des faits et, par suite, de la décision à rendre. Ce n'est pas le cas en l'espèce.
[52]Notre Cour reconnaît l'importance des actes de procédure, lesquels définissent, tant pour la Cour que pour la partie adverse, les prétentions que fait valoir une partie (In re Robinson's Settlement, Gant v. Hobbs, [1912] 1 Ch. 717 (C.A.), à la page 728; Esso Petroleum Co. Ltd. v. Southport Corporation, [1956] A.C. 218 (H.L), à la page 239; Glisic c. Canada, [1988] 1 C.F. 731 (C.A.); TWR Inc. c. Walbar of Canada Inc. (1991), 132 N.R. 161 (C.A.F.), à la page 179; Prêt-à-Porter Orly Ltd. c. Canada (1994), 176 N.R. 149 (C.A.F.); DuPont, aux pages 58 et 59; Kirin-Amgen Inc. c. Hoffmann-LaRoche Ltd. (2000), 11 C.P.R. (4th) 78 (C.A.F.), à la page 90). En l'espèce, j'estime que les actes de procédure déposés par la défenderesse indiquent, dans leur essence, les fins recherchées par la partie ainsi que les faits particuliers et les dispositions de la Loi sur les brevets sur lesquels elle s'appuie pour faire valoir que les brevets en cause sont nuls et invalides. La Cour s'attend à ce que les règles de la procédure écrite soient respectées afin que chaque partie connaisse l'argumentation de l'autre et ne soit donc pas prise par surprise. Il est évident que les demanderesses étaient au courant de la substance des actes de procédure de la défenderesse relativement aux articles 59 et 60 de la Loi sur les brevets puisqu'elles y ont répondu. L'inclusion dans une demande reconventionnelle d'une allégation d'invalidité du brevet en cause est devenue un moyen de défense accepté et couramment invoqué. Voici ce qu'a indiqué le juge Muldoon dans la décision Dableh c. Ontario Hydro, [[1993] A.C.F. no 924 (QL)] au paragraphe 93:
Il est clair que, en général, de telles personnes, de telles compagnies, ne cherchent pas à faire invalider un brevet à moins qu'elles ne soient elles-mêmes mises en cause dans le cadre d'une action en contrefaçon. Dans certaines circonstances qui peuvent être nombreuses, l'avocat de la partie défenderesse risquerait de se voir reprocher en justice sa négligence professionnelle, s'il ne réclame pas, dans la défense ou la demande reconventionnelle, l'invalidité du brevet en cause.
[53]La règle 174 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [règle 1 (mod. par DORS/2004-283, art. 2] (les Règles) énonce que «[t]out acte de procédure contient un exposé concis des faits substantiels sur lesquels la partie se fonde». Comme l'a exposé lord Denning, M.R., dans Re Vandervell's Trust (No. 2), [1974] 3 All E.R. 205 (C.A.), à la page 213:
[traduction] Il suffit que le plaideur énonce les faits importants. Il n'est pas nécessaire qu'il indique le résultat juridique. Si, par souci de commodité, il le fait, il n'est pas lié par ce qu'il a dit ni limité par cela. Il peut, dans son argumentation, présenter toute conséquence juridique justifiée par les faits.
[54]Les règles régissant les actes de procédure exigent uniquement que les faits substantiels soient allégués (384238 Ontario Limited c. La Reine du Chef du Canada, [1984] 1 C.F. 661 (C.A.), à la page 678; R. c. Imperial General Properties Limited, [1985] 1 C.F. 344 (C.A.), aux pages 351 et 352; Conohan c. Cooperators (The), [2002] 3 C.F. 421 (C.A.), à la page 435). Les conséquences juridiques découlant des faits n'ont pas à être exposées et, dans la mesure où elles pourraient l'être, le plaideur n'est pas lié ni limité par leur énoncé (Entreprises A & B Cormier Ltée c. Canada (Ministre du Revenu national--M.R.N.), [1992] A.C.I. no 574 (QL)).
[55]Premièrement, je constate que les paragraphes 51 à 56 de la défense modifiée comportent les énoncés suivants: 1) les brevets en cause sont invalides, nuls et de nul effet parce que les pétitions indiquent faussement que le demandeur du brevet est une petite entité et que seule la taxe de dépôt exigible des petites entités a été acquittée; la défense indique explicitement le paragraphe 53(1) de la Loi sur les brevets; 2) les brevets en cause sont invalides, nuls et de nul effet parce que les demandes de brevet de 1986 et 1989 ne pouvaient recevoir de date de dépôt car la taxe prescrite pour les grandes entités n'avait pas été payée et qu'elles n'ont donc jamais été régulièrement déposées; 3) même si les demandes de brevet de 1986 et 1989 avaient reçu une date de dépôt, elles sont réputées abandonnées de façon permanente parce qu'elles n'ont pas été complétées par le paiement de la taxe de dépôt exigible des grandes entités et de la taxe de complètement et parce qu'il n'y a pas eu présentation dans les délais prévus aux paragra-phes 30(1) et (2) de la Loi sur les brevets d'une pétition de rétablissement des demandes.
[56]Deuxièmement, la défenderesse présente une demande reconventionnelle au paragraphe 58 de sa défense modifiée, dans laquelle elle répète les allégations de ladite défense, notamment les paragraphes 51 à 56.
[57]Troisièmement, au paragraphe 59 de sa défense modifiée, la défenderesse sollicite expressément un jugement déclaratoire portant que les brevets en cause sont invalides et requiert leur invalidation.
[58]Par conséquent, l'omission de la défenderesse de citer les numéros des articles applicables de la Loi sur les brevets ne constitue pas une erreur fatale; la défenderesse est donc admise à invoquer les articles 59 et 60 de la Loi sur les brevets pour obtenir l'invalidation des brevets en cause.
LA REQUÊTE EN JUGEMENT SOMMAIRE EST-ELLE LE RECOURS ADÉQUAT?
[59]Les requêtes en jugement sommaire sont régies par les règles 213 à 219 des Règles des Cours fédérales. Les principes applicables en cette matière ont été résumés ainsi par la juge Tremblay-Lamer dans la décision Granville Shipping Co. c. Pegasus Lines Ltd., [1996] 2 C.F. 853 (1re inst. ) [au paragraphe 8]:
1. ces dispositions ont pour but d'autoriser la Cour à se prononcer par voie sommaire sur les affaires qu'elle n'estime pas nécessaire d'instruire parce qu'elles ne soulèvent aucune question sérieuse à instruire (Old Fish Market Restaurants Ltd. c. 1000357 Ontario Inc. et al. ((1994), 58 C.P.R. (3d) 221 (C.F. 1re inst.)));
2. il n'existe pas de critère absolu (Feoso Oil Ltd. c. Sarla (Le) ([1995] 3 C.F. 68 (C.A.))), mais le juge Stone, J.C.A. semble avoir fait siens les motifs prononcés par le juge Henry dans le jugement Pizza Pizza Ltd. v. Gillespie ((1990), 75 O.R. (2d) 225 (Div. gén.)). Il ne s'agit pas de savoir si une partie a des chances d'obtenir gain de cause au procès, mais plutôt de déterminer si le succès de la demande est tellement douteux que celle-ci ne mérite pas d'être examinée par le juge des faits dans le cadre d'un éventuel procès;
3. chaque affaire devrait être interprétée dans le contexte qui est le sien (Marine Atlantic Inc. c. Blyth (1994), 77 F.T.R. 97 (C.F. 1re inst.) et Feoso);
4. les règles de pratique provinciales (spécialement la Règle 20 des Règles de procédure civile de l'Ontario [R.R.O. 1990, Règl. 194]) peuvent faciliter l'interprétation (Feoso, et Collie Woollen Mills Ltd. c. Canada, [1996] A.C.J. no 193 (C.F. 1re inst.) (QL));
5. saisie d'une requête en jugement sommaire, notre Cour peut trancher des questions de fait et des questions de droit si les éléments portés à sa connaissance lui permettent de le faire (ce principe est plus large que celui qui est posé à la Règle 20 des Règles de procédure civile de l'Ontario) (Patrick c. Canada, [1994] A.C.F. no 1216) (1re inst.) (QL));
6. le tribunal ne peut pas rendre le jugement sommaire demandé si l'ensemble de la preuve ne comporte pas les faits nécessaires pour lui permettre de trancher les questions de fait ou s'il estime injuste de trancher ces questions dans le cadre de la requête en jugement sommaire (Pallman Maschinenfabrik G.m.b.H. Co. KG. c. CAE Machinery Ltd. (1995), 62 C.P.R. (3d) 26 (C.F. 1re inst.) et Homelife Realty Services Inc. c. Sears Canada Inc., [1996] A.C.F. no 51 (1re inst.) (QL));
7. lorsqu'une question sérieuse est soulevée au sujet de la crédibilité, le tribunal devrait instruire l'affaire, parce que les parties devraient être contre-interrogées devant le juge du procès (Forde c. Canada (Ministre du Revenu national, Douane et Accise, [1995] A.C.F. no 48 et Sears).
[60]C'est sur le requérant que la loi fait reposer la charge de prouver qu'il n'existe aucune question sérieuse à instruire, mais les deux parties doivent «présenter leurs meilleurs arguments» pour permettre à la Cour de trancher cette question (Inhesion Industrial Co. c. Anglo Canadian Mercantile Co. (2000), 6 C.P.R. (4th) 362 (C.F. 1re inst.); Feoso Oil Ltd. c. Sarla (Le), [1995] 3 C.F. 68 (C.A.); F. Von Langsdorff Licensing Ltd. c. S.F. Concrete Technology Inc. (1999), 1 C.P.R. (4th) 88 (C.F. 1re inst.)). Il incombe également au requérant d'établir que la preuve dont la Cour dispose permet à celle-ci de se prononcer sur toutes les questions et qu'aucune de ces questions ne pourrait être tranchée équitablement qu'après une instruction (F. Von Langsdorff).
[61]La règle 215 énonce que la réponse à une requête en jugement sommaire ne peut être fondée uniquement sur des allégations ou dénégations, mais doit énoncer les faits précis démontrant l'existence d'une véritable question litigieuse. La Cour doit «examiner de près» la substance des actes de procédure et, si elle est convaincue qu'il n'existe pas de question sérieuse à instruire, elle rend un jugement sommaire (paragraphe 216(1) des Règles). Toutefois, lorsque la Cour estime que la seule véritable question litigieuse porte sur un point de droit, elle peut statuer sur celui-ci et rendre un jugement sommaire (paragraphes 216(1) et (2) des Règles). De plus si la Cour conclut à l'existence d'une question sérieuse à instruire, elle peut néanmoins rendre un jugement sommaire total ou partiel si la preuve lui permet de le faire (paragraphe 216(3) des Règles). En cas de jugement sommaire partiel, la Cour peut ordonner que l'action ou les actions litigieuses non tranchées soient instruites de la manière habituelle ou ordonner la tenue d'une instance à gestion spéciale (paragraphe 216(4) des Règles).
[62]En matière de brevets ou dans d'autres domaines de la propriété intellectuelle, les requêtes en jugement sommaire ne sont pas encore une procédure usuelle. En effet, les tribunaux répugnent généralement à trancher des questions relatives à des brevets dans le cadre de requêtes en jugement sommaire. Voici notamment l'opinion qu'a exprimée à cet égard le juge Teitelbaum dans Pallmann Maschinenfabrik G.m.b.H. Co. KG c. CAE Machinery Ltd. (1995), 62 C.P.R. (3d) 26 (C.F. 1re inst.), à la page 41 [[1995] A.C.F. no 898 (QL), au paragraphe 45]:
[. . .] le jugement sommaire ne devrait pas être accordé sur une question lorsque le juge estime que l'ensemble de la preuve ne comporte pas les faits nécessaires ou qu'il estime injuste de trancher les questions en cause. Je suis d'avis que le jugement sommaire ne devrait être accordé que lorsque les faits sont clairs. Je crois également, en général, qu'une demande de jugement sommaire n'est pas le recours approprié pour obtenir un jugement lorsque les questions soulevées devant la Cour portent sur la contrefaçon ou l'invalidité d'un brevet.
[63]Dans Hudson Luggage Supplies Inc. c. Tormont Publications Inc. (1995), 65 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.), à la page 220, le juge Noël (maintenant juge à la Cour d'appel) a formulé le commentaire suivant à propos de cet exposé [[1995] A.C.F. no 1748 (QL), au paragraphe 9]:
De toute évidence, le juge Teitelbaum a voulu dire que, de façon générale, les questions de contrefaçon dépendent des faits, de sorte qu'il vaut mieux les trancher dans le cadre de procédures en première instance. Toutefois, il n'a pas donné à entendre qu'un jugement sommaire ne saurait être accordé dans une action en contrefaçon, comme le témoigne le fait qu'il a ensuite fait droit à la demande de jugement sommaire des défenderesses en application de la règle 432.3(4).
[64]Relativement à la requête en jugement sommaire dont il était saisi, le juge Noël a ajouté, à la page 220 [paragraphe 10 (QL)]:
La seule question litigieuse dont la Cour est saisie consiste à savoir si le produit incriminé est visé par la revendication du brevet. Dans l'affirmative, la contrefaçon sera établie. Par conséquent, tout ce qu'il faut faire pour trancher la question de la contrefaçon, c'est interpréter le brevet. Il s'agit d'une question qui peut à juste titre être tranchée au moyen d'un jugement sommaire.
[65]Il ressort de la jurisprudence que lorsqu'il s'agit d'accueillir ou non une requête en jugement sommaire, le point fondamental à examiner est l'existence d'une «question sérieuse à instruire» et que cet examen se fait en fonction de la preuve présentée à l'appui de la requête. Il appert en outre qu'en général, la répugnance des tribunaux à statuer sur une affaire de brevet dans le cadre d'une requête en jugement sommaire s'explique par la difficulté qu'il y a à établir les faits sans tenir d'instruction, en particulier s'il existe des éléments de preuve contradictoires et que la Cour estime qu'il y a lieu d'éprouver la crédibilité des témoins au moyen du témoignage de vive voix et du contre-interrogatoire. De toute évidence, ce n'est pas le cas ici.
[66]Je conviens que l'issue d'une action en contrefaçon de brevet dépend souvent dans une large mesure de l'appréciation par le tribunal des témoignages d'experts présentés par chaque partie. On estime généralement qu'il faut, pour procéder à cette appréciation, voir et entendre les témoins. Les tribunaux hésitent donc à fonder un jugement sommaire sur des opinions d'experts qui pourraient ou non être acceptées par suite de l'appréciation judiciaire des témoignages (Hayden Manufacturing Co. c. Canplas Industries Ltd. (1996), 68 C.P.R. (3d) 186 (C.F. 1re inst.); American Cyanamid Co. c. Bio Agri Mix Ltd. (1997), 73 C.P.R. (3d) 277 (C.F. 1re inst.)). En l'espèce, toutefois, il n'est pas nécessaire de s'appuyer sur de telles opinions d'experts pour statuer sur les questions soulevées dans la requête en jugement sommaire de la défenderesse. Les faits particuliers se rapportant au dépôt des demandes de brevet de 1986 et 1989 et à l'admissibilité des demandeurs de brevets à se réclamer du statut de petite entité sont principalement d'ordre documentaire, et ils ne sont pas contestés. La défenderesse n'avance pas, en vertu de l'article 53 de la Loi sur les brevets, que d'importantes allégations des pétitions sont fausses (ce qui aurait pu nécessiter qu'elle prouve la connaissance que les demandeurs de brevet avaient de la fausseté de leurs allégations). Il s'agit strictement de déterminer quelle est la date de dépôt de chacune des demandes de brevet et quelles conséquences juridiques entraîne le défaut d'avoir acquitté la taxe de dépôt et la taxe de complètement prescrites, le cas échéant, dans le délai prévu aux paragraphes 30(1) et (2) de la Loi sur les brevets.
[67]En l'espèce, les parties ont invoqué de nombreux arguments au sujet de l'action principale en contrefaçon et de la requête en jugement sommaire. Elles ont produit de nombreux affidavits et maints exposés des faits et du droit. J'estime toutefois que la défenderesse a réussi à s'acquitter de son fardeau de preuve et qu'elle a démontré que la Cour peut à bon droit statuer sur les questions soulevées dans la requête en jugement sommaire en fonction de la preuve dont elle dispose. Contrairement aux affaires mentionnées plus haut au sujet de la répugnance des tribunaux à trancher des litiges en matière de brevet dans le cadre de requêtes en jugement sommaire, il s'agit ici d'établir s'il existe suffisamment d'éléments de preuve pour permettre à la Cour de déterminer si les brevets des demanderesses sont invalides ou nuls du fait du non-respect des dispositions de la Loi sur les brevets concernant la taille de l'entité et les modalités de parachèvement des demandes de brevet. Je conclus que la preuve est suffisante pour prendre cette décision à l'égard de chacun des brevets en cause.
[68]J'estime de plus que les paragraphes 49 et 50 de l'arrêt Apotex Inc. c. Merck & Co. de la Cour d'appel fédérale, [2003] 1 C.F. 242 (demande d'autorisation de pourvoi devant la C.S.C. refusée, [2003] 1 R.C.S. v), s'appliquent en l'espèce:
Les Règles de la Cour fédérale (1998) autorisent le juge des requêtes à dégager les conclusions de fait et de droit nécessaires pour trancher la requête, dans la mesure où la preuve pertinente figure au dossier et où n'intervient pas une question «sérieuse» de fait ou de droit qui dépend d'inférences à tirer. Fondamentalement, lorsque l'instruction apporterait des précisions sans fournir d'éléments de preuve additionnels importants, il est préférable que le juge des requêtes tranche la question de droit ou de fait litigieuse (voir la décision Pawar c. Canada, [1999] 1 C.F. 158 (1re inst.); confirmée par (1999), 247 N.R. 271 (C.A.F.); autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée (2000), 257 N.R. 398; Warner-Lambert Co. c. Concord Confections Inc. (2001), 11 C.P.R. (4th) 516 (C.F. 1re inst.); Wetzel c. Canada (Procureur général), [2000] A.C.F. nº 155 (1re inst.) (QL).
Apotex soutient que la question qu'elle soulève par l'argument des circonstances particulières relève plus de l'instruction que d'un juge des requêtes. Toutefois, d'après l'analyse que j'en fais, le juge McKeown était aussi bien placé que le juge présidant l'instruction pour interpréter l'arrêt Eli Lilly et décider s'il soulevait une question pour l'instruction. Il a conclu, avec raison, qu'il n'y avait pas de question du genre qui était soulevée. Dans les circonstances de l'espèce, l'instruction aurait fourni des précisions, mais aucune preuve additionnelle d'importance.
[69]J'estime pareillement qu'une instruction n'ajouterait pas d'éléments de preuve importants relativement aux questions de fait et de droit en cause ici. Je suis aussi bien placé que le serait le juge chargé de l'instruction pour interpréter l'arrêt Dutch Industries Ltd. Par conséquent, je conclus qu'il s'agit d'un cas où un jugement sommaire peut être rendu sous le régime de la règle 216 des Règles des Cours fédérales.
QUELLE EST LA DATE APPLICABLE POUR DÉTERMINER SI UN DEMANDEUR DE BREVET SATISFAIT À LA DÉFINITION DE PETITE ENTITÉ ÉNONCÉE AUX RÈGLES SUR LES BREVETS?
[70]La définition de «petite entité» applicable lorsque les demandes de brevet de 1986 et 1989 ont été soumises au commissaire (6 novembre 1986 et 23 mars 1989) était la suivante [Règles sur les brevets, art. 2 (mod. par DORS/85-383, art. 1)]:
2. [. . .]
«petite entité» s'entend d'un inventeur indépendant ou d'une petite entreprise;
celle d'«inventeur indépendant» [mod., idem] était ainsi libellée:
2. [. . .]
«inventeur indépendant» s'entend d'un particulier qui est l'auteur d'une invention, sauf
a) un particulier qui a cédé ou qui est tenu, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à une personne qui n'est ni un particulier ni une petite entreprise,
b) un particulier qui a cédé ou qui est tenu, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à un autre particulier ou à une petite entreprise, et qui est au courant de la cession future d'un droit sur l'invention à une personne visée à l'alinéa a), ou de l'existence d'un contrat ou d'une autre obligation légale prévoyant la cession d'un tel droit à cette dernière;
et celle de «petite entreprise» [mod., idem] énonçait ce qui suit:
2. [. . .]
«petite entreprise» désigne, dans le cas d'une invention, une personne qui n'est pas un particulier et dont les recettes annuelles brutes ne dépassent pas deux millions de dollars (ci-après appelée «entreprise» dans la présente définition) à l'exclusion d'une entreprise
a) qui se livre à des activités de fabrication et a à son service plus de 100 employés,
b) qui se livre à des activités autres que de fabrication et a à son service plus de 50 employés,
c) a cédé ou est tenue, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à une personne qui n'est ni un particulier ni une petite entreprise au sens du paragraphe a) ou b), ou
d) a cédé ou est tenue, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à un particulier ou une petite entreprise au sens du paragraphe c), et qui est au courant de la cession future d'un droit sur l'invention à une personne qui n'est ni un particulier ni une personne décrite dans le présent alinéa, ou de l'existence d'un contrat ou d'une autre obligation légale prévoyant la cession d'un tel droit à cette dernière;
[71]Comme il en a déjà été fait mention, un accord de licence conclu le 27 août 1986 entre les demanderesses et Ethicon, une filiale de Johnson & Johnson, obligeait Ethicon à verser aux demanderesses la somme de 3 600 000 $. Les demanderesses ne satisfaisaient donc plus, à cette date, à la définition de «petite entité» puisqu'elles n'étaient plus un «inventeur indépendant» ou une «petite entreprise». Je relève en outre, bien que je ne me fonde pas sur cette observation, que la licence a été concédée à Ethicon sous réserve de licences antérieures octroyées par Palmaz au gouvernement des États-Unis (tel qu'il appert d'une lettre en date du 31 octobre 1985 envoyée à Palmaz par la Veterans' Administration) et à l'Université du Texas (tel qu'il appert d'une lettre en date du 8 août 1985 envoyée à Palmaz par Charles B. Mullins). Ces licences découlaient du fait que Palmaz était un employé du gouvernement des États-Unis et de l'Université du Texas. J'accepte en totalité la preuve et les arguments de la défenderesse à cette égard. Il s'ensuit que même avant la signature de l'accord de licence avec Ethicon, le 27 août 1986, Palmaz ne pouvait se réclamer du statut de petite entité, car ni le gouvernement des États-Unis ni l'Université du Texas ne satisfont à la définition d'«inventeur indépendant» ou de «petite entreprise». Palmaz n'avait donc pas droit au statut de petite entité lorsqu'il a déposé sa demande de brevet aux États-Unis le 7 novembre 1985. Que la date des demandes de brevet de 1986 soit le 6 novembre 1986 ou le 7 novembre 1985, ne change rien, par conséquent, puisque Palmaz ne satisfaisait pas à la définition de petite entité. Par ailleurs, il est clair que ni Palmaz ni Schatz ne pouvaient prétendre au statut de petite entité à la date du dépôt de la demande de brevet de 1989 (qu'il s'agisse du 28 mars 1988 ou du 23 mars 1989) en raison de l'accord de licence du 27 août 1986 conclu avec Ethicon.
[72]Quoi qu'il en soit, je vais quand même examiner les effets de l'arrêt Dutch Industries Ltd., sur la question de la date devant servir à la détermination du statut de petite entité. L'interprétation que je fais de la décision de la Cour d'appel fédérale et de la Loi et des Règles sur les brevets m'amène à conclure que cette date est celle du dépôt de la demande de brevet au Canada.
[73]L'arrêt Dutch Industries Ltd., aborde la question de l'effet qu'a le paiement, par un demandeur qui n'y a pas droit, de la taxe réduite consentie aux «petites entités». L'inventeur avait déposé une première demande de brevet en revendiquant le statut de «petite entité», puis il avait cédé ses droits dans l'invention à Barton No-Till Inc. et Flexi-Coil Ltd., lesquelles ne satisfaisaient pas à la définition de «petite entité». Par la suite, l'inventeur avait déposé une deuxième demande de brevet, dans laquelle il se réclamait encore du statut de «petite entité», et il avait continué à acquitter la taxe périodique afférente au brevet délivré par suite de la première demande, suivant le barème d'une «petite entité». Lorsque l'erreur avait été découverte, des paiements complémentaires avaient été faits au Bureau des brevets à l'égard du brevet en cours et de la deuxième demande de brevet.
[74]Au mois d'août 2001, la Section de première instance de la Cour fédérale a invalidé le brevet et statué que la deuxième demande avait été abandonnée parce que la taxe exigible avait été acquittée après la date limite prévue par la Loi et les Règles sur les brevets. La Cour a jugé que le commissaire avait mal exercé son pouvoir discrétionnaire et qu'il avait outrepassé sa compétence en acceptant les paiements complémentaires. Cette décision a été portée en appel, et la Cour d'appel fédérale a confirmé que la Loi ne permettait pas au commissaire d'accepter des paiements complémentaires (Dutch Industries Ltd.). Toutefois, la Cour a infirmé la décision de la Section de première instance en partie et elle a statué que le statut de l'entité est établi une fois pour toute [au paragraphe 46] «lorsque le régime des brevets entre en jeu pour la première fois (habituellement, lors du dépôt de la demande de brevet)» et que le demandeur de brevet conserve ce statut à l'égard de la demande de brevet et pendant la durée de tout brevet pouvant en découler. La Cour suprême du Canada a rejeté avec dépens la demande d'autorisation de pourvoi, le 11 décembre 2003 [[2003] 3 R.C.S. vi].
[75]Les demanderesses soutiennent que la date en fonction de laquelle le statut de petite entité est déterminé est la date à laquelle le régime des brevets entre en jeu pour la première fois dans tout pays et pas seulement au Canada, ajoutant qu'il s'agit de la «date de dépôt» de la demande de brevet. Elles invoquent la décision Bayer AG c. Apotex Inc. (1998), 84 C.P.R. (3d) 23 (C.F. 1re inst.) à l'appui de leur affirmation que, suivant la Loi sur les brevets en vigueur avant le 1er octobre 1989, la date de dépôt est la date ou la date de priorité dont l'auteur de la demande peut se réclamer en application des obligations du Canada découlant des traités internationaux, et non la simple date du dépôt de la demande au Canada. Elles soutiennent donc que les dates devant servir à la détermination du statut de petite entité sont les dates de dépôt des demandes de brevet américaines, c'est-à-dire le 7 novembre 1985 pour ce qui est des brevets 505 et 303 et le 28 mars 1988 pour ce qui est du brevet 186.
[76]Pour la défenderesse, la date de référence relativement à la détermination du statut de petite entité est la date du dépôt de la demande de brevet au Canada. Soutenant que la «date de dépôt» à laquelle le régime des brevets entre en jeu pour la première fois est la date à laquelle la demande de brevet canadien est déposée, elle cite l'arrêt de la Cour d'appel fédérale Pfizer Canada Inc. c. Canada (Procureur général), [2003] 4 C.F. 95 (C.A.). Dans cette affaire, la Cour d'appel avait confirmé la décision de la Section de première instance [[2003] 1 C.F. 423] et statué que la «date de dépôt», en matière d'application du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) [DORS/93-133] était la date à laquelle la demande de brevet canadien était déposée et non une date de priorité.
[77]En outre, au paragraphe 46 de l'arrêt Dutch Industries Ltd., la Cour d'appel a indiqué que la date à laquelle il convenait de déterminer l'existence du statut de petite entité était la date à laquelle «le régime des brevets entre en jeu pour la première fois (habituellement, lors du dépôt de la demande de brevet)», en l'absence de toute indication de temps dans la définition de «petite entité». En examinant si les intimés satisfaisaient à la définition de «petite entité», la Cour fédérale a pris la date à laquelle la demande de brevet avait été déposée au Canada comme date à laquelle le régime des brevets était entré en jeu. Un bref examen des décisions de la Cour d'appel fédérale et de la Section de première instance citées dans Dutch Industries Ltd., ainsi que de la base de données des brevets canadiens de l'OPIC [Office de la propriété intellectuelle du Canada] n'a pas permis de révéler l'existence d'une date de priorité pour le brevet en cause dans cette affaire. À mon avis, toutefois, rien dans la décision Dutch Industries Ltd., ne donne à penser que la date à employer pour déterminer si un demandeur de brevet est une petite entité doit être la «date de priorité».
[78]Compte tenu du contexte du régime mis en place par la Loi sur les brevets, des Règles sur les brevets et de l'intention du législateur, je conclus que la date servant à la détermination du statut de petite entité est la date à laquelle le régime canadien des brevets entre en jeu, c'est-à-dire la date à laquelle la demande de brevet canadien a été déposée. Même si cette conclusion est erronée et que la date de priorité soit la date de référence, comme il en a été question plus haut, les demanderesses ne pouvaient prétendre au statut de petite entité à l'égard des brevets 303 et 505, le 7 novembre 1985, à cause des licences concédées au gouvernement des États-Unis et à l'Université du Texas, et elles n'avaient pas droit non plus à ce statut à l'égard du brevet 186, le 28 mars 1988, à cause des licences susmentionnées et de l'accord de licence conclu avec Ethicon.
[79]Pour l'interprétation des dispositions de la Loi sur les brevets, il faut appliquer une méthode conforme au principe exposé dans l'ouvrage de Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes (4e éd., Toronto: Butterworths, 2002), à la page 1:
[traduction] Aujourd'hui il n'y a qu'un seul principe ou solution: il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur.
[80]La Cour suprême du Canada a déclaré que ce principe moderne d'interprétation des lois, qui met l'accent sur une méthode multi-dimensionnelle, était la méthode d'interprétation à suivre, et la Cour d'appel fédérale l'a expressément adopté (Rizzo and Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, au paragraphe 21). Voir également Bell ExpressVu Limited Partnership c. Rex, [2002] 2 R.C.S. 559; Rooke c. Canada, [2003] 1 C.T.C. 208 (C.A.F.); Qu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 3 C.F. 3 (C.A.). L'interprétation de dispositions législatives doit rendre justice au texte de loi et aux normes juridiques établies et elle doit promouvoir l'intention du législateur.
[81]Comme la Cour d'appel fédérale l'a signalé dans Dutch Industries Ltd., la définition de «petite entité» n'établit pas la date à laquelle les faits doivent être appréciés. Dans son analyse, la Cour a indiqué qu'en l'absence de disposition indiquant expressément cette date, les conclusions de fait relatives au statut de petite entité doivent être formulées une fois pour toutes à la date d'exigibilité de la première taxe liée au statut du demandeur de brevet (la date à laquelle la demande de brevet est soumise). La première date à laquelle un demandeur doit verser au commissaire la taxe afférente à une petite entité serait donc la date à laquelle il soumet sa demande de brevet canadien.
[82]Relativement à l'intention du législateur, la Cour d'appel fédérale a résumé, au paragraphe 30 de Dutch Industries Ltd., l'objet du régime applicable aux petites entités:
Les taxes exigibles en vertu de la Loi sur les brevets et des Règles sur les brevets visent à défrayer le Bureau des brevets de la totalité ou d'une partie de ses coûts. Les taxes sont calculées en fonction d'un barème moins élevé dans le cas des «petites entités» pour accorder un certain allégement aux inventeurs, qui sont présumés ne disposer que de moyens limités.
[83]Les demandes relatives aux brevets 505 et 303 ont été déposées le 6 novembre 1986 et la demande visant le brevet 186 a été soumise le 23 mars 1989. À ces dates, l'inventeur [EGP] avait cessé de disposer de moyens limités, par suite de l'accord de licence conclu avec Ethicon au mois d'août 1986, et il n'avait plus besoin de la protection offerte par le régime des petites entités. En outre, rien dans la Loi ou dans les Règles sur les brevets n'indique que le statut de petite entité doit être déterminé en fonction de la date du dépôt d'une demande de brevet dans un autre pays (c.-à-d. une date de priorité). Contrairement à ce que plaident les demanderesses, les obligations découlant de traités internationaux (obligeant le Canada à permettre aux demandeurs de brevet de se prévaloir, dans le délai prévu, de la date du dépôt antérieur d'une demande dans un autre pays de l'Union), n'exigent pas une telle interprétation. Il semble clair, sur ce fondement, que la taxe de dépôt exigible des petites entités demandant un brevet canadien est établie à la date où le régime canadien des brevets entre en jeu, généralement lors du dépôt de la demande.
[84]Il est évident, en outre, que les demandeurs de brevet ont reconnu qu'ils avaient erronément déclaré être une petite entité. Relativement aux brevets 505 et 303, leurs agents de brevet ont écrit au commissaire, le 30 juin 1989 qu'ils venaient d'apprendre que [traduction] «les faits existant à la date du dépôt de la demande étaient tels que le statut de petite entité n'était pas applicable». Pareillement, les agents de brevet ont informé le commissaire, le 10 novembre 1989, que relativement au brevet 186 les demandeurs de brevet n'avaient pas droit au statut de petite entité. Les agents ont par la suite acquitté pour chaque demande un montant équivalant à la différence entre les montants de taxe exigibles d'une grande et d'une petite entité.
[85]Compte tenu de ce qui précède, il est clair que la date servant à déterminer l'existence du statut de petite entité est la date à laquelle le régime des brevets entre en jeu au Canada (c.-à-d. la date de dépôt de la demande de brevet canadien). Voici donc la date en fonction de laquelle devait être déterminé le statut de petite entité à l'égard de chaque demande: 1) pour les brevets 505 et 303, le 6 novembre 1986 et 2) pour le brevet 186, le 23 mars 1989. Ce n'est donc pas la taxe de dépôt exigible d'une petite entité qui devait être payée à l'égard des demandes de brevet canadien déposées le 6 novembre 1986 et le 23 mars 1989, et aucune de ces demandes n'a été valablement déposée devant le commissaire.
QUELLES CONSÉQUENCES ENTRAÎNE LE PAIEMENT D'UNE TAXE DE DÉPÔT INSUFFISANTE LORS DU DÉPÔT?
[86]Suivant l'article 34 des Règles sur les brevets applicables, une demande est censée complète seulement lorsque les conditions de l'article 32 ont été remplies et lorsque les taxes relatives à la demande (y compris les taxes prescrites à l'égard des revendications supplémentaires et du complètement) ont été versées. Voici le texte de l'article 32:
32. (1) La date de dépôt attribuée à une demande sera celle à laquelle la taxe de dépôt prescrite aura été versée et à laquelle les pièces suivantes qui y ont trait auront été déposées:
a) une pétition souscrite par le demandeur ou par un agent des brevets en son nom;
b) un mémoire descriptif, comprenant les revendications;
c) tout dessin dont il est question dans le mémoire descriptif; et
d) un précis de la divulgation, qui peut être inséré au début du mémoire descriptif.
(2) Lorsque les prescriptions contenues aux alinéas (1)a) à c) ont été suivies à l'égard d'une demande, on peut, même si les conditions que renferme ledit paragraphe n'ont pas toutes été remplies, attribuer une date de dépôt à ladite demande si le commissaire est convaincu qu'il serait injuste de ne pas le faire, et, dans un tel cas, la date de dépôt attribuée à la demande doit être celle où l'on s'est conformé aux alinéa (1)a) à c).
[87]Selon les demanderesses, le paragraphe 32(2) exige seulement que les conditions énoncées aux alinéas 32(1)a) à c) soient remplies, et le commissaire a interprété l'article 32 comme signifiant qu'une demande de brevet peut recevoir une date de dépôt correspondant à la date à laquelle elle a été soumise même lorsque la taxe de dépôt est insuffisante. Elles invoquent les commentaires que la juge Sharlow, de la Cour d'appel, a formulés dans l'arrêt Dutch Industries Ltd., selon lesquels il ne faut pas privilégier une interprétation pouvant entraîner des [au paragraphe 43] «conséquences disproportionnées».
[88]Ces arguments ne me convainquent pas. Le paragraphe 32(2) des Règles sur les brevets confère au commissaire le pouvoir discrétionnaire d'attribuer une date de dépôt à une demande lorsque le précis de la divulgation n'a pas été soumis (l'exigence énoncée à l'alinéa 32(1)d)), mais non lorsque la taxe exigible n'a pas été payée. La conclusion des demanderesses n'est pas conforme au sens normal ou ordinaire des termes de la disposition pas plus qu'elle ne découle des principes applicables en matière d'interprétation des lois, tels qu'ils ont été énoncés plus haut. De plus, ce n'est pas la question de la date de dépôt attribuée aux demandes de brevet par le commissaire qui se pose en l'espèce, mais la question de savoir si les demandes de brevet étaient complètes et régulièrement déposées.
[89]Je suis lié par les décisions rendues par notre Cour et par la Cour d'appel dans l'affaire Dutch Industries Ltd. En appliquant la logique et le raisonnement de cet arrêt aux faits de la présente espèce, je conclus que le défaut des demandeurs de brevet d'acquitter la taxe de dépôt exigible a fait en sorte que les demandes sont demeurées incomplètes et que, 12 mois après leur dépôt, elles ont été tenues pour abandonnées en application du paragraphe 30(1) de la Loi sur les brevets (c.-à-d. le 6 novembre 1987 pour les brevets 505 et 303, et le 23 mars 1990 pour le brevet 186). Qui plus est, chacune des demandes de brevet est devenue abandonnée de façon permanente en vertu du paragraphe 30(2) de la Loi sur les brevets applicable, en raison du défaut des demanderesses de demander par pétition au commissaire le rétablissement des demandes de brevet dans le délai de 12 mois suivant la date où elles ont été tenues pour abandonnées (le 6 novembre 1988 pour les brevets 505 et 303, et le 23 mars 1991 pour le brevet 186).
[90]Le 30 juin 1989 (soit bien après le 6 novembre 1988, date de l'abandon permanent des demandes de brevet), les agents des demandeurs de brevet ont voulu corriger le paiement de la taxe de dépôt à l'égard des brevets 505 et 303. Les demandeurs de brevet n'ont jamais soumis de pétition visant le rétablissement des demandes ni payé les taxes afférentes au rétablissement des demandes abandonnées ou au complètement des demandes, qui étaient prévues à l'annexe II des Règles sur les brevets alors applicables. Par conséquent, les demandes de 1986, relatives aux brevets 505 et 303, n'ont jamais été complétées et leur abandon est devenu permanent.
[91]Le 10 novembre 1989, les agents des demandeurs de brevet ont voulu corriger le paiement de la taxe de dépôt à l'égard de la demande de 1989 relative au brevet 186. Pour compléter la demande de brevet, il fallait acquitter la totalité de la taxe afférente à une grande entité ainsi que la taxe de complètement. Suivant l'annexe II des Règles sur les brevets alors applicables, la taxe de complètement d'une demande était de 200 $ pour les demandes non complétées à la date de dépôt. La taxe exigible d'une grande entité a été acquittée avant le 23 mars 1990, mais la taxe de complètement est demeurée impayée. Par conséquent, la demande de 1989 n'a jamais été complétée et, le 23 mars 1990, elle devait être tenue pour abandonnée. Conformément au paragraphe 30(2) de la Loi sur les brevets, l'abandon est devenu permanent le 23 mars 1991, parce qu'il n'y a eu ni pétition de rétablissement ni versement de la taxe de rétablissement.
[92]Les demanderesses soutiennent que l'article 137 des Règles sur les brevets confère au commissaire un large pouvoir discrétionnaire dans l'établissement de la procédure applicable au complètement ou à la poursuite d'une demande de brevet lorsque la Loi ou les Règles sur les brevets sont silencieuses, pouvoir en vertu duquel il peut accepter le paiement d'un montant inférieur à celui i) de la taxe de dépôt et ii) de toute taxe supplémentaire (comme la taxe de complètement ou de rétablissement). La procédure relative au paiement de taxe correcteur, énoncée dans un bulletin publié en 1985 par le commissaire (le bulletin de 1985) relevait donc, selon elles, du pouvoir du commissaire.
[93]Dans Dutch Industries Ltd., la Cour a jugé que l'article 157 des Règles sur les brevets [DORS/96-423] (qui s'applique aux demandes déposées entre le 1er octobre 1989 et le 30 septembre 1996) enlève explicitement au commissaire le pouvoir de proroger le délai de paiement des taxes périodiques. Selon les demanderesses, les pouvoirs conférés aux articles 4, 40 et 77 de la Loi sur les brevets et à l'article 137 des Règles sur les brevets ne sont pas visés par l'article 157. Elles se fondent donc sur cette distinction pour affirmer que non seulement le commissaire était-il autorisé à proroger le délai de paiement des taxes, mais qu'il pouvait renoncer à une partie de la taxe de dépôt et à la totalité des taxes de complètement et de rétablissement.
[94]Cet argument ne résiste pas à l'analyse. En l'absence de toute disposition contraire, je suis d'avis que ni la Loi ni les Règles sur les brevets ne donnent au commissaire le pouvoir discrétionnaire de renoncer à une partie de la taxe de dépôt. L'article 26 des Règles sur les brevets [DORS/96-423] actuelles permet certes au commissaire de proroger des délais, mais le demandeur de brevet doit solliciter la prorogation et verser les droits exigés, dans le délai imparti. Cela n'a pas été fait en l'espèce. Même si aucune disposition n'exclut l'application de l'article 26 au paiement de la taxe de dépôt, j'estime (comme la Cour d'appel fédérale dans Dutch Industries Ltd.) que le pouvoir du commissaire de proroger des délais ou de renoncer au paiement total ou partiel de taxes réglementaires s'exerce sous réserve de toute disposition contraire de la Loi ou des Règles sur les brevets. L'article 137 desdites règles ne permet pas au commissaire d'établir des lignes de conduite d'applica-tion générale, de prendre des règles ou règlements ou d'établir des lignes de conduite au sujet du paiement des taxes. Comme le fait valoir la défenderesse, c'est au seul gouverneur en conseil qu'il appartient, aux termes de l'article 12 [mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 3] de la Loi sur les brevets, de prendre des règles ou règlements régissant le paiement de taxes et, notamment, les délais ou les modalités de paiement de ces taxes. Je conclus donc que le commissaire ne jouit pas du pouvoir de renoncer à une partie de la taxe de dépôt ou à la totalité des taxes de complètement ou de rétablissement.
L'ARTICLE 77 DE LA LOI SUR LES BREVETS A-T-IL POUR EFFET DE CORRIGER LES VICES DES DEMANDES DE BREVET?
[95]Les demanderesses avancent que l'article 77 de la Loi sur les brevets (abrogé par L.C. 1993, ch. 15, art. 54) a créé une présomption réfutable de régularité et de validité du brevet délivré; voici le texte de cet article:
77. Tout brevet délivré avant ou après le 1er août 1935, ou à cette date, est réputé avoir été régulièrement délivré si toutes les conditions de la délivrance d'un brevet valide qui ont pu être ou seront en vigueur, soit à la date de la demande du brevet, soit à la date de sa délivrance, ont été remplies. Toutefois, les dispositions en vigueur concernant la validité continue de brevets après leur délivrance s'appliquent à tous les brevets à quelque époque qu'ils aient été accordés.
[96]Je suis d'avis que l'article 77 n'a pas pour effet de corriger les vices d'une demande de brevet et que l'argument des demanderesses est mal fondé. Comme l'a expliqué la défenderesse dans son argumentation, l'article 77 était une disposition transitoire faisant en sorte que les modifications réglementaires apportées aux conditions d'obtention des brevets ne touchent pas les brevets déjà délivrés. Si l'on acceptait l'interprétation proposée par les demanderesses, il s'ensuivrait que les brevets, une fois délivrés, ne pourraient être invalidés. Cette interprétation de l'article 77 ne saurait manifestement être reçue, compte tenu de l'intention du législateur et de l'interprétation que les tribunaux ont faite de la disposition.
[97]L'article 77 ne crée qu'une présomption de validité, laquelle est réfutable (voir Giffin c. Canstar Sports Group Inc. (1990), 30 C.P.R. (3d) 238 (C.F. 1re inst.), à la page 241; Hoffmann-La Roche c. Canada (Ministre de la Santé et du Bien-être social) (1998), 85 C.P.R. (3d) 67 (C.F. 1re inst.); conf. par (2000), 9 C.P.R. (4th) 90 (C.A.F.)). En outre, comme les demandes de brevet ne sont pas conformes aux articles 32 et 34 des Règles sur les brevets, elles ne satisfont pas à l'exigence prévue à l'article 77 que «toutes les conditions de la délivrance d'un brevet valide qui ont pu être ou seront en vigueur, soit à la date de la demande du brevet, soit à la date de sa délivrance, ont été remplies» et, par conséquent, les demanderesses ne peuvent invoquer la présomption de validité énoncée dans cet article.
QUEL A ÉTÉ L'EFFET DE L'ENTRÉE EN VIGUEUR DE L'ARTICLE 3.1 DES RÈGLES SUR LES BREVETS LE 1ER JANVIER 2004?
[98]Cette dernière partie des motifs analyse les effets de l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2004, de modifications apportées aux Règles sur les brevets par DORS/2003-208. Les demanderesses invoquent, plus particulièrement, l'article 3.1 [édicté par DORS/2003-208, art. 2] des Règles sur les brevets, dont voici le texte:
3.1 (1) Sous réserve du paragraphe 6(1), si, avant l'expiration du délai fixé pour le versement d'une taxe prévue à l'annexe II, le commissaire reçoit une communication dans laquelle une personne fait une tentative manifeste mais infructueuse pour verser la taxe, celle-ci est réputée avoir été reçue avant l'expiration du délai dans les cas suivants:
a) la taxe impayée est versée avant l'expiration du délai;
b) dans le cas où un avis est envoyé conformément au paragraphe (2), la taxe impayée, accompagnée de la surtaxe pour paiement en souffrance prévue à l'article 22.1 de l'annexe II, est versée dans les deux mois suivant la date de l'avis;
c) dans le cas où aucun avis n'est envoyé, la taxe impayée, accompagnée de la surtaxe pour paiement en souffrance prévue à l'article 22.1 de l'annexe II, est versée dans les deux mois suivant la date à laquelle le commissaire a reçu la communication.
(2) Sous réserve du paragraphe 6(1) et à moins que l'auteur de la communication au commissaire ne soumette pas les renseignements permettant de communiquer avec lui, si le commissaire reçoit la communication dans les circonstances visées au paragraphe (1), il demande, par avis, à la personne qui lui a envoyé la communication de verser la taxe impayée, accompagnée, s'il y a lieu, de la surtaxe pour paiement en souffrance visée au paragraphe (1).
(3) Les paragraphes (1) et (2) ne s'appliquent pas aux taxes prévues aux articles 9 à 9.4 et 22.1 de l'annexe II.
[99]Lorsqu'il a été question de l'article 3.1 devant la Cour, celui-ci n'était pas encore en vigueur, et les demanderesses ont prié la Cour de différer sa décision de façon à ce qu'elles puissent se prévaloir de la disposition. Cet aspect de l'instance a perdu une grande partie de son intérêt pratique puisqu'une suspension d'instance a été ordonnée au mois de novembre 2003 pour d'autres raisons.
[100]Cela dit, j'estime que les modifications entrées en vigueur le 1er janvier 2004 n'ont pas d'effet sur l'issue de la requête prise en délibéré. En effet, le droit applicable pour statuer sur la requête en jugement sommaire ne fait pas l'objet d'une controverse entre les parties. Puisque la date de dépôt des demandes de chacun des brevets en cause est antérieure au 1er octobre 1989, la validité des brevets doit être déterminée suivant les dispositions de la Loi sur les brevets qui étaient en vigueur immédiatement avant cette date, conformément aux articles 78.1 [édicté par L.C. 1993, ch. 15, art. 55; 2001, ch. 10, art. 3] et 78.2 [édicté par L.C. 1993, ch. 15, art. 55; 2001, ch. 10, art. 3]. En outre les Règles sur les brevets qui s'appliquent pour déterminer si les demandes de brevet déposées avaient été complétées sont celles qui étaient en vigueur avant 1989.
[101]Quoi qu'il en soit, même si les nouvelles règles étaient applicables en l'espèce, l'article 3.1 ne permet pas aux demanderesses d'éviter les conséquences juridiques résultant d'une erreur dans le paiement de la taxe à l'égard des brevets en cause ou, autrement dit, du paiement erroné de la taxe de petite entité. L'article 3.1 étant une disposition réglementaire, elle est subordonnée à la loi habilitante, c'est-à-dire à la Loi sur les brevets. Ainsi, la modification des Règles sur les brevets n'a pas d'effet sur le délai de 12 mois pour compléter les demandes de brevet prévu à l'article 30 de la Loi sur les brevets, et non aux Règles. Autrement dit, l'article 3.1 constitue une modification des Règles sur les brevets, non de la Loi sur les brevets. Effectivement, l'article 3.1 n'a pas pour objet de modifier l'obligation que la Loi sur les brevets impose aux demandeurs de brevet de compléter leur demande dans les 12 mois suivant leur dépôt. Contrairement à ce qu'avancent les demande-resses, le nouveau paragraphe 3.1(2) des Règles sur les brevets ne permet pas aux demandeurs de brevet de se dérober aux obligations prévues par la Loi sur les brevets.
[102]J'ajouterai que l'article 3.1 n'est pas une disposition visant à remédier au problème relevé dans Dutch Industries Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets) (2002), 288 N.R. 14 (C.A.F.), concernant l'acceptation par le commissaire d'un versement correctif après l'expiration du délai applicable au paiement de la taxe en question. Aucun des documents se rapportant aux nouvelles règles ne mentionne l'affaire Dutch Industries. Or il serait très inhabituel, pour ne pas dire sans précédent, que des modifications réglementaires visant à «corriger un problème» soient adoptées sans qu'il soit fait mention du problème dans les documents précédant et accompagnant les nouvelles dispositions et pendant que la décision judiciaire à l'origine du problème est encore pendante devant les tribunaux. L'objet de l'article 3.1 est de permettre à un demandeur ou un titulaire de brevet qui tente sans succès d'acquitter la taxe prescrite de se reprendre à la suite d'un avis du commissaire, à la condition qu'il verse une surtaxe pour paiement en souffrance. Les nouvelles dispositions n'étaient que des modifications d'ordre administratif connexes à des changements de tarif.
[103]Par ailleurs, l'article 3.1 n'a pas pour effet de ressusciter rétroactivement des demandes de brevet déjà tenues pour abandonnées et ne peut être interprété comme ressuscitant rétroactivement des demandes de brevet dont l'abandon est réputé permanent en application de l'article 30 de la Loi sur les brevets. En fait, les lois sont présumées s'appliquer pour l'avenir. Autrement dit, elles ne doivent pas être interprétées comme rétroactives à moins qu'elles ne comportent des dispositions énonçant explicitement leur portée rétroactive ou exigeant implicitement une telle interprétation (Gustavson Drilling (1964) Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1977] 1 R.C.S. 271). Il doit y avoir une indication suffisante de l'intention du législateur que la loi s'applique non seulement à des faits en cours et à venir, mais également à des faits passés, ce qui n'est pas le cas en l'espèce (Baker Petrolite Corp. c. Canwell Enviro-Industries Ltd., [2003] 1 C.F. 49 (C.A.), au paragraphe 19).
[104]J'estime de plus que les demandeurs des brevets en cause n'ont jamais fait de «tentative manifeste mais infructueuse» pour verser la taxe présentée comme insuffisante dans la requête en jugement sommaire de la défenderesse. Le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation qui accompagnait la publication des modifications apportées aux Règles sur les brevets, le 18 juin 2003, donne un exemple de «tentative manifeste mais infructueuse» de verser une taxe, Gaz. C. 2003.II.1659. Il s'agit du paiement d'un montant de taxe incorrect par suite d'une erreur dans le calcul d'un taux de change. La présente situation est tout à fait différente. L'article 3.1 permet au demandeur de brevet de corriger une erreur commise par inadvertance relativement au paiement de la taxe, mais non une erreur se rapportant à la taxe elle-même, en particulier lorsqu'elle découle d'une hypothèse erronée ou d'une revendication sciemment irrégulière du statut de petite entité.
CONCLUSION
[105]Conformément à l'analyse précédente, une demande de brevet n'est complétée que lorsque la taxe de dépôt est acquittée en entier. Si la taxe n'est pas versée en totalité lors du dépôt de la demande, une taxe de complètement est exigible. Lorsque ni la taxe de dépôt ni la taxe de complètement ne sont acquittées en totalité avant l'expiration du délai de 12 mois prévu au paragraphe 30(1) de la Loi sur les brevets, la demande de brevet est tenue pour abandonnée. De plus, l'abandon d'une demande de brevet incomplète devient permanent, conformément au paragraphe 30(2) de la Loi sur les brevets, si le demandeur ne soumet pas de pétition de rétablissement au commissaire dans les 12 mois suivant la date à laquelle elle a été tenue pour abandonnée. Le demandeur doit alors acquitter la totalité de la taxe de dépôt, la taxe de complètement et la taxe de rétablisse-ment. En ne se conformant pas à cette série de modalités, les demandeurs des brevets en cause ont abandonné de façon permanente chacune de leurs demandes et, par conséquent, chacun des brevets était invalide à compter de la date de dépôt.
[106]Pour ces motifs et pour les motifs supplémentaires invoqués subsidiairement par la défenderesse, je rendrai une ordonnance accueillant la présente requête en jugement sommaire, rejetant toutes les prétentions des demanderesses fondées sur les brevets en cause et déclarant que lesdits brevets sont invalides, nuls et de nul effet.
[107]Comme je l'ai indiqué à la fin de l'instruction, la Cour ne statuera pas tout de suite sur les dépens. Les parties devront signifier et déposer leurs observations concernant les dépens ainsi que toute demande de directives à ce sujet dans les 45 jours suivant la présente décision.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT:
1. La requête en jugement sommaire de la défenderesse est accueillie.
2. Toutes les prétentions des demanderesses fondées sur les brevets canadiens no 1281505, 1338303 et 1330186 (les brevets en cause) sont rejetées.
3. Les brevets en cause sent déclarés invalides, nuls et de nul effet.
4. Il ne sera pas statué immédiatement sur les dépens. Les parties devront signifier et déposer leurs observations concernant les dépens ainsi que toute demande de directives à ce sujet dans les 45 jours suivant la présente décision.
ANNEXE A
Voici le texte des dispositions pertinentes citées dans les motifs de la présente ordonnance.
Dispositions transitoires pertinentes (de la Loi sur les brevets actuelle)
78.2 (1) Sous réserve du paragraphe (3), la présente loi dans sa version du 30 septembre 1989, à l'exception de l'article 46, s'applique aux affaires survenant, le 1er octobre 1989 ou par la suite, relativement aux brevets délivrés avant le 1er octobre 1989. Ces affaires sont également régies par les articles 38.1 et 45.
(2) Sous réserve du paragraphe (3), la présente loi dans sa version du 30 septembre 1989, à l'exception de l'article 46, s'applique aux affaires survenant, le 1er octobre 1989 ou par la suite, relativement aux brevets délivrés ce jour ou par la suite au titre de demandes déposées avant le 1er octobre 1989. Ces affaires sont également régies par les articles 38.1, 45, 46 et 48.1 à 48.5.
(3) Les dispositions visées aux paragraphes (1) et (2) s'appliquent compte tenu des modifications apportées à la présente loi sauf celles de ces modifications entrées en vigueur le 1er octobre 1989 et le 1er octobre 1996.
Dispositions pertinentes de la Loi sur les brevets antérieures au 1er octobre 1989.
4. (1) Le gouverneur en conseil peut nommer un commissaire aux brevets. Sous la direction du ministre, celui-ci exerce les pouvoirs et fonctions qui lui sont attribués en conformité avec la présente loi.
(2) Le commissaire reçoit les demandes, taxes, pièces écrites, documents et modèles pour brevets, fait et exécute tous les actes et choses nécessaires pour la concession et la délivrance des brevets; il assure la direction et la garde des livres, archives, pièces écrites, modèles, machines et autres choses appartenant au Bureau des brevets, et, pour l'application de la présente loi, est revêtu de tous les pouvoirs conférés ou qui peuvent être conférés par la Loi sur les enquêtes à un commissaire nommé en vertu de la partie II de cette loi.
(3) Le commissaire occupe son poste à titre amovible et reçoit le traitement annuel fixé par le gouverneur en conseil.
(4) Le commissaire peut, après consultation avec le ministre, déléguer à toute personne qu'il estime compétente les pouvoirs et fonctions que lui confère la présente loi, sauf le pouvoir de déléguer prévu au présent paragraphe.
(5) Il peut être interjeté appel d'une décision prise en vertu de la présente loi par une personne autorisée conformément au paragraphe (4) de la façon dont il peut être interjeté appel d'une décision du commissaire prise en vertu de la présente loi, et aux mêmes conditions.
[. . .]
12. (1) Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut établir les règles et prendre les règlements jugés utiles:
a) pour rendre exécutoire les objets de la présente loi, ou pour en assurer l'application régulière par le commissaire et le personnel du Bureau des brevets;
b) pour rendre effectives les stipulations de tout traité, convention, arrangement ou engagement qui subsiste entre le Canada et tout autre pays;
c) notamment sur les matières suivantes:
(i) la forme et la teneur des demandes de brevets,
(ii) la forme du registre des brevets et de ses index,
(iii) l'enregistrement des cessions, transmissions, licences, renonciations, jugements ou autres documents relatifs à un brevet,
(iv) la forme et la teneur de tout certificat délivré conformément aux termes de la présente loi,
(v) les taxes qui peuvent être imposées relativement à la production de demandes de brevets ou à d'autres formalités remplies en vertu de la présente loi ou en vertu d'une règle ou d'un règlement pris en conformité avec le présent article, ou relativement à des services ou à l'utilisation d'installations qui y sont prévus par le commissaire ou par toute personne employée au Bureau des brevets,
(vi) le paiement de toutes taxes prescrites par une règle ou un règlement pris en conformité avec le présent article, y compris le moment auquel et la manière selon laquelle de telles taxes doivent êtres payées ainsi que les circonstances dans lesquelles de telles taxes antérieurement payées peuvent être remboursées en tout ou partie.
(2) Toute règle ou tout règlement pris par le gouverneur en conseil a la même force et le même effet que s'il avait été édicté aux présentes.
[L.R.C. (1985), ch. P-4, art. 12 (mod. par L.R.C. (1985) (3e suppl.), ch. 33, art. 3)]
12. (1) Le gouverneur en conseil peut, par règle ou règlement:
a) prévoir la forme et le contenu des demandes de brevet;
b) prévoir la forme du registre des brevets et de ses index;
c) prévoir l'enregistrement de tous les documents-- cessions, transmissions, renonciations, jugements ou autres --relatifs à un brevet;
d) prévoir la forme et le contenu des certificats délivrés sous le régime de la présente loi;
e) prescrire les taxes qui peuvent être levées pour le dépôt des demandes de brevet ou les autres formalités d'application de la présente loi ou de ses règles ou règlements ou pour des services ou l'utilisation d'installations qui y sont prévus par le commissaire ou par tout fonctionnaire du Bureau des brevets ou prescrire les modalités de la détermination de ces taxes;
f) prescrire les taxes à payer pour le maintien en état des demandes de brevet ainsi que des droits conférés par les brevets ou les modalités de leur détermination;
g) prévoir le paiement des taxes réglementaires, y compris le moment et la manière selon laquelle ces taxes doivent être payées, les surtaxes qui peuvent être levées pour les paiements en souffrance, ainsi que les circonstances dans lesquelles les taxes peuvent être remboursées en tout ou en partie;
h) rendre effectives les stipulations de tout traité, convention, accord ou entente qui subsiste entre le Canada et tout autre pays;
i) par dérogation aux autres dispositions de la présente loi, rendre effectives les dispositions du Traité de coopération en matière de brevet fait à Washington le 19 juin 1970;
j) prévoir l'inscription, le maintien et la suppression des noms de personne et d'entreprise dans le registre des agents de brevets, et notamment les conditions que doit remplir toute personne ou entreprise pour que son nom soit ainsi inscrit et maintenu;
k) prendre toute autre mesure d'ordre réglementaire prévue par la présente loi;
l) prendre toute autre mesure d'application de la présente loi ou pour en assurer la mise en oeuvre par le commissaire et le personnel du Bureau des brevets;
[. . .]
27. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, l'auteur de toute invention ou le représentant légal de l'auteur d'une invention peut, sur présentation au commissaire d'une pétition exposant les faits, appelée dans la présente loi, le «dépôt de la demande» et en se conformant à toutes les autres prescriptions de la présente loi, obtenir un brevet qui lui accorde l'exclusive propriété d'une invention qui n'était pas:
a) connue ou utilisée par une autre personne avant que lui-même l'ait faite;
b) décrite dans un brevet ou dans une publication imprimée au Canada ou dans tout autre pays plus de deux ans avant la présentation de la pétition ci-après mentionnée;
c) en usage public ou en vente au Canada plus de deux ans avant le dépôt de sa demande au Canada.
(2) Un inventeur ou représentant légal d'un inventeur, qui a fait une demande de brevet au Canada pour une invention à l'égard de laquelle une demande de brevet a été faite dans tout autre pays par cet inventeur ou par son représentant légal avant le dépôt de sa demande au Canada, n'a pas le droit d'obtenir au Canada un brevet couvrant cette invention sauf si sa demande au Canada est déposée:
a) soit avant la délivrance d'un brevet à cet inventeur ou à son représentant légal couvrant cette même invention dans tout autre pays;
b) soit, si un brevet a été délivré dans un autre pays, dans un autre délai de douze mois à compter du dépôt de la première demande, par cet inventeur ou son représentant légal, d'un brevet pour cette invention dans tout autre pays.
(3) Il ne peut être délivré de brevet pour une invention dont l'objet est illicite, non plus que pour de simples principes scientifiques ou conceptions théoriques.
28. (1) Une demande de brevet, déposée au Canada par toute personne ayant le droit d'être protégée aux termes d'un traité ou d'une convention se rapportant aux brevets et auquel ou à laquelle le Canada est partie, qui a, elle-même ou par son agent ou autre représentant légal, antérieurement déposé de façon régulière une demande de brevet couvrant la même invention dans un autre pays qui, par traité, convention ou législation, procure un privilège similaire aux citoyens du Canada, a la même force et le même effet qu'aurait la même demande si elle avait été déposée au Canada à la date où la demande de brevet pour la même invention a été en premier lieu déposée dans cet autre pays, si la demande au Canada est déposée dans un délai de douze mois à compter de la date la plus éloignée à laquelle une telle demande a été déposée dans cet autre pays.
(2) Aucun brevet ne peut être accordé sur une demande de brevet pour une invention qui a été brevetée ou décrite dans un brevet ou dans une publication imprimée au Canada ou dans un autre pays, plus de deux ans avant la date du dépôt réel de la demande au Canada, ou qui a été d'un usage public ou en vente au Canada depuis plus de deux ans avant ce dépôt.
[. . .]
30. (1) Chaque demande de brevet doit être complétée dans un délai de douze mois à compter du dépôt de la demande, à défaut de quoi, ou sur manquement du demandeur de poursuivre sa demande dans les six mois qui suivent toute action que l'examinateur, nommé conformément à l'article 6, a prise concernant la demande et dont avis a été donné au demandeur, une telle demande est tenue pour avoir été abandonnée.
(2) Une demande peut être rétablie sur présentation d'une pétition au commissaire dans un délai de douze mois à compter de la date à laquelle cette demande a été tenue pour abandonnée, et contre paiement de la taxe réglementaire, si le pétitionnaire démontre à la satisfaction du commissaire que le défaut de compléter ou de poursuivre la demande dans le délai spécifié n'était pas raisonnablement évitable.
(3) Une demande ainsi rétablie garde la date de son dépôt original.
[. . .]
40. Chaque fois que le commissaire s'est assuré que le demandeur n'est pas fondé en droit à obtenir la concession d'un brevet, il rejette la demande et, par courrier recommandé adressé au demandeur ou à son agent enregistré, notifie à ce demandeur le rejet de la demande, ainsi que les motifs ou raisons du rejet.
[. . .]
53. (1) Le brevet est nul si la pétition du demandeur, relative à ce brevet, contient quelque allégation importante qui n'est pas conforme à la vérité, ou si le mémoire descriptif et les dessins contiennent plus ou moins qu'il n'est nécessaire pour démontrer ce qu'ils sont censés démontrer, et si l'omission ou l'addition est volontairement faite pour induire en erreur.
(2) S'il apparaît au tribunal que pareille omission ou addition est le résultat d'une erreur involontaire, et s'il est prouvé que le breveté a droit au reste de son brevet, le tribunal rend jugement selon les faits et statue sur les frais. Le brevet est réputé valide quant à la partie de l'invention décrite à laquelle le breveté est reconnu avoir droit.
(3) Le breveté transmet au Bureau des brevets deux copies authentiques de ce jugement. Une copie en est enregistrée et conservée dans les archives du Bureau, et l'autre est jointe au brevet et y est incorporée au moyen d'un renvoi.
[. . .]
59. Dans toute action en contrefaçon de brevet, le défendeur peut invoquer comme moyen de défense tout fait ou manquement qui, d'après la présente loi ou en droit, entraîne la nullité du brevet; le tribunal prend connaissance de cette défense et des faits pertinents et statue en conséquence.
60. (1) Un brevet ou une revendication se rapportant à un brevet peut être déclaré invalide ou nul par la Cour fédérale, à la diligence du procureur général du Canada ou à la diligence d'un intéressé.
(2) Si une personne a un motif raisonnable de croire qu'un procédé employé ou dont l'emploi est projeté, ou qu'un article fabriqué, employé ou vendu ou dont sont projetés la fabrication, l'emploi ou la vente par elle, pourrait, d'après l'allégation d'un breveté, constituer une violation d'un droit de propriété ou privilège exclusif accordé de ce chef, elle peut intenter une action devant la Cour fédérale contre le breveté afin d'obtenir une déclaration que ce procédé ou cet article ne constitue pas ou ne constituerait pas une violation de ce droit de propriété ou de ce privilège exclusif.
(3) À l'exception du procureur général du Canada ou du procureur général d'une province, le plaignant dans une action exercée sous l'autorité du présent article fournit, avant de s'y engager, un cautionnement pour les frais du breveté au montant que le tribunal peut déterminer. Toutefois, le défendeur dans toute action en contrefaçon de brevet a le droit d'obtenir une déclaration en vertu du présent article sans être tenu de fournir un cautionnement.
[. . .]
77. Tout brevet délivré avant ou après le 1er août 1935, ou à cette date, est réputé avoir été régulièrement délivré si toutes les conditions de la délivrance d'un brevet valide qui ont pu être ou seront en vigueur, soit à la date de la demande du brevet, soit à la date de sa délivrance, ont été remplies. Toutefois, les dispositions en vigueur concernant la validité continue de brevets après leur délivrance s'appliquent à tous les brevets à quelque époque qu'ils aient été accordés.
Dispositions pertinentes de la Loi sur les brevets postérieures au 1er octobre 1989.
12. (1) Le gouverneur en conseil peut, par règle ou règlement:
a) prévoir la forme et le contenu des demandes de brevet;
b) prévoir la forme du registre des brevets et de ses index;
c) prévoir l'enregistrement de tous documents--cessions, transmissions, renonciations, jugements ou autres-- relatifs à un brevet;
d) prévoir la forme et le contenu des certificats délivrés sous le régime de la présente loi;
e) prescrire les taxes qui peuvent être levées pour le dépôt des demandes de brevet ou les autres formalités d'application de la présente loi ou de ses règles ou règlements ou pour des services ou l'utilisation d'installation qui y sont prévus par le commissaire ou par tout fonctionnaire du Bureau des brevets ou prescrire les modalités de la détermination de ces taxes;
f) prescrire les taxes à payer pour le maintien en état des demandes de brevet ainsi que des droits conférés par les brevets ou les modalités de leur détermination;
g) prévoir le paiement des taxes réglementaires, y compris le moment et la manière selon laquelle ces taxes doivent être payées, les surtaxes qui peuvent être levées pour les paiements en souffrance, ainsi que les circonstances dans lesquelles les taxes peuvent être remboursées en tout ou en partie;
h) rendre effectives les stipulations de tout traité, convention, accord ou entente qui subsiste entre le Canada et tout autre pays;
i) par dérogation aux autres dispositions de la présente loi, rendre effectives les dispositions du Traité de coopération en matière de brevet fait à Washington le 19 juin 1970;
j) prévoir l'inscription, le maintien et la suppression des noms de personne et d'entreprise dans le registre des agents de brevets, et notamment les conditions que doit remplir toute personne ou entreprise pour que son nom soit ainsi inscrit et maintenu;
[. . .]
k) prendre toute autre mesure d'ordre réglementaire prévue par la présente loi;
l) prendre toute autre mesure d'application de la présente loi ou pour en assurer la mise en oeuvre par le commissaire et le personnel du Bureau des brevets;
[. . .]
27. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, l'inventeur ou son représentant légal peut, sur présentation au commissaire d'une pétition circonstanciée-- appelée dans la présente loi «dépôt de la demande»--et à condition de satisfaire aux autres obligations de cette loi, se faire délivrer un brevet lui donnant la propriété exclusive de l'invention en cause, sauf dans les cas suivants:
a) s'agissant d'une demande visée par l'article 28, sa date de priorité est postérieure:
(i) soit à la date de dépôt au Canada par toute autre personne d'une autre demande de brevet décrivant la même invention,
(ii) soit à la date de priorité d'une autre demande de brevet décrivant la même invention et également visée par l'article 28 et déposée au Canada par tout autre personne à un moment quelconque;
b) s'agissant d'une demande non visée par l'article 28:
(i) ou bien, avant la date de son dépôt, une autre demande de brevet décrivant la même invention est déposée au Canada par toute autre personne,
(ii) ou bien la date de son dépôt est antérieure à celle du dépôt au Canada par toute autre personne d'une autre demande de brevet, visée par l'article 28, décrivant la même invention mais postérieure à la date de priorité de cette dernière demande;
c) avant le dépôt de la demande ou avant la date de priorité de celle-ci, l'invention a, de la part d'une personne non visée à l'alinéa d), fait l'objet d'une communication qui l'a rendue accessible au public au Canada ou ailleurs;
d) plus d'un an avant la date de dépôt de la demande, l'invention a fait l'objet de la part du demandeur, ou d'un tiers ayant eu l'information à cet égard de façon directe ou autrement, d'une communication qui l'a rendue accessible au public au Canada ou ailleurs.
(1.1) L'inventeur ou son représentant légal peut, dans les douze mois suivant le dépôt d'une demande de brevet pour l'invention, déposer une deuxième demande qui décrit la même invention.
(1.2) Cette deuxième demande est présumée, pour l'application de la présente loi, avoir été déposée à la date du dépôt de la première demande si celle-ci remplit, à la date du dépôt de la deuxième demande, les conditions suivantes:
a) elle n'a pas été retirée, abandonnée ou refusée;
b) elle n'est pas devenue accessible pour consultation sous le régime de l'article 10;
c) elle n'a pas été invoquée pour réclamer un droit de priorité dans tout autre pays.
(1.3) Le paragraphe (1.2) n'est pas applicable à l'égard d'une deuxième demande de brevet, sauf si le demandeur, dans les six mois du dépôt de celle-ci, réclame la protection prévue à ce paragraphe et avise le commissaire de la date du dépôt et du numéro de la première demande.
(1.4) Dans le cas du dépôt d'une deuxième demande conformément au paragraphe (1.1), la première demande est présumée, pour l'application de la présente loi, avoir été retirée le lendemain de ce dépôt.
(1.5) Pour l'application du paragraphe (1), en cas de simultanéité, réelle ou présumée, du dépôt de demandes décrivant la même invention, chaque demande est examinée et un brevet est accordé sans égard à l'autre demande.
(1.6) Pour l'application du paragraphe (1), la demande retirée avant d'être devenue accessible au titre de l'article 10 est réputée n'avoir jamais été déposée.
(2) Un inventeur ou représentant légal d'un inventeur, qui a fait une demande de brevet au Canada pour une invention à l'égard de laquelle une demande de brevet a été faite dans tout autre pays par cet inventeur ou par son représentant légal avant le dépôt de sa demande au Canada, n'a pas le droit d'obtenir au Canada un brevet couvrant cette invention sauf si sa demande au Canada est déposée:
a) soit avant la délivrance d'un brevet à cet inventeur ou à son représentant légal couvrant cette même invention dans tout autre pays;
b) soit, si un brevet a été délivré dans un autre pays, dans un délai de douze mois à compter du dépôt de la première demande, par cet inventeur ou son représentant légal, d'un brevet pour cette invention dans tout autre pays.
(3) Il ne peut être délivré de brevet pour une invention dont l'objet est illicite, non plus que pour de simples principes scientifiques ou conceptions théoriques.
27.1 (1) Le demandeur est tenu de payer au commissaire, afin de maintenir sa demande en état, les taxes réglementaires pour chaque période réglementaire.
28. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la demande de brevet d'invention déposée au Canada par quiconque dont les droits sont protégés par un traité ou une convention relatifs aux brevets auquel ou à laquelle le Canada est partie et qui a personnellement ou dont l'agent, le représentant légal ou le prédécesseur en droit a déposé selon les règles une demande de brevet décrivant la même invention dans un autre pays qui par traité, convention ou loi accorde une protection similaire aux citoyens canadiens, a la même force et le même effet qu'aurait cette demande si elle avait été déposée au Canada à la date où elle a été déposée en premier lieu dans cet autre pays. La demande doit toutefois être déposée au Canada dans les douze mois suivant cette date.
(2) Le paragraphe (1) n'est pas applicable à l'égard d'une demande de brevet déposée au Canada sauf si le demandeur, dans les six mois suivant le dépôt, réclame la protection prévue à ce paragraphe et avise le commissaire, en la forme réglementaire, du nom du pays où la demande a été déposée, de la date du dépôt et du numéro de chacune des demandes sur lesquelles le demandeur fonde sa réclamation.
(3) Dans les cas où une personne ou son agent, représentant légal ou prédécesseur en droit a déjà, lors du dépôt d'une demande de brevet au Canada, déposé selon les règles deux demandes de brevet décrivant la même invention dans un pays visé au paragraphe (1), la deuxième des demandes déposées dans ce pays est, pour l'application de ce paragraphe, présumée être la demande déposée en premier lieu par cette personne, son agent, son représentant légal ou prédécesseur en droit si, à la date du dépôt de la deuxième demande, la première demande a été retirée, abandonnée ou refusée, sans avoir été accessible pour consultation et sans laisser subsister de droit, et n'a pas été invoquée pour réclamer un droit de priorité au Canada ou ailleurs.
(4) Des priorités multiples peuvent être réclamées pour une demande de brevet, même si elles sont fondées sur des demandes déposées dans des pays différents, et pour toute revendication contenue dans une demande de brevet. Le délai prévu au paragraphe (1) court cependant à compter de la première date de priorité.
(5) Le droit de priorité s'applique, dans le cas d'une réclamation de priorité, même multiple, aux éléments décrits dans les demandes de brevet sur lesquelles est fondée la réclamation de priorité.
(6) Pour l'application de présent article, est assimilée à un prédécesseur en droit toute personne par l'intermédiaire de laquelle un demandeur de brevet au Canada réclame le droit à celui-ci.
[Art. 28 (mod. par L.C. 1993, ch. 15, art. 33]
28. (1) La date de dépôt d'une demande de brevet est la date à laquelle le commissaire reçoit les documents, renseignements et taxes réglementaires prévus pour l'application du présent article. S'ils sont reçus à des dates différentes, il s'agit de la dernière d'entre elles.
(2) Pour l'application du paragraphe (1), le commissaire peut, s'il estime que cela est équitable, fixer une date de réception des taxes antérieure à celle à laquelle elles ont été reçues.
[. . .]
46. (1) Le titulaire d'un brevet délivré par le Bureau des brevets conformément à la présente loi après l'entrée en vigueur du présent article est tenu de payer au commissaire, afin de maintenir les droits conférés par le brevet en état, les taxes réglementaires pour chaque période réglementaire.
(2) En cas de non-paiement dans le délai réglementaire des taxes réglementaires, le brevet est périmé.
[. . .]
73. (1) La demande de brevet est considérée comme abandonnée si le demandeur omet, selon le cas:
a) de répondre de bonne foi, dans le cadre d'un examen, à toute demande de l'examinateur, dans les six mois suivant cette demande ou dans le délai plus court déterminé par le commissaire;
b) de se conformer à l'avis mentionné au paragraphe 27(6);
c) de payer, dans le délai réglementaire, les taxes visées à l'article 27.1;
d) de présenter la requête visée au paragraphe 35(1) ou de payer la taxe réglementaire dans le délai réglementaire;
e) de se conformer à l'avis mentionné au paragraphe 35(2);
f) de payer les taxes réglementaires mentionnées dans l'avis d'acceptation de la demande de brevet dans les six mois suivant celui-ci.
(2) Elle est aussi considérée comme abandonnée dans les circonstances réglementaires.
(3) Elle peut être rétablie si le demandeur:
a) présente au commissaire, dans le délai réglementaire, une requête à cet effet;
b) prend les mesures qui s'imposaient pour éviter l'abandon;
c) paie les taxes réglementaires avant l'expiration de la période réglementaire.
(4) La demande abandonnée au titre de l'alinéa (1)f) et rétablie par la suite est sujette à modification et à nouvel examen.
(5) La demande rétablie conserve sa date de dépôt.
Dispositions pertinentes des Règles sur les brevets antérieures au 1er octobre 1989.
2. [. . .]
«inventeur indépendant» s'entend d'un particulier qui est l'auteur d'une invention, sauf
a) un particulier qui a cédé ou qui est tenu, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à une personne qui n'est ni un particulier ni une petite entreprise,
b) un particulier qui a cédé ou qui est tenu, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à un autre particulier ou à une petite entreprise, et qui est au courant de la cession future d'un droit sur l'invention à une personne visée à l'alinéa a), ou de l'existence d'un contrat ou d'une autre obligation légale prévoyant la cession d'un tel droit à cette dernière;
[. . .]
«petite entité» s'entend d'un inventeur indépendant ou d'une petite entreprise
«petite entreprise» désigne, dans le cas d'une invention, une personne qui n'est pas un particulier et dont les recettes annuelles brutes ne dépassent pas deux millions de dollars (ci-après appelée «entreprise» dans la présente définition) à l'exclusion d'une entreprise
a) qui se livre à des activités de fabrication et a à son service plus de 100 employés,
b) qui se livre à des activités autres que de fabrication et a à son service plus de 50 employés,
c) a cédé ou est tenue, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à une personne qui n'est ni un particulier ni une petite entreprise au sens du paragraphe a) ou b), ou
d) a cédé ou est tenue, par un contrat ou une autre obligation légale, de céder un droit sur l'invention à un particulier ou une petite entreprise au sens du paragraphe c), et qui est au courant de la cession future d'un droit sur l'invention à une personne qui n'est ni un particulier ni une personne décrite dans le présent alinéa, ou de l'existence d'un contrat ou d'une autre obligation légale prévoyant la cession d'un tel droit à cette dernière;
[. . .]
11. (1) Lorsqu'une personne remplit une formalité quelconque ou demande la dispensation d'un service par le Bureau, elle doit verser la taxe qui est indiqué à l'annexe II pour cette formalité ou ce service.
(2) Les taxes exigibles en vertu du présent article doivent être envoyées au commissaire à Ottawa, en monnaie légale, ou sous forme de chèques (visés si le Bureau l'exige), traites bancaires ou mandats de postes et doivent être établis à l'ordre du Receveur général.
(3) Le montant de toute taxe payable en vertu du paragraphe (1) doit être celui qui est indiqué à l'annexe II pour la formalité remplie ou le service rendu, selon le cas, après déductions pour la perception, le change, l'impôt et autres frais.
[. . .]
(6) Le commissaire doit, conformément à l'annexe III, effectuer les remboursements de taxes versées aux termes des présentes règles à la personne qui a versé les taxes ou à son représentant légal.
[. . .]
32. (1) La date de dépôt attribuée à une demande sera celle à laquelle la taxe de dépôt prescrite aura été versée et à laquelle les pièces suivantes qui y ont trait auront été déposées:
a) une pétition souscrite par le demandeur ou par un agent des brevets en son nom;
b) un mémoire descriptif, comprenant les revendications;
c) tout dessin dont il est question dans le mémoire descriptif; et
d) un précis de la divulgation, qui peut être inséré au début du mémoire descriptif.
(2) Lorsque les prescriptions contenues aux alinéas (1)a) à c) ont été suivies à l'égard d'une demande, on peut, même si les conditions que referme ledit paragraphe n'ont pas toutes été remplies, attribuer une date de dépôt à ladite demande si le commissaire est convaincu qu'il serait injuste de ne pas le faire, et, dans un tel cas, la date de dépôt attribuée à la demande doit être celle où l'on s'est conformé aux alinéas (1)a) à c).
[. . .]
34. Une demande est censée complète seulement lorsque les conditions de l'article 32 ont été remplies, les taxes relatives à la demande, y compris les taxes prescrites à l'égard des revendications supplémentaires ainsi que du complètement, ont été versées et les documents suivants qui s'y rapportent ont été déposés:
a) une pétition selon les formules 1 à 10 de l'annexe I selon le cas;
b) un mémoire descriptif, comprenant les revendications selon la formule 24 de l'annexe I;
c) une copie supplémentaire des revendications;
d) des dessins, en double (un sur carton Bristol et un sur toile à calquer ou sur papier fort blanc), s'il est question de dessins dans le mémoire descriptif;
e) une nomination d'agent selon la formule 11 de l'annexe I lorsqu'elle est exigée aux termes du paragraphe 33(4);
f) une nomination de coagent, lorsque le présent règlement l'exige, formule 12 de l'annexe I;
g) une preuve attestant que le demandeur, s'il n'est pas l'inventeur, est un représentant légal de l'inventeur;
h) une désignation de représentant, si, d'après la pétition, il semble que le demandeur ne réside ni ne fait des opérations à une adresse spécifiée au Canada, et une déclaration signée par le représentant qui accepte la désignation à ce titre, lorsque la désignation de représentant n'est pas déposée par ce dernier; et
i) un précis de la divulgation, en double.
[. . .]
61. (1) Toute pétition demandant le rétablissement d'une demande abandonnée doit être attestée par affidavit et énoncer les faits qui ont causé cet abandon, la date de découverte de cet abandon, ainsi que les démarches faites en vue du rétablissement de la demande depuis cette date jusqu'à la présentation de ladite pétition.
(2) Aucune pétition pour le rétablissement d'une demande abandonnée ne sera agréée à moins que le commissaire ne soit convaincu que sa présentation n'a comporté aucun retard inutile, et que le demandeur n'ait fait, avant ou à la date de sa présentation, les démarches qu'il aurait dû faire dans le délai spécifié à l'article 32 de la Loi afin d'éviter l'abandon de la demande, ou qu'il n'explique à la satisfaction du commissaire qu'il est dans l'impossibilité de faire des démarches mais qu'il sera en mesure de les faire dans un délai que déterminera le commissaire.
[. . .]
137. Le commissaire peut exiger l'application de toute mesure, non autrement prévue par la Loi ou les présentes règles, qui est convenable et nécessaire pour qu'une demande soit complétée ou poursuivie et que des copies de brevets soient reproduites.
Dispositions pertinentes de l'annexe 2 [mod. par DORS/85-383, art. 6] des Règles sur les brevets antérieures au 1er octobre 1989.
1. Dépôt d'une demande de brevet |
Petite entité $150,00
Personne autre qu'une petite entité 300,00
2. Taxe finale |
Petite entité 350,00
Personne autre qu'une petite entité 700,00 |
plus, pour chaque page du mémoire |
descriptif et des dessins en sus
de 100 pages 4,00
[. . .]
6. Demande de rétablissement d'une demande abandonnée 400,00 |
[. . .]
8. Complètement d'une demande non complète à la date de son dépôt 200,00 |
Dispositions pertinentes des Règles sur les brevets postérieures au 1er octobre 1989.
26. (1) Sous réserve du paragraphe (2) et des autres dispositions des présentes règles, sauf pour l'application de la partie V, le commissaire est autorisé à proroger tout délai prévu aux présentes règles ou fixé par lui en vertu de la Loi pour l'accomplissement d'un acte, s'il est convaincu que les circonstances le justifient et si, avant l'expiration du délai, la prorogation a été demandée et la taxe prévue à l'article 22 de l'annexe II a été versée.
(2) Lorsque, pour l'application de l'alinéa 73(1)a) de la Loi, le commissaire détermine un délai plus court pour permettre de répondre de bonne foi, dans le cadre d'un examen, à toute demande de l'examinateur, il n'est pas autorisé à proroger le délai de réponse au-delà des six mois suivant la demande.
[. . .]
157. L'article 26 ne s'applique pas aux délais prévus aux articles 154, 155 et 156.
Dispositions pertinentes de l'annexe 2 des Règles sur les brevets postérieures au 1er octobre 1989.
1. Dépôt d'une demande de brevet |
By a small entity $150.00
Petite entité $150,00
Personne autre qu'une petite entité 300,00
2. Taxe finale: |
a) Demande déposée avant le 1er octobre 1989
(i) Petite entité 350,00
(ii) Personne autre qu'une petite entité 700,00
b) Demande déposée après le 1er octobre 1989
(i) Petite entité 150,00
(ii) Personne autre qu'une petite entité 300,00
plus, pour chaque page du mémoire descriptif et des dessins en sus de 100 pages 4,00
[. . .]
6. Demande de rétablissement d'une demande andonnée 200,00 |
[. . .]
8. Complètement d'une demande non complète à la date de son dépôt 200,00 |
[. . .]
38. Maintien en état d'une demande de brevet
a) Au plus tard les deuxième, troisième et quatrième anniversaires du dépôt de la demande au Canada:
(i) Petite entité 50,00
(ii) Personne autre qu'une petite entité 100,00
b) Au plus tard les cinquième, sixième, septième, huitième et neuvième anniversaires du dépôt de la demande au Canada:
(i) Petite entité 75,00
(ii) Personne autre qu'une petite entité 150,00
c) Au plus tard les dixième, onzième, douzième, treizième et quatorzième anniversaires du dépôt de la demande au Canada:
(i) Petite entité 100,00
(ii) Personne autre qu'une petite entité 200,00
d) Au plus tard les quinzième, seizième, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième anniversaires du dépôt de la demande au Canada:
(i) Petite entité 200,00
(ii) Personne autre qu'une petite entité 400,00