NOTE DE L’ARRÊTISTE : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des décisions des Cours fédérales.
RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ
ORDONNANCES D’ASSISTANCE
Sujet connexe : Compétence de la Cour fédérale
Le Service canadien du renseignement de sécurité [SCRS] a sollicité des ordonnances d’assistance prévues au paragraphe 22.3(1) de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, L.R.C. (1985), ch. C-23 — Une ordonnance d’assistance exige de la personne visée, notamment une personne morale, qu’elle prête son assistance pour donner effet à un mandat décerné en vertu des articles 21 ou 21.1 de la Loi — En l’espèce, les motifs ne traitaient que d’une des ordonnances d’assistance, soit celle qui visait une entité étrangère ayant une présence virtuelle au Canada — Le procureur général du Canada (PGC) a soutenu que la Cour est habilitée à rendre une ordonnance d’assistance ayant des effets extraterritoriaux — Le PGC a invoqué en premier lieu l’arrêt Google Inc. c. Equustek Solutions Inc., 2017 SCC 34, [2017] 1 R.C.S. 824 (Equustek) dans lequel la Cour suprême a confirmé une injonction interlocutoire mondiale rendue à l’égard de Google — Il a notamment soutenu que l’ordonnance d’assistance est assimilée à l’ordonnance de communication prévue à l’article 478.014 du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46 — Il s’agissait de savoir si la Cour est compétente pour rendre une ordonnance d’assistance visant une organisation ou entité sans présence physique au Canada (autrement dit, déterminer si la compétence personnelle peut être établie) — Si elle est établie, si la Cour doit exercer son pouvoir discrétionnaire et prononcer l’ordonnance — La jurisprudence portant sur l’ordonnance de communication prévue à l’article 487.014 du Code criminel présente une bonne analogie et étaye la conclusion selon laquelle la Cour est habilitée à rendre l’ordonnance d’assistance dès lors qu’une compétence personnelle est établie — Les considérations énumérées par la Cour suprême dans l’arrêt Equustek étayent également l’adoption d’une démarche qui tient compte de la réalité du stockage et de la transmission de documents et de renseignements par Internet — Il faut déterminer au cas par cas si une organisation ou une entité n’ayant qu’une présence virtuelle au Canada a un lien réel et substantiel avec ce dernier suffisant pour que sa présence au pays soit démontrée — Dès lors que la compétence personnelle est établie, l’organisation ou l’entité qui est visée par l’ordonnance d’assistance et est contrainte de fournir des documents en sa possession ou à sa disposition a, pour les besoins de la cause, une présence au Canada, et ce, même si les documents sont stockés ailleurs — En l’espèce, les éléments de preuve relatifs à la présence virtuelle de l’entité, s’ils n’étaient pas abondants, suffisaient néanmoins à démontrer une présence au Canada et à établir la compétence personnelle nécessaire — L’exécution de l’ordonnance d’assistance constitue une question distincte de la compétence de la Cour pour rendre l’ordonnance, mais est pertinente lorsqu’il s’agit de déterminer s’il y a lieu de rendre l’ordonnance dans les circonstances — Ordonnance d’assistance prononcée.
Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité (Re), 2023 CF 1128, juge Kane, motifs de l’ordonnance en date du 22 août 2023, 17 p.)