NOTE DE L’ARRÊTISTE : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des décisions des Cours fédérales.
Compétence de la Cour fédérale
Sujets connexes : Droit administratif; Pratique
Appel interjeté à l’encontre de la décision d’une juge adjointe de la Cour fédérale refusant de radier la demande de contrôle judiciaire déposée par le demandeur — Cette demande est dirigée contre la décision du Conseil des Arts du Canada (le Conseil) de refuser la demande de subvention du demandeur — Le demandeur, un théâtre professionnel francophone, avait déposé une demande de subvention dans la composante Catalyseurs artistiques du programme Inspirer et enraciner pour le cycle 2020-2024 auprès du Conseil — Le Conseil a informé le demandeur que sa demande n’avait pas été retenue — Le demandeur a déposé une demande de contrôle judiciaire — Le défendeur a déposé sa requête en radiation de l’avis de demande, soutenant que la demande de contrôle judiciaire était irrégulière parce que 1) le Conseil ne répond pas à la définition d’« office fédéral » selon le paragraphe 2(1) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 (la Loi) et, en conséquence, la Cour n’a pas compétence pour entendre le recours; et 2) la demande a été déposée hors délai — La juge adjointe a conclu que la question soulevée par la partie requérante était une question pouvant faire l’objet d’un débat, que les circonstances ne justifiaient pas la radiation de l’avis de demande, et que la justice serait mieux servie en permettant au juge saisi de la demande de contrôle judiciaire de traiter la question — Il s’agissait de déterminer si la Cour a commis une erreur de droit en rejetant la requête du défendeur en radiation de la demande de contrôle judiciaire — En ce qui concerne l’erreur qu’aurait commise la juge adjointe quant à la question de savoir si le Conseil est un « office fédéral », le défendeur a fait valoir que la juge adjointe n’a pas cité une jurisprudence qui porte directement sur la question et qui aurait dû être suivie, soit Toronto Independent Dance Enterprise c. Conseil des Arts du Canada, [1989] 3 C.F. 516(1re inst.) (Toronto Dance) — Le défendeur a aussi affirmé que la Cour a commis une erreur en n’appliquant pas les principes consacrés par la jurisprudence afin d’établir si la décision relative à la nature publique du Conseil pouvait faire l’objet d’un contrôle judiciaire — Le défendeur a soutenu que la juge adjointe était tenue de suivre la conclusion dans Toronto Dance portant que le Conseil n’était pas un « office fédéral » — La conclusion de la Cour dans Toronto Dance quant à la compétence de la Cour à l’égard du Conseil n’est pas définitive — Il ne pouvait être conclu que la juge adjointe a commis une erreur en ne suivant pas cette jurisprudence — En ce qui concerne la compétence dont dispose éventuellement la Cour pour contrôler la décision du Conseil en l’espèce, cela appelle un examen nuancé et fouillé de la compétence ou du pouvoir particulier exercé et la source de cette compétence ou de ce pouvoir — Sur ce point, il est admis depuis longtemps qu’une entité particulière peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire à l’égard de certaines mesures ou décisions, tandis que d’autres ne s’y prêtent pas — La juge adjointe n’a donc pas commis d’erreur, encore moins une erreur manifeste et dominante, lorsqu’elle a décidé que la question de savoir si le Conseil est un « office fédéral » aux fins de la présente affaire devait être laissée à l’appréciation du juge appelé à statuer sur le fond de la demande de contrôle judiciaire — La juge adjointe n’a pas commis une erreur dans son examen de la requête en radiation — Déterminer si une décision particulière prise par un décideur donné peut faire l’objet du recours en contrôle judiciaire aux termes de l’article 18 de la Loi est une tâche complexe — Premièrement, la jurisprudence reconnaît que la définition de l’expression « office fédéral » au paragraphe 2(1) de la Loi couvre un large éventail d’entités — Deuxièmement, il faut aussi déterminer si la décision en cause met en jeu des questions de nature publique au sens du droit administratif — La juge adjointe n’a pas commis d’erreur dans sa discussion des principes juridiques applicables en matière de requêtes en radiation — Elle n’a pas non plus commis une erreur dans son application des principes relatifs aux requêtes en radiation et dans son examen de la question de savoir si la décision du Conseil peut faire l’objet du recours en contrôle judiciaire devant la Cour fédérale — Il s’agit d’un pouvoir de décision discrétionnaire qui met en jeu la pondération d’un certain nombre de facteurs divergents, et il n’y avait aucune raison d’infirmer la décision de la juge adjointe de déférer au juge la mission d’entendre l’affaire sur le fond — Appel rejeté.
Théâtre du Rideau Vert c. Canada (Procureur général) (T-1547-20, 2024 CF 171, juge Pentney, motifs du jugement en date du 29 février 2024, 16 p.)