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A-273-01

2002 CAF 296

Ministre du Développement des ressources humaines (demandeur)

c.

Brenda Woodcock (défenderesse)

Répertorié: Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Woodcock (C.A.)

Cour d'appel, juges Isaac, Sharlow et Malone J.C.A.-- Ottawa, 17 avril et 23 juillet 2002.

Pensions -- Contrôle judiciaire d'une décision de la Commission d'appel des pensions selon laquelle la défenderesse a droit à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) -- En 1997, la défenderesse a présenté une demande pour une pension d'invalidité et le partage des gains non ajustés à la suite d'un divorce en vertu de l'art. 55.1 -- Réputée invalide 15 mois avant le dépôt de la demande -- Aucun droit à une pension d'invalidité en vertu de l'art. 44(1)b)(i), (ii) -- L'art. 44(1)b)(iv) ne sauvegarde le droit à une pension d'invalidité que si un effet rétroactif est donné à l'attribution de droits à pension en vertu de l'art. 55.1 -- Aucun fondement pour refuser d'accepter une demande fondée sur l'art. 55.1 en 1993 -- Sans qu'il soit expressément autorisé que la date de prise d'effet d'une attribution en vertu de l'art. 55.1 soit antérieure à la demande, rien n'empêche une attribution rétroactive dans un cas où l'art. 44(1)b)(iv) exige que l'admissibilité à une pension d'invalidité soit déterminée sur la base d'une demande hypothétique -- L'art. 54.2 du Règlement sur le RPC qui fixe la date à laquelle prend effet l'attribution est sans objet si la date à laquelle prend effet l'attribution doit toujours être la date du divorce.

Interprétation des lois -- Droit de la défenderesse à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) sauvegardé par l'art. 44(1)b)(iv) seulement si un effet rétroactif est donné à l'attribution de droits à pension en vertu de l'art. 55.1 -- Aucun fondement pour refuser d'accepter une demande liée à l'art. 55.1 en 1993 -- Rien dans le RPC n'autorise expressément que la date de prise d'effet d'une attribution en vertu de l'art. 55.1 soit antérieure à la demande, cependant rien n'empêche une attribution rétroactive dans un cas où l'art. 44(1)b)(iv) exige que l'admissibilité à une pension d'invalidité soit déterminée sur la base d'une demande hypothétique -- L'art. 54.2 du Règlement sur le RPC qui fixe la date à laquelle prend effet l'attribution est sans objet si la date à laquelle prend effet l'attribution doit toujours être la date du divorce.

Il s'agissait d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Commission d'appel des pensions selon laquelle la défenderesse avait droit à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) tel qu'il était rédigé le 2 septembre 1997. Le sous-alinéa 44(1)b)(iv) du RPC, en vigueur depuis le 26 juin 1992, prévoit le paiement d'une pension d'invalidité à un cotisant invalide âgé de moins de 65 ans à qui une pension d'invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide si une demande de pension d'invalidité avait été reçue avant le moment où elle a effectivement été reçue. Cette disposition a été adoptée afin de protéger de la perte d'admissibilité les personnes qui présentent en retard une demande de prestation d'invalidité. L'article 55.1 prévoit le partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension après un divorce.

La défenderesse a versé des contributions à l'égard d'un revenu d'emploi en 1970, 1984 et 1989. On lui a aussi attribué des droits à pension relativement aux gains de son ex-mari pour 1989, 1990, 1991 et 1992 parce qu'en présentant sa demande de pension d'invalidité, elle avait aussi présenté en 1997 une demande pour l'attribution des gains ouvrant droit à pension en vertu de l'article 55.1. Sa période cotisable a pris fin à la date à laquelle elle était «réputée être devenue invalide», c'est-à-dire pour la présente analyse, le 2 juin 1996, 15 mois avant qu'elle n'ait déposé sa demande le 2 septembre 1997. Il était bien établi que le sous-alinéa 44(1)b)(iv) exige que le ministre détermine si un demandeur aurait été qualifié pour une pension d'invalidité si la demande avait été déposée plus tôt qu'elle ne l'a été. Le ministre a fait valoir que la défenderesse n'aurait pas été qualifiée en 1993 pour une pension d'invalidité puisque son statut de cotisante pendant deux des trois années avant sa date d'invalidité n'était basé que sur une attribution de droits à pension en vertu de l'article 55.1, attribution qui n'était pas entrée en vigueur avant qu'elle ne l'ait demandée en septembre 1997. La défenderesse a soutenu que l'interprétation du ministre devrait être rejetée parce qu'elle irait à l'encontre de l'objectif recherché par le sous-alinéa 44(1)b)(iv).

Arrêt (le juge Malone, J.C.A. étant dissident): la demande est rejetée.

Le juge Sharlow J.C.A. (avec l'appui du juge Isaac J.C.A.): Le droit de la défenderesse à une pension d'invalidité ne pouvait être sauvegardé par le sous-alinéa 44(1)b)(iv) que si le ministre avait l'obligation de donner un effet rétroactif à l'attribution de droits à pension en vertu de l'article 55.1. Il n'y avait aucun fondement en vertu duquel le ministre aurait pu refuser d'accepter une demande fondée sur l'article 55.1 déposée en 1993. Avec l'attribution de droits à pension, la défenderesse aurait été qualifiée en 1993 pour une pension d'invalidité en vertu du sous-alinéa 44(1)b)(ii). Alors que rien dans le RPC n'indique que la date de prise d'effet d'une attribution en vertu de l'article 55.1 peut être antérieure à la demande d'attribution, sauf dans les situations envisagées par l'article 55.3 concernant un demandeur souffrant d'incapacité mentale, rien n'empêche le ministre de reconnaître une attribution rétroactive liée à l'article 55.1 dans un cas comme celui-ci où le sous-alinéa 44(1)b)(iv) exige que l'admissibilité à une pension d'invalidité soit déterminée sur la base d'une demande hypothétique à une date antérieure quelconque.

L'article 54.2 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada fixe la date à laquelle prend effet le partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension ou son approbation et celle à laquelle prend effet l'attribution de gains ouvrant droit à pension à la suite d'un partage. Cet article du Règlement serait sans objet si la date à laquelle prend effet le partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension suivant une demande en vertu de l'article 55.1 devait toujours être la date du divorce. Cependant, la méthode interprétative adoptée par la Commission d'appel des pensions n'exigeait pas un tel effet rétroactif automatique dans tous les cas. Une attribution en vertu de l'article 55.1 n'aurait plutôt un effet rétroactif que lorsque le sous-alinéa 44(1)b)(iv) s'applique en raison d'une demande tardive de pension d'invalidité, et même dans ce cas, il ne s'appliquerait que si les faits de la cause faisaient en sorte qu'il soit raisonnable de présumer, comme en l'espèce, que la demande de pension d'invalidité et celle relative à l'article 55.1 auraient été déposées au même moment ou à peu près; il n'y avait aucune raison de conclure que la demande faite en vertu de l'article 55.1 n'aurait pas été acceptée si elle avait été présentée à ce moment-là.

Le juge Malone J.C.A. (dissident): L'observation de la défenderesse était fondée sur la prémisse que celle-ci avait un droit absolu aux droits à pension attribués par suite de son divorce bien qu'elle ne les ait pas réellement demandés avant 1997. Cette prémisse était erronée. Selon l'article 55.1, le seul droit découlant automatiquement du divorce est celui de demander une attribution de droits à pension. L'attribution elle-même dépend que demande en soit faite. Il est possible que le ministre ne puisse refuser l'attribution si demande en est faite et si les conditions sont remplies, mais l'attribution ne peut être autorisée que s'il y a demande. En fait, il y a des circonstances dans lesquelles le ministre peut refuser d'effectuer un partage ou l'annuler, comme, par exemple, en vertu des paragraphes 55.1(5) et 55.2(3). En conséquence, prima facie, la date de prise d'effet de l'attribution ne peut pas être antérieure à la demande. Le RPC n'indique pas que la date de prise d'effet d'une attribution en vertu de l'article 55.1 puisse être antérieure à la demande d'attribution, sauf dans les situations envisagées par l'article 55.3 concernant un demandeur souffrant d'incapacité mentale, et il n'existe aucun fondement pour conclure qu'une telle rétroactivité automatique soit nécessairement implicite. Une interprétation favorisant la rétroactivité automatique est difficilement conciliable avec le libellé de la loi. L'article 54.2 du Règlement contredit également l'inférence selon laquelle une attribution en vertu de l'article 55.1 est automatiquement, ou par voie de conséquence nécessaire, rétroactive à la date du divorce, parce que cet article serait sans objet si la date de prise d'effet du partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension suivant une demande en vertu de l'article 55.1 devait toujours être la date du divorce.

lois et règlements

Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8, art. 2(1) «cotisant» (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 1), 42(2)b) (mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 23), 44(1)b) (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 13), (i) (mod., idem), (ii) (mod., idem), (iv) (mod. par L.C. 1992, ch. 2, art. 1), (2) (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 13), 55.1 (édicté par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 23; L.C. 1991, ch. 44, art. 7; 1995, ch. 33, art. 27), 55.2(3) (édicté par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 23), 55.2(11) (édicté, idem), 55.3 (édicté par L.C. 1991, ch. 44, art. 9).

Règlement sur le Régime de pensions du Canada, C.R.C., ch. 385, art. 54.2 (édicté par DORS/86-1133, art. 11; 93-290, art. 4).

jurisprudence

décisions citées:

Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27; (1998), 36 O.R. (3d) 418; 154 D.L.R. (4th) 193; 50 C.B.R. (3d) 163; 33 C.C.E.L. (2d) 173; 221 N.R. 241; 106 O.A.C. 1; Sarvanis c. Canada (2002), 210 D.L.R. (4th) 262; 284 N.R. 263 (C.S.C.).

DEMANDE de contrôle judiciaire d'une décision de la Commission d'appel des pensions selon laquelle la défenderesse avait droit à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada tel qu'il était rédigé le 2 septembre 1997. Demande rejetée.

ont comparu:

Katia Bustros pour le demandeur.

Linda E. Tranter pour la défenderesse.

avocats inscrits au dossier:

Le sous-procureur général du Canada pour le demandeur.

Lanark County Legal Clinic, Perth, pour la défenderesse.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

[1]Le juge Sharlow, J.C.A.: La défenderesse Brenda Woodcock tente d'établir son droit à une pension d'invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8, tel qu'il se lisait le 2 septembre 1997 au moment où elle a déposé sa demande. Le ministre a rejeté la demande en raison du fait que Mme Woodcock ne satisfaisait pas aux exigences en matière de cotisations pour une pension d'invalidité. Mme Woodcock en a interjeté appel auprès d'un tribunal de révision qui, dans une décision datée du 9 juin 1999, a accueilli son appel. Le ministre a demandé et obtenu l'autorisation d'en appeler auprès de la Commission d'appel des pensions. Dans une décision datée du 22 janvier 2001, la Commission d'appel des pensions a rejeté l'appel du ministre. Le ministre a formulé une demande de contrôle judiciaire de cette décision. Je suis d'avis que, pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire du ministre devrait être rejetée.

[2]Au coeur du présent litige, on retrouve le sous-alinéa 44(1)b)(iv) du Régime de pensions du Canada, lequel a été édicté par l'article 1 de L.C. 1992, ch. 2, et il est entré en vigueur le 26 juin 1992. Le sous-alinéa 44(1)b)(iv) prévoit ce qui suit [art. 44(1)b) (mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 13)]:

44. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie:

[. . .]

b) une pension d'invalidité doit être payée à un cotisant qui n'a pas atteint l'âge de soixante-cinq ans, à qui aucune pension de retraite n'est payable, qui est invalide et qui:

[. . .]

(iv) soit est un cotisant à qui une pension d'invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide, si une demande de pension d'invalidité avait été reçue avant le moment où elle a effectivement été reçue;

[3]Avant l'adoption du sous-alinéa 44(1)b)(iv), une personne pouvait perdre le droit à une pension d'invalidité en déposant la demande plus de 15 mois après être devenue invalide. Cela était dû à l'alinéa 42(2)b) [mod. par L.C. 1992, ch. 1, art. 23], qui prévoit:

42. (1) [. . .]

(2) Pour l'application de la présente loi:

[. . .]

b) une personne est réputée être devenue ou avoir cessé d'être invalide à la date qui est déterminée, de la manière prescrite, être celle où elle est devenue ou a cessé d'être, selon le cas, invalide, mais en aucun cas une personne n'est réputée être devenue invalide à une date antérieure de plus de quinze mois à la date de la présentation d'une demande à l'égard de laquelle la détermination a été établie.

[4]Le but recherché par le sous-alinéa 44(1)b)(iv) a été expliqué comme suit lorsque la loi modificative a été présentée ([traduction] «Questions et réponses concernant le projet de loi visant à modifier la Loi sur le Régime de pensions du Canada», jointes à un mémoire du ministre de la Santé nationale et du Bien-être social aux membres de la Chambre des communes et aux sénateurs daté de février 1992, dossier de demande du demandeur, volume 1, page 221, aux pages 224 à 226):

1.Q.     Quel changement propose-t-on d'apporter au Régime de pensions du Canada?

R.         On veut ajouter une disposition visant à protéger les personnes qui présentent en retard une demande de prestation d'invalidité, pour éviter qu'elles ne perdent leur admissibilité. Ces personnes, qui satisfaisaient aux exigences en matière de cotisations au Régime lorsqu'elles sont devenues invalides, mais qui ont tardé à présenter une demande, ne perdront plus leur droit à une pension d'invalidité.

[. . .]

3.Q.     Comment quelqu'un peut-il perdre son admissibilité à des prestations seulement en tardant à présenter une demande?

R.         Les règles d'admissibilité signifient que, lorsqu'une personne quitte le marché du travail après avoir travaillé régulièrement pendant un certain nombre d'années, elle peut bénéficier pendant cinq ou six ans de la protection du RPC. Cependant, étant donné que les règles interdisent de considérer une personne comme invalide plus de quinze mois avant qu'elle ne présente sa demande, une personne peut être admissible à des prestations au moment où elle devient invalide, mais peut ne plus satisfaire les conditions d'admissibilité à la date à laquelle elle présente sa demande.

4.Q.     De quelle façon les nouvelles dispositions aideront-elles les personnes qui sont en retard pour présenter leur demande?

R.         Les personnes qui sont en retard pour présenter leur demande de prestation ne perdront plus automatiquement leur admissibilité du simple fait qu'elles ne satisfont pas aux exigences du Régime relatives aux années de cotisation. On prendra plutôt une décision en se demandant si ces personnes pouvaient ou non présenter une demande et recevoir des prestations d'invalidité au moment où elles jouissaient de la protection du Régime. Dans l'affirmative, une pension d'invalidité pourra être accordée.

[5]L'autre disposition ayant un effet sur le présent appel est l'article 55.1 [édicté par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 23; L.C. 1991, ch. 44, art. 7] dont les parties pertinentes prévoient:

55.1 (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article et de l'article 55.2 et 55.3, il doit y avoir partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension dans les circonstances suivantes:

a) lorsque est rendu un jugement irrévocable de divorce, un jugement accordant un divorce conformément à la Loi sur le divorce ou un jugement en nullité de mariage, dès que le ministre est informé du jugement et dès qu'il reçoit les renseignements prescrits;

[6]Le but recherché par l'article 55.1 est évident. Il a été édicté dans l'intention de faciliter le partage des «gains non ajustés ouvrant droit à pension» (que l'on appelle familièrement «droits à pension») entre les anciens conjoints après un divorce. D'autres parties de l'article 55.1 permettent des partages similaires après la rupture d'un mariage ou d'une relation conjugale similaire.

Le droit de Mme Woodcock si le sous-alinéa 44(1)b)(iv) du Régime de pensions du Canada n'avait pas été adopté

[7]Il est utile, afin de comprendre les questions soulevées dans le présent litige, d'examiner de quelle façon le droit de Mme Woodcock à une pension d'invalidité aurait été déterminé si le sous-alinéa 44(1)b)(iv) n'avait pas été adopté. À cet égard, il s'agit de remarquer que, puisque la demande de Mme Woodcock a été rejetée en raison du fait qu'elle avait fait défaut de satisfaire aux exigences en matière de cotisations, aucune décision n'a été rendue quant à savoir si elle était ou non invalide, ou avait été invalide au moment où la demande avait été faite ou dans une année antérieure. Il semble que, selon elle, elle était invalide en 1993 ou peut-être avant. Toutefois, pour la présente partie de l'analyse (qui a pour but d'examiner la situation sans égard à la disposition relative aux demandes tardives), je présumerai en sa faveur que son invalidité a débuté le 2 juin 1996, 15 mois avant qu'elle n'ait déposé sa demande le 2 septembre 1997.

[8]Dans le but de se qualifier pour une pension d'invalidité, une personne doit être un «cotisant» selon la définition du paragraphe 2(1) [mod. par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 1] de la Loi:

2. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

[. . .]

«cotisant» Personne qui a versé une cotisation d'employé ou une cotisation à l'égard des gains provenant du travail qu'elle exécute pour son propre compte. Sont assimilées à un cotisant une personne dont le montant des gains sur lesquels une cotisation a été versée pour une année selon la présente loi, calculés ainsi que le prévoit le sous-alinéa 53b)(i), excède zéro, ainsi qu'une personne à laquelle des gains non ajustés ouvrant droit à pension ont été attribués en vertu de l'article 55, 55.1 ou 55.2.

[9]Mme Woodcock est clairement une cotisante. Elle a versé des cotisations à l'égard de son propre revenu d'emploi en 1970, 1984 et 1989.

[10]Mme Woodcock est également une personne à qui des droits à pension ont été attribués en vertu de l'article 55.1. Cela est dû au fait que, lorsqu'elle a formulé une demande de pension d'invalidité le 2 septembre 1997, elle a également demandé une attribution de droits à pension basée sur son mariage avec Edward A. Woodcock entre le 4 novembre 1989 et le 30 août 1993. Sa demande d'attribution de droits à pension a été acceptée et des droits à pension relativement aux gains de M. Woodcock pour 1989, 1990, 1991 et 1992 ont été attribués à Mme Woodcock en vertu de l'article 55.1.

[11]Mme Woodcock, en tant que cotisante, aurait eu droit à une pension d'invalidité le 2 septembre 1997 si elle avait satisfait aux conditions de l'un des sous-alinéas 44(1)b)(i) [mod., idem, art. 13] ou 44(1)b)(ii) [mod., idem]. Ces dispositions prévoient:

44. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie:

[. . .]

b) une pension d'invalidité doit être payée à un cotisant qui n'a pas atteint l'âge de soixante-cinq ans, à qui aucune pension de retraite n'est payable, qui est invalide et qui:

(i) soit a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d'admissibilité,

(ii) soit a versé des cotisations pendant au moins deux des trois dernières années civiles entièrement ou partiellement comprises dans sa période cotisation;

[12]La demande relativement à l'un des sous-alinéas 44(1)b)(i) ou 44(1) b)(ii) exige une décision au sujet de la «période cotisable» de Mme Woodcock en vertu du paragraphe 44(2) [mod., idem] dont les parties pertinentes prévoient:

44. (1) [. . .]

(2) Pour l'application des alinéas (1)b) et e):

a) un cotisant n'est réputé avoir versé des cotisations pendant au moins la période minimale d'admissibilité que s'il a versé des cotisations:

(i) soit pendant au moins cinq des dix dernières années civiles entièrement ou partiellement comprises dans sa période cotisable,

(ii) soit, dans les cas où il y a moins de dix années civiles entièrement ou partiellement comprises dans sa période cotisable, pendant au moins cinq de ces années;

b) la période cotisable d'un cotisant est la période qui:

(i) commence le 1er janvier 1966 ou au moment où il atteint l'âge de dix-huit ans, en choisissant celle de ces deux dates qui est postérieure à l'autre,

(ii) se termine avec le mois au cours duquel il est déclaré invalide dans le cadre de l'alinéa (1)b),

[13]Mme Woodcock est née en 1952 et sa période cotisable a ainsi commencé en 1970. Elle a pris fin à la date à laquelle elle était «réputée être devenue invalide», définie à l'alinéa 42(2)b) comme la date de l'invalidité même, sauf que la date à laquelle une personne est «réputée être devenue invalide» ne peut être antérieure de 15 mois par rapport à la date de la demande. Cette date serait le 2 juin 1996. (Comme je l'ai déjà expliqué, je présume aux fins de la présente partie de la discussion qu'elle est devenue invalide à cette date; autrement sa demande serait considérée, sauf en ce qui a trait au sous-alinéa 44(1)b)(iv), comme tardive.)

[14]Donc, si Mme Woodcock était devenue invalide le 2 juin 1996, sa période cotisable aurait pris fin en 1996. Est-ce qu'elle se serait qualifiée pour une pension d'invalidité en vertu du sous-alinéa 44(1)b)(i)? Non, parce qu'elle n'était pas une cotisante pendant au moins cinq des dix dernières années de sa période cotisable, c'est-à-dire de 1987 à 1996. Même en tenant compte de ses droits à pension attribués en vertu de l'article 55.1, elle n'aurait été une cotisante que pour quatre des dix dernières années de sa période cotisable (1989, 1990, 1991 et 1992).

[15]Sinon, est-ce qu'elle se serait qualifiée en vertu du sous-alinéa 44(1)b)(ii)? Non, parce qu'elle n'était pas une cotisante pendant au moins deux des trois dernières années de sa période cotisable, c'est-à-dire de 1994 à 1996 inclusivement. Encore une fois, même en tenant compte de ses droits à pension attribués en vertu de l'article 55.1, la dernière année au cours de laquelle elle a été une cotisante était 1993.

[16]Donc, il est clair que Mme Woodcock ne peut pas se qualifier pour une pension d'invalidité à moins que le sous-alinéa 44(1)b)(iv) ne lui vienne en aide.

L'effet du sous-alinéa 44(1)b)(iv)

[17]Pour les motifs expliqués ci-dessous, le droit à une pension d'invalidité de Mme Woodcock est sauvegardé par le sous-alinéa 44(1)b)(iv) si, mais seulement si, le ministre a l'obligation de donner un effet rétroactif à son attribution de droits à pension en vertu de l'article 55.1.

[18]Il est bien établi que le sous-alinéa 44(1)b)(iv) exige que le ministre détermine si un demandeur s'était qualifié pour une pension d'invalidité si la demande avait été déposée plus tôt qu'elle ne l'a été. Pour l'examen de cette question, je renoncerai à l'hypothèse selon laquelle Mme Woodcock est devenue invalide le 2 juin 1996 et je présumerai, comme l'a fait l'avocate de Mme Woodcock, qu'elle est devenue invalide en 1993. Il s'agit de l'hypothèse qui lui est la plus favorable, parce qu'elle place la date de son invalidité immédiatement après la dernière année pour laquelle elle a deux années consécutives de droits à pension.

[19]Selon le ministre, si Mme Woodcock avait demandé une pension d'invalidité en 1993, elle ne se serait pas qualifiée, puisque son statut de cotisante pendant deux des trois années avant sa date d'invalidité (c'est-à-dire, 1991 et 1992) était seulement basé sur une attribution de droits à pension en vertu de l'article 55.1 qui n'est pas entrée en vigueur avant qu'elle n'ait demandé l'attribution le 2 septembre 1997. Le ministre soutient que la Commission d'appel des pensions a commis une erreur de droit en en venant à une conclusion contraire.

[20]L'avocate de Mme Woodcock appuie la décision de la Commission d'appel des pensions. Elle soutient, citant l'arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, que l'interprétation du ministre devrait être rejetée, parce que cela irait à l'encontre de l'objectif recherché par le sous-alinéa 44(1)b)(iv). Elle s'appuie sur le principe convenu selon lequel le sous-alinéa 44(1)b)(iv) exige que le ministre détermine si Mme Woodcock se serait qualifiée pour une pension d'invalidité si sa demande avait été déposée en 1993. Il n'est pas inutile de répéter ici que ce principe découle du fait incontesté que le sous-alinéa 44(1)b)(iv) a pour but de dégager les demandeurs de pension d'invalidité du préjudice qu'ils subiraient autrement en raison d'une demande tardive.

[21]Si Mme Woodcock avait su, en 1993, qu'elle pouvait se qualifier pour une pension d'invalidité et qu'elle avait formulé une demande en ce sens à ce moment-là, elle aurait également demandé, à ce moment-là, une attribution de droits à pension en vertu de l'article 55.1. Les conditions pour l'attribution étaient satisfaites à ce moment-là et il doit s'ensuivre que l'attribution aurait été autorisée. Par conséquent, en regard de la question hypothétique posée par le sous-alinéa 44(1)b)(iv), vu de façon réaliste à la lumière de la situation réelle de Mme Woodcock, son statut de cotisante pendant deux des trois années précédant 1993 aurait été reconnu immédiatement et elle se serait qualifiée pour une pension d'invalidité en vertu du sous-alinéa 44(1)b)(ii).

[22]Il est clair qu'en vertu de l'article 55.1, le seul droit découlant automatiquement du divorce est celui de demander une attribution de droits à pension, et l'attribution elle-même dépend du fait qu'une demande en est faite. Il y a des circonstances dans lesquelles le ministre peut refuser d'effectuer un partage ou il peut annuler un partage, par exemple, en vertu des paragraphes 55.1(5) [édicté par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 23; L.C. 1995, ch. 33, art. 27] et 55.2(3) [édicté par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 23] de la Loi. Cependant, en l'espèce, ces circonstances n'existent pas ou n'existaient pas en 1993. Par conséquent, le ministre n'avait aucun fondement pour refuser d'accepter une demande liée à l'article  55.1  déposée par Mme Woodcock en 1993.

[23]Rien, dans le Régime de pensions du Canada, n'indique que la date de prise d'effet d'une attribution en vertu de l'article 55.1 pourra être antérieure à la demande d'attribution (sauf dans les situations envisagées par l'article 55.3 [édicté par L.C. 1991, ch. 44, art. 9], impliquant un demandeur souffrant d'incapacité mentale). D'un autre côté, il n'y a rien, dans le Régime de pensions du Canada, qui empêcherait le ministre de reconnaître une attribution rétroactive liée à l'article 55.1 dans un cas comme celui-ci, où le sous-alinéa 44(1)b)(iv) exige que l'admissibilité à une pension d'invalidité soit déterminée sur la base d'une demande hypothétique à une date antérieure quelconque. Le ministre n'a indiqué aucun fondement pour conclure qu'une telle approche pourrait occasionner un préjudice à l'ancien conjoint de Mme Woodcock. Le ministre n'a pas soutenu non plus que cette façon d'appliquer le sous-alinéa 44(1)b)(iv) aurait des conséquences déraisonnables ou absurdes dans d'autres situations.

[24]On peut soutenir que cette interprétation des dispositions pertinentes n'est pas compatible avec l'article 54.2 [édicté par DORS/86-1133, art. 11; 93-290, art. 4] du Règlement sur le Régime de pensions du Canada, C.R.C., ch. 385, dans sa forme modifiée en date du 2 septembre 1997, qui prévoit:

54.2 (1) Pour l'application de la Loi:

a) le partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension prend effet le dernier jour du mois au cours duquel le ministre reçoit les renseignements prescrits pour l'application de l'alinéa 55.1(1)a) de la Loi qui sont énumérés au paragraphe 54(2);

b) l'approbation du partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension prend effet le dernier jour du mois au cours duquel la demande visée aux alinéas 55.1(1)b) ou

c) de la Loi est reçue.

(2) L'attribution des gains ouvrant droit à pension à la suite d'un partage prend effet le premier jour du mois suivant celui de la date de prise d'effet du partage ou de son approbation.

[25]Cet article du Règlement a été édicté en application du paragraphe 55.2(11) [édicté par L.R.C. (1985) (2e suppl.), ch. 30, art. 23] du Régime de pensions du Canada, lequel autorise le gouverneur en conseil à faire un règlement fixant la date à laquelle prend effet le partage ou son approbation des gains non ajustés ouvrant droit à pension et celle à laquelle prend effet l'attribution de gains ouvrant droit à pension à la suite d'un partage. Cet article du règlement serait sans objet si la date à laquelle prend effet le partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension suivant une demande en vertu de l'article 55.1 devait toujours être la date du divorce.

[26]Cependant, la méthode interprétative adoptée par la Commission d'appel des pensions n'exige pas un tel effet rétroactif automatique dans tous les cas. On ne donnerait plutôt un effet rétroactif à une attribution en vertu de l'article 55.1 que lorsque le sous-alinéa 44(1)b)(iv) s'applique en raison d'une demande tardive de pension d'invalidité. Et même dans ce cas-là, il ne s'appliquerait que si les faits de la cause faisaient en sorte qu'il soit raisonnable de présumer, comme en l'espèce, que la demande de pension d'invalidité et celle relative à l'article 55.1 auraient été déposées à peu près au même moment, et il n'y a aucune raison de conclure que la demande en vertu de l'article 55.1 n'aurait pas été acceptée si elle avait été présentée à ce moment-là.

Conclusion

[27]Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire devrait être rejetée. Comme aucune demande n'a été faite quant aux dépens, on ne devrait pas en accorder.

Le juge Isaac, J.C.A.: Je souscris aux présents motifs.

* * *

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

[28]Le juge Malone, J.C.A. (dissident): En toute déférence, je ne puis souscrire aux motifs de la majorité prononcés par le juge Sharlow, J.C.A. dans la présente demande de contrôle judiciaire. Voici mes motifs:

[29]La défenderesse est née en 1952 et sa période cotisable a commencé en 1970. Cette période a pris fin à la date à laquelle elle était «réputée être devenue invalide», telle que définie à l'alinéa 42(2)b) comme la date de l'invalidité même, sauf que la date à laquelle une personne est «réputée être devenue invalide» ne peut être antérieure de 15 mois par rapport à la date de la demande, c'est-à-dire le 2 juin 1996. Pour les motifs indiqués par le juge Sharlow, je présumerai également, aux fins de la présente partie de mon analyse, que la défenderesse est devenue invalide à cette date.

[30]Si la défenderesse était devenue invalide le 2 juin 1996, sa période cotisable aurait pris fin en 1996. Elle se serait qualifiée pour une pension d'invalidité en vertu du sous-alinéa 44(1)b)(i) si elle avait été une cotisante pendant au moins cinq des dix dernières années de sa période cotisable, c'est-à-dire de 1987 à 1996. Sinon, elle se serait qualifiée en vertu du sous-paragraphe 44(1)b)(ii) si elle avait été une cotisante pendant au moins deux des trois dernières années de sa période cotisable, c'est-à-dire de 1994 à 1996.

[31]La défenderesse a été une cotisante par rapport à son propre emploi pendant trois ans, 1970, 1984 et 1989, mais seule une de ces années tombe à l'intérieur de la période de dix ans. On lui a attribué des droits à pension additionnels en vertu de l'article 55.1, mais pour seulement trois années additionnelles tombant à l'intérieur de la période de dix ans, c'est-à-dire 1990 à 1992. Il s'ensuit qu'elle n'aurait pas pu se qualifier pour une pension d'invalidité en vertu du sous-alinéa 44(1)b)(i), puisqu'elle n'a été une cotisante que pendant quatre années entre 1987 et 1996. De plus, elle n'aurait pas pu se qualifier pour une pension d'invalidité en vertu du sous-alinéa 44(1)b)(ii), puisqu'elle n'a été une cotisante pendant aucune des trois dernières années de sa période cotisable, à savoir de 1994 à 1996.

[32]Je suis d'accord avec le juge Sharlow lorsqu'elle affirme que la défenderesse ne peut se qualifier pour une pension d'invalidité, à moins que le sous-alinéa 44(1)b)(iv) n'opère en sa faveur. Le droit à une pension d'invalidité n'est préservé, par ce sous-alinéa, que si le ministre est tenu de donner un effet rétroactif à son attribution de droits à pension en vertu de l'article 55.1. Le sous-alinéa 44(1)b)(iv) exige que le ministre détermine si un demandeur se serait qualifié pour une pension d'invalidité si la demande avait été déposée plus tôt qu'elle ne l'a été. Pour la présente partie de mon analyse, je renoncerai à l'hypothèse selon laquelle la défenderesse est devenue invalide le 2 juin 1996 et je présumerai qu'elle est devenue invalide en 1993. Cette hypothèse, avancée par son avocate, place la date de son invalidité immédiatement après la dernière année pour laquelle elle a deux années consécutives de droits à pension.

[33]Le ministre insiste sur le fait que, si la défenderesse avait demandé une pension d'invalidité en 1993, elle ne se serait pas qualifiée parce que son statut comme cotisante pendant deux des trois années précédant sa date d'invalidité, à savoir 1991 et 1992, n'est basé que sur une attribution de droits à pension en vertu de l'article 55.1 qui n'a pas pris effet avant qu'elle ne demande une attribution le 2 septembre 1997. On affirme que la Commission d'appel des pensions a commis une erreur de droit en en venant à une conclusion contraire.

[34]En se basant sur l'arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, l'avocate de la défenderesse soutient que l'analyse du ministre est incorrecte parce que, à moins que l'on ne donne un effet rétroactif à l'attribution de Mme Woodcock liée à l'article 55.1, l'objectif visé par le sous-alinéa 44(1)b)(iv) serait entravé. On affirme que le sous-alinéa 44(1)b)(iv) a pour but de dégager les personnes invalides de la perte du droit à une pension d'invalidité simplement en raison d'une demande tardive. Cette observation est basée sur la prémisse que la défenderesse avait un droit absolu aux droits à pension attribués par suite de son divorce en 1993, bien qu'elle ne les ait pas réellement demandés avant 1997. Si tel est le cas, une attribution en vertu de l'article 55.1 devrait être traitée comme si elle avait été faite en 1993, peu importe le moment où la demande d'attribution a été faite.

[35]Je ne peux pas accepter cette prémisse. Selon mon analyse, en application de l'article 55.1, le seul droit découlant automatiquement du divorce est celui de demander une attribution de droits à pension. L'attribution elle-même dépend du fait qu'une demande en est faite. Il est possible que le ministre ne puisse refuser l'attribution si une demande en est faite et s'il est convaincu que les conditions sont satisfaites, mais il ne peut autoriser l'attribution tant qu'aucune demande n'est faite. En fait, il y a des circonstances dans lesquelles le ministre peut refuser d'effectuer un partage ou il peut l'annuler, comme par exemple, en vertu des paragraphes 55.1(5) et 55.2(3) de la Loi qui prévoient:

55.1 (1) [. . .]

(5) Avant qu'ait lieu, en application du présent article, un partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension, ou encore au cours de la période prescrite après qu'a eu lieu un tel partage, le ministre peut refuser d'effectuer ce partage, comme il peut l'annuler, selon le cas, s'il est convaincu que:

a) des prestations sont payables aux deux conjoints ou anciens conjoints, ou à leur égard;

b) le montant des deux prestations a diminué lors du partage ou diminuerait au moment où il a été proposé que le partage ait lieu.

[. . .]

55.2 (1) [. . .]

(3) Dans les cas où les conditions suivantes sont réunies:

a) le 4 juin 1986 ou après, un contrat matrimonial est conclu et contient une disposition qui fait expressément mention de la présente loi et qui exprime l'intention des conjoints de ne pas faire le partage, en application de l'article 55 ou 55.1, des gains non ajustés ouvrant droit à pension;

b) la disposition en question du contrat matrimonial est expressément autorisée selon le droit provincial applicable à ce contrat;

c) la disposition en question du contrat matrimonial n'a pas été annulée aux termes d'une ordonnance d'un tribunal,

le ministre n'effectue pas le partage en application de l'article 55 ou 55.1.

[36]Il s'ensuit alors que, prima facie, la date de prise d'effet de l'attribution ne peut pas être antérieure à la demande. Le Régime de pensions du Canada n'indique pas que la date de prise d'effet d'une attribution en vertu de l'article 55.1 puisse être antérieure à la demande d'attribution, sauf dans les situations envisagées par l'article 55.3, impliquant un demandeur souffrant d'incapacité mentale. De plus, il n'existe aucun fondement pour conclure qu'une telle rétroactivité automatique est nécessairement implicite. À mon avis, même dans le cadre de l'interprétation large fondée sur l'objet visé, prescrite par l'arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd., précité, et plus récemment dans l'arrêt Sarvanis c. Canada (2002), 210 D.L.R. (4th) 263 (C.S.C.), au paragraphe 24, une interprétation favorisant une rétroactivité automatique concernant les faits particuliers de l'espèce est difficilement conciliable avec le libellé de la loi.

[37]Dans cette conclusion, je m'appuie sur une autre partie du système législatif qui contredit l'inférence selon laquelle une attribution en vertu de l'article 55.1 est automatiquement, ou par voie de conséquence nécessaire, rétroactive à la date du divorce. En particulier, je me réfère à l'article 54.2 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada, C.R.C., ch. 385, dans sa forme modifiée en date du 2 septembre 1997, lequel serait sans objet si la date de prise d'effet du partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension suivant une demande en vertu de l'article 55.1 devait toujours être la date du divorce.

[38]Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire devrait être accueillie sans frais, la décision de la Commission d'appel des pensions devrait être annulée et l'affaire devrait être renvoyée devant un tribunal différemment constitué pour un nouvel examen en conformité avec les présents motifs.

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