T‑954‑06
2007 CF 955
Mines Alerte Canada (demanderesse)
c.
Le ministre des Pêches et des Océans, le ministre des Ressources naturelles, le procureur général du Canada, Red Chris Development Company Ltd. et bcMetals Corporation (défendeurs)
Répertorié : Mines Alerte Canada c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans) (C.F.)
Cour fédérale, juge Martineau—Vancouver, 19, 20 et 21 juin; Ottawa, 25 septembre 2007.
Environnement — La demanderesse contestait la légalité d’une série de décisions ou de mesures prises par les autorités responsables en procédant à l’évaluation environnementale (EE) d’un projet minier sous le régime de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (LCEE) — En procédant à une EE en application de la LCEE, les autorités fédérales exercent leurs pouvoirs d’une manière qui protège l’environnement et la santé humaine et qui fait appel au principe de précaution — Le projet a été considéré au départ comme une étude approfondie sous le régime de la LCEE et il a plus tard été changé pour un examen préalable sous le régime de la LCEE — L’art. 21 de la LCEE, qui a été modifié en 2003, impose une consultation publique dans le cas d’un projet mentionné dans la liste d’étude approfondie — En ne tenant pas compte des conditions énoncées à l’art. 21 de la LCEE, sous le couvert de la décision de reformuler la portée du projet, les autorités responsables ont excédé les pouvoirs que leur confère la loi et ont commis une erreur susceptible de contrôle.
Droit administratif — Contrôle judiciaire — Motifs — Contrôle judiciaire de décisions ou de mesures prises par les autorités responsables en procédant à l’évaluation environnementale (EE) d’un projet minier sous le régime de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (LCEE) — Il s’agissait de savoir si les autorités responsables étaient légalement tenues de mener une étude approfondie et de consulter le public avant de prendre une décision sur la voie à suivre au sujet du projet — L’art. 21 de la LCEE dispose qu’une étude approfondie doit être menée dans le cas d’un projet visé dans la liste d’étude approfondie (LEA) — Quand un projet est décrit dans la LEA, l’autorité responsable doit veiller à ce que l’on consulte le public sur, entre autres, la portée proposée du projet pour les besoins de l’EE — Les autorités responsables n’avaient pas le pouvoir discrétionnaire de changer la portée du projet de façon à éviter ce qu’implique l’art. 21 de la LCEE en matière de consultation publique — En ne tenant pas compte des conditions énoncées à l’art. 21, sous le couvert de la décision de reformuler la portée du projet, les autorités responsables ont excédé les pouvoirs que leur confère la loi et ont commis une erreur susceptible de contrôle — Demande accueillie.
Droit constitutionnel — Partage des pouvoirs — Le projet de développement minier en cause tombe sous les chefs des travaux et des entreprises d’une nature locale, de la propriété et des droits civils ainsi que des matières de nature purement locale, et relève donc de la compétence provinciale — Il met aussi en cause la compétence du gouvernement fédéral sur les ressources halieutiques et les pêches — En vertu de l’art. 5(1) de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, une évaluation environnementale s’impose à l’égard d’un « projet » si une « autorité fédérale » en est le promoteur.
Pratique — Parties — Qualité pour agir — Le promoteur du projet minier a contesté la qualité pour agir de la demanderesse — On n’accorde la qualité pour agir dans l’intérêt public que si l’on satisfait au critère à trois volets suivant : une question sérieuse est soulevée, il y a un intérêt véritable et il n’y a pas d’autre manière raisonnable et efficace de soumettre la question à la cour — Le respect de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale soulève une question de droit sérieuse et réglable par voie judiciaire — La demanderesse, une coalition représentant une vingtaine de groupes, a fait montre d’un intérêt réel et constant à l’égard des problèmes associés à l’exploitation minière — Elle a manifesté plus qu’un simple intérêt légitime à l’égard des questions sociales et environnementales — La qualité pour agir a été accordée à la demanderesse selon le principe de l’intérêt public.
Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire contestant la légalité de décisions ou de mesures prises par le ministère des Pêches et des Océans (MPO) et Ressources naturelles Canada (collectivement, les autorités responsables) en procédant à l’évaluation environnementale (EE) d’un projet minier sous le régime de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (LCEE). La demanderesse, une société à but non lucratif de droit fédéral, s’intéresse principalement aux effets de l’exploitation minière sur les plans environnemental, social, économique, sanitaire et culturel, notamment sur les peuples autochtones. Red Chris Development Company Ltd. (RCDC) (le promoteur) souhaite établir une exploitation d’extraction minière à ciel ouvert et une usine de concentration en vue de la production de cuivre et d’or, sous la forme de concentrés de cuivre, à partir de gisements situés dans le nord‑ouest de la Colombie‑Britannique. La mine et l’usine de concentration envisagées, de même que les ouvrages et les activités connexes liés au projet tombent sous les chefs des travaux et des entreprises d’une nature locale, de la propriété et des droits civils ainsi que des matières de nature purement locale, et relèvent donc de la compétence de la province de la Colombie‑Britannique. Comme le projet envisage la construction de barrières et de barrages anti‑infiltration, de systèmes d’alimentation en eau et d’ouvrages connexes, ainsi que d’une installation de gestion des résidus et un système de dérivation de cours d’eau, il met aussi en cause la compétence du gouvernement fédéral sur les ressources halieutiques et les pêches. Le projet était donc soumis à l’obligation de réaliser une EE, en application, d’une part, de la Environmental Assessment Act (la Loi provinciale) et, d’autre part, de la LCEE. L’exécution d’une EE en vertu de la LCEE ne peut avoir lieu qu’à l’égard d’un « projet », et il faut qu’il y ait une « autorité fédérale » en cause. En l’espèce, une EE était obligatoire aux termes des alinéas 5(1)c) et 5(2)a) de la LCEE. En procédant à une EE en application des dispositions de la LCEE, tous les organismes assujettis aux dispositions de cette Loi, dont les autorités fédérales et les autorités responsables, devaient exercer leurs pouvoirs d’une manière qui protège l’environnement et la santé humaine et qui fait appel au principe de précaution. En novembre 2003, le British Columbia Environmental Assessment Office (BCEAO) a délivré, en vertu de l’alinéa 10(1)c) de la Loi provinciale, une ordonnance déclarant que le projet était susceptible d’examen et qu’il serait nécessaire d’obtenir un certificat d’évaluation environnementale avant que le projet puisse continuer. Le projet a été considéré au départ comme une étude approfondie sous le régime de la LCEE et il a plus tard été changé pour un examen préalable sous le régime de cette même loi. En juillet 2005, le directeur administratif du BCEAO a recommandé que l’on accorde un certificat d’évaluation environnementale et, un mois plus tard, les ministres provinciaux ont délivré le certificat en question. Le processus fédéral d’évaluation environnementale a été officiellement enclenché quand, en mai 2004, deux demandes couvrant la construction envisagée des premiers bassins ainsi que le pont de franchissement du ruisseau ont été présentées au MPO en application du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches. Le MPO a conclu qu’il était nécessaire de soumettre le projet à une EE en application de l’article 5 de la LCEE. Dans une lettre datée du 11 mars 2005, le MPO a informé le BCEAO que les autorités responsables avaient [traduction] « déterminé la portée du projet pour les fins de la tenue d’une évaluation environnementale sous le régime de la LCEE, relativement au projet Red Chris ». Le 2 mai 2006, les autorités responsables ont pris une décision sur la voie à suivre en se fondant sur le pouvoir censément conféré par l’alinéa 20(1)a) de la LCEE et ont décidé que le projet, tel qu’elles l’avaient défini, n’était pas susceptible de causer des « effets environnementaux négatifs importants ».
La question litigieuse principale était de savoir si les autorités responsables étaient tenues en vertu de l’article 21 de la LCEE de mener une étude approfondie et de consulter le public avant de prendre une décision sur la voie à suivre au sujet du projet.
Jugement : la demande doit être accueillie.
Les défendeurs ont soulevé deux questions préliminaires. Premièrement, le promoteur et le procureur général ont soutenu que la demanderesse n’a pas déposé sa demande en temps opportun. La demande de contrôle judiciaire concernant la décision sur la voie à suivre n’était pas prescrite car elle a été signifiée et déposée dans les 30 jours suivant la communication de la décision en question. Deuxièmement, le promoteur a contesté la qualité pour agir de la demanderesse. On accorde la qualité pour agir à un groupe d’intérêt public qui souhaite contester l’exercice d’un pouvoir administratif, ainsi que des dispositions législatives, lorsque l’on satisfait au critère à trois volets qui suit : une question sérieuse est soulevée, la partie demanderesse fait preuve d’un intérêt véritable et il n’y a pas d’autre manière raisonnable et efficace de soumettre la question à la cour. Lorsqu’on applique ce critère à trois volets, il ne convient pas de donner un sens restreint aux mots « directement touché » que l’on trouve au paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales. Le respect de la LCEE soulève une question de droit sérieuse et réglable par voie judiciaire. De même, la demanderesse a fait montre d’un intérêt véritable à l’égard des questions soulevées en l’espèce. Pour obtenir la qualité pour agir dans l’intérêt public, il faut plus qu’un simple intérêt légitime à l’égard des questions sociales et environnementales. En tant que coalition représentant une vingtaine de groupes qui expriment une préoccupation commune, qui fait montre d’un intérêt réel et constant à l’égard des problèmes associés à l’exploitation minière, la demanderesse satisfait à cette condition. Il convient d’accorder la qualité pour agir dans l’intérêt public si la partie demanderesse a un véritable intérêt et si rien ne montre que d’autres personnes ayant un véritable intérêt engageront probablement des procédures. La demanderesse était la seule partie à montrer qu’elle avait un intérêt suffisant ou les moyens de lancer un contrôle judiciaire en l’espèce. Par conséquent, la qualité pour agir a été accordée à la demanderesse selon le principe de l’intérêt public.
Une fois qu’une EE a été « déclenchée » en vertu de l’article 5 de la LCEE, il s’agit de savoir si une autorité responsable a compétence pour redéfinir la portée d’un projet inscrit dans la liste d’étude approfondie (LEA) d’une manière qui empêchera cette autorité responsable de procéder à une étude approfondie. L’article 14 de la LCEE précise qu’il existe quatre types d’évaluation environnementale : l’examen préalable, l’étude approfondie, la médiation et l’examen par une commission. L’article 21 de la LCEE, qui a été considérablement modifié en 2003 par le projet de loi C‑9, dispose qu’une étude approfondie doit être menée dans le cas d’un projet mentionné dans la LEA. L’établissement de la portée d’un projet à évaluer est une tâche de nature très factuelle, qui oblige à examiner soigneusement les activités qui sont exécutées en rapport avec le projet en question. Le paragraphe 15(1) de la LCEE qu’invoquent les défendeurs pour appuyer la légalité des décisions ou des mesures que les autorités responsables ont prises dispose que l’autorité responsable ou, dans le cas où le projet est renvoyé à la médiation ou à l’examen par une commission, le ministre de l’Environnement, après consultation de l’autorité responsable, détermine la portée du projet à l’égard duquel l’EE doit être effectuée. L’interprétation de l’article 15 a été examinée à maintes reprises par les tribunaux.
La question qui était véritablement en litige en l’espèce était celle de savoir si les autorités responsables pouvaient légalement refuser de procéder à une étude approfondie parce que le projet, tel qu’elles l’ont redéfini, n’englobait plus une mine et une installation de concentration. Selon le paragraphe 21(1) de la LCEE, quand un projet est décrit dans la LEA, l’autorité responsable doit maintenant veiller à la tenue d’une consultation publique sur les propositions relatives à la portée du projet en matière d’évaluation environmentale, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation, et à la portée de ces éléments ainsi que la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet. Selon les lignes directrices de 1994 intitulées Loi canadienne sur l’évaluation environnementale — Guide des autorités responsables (les lignes directrices), les projets de grande envergure, comme celui dont il est question en l’espèce, qui sont susceptibles d’avoir des effets environnementaux importants indiqués dans la LEA seront habituellement soumis à une évaluation rigoureuse d’une étude approfondie. Une fois qu’une consultation publique est exigée par l’article 21 de la LCEE, il n’est pas possible d’éviter ce processus en restreignant la portée du projet de façon à le ramener au niveau d’un examen préalable. Aucune disposition de la LCEE n’habilite le ministre de l’Environnement ou une autorité responsable à déclasser une étude approfondie en la transformant en un examen préalable. Une fois qu’une décision sur le processus a été prise, soumettant le projet à une étude approfondie, les autorités responsables n’avaient pas le pouvoir discrétionnaire de changer la portée du projet de façon à éviter ce qu’implique l’article 21 sur le plan de la consultation publique. Leur permettre de le faire reviendrait à violer non seulement le sens ordinaire de la législation en question, mais aussi l’esprit du régime législatif tout entier, tel que modifié, qui est conçu pour favoriser la participation du public aux projets qui peuvent comporter d’importantes répercussions environnementales. La décision que la Cour d’appel fédérale a rendue dans l’affaire Prairie Acid Rain Coalition c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans) (la décision TrueNorth) est d’une applicabilité restreinte en l’espèce où une analyse de l’article 21 de la LCEE, dans son libellé actuel, revêt une importance cruciale pour le règlement des questions que la demanderesse a soulevées. Cette décision était fondée sur l’ancien article 21, où il n’était pas question de « propositions relatives à la portée » d’un projet. La décision TrueNorth n’était pas contraignante dans la mesure où celle‑ci tranchait des questions qui se situaient en dehors du contexte particulier des articles 5 et 15 de la LCEE. Cette décision ne s’applique pas aux évaluations commencées après octobre 2003 sous le régime de l’article 21 de la LCEE. Le MPO a décidé avec raison, dans la décision initiale de mai 2004, que le projet aurait besoin d’un examen de niveau étude approfondie sur la base d’une capacité proposée de production de minerai pouvant atteindre 50 000 tonnes par jour, ce qui excède le seuil de 600 tonnes par jour fixé à l’alinéa 16c) [de l’annexe] du Règlement LEA. En ne tenant pas compte des conditions mentionnées à l’article 21 de la LCEE, sous le couvert de la décision de reformuler la portée du projet, les autorités responsables ont excédé les pouvoirs que leur confère la loi. Elles ont commis une erreur susceptible de contrôle, erreur qui s’est soldée par la communication de la décision sur la voie à suivre, en décidant de renoncer au processus de consultation publique auquel le projet devait, de par la loi, être soumis en vertu du paragraphe 21(1) de la LCEE. Les autorités responsables n’ont tenu aucune consultation publique avant de se prononcer sur l’ébauche du rapport d’examen préalable. L’annulation de la décision sur la voie à suivre respectait donc un objet fondamental de la LCEE, à savoir que la participation du public est conçue pour améliorer la qualité d’une EE et en influencer l’issue.
lois et règlements cités
Entente de collaboration entre le Canada et la Colombie‑Britannique en matière d’évaluation environnementale (2004), articles 11, 14, 20.
Environmental Assessment Act, R.S.B.C. 1996, ch. 119.
Environmental Assessment Act, S.B.C. 2002, ch. 43, art. 8, 10(1)(c), 11.
Forest Act, R.S.B.C. 1996, ch. 157.
Forest Practices Code of British Columbia Act, R.S.B.C. 1996, ch. 159.
Loi canadienne sur la protection de l’environnement, L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 16.
Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, L.C. 1992, ch. 37, art. 2(1) « autorité fédérale » (mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 1), « autorité responsable », « étude approfondie » (mod., idem), « examen préalable », « liste d’étude approfondie », « liste d’exclusion » (mod., idem), « partie intéressée », « projet » (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 18(F)), « rapport d’examen préalable », 3, 4(1) (mod. par L.C. 1994, ch. 46, art. 1; 2003, ch. 9, art. 2), 5, 7 (mod., idem, art. 3), 11(2), 12(1),(3),(4) (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 20(F)), (5), 12.1 (édicté par L.C. 2003, ch. 9, art. 7), 12.3c) (édicté, idem), 12.4 (édicté, idem), 13, 14, 15 (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 21(F)), 16 (mod., idem, art. 22(F)), 16.1 (édicté par L.C. 2003, ch. 9, art. 8), 16.2 (édicté, idem), 16.3 (édicté, idem), 18 (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 23(F); 2003, ch. 9, art. 9), 20 (mod., idem, art. 11), 21 (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 26(F); 2003, ch. 9, art. 12), 21.1 (édicté, idem), 21.2 (édicté, idem), 22, 23(1) (mod., idem, art. 13), 25, 28 (mod. par L.C. 1998, ch. 25, art. 162), 29 (mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 14), 32 (mod., idem, art. 15(F)), 37 (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 29(F); 1994, ch. 46, art. 3; 2003, ch. 9, art. 17), 55(1) (mod., idem, art. 25), 55.1(2)a) (édicté, idem), c) (édicté, idem), 58(1)i) (mod., idem, art. 28), (1.1) (édicté par L.C. 1994, ch. 46, art. 4; 2003, ch. 9, art. 28), 59 (mod. par L.C. 1994, ch. 46, art. 5; 2003, ch. 9, art. 29), 61.
Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., ch. 3 (R.‑U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.‑U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5], art. 91(1A),(10), (12),(24),(27), 92(10),(13),(16).
Loi modifiant la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, L.C. 2003, ch. 9, art. 12, 29.
Loi sur la protection des eaux navigables, L.R.C. (1985), ch. N‑22, art. 5(1).
Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F‑7, art. 1 (mod. par L.C. 2002, ch. 8, art. 14), 18.1(1) (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5), (2) (édicté, idem; 2002, ch. 8, art. 27).
Loi sur les espèces en péril, L.C. 2002, ch. 29, art. 5, 6, 79(1), (2), annexe 1.
Loi sur les explosifs, L.R.C. (1985), ch. E‑17, art. 7 (mod. par L.C. 1993, ch. 32, art. 4).
Loi sur les pêches, L.R.C. (1985), ch. F‑14, art. 25 (mod. par L.C. 1991, ch. 1, art. 6), 35, 36(3),(5).
Loi sur l’Office national de l’énergie, L.R.C. (1985), ch. N‑7.
Mines Act, R.S.B.C. 1996, ch. 293.
Prescribed Time Limits Regulation, B.C. Reg. 372/2002, art. 3.
Projet de loi C‑19, Loi modifiant la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, 1re sess., 37e lég., 2001.
Projet de loi C‑9, Loi modifiant la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, 2e sess., 37e lég., 2002.
Public Consultation Policy Regulation, B.C. Reg. 373/2002, art. 7.
Règlement sur la coordination par les autorités fédérales des procédures et des exigences en matière d’évaluation environnementale, DORS/97‑181, art. 8.
Règlement sur la liste d’étude approfondie, DORS/94‑638, art. 3, ann., art. 9, 16.
Règlement sur la liste d’exclusion, DORS/94‑634.
Règlement sur la liste d’inclusion, DORS/94‑637, ann., partie VII, art. 42, 43, 44, 45, 46, 46.1 (édicté par DORS/99‑436, art. 14), 47.
Règlement sur les dispositions législatives et réglementaires désignées, DORS/94‑636, art. ann. I, partie I, art. 5, 6, ann. II, art. 5.
Règlement sur les effluents des mines de métaux, DORS/2002‑222, art. 1(1) « effluent » (mod. par DORS/2006‑239, art. 1), « Loi », « substance nocive », 2(1), 4, 6 à 28, 27.1 (édicté par DORS/2006‑239, art. 14), ann. 2, 4.
Reviewable Projects Regulation, B.C. Reg. 370/2002, partie 3.
jurisprudence citée
décision appliquée :
R. c. Seaboyer; R. c. Gayme, [1991] 2 R.C.S. 577.
décisions différenciées :
Prairie Acid Rail Coalition c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), 2004 CF 1265; conf. par [2006] 3 R.C.F. 610; 2006 CAF 31; autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée, [2006] S.C.C.A. no 197 (QL); Citizens’ Mining Council of Newfoundland and Labrador c. Canada (Ministre de l’Environnement), [1999] A.C.F. no 273 (1re inst.) (QL).
décisions examinées :
Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3; In the Matter of the Environmental Assessment Act, S.B.C. 2002, c. 43 (the “Act”) and an Environmental Assessment of the Proposed Red Chris Porphyry Copper‑Gold Mine Project (the “Project”). Order under Section 11, online <http ://www.eao.gov.bc.ca/epic/output/html/deploy/epic_project_doc_list_238_p_com.html>; Bow Valley Naturalists Society c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [2001] 2 C.F. 461 (C.A.); Szczecka c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 934 (C.A.) (QL); Groupe G. Tremblay Syndics Inc. c. Canada (Surintendant des faillites), [1997] 2 C.F. 719 (1re inst.); Alberta Wilderness Assn. c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [1999] 1 C.F. 483 (C.A.); infirmant [1998] A.C.F. no 821 (1re inst.) (QL); Première nation Tlingit de Taku River c. Colombie‑Britannique (Directeur d’évaluation de projet), [2004] 3 R.C.S. 550; 2004 CSC 74; Québec (Procureur général) c. Canada (Office national de l’énergie), [1994] 1 R.C.S. 159; Friends of the West Country Assn. c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [2000] 2 C.F. 263 (C.A.); confirmant [1998] 4 C.F. 340 (1re inst.); Manitoba’s Future Forest Alliance c. Canada (Ministre de l’Environnement), [1999] A.C.F. no 903 (1re inst.) (QL); Bowen c. Canada (Procureur général), [1998] 2 C.F. 395 (1re inst.); Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), 2001 CFPI 1123; conf. par [2003] 4 C.F. 672; 2003 CAF 197.
décisions citées :
R. c. Hydro‑Québec, [1997] 3 R.C.S. 213; Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226; 2003 CSC 19; Thorson c. Procureur général du Canada et autres, [1975] 1 R.C.S. 138; Ministre de la Justice du Canada et autre c. Borowski, [1981] 2 R.C.S. 575; Conseil canadien des Églises c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 R.C.S. 236; Friends of the Island Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics), [1993] 2 C.F. 229 (1re inst.); Sunshine Village Corp. c. Directeur du Parc National de Banff, [1996] A.C.F. no 1118 (C.A.) (QL); Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), [1999] 2 C.F. 211 (1re inst.); Nation haïda c. Colombie‑Britannique (Ministre des Forêts), [2004] 3 R.C.S. 511; 2004 CSC 73.
doctrine citée
Agence canadienne d’évaluation environnementale. Guide de préparation d’une étude approfondie à l’intention des promoteurs et des autorités responsables, en ligne <http://www.ceaa.gc.ca/013/ 0001/0003/comps_f.htm>.
Agence canadienne d’évaluation environnementale. Loi canadienne sur l’évaluation environnementale : Guide des autorités responsables. Ottawa : Ministre des Approvisionnements et Services Canada, 1994.
British Columbia Environmental Assessment Office. Red Chris Porphyry Copper‑Gold Project Assessment Report, 22 juillet 2005, en ligne <http ://www.eao. gov.bc.ca/epic/output/html/deploy/epic_document_238_20678.html>.
DEMANDE de contrôle judiciaire contestant la légalité de décisions ou de mesures prises par le ministère des Pêches et des Océans et Ressources naturelles Canada en procédant à l’évaluation environnementale d’un projet minier sous le régime de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. Demande accueillie.
ont comparu :
Lara Tessaro et Ryan Fritsch pour la demanderesse.
Ward Bansley et Lorne D. Lachance pour les défendeurs, le ministre des Pêches et des Océans, le ministre des Ressources naturelles et le procureur général du Canada.
Brad Armstrong, c.r., et Jude Samson pour les défendeurs Red Chris Development Company Ltd. et bcMetals Corporation.
avocats inscrits au dossier :
Sierra Legal Defence, Vancouver, pour la demanderesse.
Le sous‑procureur général du Canada pour les défendeurs, le ministre des Pêches et des Océans, le ministre des Ressources naturelles et le procureur général du Canada.
Lawson Lundell LLP, Vancouver, pour les défendeurs Red Chris Development Company Ltd. et bcMetals Corporation.
Ce qui suit est la version française des motifs de l’ordonnance et de l’ordonnance rendus par
Le juge Martineau :
I—INTRODUCTION
[1]Red Chris Development Company Ltd. (RCDC), filiale en propriété exclusive de bcMetals Corporation (bcMetals) (collectivement, le promoteur), souhaite établir une exploitation d’extraction minière à ciel ouvert et une usine de concentration en vue de la production de cuivre et d’or, sous la forme de concentrés de cuivre, à partir de gisements situés dans le nord‑ouest de la Colombie‑Britannique. Ce projet est connu sous le nom de « projet de mine de cuivre‑or porphyrique Red Chris » (le projet).
[2]Mines Alerte Canada (la demanderesse) est une société à but non lucratif de droit fédéral. Agissant en tant que coalition d’organismes membres, la demanderesse s’intéresse principalement aux effets de l’exploitation minière sur les plans environnemental, social, économique, sanitaire et culturel, et notamment à ses effets sur les peuples autochtones.
[3]La demanderesse conteste la légalité d’une série de décisions ou de mesures prises par le ministère des Pêches et des Océans (MPO) et Ressources naturelles Canada (RNCan) en procédant à l’évaluation environnementale (EE) du projet en se fondant sur le pouvoir censément conféré par diverses dispositions de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, L.C. 1992, ch. 37, et ses modifications (la LCEE).
[4]Le ministre des Pêches et des Océans et le ministre des Ressources naturelles sont représentés en l’espèce par le procureur général du Canada (collectivement, la Couronne). Le promoteur et la Couronne sont défendeurs dans la présente demande de contrôle judiciaire (collectivement, les défendeurs). Ces derniers sont en faveur des décisions ou des mesures prises par le MPO et RNCan (collectivement, les autorités responsables ou les AR).
[5]Pour les motifs qui suivent, j’ai décidé de faire droit à la présente demande. Les dispositions législatives et réglementaires en vigueur qui sont mentionnées dans les présents motifs d’ordonnance sont reproduites à l’annexe « A ».
II—LE PROJET
[6]Le « terrain minier de Red Chris » est l’unique bien de RCDC et il est constitué d’une série de concessions minières couvrant une superficie d’environ 110 kilomètres carrés autour du site minier proposé. Cette propriété se trouve à l’intérieur du territoire traditionnel de la nation Tahltan, dans un secteur peu peuplé qui est situé à environ 18 km au sud‑est du village d’Iskut, à 80 km au sud du lac Dease et à 450 km au nord de Smithers.
[7]Plus particulièrement, la mine proposée se trouve sur une terrasse située sur le plateau Togadin, à la limite de deux bassins hydrographiques régionaux : la rivière Klappan et la rivière Iskut. L’emplacement du projet est divisé par le ruisseau White Rock Canyon, qui s’écoule dans le ruisseau Coyote, ainsi que dans la rivière Iskut, au nord‑ouest; par le ruisseau Quarry, qui s’écoule dans la rivière Klappan au nord‑est; et par le système du ruisseau Trail, qui s’écoule vers le sud en passant par les lacs Kluea et Todagin et la rivière Iskut.
[8]Le projet se situe à l’intérieur de la zone de gestion des ressources de Togadin du Plan de gestion des ressources et des terres de Cassiar Iskut‑Stikine (PGRT‑CIS), qui reconnaît que l’exploration minière, l’exploitation minière et l’accès aux mines sont des activités appropriées.
[9]Le projet est fondé sur un taux de production de 30 000 tonnes de minerai par jour pour le marché d’exportation, et la durée prévue d’exploitation de la mine est de 25 ans. L’accès au site minier se ferait par une route nouvelle et longue, qui couperait la route no 37 du côté sud, aux abords du ruisseau Coyote. Les 550 tonnes de concentré produites par jour à l’usine de concentration seraient transportées jusqu’au port en eau profonde de Stewart, qui se trouve à une distance d’environ 200 km au sud du projet de développement proposé. On s’attend à ce que ce dernier nécessite des dépenses d’immobilisation de 228 millions de dollars et qu’il génère 250 emplois directs à plein temps.
[10]Outre le projet, les activités minières et les projets actuels ou raisonnablement prévisibles dans cette région comprennent : le projet Galore Creek, une mine à ciel ouvert qui transformerait jusqu’à 60 000 tonnes de minerai par jour et qui produirait jusqu’à 2 000 tonnes par jour de concentrés de cuivre‑or; l’actuel projet de déchets de roche et de résidus du lac Tom McKay, près de la mine d’Eskay Creek; le projet actuel et proposé de Kemess North et le projet existant de Kemess South; et le projet du mont Klappan.
[11]Les besoins en électricité du projet sont estimés à 37 mégawatts (MW). À l’heure actuelle, la source d’électricité la plus proche est la sous‑station de BC Hydro, qui est située à Meziadin Junction, à une distance d’environ 220 km au sud du site minier proposé. RCDC propose de construire une nouvelle ligne de transport d’électricité qui serait parallèle à la nouvelle route d’accès à la mine qui est proposée, et qui serait raccordée à la ligne prévue de transport d’énergie de BC Hydro. RCDC a pris l’engagement de ne pas débuter les travaux de construction avant que la province s’engage à construire la ligne de transport d’électricité.
[12]L’exploitation minière proposée est une mine à ciel ouvert classique, à pelles et à camions. Les trous de mine seraient chargés d’explosifs en vrac. Les explosifs seraient stockés à deux endroits distincts, prés de la mine à ciel ouvert. Les installations d’explosifs comporteraient une poudrière, un réservoir d’émulsion d’une capacité de 20 000 kg, des silos contenant du nitrate d’ammonium, ainsi qu’une fabrique d’explosifs et un garage (la fabrique d’explosifs et la poudrière).
[13]Les travaux d’exploitation à ciel ouvert se pour-suivraient au rythme de 10,95 millions de tonnes (Mt) de minerai par année pendant une période de 17 ans, après quoi le minerai de basse teneur récupéré de la pile de stockage serait transformé pendant les huit années suivantes. La conception des installations serait fondée sur un schéma de production de cuivre porphyrique standard, faisant appel à des opérations de broyage semi‑autogène (SAG) et à boulets, de flottation, de rebroyage, d’épaississement et de filtrage, de façon à produire un concentré destiné à l’exportation comportant une teneur en humidité de 8 p.100. Le projet produirait en tout 1,85 milliard de livres de cuivre et 1 187 000 onces d’or sous forme de concentré.
[14]Pendant la durée d’exploitation de la mine, le propriétaire ou l’exploitant rejetterait une substance nocive (des résidus) dans un dépôt de résidus miniers (DRM). Le site proposé est une vallée en forme de Y, située à une distance d’environ 3,5 km au nord‑est du gisement de Red Chris. Il serait nécessaire de construire trois barrages, aux bras sud, nord et nord‑est de la vallée. Le bassin hydrographique total pour le dépôt de résidus miniers, y compris les secteurs dérivés, occuperait une surface d’environ 2 700 ha. La superficie dérivée serait en tout de 1 100 ha.
[15]Lors des opérations, l’eau provenant du DRM serait rejetée dans le ruisseau Quarry et, après la fermeture, dans le ruisseau sans nom qui se trouve en aval du barrage nord‑est. Dans le ruisseau Quarry, le débit de l’eau augmenterait vraisemblablement de 119 p.100. Après la fermeture, tant la quantité que la qualité de l’eau du ruisseau Quarry sont censées revenir à ce qu’elles étaient avant le projet de mise en valeur, les décharges du DRM étant alors rejetées aux environs du barrage nord‑est, dans le ruisseau Northeast Arm. En aval du barrage nord‑est, les variations de débit du réseau de ruisseaux sont censées être minimes durant l’exploitation de la mine, mais elles augmenteraient de beaucoup après la fermeture, en raison du rejet des eaux de ruissellement du DRM par le barrage nord‑est. On s’attend à ce que, après la fermeture, le débordement de l’accumulation de résidus par le barrage nord‑est fasse augmenter de 157 p.100 la nouvelle décharge annuelle.
[16]Le DRM proposé aurait une incidence néfaste sur l’habitat de certains poissons, certains cours d’eau et certaines ressources aquatiques. Les deux colonies de castors dont les barrages sont situés à l’intérieur du DRM seraient déplacées hors de ce dernier durant les opérations minières, comme le seraient le vison, la sauvagine et le Crapaud de l’Ouest, avec une possibilité de retour graduel une fois le site remis en état après la fermeture de la mine. Il est possible aussi que la qualité de l’eau soit affectée par l’exhaure de roches acides et la lixiviation des métaux (ERA/LM), un événement géologique naturel provoqué par l’oxydation des roches acides. La lixiviation des métaux et le ruissellement acide ultérieurs pourraient réduire la qualité de l’eau locale dans le milieu récepteur s’il n’y a pas de gestion des matières ni de traitement des eaux de ruissellement.
[17]Tous les déchets de roche que générerait le projet seraient déposés par l’exploitant de la mine dans le site de déchets de roches nord. RCDC a déterminé l’emplacement de ce site de façon à ce que toutes les eaux de drainage s’écoulent par gravité dans le DRM pendant l’exploitation et la durée de vie de la mine. Le DRM accuserait un bilan hydrique excédentaire, ce qui obligerait à rejeter de l’eau dans le milieu récepteur. RCDC a estimé que, pendant la durée d’exploitation de la mine (années 1 à 18), la quantité d’eau excédentaire à rejeter dans le milieu serait en moyenne de 6 millions de m3 par année (16 400 m3 par jour). Dans la phase post‑fermeture, la quantité d’eau rejetée dans le milieu récepteur serait de 13 millions m3 par année (35 600 m3 par jour). RCDC traiterait ou gérerait par ailleurs l’eau excédentaire provenant du dépôt de résidus miniers qui serait rejetée dans le milieu récepteur, au besoin. Pendant la durée d’exploitation de la mine, l’eau excédentaire à rejeter à partir du dépôt de résidus miniers proposé serait rejetée par pompes et par pipeline au nord du dépôt dans les parties supérieures du ruisseau Quarry, qui s’écoule vers la rivière Klappan.
III—L’OBLIGATION DE PROCÉDER À UNE ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE (EE)
A. Compétence partagée
[18]La mine et l’usine de concentration envisagées, de même que les ouvrages et les activités connexes liés au projet, tombent tous sous les chefs des travaux et des entreprises d’une nature locale, de la propriété et des droits civils ainsi que des matières d’une nature purement locale, et relèvent donc de la compétence de la province de la Colombie‑Britannique (paragraphes 92(10), (13) et (16) de la Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., ch. 3 (R.‑U) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5] (la Loi constitutionnelle de 1867)).
[19]Cependant, la décision que la Cour suprême a rendue dans Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3 a pour effet de conférer au Parlement le pouvoir de faire réaliser une étude d’impact sur l’environnement dans n’importe quelle matière relevant de la compétence du gouvernement fédéral. Cela inclut, notamment : la navigation (paragraphe 91(10)); les pêcheries (paragraphe 91(12)); les terres publiques fédérales et les réserves indiennes (paragraphes 91(1A) et 91(24)); les cours d’eau internationaux et interprovinciaux; les communications et les transports interprovinciaux et internationaux (alinéa 92(10)a)); de même que les activités des industries relevant de la compétence du gouvernement fédéral (article 91, introduction, ainsi que les alinéas 92(10)a), b) et c)).
[20]En fait, dans l’arrêt Friends of the Oldman River Society, précité, le barrage situé sur la rivière Oldman avait des effets sur les eaux navigables, les pêches et les terres réservées aux Indiens (il y avait une réserve indienne en aval du site du barrage). Ces effets justifiaient la tenue d’une évaluation environnementale de grande envergure englobant l’impact du barrage sur ces trois matières, ainsi que sur n’importe quelle autre matière fédérale qui s’avérait être en cause. Le Parlement était habilité à faire réaliser une évaluation environnementale à titre d’élément accessoire d’une institution ou d’une activité qui relevait par ailleurs de la compétence du gouvernement fédéral. En outre, « l’étendue de l’évaluation n’est pas limitée au domaine particulier de compétence à l’égard duquel le gouvernement du Canada participe à la prise de décisions » (non souligné dans l’original) [aux pages 72 et 73]. En revanche, la province avait également le pouvoir de soumettre le projet à une évaluation environnementale, en vertu, d’une part, des pouvoirs provinciaux sur les ressources naturelles ainsi que sur la propriété et les droits civils et, d’autre part, de son pouvoir de dépenser des fonds.
[21]Cela dit, la compétence en matière criminelle que prévoit le paragraphe 91(27) de la Loi constitutionnelle de 1867 confère au Parlement le vaste pouvoir d’interdire des activités qui sont nocives pour l’environnement. Ce pouvoir a servi à confirmer la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 16, qui établit une structure réglementaire pour la détermination et le contrôle des substances toxiques (R. c. Hydro‑Québec, [1997] 3 R.C.S. 213).
B. Aspects particuliers
1) La protection de l’habitat du poisson
[22]En l’espèce, le projet de développement minier envisage la construction de barrières et de barrages anti‑infiltration, de systèmes d’alimentation en eau et d’ouvrages connexes, ainsi que d’une installation de gestion des résidus et d’un système de dérivation de cours d’eau. Cela met en cause la compétence du gouvernement fédéral sur les ressources halieutiques et les pêches. En fait, la Loi sur les pêches, L.R.C. (1985), ch. F‑14, et modifications (la Loi sur les pêches), traite de la protection des pêches et de l’habitat du poisson. Les deux principales dispositions de la Loi sur les pêches qui portent sur la protection de l’environnement sont l’article 35, qui protège l’habitat du poisson, et le paragraphe 36(3), qui interdit de déposer une « substance nocive » dans des eaux où vivent des poissons sauf si le dépôt en question est autorisé par des règlements pris par le gouverneur en conseil.
[23]À part la détérioration, la destruction ou la perturbation (DDP) prévue de l’habitat du poisson, qui requièrent une autorisation du ministre des Pêches et des Océans en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, une fois que la mine et l’usine de concentration seront exploitées, des substances nocives (des résidus) seront vraisemblablement déposées dans les eaux que fréquentent des poissons. Les métaux proviendront des opérations de concentration, ainsi que du ruissellement pluvial et des eaux souterraines s’écoulant du site de déchets nord de même que des roches exposées et des parois des puits de mine à ciel ouvert.
[24]En outre, on s’attend à ce que, à la longue, une part importante des déchets de roche présents dans le site de déchets nord et dans les parois exposées s’acidifie, générant ainsi des concentrations accrues de contaminants métalliques qu’il sera nécessaire de traiter en vue d’obtenir, pour les effluents qui seront rejetés dans les eaux réceptrices, une qualité acceptable.
[25]Le Règlement sur les effluents des mines de métaux, DORS/2002‑222, et modifications, (le REMM) s’applique aux mines qui excèdent un débit d’effluent de 50 m3 par jour et qui rejettent une « substance nocive » dans les eaux ou les lieux visés au paragraphe 36(3) de la Loi sur les pêches (paragraphe 2(1) du REMM). Les substances en question sont indiquées à la colonne 1 de l’annexe 4 du REMM, et tout effluent à létalité aiguë est qualifié de substance nocive.
[26]Le paragraphe 1(1) du REMM définit comme suit le mot « effluent » : « Effluent—effluent d’eau de mine, effluent d’installations de préparation du minerai, effluent de dépôts de résidus miniers, effluent de bassins de traitement, effluent d’installations de traitement, à l’exclusion de l’effluent d’installations de traitement d’eau résiduaires, eaux d’exfiltration et eaux de drainage superficiel—qui contient une substance nocive ». Aux termes de l’article 4 du REMM, le rejet d’une substance nocive dans un effluent ne doit pas dépasser certaines limites de concentration, et ce rejet est subordonné au fait que le propriétaire ou l’exploitant se conforme aux articles 6 à 27 du REMM, lesquels prescrivent les conditions relatives à la surveillance des effluents. En l’espèce, RCDC reconnaît que le REMM s’appliquerait et qu’il sera nécessaire de procéder à une surveillance en vertu de ce dernier s’il est donné suite au projet.
[27]En particulier, l’article 6 du REMM interdit au propriétaire ou à l’exploitant d’une mine de combiner un effluent avec de l’eau ou avec tout autre effluent dans le but de le diluer avant son rejet. Cependant, l’interdiction mentionnée à l’article 6 du REMM ne s’applique pas, et le propriétaire ou l’exploitant d’une mine peut rejeter ou permettre que soient rejetés des déchets de roche dans un effluent qui contient n’importe quelle concentration d’une substance nocive dans un DRM qui est un plan d’eau ou un lieu mentionné à l’annexe 2 du REMM. Là encore, cette autorisation de rejeter une substance nocive est subordonnée au fait que le propriétaire ou l’exploitant se conforme aux articles 7 à 28 du REMM.
[28]En Colombie‑Britannique, il y a trois DRM qui sont actuellement mentionnés à l’annexe 2 du REMM : le ruisseau South Kemess, le lac Albino et le lac Tom McKay. Il sera donc nécessaire d’obtenir une modification de la part du gouverneur en conseil afin d’ajouter les eaux d’amont du ruisseau Trail à la liste des DRM.
[29]En outre, l’article 27.1 [édicté par DORS/2006-239, art. 14] du REMM (qui est entré en vigueur le 3 octobre 2006) oblige le propriétaire ou l’exploitant de la mine à dresser un « plan compensatoire » à soumettre à l’approbation du ministre des Pêches et des Océans. Ce plan a pour but de contrebalancer la perte d’habitat du poisson consécutive au rejet de substances nocives dans le DRM. Cette exigence est fondée sur la « Politique de gestion de l’habitat du poisson (1988) » du MPO dont un élément capital est le principe de la « perte nette nulle » en ce qui concerne les ouvrages et les entre-prises. Cette politique s’applique aux projets miniers réalisés depuis 1986, et des ententes de compensation en matière d’habitats ont été négociées pour un certain nombre de projets miniers.
2) Les contaminants atmosphériques et autres risques pour l’environnement
[30]En l’espèce, les sources potentielles de contaminants atmosphériques issues du projet comprennent la construction et l’exploitation du DRM ainsi que la fabrique d’explosifs. En fait, dans les documents qu’elle a présentés aux autorités provinciales et fédérales, RCDC a identifié les contaminants atmosphériques que généreraient le matériel de construction ainsi que les opérations de forage, de dynamitage, de chargement, de transport et de nivelage associées à la construction des bassins de retenue des résidus.
[31]Les effets environnementaux liés à la fabrique d’explosifs et à la poudrière sont des préoccupations de sécurité générales, la gestion des effluents, la manutention des déchets, les situations d’urgence causées par un déversement, ainsi que les défaillances du matériel et les accidents. La fabrique d’explosifs comporte aussi des gaz d’échappement et d’éventuelles poussières diffuses imputables, lors des travaux de construction, au matériel de bulldozage, de nivellement, de martelage, de levage et de transport.
[32]En outre, il sera nécessaire d’obtenir des permis pour la fabrique d’explosifs et pour la poudrière en-visagées dans le projet. Sous le régime de la loi fédérale, le ministre des Ressources naturelles peut délivrer des permis pour les fabriques et les poudrières en vertu de l’alinéa 7(1)a) de la Loi sur les explosifs, L.R.C. (1985), ch. E‑17, et modifications (la Loi sur les explosifs). La Division de la réglementation des explosifs (la DRE) de RNCan délivre elle aussi des certificats de mélange mécanique de nitrate d’ammonium et de fuel‑oil (ANFO) aux entreprises qui produisent de l’ANFO au moyen d’équipement mécanique en vue de sa décharge directe dans un trou de forage situé dans un lieu, une mine ou une carrière spécifié, qui est la propriété de l’entreprise détentrice du certificat.
3) Les espèces en péril
[33]En 2002, le Parlement a adopté une législation exhaustive liant Sa Majesté du chef du Canada ou d’une province en vue de prévenir la disparition des espèces sauvages, de permettre le rétablissement de celles qui, par suite de l’activité humaine, sont devenues des espèces disparues, en voie de disparition ou menacées et de favoriser la gestion des espèces préoccupantes pour éviter qu’elles ne deviennent des espèces en voie de disparition ou menacées : la Loi sur les espèces en péril, L.C. 2002, ch. 29, et modifications (LEP), articles 5 et 6.
[34]Aux termes du paragraphe 79(1) de la LEP, toute personne tenue, sous le régime d’une loi fédérale, de veiller à ce qu’il soit procédé à l’évaluation des effets environnementaux d’un projet, notifie le ministre de l’Environnement qu’un projet est susceptible de toucher une espèce sauvage inscrite ou son habitat initial.
[35]En l’espèce, le MPO a fait cette notification au ministre de l’Environnement en février 2005. À cet égard, le Crapaud de l’Ouest, dont l’habitat se trouve notamment dans le DRM proposé, est inscrit à l’annexe 1 de la LEP.
[36]Par conséquent, aux termes du paragraphe 79(2), les AR doivent veiller à ce que des mesures compatibles avec tout programme de rétablissement et tout plan d’action applicable soient prises en vue d’éviter ces effets ou de les amoindrir et les contrôler.
C. Déclencheurs de l’EE du projet
[37]En l’espèce, le projet est soumis à l’obligation de réaliser une EE, en application, d’une part, de l’Environmental Assessment Act, S.B.C. 2002, ch. 43, et modifications (la Loi provinciale [ou l’EAA]), et d’autre part, de la LCEE.
1) Les déclencheurs provinciaux
[38]Pour les besoins de la présente demande de contrôle judiciaire, il n’est pas nécessaire de soumettre à une analyse détaillée toutes les dispositions applicables de la Loi provinciale, sinon pour signaler qu’aux termes de cette dernière, il est nécessaire d’obtenir un certificat d’évaluation environnementale avant qu’un [traduction] « projet sujet à examen » puisse aller de l’avant.
[39]En fait, la proposition de RCDC de construire, d’exploiter, de démanteler et de fermer le projet constitue un projet sujet à examen, ainsi que l’envisage la partie 3 du Reviewable Projects Regulation, B.C. Reg. 370/2002, et modifications, car la mine de cuivre‑or proposée est une installation nouvelle, dont la capacité de production est supérieure à 75 000 tonnes par année de minerai.
[40]Un certificat d’évaluation environnementale en vertu de l’EAA, un permis délivré en vertu de la Mines Act, R.S.B.C. 1996, ch. 293, et modifications (la MA), un permis d’utilisation spéciale en vertu du Forest Practices Code of British Columbia Act, R.S.B.C. 1996, ch. 159, et modifications (le FPC), ainsi qu’un permis de coupe en vertu de la Forest Act, R.S.B.C. 1996, ch. 157, et modifications (la FA), doivent être délivrés ou émis par les autorités provinciales compétentes pour que le projet puisse être mis en œuvre en tout ou en partie.
2) Les déclencheurs fédéraux
[41]Sous le régime de la loi fédérale, aux termes du paragraphe 5(1) de la LCEE, l’EE d’un « projet » est réalisée avant l’exercice d’une des attributions suivantes : une « autorité fédérale » en est le promoteur, elle accorde une aide financière pour aider à mettre en œuvre le projet, elle administre le territoire domanial ou en cède l’administration et le contrôle à une province en vue de la mise en œuvre du projet en question, ou elle délivre un permis ou une licence, donne toute autorisa-tion ou prend toute mesure en vue de permettre la mise en œuvre du projet en tout ou en partie.
[42]Cependant, une EE n’est pas exigée aux termes de l’article 5 de la LCEE si le projet est décrit dans la « liste d’exclusion » (LE) que comporte le Règlement sur la liste d’exclusion, DORS/94‑634, et modifications (le RLE), pris en vertu de l’alinéa 59c)(ii) [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 29] de la LCEE (voir l’article 7 [mod., idem, art. 3] de la LCEE). La LE s’applique aux domaines généraux suivants : l’agriculture, l’électricité et l’énergie nucléaire, les oléoducs et les gazoducs, l’exploitation forestière, les aménagements hydrauliques, les transports, les parcs nationaux, les réserves de parc national, les lieux historiques nationaux ainsi que les canaux historiques. La LE dispense les projets dont les effets environnementaux sont négligeables de l’obligation de subir une EE. Le projet dont il est question en l’espèce n’est pas mentionné dans la LE.
[43]Comme on peut le voir, l’exécution d’une EE en vertu de la LCEE ne peut avoir lieu qu’à l’égard d’un « projet », et il faut qu’il y ait une « autorité fédérale » en cause. En l’espèce, ces deux conditions sont remplies.
a) La définition d’un « projet »
[44]Le projet dont il est question en l’espèce a été décrit en détail à la section précédente des présents motifs (voir la section II—Le projet). En résumé, le projet comporte les entreprises suivantes : deux mines à ciel ouvert, un camp minier, un atelier d’entretien et les ouvrages connexes, une usine de transformation, un DRM et le système de dérivation de cours d’eau connexe, un dépôt de déchets de roche et des piles de stockage de minerai de basse teneur, une fabrique d’explosifs et une poudrière, un système d’approvisionnement en eau et les ouvrages connexes, les projets d’atténuation ou de compensation hors site ou sur le site qui peuvent être nécessaires, une nouvelle route d’accès et de transport ainsi que l’infrastructure connexe, une nouvelle ligne de transport d’électricité, ainsi que les autres ouvrages ou activités entrant en ligne de compte dans la construction, l’exploitation et la désaffectation des installations susmentionnées.
[45]En ce qui concerne un « ouvrage », le paragraphe 2(1) de la LCEE définit un « projet » [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 18(F)] comme étant la « Réalisation —y compris l’exploitation, la modification, la désaffec-tation ou la fermeture—d’un ouvrage » (non souligné dans l’original). Par ailleurs, un projet peut aussi être une « proposition d’exercice d’une activité concrète, non liée à un ouvrage, désignée par règlement ou faisant partie d’une catégorie d’activités concrètes désignées par règlement aux termes de l’alinéa 59b) » (non souligné dans l’original). Le projet dont il est question en l’espèce tombe sous le coup de la définition d’un projet que donne le paragraphe 2(1) de la LCEE.
[46]À cet égard, le Règlement sur la liste d’inclusion, DORS/94‑637, et modifications (le RLI), pris en vertu de l’alinéa 59b) de la LCEE, énumère les activités concrètes et les catégories d’activités concrètes non liées à un ouvrage qui, néanmoins, doivent être considérées comme un « projet ». Les vastes secteurs auxquels s’applique le RLI comprennent les suivants : les parcs nationaux et les zones protégées, les projets pétroliers et gaziers, les établissements nucléaires et les établisse-ments connexes, la défense, les transports, la gestion des déchets, les pêches, la flore et la faune, les projets sur des terres autochtones, les projets dans le Nord (Yukon et Territoires du Nord‑Ouest), ainsi que les forêts. La partie VII de l’annexe, intitulée « Activités concrètes et catégories d’activités concrètes » (la IL [liste d’inclusion]), porte sur les « pêches ».
[47]Plus précisément, la LI s’applique à un certain nombre d’activités menées dans un plan d’eau ou à côté de ce dernier, soit, notamment : 1) la détérioration, la destruction ou la perturbation (DDP) de l’habitat du poisson par des activités concrètes, ou par le vidage d’un plan d’eau ou la modification de son niveau d’eau, ou par des mesures de contrôle de l’érosion le long d’un plan d’eau, qui nécessitent l’autorisation du ministre des Pêches et des Océans prévue au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, et 2) le rejet dans un effluent d’une substance nocive qui nécessite l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application du paragraphe 36(5) de la Loi sur les pêches (voir les articles 42 à 47 de l’annexe du RLI [art. 46.1 (édicté par DORS/99-436, art. 14)]). Par conséquent, toutes les activités concrètes qui sont envisagées dans le projet sont visées par la LI, et tombent donc sous le coup de la LCEE.
b) La compétence fédérale
[48]En l’espèce, aucune autorité fédérale n’est le promoteur du projet ou n’accorde une aide financière en vue d’aider à mettre en œuvre le projet. Cependant, comme il est expliqué ci‑après, au moins deux autorités fédérales, le MPO et RNCan, sont tenues de prendre certaines mesures réglementaires pour que le projet puisse être mis en œuvre en tout ou en partie. Le paragraphe 5(2) de la LCEE indique clairement, par ailleurs, qu’il est obligatoire de procéder à une EE avant que le gouverneur en conseil délivre un permis ou une licence, qu’il accorde une approbation ou qu’il prenne une autre mesure quelconque afin que le projet puisse être réalisé en tout en ou partie.
[49]À cet égard, le Règlement sur les dispositions législatives et réglementaires désignées, DORS/94‑636, et modifications (le RDLRD), pris en vertu des alinéas 59f) [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 29] et g) de la LCEE, énumère les dispositions législatives et réglementaires fédérales prévoyant les attributions des autorités fédérales et du gouverneur en conseil (le Cabinet) dont l’exercice exige la tenue d’une EE en vertu de l’alinéa 5(1)d) ou du paragraphe 5(2) de la LCEE. Cette liste est exhaustive et non ouverte et, par conséquent, toutes les attributions non inscrites dans la liste des dispositions législatives et réglementaires désignées n’exigent pas une EE.
[50]En l’espèce, une EE est obligatoire aux termes des alinéas 5(1)d) et 5(2)a) de la LCEE parce que le projet nécessite : 1) une autorisation du ministre des Pêches et des Océans en application du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches pour ce qui est de la DDP de l’habitat du poisson, 2) la délivrance d’un permis par le ministre des Ressources naturelles en application de l’alinéa 7(1)a) de la Loi sur les explosifs pour la fabrique d’explosifs et la poudrière envisagées, et 3) une modification, par le gouverneur en conseil, de l’annexe 2 du REMM pris sous le régime du paragraphe 36(5) de la Loi sur les pêches en vue d’inclure les eaux d’amont du ruisseau Trail dans la liste des DRM (voir l’annexe I, partie I, articles 5 et 6, ainsi que l’annexe II, article 5 du RDLRD).
D. Le processus d’EE que prévoit la LCEE
[51]En procédant à une EE en application des dispositions de la LCEE, le gouvernement du Canada, le ministre de l’Environnement, l’Agence canadienne d’évaluation environnementale (l’Agence), de même que tous les organismes assujettis aux dispositions de cette Loi, dont les autorités fédérales et les AR, doivent exercer leurs pouvoirs d’une manière qui protège l’environnement et la santé humaine et qui fait appel au principe de précaution.
[52]À cet égard, une AR ne peut exercer les attributions mentionnées à l’article 5 de la LCEE en rapport avec un projet que si elle prend une « mesure » visée à l’alinéa 20(1)a) [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 11] ou 37(1)a) [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 29(F); 2003, ch. 9, art. 17] de la LCEE (paragraphe 11(2) de la LCEE). La LCEE lie Sa Majesté du chef du Canada ou d’une province (article 3 de la LCEE).
[53]Lorsque deux AR ou plus sont en cause dans un projet, comme c’est le cas en l’espèce, ces dernières doivent déterminer ensemble la façon d’exécuter leurs obligations et leurs fonctions et se conformer aux procédures énoncées dans le Règlement sur la coordination par les autorités fédérales des procédures et des exigences en matière d’évaluation environnementale, DORS/97‑181 (paragraphe 12(1) et alinéa 59a) [mod. par L.C. 1994, ch. 46, art. 5] de la LCEE).
[54]Un coordonnateur fédéral de l’évaluation environnementale est chargé de coordonner la partici-pation des autorités fédérales au processus d’évaluation environnementale pour un projet qui doit ou pourrait faire l’objet d’un examen préalable ou d’une étude approfondie, ainsi que de faciliter les communications et la collaboration entre elles et avec les provinces (article 12.1 [édicté par L.C. 2003, ch. 9, art. 7] de la LCEE). En l’espèce, le coordonnateur fédéral de l’évaluation environnementale pour le projet était l’Agence (articles 12.4 [édicté, idem] et 61 de la LCEE).
[55]Toute autorité fédérale qui a en sa possession des renseignements spécialisés au sujet d’un projet doit, sur demande, mettre les renseignements pertinents à la disposition de l’AR (paragraphe 12(3) de la LCEE). En l’espèce, Environnement Canada et Santé Canada, à titre d’autorités fédérales spécialisées, ont fourni des conseils spécialisés aux AR. Plus particulièrement, des conseils ont été fournis par Environnement Canada sur la qualité de l’eau, l’hydrologie, la faune, le climat, la qualité de l’air et les défaillances de matériel et les accidents éventuels. Des conseils spécialisés ont été reçus de Santé Canada en matière de santé.
[56]Il y a quelques précisions à formuler au sujet de la teneur de l’annexe 2 du REMM ainsi que du rôle que jouent les autorités fédérales qui ont pris part à l’EE du projet. En l’espèce, avant que le gouverneur en conseil ne prenne une mesure quelconque en vertu du REMM, les AR doivent prendre en compte les rapports et les observations applicables dont il est question aux articles 20 [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 11] et 32 [mod., idem, art. 15(F)] de la LCEE, et formuler en conséquence leurs recommandations au Cabinet.
[57]Cela dit, lorsqu’il faut procéder à un examen préliminaire ou à une étude approfondie d’un projet et qu’une instance, comme le gouvernement d’une province, a la responsabilité ou le pouvoir de procéder à une évaluation des effets environnementaux du projet ou d’un élément quelconque de ce dernier, l’AR peut collaborer avec cette instance en rapport avec l’évaluation environnementale du projet (paragraphe 12(4) [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 20(F)] de la LCEE).
[58]À cet égard, l’Entente de collaboration entre le Canada et la Colombie‑Britannique en matière d’évaluation environnementale (2004) (l’Entente) dispose que lorsque le Canada et la Colombie‑ Britannique assument la responsabilité d’une évaluation environnementale d’un projet, comme celui dont il est question en l’espèce, une évaluation environnementale coopérative sera réalisée dans le cadre de l’Entente, afin de produire le type, le niveau et la qualité des renseignements qui sont nécessaires pour répondre aux exigences de chaque gouvernement en matière d’évaluation environnementale, tout en préservant les responsabilités et les rôles existants de chaque niveau de gouvernement (voir les articles 11 et 20 de l’Entente).
[59]En fait, les contacts et les autorités devant s’assurer que l’on procède à une EE du projet d’une manière conforme à la LCEE ou à ses règlements doivent mettre au point, le plus tôt possible dans le cadre du processus coopératif d’évaluation environnementale, un plan de travail propre au projet, lequel peut inclure la portée du projet à évaluer ainsi que les facteurs à prendre en considération et leur importance (article 14 de l’Entente).
IV—LE CONTEXTE FACTUEL
A. L’évaluation provinciale
[60]Le 2 octobre 1995, American Bullion Minerals, l’ancienne propriétaire du projet, a présenté une demande (la demande originale) au British Columbia Environmental Assessment Office (BCEAO) en vue d’obtenir pour ce projet un certificat d’approbation en vertu de l’Environmental Assessment Act, R.S.B.C. 1996, ch. 119 (l’ancienne Loi provinciale).
[61]Le BCEAO a délivré les spécifications finales concernant le rapport du projet le 18 juin 1996, et une évaluation du projet sous le régime de l’ancienne Loi provinciale était en cours quand la Loi provinciale est entrée en vigueur le 30 décembre 2002. Une ordonnance de transition délivrée en vertu de la Loi provinciale a exigé que les renseignements inclus dans les spécifications relatives au rapport de projet soient présentés au plus tard le 18 juin 2003, sans quoi il serait mis fin à l’EE en cours.
[62]Le 17 juin 2003, RCDC s’est officiellement retirée du processus d’évaluation environnementale, dans l’intention de reprendre ce dernier en présentant une nouvelle description de projet à une date ultérieure.
[63]Le 27 octobre 2003, RCDC a soumis au BCEAO une nouvelle description de projet, fondée sur un taux nominal de production, à l’usine de concentration, de 25 000 tonnes par jour sur une période de 18 ans. La nouvelle description de projet décrivait également le projet et la portée proposée des études concernant son EE.
1) La décision préliminaire
[64]Le 19 novembre 2003, le BCEAO a délivré en vertu de l’alinéa 10(1)c) de la Loi provinciale une ordonnance déclarant que le projet était susceptible d’examen et qu’il serait nécessaire d’obtenir un certificat d’évaluation environnementale avant que le projet puisse continuer. Le BCEAO a établi un comitéinter‑agences (le groupe de travail) en vue de fournir des conseils à RCDC et d’aider à examiner les attributions et les autres documents que RCDC fournirait. Des Premières nations ainsi que des organismes provinciaux et fédéraux étaient représentés au sein du Groupe de travail.
2) Les attributions
[65]Le processus environnemental provincial n’oblige pas à consulter le public sur les [traduction] « attributions », qui fixent la portée du projet. Le 25 mars 2004, RCDC a présenté une [traduction] « ébauche d’attributions » pour la demande au BCEAO (l’ébauche d’attributions), laquelle a été mise à la disposition des organismes provinciaux et fédéraux, des administrations locales et des Premières nations de Tahltan et d’Iskut pour commentaires, mais non à la disposition du public. Dans son avant‑propos, RCDC a donné l’explication suivante :
[traduction] Les présentes attributions ont été établies par RCDC en accord avec la BCEAA en vue de définir les renseignements à inclure dans une demande de certificat d’évaluation environnementale (« DCEE ») et de permettre ainsi de déterminer l’importance des effets environnementaux, patrimoniaux, sociaux, économiques et sanitaires potentiels du projet, de même que le caractère suffisant des mesures proposées pour prévenir ou atténuer ces effets.
En prévision du fait que le projet fera également l’objet d’un examen en vertu de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (« LCEE »), les présentes attributions comportent également les renseignements qui sont nécessaires pour satisfaire aux exigences de la LCEE. Dans un tel cas, il est prévu que le processus coopératif d’évaluation environnementale sera entrepris de la manière prévue dans l’Entente de collaboration entre le Canada et la Colombie‑ Britannique en matière d’évaluation environnementale. [Non souligné dans l’original.]
[66]Le 18 juin 2004, le BCEAO a approuvé les attributions finales du projet (les attributions approuvées). Le passage contenu dans l’avant‑propos de l’ébauche d’attributions n’a pas changé, même si une EE avait été entreprise en vertu de la LCEE dans l’intervalle, c’est‑à‑dire le 19 mai 2004 (voir la prochaine sous‑section des présents motifs, intitulée « L’évaluation fédérale »).
[67]Le 30 juin 2004, RCDC a écrit au BCEAO pour l’informer que le projet avait été révisé : la capacité de production serait de 27 500 tonnes par jour sur une période de 18 ans.
3) L’ordonnance rendue en vertu de l’article 11
[68]Le 4 août 2004, dans une ordonnance rendue en vertu de l’article 11 de la Loi provinciale, le BCEAO a prescrit que le promoteur fournirait au directeur de projet, dans un délai de trois ans, la portée du projet, la portée de l’évaluation, ainsi que les procédures et les méthodes à suivre pour l’examen de la demande et du supplément à la demande (l’ordonnance rendue en vertu de l’article 11 [In the Matter of the Environmental Assessment Act, S.B.C. 2002, c. 43 (the “Act”) and an Environmental Assessment of the Proposed Red Chris Porphyry Copper-Gold Mine Project (the “Project”)]).
[69]En particulier, l’ordonnance rendue en vertu de l’article 11 a fixé comme suit la portée du projet :
[traduction]
1.1 une mine à ciel ouvert;
1.2 une capacité de concentration de 27 500 tonnes par jour;
1.3 une installation de gestion des résidus;
1.4 une installation de stockage des déchets de roche;
1.5 une pile de stockage de minerai de basse teneur;
1.6 un camp minier et les ouvrages connexes;
1.7 de nouvelles routes d’accès ou de transport, ainsi que l’infrastructure connexe;
1.8 l’amélioration des routes d’accès existantes, ainsi que de l’infrastructure connexe;
1.9 l’approvisionnement en eau et les ouvrages connexes;
1.10 l’utilisation des routes existantes par des camions de transport de concentré;
1.11 l’approvisionnement en électricité, ainsi que l’infrastructure connexe;
1.12 l’atelier d’entretien;
1.13 l’installation de stockage ou de fabrication d’explosifs;
1.14 les ouvrages de compensation ou d’atténuation hors site ou sur le site nécessaires;
1.15 les installations d’appoint;
1.16 les activités exécutées dans le cadre de la construction, de l’exploitation, de l’entretien et du démantèlement et de la fermeture des installations susmentionnées;
1.17 toute autre activité concrète qui, de l’avis du directeur de projet, fait partie intégrante de ce dernier.
[70]Par ailleurs, l’ordonnance rendue en vertu de l’article 11 prévoyait que l’évaluation du projet comporterait un examen des effets environnementaux, sociaux, économiques, sanitaires et patrimoniaux possibles, ainsi que des effets possibles sur les intérêts des groupes des Premières nations, et qu’elle prendrait en compte les moyens pratiques de prévenir ou de réduire à un niveau acceptable les effets négatifs possibles du projet.
[71]L’ordonnance rendue en vertu de l’article 11 a également fixé les paramètres et un délai concernant le processus d’évaluation environnementale, dont l’obligation de consulter le public :
a) [traduction] « l’étape préalable à la demande » consisterait principalement à relever les questions relatives au projet qu’il y aurait à régler, à la suite de consultations que RCDC ou le BCEAO tiendraient avec les parties intéressées et potentiellement touchées, dont le grand public, les Premières nations, les organismes fédéraux et provinciaux ainsi que les administrations locales;
b) [traduction] « l’étape d’examen de la demande » porterait principalement sur l’examen de la demande elle‑même, de façon à déterminer si les préoccupations relevées ont été traitées de manière satisfaisante ou non, et se terminerait par une décision de la part des ministres provinciaux compétents sur la demande, en l’occurrence le ministre de la Gestion des ressources durables (Sustainable Resource Management), le ministre de la Protection des eaux, des terres et de l’air (Water, Land and Air Protection) ou le ministre de l’Énergie et des Mines (Energy and Mines) (collectivement, les ministres provinciaux).
[72]L’étape de l’examen de la demande durerait 180 jours, et devait débuter après que le directeur de projet informerait RCDC que la demande avait été acceptée pour examen (article 3 du Prescribed Time Limits Regulation, B.C. Reg. 372/2002). Avant que les ministres provinciaux prennent une décision définitive, le directeur de projet tiendrait une période officielle de commentaires publics d’une durée de 65 jours (article 7 du Public Consultation Policy Regulation, B.C. Reg. 373/2002). Il y aurait aussi un programme de consultation des Premières nations.
[73]Après la fin du processus de consultation, le directeur de projet préparerait ensuite un rapport d’évaluation, qui décrirait les questions soulevées lors de l’examen de la demande, de même que tous les moyens pratiques relevés pour éviter les effets ou les réduire à un niveau acceptable. Le directeur de projet fournirait aux organismes publics compétents, aux administrations locales et aux Premières nations la possibilité d’examiner et de commenter l’ébauche de rapport d’évaluation.
[74]Le rapport d’évaluation serait ensuite transmis aux ministres provinciaux pour y donner suite. On s’attendait à ce que ces derniers rendent leur décision dans les 180 jours suivant la date à laquelle le directeur de projet informerait RCDC que la demande était acceptée pour examen, mais, avant de soumettre le rapport d’évaluation aux ministres provinciaux, le directeur de projet pouvait néanmoins suspendre, pour n’importe quelle raison valable, le délai de 180 jours prévu pour examiner la demande.
4) La demande et son supplément
[75]Le 24 septembre 2004, RCDC a présenté sa [traduction] « demande de certificat d’évaluation environnementale » officielle (la demande) afin qu’elle soit examinée en vertu de la Loi provinciale. La demande a été soumise à un examen préliminaire par le BCEAO, les organismes fédéraux, les groupes des Premières nations et quelques organismes provinciaux afin de s’assurer qu’elle satisfaisait aux attributions approuvées.
[76]Le 20 octobre 2004, le directeur de projet a accepté la demande, à la condition que l’on y apporte un certain nombre de changements. Par une lettre datée du 28 octobre 2004, RCDC a présenté une version révisée de la demande, dans laquelle avaient été intégrés les changements nécessaires. La demande—comprennent plusieurs volumes—a ensuite été transmise aux organismes fédéraux et provinciaux, aux administrations locales, aux groupes des Premières nations et au grand public.
[77]Le BCEAO a reçu des exemplaires de la demande révisée le 2 novembre 2004 et celle‑ci a été transmise aux organismes fédéraux et provinciaux, aux administrations locales ainsi qu’aux Premières nations faisant partie du groupe de travail. La période d’examen de la demande, de 180 jours, a débuté le 2 novembre 2004.
[78]Le 12 novembre 2004, RCDC a présenté au BCEAO un supplément en deux volumes (le supplément à la demande), et ce supplément a été accepté pour examen le 30 novembre 2004. Il a lui aussi été transmis aux organismes fédéraux et provinciaux, aux administrations locales, aux groupes des Premières nations et au grand public. Le supplément à la demande contient les résultats d’études et de travaux sur le terrain menés au cours de la saison estivale de travaux de prospection de 2004.
[79]Dans une lettre datée du 21 décembre 2004 et adressée au BCEAO, RCDC a modifié certains aspects de la demande, en se fondant sur les résultats d’une étude de faisabilité. Cependant, RCDC ne s’attendait pas à ce que ces changements aient un effet marqué sur la portée générale du projet, telle que présentée dans la demande, à part le fait de prolonger la durée prévue de la mine de 18 à 25 ans et de faire passer la production quotidienne de 27 500 tonnes à 30 000 tonnes par jour.
5) La consultation publique
[80]Outre les consultations que RCDC et le BCEAO ont menées avant de présenter la demande et son supplément, une période officielle de commentaires publics, d’une durée de 65 jours, a été annoncée sur le site Web du BCEAO ainsi que dans les journaux locaux (l’avis provincial).
[81]L’avis provincial donnait une brève description du projet et indiquait que, pour les besoins de l’examen de l’EE, le projet comprenait les activités concrètes menées sur le site et hors site en rapport avec les travaux de construction, d’exploitation et d’entretien menés au cours des semaines qui y étaient indiquées. Les activités inscrites sont les mêmes que celles qui sont mentionnées dans l’ordonnance rendue en vertu de l’article 11. Selon l’avis provincial, RCDC avait présenté une demande de certificat d’évaluation environnementale (la demande d’EE) en vertu de la EAA, de même que des demandes de permis en vertu de la MA, un permis d’utilisation spéciale en vertu de la FPC et un permis de coupe en vertu de la FA de tout, en vue de la mise en chantier du projet (les demandes de permis concurrentes). L’avis provincial invitait le public à commenter la demande d’EE et les demandes de permis concurrentes, et il indiquait que la période de commentaires publics, qui commençait le 17 novembre 2004 et prenait fin le 21 janvier 2005, avait pour objet de [traduction] « décrire des questions précises concernant l’examen technique de la demande d’EE ». Cependant, il n’est fait aucunement mention dans l’avis provincial du processus d’évaluation environnementale lancé sous le régime de la LCEE ni d’une demande quelconque de la part de RCDC aux autorités fédérales, en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches ou de l’alinéa 7(1)a) de la Loi sur les explosifs, ni du fait qu’il sera nécessaire que le gouverneur en conseil modifie l’annexe 2 du REMM de façon à inclure les eaux d’amont du ruisseau Trail dans la liste des DRM.
[82]En tout, 10 commentaires du public ont été présentés au BCEAO au cours de cette période de commentaires publics. Ils faisaient état de préoc-cupations concernant les aspects suivants du projet : la protection de l’environnement, l’habitat de la faune et du poisson, l’industrie récréotouristique locale, de même que des questions d’ordre social et communautaire. La demanderesse n’a présenté aucun commentaire.
[83]Un certain nombre d’organismes fédéraux ont également réagi. RNCan a présenté au BCEAO des commentaires détaillés concernant non seulement la fabrique d’explosifs mais aussi d’autres éléments importants du projet : la gestion des déchets de la mine, la surface de protection et la qualité des eaux souterraines, l’écoulement acide, les aléas sismiques, des aspects géologiques techniques, la stabilité des pentes ainsi que les dangers connexes imputables à la mine à ciel ouvert, les sites de déchets de roche et les installations de stockage des résidus, de même que divers aspects hydrogéologiques et hydrologiques. Santé Canada a présenté des commentaires sur la qualité de l’eau, le poisson en tant que source alimentaire, le bruit et les aspects socio‑économiques du projet. Le MPO n’a présenté aucun commentaire écrit au BCEAO.
[84]Au courant du mois de février 2005, RCDC a produit sa réponse aux divers commentaires que le BCEAO avait reçus, y compris ceux de RNCan et des participants. RNCan a transmis des commentaires additionnels sur les réponses de RCDC en mars et en avril 2005.
6) Les consultations tenues avec les Premières nations
[85]Le 11 avril 2005, à la demande expresse de RCDC, la période d’examen de 180 jours a été provisoirement suspendue afin qu’elle puisse répondre à des préoccupations que le groupe des Premières nations d’Iskut et de Tahltan avaient soulevées. La période d’examen de 180 jours a repris le 30 juin 2005, après que RCDC eut pris des mesures de consultation additionnelles, dont des réunions avec des groupes des Premières nations les 5 avril, 26 avril, 4 mai et 20 mai 2005, et fourni des rapports et des renseignements additionnels au BCEAO, comme ce dernier l’avait demandé.
7) Le rapport d’évaluation
[86]Les résultats de l’EE du BCEAO figurent dans son rapport d’évaluation daté du 22 juillet 2005 (le rapport du BCEAO [Red Chris Porphyry Copper-Gold Project Assessment Report, en ligne <http://www.eao. gov.bc.ca/epic/output/html/deploy/epic_document_238_20678.html>]), où il a conclu que le projet n’est pas susceptible d’avoir des effets négatifs importants sur le plan environnemental, patrimonial, social, économique ou sanitaire. En outre, ce rapport présentait des renseignements additionnels sur le processus d’examen, la portée de l’examen et les questions prises en compte, de même que les moyens adoptés pour prévenir ou réduire les éventuels effets négatifs importants du projet.
[87]Le rapport du BCEAO a traité de tous les aspects provinciaux et fédéraux du projet, dont les suivants : les effets potentiels sur le régime existant d’écoulement des eaux et sur la qualité des eaux résultant des rejets du site minier dans les eaux réceptrices, ainsi que des rejets du DRM; les effets potentiels sur le poisson et son habitat, ainsi que la nécessité d’établir un plan compensatoire pour la perte de l’habitat du poisson attribuable au DRM; les effets potentiels sur la faune, y compris certaines espèces en péril inscrites sur la liste rouge ou la liste bleue à l’échelon provincial, ou certaines espèces dites « préoccupantes » à l’échelon fédéral (comme le Crapaud de l’Ouest). Les préoccupations dont les autorités provinciales ou fédérales de même que le grand public et les Premières nations de Tahltan et d’Iskut ont fait état sont mentionnées dans le rapport du BCEAO.
[88]Le projet a été considéré au départ comme une étude approfondie sous le régime de la LCEE et il a plus tard été changé pour un examen préalable sous le régime de la LCEE, comme nous le verrons plus loin aux paragraphes 93 à 97 et 108 à 111. Cela dit, des facteurs liés à l’exécution d’une étude approfondie ont également été inclus dans le rapport du BCEAO. Ces facteurs étaient, selon le cas, les suivants :
· les effets de l’environnement sur le projet;
· les effets de défaillances du matériel et d’accidents sur l’environnement;
· les solutions de rechange;
· les effets environnementaux cumulatifs du projet sur une échelle régionale;
· les programmes de suivi.
[89]En particulier, dans son rapport, le BCEAO a signalé que RCDC avait procédé à une évaluation des effets cumulatifs (EEC). Dans cette EEC, les projets suivants ont été pris en considération : le projet Galore Creek, le projet hydroélectrique Forrest Kerr, le projet de résidus et de déchets de roche du lac Tom McKay, le projet Kemess North et Kemess South, le projet de mine de cuivre Sustut, le projet de mine de plomb‑zinc de Strousay, ainsi que les explorations minières menées dans la région. Dans son rapport, le BCEAO a déclaré ce qui suit [à la page 85] :
[traduction] Sur la foi de ces informations, l’EAO est convaincu qu’aucun effet environnemental cumulatif important n’est associé à la construction, à l’exploitation et à la désaffectation du projet. Cependant, comme l’exige la LCEE, les AR fédérales procéderont à leur propre détermination des effets environnementaux cumulatifs qui sont associés à la construction, à l’exploitation et à la désaffectation du projet dans un rapport d’examen préalable établi en vertu de la LCEE.
[90]Dans ses conclusions d’examen général, le BCEAO a déclaré en partie ce qui suit dans son rapport [aux pages viii et ix] :
[traduction] Selon les informations que le promoteur a fournies, le projet n’est pas susceptible de causer des effets environnementaux négatifs importants sur le plan environnemental, patrimonial, social, économique ou sanitaire, compte tenu de la mise en œuvre des mesures d’atténuation que le promoteur s’est engagé à prendre.
Les autorités responsables fédérales préparent actuellement un rapport d’examen préalable du projet sous le régime de la LCEE, qui est fondé sur des sections du présent rapport. Les AR fédérales ont déclaré qu’elles prévoient conclure que le projet n’est pas susceptible de causer des effets environnementaux négatifs importants, en tenant pour acquis que les mesures d’atténuation et les programmes de suivi proposés seront mis en œuvre. [Non souligné dans l’original.]
8) Le certificat d’évaluation environnementale
[91]Le 25 juillet 2005, le directeur administratif du BCEAO a recommandé que l’on accorde un certificat d’évaluation environnemental et, le 24 août 2005, les ministres provinciaux ont délivré le certificat en question.
B. L’évaluation fédérale
[92]Le processus fédéral d’évaluation environne-mentale a été officiellement enclenché quand, le 3 mai 2004, ou vers cette date, bcMetals (pour le compte de RCDC) a présenté au MPO, en application du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, deux demandes couvrant la construction envisagée des premiers bassins de résidus miniers du cours supérieur du ruisseau Trail, ainsi que le point de franchissement du ruisseau White Rock Canyon et du ruisseau Coyote, relativement aux tracés proposés pour la route d’accès privilégiée et la route d’accès de remplacement. Avant mai 2004, la participation concrète des ministères fédéraux à l’EE du projet s’était bornée à prendre part à diverses réunions du groupe de travail.
1) La décision préliminaire
[93]Le 19 mai 2004, ou vers cette date, sur la foi des renseignements que RCDC avait fournis à la fois au BCEAO (en octobre 2003 et en février 2004) et au MPO (en mai 2004), le MPO a conclu qu’il était nécessaire de soumettre le projet à une EE, en application de l’article 5 de la LCEE. Cette décision préliminaire reposait sur les conclusions suivantes ainsi que sur une analyse de la portée du projet :
[traduction] Pêches et Océans Canada (MPO) a reçu votre demande d’autorisation datée du 3 mai 2004 conformément au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, relativement à des éléments liés au projet de mine d’or‑cuivre porphyrique Red Chris. Pour accélérer la correspondance ou les demandes de renseignements futures, veuillez mentionner le titre et les numéros de suivi quand vous nous contacterez.
No de dossier de suivi du SSDH : 03‑HPAC‑PA1‑000‑000116
No de dossier de l’Habitat : PRHQ‑5300‑10‑083
Titre de suivi : Projet de mine d’or‑ cuivre porphyrique Red Chris
D’après ce que nous avons compris, le projet de mise en valeur minière comporte ce qui suit :
- une mine à ciel ouvert;
- la concentration de 25 000 tonnes par jour;
- un dépôt de résidus miniers;
- une ou plusieurs installations de stockage de déchets de roche;
- un camp minier et les ouvrages connexes;
- un système d’alimentation en eau;
- des installations accessoires;
- une installation de fabrication ou de stockage d’explosifs;
- un atelier d’entretien;
- de nouvelles routes d’accès ou de transport, ainsi que l’infrastructure connexe;
- l’amélioration des routes d’accès existantes, ainsi que l’infrastructure connexe;
- l’utilisation des routes 37 et 37A existantes par des camions de transport de concentré;
- un système d’approvisionnement en électricité, et les ouvrages connexes;
- les activités de compensation ou d’atténuation hors site ou sur le site requises;
- toute autre activité concrète faisant partie intégrante du projet.
Comme il est indiqué dans les renseignements présentés qui suivent :
- Red Chris Porphyry Copper‑Gold Mine Project Description. Document établi par Red Chris Development Company Ltd., octobre 2003;
- Red Chris Mine Access Review. Document établi par Allnorth Consultants Ltd., février 2004;
- Application for Works or Undertakings Affecting Fish Habitat : Red Chris copper‑gold mine development project. Demande datée du 3 mai 2004.
Si les renseignements qui précèdent ont changé depuis que vous avez présenté votre demande, nous vous prions de nous consulter afin de déterminer si les renseignements inclus dans la présente lettre s’appliquent toujours.
Sur la foi des renseignements fournis, le MPO a conclu que votre proposition est susceptible de mener à la détérioration, à la destruction ou à la perturbation de l’habitat du poisson. La détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson sont interdites, à moins d’obtenir une autorisation du MPO, en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches. Au moment d’examiner votre proposition, nous prendrons en considération la Politique de gestion de l’habitat du poisson du Ministère, laquelle dispose qu’aucune autorisation n’est accordée à moins que le promoteur établisse et mette en œuvre des mesures acceptables pour contrer toute perte d’habitat.
Nous vous informons que le paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches fait partie de la liste des dispositions législatives et réglementaires désignées qui déclenchent l’application de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (LCEE). Cela signifie que Pêches et Océans Canada est tenu de procéder à une évaluation environnementale de votre projet, comme le prescrit la LCEE, avant de décider d’accorder une autorisation. Les renseignements relatifs à votre projet seront transmis à d’autres ministères fédéraux pour examen et commentaires. Si, à la suite de cet examen, nous sommes convaincus que le projet, après avoir pris en compte la mise en œuvre de mesures d’atténuation, n’est pas susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants, une autorisation peut être délivrée en vertu de la Loi sur les pêches. [Non souligné dans l’original.]
2) L’avis de lancement
[94]Le 21 mai 2004, ou vers cette date, un « avis de lancement d’une évaluation environnementale » (l’avis de lancement) a été publié dans le registre [registre canadien d’évaluation environnementale], annonçant que le MPO procéderait à une étude approfondie à compter du 19 mai 2004 et décrivant le projet comme suit :
[traduction]
MINE À CIEL OUVERT AVEC INFRASTRUCTURE CONNEXE, Y COMPRIS DÉPÔT DE RÉSIDUS MINIERS, ROUTES D’ACCÈS, PRISES D’EAU, LIGNES DE TRANSMISSION ET BÂTIMENTS ANNEXES (P. EX. ENTRETIEN, CAMP). La portée du projet sera ajoutée lorsqu’elle sera disponible.
[95]L’avis de lancement faisant également référence au fait que selon l’article 5 de la LCEE, une évaluation était exigée pour [traduction] « ce projet » parce qu’il se pouvait que le MPO délivre un permis en application du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches. L’avis de lancement indiquait aussi que le gouvernement de la Colombie‑Britannique évaluait le projet et que pour l’EE en question, l’Agence agirait comme coordon-nateur fédéral de l’évaluation environnementale.
3) La décision initiale en matière de processus
[96]Le fondement sur lequel le MPO a décidé au départ, au milieu du mois de mai 2004, que le processus qu’il convenait de suivre dans le cadre de l’EE du projet était celui d’une étude approfondie et non d’un examen préliminaire n’était pas tout à fait clair. Cependant, cette question est clarifiée, dans l’intérêt d’autres ministères fédéraux, dans une lettre que le MPO a rédigée le 31 mai 2004 et où il est clairement indiqué que [traduction] « le MPO a décidé que le projet proposé nécessitera un examen de niveau “étude approfondie”, au vu d’une capacité de production de minerai proposée d’un maximum de 50 000 tonnes par jour, ce qui excède le seuil de 600 tonnes par jour que prévoit le point 16c) du Règlement sur la liste d’étude approfondie, pris en vertu de la LCEE » (non souligné dans l’original).
[97]Par ailleurs, d’autres ministères fédéraux ont été informés en même temps, par la lettre du 31 mai 2004, que le projet, dont le MPO avait déterminé la portée, englobait la mine et l’usine de concentration proposées, de même que certains ouvrages accessoires :
[traduction]
La portée préliminaire du projet visé par la LCEE comportera ce qui suit :
(i) Le projet principal
La construction et l’exploitation d’une mine de cuivre‑or à ciel ouvert, ainsi que d’une usine de concentration, avec une production de minerai pouvant atteindre 50 000 tonnes par jour.
(ii) Ouvrages accessoires
Dans le cadre du projet principal visé par le LCEE : dépôt de résidus miniers, piles de minerai de basse teneur, installation(s) de stockage de déchets de roche, camp minier et ouvrages connexes, système d’alimentation en eau, installations auxiliaires, installations de fabrication ou de stockage d’explosifs, atelier d’entretien, nouvelles routes d’accès ou de transport et infrastructure connexe, amélioration des routes d’accès existantes et de l’infrastructure connexe, utilisation des routes 37 et 37A par des camions de transport de concentré, système d’approvisionnement en électricité et ouvrages connexes, tous travaux de compensation et d’atténuation sur le site ou hors site nécessaires, ainsi que tout autre ouvrage ou toute autre activité faisant partie intégrante du projet.
Si une autre AR est identifiée ou si de nouveaux renseignements sont envoyés au sujet de la portée du projet, la portée définitive du projet peut inclure le fait d’apporter des rajustements aux éléments qui précèdent. La portée définitive du document se reflétera dans un « document de détermination de la portée » distinct, que le MPO met actuellement au point en vertu du paragraphe 21(1) de la LCEE. Le MPO lancera bientôt l’exercice de consultation publique exigé par l’art. 21 sur la détermination de la portée et il consultera les autres AR sur la teneur du document de détermination de la portée. [Non souligné dans l’original.]
4) Les réponses des ministères
[98]Transports Canada (TC) a rapidement répondu par écrit au MPO. Dans sa réponse, il indique que [traduction] « la détermination de la portée semble correcte, au vu des renseignements reçus à ce jour », mais il indique qu’il pourrait y avoir un élément déclencheur visé à l’alinéa 5(1)d) [de la LCEE], soit le paragraphe 5(1) de la Loi sur la protection des eaux navigables, L.R.C. (1985), ch. N‑22, pour les ponts franchissant des voies d’eau navigables. Plus tard, toutefois, après avoir examiné plus en détail les renseignements du projet concernant la route d’accès, TC a décidé qu’il n’aurait pas besoin d’une approbation en vertu de cette Loi et il n’a donc plus été une AR.
[99]Le 2 juin 2004, RNCan a répondu par écrit pour indiquer qu’il était vraisemblablement une AR, car il y avait un élément déclencheur visé à l’alinéa 5(1)d), soit l’article 7 [art. 7(1)(c),(2) (mod. par L.C. 1993, ch. 32, art. 4)] de la Loi sur les explosifs.
[100]Le 10 juin 2004, Affaires indiennes et du Nord Canada a répondu par écrit au MPO, conformément au paragraphe 12(3) de la LCEE. Il a indiqué qu’il n’avait pas d’éléments déclencheurs visés à l’article 5, mais qu’il répondrait, comme l’exigeait le paragraphe 12(3) de la LCEE.
[101]Le 18 juin 2004, Santé Canada a répondu par écrit au MPO pour indiquer qu’il n’avait pas d’éléments déclencheurs visés à l’article 5, mais qu’il fournirait au besoin les connaissances spécialisées voulues, aux termes du paragraphe 12(3) de la LCEE.
5) Le ministre de l’Environnement
[102]En juillet 2004, l’Agence a présenté un long document d’information portant sur de nombreux aspects de la LCEE, y compris les évaluations menées à ce moment‑là sous le régime de la LCEE, au nouveau ministre de l’Environnement, l’honorable Stéphane Dion (le dossier d’information). À la page 1 de ce dossier, il a été expliqué que :
[traduction] À la suite de révisions récentes à la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (la Loi), proclamées par l’entremise du projet de loi C‑9, l’autorité responsable (AR) doit consulter le public sur l’approche qu’elle se propose de suivre, rendre compte de cette consultation au ministre de l’Environnement et recommander à ce dernier s’il faut poursuivre l’évaluation environnementale (EE) au moyen d’une étude approfondie, ou alors renvoyer le projet à un médiateur ou à une commission. La décision du ministre porte le nom de « décision sur le processus en matière d’EE ».
[103]L’Agence a également informé le ministre de l’Environnement que le projet ferait l’objet d’une étude approfondie sous le régime de la Loi révisée [L.C. 2003, ch. 9] par le projet de loi C‑9 [Loi modifiant la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, 2e sess., 37e lég., 2002] :
[traduction] Le MPO est l’AR, mais il n’a pas encore déterminé la portée du projet pour les besoins de l’étude approfondie. L’examen sera effectué dans le cadre d’un examen coopératif unique, de pair avec la Colombie‑Britannique. L’AR s’attend à lancer au mois d’août une période de consultations publiques de 30 jours sur l’ébauche de portée du projet. On s’attend à recommander au ministre, en septembre, la décision sur le processus en matière d’EE qu’il convient de prendre.
6) Le plan de travail
[104]Le 28 juillet 2004, conformément à l’article 14 de l’Entente, l’Agence a établi une ébauche de plan de travail pour l’EE coopérative du projet (l’ébauche de plan de travail). Cette dernière a mentionné que le projet excédait à la fois le seuil de 3 000 tonnes de production de minerai pas jour et le seuil de 600 tonnes de production de minerai par jour pour l’or, lesquels seuils sont précisés respectivement aux alinéas 16a) et c) [de l’annexe] du Règlement sur la liste d’étude approfondie [DORS/94-638] (Règlement LEA). Le plan exposait un calendrier d’examen provisoire, comprenant la consultation publique relative à la tenue d’une étude approfondie en vertu de la LCEE et la préparation de cette étude à l’intérieur des délais prescrits par la législation provinciale, en tenant pour acquis que la demande de RCDC aurait été acceptée en vue d’un examen détaillé officiel au plus tard le 14 septembre 2004.
[105]Le 18 octobre 2004, l’Agence a révisé l’ébauche de plan de travail et de nouvelles dates ont été inscrites, en tenant pour acquis cette fois‑ci que la demande de RCDC aurait été acceptée en vue d’un examen détaillé officiel au plus tard le 27 octobre 2004 (et non le 14 septembre 2004). Il fallait encore que le projet soit évalué par les AR par la voie d’une étude approfondie, et le public devait être invité à présenter des observations aux AR en rapport avec la portée proposée du projet, les éléments qu’il était proposé de prendre en compte dans l’EE, l’étude proposée de ces éléments ainsi que la question de savoir si l’étude approfondie permettait l’examen des questions soulevées par le projet.
[106]À ce sujet, voici ce qu’on trouve dans l’ébauche de plan de travail :
[traduction]
‑ L’Agence établira une période d’observations publiques pour le rapport d’étude approfondie (REA) et il publiera un avis indiquant la date à laquelle ce rapport sera disponible, l’endroit où il le sera, ainsi que le délai fixé pour présenter des observations sur les conclusions et les recommandations qu’il contient.
‑ L’Agence, de pair avec les AR, fera des efforts raisonnables pour faire coïncider la fin de la période d’observations publiques sur le rapport d’étude approfondie, afin de permettre que les deux niveaux de gouvernement se coordonnent leurs décisions sur l’évaluation environnementale.
‑ L’objectif est de produire un rapport d’étude approfondie qui, dans la mesure du possible, est fondé sur le rapport d’évaluation, qui reflète avec exactitude les conclusions tirées au sujet de l’évaluation menée sous le régime de la LCEE et de la BCEAA, et qui respecte les délais fixés par la législation provinciale.
[107]Comme il a déjà été mentionné à la sous‑section précédente des présents motifs d’ordonnance (L’évaluation provinciale), en date du 18 octobre 2004 la demande de RCDC avait déjà été présentée et, au 20 octobre 2004, le directeur de projet avait approuvé la demande avec les changements à y apporter. Cependant, les AR n’ont pas suivi ou respecté les étapes décrites dans l’ébauche de plan de travail en vue de réaliser, dans le délai provincial de 180 jours, une EE coopérative conjointe, menant à la production d’une étude approfondie.
7) La décision ultérieure concernant le processus
[108]Le 9 décembre 2004, ou vers cette date, M. Richard Wex, du MPO, a écrit une lettre (la lettre de M. Wex) à M. Steve Burgess, de l’Agence, dans laquelle il indique ce qui suit :
[traduction] Au début du mois de mai 2004, le MPO, RNCan et Transports Canada (TC), qui, à l’époque, avait fait savoir qu’il était une AR, ont lancé conjointement une EE au sujet de la proposition Red Chris. Au départ, pour ce qui était du MPO, il y avait peu de données halieutiques disponibles et le MPO n’était donc pas en mesure d’identifier clairement tous les aspects de la proposition qui nécessiteraient une autorisation. Au site de la mine proposée, il y avait un certain nombre d’éléments du projet proposé qui étaient susceptibles d’avoir une incidence sur l’habitat du poisson. De ce fait, et conformément à la politique du MPO sur un déclenchement hâtif qui est entrée en vigueur l’été dernier, le MPO a provisoirement envisagé avec RNCan et TC d’inclure dans la portée du projet le DRM, l’usine de concentration, le trou de la mine, la pile de déchets de roche, la pile de minerai de basse teneur et les routes d’accès dans la portée du projet. Avec peu de renseignements détaillés sur les déclencheurs d’application de la LCEE et sur les responsabilités réglementaires respectives, et compte tenu des pressions exercées pour obtenir le lancement d’un processus d’EE fédéral‑provincial harmonisé, l’approche que toutes les AR ont suivie a semblé être de considérer la proposition de mise en valeur du promoteur pour ce qu’elle semblait être. Comme la capacité proposée de la mine de concentration excède le seuil fixé pour une étude approfondie par l’alinéa 16a) du Règlement sur la liste d’étude approfondie, c’est une étude approfondie qui a été entreprise.
Depuis ce premier exercice de détermination de la portée, qui s’est poursuivi jusqu’à l’automne sous la direction de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, un certain nombre de faits sont survenus qui ont incité le MPO à réévaluer la portée de projet que nous proposions. Le MPO avait demandé au promoteur de surimposer les éléments du projet à l’habitat du poisson. Le promoteur a recueilli des données halieutiques additionnelles, et a présenté la surimposition au MPO au début de novembre. Le MPO a récemment terminé son examen des nouveaux renseignements et a déterminé qu’en fait, l’usine de concentration, le trou de la mine, la pile de déchets de roche, la pile de minerai de basse teneur et les routes d’accès n’auraient vraisemblablement pas d’effets sur l’habitat du poisson qui nécessiteraient une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches.
[. . .]
Durant ce temps, la Cour fédérale a rendu sa décision dans l’affaire True North. Cette décision, qui concorde avec les décisions antérieures de la Cour, souligne l’importance de prendre en compte les déclencheurs de l’application de la LCEE et les responsabilités réglementaires des AR dans le processus d’exercice du pouvoir discrétionnaire des AR en matière de détermination de la portée d’un projet.
À la suite des nouveaux renseignements halieutiques et conformément aux directives données par les tribunaux, y compris la décision la plus récente dans l’affaire True North, le MPO a revu son approche à l’égard de la détermination de la portée de la proposition relative à la mine Red Chris en mettant l’accent, notamment, sur ses éléments déclencheurs de l’application de la LCEE et sur ses responsabilités réglementaires, et il a déterminé une nouvelle proposition de portée de projet. De ce fait, il ne sera plus nécessaire de procéder à une étude approfondie, car l’usine de concentration ne sera pas incluse dans notre portée de projet. En conséquence, c’est un rapport d’examen préalable qui sera établi.
Nous allons maintenant commencer à travailler avec RNCan aux étapes suivantes, en vue de réaliser une EE sous le régime de la LCEE, relativement à la proposition concernant la mine Red Chris. À cette fin, le MPO a convenu avec RNCan de jouer le rôle d’AR « principal ». [Non souligné dans l’original.]
[109]Malgré l’affirmation dans la lettre de M. Wex au sujet de la « surimposition au MPO » au début de novembre 2004 de « données halieutiques addition-nelles », la Cour n’a pu trouver dans le dossier une preuve documentaire quelconque à l’appui de la déclaration selon laquelle [traduction] « l’usine de concentration, le trou de la mine, la pile de déchets de roche, la pile de minerai de basse teneur et les routes d’accès n’auraient vraisemblablement pas d’effets sur l’habitat du poisson qui nécessiterait une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches ». Bien au contraire, la preuve documentaire au dossier montre, d’une part, que le système du ruisseau Trail procure un important système de frai et d’élevage au seul stock de truite arc‑en‑ciel du lac Kluea à frayer dans les ruisseaux et, d’autre part, que la truite arc‑en‑ciel et l’omble à tête plate fraient aussi dans les passages du ruisseau Quarry et du ruisseau Northeast Arm, dans les limites du DRM proposé. Des études de base ont également montré que l’on trouve de la truite arc‑en‑ciel dans les parties inférieures du ruisseau Trail, jusqu’à et y compris l’emplacement proposé du barrage sud du DRM, de même que dans le lac Kluea, en aval du ruisseau Trail. D’après la preuve documentaire, le DRM proposé aura donc un effet négatif sur l’habitat de certains poissons, les cours d’eau et les ressources aquatiques, en inondant et en remplissant les parties supérieures du ruisseau Trail et en dérivant ses eaux vers le ruisseau Quarry lors des opérations ainsi que vers le ruisseau Northeast Arm après la fermeture de la mine. En fait, RCDC a présenté un plan compensatoire pour les pêches.
[110]La lettre de M. Wex fait également état de la décision que la présente Cour a rendue le 16 septembre 2004 dans Prairie Acid Rain Coalition c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), 2004 CF 1265 (la décision TrueNorth—première instance). La Cour signale à ce stade que la décision que le juge Russell a rendue dans TrueNorth confirme le vaste pouvoir que confère l’article 15 [art. 15(3) (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 21(F)] de la LCEE pour ce qui est de déterminer la portée d’un projet. Cette décision a par la suite été confirmée par la Cour d’appel fédérale, le 27 janvier 2006 : Prairie Acid Rain Coalition c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [2006] 3 R.C.F. 610 (C.A.F.) (la décision TrueNorth—appel). La demande d’autorisation d’en appeler devant la Cour suprême du Canada a été rejetée sans motifs, le 20 juillet 2006 [[2006] S.C.C.A. no 197 (QL)]. En l’espèce, les avocats des parties ne s’entendent pas sur la portée et l’application des décisions TrueNorth. Ces dernières, qui sont fondées sur les dispositions de la LCEE avant l’entrée en vigueur des modifications apportées par le projet de loi C‑9, sont abordées plus en détail dans la section suivante, où la Cour analyse le bien‑fondé de la présente demande.
[111]Le 14 décembre 2004, l’avis de lancement diffusé « en ligne » a été rétroactivement modifié afin d’indiquer que le MPO procéderait à un examen préalable à compter du 19 mai 2004 (le premier avis de lancement modifié). Il n’a pas été fait explicitement mention du fait qu’une étude approfondie avait déjà été annoncée en mai 2004. En outre, le premier avis de lancement modifié a continué de décrire le projet en ces termes :
[traduction]
MINE À CIEL OUVERT AVEC INFRASTRUCTURE CONNEXE, Y COMPRIS DÉPÔT DE RÉSIDUS MINIERS, ROUTES D’ACCÈS, PRISES D’EAU, LIGNES DE TRANSMISSION ET BÂTIMENTS ANNEXES (P. EX. ENTRETIEN, CAMP). La portée du projet sera ajoutée lorsqu’elle sera disponible.
Le fait que le projet était également évalué par le gouvernement de la Colombie‑Britannique et que l’Agence agirait comme coordonnateur fédéral de l’évaluation environnementale était encore mentionné. Même si le processus de consultation publique d’une durée de 65 jours en Colombie‑Britannique avait déjà commencé en novembre 2004 et qu’il était censé prendre fin le 21 janvier 2005, aucune invitation officielle n’est faite au public, dans l’avis de lancement, pour qu’il fasse part de ses observations sur le projet dans le cadre de l’ancien processus d’évaluation environnementale.
8) La question non résolue de la quantité d’eau
[112]La dernière réunion du groupe de travail, établi par le BCEAO en novembre 2003 pour fournir une aide et des conseils à propos du projet, a eu lieu le 11 janvier 2005. À cette occasion‑là, les participants ont expressément discuté des effets possibles du projet sur l’habitat du poisson, ainsi que de diverses options d’atténuation et de compensation. Il semble qu’il y avait encore un certain nombre de questions importantes laissées sans réponse, dont l’une était la quantité d’eau qui serait transférée entre les bassins hydrographiques par suite de l’exploitation du DRM :
[traduction] Les organismes fédéraux ont besoin de connaître la quantité d’eau qui résultera de l’exploitation du DRM. Le seuil de l’étude approfondie qui détermine le processus à suivre en matière d’EE est de 10 millions de m3 par année ou plus. Il est possible de déterminer le montant exact à l’aide de calculs. Le promoteur a répondu qu’il est prévu qu’une quantité totale de 6 à 7 millions de m3 d’eau par année sera rejetée dans le ruisseau Quarry, après un délai environ 2 ou 3 mois d’exploitation de la mine. Le promoteur fournira une lettre indiquant la quantité d’eau à faire dériver. [Non souligné dans l’original.]
[113]Le 25 février 2005, dans une lettre adressée à l’Agence, le MPO a confirmé qu’il avait l’intention d’attendre que les questions en suspens soient réglées ou clarifiées avant de conclure son examen du projet. La quantité précise d’eau à faire dériver a continué d’être une préoccupation : [traduction] « À la réunion du 11 janvier 2005 tenue à Smithers, l’ACEE a informé RCDC du seuil indiqué dans le Règlement sur la liste d’étude approfondie pris en vertu de la LCEE concernant la “dérivation de 10M m3/a d’eau ou plus d’un plan d’eau naturel dans un autre” (partie III, point 9). RCDC s’est engagée à calculer la quantité d’eau qu’il était proposé de faire dériver du ruisseau Trail jusqu’au bassin hydrographique du ruisseau Quarry. À ce jour, cette information n’a pas encore été fournie. »
9) La décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée
[114]Dans une lettre datée du 11 mars 2005, le MPO a informé le BCEAO que les AR avaient [traduction] « déterminé la portée du projet pour les fins de la tenue d’une évaluation environnementale sous le régime de la LCEE, relativement au projet Red Chris » (la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée). Plus précisément, la lettre indiquait ce qui suit :
[traduction] Conformément au paragraphe 15(1) de la LCEE, les autorités responsables ont décidé que la portée du projet, pour les besoins de la tenue d’une évaluation environnementale sous le régime de la LCEE, sera la construction, l’exploitation, la modification et la désaffectation des ouvrages suivants :
· le dépôt de résidus miniers, y compris les bassins et les barrages anti‑infiltration dans les eaux d’amont des ruisseaux Trail, Quarry et NE Arm;
· un système de dérivation dans les eaux d’amont des ruisseaux Trail, Quarry, et NE Arm;
· les installations auxiliaires à l’appui des éléments susmentionnés (c’est‑à‑dire, la prise du pipeline transportant l’eau de traitement) sur la rivière Klappan;
· l’installation de fabrication ou de stockage d’explosifs sur le terrain de la mine.
L’évaluation environnementale du projet en vertu de la LCEE, dont la portée est déterminée ci‑dessus, se déroulera conformément aux exigences du paragraphe 18(1) de la LCEE, au niveau de l’examen préalable. [Non souligné dans l’original.]
[115]Le 15 mars 2005, l’avis de lancement diffusé « en ligne » a été modifié rétroactivement pour une deuxième fois; il a été indiqué que le MPO et RNCan procéderaient à un examen préalable du projet à compter du 19 mai 2005 (le deuxième avis de lancement modifié). Il s’agissait de la première fois que l’on faisait état de la participation de RNCan à titre d’AR. Par conséquent, l’avis de lancement a été modifié pour indiquer aussi qu’il était nécessaire de procéder à une évaluation environnementale en vertu de l’article 5 de la LCEE, conformément à l’alinéa 7(1)a) de la Loi sur les explosifs. En outre, l’avis de lancement a continué d’indiquer que l’on ajouterait la portée du projet quand celle‑ci serait disponible.
[116]Le 24 mars 2005, l’avis de lancement « en ligne » a été modifié une troisième et dernière fois (le troisième avis de lancement modifié) afin de préciser qu’il était nécessaire de procéder à une EE parce que : 1) RNCan envisageait de délivrer un permis en application de l’alinéa 7(1)a) de la Loi sur les explosifs, pour la construction, sur le terrain de la mine, de l’installation de fabrication ou de stockage d’explosifs; 2) le MPO envisageait de délivrer des autorisations en vertu de l’article 25 [mod. par L.C. 1991, ch. 1, art. 6] de la Loi sur les pêches, pour la détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson; 3) il était envisagé que les règlements pris par le gouverneur en conseil ajouteraient les eaux d’amont du ruisseau Trail dans la liste des DRM figurant à l’annexe 2 du REMM, conformément aux alinéas 36(5)a) à e) de la Loi sur les pêches.
[117]En outre, le troisième avis de lancement modifié indiquait que, conformément au paragraphe 15(1) de la LCEE, les AR avaient décidé que la portée du projet, pour les fins d’une évaluation environnementale sous le régime de la LCEE, serait la suivante :
[traduction] [. . .] la construction, l’exploitation, la modi-fication et la désaffectation des ouvrages suivants : dépôt de résidus miniers, y compris bassins et barrages anti‑infiltration dans les eaux d’amont des ruisseaux Trial, Quarry et NE Arm. Système de dérivation dans les eaux d’amont des ruisseaux Trail, Quarry et NE Arm. Installations auxiliaires à l’appui des éléments susmentionnés (c’est‑à‑dire, prise d’eau de traitement par pipeline) sur la rivière Klappan. Installations de fabrication ou de stockage d’explosifs sur le terrain de la mine. [Non souligné dans l’original.]
[118]D’après la preuve documentaire au dossier, il semble qu’au mois de mars 2005, quand a été prise la « décision concernant la détermination de la portée » qui figure dans le troisième avis de lancement modifié, les AR s’efforçaient encore d’obtenir des renseignements importants de RCDC. La portée exacte du projet suscitait encore des préoccupations. Dans une lettre datée du 30 mars 2005, que RNCan a adressée au BCEAO dans le contexte de son premier rapport préliminaire, RNCan a souligné que [traduction] « il serait difficile pour nous d’effectuer l’EE avant de connaître les effets potentiels et de savoir si ces derniers peuvent être atténués ou non » (non souligné dans l’original). Les principales questions en suspens que RCDC devait clarifier ou régler comprenaient ce qui suit : [traduction] « spécification des emplacements de rejet prévus à partir du TMF, après la fermeture »; « dilution dans le TMF afin de gérer la qualité de l’eau pour divers métaux »; « la gestion des matières de basse teneur s’il est impossible de les transformer »; « moment des rejets »; « le volume d’argile disponible dans les environs immédiats du projet »; « la complexité géologique et géotechnique du site à ciel ouvert ainsi que le risque d’instabilité des parois sud du puits à ciel ouvert »; « risques du terrain le long des routes d’accès »; « la disponibilité d’importants bancs d’emprunt afin d’obtenir des matières de couverture pour le dépôt de déchets de roche »; « la profondeur de contact du lit de roche » (en ce qui concerne les installations de stockage de résidus); la nature de certaines « modifications au plan de la mine et les effets que cela aura sur les installations de la mine »; et, pour conclure : « nous avons besoin du volume total d’eau qui sera dérivé d’un plan d’eau à un autre et nous devons régler le problème touchant une espèce visée par la LEP, le Crapaud de l’Ouest » (non souligné dans l’original).
[119]Il faut se souvenir que le projet dont les AR avaient déterminé la portée en mars 2005, comprenait le système de dérivation d’eau et que l’Agence, à l’occasion de la réunion du 11 janvier 2005, avait indiqué que l’article 9 [de l’annexe] du Règlement LEA était un seuil qu’il était possible d’excéder. Si tel était le cas, l’EE du projet, même de la manière « définie » par les AR, allait devoir être menée sous la forme d’une étude approfondie, et non d’un examen préliminaire.
[120]Le 1er avril 2005, le MPO a informé l’Agence qu’il lui était impossible de présenter des commentaires importants sur l’ébauche du rapport d’évaluation que le BCEAO avait établie. En outre, il était nécessaire d’obtenir de RCDC de plus amples éclaircissements sur le plan de compensation de l’habitat : [traduction] « À ce jour, le MPO n’a reçu aucune autre information de la part de RCDC qui lui permettrait de lancer avec Environnement Canada le processus prévu par le REMM ». En outre, le MPO a informé l’Agence qu’il n’avait reçu aucune réponse de RCDC à propos de la dérivation des eaux, tandis que « l’Agence a indiqué, à l’occasion de la réunion tenue le 11 janvier 2005 à Smithers, que le point 9 du Règlement sur la liste d’étude approfondie [. . .] constituait un seuil qu’il était possible d’excéder ».
10) L’évaluation provinciale
[121]Comme il a été mentionné à la sous‑section précédente (L’évaluation provinciale), le rapport du BCEAO a été rendu public le 22 juillet 2005, ou vers cette date. On y concluait qu’au vu des informations que RCDC avait fournies, le projet n’était pas susceptible de causer des effets environnementaux négatifs importants, compte tenu de la mise en œuvre des mesures d’atténuation que RCDC s’était engagée à prendre.
[122]Là encore, il est utile de rappeler ici que, dans son rapport, le BCEAO a déclaré de plus dans ses conclusions d’examen [à la page 88] :
[traduction] Les autorités responsables fédérales préparent actuellement un rapport d’examen préalable du projet sous le régime de la LCEE, qui est fondé sur des sections du présent rapport. Les AR fédérales ont déclaré qu’elles s’attendent à conclure que le projet n’est pas susceptible de causer des effets environnementaux négatifs importants, en supposant que les mesures d’atténuation et les programmes de suivi proposés seront mis en œuvre. [Non souligné dans l’original.]
[123]Cela étant dit, il a fallu aux AR plusieurs mois pour terminer l’EE du projet.
11) Les consultations tenues avec les Premières nations
[124]Conformément à l’intention des AR de consulter les Premières nations dans le cadre de l’examen du projet, le 10 janvier 2006 le conseil de la bande de Tahltan et la Première nation d’Iskut ont été expressément invités à présenter des observations, au plus tard le 10 février 2006, sur une ébauche de rapport d’examen préliminaire que les AR avaient convenu de rendre public avant de mettre la dernière main au rapport d’examen préalable. En l’espèce, aucune communication antérieure d’une telle ébauche de rapport n’a été faite sur le site Internet, et les AR n’ont pas sollicité des observations du grand public.
12) Le rapport d’examen préalable
[125]Les AR ont terminé leur EE et ont produit un rapport d’examen préalable le 16 avril 2006, ou vers cette date, en se fondant sur le pouvoir censément conféré par l’article 18 [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 23(F); 2003, ch. 9, art. 9] de la LCEE (le rapport d’examen préalable).
[126]Le rapport d’examen préalable indiquait qu’il était [traduction] « fondé sur des renseignements recueillis dans le cadre du processus d’EE fédéral‑provincial coopératif » (l’article 7 du rapport d’examen préalable). Les AR ont conclu que « en tenant compte de la mise en œuvre des mesures d’atténuation, le projet n’est pas susceptible de causer des effets environnementaux négatifs importants ». La portée du projet, telle que décrite à la page 10 du rapport d’examen préalable, était supérieure à celle qui était décrite dans le troisième avis de lancement modifié, et contenait les trois ajouts suivants :
[traduction]
‑ Le rejet d’une substance nocive (des résidus) dans un dépôt de résidus miniers (DRM);
‑ tous les ouvrages ou entreprises nécessaires à titre de mesures d’atténuation et de compensation pour la détérioration, la destruction ou la perturbation (DDP) de l’habitat du poisson qui sont associées à la construction du DRM et qui peuvent nécessiter une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches;
‑ tous les ouvrages ou entreprises nécessaires à titre de compensation pour le rejet de résidus dans le DRM qui peuvent nécessiter une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches.
[127]En ce qui concerne le sujet des consultations, le rapport d’examen préalable indiquait ce qui suit :
[traduction] Le BCEAO a mené des consultations avec le promoteur, les administrations locales, les Premières nations, les organismes fédéraux et provinciaux et d’autres collectivités intéressées (en mettant l’accent sur Stewart, Iskut, Lake Dease et Telegraph Creek) afin de donner la possibilité de passer en revue le projet proposé et de veiller à ce que ces parties contribuent au processus d’EE. Les AR se sont servies des renseignements recueillis lors de ces consultations pour éclairer la décision consécutive à l’examen préalable. Un sommaire des mesures de consultation prises auprès des Premières nations figure aux sections 3 et 5.4, ainsi qu’aux annexes E et F du rapport du BCEAO. Un sommaire des mesures de consultation des collectivités qui ont été prises par le promoteur et le BCEAO est présenté à la section 3.2 du rapport du BCEAO.
Les AR sont convaincues que cet effort de consultation publique a fourni au public des possibilités suffisantes et satisfaisantes de contribuer au processus d’EE du projet Red Chris. D’après l’ampleur des consultations que le gouvernement de la Colombie‑Britannique et le promoteur ont menées, et les renseignements que les AR ont reçus par la suite, ces dernières sont d’avis que la participation du public à l’examen préalable du projet en vertu du paragraphe 18(3) de la LCEE 18(3) n’est pas appropriée dans les circonstances. [Non souligné dans l’original.]
13) La décision sur la voie à suivre
[128]Le 2 mai 2006, les AR ont pris une décision sur la voie à suivre en se fondant sur le pouvoir censément conféré par l’alinéa 20(1)a) de la LCEE (la décision sur la voie à suivre). Plus particulièrement, les AR ont décidé que le projet, tel qu’elles l’avaient défini, n’était pas susceptible de causer des « effets environnementaux négatifs importants ».
[129]La décision sur la voie à suivre a été portée au registre le 10 mai 2006. À ce moment‑là, le grand public était en mesure de consulter le rapport d’examen préalable.
[130]Selon la décision sur la voie à suivre, RCDC et les entrepreneurs connexes pouvaient présenter une demande de permis à RNCan, en vertu de l’alinéa 7(1)a) de la Loi sur les explosifs. Le MPO pouvait également procéder comme il le fallait, avec une autorisation délivrée en vertu du paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches, pour la DDP de l’habitat du poisson. En outre, le MPO était tenu de prendre en considération le rapport d’examen préalable, relativement au fait de décider s’il fallait recommander au gouverneur en conseil de désigner les eaux d’amont du ruisseau Trail comme un DRM, à l’annexe 2 du REMM, aux termes des alinéas 36(5)a) à e) de la Loi sur les pêches. À la date à laquelle la présente demande de contrôle judiciaire a été entendue, en juin 2007 plus précisément, aucune autorisation ou aucun permis n’avaient encore été délivrés et aucune mesure n’avait encore été prise par le Cabinet.
V—LA PRÉSENTE DEMANDE
[131]La demanderesse a présenté le 9 juin 2006 un avis de demande concernant le présent contrôle judiciaire. Essentiellement, on demande à la Cour de décider si les AR sont légalement tenues, vu que l’EE a été annoncée dans le registre en mai 2004, de mener une étude approfondie et de consulter le public avant de prendre une décision sur la voie à suivre au sujet du projet.
[132]Le point en litige en l’espèce est le droit des AR de prendre la décision sur la voie à suivre, en se fondant sur le pouvoir censément conféré par l’alinéa 20(1)a) de la LCEE. La demanderesse soutient que l’article 20 de la LCEE ne s’applique pas à l’EE du projet. Elle déclare qu’aux termes de l’article 13 de la LCEE, toute décision prise en l’espèce doit l’être en vertu de l’article 37 de la LCEE avant que le projet puisse aller de l’avant et avant que les AR accordent des autorisations ou délivrent des permis sous le régime de la Loi sur les pêches et de la Loi sur les explosifs, respectivement. Enfin, la demanderesse soutient que le gouverneur en conseil devrait modifier l’annexe 2 du REMM.
[133]La demanderesse a abandonné sa demande antérieure concernant une déclaration selon laquelle le projet s’inscrit sous l’article 9 [de l’annexe] du Règlement LEA, car il excède le seuil de dérivation d’eau de 10 millions de m³ par année. Cependant, elle maintient sa demande pour que le projet soit déclaré comme un « projet » pour lequel il est nécessaire de réaliser une étude approfondie car il excède les capacités de production de minerai indiquées aux alinéas 16a) ou 16c) [de l’annexe] du Règlement LEA. Elle sollicite également une ordonnance, sous la forme d’une déclaration, indiquant notamment que les AR étaient légalement tenues, en application du paragraphe 21(1) [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 12_] de la LCEE, de veiller à ce que le public soit consulté sur la portée proposée du projet, sur les éléments que l’on proposait de prendre en compte dans l’évaluation de ce dernier, sur la portée proposée de ces éléments et sur la question de savoir si l’étude approfondie permettait l’examen des questions soulevées par le projet. La demanderesse sollicite de plus une ordonnance déclarant que les AR ont commis une erreur de droit ou agi sans compétence en omettant de s’acquitter de leur obligation légale prévue au paragraphe 21(1) de la LCEE.
[134]De plus, la demanderesse sollicite une ordonnance de certiorari annulant la décision sur la voie à suivre. Elle sollicite également une ordonnance interdisant d’exercer les pouvoirs conférés par l’alinéa 5(1)d) ou le paragraphe 5(2) de la LCEE qui permettraient que le projet soit mis en œuvre en tout ou en partie. Subsidiairement, elle sollicite une ordonnance de mandamus contraignant les AR, le ministre des Pêches et des Océans, le ministre des Ressources naturelles et le gouverneur en conseil, représentés par le procureur général, à s’abstenir d’exercer des attributions quelconques qui permettraient que le projet soit mis en œuvre en tout ou en partie, à moins qu’une décision soit prise en rapport avec le projet, conformément à l’alinéa 37(1)a) de la LCEE, dans le cadre de l’exécution de leur obligation de mener une EE en vertu de l’article 13 de la LCEE.
VI—LA NORME DE CONTRÔLE
[135]La Cour d’appel fédérale a déjà traité de la question de la norme de contrôle dans l’arrêt Bow Valley Naturalists Society c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [2001] 2 C.F. 461 (C.A.) (Bow Valley). Au paragraphe 55 de cet arrêt, le juge Linden a indiqué ce qui suit à cet égard :
L’arrêt qui fait jurisprudence quant à l’interprétation des articles 15 et 16 de la Loi a été prononcé par notre Cour dans l’affaire Friends of the West Country Assn. c. Canada (Ministre des Pêches et Océans) [citation omise]. Dans ses motifs rédigés au nom de la Cour, le juge Rothstein, J.C.A., a conclu que l’interprétation de la Loi, qui est une loi d’application générale, est une question de droit et que la norme de contrôle est celle de la décision correcte [citation omise]. Par conséquent, c’est cette norme de contrôle que la Cour utilisera en l’instance pour les questions se rapportant à l’interprétation de la Loi. Toutefois, dans l’arrêt précité, notre Cour n’a pas tranché la question de la norme de contrôle applicable aux décisions de fond prises dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire accordé par la Loi. Le juge de première instance avait estimé qu’en ce cas la norme de contrôle était celle de la décision raisonnable. Vu les facteurs de l’arrêt Pushpanathan, cette approche serait appropriée en l’instance notamment parce qu’il n’y a pas de clause privative et parce que le degré d’expertise dans l’application de la Loi est minime en l’espèce et chez la plupart des autorités responsables, sinon toutes.
La Cour décide que la norme de contrôle qui s’applique aux questions de compétence et d’applicabilité des dispositions législatives et réglementaires contestées au projet que soulève la demanderesse est la décision correcte. Pour arriver à cette conclusion, la Cour a pris en considération les quatre facteurs contextuels qui sont mentionnés dans l’arrêt Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226 (la présence ou l’absence d’une clause privative ou d’un droit d’appel; l’expertise du tribunal relativement à celle de la cour de révision sur la question en litige; l’objet de la loi et de la disposition particulière; la nature de la question).
[136]La Cour doit décider si, comme l’allègue la demanderesse, le projet tombe sous le coup des alinéas 16a) ou 16c) [de l’annexe] du Règlement LEA et si les AR sont tenues, par l’article 21 de la LCEE, de consulter le public sur la portée du projet et celle de l’évaluation avant de prendre une décision quelconque à propos de la détermination de la portée du projet ou de la voie à suivre à l’égard de ce dernier. Les défendeurs soutiennent au contraire que l’article 21 ne s’applique pas car le projet, tel que « défini » en vertu de l’article 15 par les AR, n’est pas mentionné dans la LEA [liste d’étude approfondie]; par conséquent, les décisions ou les mesures contestées que les AR ont prises étaient permises par l’article 18 de la LCEE.
[137]Comme on peut le voir, la Cour doit interpréter et déterminer la portée des articles 15 et 21 de la LCEE. La nature des questions de droit et des questions mixtes de droit et de fait qui sont en cause en l’espèce est déterminante. Les questions d’interprétation législative qui sont soulevées en l’espèce seront donc tranchées selon la norme de la décision correcte.
VII—QUESTIONS PRÉLIMINAIRES SOULEVÉES PAR LES DÉFENDEURS
[138]Pour les motifs indiqués ci‑après (section VIII—Le bien‑fondé de l’affaire), je conclus que le MPO a déterminé avec raison en mai 2004 que le projet est inclus dans la LEA. Le libellé de l’article 21 de la LCEE, tel que modifié en 2003, faisait en sorte que la consultation publique était obligatoire. Il s’agit là d’une exigence claire et nette, dont les AR ne semblent pas avoir négligé l’importance, elles qui ont procédé par la suite à un nouveau suivi du projet sous l’égide d’une décision sur la portée du projet, évitant ainsi les rigueurs du processus obligatoire de consultation publique. J’ai donc décidé de faire droit à la présente demande de contrôle judiciaire. Cependant, la Cour se doit de traiter des deux questions préliminaires que les défendeurs ont soulevées. Premièrement, le promoteur et le procureur général soutiennent que la demanderesse n’a pas déposé sa demande en temps opportun; deuxièmement, le promoteur conteste la qualité pour agir de la demanderesse en l’espèce.
A. Le délai
[139]La demanderesse a déposé son avis de demande de contrôle judiciaire le 9 juin 2006, soit moins de 30 jours après la date à laquelle la décision sur la voie à suivre a été annoncée dans le registre.
1) Les arguments des parties
[140]Les défendeurs demandent instamment à la Cour de conclure que le présent contrôle judiciaire est prescrit en raison du délai de 30 jours fixé pour déposer un avis de demande de contrôle judiciaire, lequel délai débute à partir du moment où la décision ou l’ordonnance faisant l’objet du contrôle a été communiquée pour la première fois à la demanderesse : paragraphe 18.1(2) [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5; 2002, ch. 8, art. 27] de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F‑7 [art. 1 (mod., idem, art. 14)] (la LCF). Ce même paragraphe de la LCF dispose en outre que ce délai peut être prolongé, soit avant soit après l’expiration des 30 jours.
[141]Les défendeurs sont d’avis que le délai de prescription de 30 jours a commencé lorsque la « décision concernant la détermination de la portée du projet », mentionnée dans le troisième avis de lancement modifié, a été communiquée au public le 24 mars 2005 (la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée). Les défendeurs font valoir que les décisions de cette nature que l’on prend sous le régime de la LCEE constituent des décisions susceptibles de contrôle judiciaire et que la demanderesse ne devrait pas avoir le droit d’attaquer de façon indirecte la légalité de la décision concernant la détermination de la portée du projet.
[142]La demanderesse soutient au contraire que la demande a été déposée à temps. Elle est d’avis que le délai de prescription de 30 jours a débuté le 10 mai 2006, soit la date à laquelle l’avis du rapport d’examen préalable a été communiqué au public. Elle ajoute que les évaluations environnementales que l’on mène en vertu de la LCEE sont, de par leur nature, des processus continus. Mme Kuyek déclare dans son affidavit que, pendant toute l’année 2005, elle a fait état des préoccupations de la demanderesse auprès de divers délégués ou employés du Ministry of Environment [de la C.-B.], du MPO et de l’Agence. En outre, la demanderesse dit que jusqu’au 10 mai 2006, Mme Kuyek a continué de croire que les AR faciliteraient la participation du public.
[143]Subsidiairement, advenant que la Cour décide que le délai de prescription a débuté quand la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée a été communiquée, la demanderesse, comme elle le décrit dans sa réponse écrite, a demandé l’autorisation d’obtenir une prorogation du délai de dépôt.
2) La décision de la Cour
[144]La demanderesse n’est pas irrecevable à présenter sa demande, qui a été déposée moins de 30 jours après la communication de la décision sur la voie à suivre. Par ailleurs, je signale que la demanderesse ne conteste ni la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée, ni la décision finale concernant la décision de la portée du projet qui est contenue dans le rapport d’examen préalable; elle allègue plutôt qu’il y a eu manquement continu à l’obligation de veiller à ce que les AR effectuent une étude approfondie comme le veut l’article 21 de la LCEE, lequel manquement s’est soldé par la prise de la décision sur la voie à suivre sur la base des conclusions contenues dans le rapport d’examen préalable.
[145]Comme en témoigne la preuve dont je suis saisi, l’EE du projet a été un processus complexe et évolutif. Un grand nombre de mesures interdépendantes et de décisions interlocutoires ont été prises par les diverses autorités fédérales et provinciales avant que les ministres provinciaux délivrent un certificat d’évaluation le 24 août 2005 et que les AR prennent la décision sur la voie à suivre le 2 mai 2006. Les faits de l’espèce montrent que, depuis 2003, les AR ont modifié un certain nombre de fois la portée du projet pendant toute la durée de l’EE. Cela est normal dans les circonstances, vu qu’un grand nombre de variables et de scénarios doivent être traités par le promoteur et examinés par les autorités fédérales et provinciales en vertu de diverses dispositions législatives et réglementaires.
[146]La personne qui a souscrit un affidavit pour le compte de la Couronne participait directement au projet quand la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée a été prise. Cette personne reconnaît que le projet, tel que défini, englobait uniquement la construction, l’exploitation, la modification et la désaffectation de quatre ouvrages, soit : le DRM, le système de dérivation des eaux dans les eaux d’amont des ruisseaux Trail et Northeast Arm, les installations auxiliaires étayant les éléments susmentionnés, de même que l’installation de fabrication et de stockage d’explosifs. Dans cette mesure, jusqu’au 8 février 2007, date du contre‑interrogatoire sur son affidavit, l’auteur de l’affidavit n’était manifestement pas au courant que l’on avait ajouté trois éléments au projet à la suite de la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée. Répondant à des questions des avocats de la demanderesse, l’auteur a déclaré qu’il n’était pas en mesure d’expliquer de quelle façon les changements étaient survenus. Il a reconnu de plus ignorer si le public avait été avisé a de cet ajout à la portée du projet.
[147]Cela étant dit, quand la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée du projet a été annoncée, les organismes fédéraux attendaient toujours que RCDC leur communique ses calculs et les données pertinentes à propos de la quantité d’eau à dériver du ruisseau Trail dans le bassin hydrographique du ruisseau Quarry. Étant donné que le projet, tel que « défini » par les AR en mars 2005, englobait le système de dérivation des eaux d’amont des ruisseaux Trail, Quarry et Northeast Arm, la quantité précise d’eau à dériver était un élément clé de l’EE menée par les AR. En fait, l’expansion résultante de la structure des eaux, aussi bien pendant la durée de la mine qu’après sa fermeture, déterminerait le niveau d’évaluation qu’effectueraient les AR (examen préalable ou étude approfondie), étant donné qu’il est nécessaire de procéder à une étude approfondie dans le cas des activités proposées de construction, de désaffectation ou de fermeture d’une structure destinée à dériver 10 millions de m³ ou plus d’eau d’un plan d’eau naturel dans un autre, ou d’un projet d’agrandissement d’une telle structure qui entraînerait une augmentation de la capacité de dérivation de plus de 35 pour cent (article 9 de la partie III [de l’annexe]—Projets hydrauliques du Règlement LEA).
[148]Il est de jurisprudence constante que, pour être susceptible d’un contrôle judiciaire, une « décision » doit être une décision définitive, et non une décision interlocutoire ou procédurale. Cela s’explique par le fait que les demandes de contrôle judiciaire concernant une décision interlocutoire peuvent en fin de compte être parfaitement inutiles : la partie plaignante peut avoir eu gain de cause au bout du compte, ce qui fait que les demandes de contrôle judiciaire ne sont d’aucune valeur. En outre, les délais et les frais inutiles que l’on associe à de telles demandes peuvent avoir pour effet de discréditer l’administration de la justice.
[149]Dans l’arrêt Szczecka c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 934 (C.A.) (QL), le juge Létourneau a déclaré ce qui suit, pour la Cour d’appel fédérale [au paragraphe 4] :
[. . .] il ne doit pas, sauf circonstances spéciales, y avoir d’appel ou de révision judiciaire immédiate d’un jugement interlocutoire. De même, il ne doit pas y avoir ouverture au contrôle judiciaire, particulièrement un contrôle immédiat, lorsqu’il existe, au terme des procédures, un autre recours approprié. Plusieurs décisions de justice sanctionnent ces deux principes, précisément pour éviter une fragmentation des procédures ainsi que les retards et les frais inutiles qui en résultent, qui portent atteinte à une administration efficace de la justice et qui finissent par la discréditer.
[150]Dans la décision Groupe G. Tremblay Syndics Inc. c. Canada (Surintendant des faillites), [1997] 2 C.F. 719 (1re inst.), la juge Tremblay‑Lamer, dans le contexte d’une instance fondée sur l’article 18.1, a déclaré ce qui suit [au paragraphe 24] : « Les décisions à l’égard desquelles il y a ouverture à contrôle judiciaire sont celles qui adjugent sur le mérite d’une cause de façon définitive. »
[151]Bien qu’elle se soit prononcée dans le contexte d’une instance criminelle, je crois que les propos de la juge McLachlin [à la page 641] dans l’arrêt R. c. Seaboyer; R. c. Gayme, [1991] 2 R.C.S. 577 sont pertinents en l’espèce :
[. . .] je partage l’opinion qu’il faut décourager les appels de décisions rendues à l’enquête préliminaire. Bien que la loi doive au besoin offrir une réparation, cette réparation devrait en général être accordée dans le contexte de la procédure habituelle, savoir le procès. Cette restriction évitera qu’il y ait une pléthore d’appels interlocutoires avec les retards qu’ils entraînent nécessairement. Les tribunaux chargés de l’examen pourront ainsi avoir un meilleur aperçu de la question, en ce qu’ils disposeront d’un tableau plus complet de la preuve et de l’affaire.
[152]Tant la demanderesse que le promoteur conviennent qu’après que la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée a été rendue publique, les AR ont modifié la portée de leur décision concernant le projet, ajoutant trois autres éléments de projet aux quatre déjà mentionnés. Même si les avocats du promoteur ont fait valoir à l’audience que les trois éléments ajoutés au rapport d’examen préalable après le mois de 2005 n’étaient que des « améliorations » apportées à la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée, cela démontre néanmoins que la portée réelle a été changée. On ne peut donc dire que la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée était « définitive ».
[153]Les faits de la présente espèce se distinguent aussi de ceux dont il est question dans la décision Citizens’ Mining Council of Newfoundland and Labrador c. Canada (Ministre de l’Environnement), [1999] A.C.F. no 273 (1re inst.) (QL) (Citizens’ Mining), dans laquelle le juge MacKay avait à décider si une décision rendue en vertu de l’article 15 de la LCEE était une décision définitive et donc susceptible de contrôle judiciaire. Au vu de la preuve dont il était saisi, le juge MacKay a tiré la conclusion suivante [au paragraphe 49] :
Avec égards, je ne suis pas convaincu que le contrôle judiciaire soit prématuré lorsqu’une décision est prise par l’autorité responsable au sujet de la portée du projet devant faire l’objet d’une évaluation que l’autorité en question approuvera ou refusera d’approuver. Cette décision n’est pas simplement une recommandation; elle satisfait plutôt à une exigence législative et constitue le fondement du processus d’évaluation à compter de ce moment‑là de sorte qu’il s’agit à mon avis d’une décision susceptible de contrôle judiciaire.
[154]Dans l’affaire Citizens’ Mining, la demande avait été déposée environ huit mois après que l’on eut mis au point le mandat limitant la compétence de la commission d’évaluation au projet et environ sept mois après que l’on eut dit à l’un des dirigeants du demandeur que le mandat en question ne serait pas réexaminé (voir la décision Citizens’ Mining, précitée, au paragraphe 41). Ces circonstances extraordinaires justifiaient que l’on s’écarte de la règle habituelle selon laquelle les décisions interlocutoires ne sont pas susceptibles de contrôle judiciaire.
[155]Dans la présente demande de contrôle judiciaire, cependant, de telles circonstances extraor-dinaires n’existent pas. La demanderesse n’a pas été informée que la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée était définitive. Même s’il ressort de la preuve que cette décision a été communiquée à la demanderesse, pour les raisons que Mme Kuyek a invoquées dans son affidavit, il n’était pas déraisonnable pour la demanderesse de croire que la décision en question serait modifiée et que les AR rectifieraient ce qu’elles croyaient être un processus illégal en rétablissant le processus que prescrit l’article 21 de la LCEE. À cet égard, les deux parties reconnaissent que la demanderesse a correspondu avec les représentants de l’Agence et du MPO après que la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée a été rendue, afin de contester le manque de consultation publique. En fait, les AR n’ont pris une décision définitive qu’après avoir conclu, dans le rapport d’examen préalable, que la participation du public à l’examen préalable du projet, conformément au paragraphe 18(3), n’était pas appropriée dans les circonstances, et après avoir décidé que le projet, tel qu’elles l’avaient « défini » dans le rapport d’examen préalable, n’était pas susceptible d’entraîner des « effets environnementaux négatifs im-portants », comme l’indiquait la décision sur la voie à suivre qui a été portée au registre le 10 mai 2006.
[156]Dans l’arrêt Alberta Wilderness Assn. c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [1999] 1 C.F. 483 (C.A.), l’Alberta Wilderness Association, la Fédération canadienne de la nature, la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada, la Jasper Environmental Association et le Pembina Institute for Appropriate Development (collectivement, les appelants) sollicitaient une ordonnance interdisant au ministre des Pêches et des Océans d’accorder des autorisations en vertu de la Loi sur les pêches au motif que l’EE que la commission d’examen conjoint avait menée ne satisfaisait pas aux exigences prescrites dans la LCEE. Dans cette affaire, le rapport que la commission avait établi consistait en une EE d’une proposition de Cardinal River Coals Ltd. concernant la construction et l’exploitation d’une mine de charbon à ciel ouvert de 20 km, située à trois kilomètres à l’est du parc national Jasper en Alberta.
[157]Le juge des requêtes avait rejeté la demande pour le motif préliminaire que la réponse fédérale que le ministre des Pêches et des Océans avait rendue n’avait pas été contestée auparavant par les appelants et qu’elle servait donc d’obstacle à la demande de ces derniers [[1998] A.C.F. no 821 (1re inst.) (QL)]. Par conséquent, le bien‑fondé des arguments des appellants n’a pas été examiné. La Cour d’appel fédérale a infirmé la décision du juge des requêtes et renvoyé l’affaire à la Cour afin qu’une décision soit rendue sur le fond.
[158]Dans l’arrêt Alberta Wilderness Assn., le juge Sexton a fait remarquer ce qui suit, aux paragraphes 15 à 18 :
Dans une requête préliminaire [. . .] qui a été présentée avant le présent appel, les intimés ont sollicité la radiation de la demande initiale des appelants pour le motif qu’elle était prescrite. Le juge Hugessen, au paragraphe 4, pages 240 à 242, a fait les remarques suivantes :
J’estime plutôt que le rapport devrait être considéré comme une étape préliminaire essentielle, prévue par la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, qui précède la décision du ministre de donner son autorisation en vertu de l’article 35 de la Loi sur les pêches.
Or, cette décision n’a pas encore été prise et j’estime que le fait de considérer que l’avis de requête introductive d’instance des requérants vise principalement à empêcher le ministre de rendre cette décision au motif que le rapport de la commission est irrémédiablement vicié constitue une interprétation raisonnable de celui‑ci.
L’interdiction (telle le mandamus et le quo warranto) est une réparation expressément visée par l’article 18 de la Loi sur la Cour fédérale et, à l’instar de ceux‑ci, son exercice ne dépend pas de l’existence préalable d’une décision ni d’une ordonnance.
Je souscris à l’avis exprimé dans ce passage, qui a été adopté par le juge Gibson dans l’affaire Friends of the West Country Assn. c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [1998] 4 C.F. 340 (1re inst.), à la page 352, note 7.
Je souscris aux décisions qui ont été rendues dans les affaires Bowen c. Canada (Procureur général), [1998] 2 C.F. 395 (1re inst.); Friends of the West Country, supra; et Union of Nova Scotia Indians c. Canada (Procureur général), [1997] 1 C.F. 325 (1re inst.), où il a été statué qu’une évaluation environnementale doit avoir été effectuée conformément à la LCEE avant qu’une décision comme l’autorisation du ministre en l’espèce puisse être prise. Cette thèse est renforcée par la décision rendue dans l’affaire Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3, qui confirmait que les lignes directrices qui ont précédé la LCEE (le Décret sur les lignes directrices visant le processus d’évaluation et d’examen en matière d’environnement, DORS/84‑467) étaient de nature impérative plutôt que directive et que l’omission de les observer aurait donc pour effet d’enlever à l’autorité responsable la compétence voulue pour agir.
Les exigences de la LCEE sont des directives légiférées qui exigent expressément qu’une évaluation environnementale soit effectuée avant que le ministre prenne une décision. Il est clair que le ministre n’a pas compétence pour délivrer des autorisations en l’absence d’une évaluation environnementale. Il est également clair que toute évaluation doit être effectuée conformément à la LCEE, y compris par exemple, l’exigence imposée à l’article 16 de la LCEE. Le fait qu’une réponse fédérale a été donnée et n’a pas été contestée ne change rien à ces exigences. Les appelants ont donc le droit de débattre le bien‑fondé de leur cause. [Non souligné dans l’original.]
[159]La présente demande de contrôle judiciaire concernant la décision sur la voie à suivre n’est donc pas prescrite car elle a été signifiée et déposée dans les 30 jours suivant la communication de la décision en question. Comme j’ai conclu que la présente demande a été déposée en temps opportun, il est inutile d’examiner s’il convient d’accorder à la demanderesse l’autorisation de proroger le délai prévu pour présenter sa demande.
B. La qualité pour agir
1) Les arguments du promoteur
[160]S’agissant de la qualité pour agir, le promoteur soutient que la demanderesse n’a pas soulevé une question sérieuse, qu’elle ne possède pas un intérêt véritable dans l’objet de la demande et qu’il y a d’autres parties directement touchées qui ont décidé de ne pas présenter une demande de contrôle judiciaire.
[161]Le promoteur soutient à cet égard que la demanderesse n’a pas contesté le fond de la décision sur la voie à suivre et que les questions qu’elle a soulevées ont déjà été tranchées par la présente Cour ainsi que par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire TrueNorth, précitée. Le promoteur signale que la demanderesse est un groupe d’intervention dont le siège est situé à Ottawa et qu’elle ne représente aucun groupe de citoyens ou groupes d’intérêt locaux directement touchés par le projet. Les groupes des Premières nations qui sont directement touchés par le projet n’ont pas présenté une demande de contrôle judiciaire. En outre, le promoteur souligne que la demanderesse a décidé de ne pas prendre part au processus coopératif d’évaluation environnementale. En fait, elle n’a fait aucune observation à propos du bien‑fondé du projet au BCEAO, aux AR ou à RCDC.
2) Le critère à trois volets
[162]Il ressort de la jurisprudence de la Cour suprême du Canada que l’on accorde la qualité pour agir à un groupe d’intérêt public qui souhaite contester l’exercice d’un pouvoir administratif, ainsi que des dispositions législatives, lorsque l’on satisfait au critère à trois volets qui suit : une question sérieuse est soulevée, la partie demanderesse fait preuve d’un intérêt véritable et il n’y a pas d’autre manière raisonnable et efficace de soumettre la question à la cour (Thorson c. Procureur général du Canada et autres, [1975] 1 R.C.S. 138; Ministre de la Justice du Canada et autre c. Borowski, [1981] 2 R.C.S. 575, à la page 598; Conseil canadien des Églises c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 R.C.S. 236, aux pages 252 et suivantes).
[163]En appliquant ce critère à trois volets, la présente Cour a systématiquement rejeté la thèse selon laquelle il convient de donner un sens restreint aux mots « directement touché » que l’on trouve au paragraphe 18.1(1) de la LCF. En fait, il a été décidé dans le passé qu’une partie demanderesse qui satisfait aux exigences de la qualité pour agir dans l’intérêt public, reconnue de façon discrétionnaire, peut demander réparation en vertu du paragraphe 18.1(1) de la LCF même si elle n’est pas « directement touchée », si la Cour est par ailleurs convaincue que les circonstances particulières de l’affaire et le type d’intérêt que possède la partie demanderesse justifient l’octroi de ce statut (voir Friends of the Island Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics), [1993] 2 C.F. 229 (1re inst.), aux pages 280 à 283; Sunshine Village Corp. c. Directeur du Parc national de Banff, [1996] A.C.F. no 1118 (C.A.) (QL), aux paragraphes 65 à 72; Citizens’ Mining, précité, aux paragraphes 30 à 33; Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), [1999] 2 C.F. 211 (1re inst.), aux paragraphes 27 à 34).
3) L’exercice du pouvoir discrétionnaire de la Cour d’accorder la qualité pour agir
[164]Je souscris aux arguments présentés par écrit et de vive voix à l’audience pour le compte de la demanderesse. Dans le cadre de l’exercice de mon pouvoir discrétionnaire, j’ai pris en considération les trois facteurs du critère à trois volets, de même que l’objet de la LCEE et les circonstances particulières de l’espèce.
[165]La LCEE a pour objet fondamental de veiller à ce que les projets qui nécessitent la tenue d’une EE soient étudiés avec soin et prudence avant que les autorités fédérales prennent des mesures à leur égard, afin que ces projets n’entraînent pas d’« effets environnementaux négatifs importants » (alinéa 4(1)a) [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 2] de la LCEE). Un autre objet sous‑jacent est « de veiller à ce que le public ait la possibilité de participer de façon significative et en temps opportun au processus de l’évaluation environnementale » (alinéa 4(1)d) [mod., idem] de la LCEE) (non souligné dans l’original). Par conséquent, il convient d’interpréter et d’appliquer les dispositions opérationnelles que comportent la LCEE et ses règlements d’une manière qui cadre avec ces objets.
[166]Pour faciliter l’accès du public aux dossiers relatifs aux évaluations environnementales et donner avis en temps opportun de la tenue de ces dernières, on a créé le registre canadien d’évaluation environnementale (le registre), lequel se compose d’un site Internet et de dossiers portant sur divers projets (paragraphe 55(1) [mod., idem, art. 25] de la LCEE). Dans les 14 jours qui suivent le début d’une EE menée sous le régime de la LCEE, un avis de son lancement doit être versé au site Internet de l’Agence (alinéa 55.1(2)a) [édicté, idem] de la LCEE). Cet avis doit inclure une description de la portée, déterminée en vertu de l’article 15 de la LCEE, du projet à l’égard duquel l’EE doit être effectuée (voir l’alinéa 55.1(2)c) [édicté, idem] de la LCEE). À la section précédente (voir IV—Le contexte factuel, et surtout la section B.—L’évaluation fédérale), j’ai examiné les mesures que les AR ou l’Agence ont prises pour informer le grand public.
[167]En plus de l’obligation de notifier le public ou de faire part des possibilités de participation du public qui découlent des dispositions de la LCEE, la Couronne (mais non les entreprises privées ou les particuliers) est tenue de consulter les Premières nations lorsqu’il est possible qu’un projet ait une incidence sur des droits ancestraux (voir Première nation Tlingit de Taku River c. Colombie‑Britannique (Directeur d’évaluation de projet), [2004] 3 R.C.S. 550; Nation haïda c. Colombie‑Britannique (Ministre des Forêts), [2004] 3 R.C.S. 511). En fait, dans l’arrêt Première nation Tlingit de Taku River, précité, la Cour suprême du Canada a décrété que le processus dans lequel la province de la Colombie‑Britannique s’était engagée à l’égard de l’EE d’un projet envisagé au sein du territoire traditionnel de la Première nation Tlingit de Taku River satisfaisait aux exigences de son obligation de consultation et d’accommodement. Cependant, il n’est pas nécessaire en l’espèce de déterminer si l’obligation particulière de consulter les membres des nations de Tahltan et d’Iskut et de prendre des mesures d’accommodement à leur égard a été satisfaite par les autorités provinciales et fédérales participant à l’EE du projet.
[168]La demanderesse soulève une question sérieuse à propos de la légalité de la décision sur la voie à suivre, laquelle est une décision définitive pour les besoins du présent contrôle judiciaire. En l’espèce, la demanderesse fait valoir que la décision contestée s’écarte de l’obligation positive de consulter le public. À cet effet, la question de la participation du public est importante, non seulement en l’espèce, mais aussi pour les projets ultérieurs qui seront menés dans tout le Canada. Comme il a été mentionné, les études approfondies obligent à tenir une consultation publique.
[169]L’article 21 de la LCEE, qui, d’après la demanderesse, s’applique en l’espèce, a été considérablement modifié en 2003. La version améliorée de cette disposition actuellement en vigueur a été introduite par l’article 12 de la Loi modifiant la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, L.C. 2003, ch. 9 (les modifications apportées par le projet de loi C‑9). L’ancien texte de l’article 21 [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 26(F)] de la LCEE est également reproduit à la fin des présents motifs d’ordonnance (voir l’annexe « A »). Les modifications apportées par le projet de loi C‑9 sont entrées en vigueur le 30 octobre 2003, et elles s’appliquent au projet dont il est question en l’espèce.
[170]Les décisions TrueNorth, que les défendeurs ont invoquées à l’appui de la légalité des mesures ou des décisions contestées, sont fondées sur la version de la loi qui était en vigueur avant les modifications apportées par le projet de loi C‑9.
[171]L’article 21 de la LCEE fait maintenant en sorte qu’une consultation publique est obligatoire lorsque l’on procède à une EE par la voie d’une étude approfondie. Plus précisément, la nouvelle disposition prescrit que « [d]ans le cas où le projet est visé dans la liste d’étude approfondie, l’autorité responsable veille à la tenue d’une consultation publique sur les propositions relatives à la portée du projet en matière d’évaluation environnementale, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation et à la portée de ces éléments ainsi que sur la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet » (non souligné dans l’original).
[172]Par ailleurs, le nouvel article 21 de la LCEE dispose que lorsque l’on procède à une EE par la voie d’une étude approfondie, l’AR doit aussi faire rapport au ministre de l’Environnement, après avoir tenu la consultation publique, de la portée du projet, des éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation, de la portée de ceux‑ci, des préoccupations du public, de la possibilité d’effets environnementaux négatifs et de la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet. L’AR doit aussi recommander au ministre de l’Environnement de poursuivre l’EE par la voie d’une étude approfondie ou de la renvoyer à un médiateur ou à une commission (paragraphe 21(2) de la LCEE). Là encore, de telles exigences ne s’appliquent pas lorsque l’AR procède à un examen préalable.
[173]L’obligation de consulter le public au début du processus à propos des principaux aspects de l’évaluation environnementale constitue donc un aspect fondamental qu’ont introduit les modifications apportées par le projet de loi C‑9. Un autre aspect est le financement des participants. L’ancien paragraphe 58(1.1) [édicté par L.C. 1994, ch. 46, art. 4] obligeait le ministre à établir un programme de financement pour les participants afin de faciliter la participation du public aux médiations et à l’évaluation qu’effectuait une commission. Les modifications apportées par le projet de loi C‑9 [L.C. 2003, ch. 9, art. 28] donnent plus d’expansion à ce programme en étendant le financement des participants aux études approfondies, et elles clarifient également que le programme de financement s’applique aussi aux évaluations conjointes qu’effectue une commission. C’est l’Agence qui administre ce programme.
[174]L’avis de lancement publié au registre le 23 mai 2004 annonçait que le MPO procéderait à une étude approfondie à compter du 19 mai 2004. La demanderesse peut faire valoir avec sérieux que cela créait une attente légitime, à savoir que, conformément à l’article 21 de la LCEE, le grand public serait consulté. En outre, à l’époque où les AR ont changé de « voie » et décidé de recourir à un examen préalable, il ressort des documents au dossier que le processus de consultation publique mené dans le cadre de l’EE provinciale était fort avancé. En fait, ce processus a pris fin avant que l’on annonce dans le registre la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée.
[175]En fin de compte, il n’y a pas eu de consultation publique sur le rapport d’examen préalable établi en 2006, en vertu du pouvoir censément conféré par l’article 18 de la LCEE. Cela contraste nettement avec la preuve au dossier selon laquelle les AR ont consulté le public sur l’étude approfondie préparée dans le cas de la mine d’or‑argent‑cuivre de Galore Creek, laquelle est située dans la même région que la propriété de Red Chris.
[176]Selon des preuves documentaires pertinentes que la demanderesse a produites (l’affidavit de Mme Kuyek), preuves que je considère comme recevables et que j’accepte de prendre en compte en l’espèce, le 25 janvier 2005, le MPO, RNCan et TC ont décidé de procéder à une étude approfondie, à compter du 11 janvier 2005, sur la mine d’or‑argent‑cuivre de Galore Creek en Colombie‑Britannique et le grand public, dont la demanderesse faisait partie, a eu l’occasion d’être consulté par les AR sur la portée du projet et les éléments à prendre en considération, même si une EE coopérative conjointe était également en cours.
[177]C’est donc dire que des AR s’occupent actuellement de déterminer la portée d’autres mines avec des résultats différents. Cela crée une certaine incertitude quant à la bonne façon d’interpréter et d’appliquer l’article 21 de la LCEE, qui est de nature impérative.
[178]Je m’en remets au raisonnement du juge Cory dans l’arrêt Conseil canadien des Églises, aux pages 253 et 254, où il a été décidé que la question de la qualité pour agir et celle de savoir s’il existe une cause d’action raisonnable sont étroitement liées et, en fait, ont tendance à se combiner. En l’espèce, le respect de la LCEE soulève une question de droit sérieuse et réglable par voie judiciaire.
[179]La demanderesse fait également montre d’un intérêt véritable à l’égard des questions soulevées dans la présente demande de contrôle judiciaire. Pour obtenir la qualité pour agir dans l’intérêt public, il faut plus qu’un simple intérêt légitime à l’égard de questions sociales et environnementales. Dans la décision Citizens’ Mining, précité, au paragraphe 30, la Cour a conclu qu’un demandeur qui désire faire reconnaître sa qualité pour agir dans l’intérêt du public « doit avoir une réputation établie et il doit effectuer énormément de travail dans le domaine en cause, et son intérêt doit être plus grand que celui d’un membre du grand public ».
[180]Au vu de la preuve qui m’a été soumise, Mines Alerte Canada satisfait clairement à cette exigence. Il s’agit d’une société à but non lucratif de droit fédéral, qui agit à titre de coalition d’organismes de promotion de l’environnement, de la justice sociale, des Autochtones et du travail dans le Canada tout entier. En se concentrant sur les aspects fédéraux du secteur de l’exploitation minière, la demanderesse jouit de la meilleure réputation qui soit et fait montre d’un intérêt réel et constant à l’égard des problèmes associés à l’exploitation minière. En fait, Mines Alerte Canada a présenté des mémoires devant le Comité de la Chambre sur le projet de loi C‑19 [Loi modifiant la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, 1re sess., 37e lég., 2001], qui a précédé les modifications apportées en 2003 à la LCEE, et elle a publié des études critiquant des plans d’atténuation infructueux en rapport avec des activités d’exploitation minière.
[181]Le fait que la demanderesse n’ait pas participé au processus provincial d’évaluation environnementale n’est pas un obstacle à l’octroi de la qualité pour agir dans le présent contrôle judiciaire, car le processus provincial n’aurait pas été le cadre approprié pour faire part de ses préoccupations quant à la conduite des AR, qui sont toutes des ministères fédéraux. En outre, cette Cour a décrété que le fait de ne pas participer à une évaluation n’empêche pas une partie intéressée de faire reconnaître sa qualité pour agir : Sierra Club, précité, au paragraphe 68. Enfin, je suis également d’avis qu’étant donné le fait que Mme Kuyek a fait part des préoccupations de la demanderesse auprès de divers délégués ou employés du Ministry of Environment, du MPO et de l’Agence pendant toute l’année 2005 dénote une participation au projet qui empêche de radier la demande pour absence de qualité pour agir.
[182]Même si la demanderesse soulève une question sérieuse et a un intérêt véritable à l’égard de l’objet de la présente demande, il est encore possible de refuser la qualité pour agir dans l’intérêt du public s’il y a d’autres personnes plus directement touchées qu’elle qui sont raisonnablement susceptibles d’engager des procédures pour contester la mesure administrative en question. Cette dernière exigence s’explique par le fait que ceux qui sont le plus directement touchés par une mesure administrative sont souvent les mieux placés pour présenter au tribunal les renseignements qui permettront de régler le litige de manière appropriée.
[183]Il est évident que les membres du grand public ainsi que les groupes autochtones ou les Autochtones qui vivent à proximité du projet peuvent avoir un intérêt dans le présent contrôle judiciaire. Cependant, vu les complexités et l’interdépendance de la société moderne (ce que la Cour suprême du Canada analyse dans l’arrêt Conseil canadien des Églises, précité, à la page 249), je ne suis pas convaincu que la proximité géographique doit être le facteur déterminant lorsqu’il est question d’évaluer la qualité pour agir dans l’intérêt du public.
[184]En fait, je fais mien le raisonnement du juge MacKay [au paragraphe 35] dans l’arrêt Citizens’ Mining, à savoir qu’il convient d’accorder la qualité pour agir dans l’intérêt public « si le demandeur a un véritable intérêt et si rien ne montre qu’une autre personne ou que d’autres personnes ayant un véritable intérêt engageront probablement des procédures ». Je ne suis pas d’accord pour dire que, juste parce que d’autres pourraient avoir les mêmes préoccupations que la demanderesse, mais n’ont pas intenté une action en justice, il faudrait refuser à la demanderesse la qualité pour agir. En l’espèce, aucune preuve n’indique que d’autres pourraient soulever la question importante dont la demanderesse fait état au sujet de la portée de l’article 21 de la LCEE, tel que modifié par le projet de loi C‑9, et de l’application de cet article en rapport avec le projet.
[185]En résumé, Mines Alerte Canada représente une coalition d’une vingtaine de groupes qui expriment une préoccupation commune et tentent de contester une décision qui, par ailleurs, ne pourrait essentiellement pas faire l’objet d’un contrôle. Selon moi, la demanderesse est la seule partie à montrer qu’elle a un intérêt suffisant ou les moyens de lancer le présent contrôle judiciaire.
[186]Par conséquent, la qualité pour agir est accordée à la demanderesse selon le principe de l’intérêt public.
VIII—LE BIEN‑FONDÉ DE L’AFFAIRE
[187]Essentiellement, la Cour est confrontée au problème de « l’œuf ou la poule ». Une fois qu’une EE a été « déclenchée » en vertu de l’article 5 de la LCEE, une AR a‑t‑elle compétence pour redéfinir la portée d’un projet inscrit dans la LEA d’une manière qui empêchera cette AR de procéder à une étude approfondie?
A. Les arguments des parties
[188]Par l’entremise de leurs avocats, les parties ont présenté de nombreux arguments par écrit et à l’audience au sujet du bien‑fondé de l’affaire. Bien que les paragraphes qui suivent ne reflètent pas nécessairement certains arguments particuliers, j’ai pris en considération tous les arguments de ce genre avant de rendre l’ordonnance qui suit les présents motifs. Il est possible de résumer comme ceci les principaux arguments des parties.
1) La demanderesse
[189]La demanderesse soutient que le processus d’une évaluation doit être conforme aux règles énoncées aux articles 18 et 21 de la LCEE et que la portée du projet, au sens de l’article 15, n’est déterminée qu’après le choix de la voie d’évaluation appropriée. À l’appui de ses prétentions, la demanderesse souligne que l’ancienne version de l’article 21 ne rendait pas obligatoire la consultation publique, mais que la version actuellement en vigueur dispose que « [d]ans le cas où le projet est visé dans la liste d’étude approfondie, l’autorité responsable veille à la tenue d’une consultation publique sur les propositions relatives à la portée du projet en matière d’évaluation environnementale » (non souligné dans l’original). D’après la demanderesse, cela signifie que le choix du processus doit se faire avant la détermination de la portée du projet, pour les besoins de l’EE. Elle signale que la définition du mot « projet », au paragraphe 2(1) de la LCEE, en fait un terme général qui ne fait pas de distinction entre les projets fédéraux et provinciaux et qu’il ne peut s’agir du « projet tel que défini ». Par conséquent, en l’espèce, en déterminant le « processus » à suivre, les AR auraient dû examiner le projet décrit dans la proposition soumise au BCEAO.
[190]En outre, d’après la demanderesse, les mots « dans le cas où le projet est visé dans la liste d’étude approfondie » créent une condition préalable à l’application de l’article 21. Dans ce contexte, lorsque le « projet » proposé figure dans la LEA, il faut que l’EE soit menée par la voie d’une étude approfondie. En l’espèce, étant donné que la description du projet soumise au BCEAO contenait des seuils de production minière qui excédaient ceux que prescrivent les alinéas 16a) et c) [de l’annexe] du Règlement LEA, le projet est « visé dans la liste d’étude approfondie », et il aurait fallu que l’EE soit menée par la voie d’une étude approfondie. Par ailleurs, l’emploi des mots « proposition relative à la portée du projet », qui ont été ajoutés à l’article 21 par les modifications apportées par le projet de loi C‑9, fait clairement ressortir que la consultation publique doit avoir lieu avant que l’on se prononce réellement sur la détermination de la portée. En fait interpréter l’article 21 d’une autre façon reviendrait à permettre aux AR de contourner l’obligation de tenir une consultation publique en restreignant la portée d’un projet de façon à exclure les éléments décrits dans la LEA.
[191]La demanderesse soutient de plus que la LCEE ne confère pas aux AR le pouvoir de transformer des études approfondies en examens préalables. Elle signale que l’article 21.1 de la LCEE, ajouté en 2003 [L.C. 2003, ch. 9, art. 12], autorise explicitement le ministre de l’Environnement à décider de renvoyer le projet à l’autorité responsable pour que celle‑ci poursuive l’étude approfondie, ou alors de renvoyer le projet à la médiation ou à l’examen par une commission. Il n’existe aucune disposition de ce genre pour ce qui est des AR. La demanderesse signale par ailleurs que la LCEE ne confère à personne le pouvoir de déclasser une étude approfondie en la transformant en examen préalable.
[192]À l’audience, les avocats de la demanderesse ont précisé que cette dernière ne soutient pas que la portée d’un projet doit toujours être définie de manière à englober la totalité de ses éléments. Il faut plutôt que les décisions de ce genre soient prises au cas par cas. Les avocats ont fait valoir de plus que si le ministre de l’Environnement croyait que la portée du projet était trop restreinte, après avoir tenu une consultation publique il pourrait renvoyer le projet à la médiation ou à l’examen par une commission.
[193]La demanderesse soutient aussi que les décisions TrueNorth que les défendeurs invoquent sont à distinguer de la présente espèce. Premièrement, elle fait remarquer que ces décisions avaient trait au contrôle judiciaire d’une décision relative à la détermination de la portée d’un projet, alors qu’en l’espèce, la demanderesse allègue qu’après la prise de mesures fondées sur un rapport d’examen préalable, il y a eu manquement à l’obligation de veiller à la tenue d’une consultation publique en application de l’article 21 de la LCEE. La demanderesse souligne que la Cour d’appel fédérale n’a aucunement mentionné l’article 21. Deuxièmement, les décisions TrueNorth ont trait à l’ancienne version de la LCEE, celle qui était en vigueur avant les modifications apportées par le projet de loi C‑9. La demanderesse allègue de plus que le législateur n’aurait pas pu tenir compte des décisions TrueNorth au moment de faire les modifications, car ces décisions ont été rendues après l’entrée en vigueur des modifications apportées par le projet de loi C‑9, lesquelles rendent obligatoire la tenue d’une consultation publique sur la portée du projet. En fait, dans leur plaidoirie, les avocats de la demanderesse ont indiqué que si le législateur n’avait pas modifié cette disposition en 2003, celle‑ci ne s’adresserait pas à la Cour aujourd’hui.
2) Les défendeurs
[194]Les défendeurs soutiennent pour leur part que la « détermination de la portée du projet » détermine le « processus » que suivra l’évaluation d’un projet.
[195]Le promoteur fait valoir que les arguments de la demanderesse ont déjà été analysés dans les décisions TrueNorth. Même si la proposition tout entière contient certains éléments inclus dans la LEA, une AR peut déterminer la portée du projet de manière plus restreinte afin de mettre l’accent sur les éléments qui requièrent un permis ou une autorisation du gouvernement fédéral. En outre, dans TrueNorth, la Cour d’appel fédérale a confirmé que la décision relative à la détermination de la portée du projet, sous le régime de l’article 15 de la LCEE, est prise avant que l’on décide de procéder par la voie d’un examen préalable ou d’une étude approfondie. Le promoteur soutient que les modifications apportées par le projet de loi C‑9 n’ont pas changé cet ordre et qu’aucune modification n’a été apportée à l’article 15.
[196]La Couronne soutient que l’application de l’article 21 de la LCEE n’est déclenchée que si un élément de la portée proposée du projet, telle que déterminée par l’AR en vertu de l’article 15, figure dans la LEA. Elle allègue de plus qu’une AR peut modifier la portée du projet en tout temps après l’application de l’article 21. Si la portée est modifiée de sorte qu’aucun des éléments du projet ne figure dans la LEA, l’article 21 cesse de s’appliquer. La Couronne soutient que, dans l’arrêt TrueNorth, la Cour d’appel fédérale a confirmé que pour les besoins d’une évaluation, le « projet » n’est pas la proposition, mais ce qui est déterminé par l’AR dans le cadre de l’exercice du pouvoir discrétionnaire que lui confère l’article 15 de la LCEE. La Couronne soutient que, dans l’arrêt TrueNorth, la Cour d’appel fédérale a décidé que le mot « projet », pour l’application de la LCEE, doit être interprété comme étant le « projet tel que défini » en vertu de l’article 15 de la LCEE. Selon la Couronne, le mot « projet » doit donc être interprété, dans l’ensemble de la LCEE, y compris à l’article 21, comme le « projet tel que défini ».
[197]Même si les observations écrites de la Couronne portaient aussi sur l’aspect constitutionnel de TrueNorth, à l’audience l’avocat de la Couronne a précisé qu’il ne croyait pas que la position de cette dernière différait de celle du promoteur. Quoi qu’il en soit, l’avocat de la Couronne fait valoir qu’il n’est pas nécessaire de trancher cette question en l’espèce.
B. Le régime législatif
[198]Dans l’arrêt Bow Valley, précité, la Cour d’appel fédérale, au paragraphe 19, a confirmé que le cadre fondamental d’une évaluation environnementale est le suivant :
Le cadre général d’une évaluation environnementale est le suivant. Premièrement, l’autorité responsable doit décider si la Loi s’applique au projet et, le cas échéant, quel type d’évaluation environnementale doit être utilisée. L’étape suivante consiste à procéder à l’évaluation elle‑même, suite à laquelle l’autorité responsable doit décider si elle autorise la réalisation du projet ou non. L’étape finale recouvre les activités qui doivent être entreprises après la décision pour garantir la mise en œuvre des mesures d’atténuation, ainsi que celle de la communication au public de la décision prise par l’autorité responsable. [Non souligné dans l’original.]
[199]Point n’est besoin de revenir aux éléments particuliers qui ont déclenché le besoin de procéder à une EE en vertu de l’article 5 de la LCEE dans le cas du projet dont il est question en l’espèce. À cet égard, je ne ferai référence qu’à ce qui a déjà été mentionné plus tôt à la section III—L’obligation de procéder à une évaluation environnementale (EE). Cela étant dit, j’examinerai maintenant deux aspects juridiques particuliers qu’il est nécessaire de clarifier : 1) les types d’évaluation environnementale (voies) et 2) la nature de la détermination de la portée.
1) Les types d’évaluation environnementale (voies)
[200]Aux termes de l’article 14 de la LCEE, il existe quatre types d’évaluation environnementale : l’examen préalable, l’étude approfondie, la médiation et l’examen par une commission. Ces quatre types d’évaluation sont couramment appelés « voies ». Le cas échéant, l’EE inclut aussi l’élaboration et l’application d’un programme de suivi.
[201]La majorité des projets qui nécessitent une EE visée à l’article 5 de la LCEE feront l’objet d’une EE auto‑dirigée, qui comporte soit un examen préalable soit une étude approfondie.
[202]Selon l’article 13 de la LCEE, dans le cas où un projet est décrit dans la LEA ou doit être soumis à un examen par une commission ou un médiateur et nonobstant toute autre loi fédérale, l’exercice d’une attribution qui est prévue par la Loi ou ses règlements pour mettre en œuvre le projet en tout ou en partie est subordonné à une EE de celui‑ci et à la prise d’une décision à son égard conformément à l’alinéa 37(1)a) de la LCEE.
a) Examen préalable
[203]L’article 18 de la LCEE, qui, d’après les défendeurs, s’applique en l’espèce, dispose que dans le cas où le projet n’est pas décrit dans la LEA ou la LE, l’AR veille à ce qu’en soit effectué l’examen préalable et à ce que soit établi un rapport d’examen préalable.
[204]Selon le paragraphe 16(1) [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 22(F)] de la LCEE, l’examen préalable porte notamment sur les éléments suivants : les effets environnementaux du projet, l’importance de ces effets, les observations du public que l’on reçoit conformément à la LCEE et à ses règlements, les mesures d’atténuation réalisables, sur les plans technique et économique, des effets environnementaux négatifs importants du projet, de même que tout autre élément utile à l’examen préalable dont l’AR peut exiger la prise en compte.
[205]Dans le contexte d’un examen préalable, la consultation publique n’est pas forcément obligatoire. Lorsqu’elle n’est pas exigée par les règlements, elle n’aura lieu que si l’AR estime que la participation du public à l’examen préalable est indiquée (paragraphe 18(3) de la LCEE). Dans ces cas, l’AR inclura, dans le site Internet, une description de la portée du projet, des éléments à prendre en compte dans le cadre de l’examen préalable et de la portée de ceux‑ci ou une indication de la façon d’obtenir cette description (alinéa 18(3)a) de la LCEE).
[206]Là encore, si l’AR est d’avis qu’il serait bon que le public participe à l’examen préalable d’un projet avant de prendre une mesure en application l’article 20 de la LCEE, elle donne au public la possibilité d’examiner le rapport d’examen préalable et tout document relatif au projet et de faire ses observations à leur égard, ainsi qu’un avis suffisant de cette possibilité (alinéa 18(3)b) de la LCEE). Après avoir pris en compte le rapport d’examen préalable ainsi que toutes les observations reçues conformément au paragraphe 18(3) de la LCEE, l’AR peut prendre l’une des mesures décrites à l’article 20 de la LCEE.
[207]Comme il a été expliqué plus tôt, la décision sur la voie à suivre que les AR ont rendue le 2 mai 2006 est fondée sur l’alinéa 20(1)a) de la LCEE, dont le texte est le suivant :
20. (1) L’autorité responsable prend l’une des mesures suivantes, après avoir pris en compte le rapport d’examen préalable et les observations reçues aux termes du paragraphe 18(3) :
a) sous réserve du sous‑alinéa c)(iii), si la réalisation du projet n’est pas susceptible, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants, exercer ses attributions afin de permettre la mise en œuvre totale ou partielle du projet; [Non souligné dans l’original.]
[208]En fait, les AR ont rendu leur décision sur la voie à suivre sans que le public participe de quelque façon au processus d’EE visé par la LCEE, au motif que la consultation publique dans le cadre du processus provincial d’EE [traduction] « a donné au public une possibilité suffisante et satisfaisante de contribuer au processus d’EE du projet Red Chris ». À cet égard, les AR ont fait remarquer ce qui suit : « Vu l’ampleur des consultations qu’ont menées le gouvernement de la Colombie‑Britannique et le promoteur, et vu les renseignements que les AR ont reçus à la suite de cette consultation, les AR sont d’avis qu’il ne convient pas dans les circonstances que le public participe à l’examen préalable du projet en vertu du paragraphe 18(3) de la LCEE ».
b) Étude approfondie
[209]L’article 21 dispose qu’une étude approfondie doit être menée dans le cas d’un projet mentionné dans la LEA. L’article 21 a été considérablement modifié en 2003. Nous traiterons plus loin des modifications que le projet de loi C‑9 a introduites.
[210]Une étude approfondie est une évaluation environnementale plus complète qu’un examen préalable. En fait, lorsqu’il est nécessaire de procéder à une étude approfondie, on ajoute aux éléments à prendre en compte en vertu du paragraphe 16(1) de la LCEE les suivants : les raisons d’être du projet, les solutions de rechange réalisables sur les plans technique et économique, et leurs effets environnementaux, la nécessité d’un programme de suivi du projet, ainsi que ses modalités, de même que la capacité des ressources renouvelables, risquant d’être touchées de façon importante par le projet, de répondre aux besoins du présent et à ceux des générations futures (paragraphe 16(2) de la LCEE).
[211]La LEA dont il est question à l’article 21 de la LCEE, et qui, selon la demanderesse, s’applique au projet, catégorise les projets ou les catégories de projet pour lesquels il est nécessaire de procéder à une étude approfondie lorsque le gouverneur en conseil est convaincu que le projet ou n’importe quel projet faisant partie de la catégorie en question est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants. La LEA est annexée au Règlement LEA.
[212]De façon similaire à la LE et à la LI déjà mentionnées ci‑dessus (voir la section III—L’obligation de procéder à une évaluation environnementale (EE)), la LEA est divisée en plusieurs parties, qui reflètent ses domaines d’application généraux : parcs nationaux et zones protégées, centrales électriques et lignes de transport d’électricité, projets hydrauliques, projets pétroliers et gaziers, minerais et traitement des minerais, installations nucléaires et installations connexes, installations industrielles, défense, transports, et gestion de l’eau.
[213]Selon l’article 3 du Règlement LEA, le projet de construction, de désaffectation ou de fermeture d’une mine métallifère, autre qu’une mine d’or, d’une capacité de production de minerai de 3 000 tonnes par jour ou plus, ou d’une mine d’or, autre qu’un placer, d’une capacité de production de minerai de 600 tonnes par jour ou plus, constituent des projets et des catégories de projet pour lesquels une étude approfondie est obligatoire (voir les alinéas 16a) et c) de la partie 5—Minerais et traitement des minerais—de l’annexe du Règlement LEA).
[214]Par ailleurs, une étude approfondie est obligatoire dans le cas d’un projet de construction, de désaffectation ou de fermeture d’une structure destiné à dériver 10 millions de m³ ou plus d’eau d’un plan d’eau naturel dans un autre, ou d’un projet d’agrandissement d’une telle structure qui entraînerait une augmentation de la capacité de dérivation de plus de 35 pour cent (article 9 de la partie III—Projets hydrauliques—du Règlement LEA). Cependant, étant donné que la demanderesse a abandonné sa demande visant à obtenir une déclaration à cet égard, il n’est pas nécessaire de décider si le projet en question tombe sous le coup ou non de l’article 9 [de l’annexe] du Règlement LEA, car il est possible qu’il excède le seuil de dérivation d’eau de 10 millions de m³ par année dans la phase de post‑fermeture de la mine (voir les estimations mentionnées à la section II—Le projet).
[215]Les modifications apportées par le projet de loi C‑9 ont également ajouté les articles 21.1 et 21.2 [L.C. 2003, ch. 9, art. 12] de la LCEE.
[216]Selon l’article 21.1 de la LCEE, après la consultation publique, le ministre de l’Environnement doit prendre en compte le rapport de l’AR et sa recommandation, et soit renvoyer le projet à l’AR pour qu’elle poursuive l’étude approfondie et veille à ce qu’un rapport de cette étude soit présenté au ministre de l’Environnement ainsi qu’à l’Agence, soit le renvoyer à la médiation ou à l’examen par une commission. Si le ministre de l’Environnement renvoie le projet à l’AR, cette décision est définitive; le projet ne peut pas être renvoyé plus tard à un médiateur ou à une commission (paragraphe 21.1(2) de la LCEE).
[217]En outre, selon le nouvel article 21.2 de la LCEE, l’AR doit ensuite veiller à ce que le public ait la possibilité, en plus de celles qui sont prévues au paragraphe 21(1) et à l’article 22 de la LCEE, de prendre part à l’étude approfondie, sous réserve toutefois de toute décision prise par le coordonnateur fédéral de l’évaluation environnementale, en vertu de l’alinéa 12.3c) [édicté, idem, art. 7] de la LCEE, quant au moment de la participation.
[218]L’article 22 de la LCEE, qui traite aussi des études approfondies, n’a pas été modifié. Après avoir reçu un rapport d’étude approfondie d’un projet, l’Agence publie un avis indiquant, notamment, l’adresse où présenter des observations sur les conclusions et les recommandations du rapport, et toute personne peut soumettre des observations à l’Agence au sujet des conclusions et des recommandations en question, ainsi que de n’importe quel autre aspect du rapport d’étude approfondie. Avant la date limite indiquée dans l’avis que publie l’Agence, toute personne peut soumettre à cette dernière des observations sur les conclusions et les recommandations ainsi que sur n’importe quel autre aspect du rapport d’étude approfondie.
[219]Selon le paragraphe 23(1) [mod., idem, art. 13] de la LCEE, après avoir pris en compte le rapport d’étude approfondie et les observations présentées, le ministre de l’Environnement peut renvoyer le projet à l’AR pour qu’une mesure soit prise en application de l’article 37 [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 29(F); 1994, ch. 46, art. 3; 2003, ch. 9, art. 17] de la LCEE. Il peut faire une déclaration dans laquelle il indique si, selon lui, le projet est susceptible ou non, compte tenu de la mise en œuvre des mesures d’atténuation qu’il estime appropriées, d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants, et dans laquelle il précise, s’il y a lieu, les mesures d’atténuation et tout programme de suivi qu’il estime appropriés, compte tenu des observations des AR et des autorités fédérales concernant ces mesures ou programmes.
c) Commission ou médiateur
[220]La LCEE confère aux AR ou au ministre de l’Environnement le vaste pouvoir discrétionnaire d’opter pour une voie d’un niveau « supérieur » à celui que représente un examen préalable ou une étude approfondie.
[221]En fait, sous réserve des alinéas 29(1)b) et c) de la LCEE à tout moment si une AR estime soit qu’un projet, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, peut entraîner des effets environnementaux négatifs importants, soit que les préoccupations du public justifient une médiation ou un examen par une commission, cette AR peut demander au ministre de l’Environnement de renvoyer le projet à un médiateur ou à une commission (article 25 de la LCEE).
[222]Dans le même ordre d’idées, à tout moment le ministre de l’Environnement s’il estime soit qu’un projet assujetti à l’évaluation environnementale en vertu de l’article 5 de la LCEE, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation indiquées, peut entraîner des effets environnementaux négatifs importants, soit que les préoccupations du public le justifient, peut renvoyer le projet à un médiateur ou à une commission, après avoir offert de consulter l’instance, au sens du paragraphe 12(5) de la LCEE, responsable du lieu où le projet doit être réalisé et après consultation de l’AR, ou, à défaut, de toute autorité fédérale compétente, renvoyer le projet à un médiateur ou à une commission (article 28 [mod. par L.C. 1998, ch. 5, art. 162] de la LCEE).
2) La nature de la décision concernant la détermination de la portée
[223]L’établissement de la portée d’un projet à évaluer est une tâche de nature très factuelle, qui oblige à examiner soigneusement les activités qui sont exécutées en rapport avec le projet en question.
[224]Par exemple, dans l’arrêt Québec (Procureur général) c. Canada (Office national de l’énergie), [1994] 1 R.C.S. 159, la Cour suprême du Canada a examiné la question de la portée du projet pour les besoins d’une évaluation menée en vertu de la Loi sur l’Office national de l’énergie, L.R.C. (1985), ch. N‑7. Hydro‑Québec avait demandé des permis d’exportation d’électricité vers les États‑Unis. L’Office national de l’énergie (l’Office) avait approuvé les permis sous réserve de deux conditions environnementales liées aux installations de production d’électricité proposées. L’une de ces conditions exigeait que ces installations fassent l’objet d’une évaluation environnementale avant leur construction.
[225]La Cour suprême [à la page 192] a décrété que, au moment d’évaluer la portée de l’évaluation, la question qu’il convenait de poser était de savoir si la construction des nouvelles installations « est nécessaire, entre autres, pour répondre à la demande créée par un contrat d’exportation ». La Cour suprême a de plus déclaré [à la page 195] que l’Office n’était pas tenu de se limiter, dans la portée de son enquête, « aux répercussions environnementales du transport d’électricité par une ligne de fil métallique ». Les effets environnementaux des installations productrices d’électricité étaient donc liés au pouvoir de l’Office d’accorder un permis d’exportation, et ces effets entraient dans le cadre de l’évaluation.
[226]Le paragraphe 15(1) de la LCEE qu’invoquent les défendeurs pour appuyer la légalité des décisions ou des mesures que les AR ont prises dispose que l’autorité responsable ou, dans le cas où le projet est renvoyé à la médiation ou à l’examen par une commission, le ministre de l’Environnement, après consultation de l’AR, détermine la portée du projet à l’égard duquel l’EE doit être effectuée.
[227]Selon le paragraphe 15(2), l’AR peut combiner en une même EE deux ou plusieurs projets auxquels la Loi s’applique si elle juge que les projets ont un lien assez étroit pour qu’ils soient considérés comme un seul projet. Ce pouvoir est de nature discrétionnaire.
[228]Par ailleurs, le paragraphe 15(3) de la LCEE dispose que :
15. . . .
15. [. . .]
(3) Est effectuée, dans l’un ou l’autre des cas suivants, l’évaluation environnementale de toute opération— construction, exploitation, modification, désaffectation, fermeture ou autre—constituant un projet lié à un ouvrage :
a) l’opération est proposée par le promoteur;
b) l’autorité responsable ou, dans le cadre d’une médiation ou de l’examen par une commission et après consultation de cette autorité, le ministre estime l’opération susceptible d’être réalisée en liaison avec l’ouvrage. [Non souligné dans l’original.]
[229]Bien qu’elles ne soient pas d’application obligatoire, les lignes directrices [Loi canadienne sur l’évaluation environnementale : Guide des autorités responsables, 1994] expliquent de quelle façon l’Agence envisage l’application du processus d’EE, qui est complexe. En fait, les tribunaux se sont fondés sur les publications de l’Agence pour décrire le processus d’EE : Friends of the West Country Assn. c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans), [2000] 2 C.F. 263 (C.A.); Citizens’ Mining, précité; Manitoba’s Future Forest Alliance c. Canada (Ministre de l’Environnement), [1999] A.C.F. no 903 (1re inst.) (QL), Bow Valley, précité.
[230]Les AR doivent d’abord décider si la LCEE s’applique. Pour répondre à cette question, il leur faut décider si :
1) il existe un « projet », au sens de la LCEE;
2) le projet n’est pas exclu par la LCEE ou l’un de ses règlements;
3) le projet met en cause une « autorité fédérale »;
4) le projet comporte une mesure qui déclenche le besoin de procéder à une EE en vertu de la LCEE.
[231]Deuxièmement, l’AR décide quelle voie d’EE elle doit suivre. À cet égard, le Guide de préparation d’une étude approfondie à l’intention des promoteurs et des autorités responsables mentionne ce qui suit :
étape 1.2 : déterminer le processus d’évalua-tion environnementale
[. . .]
La majorité des projets fédéraux nécessitant une évaluation environnementale feront l’objet d’une auto‑évaluation, ce qui suppose soit un examen préalable, soit une étude approfondie. Les deux sont des auto‑évaluations parce que l’autorité responsable :
· détermine la portée de l’évaluation environnementale;
· établit avec certitude les facteurs à considérer;
· conduit directement le processus d’évaluation environ-nementale;
· veille à ce qu’un rapport d’évaluation environnementale soit établi.
Dans la plupart des cas, l’auto‑évaluation consiste en un examen préalable, mais certains projets nécessitent une étude approfondie, c’est‑à‑dire une évaluation plus poussée et rigoureuse des effets sur l’environnement que pourrait avoir le projet.
Un projet fera l’objet d’une étude approfondie :
· s’il figure au Règlement sur la liste d’étude approfondie;
· si l’AR ne l’a pas renvoyé directement au ministre pour une médiation ou un examen par une commission;
· s’il est réalisé au Canada.
L’AR doit examiner le Règlement sur la liste d’étude approfondie afin de déterminer si le projet pouvant mener à l’exercice d’une attribution est visé. En cas de doute, l’AR doit obtenir un avis en s’adressant à l’Agence.
[232]À cet égard, toujours selon le Guide :
étape 2.1 : établir la portée de l’étude approfondie
Il revient à l’autorité responsable de déterminer la portée du projet (article 15) ainsi que les éléments à examiner dans le cadre de l’étude approfondie [paragraphes 16(1), 16(2) et 16(3)]. Le Règlement sur la coordination fédérale exige que les AR et les ministères compétents en la matière déterminent conjointement la portée du projet, les éléments à examiner et la portée de ces éléments. La meilleure approche pour les autorités fédérales consiste à s’entendre sur la portée qui leurs permettent de satisfaire à toutes leurs responsabilités en matière d’évaluation environnementale. Il ne s’agit pas toutefois d’une obligation légale.
Il est fortement recommandé d’entreprendre la délimitation de la portée de l’étude en collaboration avec le promoteur, les parties intéressées, les ministères compétents en la matière et l’Agence. Les séances à cet effet devraient commencer le plus tôt possible. La réussite du processus d’évaluation environne-mentale dépend souvent de la manière dont cette activité est menée. Cet exercice permet d’établir les paramètres de l’étude approfondie et de déterminer le bien‑fondé des études à effectuer. [Non souligné dans l’original.]
[233]Comme le signale le juge Linden dans l’arrêt Bow Valley, précité, aux paragraphes 25 à 27 :
La Loi ne définit pas la procédure à suivre pour déterminer la portée d’un projet. Elle ne définit pas non plus le terme « portée ». Elle n’indique pas non plus à l’autorité responsable comment elle doit procéder pour déterminer quels ouvrages doivent être compris dans la portée du projet. Le Guide des autorités responsables suggère toutefois que le test du projet principal/accessoire soit utilisé afin d’uniformiser la détermination de la portée des projets. Selon le test du projet principal/accessoire, le projet principal, savoir l’entreprise liée à un ouvrage ou l’activité concrète, doit toujours être compris dans la détermination de la portée du projet. La portée doit aussi couvrir les ouvrages ou activités concrètes accessoires au projet principal.
Le Guide des autorités responsables suggère l’utilisation de deux critères pour déterminer quels sont les éléments accessoires au projet principal : l’interdépendance et le lien. Si le projet principal ne peut être mené à bien sans qu’un autre ouvrage ou qu’une autre activité concrète soit entreprise, il faut alors les considérer comme un tout. De plus, si la décision d’entreprendre l’exécution du projet principal rend inévitable l’exécution d’autres ouvrages ou activités, ils peuvent être considérés comme faisant partie du même projet.
L’Énoncé de politique opérationnelle […] de l’Agence qui s’intitule « établir la portée de l’évaluation environnementale » porte que « l’établissement de la portée détermine les limites d’une évaluation environnementale (quels sont les éléments du projet à considérer et à inclure, quelles composantes environnementales sont susceptibles d’être affectées et à quelle distance du projet se trouvent‑ elles) » . L’Énoncé recommande notamment de prendre en considération les questions suivantes pour arriver à la détermination de la portée du projet : la description du projet (quel est le projet et pourquoi est‑ce le projet principal?); la justification du projet (quelle est l’utilité du projet et pourquoi est‑il proposé?), ainsi que la description des autres ouvrages qui sont inévitables ou physiquement liés au projet proposé, ou qui en sont inséparables; si le projet proposé est ou a été l’objet d’une évaluation des effets environnementaux effectuée par une autre entité, par exemple, d’autres évaluations environnementales, des plans d’aménagement de forêts, des plans de gestion de ressources, des plans d’utilisation régionale de terres; si d’autres processus d’examen sont en cours ou ont été effectués et leurs résultats. [Non souligné dans l’original.]
[234]Comme on peut le voir, le processus de détermination de la portée d’un projet comporte plusieurs aspects : la portée du projet lui‑même, la portée de l’évaluation environnementale, la portée des éléments à prendre en compte, de même que la délimitation des « partie[s] intéressée[s] » (voir la définition donnée au paragraphe 2(1) de la LCEE). Je vais maintenant examiner la jurisprudence qui s’applique à l’interprétation des pouvoirs conférés aux AR à cet égard.
[235]En l’espèce, il n’est pas envisagé que le projet se déroule en plusieurs étapes (cependant, les deux puits à ciel ouvert qui sont projetés ne formeraient finalement qu’un seul) ou que RCDC ne construira pas la mine et l’usine de concentration projetées que les AR ont exclues dans la décision de mars 2005 concernant la détermination de la portée. Il n’est pas question non plus, en l’espèce, que les AR ont décidé d’inclure dans l’exercice de détermination de la portée des éléments d’un projet qui avaient, par exemple, été exclus par un promoteur dans sa description du projet envisagé. Comme je l’ai expliqué plus tôt, il a d’abord été décidé par le MPO, en mai 2004, que les AR prépareraient une étude approfondie, précédée d’une consultation publique sur la portée du projet et les éléments à prendre en compte dans le cadre de l’EE de ce projet. Cependant, les AR ont plus tard décidé que le projet « défini » par elles n’était plus inclus dans la LEA.
C. La jurisprudence
[236]L’interprétation de l’article 15 a été examinée à maintes reprises par les tribunaux.
1) Bowen
[237]Dans la décision Bowen c. Canada (Procureur général), [1998] 2 C.F. 395 (1re inst.), les demandeurs contestaient la décision du ministre du Patrimoine canadien de fermer les pistes d’atterrissage des parcs nationaux Banff et Jasper. Plus précisément, ils alléguaient que le processus d’examen préalable, que le ministère du Patrimoine canadien avait entrepris pour déterminer les effets environnementaux de la désaffectation des pistes d’atterrissage, violait les exigences prévues par la LCEE de procéder à une étude approfondie. Dans cette décision, la Cour a apprécié le régime que prévoyait l’ancienne version de la LCEE. La Cour a ensuite évalué si la décision du gouverneur en conseil avait trait à un « ouvrage ». Après avoir décidé que le projet en question était la désaffectation des pistes d’atterrissage, la Cour a ensuite examiné si le projet était inscrit sur la Liste d’étude approfondie. Le juge Campbell a noté ce qui suit à cet égard [au paragraphe 70] :
Au titre de l’article 1 de la Liste d’étude approfondie, puisque chaque désaffectation se rapporte à un ouvrage dans un parc national, une étude approfondie est nécessaire, mais seulement si la désaffectation va à l’encontre du plan de gestion du parc en question.
[238]Concluant que la désaffectation des pistes d’atterrissage était contraire au plan directeur des parcs en question, la Cour a décidé que le projet était inscrit sur la LEA. Le juge Campbell a signalé en outre ce qui suit [au paragraphe 75] :
En conséquence, je conclus qu’une étude approfondie est nécessaire concernant la décision de désaffecter chacune des pistes d’atterrissage de Banff ou de Jasper. Je conclus également que le fait que les examens préalables ont déjà été effectués est une considération non pertinente aux yeux du droit, bien que, sans doute, les résultats seront d’une aide pratique dans la préparation des études approfondies requises.
[239]Compte tenu de ce qui précède, la Cour a donc conclu qu’il était nécessaire de procéder à une étude approfondie et que l’examen préalable était ultra vires.
2) Manitoba’s Future Forest Alliance
[240]La décision Manitoba’s Future Forest Alliance avait trait à la construction d’un pont et à une évaluation environnementale menée par la Garde côtière canadienne. Le promoteur du projet entreprenait également la transformation et l’agrandisse-ment d’une usine de pâte à papier existante, la construction d’une nouvelle usine de pâte à papier, la construction de chemins d’exploitation s’étendant sur des centaines de kilomètres, ainsi que d’autres activités forestières connexes. L’approbation était contestée en raison de la délimitation étroite de la portée du projet. Le juge Nadon a conclu que, au moment de déterminer la portée du projet en vertu du paragraphe 15(1) de la LCEE, l’autorité responsable était tenue, en vertu du paragraphe 15(3), d’évaluer non seulement les travaux proposés par le promoteur mais aussi ceux qui étaient susceptibles d’être menés en rapport avec le pont.
[241]Le juge Nadon, au paragraphe 53 de la décision, a importé dans son jugement le passage suivant, extrait du mémoire du défendeur :
L’effet du paragraphe 15(3) [. . .] est qu’il est possible d’étendre la portée de l’évaluation d’un projet relatif à un ouvrage au‑delà de ce qui est proposé dans le projet lui‑même afin de tenir compte des effets environnementaux des opérations qui, de l’avis de l’autorité responsable, sont susceptibles d’être réalisées pendant le cycle de vie du projet. [Non souligné dans l’original.]
[242]Cependant, au vu des faits particuliers de cette affaire, la Cour a conclu que la Garde côtière canadienne n’était pas tenue d’inclure dans la portée du projet les activités forestières, les usines de pâte à papier ou la construction des nouveaux chemins d’exploitation, car les activités forestières n’étaient pas des activités liées au pont ou susceptibles d’être exécutées en rapport avec le projet en question.
3) Friends of the West Country Assn.
[243]Dans l’affaire Friends of the West Country Assn., précitée, la portée des paragraphes 15(1) et (3) de la LCEE a été examinée par cette Cour ainsi que par la Cour d’appel fédérale. En première instance [[1998] 4 C.F. 340 (1re inst.)], la Cour n’a relevé aucune erreur susceptible de contrôle dans la façon dont la Garde côtière canadienne avait exercé son pouvoir discrétionnaire pour définir les projets soumis à une évaluation environnementale. En particulier, la Cour a conclu que la Garde côtière canadienne n’avait pas commis d’erreur en n’incluant pas, dans la portée des projets de pont, la route principale et les activités forestières proposées de Sunpine. Cependant, elle a examiné ensuite le paragraphe 15(3). À cet égard, mon collègue le juge Gibson a conclu que l’AR était tenue d’inclure dans « la portée de l’évaluation environnementale » (par opposition aux « projets ») la route et peut‑être les activités forestières parce qu’elles avaient trait au pont.
[244]L’appel a été rejeté et il a été ordonné que l’affaire soit réexaminée conformément aux motifs du juge Gibson, tels que modifiés par les motifs de la Cour d’appel fédérale. À cet égard, le juge Rothstein, qui a rédigé les motifs de la Cour d’appel, a déclaré que bien que la portée du projet doive être déterminée par l’AR, cette portée peut englober plus que l’ouvrage qui a déclenché l’examen visé par la LCEE lorsqu’il y a d’autres activités concrètes qui sont menées en rapport avec un ouvrage particulier. Cependant, le paragraphe 15(3) est « subsidiaire » au paragraphe 15(1), et comme l’a déclaré le juge Rothstein [au paragraphe 147] dans ce dernier cas : « le paragraphe 15(3) n’a pas pour effet d’élargir la portée d’un projet au‑delà de la définition faite conformément au paragraphe 15(1) ».
[245]Cela étant dit, le juge Rothstein a émis l’opinion suivante, aux paragraphes 34 et 39 :
Aux termes de l’alinéa 16(1)a), l’autorité responsable n’a pas à se borner à un examen des effets environnementaux découlant strictement d’un projet dont la portée a été déterminée conformément au paragraphe 15(1). Cette autorité responsable n’est pas non plus obligée de s’en tenir aux seuls effets environnementaux pouvant découler de sources relevant de la compétence fédérale. En effet, la nature même d’une évaluation des effets cumulatifs en vertu de l’alinéa 16(1)a) semble expressément élargir le champ d’examen au delà du projet défini. [. . .]
[. . .]
Il n’est pas illogique de penser que l’accumulation de toute une série d’effets insignifiants pourrait finir par constituer des effets appréciables.Je ne dis pas que c’est le cas en l’espèce. Je fais simplement remarquer que le fait qu’il ait été décidé que les projets définis entraîneraient des effets insignifiants permet d’envisager la possibilité d’effets cumulatifs appréciables sur l’environnement lorsqu’on englobe dans l’analyse les autres projets. Pour ce motif, je ne pense pas que le fait que la Garde côtière ait conclu que les projets en question n’entraîneraient que des effets insignifiants empêche l’application en l’espèce de la partie de l’alinéa 16(1)a) concernant les effets cumulatifs, ou du paragraphe 16(3). [Non souligné dans l’original.]
[246]Par conséquent, la Cour d’appel fédérale a jugé que la Garde côtière canadienne avait commis une erreur en refusant d’exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui était conféré dans son analyse des effets cumulatifs par l’alinéa 16(1)a), en excluant l’examen des effets d’autres projets ou activités parce qu’ils débordaient le cadre des projets définis ou excédaient la compétence du gouvernement fédéral.
4) Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada
[247]Les tribunaux ont reconnu que le besoin d’établir la portée d’un projet à évaluer est par-ticulièrement important lorsqu’on a affaire à un projet qui peut comporter des phases ou des étapes différentes qui s’étendent sur plusieurs années. Ainsi, dans l’affaire Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), 2001 CFPI 1123; conf. par [2003] 4 C.F. 672 (C.A.), la ministre du Patrimoine canadien a considéré l’EE d’une route d’hiver comme un projet et a décidé que toute proposition future en vue de la construction d’une route toute saison serait un nouveau projet. L’EE a été contestée, en raison notamment de la portée de l’évaluation. La contestation n’a pas été fructueuse et il a été décidé que la ministre du Patrimoine canadien avait agi dans le cadre de sa compétence en considérant la route d’hiver et l’éventuelle route toute saison comme deux projets distincts.
5) TrueNorth
[248]J’analyserai maintenant les deux décisions TrueNorth que la présente Cour et la Cour d’appel fédérale ont rendues, en 2004 et en 2006 respective-ment. Les faits pertinents de cette affaire, que mon collègue le juge Russell a exposés dans TrueNorth —première instance, sont expliqués ci‑dessous. À l’instar des causes précédemment mentionnées, les décisions TrueNorth sont fondées aussi sur les dispositions de la LCEE avant les modifications apportées par le projet de loi C‑9. Cependant, le texte de l’article 15 n’a pas changé.
a) Le contexte factuel
[249]En août 2000, TrueNorth Energy Corporation a annoncé qu’elle envisageait d’exploiter un gisement de sables bitumineux situé près de Fort McMurray (Alberta), ce qui obligeait d’enlever une terre imprégnée de pétrole. Le projet en question obligeait à détruire Fort Creek, un ruisseau poissonneux qui traversait la zone de la mine projetée. Cela signifiait qu’une autorisation de détruire le poisson et l’habitat du poisson (DDP) était requise en application de l’article 35 de la Loi sur les pêches. Le MPO, l’autorité responsable dans cette affaire, a reçu une demande officielle d’autorisation en avril 2001, qui a déclenché la tenue d’une évaluation environnementale conformément à l’alinéa 5d) de la LCEE.
[250]La province de l’Alberta procédait elle aussi à un examen de la proposition de TrueNorth. En juillet 2001, le MPO a obtenu l’étude d’impact environnemental (EIE) de TrueNorth, que la province de l’Alberta avait exigée pour son examen de la proposition de TrueNorth. Selon l’EIE, l’altération de la qualité du poisson constituait un problème que l’on ne pouvait pas ignorer. L’altération de la qualité du poisson est un processus causé soit par infiltration naturelle, soit par le rejet d’une substance nocive dans des eaux poissonneuses. À cet égard, l’EIE envisageait la possibilité que le rejet était imputable aux activités de la mine de TrueNorth. La Cour a fait remarquer au paragraphe 9 de la décision, dans une remarque incidente, que même si « [l]e rejet d’une substance nocive dans des eaux poissonneuses est interdit par le paragraphe 36(3) de la Loi sur les pêches, [ce rejet] ne pouvait être l’objet d’une autorisation aux termes du paragraphe 35(2) ». Il vaut la peine de réitérer que la proposition de TrueNorth, contrairement à celle dont il est question en l’espèce, n’englobait pas un DRM.
[251]Près d’un an plus tard, en mai 2002, TrueNorth a fourni au MPO le rapport d’un consultant qui ramenait les risques d’altération de la qualité du poisson à un niveau qualifié de négligeable. En juillet 2002, Environnement Canada a fait connaître son avis spécialisé et a demandé que l’on procède à d’autres études, même s’il ne contestait pas nécessairement l’évaluation de TrueNorth selon laquelle les effets d’altération de la qualité du poisson seraient négligeables.
[252]En juillet 2002, le MPO a participé à titre d’intervenant aux audiences de la province, conduites par l’entremise de l’Alberta Energy and Utilities Board (AEUB), au sujet des travaux d’extraction que proposait TrueNorth.
[253]Le mois suivant, en août 2002, le MPO a rendu par lettre une décision préliminaire sur la détermination de la portée du projet, indiquant que la portée du projet à l’égard duquel une évaluation environnementale devait être effectuée était la destruction du lit et du canal du Fort Creek et d’autres activités connexes :
1. la destruction du lit et du canal du Fort Creek;
2. la construction de dérivations temporaires ou permanentes du Fort Creek;
3. la construction d’ouvrages d’assèchement et de drainage;
4. la construction et l’exploitation d’ouvrages connexes propres à empêcher la sédimentation et l’érosion;
5. la construction de passages sur le Fort Creek, ainsi que les approches nécessaires;
6. la construction et l’exploitation d’ouvrages de préservation de l’habitat du poisson, selon les directives du MPO;
7. la construction des camps et des zones d’entreposage reliés aux points 1) à 7);
8. les travaux de défrichage et d’enlèvement de la végétation des rives, reliés aux points 1) à 8).
[254]En septembre 2002, le gouvernement du Canada a fait part de ses observations à l’AEUB ainsi qu’aux participants aux audiences provinciales.
[255]Le MPO a consulté d’autres autorités fédérales avant de déterminer la portée du projet, conformément à l’article 8 du Règlement sur la coordination par les autorités fédérales des procédures et des exigences en matière d’évaluation environnementale, DORS/97‑181. Il a ainsi obtenu des réponses de Santé Canada, de Parcs Canada, de RNCan et d’Environnement Canada. Parmi toutes ces autorités fédérales, seul Environnement Canada a recommandé que la portée du projet aille au‑delà de celle qui était proposée dans la lettre du MPO. Plus précisément, il a recommandé que la portée du projet soit élargie de manière à [traduction] « englober le projet tout entier défini par TrueNorth Energy Ltd. dans sa demande combinée adressée à l’Alberta Energy Utilities Board et à Alberta Environment ». De plus, en octobre 2002, trois organismes à but non lucratif ont eux aussi présenté une lettre par l’entremise de leur avocat, alléguant que la portée proposée était trop restreinte et qu’il était nécessaire de procéder à une étude approfondie.
[256]En décembre 2002, le MPO a rendu sa décision finale sur la détermination de la portée du projet, une décision inchangée par rapport à sa décision préliminaire d’août 2002. En ce qui concerne cette décision, le juge Russell écrit ce qui suit [aux paragraphes 20 à 22] :
Pour arriver à la décision finale, Mme Majewski [chef régionale pour l’habitat auprès du MPO] s’était fondée sur les principes suivants : les décisions de cette nature doivent être raisonnables et elles reposent sur les circonstances propres à chaque cas. Mme Majewski a estimé que la portée du projet devait englober d’une part les entreprises et activités qui requièrent une autorisation selon le paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches et qui donnent lieu à l’application de la LCEE, et d’autre part les ouvrages et activités accessoires. Elle a donc défini la portée du projet comme la destruction du lit du Fort Creek parce que cette destruction comporte, selon la partie VII de l’annexe du Règlement sur la liste d’inclusion, des activités concrètes requises pour l’existence d’un « projet » aux fins de la LCEE. Les éléments restants de la décision de Mme Majewski sur la portée du projet concernent les ouvrages et activités accessoires, notamment un canal de dérivation du Fort Creek.
Si le déversement des eaux du Fort Creek dans un canal de dérivation avait dépassé les limites prévues par l’article 9 du Règlement sur la liste d’étude approfondie, une étude approfondie aurait été nécessaire. Puisque tel n’était pas le cas, Mme Majewski a conclu que l’évaluation environnementale requise par la LCEE devait se faire selon la formule de l’examen préalable.
Pour arriver à sa décision finale sur la portée du projet, Mme Majewski a pris en compte toutes les observations, notamment celles de l’avocat des demandeurs, ainsi que les conclusions de l’enquête provinciale.
b) La demande de contrôle judiciaire
[257]Les organismes à but non lucratif qui avaient soumis plus tôt des observations au MPO ont demandé à la présente Cour de soumettre à un contrôle judiciaire la décision prise par le MPO en décembre 2002 à propos de la détermination de la portée du projet. Ils ont fait valoir que le MPO avait limité à tort la portée du projet à la destruction du Fort Creek et qu’il aurait plutôt dû englober toute l’entreprise d’extraction de sables bitumineux. Ils ont fait valoir que le MPO avait commis une erreur dans son interprétation de la portée du pouvoir d’évaluation fédéral que confère la LCEE ainsi que de la définition d’un « projet », et qu’il avait exercé de manière déraisonnable son pouvoir discrétionnaire en déterminant la portée du projet à évaluer. Plus précisément, les demandeurs ont fait valoir que la destruction du Fort Creek était un impact du projet et ne constituait pas en soi un projet distinct. Étant donné que le projet relatif aux sables bitumineux excédait deux seuils distincts indiqués à la partie IV du Règlement LEA, il était nécessaire de procéder à une étude approfondie du projet.
[258]Les demandeurs ont souligné que Mme Majewski avait présumé à tort que lorsqu’une EE est déclenchée, [traduction] « la portée du projet devrait se limiter aux éléments sur lesquels le gouvernement fédéral peut validement revendiquer un pouvoir, directement ou indirectement. La portée du projet soumis à l’évaluation environnementale devrait s’accorder avec l’entreprise de droit fédéral dont il est question dans la demande ». Les demandeurs ont fait valoir que cela montrait que le MPO croyait à tort qu’une autorité fédérale ne peut considérer que ce qu’elle peut validement réglementer. Cependant, d’après les demandeurs, dans l’arrêt Friends of the Oldman River Society, précité, la Cour suprême du Canada a établi que la portée d’une évaluation ne se limite pas au chef de compétence particulier en vertu duquel l’autorité fédérale assume une responsabilité décisionnelle et qu’une fois que le ministère d’origine obtient l’autorisation de mettre en marche l’évaluation, l’examen qu’il effectue doit prendre en compte l’effet environnemental sur tous les domaines de compétence fédérale.
c) La décision en première instance
[259]Le 16 septembre 2004, le juge Russell a rejeté la demande. Pour arriver à cette conclusion, il a fait remarquer ce qui suit, aux paragraphes 234 et 235 :
À mon avis par conséquent, même si l’arrêt Oldman River prescrit que l’évaluation, une fois validement entreprise, peut considérer l’incidence d’un projet sur tous les domaines de compétence fédérale, il ne dit pas que le champ d’une évaluation n’a pas à être rattaché au chef de compétence fédérale qui est mis en cause par une demande. En réalité, il m’apparaît que l’avis rendu par le juge La Forest dans l’arrêt Oldman River renferme le postulat selon lequel l’exercice d’un pouvoir législatif ne peut conférer qu’un mandat d’examiner des questions qui se rapportent aux domaines de compétence fédérale concernés.
Quoi qu’il en soit, je suis d’avis que le pouvoir du MPO de définir la portée d’un projet se trouve dans la LCEE elle‑même et ne peut résulter d’une décision judiciaire telle que l’arrêt Oldman River, qui traitait expressément de la constitutionnalité d’un certain Décret sur les lignes directrices. [Non souligné dans l’original.]
[260]Le juge Russell a déclaré de plus, au paragraphe 243 :
Je reconnais avec les demandeurs que, une fois qu’est déclenchée l’application de la LCEE, l’article 15 ni aucune disposition liée au champ d’une évaluation ne limitent en rien une décision concernant la portée d’un projet au domaine de compétence fédérale qui est occupée par l’autorité responsable. Mais, à mon avis, aucune limite semblable n’est nécessaire parce qu’il est impossible que le législateur ait voulu permettre à une autorité responsable de procéder à l’évaluation environnementale des aspects d’un projet qui ne sont pas rattachés au chef de compétence fédérale mis en cause par le projet en question. [Non souligné dans l’original.]
[261]Par ailleurs, le juge Russell a décrété que rien dans la définition d’un « projet » que donne la LCEE n’empêchait la destruction du Fort Creek d’être par elle‑même un projet.
[262]Même si l’ancien article 21 de la LCEE a été mentionné dans le sommaire qu’a fait le juge Russell des observations des parties, ce dernier ne l’a pas mentionné explicitement dans son analyse. Cela étant dit, il est clair que les commentaires du juge Russell qui précèdent visent exclusivement la « portée d’une évaluation » au sens de l’article 5 de la LCEE, qui, dans ce cas‑ci, « limite en rien une décision concernant la portée d’un projet au domaine de compétence fédérale qui est occupé par l’autorité responsable ».
d) La décision en appel
[263]Les demandeurs ont interjeté appel de la décision de la Cour. Le 27 janvier 2006, la Cour d’appel fédérale a rejeté l’appel [[2006] 3 R.C.F. 610].
[264]Premièrement, en ce qui concerne l’argument des demandeurs selon lequel les mots « en tout ou en partie », à l’alinéa 5(1)d), sous‑entendaient qu’un projet doit être constitué par la totalité d’un ouvrage ou d’une activité concrète, le juge Rothstein, qui a rédigé les motifs de la Cour d’appel fédérale, a déclaré ce qui suit [au paragraphe 20] :
Les appelants ont mal interprété l’alinéa 5(1)d). Le projet visé à l’alinéa 5(1)d) est le projet dont la portée est définie par l’autorité responsable en vertu du paragraphe 15(1). Les mots « en tout ou en partie » reconnaissent que dans le cadre du projet dont la portée est définie par l’autorité responsable, le pouvoir qu’exerce une autorité fédérale en vertu de l’alinéa 5(1)d) peut concerner une partie seulement du projet. En l’espèce, TrueNorth doit obtenir du ministre des Pêches et des Océans du Canada l’autorisation visée au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches pour la destruction de l’habitat du poisson du Fort Creek. Toutefois, la portée du projet est plus large que la destruction du Fort Creek : par exemple, elle comprend la construction des camps et des zones d’entreposage nécessités par la destruction du Fort Creek. Bien que la construction des camps et des zones d’entreposage entrent dans la portée du projet défini comme la destruction du Fort Creek, TrueNorth n’a pas besoin de permis pour cet élément en vertu de l’alinéa 5(1)d). [Non souligné dans l’original.]
[265]Il est intéressant de signaler que, dans ces passages, le juge Rothstein ne mentionne pas directement l’ancien article 21. Son raisonnement dans TrueNorth laisse entendre que le mot « projet », qui est défini de manière large à l’article 2 de la LCEE, doit avoir un sens plus restreint lorsqu’il est employé à l’alinéa 5(1)d) de la LCEE : « [l]e projet visé à l’alinéa 5(1)d) est le projet dont la portée est définie par l’autorité responsable en vertu du paragraphe 15(1) » (non souligné dans l’original). Cependant, il reste la question de savoir si le mot « projet », employé ailleurs dans d’autres dispositions de la Loi, devrait être interprété comme étant le projet dont la portée a été déterminée par l’AR, ou le projet que le promoteur a proposé. Autrement dit, la portée du projet proposé par le promoteur ou déterminée par l’AR a‑t‑elle un effet sur le niveau d’évaluation lui‑même?
[266]Sans répondre directement à cette question, le juge Rothstein a rejeté l’argument des demandeurs selon lequel les projets inscrits dans la LEA doivent être soumis à une EE en vertu de la LCEE; voici ce qu’il a déclaré aux paragraphes 23, 24 et 26 :
L’argument suivant que font valoir les appelants s’appuie sur le Règlement sur la liste d’étude approfondie, DORS/94‑438. Un grand nombre des projets énumérés dans ce Règlement relèvent de la compétence provinciale, le rôle du gouvernement fédéral étant limité. Néanmoins, les appelants plaident que les projets énumérés dans ce Règlement doivent être assujettis à une évaluation environnementale en vertu de la LCEE.
L’objet de ce Règlement, semble‑t‑il, est d’établir que dans les cas d’un projet figurant sur la liste dont la portée est définie en vertu du paragraphe 15(1), une étude approfondie est exigée à l’égard du projet plutôt qu’un examen préalable. Mais le Règlement ne vise pas à imposer à une autorité responsable qui exerce son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 15(1) de la LCEE l’obligation de définir la portée d’un ouvrage ou d’une activité du seul fait qu’ils figurent sur la liste du Règlement. En l’espèce, l’entreprise de sables bitumineux relève de la compétence provinciale. Le Règlement sur la liste d’étude approfondie n’a pas pour objet d’assujettir à une évaluation environnementale fédérale des entreprises non assujetties à la compétence fédérale. Le Règlement n’est pas non plus mis en jeu en raison d’un motif étroit de compétence fédérale, en l’occurrence le paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches. Voir l’arrêt Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3, aux pages 71 et 72.
[. . .]
Les appelants peuvent déplorer qu’une province effectue une évaluation environnementale, mais le domaine de l’environnement ne tombe pas sous la compétence législative exclusive du Parlement du Canada. Les limitations constitutionnelles doivent être respectées et c’est ce qui est arrivé en l’espèce. [Non souligné dans l’original.]
[267]En fait, dans TrueNorth, le juge Rothstein a déclaré ce qui suit [au paragraphe 47] :
En l’espèce, les autorités de la province de l’Alberta effectuaient une évaluation environnementale. Il serait inefficient de réaliser deux évaluations. Il était donc à la fois approprié sur le plan de la loi et efficient sur le plan de la politique pour le MPO de s’en remettre à l’évaluation environnementale réalisée par l’Alberta.
[268]Selon moi, ces passages signifient que le simple fait qu’une entreprise particulière semble tomber sous le coup de la LEA ne veut pas dire qu’il est nécessaire de procéder à une EE en vertu de l’article 5 de la LCEE. Il faut toujours qu’il y ait un déclencheur fédéral. Cependant, je ne suis pas sûr que le juge Rothstein voulait dire par cela qu’une AR pouvait invoquer l’article 15 pour rejeter l’application de l’ancien article 21 quand il avait déjà été décidé qu’une évaluation conjointe du projet proposé par un promoteur, comme c’est le cas en l’espèce, serait effectuée par les autorités provinciales et fédérales. En l’espèce, il a d’abord été annoncé par l’AR au printemps 2004 et, par la suite, reconnu par le BCEAO que le projet serait évalué conjointement sous la forme d’une étude approfondie et, à cet égard, une ébauche de plan de travail a été établie conjointement au cours de l’automne de 2004, conformément à l’Entente (voir le paragraphe 58 qui précède).
[269]L’autorisation d’interjeter appel devant la Cour suprême du Canada du jugement de la Cour d’appel dans l’affaire TrueNorth a été rejetée sans motif le 20 juillet 2006 [[2006] S.C.C.A. no 197 (QL)].
D. La décision prise sur la voie à suivre est susceptible de contrôle
[270]En mai 2004, au vu des renseignements que RCDC avait fournis, l’avis de lancement inscrit au registre a annoncé qu’une étude approfondie débutant le 19 mai 2004 serait menée en rapport avec le projet. Il ressort clairement de la correspondance et de divers documents émanant du MPO et de l’Agence que même si le MPO n’avait pas encore officiellement déterminé la portée du projet pour les besoins de l’étude approfondie, les AR consulteraient le public sur la portée proposée du projet ainsi que sur d’autres aspects mentionnés à l’article 21 de la LCEE (voir l’avis du MPO aux autorités fédérales, le dossier d’information et l’ébauche de plan de travail).
[271]Comme il est indiqué dans le dossier d’information adressé au ministre de l’Environnement en juillet 2004, la décision au sujet du processus que le MPO a prise en mai 2004 concordait à la fois avec le régime de la LCEE et avec les modifications apportées par le projet de loi C‑9, qui obligent maintenant les AR à consulter le public sur l’approche qu’elles se proposent de suivre, à rendre compte de cette consultation au ministre de l’Environnement et à recommander à ce dernier s’il faut poursuivre l’EE au moyen d’une étude approfondie ou si le projet doit être renvoyé à un médiateur ou à une commission.
[272]La décision prise en décembre 2004 de changer subitement de processus semble avoir été basée sur de « nouvelles » données halieutiques inexistantes. Cela contraste nettement avec la décision prise en janvier 2005 de procéder à une étude approfondie, débutant le 22 janvier 2005, sur la mine d’or‑argent‑cuivre de Galore Creek, pour laquelle l’Agence avait établi à l’intention des participants un programme de financement de 50 000 $ afin d’aider des groupes ou des particuliers à prendre part à l’EE fédérale du projet proposé, qui excédait les seuils de production indiqués aux alinéas 16a), b) et c) de [l’annexe] du Règlement. LEA. En fait, le grand public avait été invité par la suite à commenter la portée du projet ainsi que celle des éléments contenus dans le document intitulé « Comprehensive Study Scoping Document for the NovaGold Canada Inc. Proposed Galore-Creek Gold‑Silver‑Copper Mine Project in North‑Western British Columbia », daté du 30 novembre 2005.
[273]La question qui est véritablement en litige en l’espèce est celle de savoir si les AR peuvent légalement refuser de procéder à une étude approfondie parce que le projet, tel qu’elles l’ont redéfini, n’englobe plus une mine et une installation de concentration.
[274]Dans l’ensemble, les articles 2, 5, 13, 14, 15, 16 et 18, ainsi que le nouvel article 21 de la LCEE, pris comme un tout et gardant à l’esprit l’objet de la LCEE et l’intention du législateur, étayent la thèse principale de la demanderesse : quand un projet est décrit dans la LEA, l’AR doit maintenant veiller à la tenue d’une consultation sur les propositions relatives à la portée du projet en matière d’évaluation environnementale, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation, et à la portée de ces éléments ainsi que la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet.
[275]Le paragraphe 21(1) de la LCEE revêt, en l’espèce, une importance particulière. Son texte est le suivant :
21. (1) Dans le cas où le projet est visé dans la liste d’étude approfondie, l’autorité responsable veille à la tenue d’une consultation publique sur les propositions relatives à la portée du projet en matière d’évaluation environnementale, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation et à la portée de ces éléments ainsi que sur la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet. [Non souligné dans l’original.]
[276]Par comparaison, l’ancienne version de l’article 21, que le projet de loi C‑9 a abrogé, était libellée comme suit :
21. Dans le cas où le projet est visé dans la liste d’étude approfondie, l’autorité responsable a le choix :
a) de veiller à ce que soit effectuée une étude approfondie et à ce que soit présenté au ministre et à l’Agence un rapport de cette étude;
b) de s’adresser au ministre afin qu’il fasse effectuer, aux termes de l’article 29, une médiation ou un examen par une commission. [Non souligné dans l’original.]
[277]Bien que je n’aie pas à recourir aux lignes directrices, je suis conforté par le fait que mon interprétation est compatible avec ces dernières. Je signale que, selon les lignes directrices, les projets de grande envergure qui sont susceptibles d’avoir des effets environnementaux importants indiqués dans la LEA, comme les terminaux maritimes, les routes, les pistes d’atterrissage, les centrales électriques, les barrages et les réservoirs, les îles artificielles servant à la production de pétrole et de gaz, les installations de traitement des sables bitumineux et les mines d’extraction connexes, les raffineries de pétrole, les oléoducs et les gazoducs, les mines de métal et d’uranium, les usines de pâte à papiers et papiers, de même que certaines constructions militaires, seront habituellement soumis à une évaluation rigoureuse d’une « étude approfondie ».
[278]Bien que ces lignes directrices ne soient pas légalement exécutoires—ce qui compte ce sont les dispositions législatives et réglementaires existantes applicables—elles dénotent fortement que le projet dont il est question en l’espèce est l’un de ces projets à grande échelle auxquels le Cabinet voulait faire subir l’évaluation rigoureuse d’une étude approfondie. Je doute fort que l’intention du Cabinet, en ajoutant à la LEA les projets miniers excédant l’un quelconque des seuils mentionnés aux articles 16, 17 et 18 [de l’annexe] du Règlement LEA, était de limiter la portée d’une évaluation dite « par étude approfondie » aux mines situées sur des terres de la Couronne ou exploitées par une autorité fédérale.
[279]Selon le libellé original de l’alinéa 59d) de la LCEE, entré en vigueur le 19 janvier 1995, le Parlement réservait entièrement au Cabinet le pouvoir discrétionnaire de décider quels projets décrire dans la LEA. Il faut présumer que cela ne voulait pas dire le projet « défini » par l’AR, sans quoi l’exercice du pouvoir discrétionnaire absolu du Cabinet serait futile et inutile. Le Cabinet a exercé ce pouvoir discrétionnaire en édictant et en modifiant à l’occasion le Règlement LEA. Selon mon interprétation de la LEA, de la LE et de la LI, les projets mentionnés dans ces règlements font référence au projet décrit par un promoteur.
[280]En outre, depuis les modifications apportées par le projet de loi C‑9 en octobre 2003, le Parlement a transféré le pouvoir d’ajouter un projet à la LEA, du Cabinet au ministre de l’Environnement (les modifications apportées au projet de loi C‑9, précitées, au paragraphe 29(2.1)). L’alinéa 58(1)i) [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 28] de la version modifiée de la LCEE (la version, il est utile de le répéter, qui s’applique à la présente espèce), prescrit maintenant que le ministre de l’Environnement peut « prendre des règlements désignant des projets ou des catégories de projets pour lesquels une étude approfondie est obligatoire, s’il est convaincu que ceux‑ci sont susceptibles d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants ».
[281]La corollaire est également vraie : si le ministre ne souhaite pas que des projets miniers, comme celui dont il est question en l’espèce, soient considérés, pour les besoins d’une EE, comme exigeant la tenue d’une étude approfondie, il peut simplement supprimer ces derniers de la LEA actuelle. À mon avis, cette modification législative est importante car, advenant que le gouvernement décide que des projets ont été soit omis soit inclus à tort dans la LEA, elle offre un moyen encore plus facile de rectifier cet oubli.
[282]Comme il est indiqué dans le préambule de la LCEE, une EE est un instrument utile pour atteindre l’objectif du développement durable en offrant « un outil efficace pour la prise en compte des facteurs environnementaux dans les processus de planification et de décision ».
[283]Je ne suis pas convaincu qu’une fois qu’une consultation publique est exigée par l’article 21 de la LCEE, il soit possible d’éviter entièrement ce processus en restreignant la portée du projet de façon à le ramener au niveau d’un examen préalable. Une fois qu’un projet a été inclus dans la LEA, l’article 21.1 accorde au ministre de l’Environnement le pouvoir discrétionnaire de poursuivre l’étude approfondie ou alors de renvoyer le projet à un médiateur ou à une commission, conformément à l’article 29 [mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 14]. Le régime législatif permet donc seulement au ministre de l’Environnement de maintenir une étude approfondie ou de la faire passer à un processus plus approfondi. Aucune disposition de la LCEE n’habilite le ministre de l’Environnement à déclasser une étude approfondie en la transformant en un examen préalable. De la même façon et surtout pour la présente espèce, aucune disposition de la LCEE n’habilite une autorité responsable à déclasser une étude approfondie en la transformant en un examen préalable.
[284]Je suis d’avis qu’une fois qu’une décision sur le processus a été prise, soumettant le projet à une étude approfondie, les AR n’avaient pas le pouvoir discrétionnaire de changer la portée du projet de façon à éviter ce qu’implique l’article 21 sur le plan de la consultation publique. Leur permettre de le faire reviendrait à violer non seulement le sens ordinaire de la législation en question, mais aussi l’esprit du régime législatif tout entier, tel que modifié, qui est conçu pour favoriser la participation du public aux projets qui peuvent comporter d’importantes répercussions environnementales.
[285]L’avocat du promoteur affirme que la présente affaire est quasi identique à TrueNorth, en ce sens que :
· TrueNorth proposait d’exploiter une mine d’extraction de sables bitumineux;
· le projet tout entier a été l’objet d’une évaluation environnementale provinciale complète;
· considérée globalement, la mine comprenait une installation de transformation dotée d’une capacité de 30 000 m3/jour et une mine d’une capacité de 15 000 m3/jour, ce qui signifiait qu’elle était décrite dans la liste d’étude approfondie;
· la seule autorisation fédérale qui concernait le projet était celle accordée en vertu de la Loi sur les pêches pour éviter la détérioration de l’habitat du poisson;
· l’AR (le MPO) a décidé en vertu du paragraphe 15(1) de la LCEE que la portée du projet qui était assujettie à une évaluation environnementale fédérale était la destruction du Fort Creek ainsi que les ouvrages et les activités auxiliaires.
[286]Tout d’abord, il est de droit constant que la présente Cour est liée par le jugement de la Cour d’appel fédérale dans TrueNorth. Je suis d’accord avec le promoteur qu’il y a des similitudes entre les deux causes, mais il omet de signaler quelques différences de fait qui, selon moi, limitent l’applicabilité de ce jugement à la présente affaire :
· Dans TrueNorth, les demandeurs sollicitaient le contrôle judiciaire d’une décision relative à la détermination de la portée d’un projet, prise en vertu de l’article 15 de la LCEE. En l’espèce, la demanderesse allègue un manquement à l’obligation de veiller à tenir une consultation publique, conformément à l’article 21 de la LCEE, lequel manquement s’est soldé par la communication du rapport relatif à la décision sur la voie à suivre, et dont la légalité doit être examinée à la lumière du contexte factuel de l’espèce.
· Dans TrueNorth, aucune preuve n’indique que les autorités responsables ont initialement décidé que le projet devait être soumis au processus d’une étude approfondie, pour ensuite modifier la décision à une date ultérieure. En fait, dans TrueNorth, la preuve soumise à la présente Cour ainsi qu’à la Cour d’appel fédérale était qu’il avait toujours été entendu que le projet serait soumis à un examen préalable et non à une étude approfondie. Là encore, cela m’indique qu’il faudrait appliquer avec prudence la décision TrueNorth, et uniquement dans la mesure où les faits de la présente espèce coïncident directement avec ceux de cette affaire.
· Dans TrueNorth, le promoteur ne prévoyait pas construire un DRM.
· Dans TrueNorth, il n’y avait pas de fabrique d’explosifs ou de poudrière. Non seulement faut‑il que le ministre des Ressources naturelles délivre un permis fédéral en vertu de la Loi sur les explosifs, mais la fabrique d’explosifs et la poudrière seront bâties sur le site de la mine. En fait, les installations doivent être situées à environ 400 ou 450 mètres de distance et à 450 ou 500 mètres au nord de l’extrémité de la zone de stockage des déchets de roche.
· Les activités concrètes qui se rapportent à l’exécution du projet vont au‑delà de la détérioration, de la destruction ou de la perturbation (DDP) de l’habitat du poisson, mais envisagent le rejet d’une substance nocive (des résidus) dans un DRM qui est également inclus dans le projet « défini » par les AR.
· Les résidus en question sont produits par les activités concrètes menées sur le site de la mine. Les métaux proviendront des opérations de concentration ainsi que des eaux de ruissellement et des eaux souterraines qui s’écoulent par la zone de déchets nord ainsi qu’à travers la roche exposée dans les parois de la mine à ciel ouvert.
[287]Deuxièmement, étant donné que la majeure partie de l’analyse que la Cour d’appel fédérale a faite dans l’arrêt TrueNorth était axée sur l’article 15 de la LCEE, je conclus qu’elle est d’une applicabilité restreinte à une affaire, telle que la présente, où une analyse de l’article 21, dans son libellé depuis l’entrée en vigueur des modifications apportées par le projet de loi C‑9, revêt une importance cruciale pour le règlement des questions que la demanderesse a soulevées. À la suite d’une lecture attentive de l’arrêt de la Cour d’appel fédérale, je signale que pas une seule fois il n’y est fait expressément mention de l’ancien article 21, encore qu’aux paragraphes 23 et 24 de cet arrêt, la Cour rejette l’argument des appelantes selon lequel les projets énumérés dans la LEA doivent être soumis à une EE en vertu de l’article 5 de la LCEE.
[288]Troisièmement, et fait peut‑être encore plus révélateur, même si la décision TrueNorth a été rendue par la présente Cour en septembre 2004, elle était fondée sur l’ancien article 21, où il n’était pas question de « propositions relatives à la portée » d’un projet. Comme il a été mentionné plus tôt, la LCEE a été modifiée en octobre 2003. Toutes les parties conviennent, et je souscris à leur opinion, que seule la nouvelle version de la LCEE s’applique dans le cas présent. Même dans la décision que la présente Cour a rendue dans TrueNorth, je ne trouve pas que l’on a analysé de manière rigoureuse l’ancien article 21. En fait, l’ancien article 21 semble faire référence au projet « inscrit » dans la LEA et non au projet « défini » en vertu de l’article 15. Je ne crois donc pas être lié par la décision TrueNorth, dans la mesure où celle‑ci tranchait des questions qui se situaient en dehors du contexte particulier des articles 5 et 15.
[289]Il vaut la peine de souligner brièvement quelques‑unes des différences qui existent entre l’ancienne version et la version modifiée de l’article 21 afin de faire ressortir pourquoi je suis d’avis que la décision TrueNorth s’applique de manière restreinte à la présente espèce. Premièrement, l’ancien article 21 de la LCEE ne faisait pas en sorte que la consultation publique soit obligatoire, contrairement à la version actuellement en vigueur. En outre, il est clair que les mots « propositions relatives à la portée », qui ont été ajoutés au nouvel article 21, prescrivent que la consultation publique doit avoir lieu avant la décision relative à la détermination de la portée du projet. Enfin, en vertu de la nouvelle LCEE, une fois qu’un « projet » qui a été proposé est inscrit dans la LEA, l’évaluation environnementale doit se faire par la voie d’une étude approfondie.
[290]Je suis donc d’avis que l’arrêt TrueNorth de la Cour d’appel fédérale dit le droit pour ce qui est des décisions relatives à la portée d’un projet qui sont prises en vertu de l’article 15, si une telle EE a été entreprise avant le mois d’octobre 2003. Je ne suis toutefois pas d’avis que cette décision s’applique aux évaluations commencées après octobre 2003, sous le régime de l’article 21 de la LCEE.
[291]Je ne considère donc pas que le pouvoir discrétionnaire d’établir la portée d’un projet en vertu de l’article 15 de la LCEE est le « pouvoir discrétionnaire entier » qu’allèguent les défendeurs. En fait, les AR sont liées procéduralement par les exigences du nouvel article 21 de la LCEE, de sorte que si le projet proposé par un promoteur figure sur la liste d’étude approfondie, il est obligatoire de consulter le public, en présumant qu’il y a un déclencheur visé à l’article 5. Après les consultations publiques, l’exercice de détermination de la portée du projet fixera les paramètres de l’étude approfondie et servira de fondement à la conception des études qui pourront être nécessaires, au cas par cas.
[292]La Cour ne saisit pas tout à fait pourquoi, une fois qu’il a été décidé que le projet, décrit par RCDC était inclus dans la LEA, il a plus tard été décidé de déclasser au niveau d’un examen préalable le degré d’évaluation requis. À cet effet, la seule personne à présenter un affidavit pour le compte de la Couronne était au service du MPO à titre de gestionnaire intérimaire de l’Unité d’examen des grands projets, pour la région du Pacifique, entre les mois de février et d’août 2005.
[293]L’auteur de cet affidavit n’a participé au projet que pendant une période de six mois, sur une période approximative de 24 mois d’évaluation environnementale et, fait intéressant, il n’a pas participé au projet pendant la période en question, lorsque la décision de changer de niveau d’évaluation a été prise, en décembre 2004. Néanmoins, selon le contre‑interrogatoire de cette personne sur son affidavit, celle‑ci était au courant que le projet ne serait plus évalué par la voie d’une étude approfondie dès les premières semaines qui ont suivi son entrée en fonction à titre de gestionnaire intérimaire.
[294]Le projet est actuellement fondé sur le taux de production de 30 000 tonnes de minerai par jour en vue de la vente sur le marché d’exportation, pendant une durée prévue de 25 ans. Il n’est pas nécessaire que je fonde ma décision sur le fait que la nouvelle détermination de la portée du projet présente tous les signes d’une décision arbitraire et abusive, prise à une fin irrégulière. Il suffit de déclarer que le MPO a décidé avec raison, dans la décision initiale de mai 2004 au sujet du processus, que le projet aurait besoin d’un examen de niveau « étude approfondie » sur la base d’une capacité proposée de production de minerai pouvant atteindre 50 000 tonnes par jour, ce qui excède le seuil de 600 tonnes par jour fixé à l’alinéa 16c) [de l’annexe] du Règlement LEA. Compte tenu de cette conclusion, il n’est pas nécessaire de décider si la construction, la désaffectation ou la fermeture proposées de la mine d’or‑cuivre porphyrique Red Chris tombe également sous le coup de l’alinéa 16a) [de l’annexe] du Règlement LEA car il s’agit d’une mine métallifère, autre qu’une mine d’or, d’une capacité de production de minerai de 3 000 tonnes par jour ou plus.
[295]Par conséquent, en ne tenant pas compte des conditions mentionnées à l’article 21 de la LCEE, tel que modifié en 2003, sous le couvert de la décision de reformuler la portée du projet, les AR ont excédé les pouvoirs que leur confère la loi. Selon moi, les AR ont donc commis une erreur susceptible de contrôle, erreur qui s’est soldée par la communication de la décision sur la voie à suivre, en décidant de renoncer au processus de consultation publique auquel le projet devait, de par la loi, être soumis en vertu du paragraphe 21(1) de la LCEE. Cela ne veut pas dire que les AR n’ont pas le pouvoir discrétionnaire de modifier la portée des projets. Au contraire, une telle décision serait absurde, compte tenu du libellé du paragraphe 15(1), qui confère clairement ce pouvoir discrétionnaire à l’autorité responsable. En outre, une telle décision irait à l’encontre de la jurisprudence (voir la section C. La jurisprudence, ci‑haut), qui souligne que l’article 15 de la LCEE accorde aux AR le vaste pouvoir de délimiter la portée des projets de la manière qu’elles jugent appropriée, au cas par cas.
[296]Les AR étaient au courant, pendant toute la période en cause, des conséquences qu’il y avait à déclasser le projet du niveau « étude approfondie » au niveau « examen préalable ». Selon la preuve au dossier, les AR étaient bien au fait que des groupes environnementaux, dont la demanderesse, seraient mécontents de la décision de déclasser le projet. Dans le même ordre d’idées, les AR savaient que le ministre de l’Environnement n’aurait plus aucun pouvoir décisionnel sur le projet et que, par suite de la décision de déclasser ce dernier, le grand public n’aurait pas la possibilité de présenter des observations sur les propositions relatives à la portée du projet, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation de ce dernier, à la portée de ces éléments ainsi qu’à la question de savoir si l’étude approfondie permettait l’examen des questions soulevées par le projet.
[297]L’annulation de la décision sur la voie à suivre respecte donc un objet fondamental de la LCEE, à savoir que la participation du public est conçue pour améliorer la qualité d’une EE et en influencer l’issue. La consultation publique sur les paramètres mentionnés à l’article 21 de la LCEE, dans sa forme actuelle depuis les modifications apportées par le projet de loi C‑9, améliore sans nul doute le processus d’EE et le processus décisionnel.
[298]Il me faut prendre en compte que les AR n’ont tenu aucune consultation publique avant de se prononcer sur l’ébauche de rapport d’examen préalable. Je suis conscient que le public a été invité à présenter des observations au cours de la période de 65 jours mentionnée dans l’avis provincial, mais cela concernait exclusivement le processus provincial d’EE. Là encore, compte tenu des circonstances particulières et fort inusitées de la présente affaire, lesquelles ont été exposées plus tôt de manière très détaillée (IV—Le contexte factuel), je conclus qu’une intervention judiciaire est à la fois nécessaire et dans l’intérêt du public.
[299]Dans l’affaire Friends of the Oldman River Society, précité, à l’époque où la demande a été instruite le barrage en litige était terminé à 40 pour cent. Au moment où l’appel a été entendu en Cour suprême, il était presque entièrement terminé. Malgré ces faits, la Cour suprême a rejeté les arguments des défendeurs selon lesquels il serait vain d’accorder une réparation extraordinaire.
[300]Les faits dont il est question en l’espèce sont plus propices à une réparation, car les travaux de construction relatifs au projet n’ont pas encore commencé. Une étude approfondie comportera une participation du public, d’autres questions visées à l’article 16 [de la LCEE] ainsi qu’un suivi obligatoire, et l’on ne peut pas dire que cela soit vain.
IX—DISPOSITIF
[301]Ayant pris en considération les circonstances particulières de l’espèce, la conduite des parties et les observations des avocats, je suis convaincu qu’il convient d’accorder un redressement dans le cadre de l’exercice des pouvoirs de réparation que les articles 18 et 18.1 de la LCF accordent à la Cour.
[302]Par conséquent, la présente demande sera accueillie et la Cour rendra une ordonnance :
a) déclarant que le MPO a décidé avec raison, dans la décision initiale sur le processus, datée de mai 2004, que le projet nécessiterait un examen de niveau « étude approfondie », sur la base d’une capacité de production de minerai proposée pouvant atteindre 50 000 tonnes par jour, ce qui excède le seuil de 600 tonnes par jour fixé à l’alinéa 16c) [de l’annexe] du Règlement LEA. Par conséquent, en ne tenant pas compte des exigences mentionnées à l’article 21 de la LCEE, tel que modifié en 2003, sous le couvert d’une décision visant à modifier la portée du projet, les AR ont excédé les pouvoirs que la loi leur confère;
b) annulant la décision sur la voie à suivre;
c) déclarant que les AR sont légalement tenues, par le paragraphe 21(1) de la LCEE, tel que modifié en 2003, de veiller à la tenue d’une consultation publique sur les propositions relatives à la portée du projet, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation et à la portée de ces éléments, ainsi que sur la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet;
d) interdisant l’exercice de tout pouvoir prévu à l’alinéa 5(1)d) ou au paragraphe 5(2) de la LCEE qui permettrait de mettre en œuvre le projet en tout ou en partie, et ce, jusqu’à ce que les AR aient pris une mesure conformément à l’article 37 de la LCEE, dans le cadre de leur obligation de soumettre le projet à une EE prévue à l’article 13 de la LCEE;
e) réservant le plein pouvoir discrétionnaire de la Cour d’établir le montant, d’adjuger les dépens et de décider qui les acquittera, en attendant d’avoir reçu et examiné les arguments des parties quant aux dépens.
[303]En outre, à moins d’une indication contraire de la Cour, les arguments relatifs aux dépens seront présentés par écrit et adressés au greffier de la Cour selon l’échéancier suivant :
a) les arguments de la demanderesse : le 9 octobre 2007;
b) les arguments des défendeurs : le 23 octobre 2007;
c) la réponse de la demanderesse : le 30 octobre 2007.
ORDONNANCE
LA PRÉSENTE COUR ORDONNE ET DÉCLARE ce qui suit :
1. La présente demande est accueillie;
2. Le MPO a décidé avec raison, dans la décision initiale sur le processus datée de mai 2004, que le projet nécessiterait un examen de niveau « étude approfondie », sur la base d’une capacité de production de minerai proposée pouvant atteindre 50 000 tonnes par jour, ce qui excède le seuil de 600 tonnes par jour qui est fixé à l’alinéa 16c) [de l’annexe] du Règlement LEA. Par conséquent, en ne tenant pas compte des exigences mentionnées à l’article 21 de la LCEE, tel que modifié en 2003, sous le couvert d’une décision visant à reformuler la portée du projet, les AR ont excédé les pouvoirs que la loi leur confère;
3. La décision sur la voie à suivre est annulée;
4. Les AR sont légalement tenues, par le paragraphe 21(1) de la LCEE, tel que modifié en 2003, de veiller à la tenue d’une consultation publique sur les propositions relatives à la portée du projet, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation et à la portée de ces éléments, ainsi que sur la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet;
5. L’exercice de tout pouvoir prévu à l’alinéa 5(1)d) ou au paragraphe 5(2) de la LCEE qui permettrait de mettre en œuvre le projet en tout ou en partie est interdit jusqu’à ce que les AR aient pris une mesure conformément à l’article 37 de la LCEE, dans le cadre de leur obligation de soumettre le projet à une EE prévue à l’article 13 de la LCEE;
6. La Cour se réserve le plein pouvoir discrétionnaire d’établir le montant, et d’adjuger les dépens et de décider qui les acquittera, en attendant d’avoir reçu et examiné les arguments des parties quant aux dépens.
7. À moins d’une indication contraire de la Cour, les arguments relatifs aux dépens seront présentés par écrit et adressés au greffier de la Cour selon l’échéancier suivant :
a) les arguments de la demanderesse : le 9 octobre 2007;
b) les arguments des défendeurs : le 23 octobre 2007;
c) la réponse de la demanderesse : le 30 octobre 2007.
APPENDIX “A”
ANNEXE « A »
.
Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, L.C. 1992, ch. 37, et modifications [art. 2(1) « autorité fédérale » (mod. par L.C. 2003, ch. 9, art. 1), « étude approfondie » (mod., idem), « liste d’exclusion » (mod., idem), 4(1) (mod. par L.C. 1994, ch. 46, art. 1; 2003, ch. 9, art. 2), 16.1 (édicté par L.C. 2003, ch. 9, art. 8), 16.2 (édicté, idem), 16.3 (édicté, idem) L.C. 2003, ch. 9.
2. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.
[. . .]
“comprehensive study” means an environmental assessment that is conducted pursuant to sections 21 and 21.1, and that includes a consideration of the factors required to be considered pursuant to subsections 16(1) and (2);
…
“comprehensive study list” means a list of all projects or classes of projects that have been prescribed pursuant to regulations made under paragraph 59(d);
…
“exclusion list” means a list of projects or classes of projects that have been exempted from the requirement to conduct an assessment by regulations made under paragraph 59(c) or (c.1);
…
(a) a Minister of the Crown in right of Canada,
(b) an agency of the Government of Canada, a parent Crown corporation, as defined in subsection 83(1) of the Financial Administration Act, or any other body established by or pursuant to an Act of Parliament that is ultimately accountable through a Minister of the Crown in right of Canada to Parliament for the conduct of its affairs,
(c) any department or departmental corporation set out in Schedule I or II to the Financial Administration Act, and
(d) any other body that is prescribed pursuant to regulations made under paragraph 59(e),
but does not include the Executive Council of—or a minister, department, agency or body of the government of—Yukon, the Northwest Territories or Nunavut, a council of the band within the meaning of the Indian Act, Export Development Canada, the Canada Pension Plan Investment Board, a Crown corporation that is a wholly‑owned subsidiary, as defined in subsection 83(1) of the Financial Administration Act, The Hamilton Harbour Commissioners as constituted pursuant to The Hamilton Harbour Commissioners’ Act, a harbour commission established pursuant to the Harbour Commissions Act, a not‑for‑profit corporation that enters into an agreement under subsection 80(5) of the Canada Marine Act or a port authority established under that Act;
“interested party” means, in respect of an environmental assessment, any person or body having an interest in the outcome of the environmental assessment for a purpose that is neither frivolous nor vexatious;
…
“project” means
(b) any proposed physical activity not relating to a physical work that is prescribed or is within a class of physical activities that is prescribed pursuant to regulations made under paragraph 59(b);
“responsible authority”, in relation to a project, means a federal authority that is required pursuant to subsection 11(1) to ensure that an environmental assessment of the project is conducted;
“screening” means an environmental assessment that is conducted pursuant to section 18 and that includes a consideration of the factors set out in subsection 16(1);
“screening report” means a report that summarizes the results of a screening;
…
« autorité fédérale »
a) Ministre fédéral;
b) agence fédérale, société d’État mère au sens du paragraphe 83(1) de la Loi sur la gestion des finances publiques ou autre organisme constitué sous le régime d’une loi fédérale et tenu de rendre compte au Parlement de ses activités par l’intermédiaire d’un ministre fédéral;
c) ministère ou établissement public mentionnés aux annexes I et II de la Loi sur la gestion des finances publiques;
d) tout autre organisme désigné par les règlements d’application de l’alinéa 59e).
Sont exclus le conseil exécutif et les ministres du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, ainsi que les ministères et les organismes de l’administration publique de ces territoires, tout conseil de bande au sens donné à « conseil de la bande » dans la Loi sur les Indiens, Exportation et développement Canada, l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada, les sociétés d’État qui sont des filiales à cent pour cent au sens du paragraphe 83(1) de la Loi sur la gestion des finances publiques, les commissions portuaires constituées par la Loi sur les commissions portuaires, les commissaires nommés en vertu de la Loi des commissaires du havre de Hamilton, la société sans but lucratif qui a conclu une entente en vertu du paragraphe 80(5) de la Loi maritime du Canada et les administrations portuaires constituées sous le régime de cette loi.
[. . .]
« autorité responsable » L’autorité fédérale qui, en conformité avec le paragraphe 11(1), est tenue de veiller à ce qu’il soit procédé à l’évaluation environnementale d’un projet.
[. . .]
« étude approfondie » Évaluation environnementale d’un projet effectuée aux termes des articles 21 et 21.1 et qui comprend la prise en compte des éléments énumérés aux paragraphes 16(1) et (2).
« examen préalable » Évaluation environnementale qui, à la fois :
a) est effectuée de la façon prévue à l’article 18;
b) prend en compte les éléments énumérés au paragraphe 16(1).
« liste d’étude approfondie » Liste des projets ou catégories de projets désignés par règlement aux termes de l’alinéa 59d).
« liste d’exclusion » Liste des projets ou catégories de projets soustraits à l’évaluation par règlement pris en vertu des alinéas 59c) ou c.1).
[. . .]
« partie intéressée » Toute personne ou tout organisme pour qui le résultat de l’évaluation environnementale revêt un intérêt qui ne soit ni frivole ni vexatoire.
[. . .]
« projet » Réalisation—y compris l’exploitation, la modification, la désaffectation ou la fermeture—d’un ouvrage ou proposition d’exercice d’une activité concrète, non liée à un ouvrage, désignée par règlement ou faisant partie d’une catégorie d’activités concrètes désignée par règlement aux termes de l’alinéa 59b).
[. . .]
« rapport d’examen préalable » Rapport des résultats d’un examen préalable.
[. . .]
4. (1) La présente loi a pour objet :
a) de veiller à ce que les projets soient étudiés avec soin et prudence avant que les autorités fédérales prennent des mesures à leur égard, afin qu’ils n’entraînent pas d’effets environnementaux négatifs importants;
b) d’inciter ces autorités à favoriser un développement durable propice à la salubrité de l’environnement et à la santé de l’économie;
b.1) de faire en sorte que les autorités responsables s’acquittent de leurs obligations afin d’éviter tout double emploi dans le processus d’évaluation environnementale;
b.2) de promouvoir la collaboration des gouvernements fédéral et provinciaux, et la coordination de leurs activités, dans le cadre du processus d’évaluation environnementale de projets;
b.3) de promouvoir la communication et la collaboration entre les autorités responsables et les peuples autochtones en matière d’évaluation environnementale;
c) de faire en sorte que les éventuels effets environnementaux négatifs importants des projets devant être réalisés dans les limites du Canada ou du territoire domanial ne débordent pas ces limites;
d) de veiller à ce que le public ait la possibilité de participer de façon significative et en temps opportun au processus de l’évaluation environnementale.
[. . .]
5. (1) L’évaluation environnementale d’un projet est effectuée avant l’exercice d’une des attributions suivantes :
a) une autorité fédérale en est le promoteur et le met en œuvre en tout ou en partie;
b) une autorité fédérale accorde à un promoteur en vue de l’aider à mettre en œuvre le projet en tout ou en partie un financement, une garantie d’emprunt ou toute autre aide financière, sauf si l’aide financière est accordée sous forme d’allègement—notamment réduction, évitement, report, remboursement, annulation ou remise—d’une taxe ou d’un impôt qui est prévu sous le régime d’une loi fédérale, à moins que cette aide soit accordée en vue de permettre la mise en œuvre d’un projet particulier spécifié nommément dans la loi, le règlement ou le décret prévoyant l’allègement;
c) une autorité fédérale administre le territoire domanial et en autorise la cession, notamment par vente ou cession à bail, ou celle de tout droit foncier relatif à celui‑ci ou en transfère à Sa Majesté du chef d’une province l’administration et le contrôle, en vue de la mise en œuvre du projet en tout ou en partie;
d) une autorité fédérale, aux termes d’une disposition prévue par règlement pris en vertu de l’alinéa 59f), délivre un permis ou une licence, donne toute autorisation ou prend toute mesure en vue de permettre la mise en œuvre du projet en tout ou en partie.
(2) Par dérogation à toute autre disposition de la présente loi :
a) l’évaluation environnementale d’un projet est obligatoire, avant que le gouverneur en conseil, en vertu d’une disposition désignée par règlement aux termes de l’alinéa 59g), prenne une mesure, notamment délivre un permis ou une licence ou accorde une approbation, autorisant la réalisation du projet en tout ou en partie;
b) l’autorité fédérale qui, directement ou par l’intermédiaire d’un ministre fédéral, recommande au gouverneur en conseil la prise d’une mesure visée à l’alinéa a) à l’égard du projet :
(i) est tenue de veiller à ce que l’évaluation environnementale du projet soit effectuée le plus tôt possible au stade de la planification de celui‑ci, avant la prise d’une décision irrévocable,
(ii) est l’autorité responsable à l’égard du projet pour l’application de la présente loi—à l’exception du paragraphe 11(2) et des articles 20 et 37—et de ses règlements,
(iii) est tenue de prendre en compte les rapports et observations pertinents visés aux articles 20 et 37,
(iv) le cas échéant, est tenue d’exercer à l’égard du projet les attributions de l’autorité responsable prévues à l’article 38 comme si celle‑ci était l’autorité responsable à l’égard du projet pour l’application des alinéas 20(1)a) et 37(1)a).
[. . .]
13. Dans le cas où un projet appartient à une catégorie visée dans la liste d’étude approfondie, ou si un examen par une commission ou un médiateur doit être effectué, malgré toute autre loi fédérale, l’exercice d’une attribution qui est prévu par cette loi ou ses règlements pour mettre en œuvre le projet en tout ou en partie est subordonné à l’achèvement de l’évaluation environnementale de celui‑ci et à la prise d’une décision à son égard aux termes de l’alinéa 37(1)a).
14. Le processus d’évaluation environnementale d’un projet comporte, selon le cas :
a) un examen préalable ou une étude approfondie et l’établissement d’un rapport d’examen préalable ou d’un rapport d’étude approfondie;
b) une médiation ou un examen par une commission prévu à l’article 29 et l’établissement d’un rapport;
c) l’élaboration et l’application d’un programme de suivi.
15. (1) L’autorité responsable ou, dans le cas où le projet est renvoyé à la médiation ou à l’examen par une commission, le ministre, après consultation de l’autorité responsable, détermine la portée du projet à l’égard duquel l’évaluation environnementale doit être effectuée.
(2) Dans le cadre d’une évaluation environnementale de deux ou plusieurs projets, l’autorité responsable ou, au moins un des projets est renvoyé à la médiation ou à l’examen par une commission, le ministre, après consultation de l’autorité responsable, peut décider que deux projets sont liés assez étroitement pour être considérés comme un seul projet.
(3) Est effectuée, dans l’un ou l’autre des cas suivants, l’évaluation environnementale de toute opération— construction, exploitation, modification, désaffectation, fermeture ou autre—constituant un projet lié à un ouvrage :
a) l’opération est proposée par le promoteur;
likely to be carried out in relation to that physical work.
b) l’autorité responsable ou, dans le cadre d’une médiation ou de l’examen par une commission et après consultation de cette autorité, le ministre estime l’opération susceptible d’être réalisée en liaison avec l’ouvrage.
16. (1) L’examen préalable, l’étude approfondie, la médiation ou l’examen par une commission d’un projet portent notamment sur les éléments suivants :
a) les effets environnementaux du projet, y compris ceux causés par les accidents ou défaillances pouvant en résulter, et les effets cumulatifs que sa réalisation, combinée à l’existence d’autres ouvrages ou à la réalisation d’autres projets ou activités, est susceptible de causer à l’environnement;
b) l’importance des effets visés à l’alinéa a);
c) les observations du public à cet égard, reçues conformément à la présente loi et aux règlements;
d) les mesures d’atténuation réalisables, sur les plans technique et économique, des effets environnementaux importants du projet;
e) tout autre élément utile à l’examen préalable, à l’étude approfondie, à la médiation ou à l’examen par une commission, notamment la nécessité du projet et ses solutions de rechange,—dont l’autorité responsable ou, sauf dans le cas d’un examen préalable, le ministre, après consultation de celle‑ci, peut exiger la prise en compte.
(2) L’étude approfondie d’un projet et l’évaluation environnementale qui fait l’objet d’une médiation ou d’un examen par une commission portent également sur les éléments suivants :
a) les raisons d’être du projet;
b) les solutions de rechange réalisables sur les plans technique et économique, et leurs effets environnementaux;
c) la nécessité d’un programme de suivi du projet, ainsi que ses modalités;
d) la capacité des ressources renouvelables, risquant d’être touchées de façon importante par le projet, de répondre aux besoins du présent et à ceux des générations futures.
(3) L’évaluation de la portée des éléments visés aux alinéas (1)a), b) et d) et (2)b), c) et d) incombe :
a) à l’autorité responsable;
b) au ministre, après consultation de l’autorité responsable, lors de la détermination du mandat du médiateur ou de la commission d’examen.
(4) L’évaluation environnementale d’un projet n’a pas à porter sur les effets environnementaux que sa réalisation peut entraîner en réaction à des situations de crise nationale pour lesquelles des mesures d’intervention sont prises aux termes de la Loi sur les mesures d’urgence.
16.1 Les connaissances des collectivités et les connaissances traditionnelles autochtones peuvent être prises en compte pour l’évaluation environnementale d’un projet.
16.2 Les résultats d’une étude des effets environ-nementaux de projets éventuels dans une région, faite hors du champ d’application de la présente loi et à laquelle une autorité fédérale a collaboré avec des instances, au sens des alinéas 12(5)a),c) ou d), peuvent être pris en compte dans l’évaluation environnementale d’un projet à réaliser dans cette région, notamment dans l’évaluation des effets cumulatifs que la réalisation du projet, combinée à celle d’autres projets ou activités déjà complétés ou à venir, est susceptible de produire sur l’environnement.
16.3 L’autorité responsable consigne et rend accessibles au public, conformément au paragraphe 55(1), les décisions qu’elle prend aux termes de l’article 20.
[. . .]
18. (1) Dans le cas où le projet n’est pas visé dans la liste d’étude approfondie ou dans la liste d’exclusion établie par règlement pris en vertu de l’alinéa 59c), l’autorité responsable veille :
a) à ce qu’en soit effectué l’examen préalable;
b) à ce que soit établi un rapport d’examen préalable.
(2) Dans le cadre de l’examen préalable qu’elle effectue, l’autorité responsable peut utiliser tous les renseignements disponibles; toutefois, si elle est d’avis qu’il n’existe pas suffisamment de renseignements pour lui permettre de prendre une décision en vertu du paragraphe 20(1), elle fait procéder aux études et à la collecte de renseignements nécessaires à cette fin.
(3) Dans les cas où elle estime que la participation du public à l’examen préalable est indiquée ou dans les cas prévus par règlement, l’autorité responsable :
a) verse au site Internet, avant de donner au public la possibilité d’examiner le rapport d’examen préalable et de faire des observations à son égard, une description de la portée du projet, des éléments à prendre en compte dans le cadre de l’examen préalable et de la portée de ceux‑ci ou une indication de la façon d’obtenir copie de cette description;
b) avant de prendre sa décision aux termes de l’article 20, donne au public la possibilité d’examiner le rapport d’examen préalable et tout document relatif au projet et de faire ses observations à leur égard et un avis suffisant de cette possibilité;
c) peut donner au public la possibilité de prendre part à toute étape de l’examen préalable qu’elle choisit.
(4) L’exercice du pouvoir discrétionnaire dont dispose l’autorité responsable, dans le cadre du paragraphe (3), de déterminer à quel moment peut se faire la participation du public est assujetti à toute décision pouvant être prise par le coordonnateur fédéral de l’évaluation environnementale en vertu de l’alinéa 12.3c).
[. . .]
20. (1) L’autorité responsable prend l’une des mesures suivantes, après avoir pris en compte le rapport d’examen préalable et les observations reçues aux termes du paragraphe 18(3) :
a) sous réserve du sous‑alinéa c)(iii), si la réalisation du projet n’est pas susceptible, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants, exercer ses attributions afin de permettre la mise en œuvre totale ou partielle du projet;
b) si, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, la réalisation du projet est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants qui ne peuvent être justifiés dans les circonstances, ne pas exercer les attributions qui lui sont conférées sous le régime d’une loi fédérale et qui pourraient lui permettre la mise en œuvre du projet en tout ou en partie;
c) s’adresser au ministre pour une médiation ou un examen par une commission prévu à l’article 29 :
(i) s’il n’est pas clair, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, que la réalisation du projet soit susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants,
(ii) si la réalisation du projet, compte tenu de l’application de mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants et si l’alinéa b) ne s’applique pas,
(iii) si les préoccupations du public le justifient.
(1.1) Les mesures d’atténuation que l’autorité responsable peut prendre en compte dans le cadre du paragraphe (1) ne se limitent pas à celles qui relèvent de la compétence législative du Parlement; elles comprennent :
a) les mesures d’atténuation dont elle peut assurer l’application;
b) toute autre mesure d’atténuation dont elle est convaincue qu’elle sera appliquée par une autre personne ou un autre organisme.
(2) Si elle prend une décision dans le cadre de l’alinéa (1)a), l’autorité responsable veille à l’application des mesures d’atténuation qu’elle a prises en compte et qui sont visées à l’alinéa (1.1)a) de la façon qu’elle estime nécessaire, même si aucune autre loi fédérale ne lui confère de tels pouvoirs d’application.
(2.1) Il incombe à l’autorité fédérale qui convient avec l’autorité responsable de mesures d’atténuation d’appuyer celle‑ci, sur demande, dans l’application de ces mesures.
(3) L’autorité responsable qui prend la décision visée à l’alinéa (1)b) à l’égard d’un projet est tenue de publier un avis de cette décision dans le registre, et aucune attribution conférée sous le régime de toute autre loi fédérale ou de ses règlements ne peut être exercée de façon à permettre la mise en œuvre, en tout ou en partie, du projet.
(4) L’autorité responsable ne peut prendre une décision dans le cadre du paragraphe (1) avant le quinzième jour suivant le versement au site Internet des documents suivants :
a) l’avis du début de l’évaluation environnementale;
b) la description de la portée du projet;
c) dans le cas où l’autorité responsable donne, au titre du paragraphe 18(3), la possibilité au public de participer à l’examen préalable, la description des éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation environnementale et de la portée de ceux‑ci ou une indication de la façon d’obtenir copie de cette description.
21. (1) Dans le cas où le projet est visé dans la liste d’étude approfondie, l’autorité responsable veille à la tenue d’une consultation publique sur les propositions relatives à la portée du projet en matière d’évaluation environnementale, aux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation et à la portée de ces éléments ainsi que sur la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet.
(2) L’autorité responsable, dès qu’elle estime disposer de suffisamment de renseignements et après avoir tenu la consultation publique :
a) fait rapport au ministre de la portée du projet, des éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation, de la portée de ceux‑ci, des préoccupations du public, de la possibilité d’effets environnementaux négatifs et de la question de savoir si l’étude approfondie permet l’examen des questions soulevées par le projet;
b) lui recommande de poursuivre l’évaluation environnementale par étude approfondie ou de la renvoyer à un médiateur ou à une commission conformément à l’article 29.
21.1 (1) Le ministre, prenant en compte tous les éléments qui doivent lui être signalés dans le cadre de l’alinéa 21(2)a) et les recommandations de l’autorité responsable et selon ce qu’il estime indiqué dans les circonstances :
a) renvoie le projet à l’autorité responsable pour qu’elle poursuive l’étude approfondie et qu’elle veille à ce qu’un rapport de cette étude lui soit présenté, de même qu’à l’Agence;
b) renvoie le projet à la médiation ou à l’examen par une commission conformément à l’article 29.
(2) Malgré toute autre disposition de la présente loi, le projet que le ministre renvoie à l’autorité responsable au titre de l’alinéa (1)a) ne peut faire l’objet d’une médiation ou d’un examen par une commission conformément à l’article 29.
21.2 En plus des consultations publiques prévues au paragraphe 21(1) et à l’article 22, l’autorité responsable à laquelle le projet est renvoyé en vertu de l’alinéa 21.1(1)a) est tenue de veiller à ce que le public ait la possibilité de prendre part à l’étude approfondie. Elle est toutefois assujettie à toute décision éventuellement prise par le coordonnateur fédéral de l’évaluation environnementale en vertu de l’alinéa 12.3c) quant au moment de la participation.
[. . .]
28. (1) À tout moment, le ministre, après avoir offert de consulter l’instance, au sens du paragraphe 12(5), responsable du lieu où le projet doit être réalisé et après consultation de l’autorité responsable, ou, à défaut, de toute autorité fédérale compétente, s’il estime soit qu’un projet assujetti à l’évaluation environnementale aux termes de l’article 5 peut, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation indiquées, entraîner des effets environnementaux négatifs importants, soit que les préoccupations du public le justifient, peut faire procéder à une médiation ou à un examen par une commission conformément à l’article 29.
[. . .]
37. (1) Sous réserve des paragraphes (1.1) à (1.3), l’autorité responsable, après avoir pris en compte le rapport du médiateur ou de la commission ou, si le projet lui est renvoyé aux termes du paragraphe 23(1), le rapport d’étude approfondie, prend l’une des décisions suivantes :
a) si, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, la réalisation du projet n’est pas susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants ou est susceptible d’en entraîner qui sont justifiables dans les circonstances, exercer ses attributions afin de permettre la mise en œuvre totale ou partielle du projet;
b) si, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estime indiquées, la réalisation du projet est susceptible d’entraîner des effets environnementaux qui ne sont pas justifiables dans les circonstances, ne pas exercer les attributions qui lui sont conférées sous le régime d’une loi fédérale et qui pourraient permettre la mise en œuvre du projet en tout ou en partie.
[. . .]
58. (1) Pour l’application de la présente loi, le ministre peut :
[. . .]
(i) prendre des règlements désignant des projets ou des catégories de projets pour lesquels une étude approfondie est obligatoire, s’il est convaincu que ceux‑ci sont susceptibles d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants.
[. . .]
59. Le gouverneur en conseil peut, par règlement :
a) régir les procédures, les délais applicables et les exigences relatives à l’évaluation environnementale et au programme de suivi, notamment le moment de la prise de mesures au titre des articles 20 ou 37 quand plusieurs autorités fédérales sont susceptibles d’exercer les attributions visées à l’article 5, ainsi que les évaluations effectuées par une commission aux termes de l’article 40;
[. . .]
b) désigner une activité concrète ou une catégorie d’activités concrètes pour l’application de la définition de « projet » au paragraphe 2(1);
c) soustraire à l’évaluation exigée par la présente loi des projets ou des catégories de projets :
(i) dont, à son avis, l’évaluation ne serait pas indiquée pour des raisons de sécurité nationale,
(ii) qui sont liés à un ouvrage et dont, à son avis, les effets environnementaux ne sont pas importants,
(iii) qui remplissent les conditions de nature environnementale prévues par règlement et dont le coût total est en‑deçà du seuil réglementaire
[. . .]
f) déterminer, pour l’application de l’alinéa 5(1)d), des dispositions de toute loi fédérale ou de textes pris sous son régime;
g) désigner les dispositions législatives ou réglementaires fédérales conférant des attributions au gouverneur en conseil pour l’exercice desquelles le paragraphe 5(2) exige une évaluation environnementale;
.
Article 21 de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, L.C. 1992, ch. 37, avant sa modification en 2003.
21. Dans le cas où le projet est visé dans la liste d’étude approfondie, l’autorité responsable a le choix :
a) de veiller à ce que soit effectuée une étude approfondie et à ce que soit présenté au ministre et à l’Agence un rapport de cette étude;
b) de s’adresser au ministre afin qu’il fasse effectuer, aux termes de l’article 29, une médiation ou un examen par une commission.
.
Loi sur les explosifs, L.R.C. (1985), ch. E‑17, et modifications.
7. (1) Le ministre peut délivrer :
a) des licences pour des fabriques et poudrières;
.
Loi sur les pêches, L.R.C. (1985), ch. F‑14, et modifications.
35. (1) No person shall carry on any work or undertaking that results in the harmful alteration, disruption or destruction of fish habitat.
35. (1) Il est interdit d’exploiter des ouvrages ou entreprises entraînant la détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson.
(2) Le paragraphe (1) ne s’applique pas aux personnes qui détériorent, détruisent ou perturbent l’habitat du poisson avec des moyens ou dans des circonstances autorisés par le ministre ou conformes aux règlements pris par le gouverneur en conseil en application de la présente loi.
36. [. . .]
(3) Sous réserve du paragraphe (4), il est interdit d’immerger ou de rejeter une substance nocive—ou d’en permettre l’immersion ou le rejet—dans des eaux où vivent des poissons, ou en quelque autre lieu si le risque existe que la substance ou toute autre substance nocive provenant de son immersion ou rejet pénètre dans ces eaux.
.
Loi sur les espèces en péril, L.C. 2002, ch. 29, et modifications.
79. (1) Toute personne tenue, sous le régime d’une loi fédérale, de veiller à ce qu’il soit procédé à l’évaluation des effets environnementaux d’un projet notifie sans tarder à tout ministre compétent tout projet susceptible de toucher une espèce sauvage inscrite ou son habitat essentiel.
[. . .]
(3) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.
[. . .]
“project” means a project as defined in subsection 2(1) of the Canadian Environmental Assessment Act.
« projet » S’entend au sens du paragraphe 2(1) de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale.
RÈGLEMENTS
.
Règlement sur la liste d’étude approfondie, DORS/94‑638, et modifications.
Dispositions générales
3. Les projets et les catégories de projets figurant à l’annexe sont ceux pour lesquels une étude approfondie est obligatoire.
ANNEXE
(article 3)
[. . .]
PARTIE V
MINERAIS ET TRAITEMENT DES MINERAIS
16. Projet de construction, de désaffectation ou de fermeture :
a) d’une mine métallifère, autre qu’une mine d’or, d’une capacité de production de minerai de 3 000 t/d ou plus;
b) d’une usine métallurgique d’une capacité d’admission de minerai de 4 000 t/d ou plus;
c) d’une mine d’or, autre qu’un placer, d’une capacité de production de minerai de 600 t/d ou plus;
d) d’une mine de charbon d’une capacité de production de charbon de 3 000 t/d ou plus;
e) d’une mine de potasse d’une capacité de production de chlorure de potassium de 1 000 000 t/a ou plus.
.
Règlement sur la liste d’inclusion, DORS/94‑637, et modifications.
ANNEXE
(Section 3)
(article 3)
[. . .]
PARTIE VII
PÊCHES
42. La destruction de poissons par d’autres moyens que la pêche, qui nécessite l’autorisation émanant du ministre des Pêches et des Océans prévue à l’article 32 de la Loi sur les pêches ou l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application de cette loi.
43. La détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson par des activités concrètes exercées dans un plan d’eau, notamment des opérations de dragage ou de remblayage, qui nécessitent l’autorisation du ministre des Pêches et des Océans prévue au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches ou l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application de cette loi.
44. La détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson par le vidage d’un plan d’eau ou la modification de son niveau d’eau, qui nécessitent l’autorisation du ministre des Pêches et des Océans prévue au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches ou l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application de cette loi.
45. La détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson par des mesures de contrôle de l’érosion le long d’un plan d’eau, qui nécessitent l’autorisation du ministre des Pêches et des Océans prévue au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches ou l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application de cette loi.
46. La détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson par l’enlèvement de la végétation dans un plan d’eau ou le long de celui‑ci, qui nécessitent l’autorisation du ministre des Pêches et des Océans prévue au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches ou l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application de cette loi.
46.1 La détérioration, la perturbation ou la destruction de l’habitat du poisson par suite d’activités concrètes visant à mettre en valeur ou à modifier plus de 500 m d’un rivage naturel continu, qui nécessitent l’autorisation du ministre des Pêches et des Océans prévue au paragraphe 35(2) de la Loi sur les pêches ou l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application de cette loi.
47. L’immersion ou le rejet d’une substance nocive qui nécessitent l’autorisation prévue dans tout règlement pris par le gouverneur en conseil en application du paragraphe 36(5) de la Loi sur les pêches.
Règlement sur les effluents des mines de métaux, DORS/2002‑222, et modifications [art. 1(1) « effluent » (mod. par DORS/2006-239, art. 1), 5 (mod., idem, art. 2), 27.1 (édicté, idem, art. 14)].
Définitions et interprétation
1. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent règlement.
« effluent » Effluent—effluent d’eau de mine, effluent d’ins-tallations de préparation du minerai, effluent de dépôts de résidus miniers, effluent de bassins de traitement, effluent d’installations de traitement, à l’exclusion de l’effluent d’installations de traitement d’eaux résiduaires, eaux d’exfiltration et eaux de drainage superficiel—qui contient une substance nocive.
[. . .]
« Loi » La Loi sur les pêches.
[. . .]
« substance nocive » Toute substance désignée aux termes de l’article 3, sauf disposition contraire du présent règlement.
[. . .]
Champ d’application
2. (1) Le présent règlement s’applique aux mines et aux mines fermées reconnues qui présentent les caractéristiques suivantes :
a) après l’enregistrement du présent règlement, elles ont, à un moment quelconque, un débit d’effluent supérieur à 50 m3 par jour, déterminé d’après les rejets d’effluent à partir de tous leurs points de rejet final;
b) elles rejettent une substance nocive dans les eaux ou les lieux visés au paragraphe 36(3) de la Loi.
[. . .]
Rejet autorisé
4. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le propriétaire ou l’exploitant d’une mine peut rejeter—ou permettre que soit rejeté—un effluent contenant des substances nocives dans les eaux ou les lieux visés au paragraphe 36(3) de la Loi si une autorisation transitoire le permet ou si les conditions suivantes sont réunies :
a) la concentration des substances nocives dans l’effluent ne dépasse pas les limites permises prévues à l’annexe 4;
b) le pH de l’effluent est égal ou supérieur à 6,0 mais ne dépasse pas 9,5;
.
c) la substance nocive n’est pas un effluent à létalité aiguë.
(2) Le propriétaire ou l’exploitant ne peut se prévaloir du droit que lui confère le paragraphe (1) que s’il satisfait aux exigences prévues :
a) à l’article 36, dans le cas où une autorisation transitoire permet le rejet;
b) aux articles 6 à 27, dans l’autre cas.
Autorisation de rejeter dans un dépôt de résidus miniers
5. (1) Malgré l’article 4, le propriétaire ou l’exploitant d’une mine peut rejeter—ou permettre que soient rejetés—des stériles ou un effluent, quel que soit le pH de l’effluent ou sa concentration en substances nocives, dans l’un ou l’autre des dépôts de résidus miniers suivants :
a) les eaux et lieux mentionnés à l’annexe 2;
b) toute aire de décharge circonscrite par une formation naturelle ou un ouvrage artificiel, ou les deux, à l’exclusion d’une aire de décharge qui est un plan d’eau naturel où vivent des poissons ou qui en fait partie.
(2) Le propriétaire ou l’exploitant ne peut se prévaloir du droit que lui confère le paragraphe (1) que s’il satisfait aux exigences prévues aux articles 7 à 28.
[. . .]
Interdiction de diluer
6. Il est interdit au propriétaire ou à l’exploitant d’une mine de combiner un effluent avec de l’eau ou avec tout autre effluent dans le but de le diluer avant son rejet.
[. . .]
Plan compensatoire
27.1 (1) Le propriétaire ou l’exploitant d’une mine présente au ministre un plan compensatoire pour approbation et doit obtenir celle‑ci avant de rejeter des substances nocives dans tout dépôt de résidus miniers qui est ajouté à l’annexe 2 après l’entrée en vigueur du présent article.
(2) Le plan compensatoire a pour objectif de contrebalancer la perte d’habitat du poisson consécutive au rejet de substances nocives dans le dépôt de résidus miniers.
(3) Le plan compensatoire comporte des dispositions portant sur les éléments suivants :
(a) a description of the location of the tailings impoundment area and the fish habitat affected by the deposit;
a) une description de l’emplacement du dépôt de résidus miniers et de l’habitat du poisson atteint par le rejet de substances nocives;
b) l’analyse quantitative de l’incidence du rejet sur l’habitat du poisson;
c) les mesures visant à contrebalancer la perte d’habitat du poisson;
d) les mesures envisagées durant la planification et la mise en œuvre du plan pour atténuer les effets défavorables sur l’habitat du poisson qui pourraient résulter de la mise en œuvre du plan;
e) les mesures de surveillance de la mise en œuvre du plan;
f) les mécanismes visant à établir dans quelle mesure les objectifs du plan ont été atteints;
g) le délai pour la mise en œuvre du plan, lequel délai permet l’atteinte des objectifs prévus dans un délai raisonnable;
(h) an estimate of the cost of implementing each element of the plan.
h) l’estimation du coût de mise en œuvre de chacun des éléments du plan.
(4) Le propriétaire ou l’exploitant présente, avec le plan compensatoire, une lettre de crédit irrévocable couvrant les coûts de mise en œuvre du plan et payable sur demande à l’égard du coût des éléments du plan qui n’ont pas été mis en œuvre.
(5) Le ministre approuve le plan compensatoire si les exigences des paragraphes (2) et (3) ont été remplies et si le propriétaire ou l’exploitant s’est conformé aux exigences du paragraphe (4).
(6) Le propriétaire ou l’exploitant veille à ce que le plan compensatoire soit mis en œuvre.
(7) Si les mécanismes visés à l’alinéa (3)f) révèlent que les objectifs n’ont pas été atteints, le propriétaire ou l’exploitant en informe le ministre et, le plus tôt possible dans les circonstances, détermine et prend les mesures correctives nécessaires à l’atteinte des objectifs.
Deposits from Tailings Impoundment Areas
Rejets à partir de dépôts de résidus miniers
28. (1) Le propriétaire ou l’exploitant d’une mine ne rejette l’effluent provenant d’un dépôt de résidus miniers qu’à un point de rejet final faisant l’objet d’un suivi et de rapports conformément aux exigences du présent règlement.
(2) Il remplit les conditions prévues aux alinéas 4(1)a) à c) et se conforme à l’article 6 lorsqu’il rejette un tel effluent.